Enseignement expérimental
Transcription
Enseignement expérimental
Atelier 2 Enseignement expérimental : apports et limites de quelques innovations 280 L’expérience en Sciences de la Vie et de la Terre en matière de formation des professeurs en expérimentation assistée à l’ordinateur, les actions de formation en SVT des professeurs au Burkina. Adama KAOLA Inspecteur de l’enseignement secondaire. Burkina Faso I Brève présentation de l'enseignement secondaire au BURKINA FASO 1°) Etat des lieux L'enseignement secondaire général se caractérise par la faiblesse de ses infrastructures et la massification de ses effectifs surtout dans les grands centres urbains. Quelques indicateurs Le nombre d'établissements lycées et collèges pour l'année scolaire 1998-1999 était d'environ 329 (189 établissements publics et 140 établissements privés) - le taux d'accès oscille entre 10% et 12%. - le taux brut de scolarisation au secondaire était de 11.14 % en 1998-1999. - Les effectifs d'élèves par classe sont de : *80 en moyenne pour le premier cycle *60 en moyenne pour le second cycle. - Le rendement interne et les succès aux examens demeurent faibles 23.20% au premier cycle et 28.5% pour le second cycle. - Les causes se situent à deux niveaux : • insuffisance des infrastructures et des équipements • insuffisance du nombre d'enseignants surtout dans les disciplines scientifiques mathématiques, sciences physiques et chimie et sciences de la vie et de la terre 2°) La stratégie de développement de l'enseignement secondaire Pour faire face à cette situation l'état burkinabé développe des efforts dans deux directions : au plan quantitatif : des efforts sont faits dans la mise en place d'une politique de développement quantitatif de l'enseignement secondaire avec l'appui des collectivités locales et des partenaires extérieurs (construction de nombreux établissements dans les provinces et dans les départements ; incitation du privé à investir dans la construction d'établissement secondaire, recrutement de nombreux enseignants) ; au plan qualitatif : la mise en place de structures de formation et d'encadrement du personnel enseignant et de direction (Ecole normale supérieure de KOUDOUGOU, Direction des Inspections et de la Formation des Personnels de l'Education…) 3°) Situation de l'enseignement de SVT L'enseignement de SVT est à l'image du tableau dressé plus haut. A cause de la surcharge des classes et du dénuement en outils didactiques, on note une forte tendance au niveau des enseignants à dispenser des cours uniquement théoriques. Quand il y a des manipulations, elles servent de démonstration ou d'illustration d'un phénomène scientifique. Elles sont la plupart du temps conduites uniquement par le professeur. Cette situation n'est pas une fatalité ; en développant certaines initiatives, l'on peut faire autrement et les instructions officielles invitent à cela. Elles préconisent la mise en œuvre de méthodes actives sous tendues par une dynamique de travaux pratiques réalisables avec les moyens de l'environnement immédiat. Cette approche ne doit pas occulter les obstacles à surmonter pour promouvoir et consolider l'enseignement scientifique expérimental dans nos lycées et collèges. Ces obstacles se rencontrent à différents niveaux. - le volet salles spécialisées, équipements et fonctionnalité. De nombreux établissements ne sont pas dotés de salles spécialisées. Les rares laboratoires existants dans les principaux établissements du pays ne sont pas toujours fonctionnels pour des raisons multiples(non-renouvellement des équipements et des produits, absence d'entretien par manque de laborantin, exiguïté des salles, faible fréquentation de ces labos par les enseignants..) - le volet formation pédagogique : De nombreux enseignants manquent de formation adéquate à la pratique expérimentale dans le cadre de leur enseignement. - le volet massification des effectifs dans les classes 281 Les grands groupes constituent une source de difficultés. Nous sommes confrontés à ces difficultés car il se trouve que les rares laboratoires sont dans les principaux établissements, et c'est là aussi que l'on rencontre les grands groupes. Le séminaire inter africain de SVT tenu à Yamoussokro en république de COTE D'IVOIRE en novembre 1998 avait fait à peu près le même constat en ce qui concerne la plupart des pays francophones d'Afrique et de l'Océan indien. Il invitait de ce fait à une réhabilitation de l'enseignement scientifique expérimental dans ces différents pays. Faisant sienne cette recommandation qui va dans le sens des efforts que fait le BURKINA pour l'amélioration de la qualité de l'enseignement secondaire général et technique, l'inspection de SVT a conçu et mis en route un programme de formation et de recyclage des professeurs de sciences à la pratique expérimentale. Il s'agit de séminaire-ateliers sur les manipulations en sciences et de séminaires de formation à l'expérimentation assistée par ordinateur(EXAO) II Quelques actions de formation 1°) Au niveau de la formation initiale. Dans le cadre de la formation des élèves professeurs, l'inspection de SVT fait deux types d'intervention. La première intervention porte sur les manipulations en SVT au lycée et au collège. A ce niveau, la conception, la forme et la manière de conduire les travaux pratiques dans l'enseignement secondaire sont abordée. Une distinction est faite entre des TP entrant dans le cadre d'une démarche pédagogique de découverte, de redécouverte et des TP de démonstration ou d'illustration etc. La deuxième forme d'intervention consiste à dispenser aux élèves professeurs une formation pratique sur les manipulations. Cette formation est donnée dans un laboratoire de lycée. Elle est conçue par l'inspection et dispensée par un encadreur, un conseiller pédagogique notamment.. 2°) Au niveau de la formation continue : 2-1 les séminaires-ateliers a) Les objectifs - recycler sur le plan technique les enseignants aux travaux pratiques -amener les enseignants de SVT à intégrer les manipulations dans leur tâche quotidienne -amener les enseignants à mieux fréquenter les laboratoires de sciences -familiariser les enseignants avec le matériel expérimental - développer leurs aptitudes à concevoir et à réaliser des TP contextualisés - leur apprendre à confectionner du matériel didactique simple à partir de matériaux locaux et/ou de récupération - amener les enseignants à appliquer les mesures de sécurité au laboratoire En direction des responsables d'établissement - les sensibiliser sur l'importance didactique des manipulations en sciences expérimentales Ces séminaires sont préparés et exécutés avec l'appui financier du Projet Enseignement Post primaire (PEPP). Cet appui nous a permis de nous doter de certains produits et réactifs ( acides, bases, alcools, sels, colorants, milieu de culture, matériel de chromatographie, acétone éther de pétrole, benzène, liqueur de Fehling etc.). Cette dotation servira aux équipes d'encadrement lors des tournées de formation. Une vingtaine d’ateliers est prévue pour l’ensemble des professeurs soit environ 700 participants. Ces ateliers doivent s’étaler sur une période de deux ans (2000-2001). Chaque atelier regroupe au maximum une trentaine de participants et est animé par une équipe de 4 formateurs soit un inspecteur et trois conseillers pédagogiques b) La méthodologie b.1 La préparation Choix des manipulations - une liste de manipulations susceptibles d'être réalisées en classe soit par le professeur soit par les élèves a été dressée par l'inspection sur la base des programmes officiels de SVT de la 6ème à la terminale. Titre des manipulations 1- étude expérimentale des conditions de la germination d'une graine. 2- étude expérimentale des conditions de la croissance d'une plante. 3- étude de la multiplication végétative chez les végétaux. 4- nutrition des plantes vertes (besoins nutritifs, échanges gazeux, séparation des pigments chlorophylliens). 5- études d'une roche (caractères physiques et chimiques). 6- dissection d'un mammifère. 282 7- étude de la composition chimique d'un os. 8- étude de la composition du lait et du pain. 9- digestion de l'amidon par l'amylase salivaire. 10-étude des mouvements réflexes chez la grenouille. 11 -mise en évidence des constituants du sang. 12- études des tissus animaux et végétaux. 13- dosage du calcaire d'un sol. 14- étude de la cellule. 15- étude des échanges cellulaires. 16- étude des propriétés du tissu nerveux. 17- étude de la respiration tissulaire. 18- mesure de l'intensité respiratoire. 19- étude de la fermentation. 20- physiologie du muscle et du cœur. Validation. Les manipulations ont été validées par les conseillers pédagogiques. Cela a consisté à tester leur faisabilité et à les adapter au contexte local caractérisé par l'absence et/ou l'insuffisance de certains produits et appareils …) Cette opération s'est fait dans un laboratoire d'un lycée de la capitale. Pour la réaliser, il a fallu aussi, solliciter le concours de certains établissements secondaires et le concours de l'Université de OUAGA pour rassembler les produits et les matériels nécessaires au montage des manipulations. b.2 la réalisation pratique Chaque atelier se tient dans un lycée possédant un laboratoire. Un professeur de l'établissement d'accueil de la formation est choisi comme facilitateur par l'inspection. Ce dernier fait un premier travail exploratoire sur l'équipement du laboratoire qui servira de site pour la formation. Il se fait aider si possible par un garçon de laboratoire. Une fois sur place l'équipe de formation (l'inspecteur et les 3 CP) appuyée par le professeur facilitateur et le garçon de labo. préparent les salles de TP et installent le nécessaire pour les différentes manipulations selon le programme établi. L'atelier dure cinq jours. Après l'accueil des participants, les travaux débutent par la communication des objectifs de la formation par l'équipe d'encadrement et par un exposé débats sur la sécurité au laboratoire. Les différentes manipulations seront réalisées par les participants organisés en petits groupes ; chaque formateur encadre un ou deux groupes au maximum. Un système de rotation est mis en place pour permettre à tous les groupes de faire toutes les manipulations au bout des cinq jours. Chaque jour une évaluation de l'exécution des différents types de manipulations programmées est faite pour mesurer les succès et les échecs ; ce qui permet d'apporter des correctifs pour les prochaines séances. En marge des travaux, l'équipe d'encadrement saisit l'occasion pour donner des conseils sur la tenue du laboratoire (rangement, nettoyage, montage de certains appareils…) au professeur facilitateur et à son aide. A l'occasion de ces ateliers les responsables de l'établissement d'accueil sont sensibilisés sur la nécessité d'une bonne gestion des laboratoires et sur l'appui qu'ils doivent apporter aux professeurs. - Nous sommes en retard sur notre chronogramme car à ce jour, nous avons tenu seulement 4 séminaires-ateliers dans quatre provinces (GOURMA, KOURITENGA PASSORE, NAHOURI). Les autres sessions sont programmées et certaines seront réalisées dans le courant de l'année en cours. c) le suivi évaluation Il se fait au cours des visites de classe et sera systématisé à la fin de la formation. 