La dégénérescence maculaire liée à l`âge
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La dégénérescence maculaire liée à l`âge
FÉVRIER 2004 Volume 2, numéro 2 Ophtalmologie MC Conférences Scientifiques COMPTE RENDU DES CONFÉRENCES SCIENTIFIQUES DU DÉPARTEMENT D’OPHTALMOLOGIE ET DES SCIENCES DE LA VISION, FACULTÉ DE MÉDECINE, UNIVERSITÉ DE TORONTO La dégénérescence maculaire liée à l’âge PAR M IC HAE L H. B R E NT, M.D. La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est la première cause de perte sévère et irréversible de la vision en Amérique du Nord et dans tous les pays industrialisés1. Les personnes atteintes de DMLA, âgées de 55 ans et plus, présentent souvent divers symptômes visuels à la consultation. Une approche diagnostique ciblée peut aider à déterminer et à établir le stade du processus morbide. Les résultats des études cliniques récentes et la technologie émergente ont modifié le traitement de la DMLA. Classification La DMLA est la première cause de cécité dans la population âgée de 55 ans et plus. Le risque de développer une forme de DMLA augmente avec l’âge, et à l’âge de 75 ans, le risque est de près de 40 %. La DMLA est classée en deux entités cliniques : atrophique (sèche) et exsudative (humide). La DMLA atrophique La DMLA atrophique touche environ 85 % de tous les patients souffrant de DMLA et est responsable de 10 à 20 % des cas de cécité causée par cette maladie (figure 1). La perte de la vision est généralement progressive et le degré de perte de vision est déterminé par le nombre, la taille, la morphologie et la localisation des drusens dans la macula ainsi que par le degré et la localisation de l’atrophie de l’épithélium pigmentaire rétinien (ÉPR). La taille des drusens peut être petite (< 63 µm), moyenne (63 µm-124 µm) ou grande (≥125 µm)2. Les drusens durs et de petite taille sont associés à un faible risque d’évolution vers la DMLA de stade avancé, en particulier lorsque qu’ils sont en petit nombre (p. ex. < 5). Les drusens de taille moyenne et de grande taille et les drusens confluents sont des signes de DMLA de stade plus avancé qui pourrait évoluer vers une DMLA exsudative. La présence d’un amas de pigments est souvent associée aux drusens. L’atrophie géographique non centrale de l’ÉPR est un indicateur d’une DMLA atrophique de stade plus avancé. Les maculas comportant au moins un drusen de grande taille et/ou de plusieurs drusens de taille moyenne sont plus probablement associées au développement d’une atrophie de l’ÉPR. Chez les patients présentant une DMLA atrophique de stade avancé, jusqu’à 43 % évoluent vers une DMLA exsudative sur une période de 5 ans. La DMLA exsudative La DMLA exsudative touche environ 15 % de tous les patients souffrant de DMLA, et est pourtant responsable de 80 à 90 % des cas de cécité causée par cette maladie (figure 2). La perte de la vision est généralement rapide, en quelques jours ou mois, et est déterminée par la quantité de sang, de lipide et de liquide dans l’espace sous-rétinien et intrarétinien et du tissu cicatriciel sous la rétine maculaire en résultant. La physiopathologie acceptée conventionnellement comprend la prolifération de néovaisseaux sanguins anormaux dans la choroïde qui entraîne le développement d’une membrane néovasculaire choroïdienne (MNVC). Ces néovaisseaux traversent la membrane de Bruch dans l’espace sous l’ÉPR et sous-rétinien. Les exsudats, les hémorragies et les cicatrices fibrovasculaires endommagent et détruisent les photorécepteurs paramaculaires, entraînant une baisse d’acuité visuelle sévère. Récemment, Yannuzzi et coll. ont décrit un autre processus physiopathologique appelé la prolifération angiomateuse rétinienne (PAR) qui peut également entraîner une perte sévère de la vision centrale et est incluse dans la catégorie de la DMLA exsudative3. Dans la PAR, la prolifération capillaire débute dans la région paramaculaire au niveau du plexus capillaire profond de la rétine. La prolifération néovasculaire se produit antérieurement et postérieurement. La prolifération postérieure envahit finalement l’espace sous-rétinien et