guignol
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GUIGNOL Les contributions au patrimoine peuvent être les plus nombreuses et parfois les plus inattendues. C’est ainsi qu’au début du Second Empire, lorsque l’on cite Arras dans les salons lillois et même parisiens, ce n’est pas pour évoquer les richesses historiques et architecturales de la capitale de l’Artois ou la mémoire de Robespierre, mais aussi pour parler d’un théâtre de « guignol » (à l’époque, on l’écrivait guignole ). Il s’agit d’un « Théâtre de variétés amusantes », animé par un certain Lachique, de son vrai nom François Manœuvre. Un homme qui n’hésite pas, pour le grand plaisir de son public, à réécrire en patois les œuvres classiques ! Au moyen de simples ficelles, il parvient à donner à un assemblage informe de bras, de jambes et de têtes de bois couvertes d’oripeaux et de clinquant, des gestes d’une rare intensité dramatique. Lachique réécrit en patois toutes les œuvres de Voltaire et les drames d’Alexandre Dumas. C’est un régal d’écouter cette langue avec des répliques telles que : « Où qu’ch’est qu’all est chell’reine Béréniche ! » (Où est, la reine Bérénice !) L’aventure a commencé dans une cave d’un quartier populaire d’Arras. Avec le succès et un public de plus en plus nombreux, le théâtre s’installe dans une cave plus vaste et mieux aérée. François Manœuvre se produit enfin au grand jour, près du Jardin du Gouverneur, un cadre verdoyant, lieu privilégié de promenade des Arrageois de toute condition sociale. Quatre perches de bois tendues de voiles, une enseigne rouge et des Source indéterminée GUIGNOL bancs pour l’assistance, voilà le théâtre, dont les représentations sont annoncées à grands roulements de tambour. Au début, la bourgeoisie boude le spectacle, mais le public populaire est là, en masse. On parle de plus en plus de l’artiste dramatique, à tel point que les gens des beaux quartiers viennent et sont vite conquis. Au fil des excellentes recettes, la baraque se modernise, se dore. Lachique est devenu aussi populaire dans la basse ville que dans les quartiers chics. Les journaux commencent à parler de ce curieux théâtre de variétés amusantes d’Arras et on vient de Douai, de Lille, de toute la région, et même de Paris, pour assister au spectacle ! Cependant, le succès ne grise pas le brave Lachique qui continue pendant longtemps à amuser et étonner son public. Son théâtre aura connu deux rois, un empereur et deux républiques, avant que l’âge ne contraigne à un ultime baisser de rideau. Source indéterminée