2-2) Les séminaires de formation en EXAO Depuis février 1993, quinze établissements publics d’enseignement secondaire de notre pays ont reçu du matériel d’expérimentation assistée par ordinateur (EXAO) pour l’enseignement de SVT. Ce matériel est composé de logiciels, de systèmes multifonctions (interface), de capteurs, etc. L’expérimentation assistée par ordinateur est une application de l’informatique à l’enseignement des sciences expérimentales et des sciences de la vie et de la terre en particulier. Elle offre à l’enseignement des sciences une aide précieuse dans la réalisation des travaux pratiques et dans la recherche d’un enseignement expérimental, lequel devrait se manifester par les avantages suivants : - une plus grande possibilité de motivation des élèves un meilleur apprentissage des notions et concepts scientifiques et partant une meilleure atteinte des objectifs de l’enseignement des sciences ; une meilleure gestion des grands effectifs sur le plan de l’apprentissage expérimental ; une exploration plus accessible du réel une plus grande sécurité et précision dans les manipulations une redécouverte du concept de la mesure 283 - une automatisation de la prise de mesure une économie de temps ; - une plus grande opportunité d’utilisation, et d'appropriation des nouvelles technologies etc. Des visites effectuées dans les laboratoires des établissements dotés de ce matériel EXAO, et les entretiens menés avec les professeurs de SVT des dits établissements ont permis de faire le constat suivant : - dans la plupart des établissements équipés en matériel EXAO, les enseignants de sciences en général, de SVT en particulier ignoraient la présence de ce matériel dans leur laboratoire. - la grande majorité des enseignants de SVT ne sait pas utiliser ce matériel EXAO, car n’ayant jamais été formée à cela. Pour lever les différents obstacles à l’utilisation efficiente de ce matériel, l’inspection lors de son séminaire de formation en informatique (septembre 1999 à BOBO Dioulasso) des inspecteurs et conseillers de SVT y a inclus un volet formation en EXAO. Ce qui lui a permis par la suite de concevoir et de mettre en route un plan de formation des professeurs des établissements bénéficiaires du matériel en question. Ce plan qui s’étale sur deux ans comprend : - pour la première année la formation de 54 professeurs par une série de trois séminaires soit dix huit (18) professeurs par séminaire ; - pour la deuxième année également, la formation de 54 professeurs par une série de trois séminaires Dans la conception de ces séminaires c'est à dire au plan méthodologique, chacun d’eux est précédé de trois jours de préparation et de montage du matériel et du test des expériences. Ces préparations doivent être répétées à chaque séminaire pour permettre d’intégrer les leçons tirées de la session précédente et faire les rectificatifs nécessaires. a) les objectifs - connaître des notions de base en informatique - connaître l’EXAO et sa place dans l’enseignement des sciences ; - intégrer l’EXAO dans sa pratique enseignante b) le contenu des formations - notions de base en informatique - le matériel EXAO l’interface SMF 100 les logiciels/ exabio, ECG, nerf, myo-cardio les capteurs - les travaux pratiques respiration électrocardiographie photosynthèse électrophysiologie du nerf myographie Pour cette année scolaire 2000-2001 nous avons pu réaliser à BOBO Dioulasso deux sessions au profit des enseignants des établissements de Ouagadougou, Banfora, Gaoua et Koudougou.. Les professeurs ont accueilli favorablement cette formation. Un bilan global sera fait et un programme de suivi de l'application dans les classes sera aussi établi. Mais d'ores et déjà nous avons noté que les logiciels, les capteurs etc. sont légèrement dépassés au regard des nouveaux produits qui sont sur le marché. III Bilan partiel Le bilan à mi-parcours montre que les enseignants ayant accueilli favorablement ces ateliers se sont engagés à tout mettre en œuvre pour changer leur façon d'enseigner. 284 Une innovation pédagogique pour l’enseignement de la chimie : la microchimie utilisant les Kit(1). Points de vue de deux catégories d’enseignants. SALIOU KANE IBRAHIMA CISSE Formateurs au Département de Sciences physiques. Ecole Normale supérieure de Dakar - Université Cheikh Anta Diop – Sénégal. ² Résumé . Le présent article rend compte de résultats d’enquêtes menées sur la microchimie utilisant les Kit* auprès d’un public constitué de deux catégories d’enseignants : des élèves-professeurs en situation de formation initiale et des professeurs titulaires en exercice dans les lycées. Tous les deux groupes ont été formés à l’utilisation du matériel de microchimie; les uns pendant la formation initiale et les autres pendant des sessions de formation continue. Au terme de la formation qu’ils ont reçue nous les avons interrogé sur les qualités pédagogiques de l’outil didactique ainsi que sur les avantages, les inconvénients de la microchimie et sur l’opportunité d’introduire ce type de matériel dans le système éducatif sénégalais. Le mode didactique de familiarisation au référent se prete mieux au Kit qu’au matériel standard du fait de ses caractéristiques physiques. Mots – Clés : microchimie, Kit, élève – professeur, professeur, avantage, inconvénient. I.INTRODUCTION. L’enseignement de la chimie, discipline expérimentale par excellence, est largement affecté par les conditions précaires qui prévalent dans les établissements scolaires de beaucoup de pays, en particulier dans les établissements des pays en développement. L’absence et/ou le manque de salles spécialisées, de personnels qualifiés (professeurs et laborantins), les effectifs pléthoriques des classes qui caractérisent la plupart de ces pays sont autant de facteurs défavorables à un enseignement expérimental de la chimie. On assiste alors dans ces pays à une dérive de plus en plus accentuée vers un enseignement théorique de la discipline avec comme corollaire la démotivation des élèves qui se trouvent ainsi privées de l’acquisition des techniques expérimentales les plus simples. A l’échelle internationale ce constat justifie de nombreuses rencontres qui sont organisées pour rechercher les voies et moyens d’améliorer la qualité de l’enseignement des sciences physiques par la prise en compte effective de la dimension expérimentale de ces disciplines dans les conditions précaires qui sévissent dans la plupart des pays [12]. Des démarches innovantes sont en expérimentation pour faire manipuler le plus grands nombres d’élèves avec des équipements à moindre cout [3]. Ainsi depuis un certain temps il y a eu une tendance à réduire les dimensions et le cout de l’équipement et du matériel utilisé dans les travaux pratiques de chimie. Plusieurs pays ont déjà entrepris des programmes dans cette direction, par exemple les USA, le Japon , la France, l’Inde et la Grande Bretagne. La « Microchimie » est devenue une des alternatives adoptées par quelques pays occidentaux et africains [4]. Dans le cadre de cette « nouvelle » chimie le CENTRE RADMASTE (Centre for Research and Developpement in Mathematics, Sciences and Technonology Eduction) qui est un centre de recherche-développement basé à Johannesburg, spécialisé dans l’éducation en mathématiques, sciences et technologie, a depuis quelques années, mis au point des Kit de microchimie. Les Kit ont d’abord été expérimentés en Afrique du Sud et à tous les niveaux d’enseignement et l’expérimentation mène, semble – t – il, à des résultats satisfaisants. Ils ont été aussi expérimentés au Cameroun dans le cycle secondaire, en Côte d’Ivoire, au Niger, pour ne citer que ces pays [5-6]. Au Sénégal, au département de sciences physiques de l’Ecole Normale Supérieure de Dakar, une initiation aux techniques de microchimie a été introduite dans le programme de formation des élèves professeurs. Plusieurs expériences initialement réalisées avec le matériel classique standard seront reprises avec les Kits de microchimie à titre de comparaison. Parmi ces expériences il faut citer la préparation du dihydrogène, la préparation du dioxygène, la réalisation de la pile Daniel, l’électrolyse de l’eau, la réduction de l’oxyde de cuivre (II) et la réaction d’estérification. En vu d’une extension de l’expérimentation à d’autres écoles du pays, les professeurs principaux de sciences physiques, généralement animateurs des cellules pédagogiques dans leur établissement, les conseillers pédagogiques en service dans les pôles régionaux de formation ont été également formés à l’utilisation du matériel de microchimie à l’occasion de sessions de formation continue [7]. 1 - Kit : il s’agit d’un matériel en miniature utilisant de faibles quantités de substance. La chimie utilisant de telles quantités est communément appelée « microchimie ». Pour le lecteur nous avons joint en annexe les schémas et précisé quelques unes des caractéristiques de ce type de matériel (matière première, forme géométrique, dimensions et schémas). 