une membrane néovasculaire sous-rétinienne se forme et produit alors un soulèvement de l’ÉPR séreux. L’aggravation de la prolifération entraîne l’envahissement de la choroïde par les vaisseaux, formant la MNVC. La prolifération antérieure des vaisseaux forme une anastomose avec la circulation rétinienne. Il se produit donc une anastomose choriorétinienne. Les tableaux clinique et angiographique sont similaires à ceux de la DMLA et souvent indiscernables de celle-ci où la néovascularisation débute dans la choroïde plutôt que dans la rétine. Les deux entités peuvent répondre différemment aux modalités thérapeutiques existantes, à différents stades de leur évolution. Disponible sur Internet à : www.ophtalmologieconferences.ca FACU LT Y O F M E D I C I N E Un i v e r s i t y o f To r o n t o Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Jeffrey Jay Hurwitz, M.D., Rédacteur Professeur et président Martin Steinbach, Ph.D. Directeur de la recherche The Hospital for Sick Children Elise Heon, M.D. Ophtalmologiste en chef Mount Sinai Hospital Jeffrey J. Hurwitz, M.D. Ophtalmologiste en chef Princess Margaret Hospital (Clinique des tumeurs oculaires) E. Rand Simpson, M.D. Directeur, Service d’oncologie oculaire St. Michael’s Hospital Alan Berger, M.D. Ophtalmologiste en chef Sunnybrook and Women’s College Health Sciences Centre William S. Dixon, M.D. Ophtalmologiste en chef The Toronto Hospital (Toronto Western Division and Toronto General Division) Robert G. Devenyi, M.D. Ophtalmologiste en chef Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision Faculté de médecine Université de Toronto 60 Murray St. Bureau 1-003 Toronto (Ontario) M5G 1X5 Le contenu rédactionnel d’Ophtalmologie – Conférences scientifiques est déterminé exclusivement par le Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médicine, Université de Toronto. Figure 1 : DMLA atrophique Figure 2 : DMLA exsudative I DMLA = dégénérescence maculaire liée à l’âge Présentation clinique Chez les patients âgés de 55 ans et plus présentant une vision trouble ou déformée, on devrait soupçonner une DMLA. D’autres symptômes peuvent comprendre la difficulté à lire ou des difficultés visuelles lorsque l’éclairage est insuffisant. On peut noter de longues périodes de stabilité de la vision entrecoupées de périodes plus courtes de détérioration. Lorsque l’on évalue des patients chez qui l’on soupçonne une DMLA, l’anamnèse doit comprendre l’âge d’apparition, la durée des symptômes, la localisation des distorsions/des scotomes paracentraux et le degré de perte de la sensibilité au contraste. Les facteurs de risque de DMLA doivent être examinés, comprenant l’âge, la race, le sexe, la couleur claire de l’iris, les antécédents familiaux, la présence de coronaropathie, d’hypertension, le tabagisme, une mauvaise alimentation et l’exposition prolongée aux rayons ultraviolets. Les personnes dont la peau est claire présentent un risque plus élevé de développer une DMLA. Les femmes présentent un risque deux fois plus élevé que les hommes et les fumeurs, un risque 6 fois plus élevé. On doit interroger les patients sur les médicaments qu’ils prennent qui pourraient avoir un effet néfaste sur la fonction maculaire (p. ex. les dérivés de la chloroquine, les phénothiazines et les médicaments antituberculeux). L’examen oculaire L’examen oculaire doit établir la présence d’une baisse de la vision et exclure une erreur de réfraction comme la cause sous-jacente, soit par réfraction soit par la vérification de l’acuité visuelle à l’aide d’un trou sténopéique. • On doit utiliser la grille d’Amsler pour toutes les évaluations de la DMLA, étant donné que c’est un test facile à effectuer et s’il est positif, il peut aider à orienter l’investigation vers une zone spécifique durant l’examen biomicroscopique. • En présence d’une opacité lenticulaire importante, le test de la fonction maculaire au moyen de l’interférométrie laser ou éventuellement d’un grillage d’acuité visuelle peut permettre de déterminer dans quelle mesure la baisse de l’acuité visuelle est due à la cataracte ou à une pathologie maculaire. • Une