Menace réelle ou tempête dans un verre d`eau?

Menace réelle ou tempête dans
un verre d’eau?
Gmail, le futur service de webmail de Google, reste un sujet très controversé. Il est vrai que Gmail fait envie. Mais il inquiète aussi. Avant même
le lancement officiel – le nouveau service, annoncé début avril, n’en est
qu’à sa version bêta – certains réclament en effet qu’il soit largement
modifié ou interrompu. Motif du litige: la publicité. Gmail proposera une
capacité de stockage de 1Go, impressionnante si on la compare aux webmails existants. Pour financer cette offre, Google entend afficher des publicités ciblées sur le contenu des e-mails. Pour cela, un robot analysera
les messages pour mieux cibler les annonces affichées.
Thomas Vauthier
[email protected]
Gmail impressionne, non seulement par l’importance du volume
de stockage offert à chaque futur abonné (1 Go), mais aussi parce
que le nouveau service fourmille de petites idées qui, lorsqu’il
sortira, pourraient en faire le meilleur webmail existant.
L’une des principales ruptures avec les services existants
réside dans la conception que Gmail a de vos messages: ils
feront partie de «conversations». Le programme reprend
en fait une option disponible déjà dans plusieurs autres
logiciels de messageries, regroupant tous les messages
faisant partie d’une même conversation sur une ligne. Cela
facilite non seulement la lisibilité de la boîte aux lettres,
mais aussi des messages: lorsque l’on ouvre un message, le
déroulé entier de la conversation est présenté, de manière condensée ou en intégralité. Gmail ajoute ainsi une souplesse bienvenue au classement et à la lecture de ses mails.
Cette souplesse est augmentée par une interface rapide. Gmail n’a
pas besoin de recharger une nouvelle page à chaque action: la fenêtre permettant de répondre à un message est déjà disponible sous
le message que nous lisons. D’autres petites innovations, comme la
navigation grâce au clavier ou l’archivage automatique des adresses
e-mail en font un service simple, rapide et convivial.
Avec 1Go, inutile d’effacer les messages encombrants ni de purger
régulièrement sa boîte aux lettres. Pour s’y retrouver, deux outils
novateurs suffisent. En premier lieu les étiquettes, qui remplacent
les dossiers. On peut étiqueter automatiquement ses mails en
fonction de leur provenance ou de leur sujet, et retrouver rapidement les messages qui portent la même étiquette. Ensuite, un
moteur de recherche aussi puissant que celui de Google, qui permet de faire une recherche rapide sur des mots contenus dans les
sujets, ou le corps des messages.
Stocker tous ses e-mails en ligne, est-ce vraiment gratuit?
Google n’a pas caché son intention d’ajouter, dans les courriels,
des publicités sous forme de liens-texte contextuels. Or, pour ce
faire, la compagnie doit scanner chaque communication échangée.
Par exemple, les internautes mentionnant un voyage se verraient
offrir des publicités pour des billets d’avion. De plus, chaque recherche effectuée dans le moteur, crée un «cookie» qui stocke des
informations sur l’internaute jusqu’en 2038! De là à ce que Google
établisse des liens entre les recherches d’un internaute et les mots
clés de ses courriels, il n’y a qu’un pas … que Google n’a pas nié
pour l’instant!
Ce sont surtout ces deux points qui ont soulevé un tollé du côté
des associations de défense des libertés. Une sénatrice américaine
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Tous vos messages sont lus: Gmail trop curieux?
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s’est même emparée du sujet. Elle estime que la pub dans Gmail
«reflète une mauvaise compréhension des besoins des consommateurs» et que «ce sont les publicitaires qui réclament un tel
service, pas les internautes». Dénonçant l’intrusion de Google
dans la vie privée, elle demande à l’entreprise «d’abandonner cette
idée».
Garanties suffisantes?
Google s’est empressé de calmer le jeu, sans pour autant changer
de cap en déclarant que les retours des bêta-testeurs et des «autres
parties concernées» seraient écoutés avec attention et que des
changements pourront intervenir au terme de la période de test
de trois à six mois. La société s’est toutefois défendue de toute
volonté d’intrusion. Google a ainsi garanti à l’ organisation Electronic Frontier Foundation, très sourcilleuse sur ces questions, qu’il
ne resterait aucune trace des analyses des messages faites par les
robots: aucun «dossier d’utilisateur» ne serait constitué. Et de
souligner «qu’aucun être humain ne lit les messages pour cibler
les publicités», cette analyse de contenus étant automatisée.
Le volume de stockage annoncé de 1 Go permet de confier la
totalité de ses archives à un serveur, ce qui les rend vulnérables à
une panne ou à un piratage. En outre, les sauvegardes régulières qui seront nécessairement effectuées font qu’il
n’est jamais certain qu’un courriel effacé le soit de manière définitive. D’autres commentateurs dénoncent le
fait que l’insertion de publicités adaptées au «contexte»
des courriels échangés menace la confidentialité des
utilisateurs. Ce d’autant que Google précise que «des
copies résiduelles de données peuvent rester stockées
dans nos systèmes, même après la suppression des informations de la boîte à lettres ou après la clôture du compte».
Tempête dans un verre d’eau?
Or, plusieurs des internautes qui ont pu tester Gmail pensent que
la polémique actuelle n’est en réalité qu’une tempête dans un
verre d’eau. L’un d’eux explique que les pubs sont moins intrusives
que des pop-ups qui s’affichent dans la marge et que leur analyse
des messages est des plus basiques. Un autre se demande quel est
le bien-fondé de cette fronde, car «tous les services de mail scrutent vos messages, ne serait-ce que pour dénicher les spams, détecter les virus et autres codes malicieux ou présenter correctement
le message dans votre navigateur».
La seule source d’inquiétude résiderait dès lors dans la possibilité
de constitution de «profils d’utilisateurs». Google assure pour
l’instant qu’il n’est pas prévu de créer de tels dossiers. Nous verrons bien …
A suivre …