285 Au terme de la formation reçue par les élèves-professeurs et les professeurs, dans un but évaluatif afin de tirer des recommandations à soumettre aux autorités éducatives du Sénégal, nous les avons tous interrogé sur les qualités de l’outil didactique, le Kit, et sur les avantages et inconvénients de la microchimie utilisant cet outil. En fin nous avons demandé leur avis sur l’opportunité d’introduire ce type de matériel pour l’enseignement de la chimie au Sénégal 3.1 Qualités du support didactique. Les professeurs, de par leur expérience professionnelle, ont su répondre à cette partie. Les élèves-professeurs se sont surtout prononcé sur les avantages et inconvénients de la microchimie. Caractéristiques physiques du support Les caractéristiques suivantes ont été citées par les professeurs : - les dimensions du Kit sont réduites comparées à celles des appareils conventionnels, - le Kit est à la fois transparent, léger, robuste et simple. Implications d’ordre psychologique. Les élèves connaissent bien la matière première du Kit (le polystyrène), Il y a une démythification du dispositif expérimental comparé au dispositif conventionnel souvent trop sophistiqué et volumineux ; la manipulation de l’outil est aisée ; les élèves éprouvent un plaisir à manipuler l’outil ; la motivation de l’élève d’apprendre la chimie est accrue du fait de la possibilité de manipuler. Implications d’ordre pédagogique. Le Kit permet à la fois le travail en groupe restreint et le travail individuel, Le laboratoire devient individuel et transportable, La possibilité est offerte à l’élève de reprendre les manipulations en dehors de la classe pour consolider les acquis ou pour refaire les expériences non réussies en classe, Il y a la possibilité pour l’élève de réaliser d’autres expériences que celles imposées par le professeur, Le matériel développe l’esprit de recherche et d’initiative de l’élève, Le matériel développe l’autonomie de l’élève, L’outil développe mieux l’habileté gestuelle que le matériel conventionnel, Il développe mieux le savoir faire expérimental que le matériel conventionnel, Le Kit est un véritable outil de construction du savoir à la portée de l’apprenant, 3.2. Avantages et inconvénients de l’utilisation des Kits. Pour chaque avantage et chaque inconvénient identifiés nous avons calculé la fréquence (pourcentage des répondants ayant cité ce type d’avantage ou d’inconvénient) . Les résultats sont consignés dans le tableau ci-après : Inconvénients et avantages de la microchimie utilisant les Kits selon les stagiaires et les professeurs en exercice Avantages Item Inconvénients Fréquence Item S P M Matériel non encombrant Facile à transporter 56 50 60 61 58 55 Facile à conserver 55 55 55 Résiste au choc Economie des produits 37 75 50 83 44 79 Moins de danger Possibilité de faire manipuler tous les élèves Evite la pollution 12 75 50 77 31 76 ------- 58 ----- Protection de l’environnement. 50 Fréquence S P M Ne résiste pas à la chaleur Manipulation difficile du fait de la miniaturisation Expériences qualitatives souvent non quantitatives Observations des faits difficiles Impossibilité pour le prof de suivre individuellement les élèves. Dangers du fait de l’accès facile Utilisation impossible ²de certains produits. Matériel difficile à nettoyer 12 56 35 60 24 58 6 10 8 25 12 31 20 28 16 12 --- 15 10 14 ---- 40 ---- Matériel onéreux ------- 10 ---- 20 ---- 20 ---- Matériel non utilisable en TP cours Matériel non utilisable en expérience de démonstration (professeur) NB : S = stagiaire ; P = professeur ; M = moyenne arithmétique des réponses en pourcentage 286 Ces résultats appellent les commentaires suivants : 1. Sur beaucoup de points nous avons constaté une correspondance parfaite sur les inconvénients et avantages cités et leurs fréquences dans les réponses fournies par les deux catégories de répondants : - Pour plus de la moitié des interrogés, soit 56% des stagiaires et 60% des professeurs, la manipulation du Kit n’est pas aisée du fait de sa miniaturisation. Les fréquences enregistrées pour les autres inconvénients sont en général inférieures à 30. - Si les répondants trouvent que le matériel est difficile à manipuler il n’en demeure pas moins qu’ils le trouvent en moyenne non encombrant (58%) et donc facile à transporter (55%). - Ils pensent surtout à grande majorité que ce matériel permet d’économiser les produits (79%) et de faire manipuler tous les élèves (76%) - A une exception près la fréquence est inférieure à 30% pour tous les inconvénients cités. 2. Mais nous constatons que certains aspects soulignés par les professeurs ne l’ont pas été par les stagiaires. C’est le cas pour les avantages liés à la préservation de l’environnement, et les inconvénients liés au fait que la microchimie n’est pas utilisable pour certains types d’expériences tels que les expériences de cours. 3.3. Introduction des Kit dans l’enseignement de la chimie au Sénégal. Les résultats enregistrés à ce sujet sont mitigés. En effet on a noté que : 38% des répondants sont favorables à l’introduction de la microchimie dans l’enseignement au Sénégal, 38% sont défavorables à cela, 15% sont indifférents, 9% ne se sont pas exprimés sur la question. Par ailleurs 75% de ceux qui sont favorables pour l’introduction de ce type de matériel dans le système d’enseignement sénégalais proposent des solutions d’adaptation : - « déminiaturisation » du matériel, - conception du matériel avec des matériaux mieux adaptés que le plexiglas, - utilisation alternée des Kit et du matériel standard afin de solutionner certaines limites constatées pour l’emploi des Kit . 4.CONCLUSION. Au terme de cette étude nous constatons que les enseignants ont une bonne perception de la microchimie utilisant les Kit du fait des qualités du support et des avantages multiples liés à ce type matériel. Un peu plus du tiers des élèvesprofesseurs sont d’accord pour l’introduction de ce type de matériel dans l’enseignement de la chimie au Sénégal. Des solutions d’adaptation sont cependant proposées. Bibliographie : 1.Actes du séminaire international sur l’amélioration de la qualité de l’enseignement des sciences ( BASE, Dakar, 1992). 2. Djouka., A., (1996)., Des rencontres de Grand Bassam au séminaire deYaoundé., Actes du séminaire d’Harmonisation des Programmes de Sciences Physiques et de Technologie dans les pays francophones d’Afrique et de l’Océan Océan Indien tenu à Yaoundé du 13 au 19 mars 1996., 13. 3. EASTES., E., (1999). Conférence sur la microchimie., Actes du séminaire d’Harmonisation des Programmes de Sciences Physiques et de Technologie dans les pays francophones d’Afrique et de l’Océan Océan Indien tenu à Ouagadougou du 21 au 27 avril 1999., 77. 4. BRADLEY., J., (1997). Le programme de microchimie développé en Afrique du Sud. Actes du séminaire d’Harmonisation des Programmes de Sciences Physiques et de Technologie dans les pays francophones d’Afrique et de l’Océan Océan Indien. tenu à Dakar du 9 au 15 avril 1997, 56-57. 5. BRADLEY., J., (1997). Worksheets for students « basic » - Radmaste michrochem Educational Product & systems – SOMMERSET. Republic of South Africa. 6. BRADLEY., J., (1997).Manuel for lectrers & teachers « advanced » - Radmaste michrochem Educational Product & systems – SOMMERSET. Republic of South Africa. 7. NDIAYE, A., et all,. (1999), Actes du séminaire de formation continue des professeurs de sciences physiques des régions de Kolda et Saint Louis du Sénégal., 21. 287 Les effets d’une pédagogie interactive et d’intégration sur la motivation et la compréhension dans l’enseignement des sciences expérimentales. Recherche empirique dans le cours de physique au lycée. RATZUI Iona ENS/UCAD INTRODUCTION Nous présentons dans cette communication les résultats d'un travail de recherche qui a eu lieu à Dakar, au Sénégal auprès de 766 élèves (24 classes) du cycle secondaire en physique, entre novembre 1998 et mars 19991. La présentation sera structurée en quatre parties : (1) Dans la première, après quelques réflexions sur l'enseignement des sciences, nous présentons notre conception d'une pédagogie situationnelle interactive et d'intégration, la questionproblème, la définition des variables et les hypothèses formulées termineront cette partie. (2) Dans la deuxième partie nous allons présenter le dispositif expérimental de la recherche. (3) La troisième partie concernera la présentation et la discussion des résultats obtenus à travers deux types d'analyses : une analyse psychométrique (normative) et une analyse édumétrique (critérielle). (4) Enfin la dernière partie présentera les conclusions générales permettant de dégager les implications théoriques, méthodologiques et pratiques de cette recherche. 1. QUELQUES REFLEXIONS SUR L’ENSEIGNEMENT DES SCIENCES ; NOTRE CONCEPTION D’UNE PEDAGOGIE SITUATIONNELLE, RENFORCEE, INTERACTIVE ET D’INTEGRATION 1.1. Le sens (ou plutôt le manque de sens) dans les apprentissages Nombreux sont encore ceux qui croient que les problèmes de l'enseignement des sciences tiennent essentiellement à des difficultés de la matière ou encore au manque d'aptitude des élèves pour l'apprentissage des sciences. Les médiocres résultats enregistrés au Sénégal… (mais aussi en Belgique, France ou dans d'autres pays) par les élèves en sciences expérimentales traduisent avant tout un manque de motivation à apprendre les sciences et/ou de disponibilité des connaissances scientifiques pertinentes. Le manque de disponibilité des connaissances pertinentes (déclaratives et procédurales) seraient largement dues à leurs caractères abstrait et parcellaire sans lien avec les situations pratiques familières. Dans la plupart des cas on observe l'application simpliste et abusive des symboles mathématiques ou des procédures (algorithmes à appliquer) sans référence aux enjeux pratiques quotidiens. Par conséquent, les difficultés de traitement cognitif des concepts, lois, phénomènes ou situations présentées en cours relèvent, principalement, de l'incapacité de l'élève à donner du sens, à conceptualiser les grandeurs physiques et les lois dont se sert la physique pour décrire les phénomènes du monde qui nous entoure. Et implicitement, à les transférer vers des situations autres que celles traitées en classe. 