évaluation du champ visuel est recommandée pour exclure la perte concomitante du champ visuel périphérique ou des causes neurologiques de la perte de la vision centrale. • Si disponible, le test de sensibilité binoculaire au contraste de Pelli Robson est rapide et fiable pour évaluer et suivre la fonction visuelle dans la DMLA. • L’examen de la macula doit être effectué au moyen de la biomicroscopie avec une lentille biconvexe indirecte (60-90 D) ou une lentille de Hruby. Malgré l’inversion de l’image, on obtient une bonne stéréopsie. Durant la biomicroscopie maculaire, la taille, la localisation et la morphologie des drusens doivent être notées. On doit noter les amas de pigments et les zones d’atrophie de l’ÉPR, étant donné qu’ils peuvent être des indicateurs d’une DMLA atrophique de stade avancé. La présence de sang, de lipide ou de liquide sous la rétine est un signe devant faire soupçonner la présence d’une MNVC. • L’ophtalmoscopie directe ne fournit pas une stéréopsie et ne permet pas d’évaluer correctement la macula dans la DMLA. • On peut obtenir une vue optique optimale de la macula avec une lentille de contact maculaire. Cependant, cette technique nécessite une anesthésie topique et l’utilisation d’un liquide visqueux pour éliminer l’interface air-cornée. Le liquide visqueux peut altérer la qualité des clichés photographiques et angiographiques s’ils sont réalisés peu de temps après l’examen. Une perte sévère de vision, la déformation de la grille d’Amsler et la présence cliniquement manifeste de sang, de lipide ou de liquide nécessitent d’orienter le patient en urgence vers un spécialiste de la rétine ayant la capacité de réaliser une angiographie à la fluorescéine. L’algorithme en vue de déterminer la meilleure ligne de conduite pour réduire la perte de vision chez un patient affichant une MNVC est fondé sur l’interprétation de l’angiographie à la fluorescéine. Il permet de déterminer si le laser thermique, la photothérapie dynamique avec Visudyne® ou simplement un suivi pendant une période d’observation seront bénéfiques pour le patient. Histoire naturelle Dans l’histoire naturelle de la DMLA, plusieurs facteurs sont associés à la progression de la DMLA atrophique vers la forme exsudative (tableau 1). En présence de drusens de grande taille et/ou de plusieurs drusens de taille moyenne ou d’une atrophie géographique non centrale, la formation d’une MNVC est probable. Si un œil a déjà développé une MNVC sous-fovéale, il existe des facteurs pronostiques importants de perte de vision dans l’autre œil, secondaire au développement d’une MNVC. Ces facteurs sont fondés sur le type de DMLA tardive documentée dans le premier œil et incluent > 5 drusens, un drusen mou de grande taille, un amas de pigments et une hypertension systémique. Lorsque le nombre de facteurs de risque augmente, le risque de développer une DMLA exsudative dans l’autre œil est de près de 90 % (figure 3)4. Tableau 1 : Évolution de la DMLA atrophique vers la DMLA exsudative La composition et le nombre de drusens dans la DMLA sèche sont des facteurs associés à un risque plus élevé d’évolution vers la DMLA humide : • Yeux porteurs de drusens bilatéraux • Drusens mous, avec une bordure mal définie non discrète • Nombreux drusens mous (> 20) associés à un changement pigmentaire de l’ÉPR • Au moins cinq drusens de grande taille (> 63 µm) • Hyperpigmentation locale de l’ÉPR • Anomalies pigmentaires comprenant des amas de pigments • Patients présentant une atrophie géographique (stade tardif de la DMLA) Étude des maladies oculaires liées à l’âge L’étude AREDS (Age Related Eye Disease) a examiné le rôle de la supplémentation en micronutriments dans la modification de l’histoire naturelle de la DMLA atrophique5. Elle a démontré l’efficacité de fortes doses d’anti-oxydants et de minéraux pour réduire le risque de progression de la DMLA de stade intermédiaire vers une DMLA unilatérale de stade avancé de 25 % et de perte modérée de vision (≥ 3 lignes) de 19 % à 5 ans. Les patients ne souffrant pas de DMLA ou ne présentant qu’une DMLA de stade précoce n’ont obtenu aucun avantage. La préparation étudiée consistait en 500 mg de vitamine C, 400 UI de vitamine E, 25 000 UI de bêtacarotène, 80 mg d’oxyde de zinc et 2 mg d’oxyde cuivrique. Les auteurs de l’étude AREDS Update II ont examiné les facteurs de risque de DMLA et le rôle des lipides alimentaires dans la pathogenèse de la DMLA 6. Ils ont rapporté qu’un apport plus élevé de lipides alimentaires, tels que les acides gras polyinsaturés à longue chaîne oméga-3/le poisson et la lutéine/la zéaxanthine, était associé à un risque réduit de développer une DMLA néovasculaire. Seddon et coll. ont constaté qu’un apport total plus élevé de graisses augmentait le risque de progression vers des formes avancées de DMLA7. Un apport plus élevé de graisses végétales et, dans une moindre mesure, de graisses animales, augmentait le taux de progression. On a constaté en particulier que les produits transformés cuits au four entraînaient un taux plus élevé de progression, alors que les noix avaient un effet protecteur. Par conséquent, la modification de l’apport de graisses pourrait potentiellement modifier l’évolution de la maladie chez les patients présentant les formes précoce et intermédiaire de DMLA. Évaluation diagnostique Les tests suivants sont utiles pour déterminer la présence d’une DMLA et évaluer son stade. Grille d’Amsler La grille d’Amsler est un excellent test de la fonction maculaire monoculaire pour déterminer la présence d’une pathologie maculaire. Chaque carré de 5 mm sur la grille forme un angle visuel de 1o lorsque l’on tient la grille à une distance de 30 cm. Par conséquent, la grille entière teste 10o de chaque côté du point de fixation, sur les lignes horizontales et verticales. Le test de la grille d’Amsler doit être effectué avant la dilatation de la pupille et la tonométrie par aplanation. Avec leurs lunettes de lecture, les patients se cachent un œil et fixent le point central sur la grille. Si le patient voit toutes les lignes sans distorsions et s’ils voient Figure 3 : Évolution vers la DMLA exsudative dans le deuxième œil4 100 % 90 % 80 % 70 % 60 % 50 % 40 % 30 % 20 % 10 % 0% Risque à cinq ans de développer une DMLA humide dans l’œil controlatéral 87 % 53 % 44 % 25 % 7% 0 1 2 PC 3 4 Nombre de facteurs de risque tous les quadrillages, le résultat du test est considéré comme normal et l’autre œil doit être testé. Si le patient remarque une distorsion, un flou ou des scotomes paracentraux, il faut les inscrire sur la grille et inclure celle-ci dans son dossier médical. Ces informations peuvent être utiles pour une comparaison future et pour documenter l’évolution ou la régression de la maladie. Angiographie à la fluorescéine L’angiographie à la fluorescéine est actuellement l’examen de référence pour évaluer la circulation rétinienne et choroïdienne dans la DMLA. Après avoir réalisé des clichés photographiques en couleur du fond de l’œil, on injecte par voie intraveineuse un colorant, la fluorescéine sodique. Ce colorant est activé par la lumière du flash de l’appareil photo qui passe à travers un filtre activateur bleu. La longueur d’onde de 490 nm de la lumière bleue est absorbée par les molécules de fluorescéine dans la circulation choroïdienne, puis dans la circulation rétinienne. Le colorant est activé pour émettre une lumière jaune-verte (530 nm) qui repasse dans l’appareil photo par un filtre écran jaune-vert, bloquant la lumière bleue réfléchie, ce qui permet à la fluorescence d’être photographiée. Les clichés photographiques sont pris lorsque le colorant passe à travers la circulation choroïdienne et rétinienne. Les drusens peuvent être rendus fluorescents, l’atrophie de l’épithélium pigmentaire rétinien apparaît comme des défauts, et les néovaisseaux choroïdiens laissent fuir le colorant et sont hyperfluorescents. La néovascularisation choroïdienne est interprétée et classifiée selon le type de fuite8. La néovascularisation choroïdienne classique apparaît comme une zone d’hyperfluorescence vive et bien démarquée durant la phase initiale de l’angiogramme, avec une fuite progressive du colorant dans l’espace sous-rétinien