1.2. Sens discursif et signification argumentative du monde Parmi les nombreuses définitions du sens nous avons fait nôtre, celle proposée par Galatanu (2000) selon laquelle le sens désigne “ l'association de deux ou plusieurs représentations proposées par un sujet parlant dans un acte discursif, dans une situation discursive ” (p. 29). Cette perspective du sens discursif et de son caractère essentiellement argumentatif s'articule avec une conception de l'apprentissage à la compréhension, permet l'acquisition des compétences indispensables aux fonctions scientifiques essentielles, à savoir décrire, expliquer, prédire et contrôler le monde autour de nous. Peut-on dès lors proposer aux élèves au cours de physique des situations d'apprentissage à l'intérieur des dispositifs d'enseignement/apprentissage susceptibles de les motiver afin de leur permettre d'acquérir des connaissances (et des stratégies cognitives) significatives (c'est-à-dire applicables et transférables) ? Ceci nous amène à formuler la question-problème de notre étude : Est-ce qu'une pédagogie situationnelle renforcée, faisant appel à un dispositif (contenus et stratégies) construit selon le modèle d'apprentissage interactif ILM améliore la motivation à apprendre les sciences, ainsi que la compréhension scientifique des concepts et des phénomènes physiques impliqués dans le cours de physique ? Autant de concepts et de variables que nous nous employons à préciser et à opérationnaliser. 1.3. Type de pédagogie pratiquée (Variables indépendantes) Dans le cadre de l'expérimentation, les élèves répartis en trois groupes devraient suivre le même cours mais à travers trois types d'approches pédagogiques : - G3 - Groupe contrôle - selon une pédagogie classique, - G2 - Groupe expérimental n°2 - selon une pédagogie situationnelle commune, G1 - Groupe expérimental n°1 - selon une pédagogie situationnelle renforcée, interactive et d'intégration. 1 L'étude a fait l'objet d'une thèse en didactique des sciences, présentée en septembre 2000 à l'Université Catholique de Louvain. 288 La pédagogie classique est, dans la présente recherche, une manière de concevoir les activités d'enseignement/apprentissage à partir d'une situation-problème introductive insuffisamment exploitée. Les élèves sont invités à répondre à des questions portant sur certains concepts, lois ou phénomènes concernés ainsi qu'à résoudre des applications (exercices d'examen donnés les années précédentes). Il s'agit principalement d'illustrer l'applicabilité de la théorie enseignée, et de préparer aux épreuves d'évaluation à l'occasion d'interrogations ou d'examens. Une pédagogie situationnelle commune fait référence en début de cours à une situation-problème qui constitue l'objet d'un débat entre un ou deux élèves et le professeur. Celui-ci, apporte les corrections nécessaires pour dégager la solution. A chaque moment important de la séquence, les élèves sont invités à donner leur avis sur les questionnements que le professeur formule à cet égard. A la fin du cours, des questions d'application qualitative et des applications semblables à celles de l'examen sont proposées. Avant de préciser le sens des trois attributs du type de pédagogie proposée dans le groupe G1 attardons-nous sur le modèle d'apprentissage ILM. 1.4. Le modèle d'apprentissage interactif “Interactive Learning Model” (ILM) Plutôt que de concevoir l'apprentissage comme un procédé linéaire où se succèdent les recours à la mémoire sensorielle, celle de travail et la mémoire à long terme, Tennyson & Nielsen (1998) proposent2 un modèle flexible et adaptatif (figure 1). Au lieu d'une approche réductioniste étudiant les composantes indépendamment, le modèle ILM insiste sur le traitement cognitif actif et non-linéaire des différentes composantes en interaction avec l'environnement externe. Figure 1 : Modèle d'apprentissage interactif “ Interactive Learning Model ” (ILM) d'après Tennyson & Nielsen 1998, p.9 ENVIRONNEMENT EXTERNE et CONDUITE EXTERNE (Action) RECEPTEURS SENSORIELS (Mémoires) CONTRÔLE EXECUTIF (Méta/Automatique) * Perceptions * Attention * Ressources (effort) STRATEGIES COGNITIVES * Construction (développement d'un nouveau savoir et des stratégies) * Différentiation (sélection du savoir) * Intégration (restructuration et élaboration de savoir) 2 AFFECT * Motivation * Sentiments * Attitudes * Emotions * Anxiété * Valeurs BASE DU SAVOIR * Savoir déclaratif (savoir que) * Savoir procédural (savoir comment) * Savoir contextuel (savoir pourquoi quand et où) Nous signalons que, juste avant le démarrage de l'expérimentation-recherche, nous avons eu connaissance d'un article de Tennyson & Nielsen. Dans une section spéciale consacrée aux domaines affectif et cognitif de l'apprentissage, ils proposaient un modèle d'apprentissage Interactive Learning Model for Instructional Design (que nous traduisons par modèle d'apprentissage ILM), très complexe, destiné à fournir une explication éducative à l'apprentissage en général (figure 1). 289 Notons les principales directions suivies : les éléments affectifs représentent une composante intégrale du système cognitif, les éléments linéaires et non-linéaires de la cognition sont abordées simultanément, il y a une interaction entre le contenu disciplinaire et les stratégies cognitives pour élaborer des stratégies cognitives d'ordre supérieur. Nous avons, par conséquent, retenu et adapté un dispositif d'enseignement en accord avec les postulats socioconstructivistes issus des derniers travaux théoriques et de recherches, susceptible de favoriser par son approche de l'apprentissage la construction des connaissances transférables. Si le transfert de l'apprentissage renvoie (dans la foulée des travaux de Palincsar & Brown 1984, Barth 1993 et Frenay 1994) à la capacité d'un apprenant à résoudre des nouvelles situations, nous avons conclu que les cinq conditions suivantes seraient incontournables : (1) La nécessité qu'une structure d'accueil pertinente existe pour l'assimilation des nouvelles informations (données) ; (2) La nécessité que cette structure soit effectivement mobilisable dans les situations de transfert ; (3) La nécessité que les informations fournies à l'apprenant doivent être assimilées par lui-même - compte tenu de sa structure d'accueil et de sa capacité de l'activer en ce moment -; (4) La nécessité de créer des environnements d'apprentissage et de mises en scène didactiques capables de motiver et intéresser davantage les élèves ; (5) La nécessite que les situations-problèmes proposées soient socio-contextualisées et personnalisées de telle manière qu'elles puissent susciter réellement chez les élèves une dynamique motivationnelle et de réflexion dans le travail qu'en tant qu’expérimentateurs on proposait aux enseignants (et indirectement aux élèves). Le grand nombre de paramètres à prendre en compte a suscité, dans un premier temps, notre inquiétude. Le modèle d'apprentissage interactif ILM nous a aidé et conforté sur cet aspect. Il fournit une explication pertinente pour les variables complexes et diverses qui interviennent dans l'apprentissage et que nous avons prises en considération, car nous les considérons nécessaires, pour mettre régulièrement les élèves en situation de mobiliser leurs connaissances antérieures et les confronter à des situations-problèmes nouvelles3 Comme la quasi totalité des variables, impliquées dans le modèle d'apprentissage ILM de Tennyson & Nielsen (figure 1), faisaient l'objet de manipulations et de mesures dans notre dispositif de recherche, nous en avons conclu qu'on pourrait l'utiliser et le mettre à l'épreuve en tant que modèle théorique de base. 1.5. Pédagogie situationnelle renforcée, interactive et d'intégration Précisons le sens que nous donnons à chacun des trois attributs cités : Pédagogie situationnelle renforcée, dans la mesure où elle fait appel à des situations-problèmes en début, pendant et à la fin du cours, à des situations d'apprentissage contextualisées, dans lesquelles les données à traiter sont complexes et variées, selon une approche présentée dans le schéma de la figure 2. 3 Des situations-problèmes issues d'un contexte riche en signification, de vrais problèmes du monde qui doivent avoir les caractéristiques suivantes : a) contexte du monde réel ; b) comportant des énoncés qui n'identifient pas explicitement ce qu'on a besoin de trouver ; c) comportant des informations qui peuvent ne pas être nécessaires pour résoudre le problème ; d) un certain manque d'application qui demande aux élèves de faire des hypothèses raisonnables pour résoudre le problème (Heller & al. 1992). 290 Figure 2 : Schéma de la méthodologie d'approche par situation-problème (S-P) SITUATION PROBLEMATIQUE ETONNANTE 1ère tentative pour trouver une solution NOUVELLE PHASE, CONCEPT ou LOI (1) Des consignes, questions, suggestions, nouvelle S-P, interactions individualisées ou avec les groupes guideront les élèves NOUVELLE PHASE, CONCEPT ou LOI (2) Une nouvelle S-P, à travers des consignes appropriées doit faire rebondir le débat NOUVELLE PHASE, CONCEPT ou LOI (3) A partir de l'exploitation des travaux effectués, la S-P initiale va être reprise et discutée MISE EN COMMUN du travail individuel et de groupe SOLUTION de la S-P présentée au début de la séquence - Synthèse du cours, - Relations entre STS - Décrire et expliquer d'autres situations du monde autour de nous - Problème-exercice Pédagogie interactive, au sens donné par Tennyson & Nielsen (1998), où cinq sous-systèmes différents (de récepteurs sensoriels, du contrôle exécutif, des affects, des stratégies cognitives et de la base du savoir) interviennent dans l'apprentissage et réagissent les uns par rapport aux autres. Pédagogie d'intégration, dans un double sens : faire appel à des situations complexes (situations-problèmes) nécessitant et permettant non pas la juxtaposition des compétences (spécifiques, démultiplicatrices, stratégiques et dynamiques) mais leur intégration réciproque et au sens d'intégrer dans les situations d'apprentissage contextualisées et fonctionnelles des moments d'apprentissage systématiques organisés selon des progressions rigoureuses. 1.6. Variables dépendantes 291 Nous rappelons que l'objectif principal de notre recherche consiste à vérifier l'efficacité d'un modèle pédagogique faisant appel à un dispositif d'enseignement basé sur le modèle d'apprentissage ILM à partir d'un contenu disciplinaire spécifique. Nous avons retenu, pour ce faire, les trois variables dépendantes suivantes : motivation à apprendre les sciences, la compréhension scientifique et la socio-contextualisation et la personnalisation des contenus disciplinaires. Nous décrivons brièvement ci-après les deux premières variables. 