susjacent durant la dernière phase de l’angiogramme (figure 4). Les lésions occultes peuvent présenter deux schémas angiographiques : • Le décollement de l’épithélium pigmentaire rétinien démontre une hyperfluorescence tachetée qui n’est pas aussi vive ou discrète que dans la néovascularisation choroïdienne classique, 1 à 2 minutes après l’injection de la fluorescéine, avec une coloration ou une fuite persistante de la fluorescéine 10 minutes après l’injection. • Le deuxième schéma est celui d’une fuite tardive de source indéterminée. Cela ne se produit que durant la dernière phase de l’angiogramme, sans signes de néovascularisation choroïdienne classique ou de décollement de l’épithélium pigmentaire rétinien fibrovasculaire durant les phases initiale et intermédiaire de l’angiogramme pour expliquer la fuite (figure 5). Jusqu’à récemment, la plupart des clichés photographiques et des clichés angiographiques à la fluorescéine du fond de l’œil étaient enregistrés sur film. Avec les progrès Figure 4 : MNVC sous-fovéale essentiellement classique dans la DMLA MNVC = membrane néovasculaire choroïdienne de la technologie, la capture numérique et le stockage d’images sont devenus couramment utilisés. Des résultats instantanés sont obtenus et la taille des lésions peut être mesurée de façon plus précise. Les composantes des lésions causées par la néovascularisation choroïdienne peuvent être évaluées quantativement, afin que l’on détermine si un traitement est approprié9. Les images numériques sont facilement stockées à un coût peu élevé et le procédé numérique permet d’établir des bases de données pour aider à la recherche. Angiographie au vert d’indocyanine L’angiographie au vert d’indocyanime (AVI) est un autre outil diagnostique important dans l’évaluation de la MNVC dans la DMLA. Le vert d’indocyanime est un colorant à base de tricarbocyanine qui absorbe la lumière à 790-805 nm et qui a un pic d’émission à 835 nm, qui se situe dans le spectre infrarouge. Il est injecté par voie intraveineuse et la vidéoangiographie infrarouge numérique est utilisée pour photographier les vaisseaux de la rétine et de la choroïde. Le vert d’indocyanine est lié à 95 % au plasma et reste donc en grande partie dans les vaisseaux, facilitant la visualisation des vaisseaux choroïdiens. Le vert d’indocyanine peut être visualisé à travers une mince couche de sang, le liquide séreux et les pigments. L’angiographie au vert d’indocyanine, utilisée conjointement à l’angiographie à la fluorescéine, permet de mieux déterminer l’étendue d’une lésion chez les patients présentant une MNVC occulte ou minimalement classique. Cela se traduit par un meilleur traitement et un taux réduit de répétition du traitement. Le vert d’indocyanine est sûr pour un usage général et il est moins toxique que la fluoréscéine sodique. Il contient environ 5 % d’iode par poids et est éliminé par le foie. Le vert d’indocyanine est donc contreindiqué pour les patients allergiques à l’iode ou aux crustacés ou souffrant d’une maladie hépatique importante. Tomographie à cohérence optique La tomographie à cohérence optique (TCO) est une technologie similaire à l’échographie, mais qui utilise les ondes lumineuses plutôt que les ondes acoustiques pour produire des images transversales à haute résolution du pôle postérieur. Cette technologie non invasive permet la visualisation à l’échelle du micron des microstructures tissulaires in situ, en temps réel. Le Stratus OCT3 de Zeiss Humphrey est un modèle de 3e génération ayant Figure 5 : MNVC occulte dans la DMLA une résolution axiale de 7-8 µm. De fausses couleurs sont ajoutées aux tissus avec différentes propriétés optiques de diffusion, améliorant la qualité de l’image. La TCO à très haute résolution a été développée, mais elle n’est pas encore commercialisée. Elle fournit une résolution axiale aussi haute que 1-2 µm. La TCO est un outil utile pour diagnostiquer une pathologie maculaire et pour surveiller le succès du traitement. Elle permet de mesurer l’épaisseur de la rétine et de visualiser le liquide intrarétinien et le liquide sous-rétinien (sang, liquide séreux, MNVC). C’est également une excellente technologie pour démontrer la traction de la macula (membranes épirétiniennes), la traction vitréo-maculaire et la formation d’un trou maculaire. Lorsque le traitement est amorcé, la TCO est extrêmement utile pour surveiller et quantifier la réponse post-opératoire et faciliter la décision de retraiter le patient. Elle devient rapidement un outil diagnostique important dans l’évaluation et le traitement de la DMLA. Traitement clinique La DMLA atrophique Après un examen clinique, chez les patients que l’on considère être atteints de DMLA atrophique et dont le test de la grille d’Amsler est normal, il n’est généralement pas nécessaire d’effectuer une angiographie. Il faut donner au patient une grille d’Amsler pour qu’il effectue quotidiennement le test à la maison à des fins de dépistage. Il faut lui rappeler de porter ses lunettes de lecture et d’effectuer le test dans les mêmes conditions d’éclairage. Il devra appeler le cabinet du médecin s’il remarque un changement important dans la grille durant 3 jours ou plus. Une réévaluation urgente devra être effectuée et si l’on soupçonne une DMLA exsudative, il est recommandé d’adresser le patient à un spécialiste de la rétine. Il faut conseiller aux patients d’adopter un régime alimentaire riche en légumes et d’augmenter leur apport de poisson à 1 à 2 portions par semaine. Il peut être utile également de réduire l’apport de graisses alimentaires. Chez les patients ne fumant pas et présentant des drusens extensifs de taille moyenne (63-124 µm), au moins un drusen de grande taille (≥ 125 µm), une atrophie géographique non centrale dans l’un ou les deux yeux, ou souffrant d’une DMLA de stade avancé ou d’une perte de l’acuité visuelle due à une DMLA dans un œil, une supplémentation en micronutriments peut être bénéfique, tel qu’indiqué dans l’étude AREDS. Actuellement, il existe deux préparations commercialisées au Ophtalmologie Conférences Scientifiques Canada qui correspondent au dosage préconisé dans l’étude AREDS. Avec Vitalux ® AREDS par Novartis Ophthalmics, 2 comprimés par jour correspondent au dosage préconisé dans l’étude. Cette préparation contient de la lutéine et de la zéaxathéine. Avec la préparation Ocuvite Preser Vision® par Bausch & Lomb, qui ne contient pas de lutéine et de zéaxanthéine, 4 comprimés par jour correspondent au dosage de l’étude. Les fumeurs présentent un risque plus élevé de développer un cancer du poumon s’ils prennent de la bêta-carotène. On doit les en informer et ils devraient s’arrêter de fumer, si possible. Il n’y a pas de consensus sur la durée pendant laquelle un fumeur doit s’arrêter de fumer avant de prendre sans danger de la bêta-carotène 10. Certains fumeurs atteints de DMLA désireront peut-être prendre la préparation AREDS sans bêta-carotène. Cette préparation est commercialisée sous le nom de VitaluxS®, par Novartis Ophthalmics, 2 comprimés par jour. Les patients souffrant de DMLA doivent se protéger contre les rayons ultraviolets en portant des lunettes de soleil ayant une forme enveloppante lorsqu’ils sortent dehors à la lumière du jour. La DMLA exsudative Les patients chez qui l’on soupçonne une DMLA exsudative doivent faire l’objet d’une investigation plus approfondie. L’angiographie à la fluorescéine est actuellement le test diagnostique de choix pour évaluer la DMLA exsudative, étant donné qu’elle fournit des informations sur la localisation, la composition et l’étendue des lésions. En présence de MNVC qui sont bien délimitées et extra-fovéales ou juxta-fovéales, le laser thermique offre un avantage par opposition à l’administration d’aucun traitement11. Pour les lésions qui sont mal délimitées, il n’est généralement pas recommandé d’utiliser le laser thermique. Pour les MNVC sousfovéales, il peut être avantageux d’utiliser la photothérapie dynamique (PTD) avec Visudyne®, selon l’acuité visuelle initiale et la composition et la taille des lésions. L’étude TAP (Treatment of Age-Related Macular Degeneration with Photodynamic Therapy ) a démontré que la PTD avec Visudyne avait un effet