1.6.1. La motivation à apprendre la physique A la suite des auteurs comme Brophy (1987), Viau (1994), Lee & Brophy (1996), Louis & al. (1998), nous définissons la motivation à apprendre les sciences comme étant un phénomène dynamique qui a ses origines dans les perceptions qu'un élève a de lui-même et de son environnement et qui l'incitent à choisir des tâches scientifiques, à s'y engager et à persévérer dans leur accomplissement, dans le but d'acquérir une meilleure compréhension du monde autour de lui. Nous allons retenir et opérationnaliser quatre composantes4 de la motivation qui nous semblent les plus importantes : 1° La perception qu'un élève a de la valeur de l'activité d'apprentissage qu'on lui propose ; 2° La perception qu'il a de la compétence à accomplir l'activité qui lui est proposée ; 3° La perception qu'il a du degré de contrôle qu'il peut exercer sur le déroulement et sur les conséquences de l'activité proposée ; 4° L'engagement cognitif et la persévérance de l'élève face à l'activité qui lui est proposée. Du modèle de Viau (dont nous nous sommes inspiré), nous avons éliminé la composante performance, en estimant que si dans une vision systémique elle peut être considérée comme un facteur en interaction avec la motivation, intrinsèquement, elle ne représente pas une composante de la motivation mais une composante d'une autre nature que nous allons mesurer séparément. 1.6.2. La compréhension scientifique des concepts, lois, principes ou des phénomènes physiques Suite aux travaux de Toulmin 1972, Palincsar & Brown 1984, Barth 1993, et notamment Anderson C. W & Roth 1989, nous définissons la compréhension scientifique des élèves comme un processus comportant deux composantes fondamentales : (1) Une composante fonctionnelle, selon laquelle les élèves doivent acquérir les connaissances qui leur sont utiles pour les fonctions essentielles consistant à décrire, expliquer, prédire et contrôler le monde autour d'eux ; (2) Une composante structurelle, selon laquelle les élèves doivent construire les connaissances qui sont conceptuellement cohérentes et intégrées avec leurs connaissances personnelles du monde. Cette deuxième composante fait référence au rôle joué par les connaissances antérieures dans l'apprentissage. En effet, quand la connaissance antérieure des élèves entre en conflit avec les connaissances scientifiques nouvelles, et cela se vérifie en particulier quand les données déjà assimilées sont incorrectes ou erronées, il est nécessaire qu'ils intègrent les nouvelles connaissances scientifiques avec leurs connaissances antérieures, à travers le procédé (complexe) de changement conceptuel. La recherche réalisée par Huffman (1997) nous a servi de référence tant en ce qui concerne les critères choisis que les grilles de marquage et de score de réponses aux questions de compréhension. Voici les quatre critères retenus et opérationnalisés : 1° Qualité du diagramme (schéma) physique modélisant le concept, la loi, le principe, la situation ou le phénomène physique concerné ; 2° Qualité des descriptions et des explications du point de vue physique, accompagnant la solution ; 3° Qualité de la cohérence du traitement physique entre le diagramme (donné ou réalisé par l'élève) et l'explication-description apportée ; 4° Qualité de l'argumentation mathématique concernant la capacité de prévoir et contrôler les solutions avancées. Avant d'analyser chacun de ces quatre critères retenus, quelques précisions s'imposent. Les questions concernant le domaine cognitif ont été combinées à l'intérieur de chaque test de façon à comporter chaque fois, les trois types de questions suivantes : (1) les questions déclaratives, nécessitant des réponses de type restitution des définitions, des concepts, des principes et des formules mathématiques ; (2) les questions fonctionnelles, nécessitant des réponses de type argumentation-justification des phénomènes à analyser ; (3) les questions de transfert, nécessitant des réponses de type application-contrôle-prévision des concepts et des principes concernés. 4 Nous rappelons que le modèle de la dynamique motivationnelle de Viau se compose de trois déterminants (la perception qu'un élève a de la valeur d'activité d'apprentissage qu'on lui propose, de sa compétence à accomplir l'activité et le degré de contrôle sur le déroulement et les conséquences de cette activité) et de trois composantes de l'apprentissage que la motivation influence (l'engagement cognitif face à une activité, sa persévérance et sa performance). 292 Si pour la partie concernant le domaine motivationnel, les quatre questionnaires étaient quasi identiques, ce n'était plus le cas pour la dimension cognitive. Néanmoins, en dépit des différences liées à la complexité des connaissances, dans les deux niveaux de classes (1ère et 4ème)5, les types des questions se ressemblent beaucoup (déclaratives, fonctionnelles et de transfert). Nous soulignons, à cet effet, que le niveau des classes de 4ème - nouvellement confrontée à l'étude de la physique - ne permettait de mesurer que le second critère, relatif à la description et à l'explication. Notons que ce dernier critère constitue l'objectif principal, quel que soit le niveau d'étude (Palincsar & Brown 1984 ; Barth 1993). 1.7. Hypothèses Par rapport à la question-problème formulée nous postulons que : les résultats du groupe expérimental 1 seront meilleurs que ceux du groupe expérimental 2, eux-mêmes meilleurs que ceux du groupe contrôle, et cela tant pour les questions de motivation (dynamique motivationnelle) à apprendre les sciences (hypothèse 1), que pour les épreuves de compréhension scientifique (hypothèse 2) et que pour les facteurs portant sur la socio-contextualisation et la personnalisation des contenus disciplinaires en physique (hypothèse 3). Dans cette communication, nous allons nous centrer sur la vérification de l’hypothèse 2. Nous rappelons que nous avons conçu (pour les classes appartenant aux groupes G2 et G1) des scénarios de séquences didactiques couvrant trois chapitres (du programme de 1ère et de 4ème )6, basés sur des situations-problèmes et sur un jeu de questions-réponses inspirés par la grille épistémique socio-constructiviste. 2. LE DISPOSITIF DE RECHERCHE Notre échantillon se compose de vingt-quatre (24) classes de l'enseignement secondaire : dix huit (18) de 1ère (16-17 ans) de Lycée, section scientifique et six (6) de 4ème de BST7 (13-14 ans) - répartis dans les trois groupes : deux groupes expérimentaux (G1 et G2) et un groupe de contrôle (G3) (tableau 1). Tableau 1 : Echantillonnage GR. EXP. 1 NOMBRE de CLASSES LYC BS EE T 1ère 4ème 6 2 NOMBRE d’ELEVES LYCEE - 1ère total traité8 BST - 4ème total traité 220 111 48 34 GR.EXP. 2 6 2 237 119 50 39 GR.CONTR OLE TOTAUX 6 2 161 100 50 34 18 6 618 330 148 107 Le déroulement sur le terrain a été concrétisé par cinq séances d'observation des cours (de deux heures/séance) pour chacune des classes, suivies de quatre séances de passation des questionnaires et des tests concernant les trois variables dépendantes. Les objectifs poursuivis, à l'occasion de chaque observation, ainsi que des aspects méthodologiques concernant le dispositif de la recherche, sont décrits ci-après. Pré-observation - Le but principal était d'obtenir une première série de données concernant les composantes retenues pour apprécier la dynamique motivationnelle de chaque élève participant à l'expérience et pour s'assurer qu'au départ il n'y avait pas de différences significatives entre les groupes. A l'occasion de cette pré-observation un premier questionnaire sur la motivation (M1) a été administré auprès de tous les élèves participant à la recherche. Observation 1 - Trois semaines plus tard, une observation concernant le premier chapitre du programme d'étude faisant objet de la recherche, a eu lieu. Nous avons voulu obtenir un premier feed-back de la manière dont les professeurs-collaborateurs appliquent les scénarios des séquences didactiques et de leur façon d'adapter les stratégies 5 Il s’agit respectivement de la 11° année de scolarité (1ère) et de la 8° année de scolarité (4ème). En classe de 1ère: Etude expérimentale du mouvement de chute libre ; Travail et Puissance ; Energie, Energie cinétique, Energie potentielle, Energie mécanique totale ; Autres formes d'énergie, Conservation de l'énergie totale. En classe de 4ème: Masse, Masse volumique, Densité ; Les forces ; Poids, Relation entre poids et masse ; Ne confondons plus poids et masse ! 7 Blocs Scientifiques et Techniques, correspondant au cycle secondaire inférieur. 8 Après avoir éliminé, par tirage au sort juste avant le début de la correction, une partie des copies des élèves dans chaque classe 6 293 pédagogiques respectives, aux conditions imposées par la recherche. Les discussions, avant et après le cours9 nous ont permis de régulariser certains aspects méthodologiques et disciplinaires litigieux. Observation 2 - Six semaines après le début de l'expérience organisée selon les trois types d'approches pédagogiques mentionnées, les élèves ont reçu des questionnaires portant sur la motivation (M2), sur la compréhension scientifique (C2), sur la socio-contextualisation (c2) et sur la personnalisation (p2). Il est important de souligner que nous préparions à l'avance avec les professeurs du groupe expérimental 1, chaque séquence concernée par les scénarios proposés. Nous voulions ainsi nous assurer de la meilleure application du modèle d'enseignement/apprentissage interactif et intégré. Observation 3 - Après neuf semaines de cours, des questionnaires portant sur la motivation (M3) et sur la compréhension scientifique (C3), à propos des nouveaux chapitres étudiés, et sur la socio-contextualisation (c3), leur ont été distribués. Post-observation - Les élèves ont reçu un autre questionnaire, cinq semaines après l'interruption des observations en classe ; il concernait la motivation (M4), la compréhension (C4) et la socio-contextualisation (c4). A cette étape, ils portaient sur la matière entière parcourue durant toute la période d'expérimentation. 