bénéfique statistiquement significatif par rapport au placebo pour les lésions sous-fovéales qui étaient essentiellement classiques, avec une acuité visuelle initiale de 20/40 à 20/200 12 . L’étude VIP (Verteprofin in Photodynamic Therapy ) a démontré que la PTD avec Visudyne avait un effet thérapeutique cliniquement significatif sur la fonction visuelle chez les patients qui souffraient de DMLA occulte, ne comprenant pas de lésions sous-fovéales classiques et dont la maladie avait récemment évolué13. Chez les patients qui avaient une acuité visuelle initiale ≤ 20/50 et dont la taille des lésions était ≤ 4 têtes du nerf optique, on a obtenu des résultats optimaux. La PTD avec Visudyne n’a offert aucun avantage statistiquement significatif pour les yeux affichant une MNVC sousfovéale minimalement classique. Pour les lésions principalement classiques, ou occultes sans lésions classiques qui sont juxtafovéales, la thérapie photodynamique avec Visudyne doit être envisagée lorsque la lésion est si près du centre fovéal que la photocoagulation au laser thermique conventionnelle s’étendrait probablement sous le centre de la zone fovéale avasculaire. Récemment, une analyse à régression linéaire multiple des données des études TAP et VIP a indiqué que comparé à la composition des lésions ou à l’acuité visuelle initiale, la taille des lésions était le facteur ayant l’impact le plus significatif sur les résultats thérapeutiques15. On a constaté que chez les patients présentant des lésions de plus petite taille (≤ 4 têtes du nerf optique), la perte de l’acuité visuelle était moindre et le traitement avait un bienfait similaire, que la lésion soit essentiellement classique, minimalement classique ou occulte et ne contenant pas de lésions classiques.15 Actuellement, les régimes de santé provinciaux prennent en charge le coût du traitement des patients affichant une MNVC essentiellement classique secondaire à une DMLA, à l’exception de l’Île-du-PrinceÉdouard et de Terre-Neuve. Les régimes de santé de Colombie-Britannique et du Québec prennent en charge les coûts du traitement de tous les types de MNVC, à la discrétion de l’ophtalmologiste traitant. Dans toutes les autres provinces, les patients affichant des lésions minimalement classiques ou occultes sans MNVC sousfovéale dues à une DMLA, qui désirent recevoir un traitement, doivent payer pour l’usage en dérogation de directives de la PTD par Visadyne. Le traitement est coûteux et nécessite en moyenne 4 à 6 séances pour une occlusion de la MNVC. Les patients doivent être informés que l’objectif du traitement est la stabilisation de la vision, bien que certains patients remarquent une légère amélioration de la vision à la fin du traitement. Lorsque la PTD est répétée, les lésions qui sont initialement minimalement classiques ou qui sont occultes et ne comprennent pas de lésions classiques peuvent devenir essentiellement classiques. Malheureusement, la décision des régimes de santé provinciaux de prendre en charge le coût de la PTD est fondée sur le tableau clinique initial, tel qu’indiqué par l’angiographie à la fluorescéine. Traitements expérimentaux Il existe plusieurs nouvelles options thérapeutiques pour la DMLA qui sont à divers stades d’études cliniques. La rhéophorèse pour la DMLA atrophique fait actuellement l’objet d’études cliniques de phase III. Ce procédé filtre les macromolécules (p. ex. macroglobuline, fibrinogène, complexes cholestérol-LDL et IgA) qui, pense-t-on, ont des effets délétères sur la circulation microvasculaire, entraînant le processus dégénératif atrophique. L’étude TTT4CNV (Transpupillary Thermal Therapy for occult CNVM in AMD) est terminée, mais les résultats n’ont pas encore été publiés. La thermothérapie transpupillaire ou TTT utilise un laser à diodes (810 nm) de type infra-rouge pour traiter la MNVC sous-fovéale. Le protocole du traitement recommande une faible illumination, une longue durée d’exposition et une grande surface d’exposition pour créer une hyperthermie graduelle des vaisseaux sanguins de la choroïde. L’objectif est de créer une obturation de la