3. PRESENTATION ET DISCUSSION DES RESULTATS Dans cet article nous allons présenter l'impact du dispositif sur la compréhension scientifique ainsi que l'articulation des trois hypothèses. L'impact du dispositif sur la compréhension sera réalisé selon une analyse en trois points : examen des moyennes, examen des tests statistiques et analyses édumétriques. Signalons que nous avons vérifié l’équivalence au départ des groupes qui se sont prêtés à l’expérience. 3.1. Examen des moyennes des résultats aux tests des groupes L'examen des deux graphiques (figures 3a et 3b) nous permet de constater que l'effet du dispositif est bien présent tant au niveau d'étude Lycée que BST. En effet, le score du groupe G1 est nettement supérieur à celui du groupe G2, supérieur à son tour à celui du G3. 10 8 6 4 Scores 2 0 -2 -4 G1 G2 G3 CompréhensionTOT Figure 3a : Score total en compréhension en fonction du dispositif (groupes) (Lycée) 30 25 20 Scores 15 10 5 0 G1 G2 G3 Compréhension Figure 3b : Score total en compréhension en fonction du dispositif (groupes) (BST) Nous constatons aussi (figure 4) que, quelle que soit la composante de la variable compréhension scientifique examinée, l'effet du dispositif pédagogique est favorable au groupe expérimental G1. Le groupe témoin (G3 ) a 9 Il s'agit des cours d'une durée de 2 heures sans interruption. 294 toujours les moins bons résultats tandis que le groupe expérimental 2 (G2) se situe entre les deux (sauf pour la composante AMATH (argumentation mathématique), où le G2 obtient un résultat inférieur au groupe G3. 4,5 3,5 2,5 G1 1,5 G2 0,5 G3 -0,5 -1,5 DIAGR DESEX COHE AMATH Figure 4 : Scores de quatre composantes de la compréhension (T2+T3+T4) en fonction du dispositif (LYCEE) (DIAGR. – diagramme ; DESEX. – description-explication ; COHE. – cohérence ; AMATH. – argumentation mathématique) 3.2. Examens des tests statistiques Le modèle d'analyse de variance hiérarchisée nous a permis de constater et mesurer deux types d'effets : un effet du dispositif expérimental et un effet de la classe à l'intérieur du dispositif. Globalement, nous observons que les deux effets sont très significatifs (p = 0,000) pour toutes les composantes de la compréhension. 3.2.1. Effet du dispositif expérimental Dans le tableau 2 concernant l'effet du dispositif sur la compréhension totale on remarque la supériorité du niveau Lycée sur celui de BST (η2 = 0,324 expliquant 32,4% de la variance enregistrée, contre η2 = 0,236 et 23,6%). Tableau 2 : Tests statistiques - Synthèse des résultats pour la compréhension scientifique MANOVA et ANOVA sur le total compréhension et les 4 composantes (totaux) MANOV A sur les 4 comp.CO MPREHE NSION (Lycée+ BST) ANOVAs sur le TOTAL COMPREH ENS. p 0,000*** 0.00 0** * η2 0,219 0,32 4 p 0,000*** 0,00 0** * η2 0,183 0,39 4 Disposi tif Classe/ Disposi tif *** p < 0,001 ** p < 0,01 * p < 0,05 ! p < 0,10 Lyc ée B S T 0. 0 0 0 * * * 0, 2 3 6 0, 0 0 0 * * * 0, 1 8 9 ANO VA sur DIAG R. ANO VA sur COH E. (Lycé e) (Lycé e) 0,000 *** 0,000 *** 0,000*** 0,302 0,291 0,286 0,101 0,000 *** 0,000 *** 0,000 *** 0,000*** 0,298 0,371 0,320 0,293 ANO VA sur DESE X. (Lycé e) 0,000 *** ANOVA sur AMATH. (Lycée) 295 Cette différence résulte d'abord de la composante qualité des descriptions et des explications (30,2% de variance), puis qualité du diagramme (29,1%), qualité de la cohérence (28,6%). Le résultat de la qualité d'argumentation mathématique est nettement plus faible, expliquant 10,1% de variance. Les résultats à nos épreuves de compréhension ne s'accordent pas avec ceux issus des travaux de Huffman (1997). Celui-ci prétend que la stratégie explicite de résolution des problèmes “ real world problems ”, dont les situationsproblèmes font partie (principalement en ce qui concerne l'insistance sur les aspects qualitatifs de résolution des problèmes), n'améliore pas, davantage que la stratégie traditionnelle du manuel (mettant l'accent sur le traitement quantitatif), la compréhension conceptuelle en physique chez les élèves. Signalons cependant une différence : sa recherche portait uniquement, dans un premier temps, sur l'enseignement explicite de la résolution des problèmes, alors que nous avons utilisé l'enseignement explicite de la résolution des problèmes comme un élément corroboré concomitant, dans le cours habituel, à l'enseignement des concepts et des principes. Par contre, d'autres recherches antérieures (Heller & al. 1992 ; Mestre & al. 1993), indiquent que l'enseignement explicite de la résolution des problèmes peut aider à améliorer quelques-uns des aspects de la performance en résolution des problèmes (par exemple, l'amélioration qualitative d'ensemble de leurs représentations de la physique). Les auteurs notent qu'en proposant aux groupes expérimentaux de reformuler les questions, de s'interroger sur l'approche à suivre, de planifier la recherche des solutions, de dessiner le diagramme, d'interpréter les variables, etc., l'image qu'ils se font de la physique semble s'améliorer davantage que dans l'application de la méthodologie traditionnelle (du manuel). Nos résultats confirment ce dernier constat. Ces mêmes résultats traduisent l'importance des effets du dispositif pédagogique mis en place sur le binôme : capacités à pouvoir décrire-expliquer et à schématiser (ou représenter par un diagramme) des situations concernant certains phénomènes ou concepts physiques. Les résultats montrent en même temps le caractère indissociable de ces deux capacités. 3.2.2. Effet de la classe dans le dispositif Comme la littérature scientifique le laisse entendre, il y a un effet de la classe (dans lequel se trouve cachés10 à la fois un effet professeur et un effet établissement) très important. Il nous apparaît cependant à l'examen du tableau 2, que deux éléments valent d'être soulignés : Premièrement, l’effet de la classe à l’intérieur du dispositif (ce qui se traduit par une hétérogénéité des classes) est plus fort au niveau des lycée (η2 = 0,394 expliquant 39,4% de variance) par rapport à celui au niveau des BST (η2 = 0,189 et 18,9%). Deuxièmement, cet effet et cette hétérogénéité sont plus marquées pour la composante qualité du diagramme (expliquant 37,1% de variance) suivi par celui et celle de la qualité de la cohérence (32,0%), puis par la composante qualité des descriptions et des explications (29,8) et enfin par celle de l'argumentation mathématique (29,3%). Globalement, nos résultats relatifs à l'effet de classe à l'intérieur du dispositif, s'accordent avec la perspective avancée par certains auteurs (Candela 1997). Selon elle, les professeurs, par leurs transformations didactiques, transforment souvent les exercices de résolution de problèmes (situations-problèmes) en démonstrations expérimentales notamment, dans d'autres cas changent les démonstrations (comportant des activités expérimentales) en exercices de résolution de problèmes. D'après sa recherche, réalisée en 1997, Candela estime que la transposition didactique, comprise comme une partie de la construction du savoir en classe, semble être une pratique sociale courante parmi les professeurs. Nos résultats en compréhension scientifique confirment, plus encore que ceux qui concernent la motivation, la grande influence exercée par la qualité professionnelle et l'investissement personnel des enseignants sur les activités qui se déroulent en classe. 3.3. Analyse édumétrique Avant de commencer l'analyse édumétrique quelques considérations relatives à ce type d'analyses s'imposent. A l'évidence, l'analyse de variances suffit à démontrer la valeur statistique des différences quelles que soient les bornes (inférieures et supérieures) de l'échelle de mesure. C'est une approche psychométrique. Les rapports de corrélation η2 issues des analyses des variances permettent déjà une première évaluation statistique de l'ampleur de l'effet expérimental. Il est utile de poursuivre l'exploitation par une analyse secondaire - édumétrique - capable de donner une vue synthétique, une méta-analyse de nos résultats. Cette démarche se justifie car elle nous permet de répondre aux deux questions suivantes : (1) Quelle est l'ampleur et la signification pratique des effets observés ? (et d'affirmer que, par exemple, pour le niveau d'étude a l'effet du dispositif sur la variable x est n fois plus fort que la variable y) ; (2) A quelle distance nos résultats se trouvent-ils du maximum dans les trois groupes G1, G2 et G3 ?. Nous allons affiner l'analyse des différences entre les résultats des groupes (classes) - au travers de l'analyse édumétrique - par le biais des deux indices : (1) indice critériel (ou score critériel) : (2) l'indice de l'ampleur de l'effet. 10 Sans pouvoir distinguer la contribution de l'établissement ou du professeur. 296 L'approche critérielle (typique de l'édumétrie) se distingue de l'approche normative (typique de la psychométrie) par le fait qu'elle compare les performances de l'apprenant non pas à celles des autres membres du groupe mais à la performance maximale attendue. (1) On obtient ainsi, pour une question (ou une épreuve), l'indice critériel (I.C.) ou le score critériel (S.C.), exprimé en pourcentage, faisant le rapport entre le résultat R (concrètement obtenu) et le résultat RM (potentiellement réalisable) : S .C. = R RM 100 Il permet de comparer le taux de réussite à un test, par exemple, (x %) à la performance attendue (100%). Tableau 3 : Les Scores Critériels (S.C.) des taux de réussite (scores exprimés en %) pour la variable compréhension scientifique totale- moyennes/classe et dispositif (LYCEE) n° classe N effectifélèves 1 2 3 4 5 6 22 44 24 24 56 58 Moyenne G1 9 38 10 36 11 40 12 48 13 42 14 49 Moyenne G2 17 38 18 21 19 13 20 40 21 36 22 16 Moyenne G3 SCORE TOTAL BRUT11 Moyenne/classe(M ) 56,84 20,25 37,72 36,15 31,25 26,6 34,80 28,45 24,65 17,85 23,55 13,9 15,5 20,65 16,25 21,55 27,27 14,4 14,05 26,63 20,03 SCORE CRITERIEL S.C. 66,09% 23,55% 43,86% 42,03% 36,34% 30,93% 40,46% 33,08% 28,66% 20,76% 27,38% 16,16% 18,02% 24,01% 18,89% 25,05% 31,70% 16,74% 16,34 30,96% 23,29% Tableau 4 : Les Scores Critériels (S.C.) des taux de réussite (scores exprimés en %) pour la variable compréhension scientifique totale - moyennes/classe et dispositif (BST) n° classe N effectif -élèves 7 21 8 22 Moyenne G1 15 24 16 25 Moyenne G2 23 25 24 25 Moyenne G3 SCORE TOTAL BRUT Moyenne/class e 30,93 19,05 24,99 13,84 21,9 17,87 15,31 13,53 14,42 SCORE CRITERIEL S.C. 46,86% 28,86% 37,86% 20,96% 33,18% 27,08% 23,20% 20,5% 21,84% Nous sommes donc en mesure de comparer (tableau 3 et 4) les scores critériels des taux de réussite pour la compréhension scientifique par rapport à la performance attendue de 100%. C'est ainsi que pour la compréhension totale (Lycée et BST) nous remarquons qu'en dépit de différences remarquables des moyennes de scores totaux, en faveur des groupes expérimentaux MG1 > MG2 > MG3, les S.C. des deux groupes G1 sont inférieurs à 50%. Notons que toutes les questions proposées étaient des questions (des problèmes) à réponses construites, ouvertes à réponses longues : elles exigent la mise en œuvre des processus cognitifs supérieurs12. Parmi les 24 classes du dispositif de recherche, une 11 12 Scores des épreuves de compréhension, qui n'ont pas été ajustés en fonction du degré de difficulté des épreuves utilisées. Par rapport à certains QCM simples, où on peut obtenir des points tout simplement en "tapant au hasard". 297 seule classe obtient un S.C. supérieur à 50%. Ce constat confirme par ailleurs, hélas, les conclusions issues d'autres recherches (Huffman 1998 ; Deltour & Demeuse 1991). La comparaison des S.C. des deux types de classes (Lycées et BST) nous permet de remarquer que n'existe pas de différences révélatrices entre les moyennes des classes et des groupes. Néanmoins nous pouvons remarquer que par rapport aux résultats enregistrés lors de la phase de préexpérimentation (seulement 15% des bonnes réponses en compréhension conceptuelle) les pourcentages de réussite se sont nettement améliorées (du simple au double pour le G2 et du simple au triple pour le G1). (2) Concernant l'Ampleur de l'Effet, chaque fois que l'on compare les résultats d'un groupe expérimental (e) à ceux d'un groupe témoin (t), la différence entre les deux moyennes (Me - Mt) est rapportée à l'écart-type des scores du groupe témoin (σt) dans la formule de Glass (1976) ou des deux groupes rassemblés dans la formule de Hedges13 : A.E. = Me − Mt σt L'Ampleur de l'Effet est donc exprimée en “ unités d'écart-type ” (Leclercq 1999). Glass et ses collaborateurs ont proposé de discuter en termes d'unités exprimées en grade (dans le sens d'année scolaire). Selon l'auteur, l'élève moyen “ gagne ” 10 mois de compétence durant une année scolaire. Par ailleurs on a constaté que dans la plupart des tests de rendement à l'école, un élève moyen d'une classe (par exemple la 4ème) a un score supérieur d'un écart-type par rapport à l'élève moyen de la classe inférieure (la 3ème). Par conséquent l'Ampleur de l'Effet (A.E.) d'une année d'enseignement est approximativement de +1, et celle d'un mois est donc en moyenne de + 0,1 (Leclercq 1999). C'est ainsi que à l'étude des tableaux 5 et 6, il apparaît que le groupe expérimental G1 (Lycée) pratiquant la “ pédagogie renforcée, interactive et d'intégration ” obtient une valeur extrêmement élevée de l'A.E. (+ 1,32) pour la compréhension totale (ce qui traduit un gain approximatif de 1an et 3 mois de travail scolaire concernant cette compétence par rapport à l'évolution du groupe G3). Quoique moindre (+1,24), l’effet reste également très fort pour les BST, ce qui traduit un gain de 1 an et 2 mois par rapport à l’évolution du groupe G3. Tableau 5 : Les indices de l'Ampleur de l'Effet (A.E.) pour la compréhension scientifique totale calculés pour les deux groupes expérimentaux G1 et G2 (LYCEE) MOYEN NES des groupes Ecarttype G3 Ampleur de l'effet (A.E.) COMPR. TOT. G1 = 7,81 G2 = 1,83 G3 = 3,28 σt = 8,42 DESEX. DIAGR. COHE. AMATH. G1 = 3,90 G2 = 0,30 G3 = 0,19 σt = 3,103 G1 = 1,88 G2 = 0,47 G3 = 1,08 σt = 1,84 G1 = 1,56 G2 = 0,70 G3 = 1,28 σt = 2,07 G1 = 0,47 G2 = 0,96 G3 = 0,72 σt = 2,55 A.E.1 +1,32 A.E.2 +0,17 A.E.1 = +1,32 A.E. 2 = +0,16 A.E.1 = +1,61 A.E. 2 = +0,33 A.E.1 = +1,37 A.E. 2 = +0,28 A.E.1 = +0,47 A.E. 2 = 0,09 = = COMPR.TOT.- compréhension totale DESEX.- description-explication DIAGR.- diagramme COHE. – cohérence AMATH. – argumentation mathématique A.E.1 = MG1-MG3/ Ecart-typeG3 ; A.E.2 = MG2-MG3/ Ecart-typeG3 Tableau 6 : Les indices de l'Ampleur de l'Effet (A.E.), pour la compréhension scientifique totale (descriptionexplication), calculés pour les deux groupes expérimentaux G1 et G2 (BST) DESEX. MOYENNES des groupes Ecart-type G3 Ampleur de l'effet (A.E.) G1 = 25,00 G2 = 17,48 G3 = 14,44 σt = 8,50 A.E.1 = +1,24 A.E. 2 = +0,36 13 Il s'agit d'une variante selon laquelle on rapporte la différence des moyennes à l'écart-type des deux distributions fusionnées (celle du groupe témoin et celle du groupe expérimental), (Hedges & Olkin 1985, in Leclercq 1999). 298 Parmi les quatre composantes prises individuellement la valeur A.E. la plus élevée concerne la qualité du diagramme (+ 1,61) pour G1 et (+ 0,33) pour le groupe G2. La valeur de A.E. du groupe G1, traduit, pour cette composante, un gain approximatif de 1 an et 6 mois, par rapport à l'évolution du groupe témoin. Il est intéressant de rappeler quelques valeurs d'ampleurs observées dans d'autres recherches. Dans une méta-analyse regroupant 160 études, Wise & Okey (1983) ont recensé douze comportements d'enseignants ayant un effet sur la performances des élèves en sciences. En moyenne, l'Ampleur de l'Effet varie de +0,90 à +0,18. Les effets dont l'ampleur est parmi la plus élevée sont enregistrés pour : le temps de réflexion laissé aux élèves (+0,90), les indices structurants et les manipulations (+0,57), questionnement (+0,48), l’enquête scientifique (+0,32). Par contre, l'on observe un effet faible des méthodes audiovisuelles (+0,18) sur les performances des élèves en sciences. Avec Leclercq (1999) nous pouvons noter aussi que “ Bangert et al. (1983, 1985) relèvent pour l'enseignement individualisé, comparé au traditionnel collectif, un A.E. de +0,10 (49)14 pour le rendement. A propos du rendement des Utilisations Pédagogiques de l'Ordinateur dans le primaire et secondaire, Bangert et al. (1985) observent également : +0,40 (9) pour l'Enseignement Géré par Ordinateur, +0,36 (17) pour l'Enseignement Assisté par Ordinateur et +0,07 (16) pour l'Enseignement Enrichi par Ordinateur ”. Divers autres auteurs (voir Leclercq, 1999) rapportent les A.E. de mathématiques de +0,14 ; + 0,30 ; +0,38 et +0,47 mais aussi de +0,07 en langues. 3.4. Articulation des trois hypothèses Nous poursuivons notre analyse par l'articulation des trois hypothèses en trois temps: (1) comparaison des variances expliquées des résultats selon le niveau d'étude ; (2) comparaison des valeurs d'ampleur d'effet du dispositif expérimental et (3) comparaison des variances expliquées des résultats entre les deux effets. (1) La lecture du tableau 7 laisse apparaître pour chacun des niveaux d'étude, les différences suivantes : Tableau 7 : Variances des résultats - effet du dispositif - pour les trois variables dépendantes selon le niveau d'études Lycé e BST SCONTEXT.PERS. η2 0,015 (1,5%) 0,149 (14,9%) MOTIV ATION η2 COMPREHE NSION η2 0,084 (8,4%) 0,209 (20,9%) 0,324 (32,4%) 0,236 (23,6%) Au niveau Lycée même une assez faible amélioration de la perception de la contextualisation des contenus (expliquant à peine 1,5% de la variation des résultats) semble être liée à une augmentation plus importante (8,4%) de la motivation à apprendre dont la part d'explication de la variance augmente visiblement. Cela semble intervenir à son tour sur la compréhension scientifique dont le pourcentage impliqué dans la variance des résultats enregistre une très nette augmentation (32,4%). Au niveau BST, une perception plus élevée de la socio-contextualisation des contenus, expliquant 14,9% de la variance des résultats, semble intervenir sur la motivation à apprendre (20,9%) ce qui semble agir à son tour sur la compréhension scientifique (23,6%). Nos résultats sont cohérents avec les corrélations positives suivantes : proposer aux élèves des activités basées sur des situations-problèmes étonnantes inspirées de leur univers quotidien et faisant appel à un raisonnement contextualisé, est associé à des attitudes positives envers l'étude des sciences expérimentales (corrélation entre la socio-contextualisation et la motivation : r = 0,141**), à l'intérêt et la motivation des élèves pour ce type d'étude ce qui permet ainsi aux élèves d'améliorer leur compréhension (corrélation entre la motivation et la compréhension r = 0,205**). Les résultats obtenus permettent d’inférer qu'une pédagogie de type situationnelle renforcée, faisant appel à un dispositif (contenus + stratégies) construit selon le modèle d'apprentissage ILM, améliore la perception de la socio- contextualisation et la personnalisation des contenus disciplinaires, la motivation à apprendre les sciences et la compréhension scientifique des concepts et des phénomènes physiques impliqués. (2) Concernant la comparaison des valeurs d'A.E. les résultats (tableaux 8a et 8b) indiquent qu'au niveau Lycée la valeur de A.E. du dispositif expérimental G1 la plus élevée concerne la variable compréhension scientifique (A.E.1 = + 1,32). 14 Entre parenthèses sont indiquées le nombre d'études. 