MNVC sans causer de lésions thermiques de la rétine sus-jacente16. Le facteur de croissance de la vascularisation endothéliale (VEGF) est une protéine qui stimule la perméabilité et l’angiogenèse vasculaires. On a constaté des taux élevés de VEGF dans des maladies telles que la DMLA, où la formation active de vaisseaux sanguins est évidente. L’inhibition du VEGF est une approche utilisée pour traiter ces maladies. Le traitement anti-VEGF pour la MNVC sousfovéale, nécessitant une série d’injections intravitréales, est un domaine de recherche très passionnant et l’on devrait obtenir les résultats des études au cours des prochaines années. L’acétate d’anécortave fait actuelle- Ophtalmologie Conférences Scientifiques ment l’objet d’études cliniques. Une injection juxtasclérale postérieure est administrée sur la surface sclérale postérieure. L’action du médicament est d’inhiber la croissance des vaisseaux sanguins en inhibant les protéases nécessaires pour la migration des cellules endothéliales vasculaires. Les études SST (Submacular Surgery Trials) évaluent les avantages de l’exérèse chirurgicale de la MNVC sous-fovéale dans la DMLA. La fin du recrutement a eu lieu en 2001. Le suivi a été terminé en septembre 2003 et les résultats devraient être bientôt publiés. La translocation maculaire est une autre approche chirurgicale pour traiter les patients affichant une MNVC sous-fovéale dans la DMLA. Cette intervention consiste à détacher la rétine et à lui faire subir une rotation, afin de déplacer la macula malade et de la replacer sur un endothélium pigmentaire rétinien sain. La MNVC qui n’est plus en position sous-fovéale, est donc accessible à la photocoagulation au laser thermique. Enfin, des études sont en cours sur l’utilisation de prothèses visuelles à des fins de réadaptation visuelle, comprenant le télescope miniaturisé implantable et la vision artificielle à l’aide de microcircuits intégrés épirétiniens et sous-rétiniens. En conclusion, les nouvelles approches pour traiter la DMLA et la technologie qui évolue rapidement modifient les modes d’évaluation et de traitement de la DMLA. De nouvelles modalités thérapeutiques intéressantes nous permettront de relever les défis que pose cette maladie dévastatrice et d’améliorer la qualité de vie de nos patients atteints de DMLA. Michael H. Brent, MD, FRCSC, est professeur adjoint d’Ophtalmologie et des Sciences de la vision, Université de Toronto, et ophtalmologiste au Mount Sinai Hospital, Toronto et au William Osler Health Centre, Campus de Brampton. Références 1. National Advisory Eye Council. Vision Research- A National Plan: 19992003, Vol 1. A report of the National Advisory Eye Council. Bethesda, Md: National Institute of Health; 1999. NIH publication 98-4120. 2. The Age-Related Eye Disease Study Research Group. The Age-Related Eye Disease Study (AREDS): Design Implications. AREDS Report No. 1. Control Clin Trials 1999; 20:573-600. 3. Yannuzzi LA, Negrao S, Iida T, et al. Retinal angiomatous proliferation in age-related macular degeneration. Retina 2001;21:416-434. 4. Klein R, Klein BEK, Linton KLP. 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Les envois non distribuables doivent être envoyés à l’adresse ci-dessus. Poste-publications #40032303 La version française a été revisée par le professeur Pierre Lachapelle, Montréal. L’élaboration de cette publication a bénéficié d’une subvention à l’éducation de Novartis Ophthalmics © 2004 Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto, seul responsable du contenu de cette publication. Édition : SNELL Communication Médicale Inc. avec la collaboration du Département d’ophtalmologie et des sciences de la vision, Faculté de médecine, Université de Toronto. MDOphtalmologie – Conférences scientifiques est une marque de commerce de SNELL Communication Médicale Inc. Tous droits réservés. L’administration d’un traitement thérapeutique décrit ou mentionné dans Ophtalmologie – Conférences scientifiques doit toujours être conforme aux renseignements d’ordonnance approuvés au Canada. 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