299 Tableau 8a : Ampleur d'Effet sur les trois variables dépendantes selon le niveau d'études, pour le groupe expérimental G1 (Lycée et BST) Lycée BST MOTIVATIO N A.E. A.E.1 = +0,62 A.E.1 = +1,01 COMPREHE NSION A.E. A.E.1 = +1,32 A.E.1 = +0,88 S-CONTEXT.PERS. A.E. A.E.1 = +0,28 A.E.1 = +0,84 L'effet du dispositif sur la compréhension est 2,13 fois plus fort que sur la motivation (A.E.1 = + 0,62) et 4,71 fois plus fort que sur la socio-contextualisation (A.E.1 = + 0,28). Au niveau BST la valeur de A.E. la plus élevée est celle pour la motivation (A.E.1 = + 1,01). L'effet sur la motivation est 1,15 fois plus fort que sur la compréhension (A.E.1 = + 0,88) et 1,2 fois plus fort que sur la socio-contextualisation (A.E.1 = + 0,84). Tableau 8b : Ampleur d'Effet sur les trois variables dépendantes selon le niveau d'études, pour le groupe expérimental G2 (Lycée et BST) Lycée BST MOTIVATIO N A.E. A.E.2 = +0,36 A.E.2 = +0,48 COMPREHE NSION A.E. A.E.2 = +0,17 A.E.2 = +0,36 S-CONTEXT.PERS. A.E. A.E.2 = +0,05 A.E.2 = +0,54 Pour les groupes expérimentaux 2 (pratiquant une pédagogie situationnelle commune avec jeu de questionsréponses) au niveau Lycée la valeur A.E. la plus élevée concerne la motivation à apprendre (A.E.2 = + 0,36), l'effet du dispositif étant 2,12 fois plus fort que sur la compréhension (+ 0,17) et 7,2 fois plus fort que sur la sociocontextualisation (A.E.2 = + 0,05). Pour le niveau BST les valeurs d'A.E. sont très voisines mais plus petites que pour le groupe G1. Les mesures effectuées indiquent qu'une pédagogie situationnelle renforcée interactive et d'intégration, au niveau Lycée, produit un effet majeur sur la compréhension scientifique (effet 2 fois plus fort comparativement à la motivation et plus 4 fois plus fort comparativement à la socio-contextualisation). Pour les classes BST elle semble induire des effets comparables (mais très élevés) sur les trois variables retenues. (3) Quant à la comparaison des variances des résultats entre les deux effets, l'examen du tableau 9 nous permet de constater que pour la variable motivation l'effet dominant est celui de la classe (expliquant 28% de la variance). L'effet du dispositif est moins important pour les classes de lycée (8,4%) et très important pour les classes de BST (20, 9%). Pour la variable compréhension scientifique, on remarque deux situations différentes selon le niveau d'étude : pour les classes de lycée l'effet de la classe est dominant et explique 39,4% de la variance, mais l'effet du dispositif reste lui aussi très élevé (32,4%). Par contre, pour les BST, l'effet dominant est celui du dispositif (23,6%) alors que celui de la classe reste néanmoins assez important (18,9%). Tableau 9 : Variances des résultats effets du dispositif et de la classe, pour lycée et BST, selon les trois variables dépendantes Effet du dispositif péd. η2 Effet de la classe η2 Lycée BST Lycée BST 0,280a (28%) MOTIVATIO 0,084 0,209 N (8,4%) (20,9%) COMPREHE 0,324 0,236 0,394 0,189 NSION (32,4%) (23,6%) (39,4%) (18,9%) 0,071c S0,015 0,149 0,126b (12,6%) (7,1%) CONTEXT.(1,5%) (14,9%) PERS. a - concerne l'ensemble des classes (Lycée + BST) b - concerne uniquement la contextualisation c - concerne uniquement la contextualisation En ce qui concerne la variable socio-contextualisation et personnalisation nous constatons aussi deux situations : pour les classes de lycée l'effet dominant est celui de la classe (12,6%) tandis que l'effet du dispositif est très faible 300 (1,5%). Au contraire, pour les classes de BST, l'effet principal est celui du dispositif (14,9%) qui dépasse l'effet de la classe (7,1%). Nous pouvons remarquer ainsi qu'au sein du groupe expérimental G1, les classes de BST (13-14 ans) - pour ce qui concerne les variables motivation et socio-contextualisation - sont plus avantagées que les classes du niveau Lycée (16-17 ans). Si on tient compte simultanément des trois variables effets (et malgré les résultats en compréhension plus élevés dans les classes de lycée que dans les classes de BST), nous pouvons formuler l'hypothèse que cette pédagogie dans son ensemble convient plus aux classes de BST qu'à celles de lycée. Au-delà de l'effet remarquable du dispositif pédagogique, les résultats mettent en évidence l'effet extrêmement fort de la classe (effet professeur + effet établissement) à l'intérieur du dispositif. Cette constatation repose le problème du rôle des enseignants. Elle nous interroge sur l'adéquation entre leur formation et les conditions à réunir pour un apprentissage efficace des sciences. Il est dès lors compréhensible que les meilleures performances, observées durant la recherche, soient obtenues par les élèves dont l'enseignant s'est illustré par un degré élevé d'investissement personnel et professionnel. 4. CONCLUSIONS GENERALES 4.1. Implications théoriques Les conclusions générales mettent en évidence deux implications théoriques majeures : (1) la nécessaire prise en compte concomitante des caractéristiques de l'apprenant, de la situation d'apprentissage et du dispositif ; (2) la nécessité de mettre en place un dispositif d'enseignement/apprentissage non-linéaire de type situationnel renforcé intégrant les composantes du modèle ILM -, dont les caractéristiques principales sont : - l'implication affective et cognitive de l'élève, - le va-et-vient permanent entre la théorie et la pratique, principalement, au travers des situations-problèmes, - la mise en place d'un dispositif d'encadrement faisant appel à des interactions diverses. 4.2. Implications méthodologiques Les implications méthodologiques suivantes peuvent être soulignées : (1) Il y a un intérêt manifeste à favoriser les exigences d'une recherche collaborative avec les enseignants dont la plupart étaient maîtres de stages, familiarisés avec la présence de formateurs et de stagiaires. (2) Le traitement concomitant des trois variables (motivation, compréhension et socio-contextualisation) semble s'être avéré pertinent pour assurer la cohérence entre le cadre théorique et l'analyse des résultats. (3) Une conception de la recherche, accordant des approches théoriques et empiriques mais aussi recourant à une double analyse psychomètrique et édumétrique, pour mettre en évidence et articuler les effets comparatifs des différents types de dispositifs. 4.3. Implications sur le plan pratique A partir des résultats dégagés tant au niveau théorique qu'empirique plusieurs pistes s'ouvrent pour mettre en place en classes de sciences, des dispositifs didactiques susceptibles de favoriser l’acquisition des connaissances applicables et transférables (des compétences) : des apprentissages qui ont du sens… pour les apprenants, des situations-problèmes contextualisées… à la vie de tous les jours, des stratégies d'enseignement/apprentissage variées, le recours à des phases de schématisation-structuration. 4.4. Limites méthodologiques et humaines Il nous paraît important de rappeler que les instruments, tels qu'ils ont été conçus, présentent des limites. En dépit de notre souci de rigueur scientifique, notre démarche manifeste des limites méthodologiques et humaines. L'investigation des trois variables - si importantes - auraient imposé un plus grand nombre de questions et davantage de précisions, au risque de rendre les épreuves et les questionnaires trop longs et de soustraire du programme de cours normal trop d'heures. Le volet concernant les limites humaines a pu être étudié grâce aux éléments de réponses fournies par les professeurs participants (au terme de la recherche), portant sur : les réactions des élèves face aux activités proposées, le désir des enseignants de modifier leur pédagogie et l'environnement d'apprentissage des élèves, la qualité des connaissances des élèves en physique, la réutilisation d'activités de ce type en classe pour des cours ultérieurs. Ils y étaient également invités à formuler leurs commentaires sur les activités didactiques proposées. A l'étude critique de ces informations, deux thèmes ressortent principalement : le thème de la rupture, de la découverte d'une pratique qui remet en question la manière habituelle de travailler, 301 le thème des conditions structurelles (cités de manière répétitive comme par exemple le manque de temps pour accomplir le programme) ce qui laisse entendre que… ce n'est donc pas de leur faute si à l'avenir ils reviendront à leur habituelle méthode pédagogique. Loin d'être offensé par ces réponses, les chercheurs en déduisent que les enseignants avec lesquels ils ont collaboré sont consciencieux, mais hélas soumis à des décisions administratives souvent rétives aux innovations. Ils peuvent aussi, sans douter de la bonne volonté des professeurs, prendre conscience que leur méthode se heurte à leurs propres limites et peur : peur de la nouveauté du travail et de l'inévitable investissement qu'elle exige. Nous concluons ainsi qu'une méthode si probante soit-elle doit tenir compte de la dimension humaine et sociale de l'entreprise. Remerciements Nous ne voudrions pas passer sous silence la participation dévouée des directeurs et des vingt-quatre professeurscollaborateurs et également de celle de leurs élèves qui se sont montrés particulièrement coopérants. Ils nous ont accueilli à maintes reprises dans leurs établissements et leurs classes pour nous permettre de recueillir les données qui constituent la base de notre travail. Bibliographie Anderson, C.W. & Roth, K. J. (1989). Teaching for meaningful understanding and self-regulated learning of science. In J. Brophy (Ed), Teaching for meaningful understanding and self-regulated learning (pp.265-309). Greenwich, CT : JAI Press. Barth, B.-M. (1993). Le savoir en construction. Former à une pédagogie de la compréhension. Paris : RETZ. Brophy, J. (1987). Socializing student motivation to learn. In M.L. Maehr & D.A. Kleiber (Ets.), Advances in motivation and achievement (Vol. 1) (pp. 181-210). Greenwich, CT : JAI Press. Candela, A. (1997). Demonstrations and problem-Solving Exercices in School Science : Their Transformation within the Mexican Elementary School Classroom. Science Education, 81, pp. 497-512. Deltour, N., & Demeuse, M. (1991). Projet pilotage : contrôle de la qualité de l'enseignement des sciences. Phase I : deuxième année de l'enseignement secondaire, Rapport final, SEDEP, Ministère de l'Education et de la Recherche scientifique de la Communauté française, 129. Galatanu, O. (2000). Signification, sens et construction discursive de soi et du monde. In J.-M. Barbier, & O. Galatanu, (Eds.), Signification, sens, formation (pp. 25-44). Paris : Presses Universitaires de France. Glass, G.V. (1976). Primary, secondary, and meta-analysis of research. Educational Researcher, 5, 3-8. Heller, P., & al. (1992). Teaching problem solving throught cooperative grouping. Part 1 : Group versus individual problem solving. American Journal of Physics, 60, 627-636. Huffman, D. (1997). Effect of Explicit Problem Solving Instruction on Hight Scool Students' Problem-Solving Performance and Conceptual Understanding of Physics. Journal of Research in Science Teaching, 34 (6), pp. 551570. Leclercq, D. (1999). Edumétrie et Docimologie. Université de Liège, STE : document inédit. Lee, O., & Brophy, J. (1996). Motivational Patterns Observed in Sixth-Grade Science Classrooms. Journal of Research in Science Teaching, 33 (3), pp.303-318. Louis, R., & al. (1998). Rapport de recherche I. Elaboration et validation d'un instrument de mesure de la motivation des élèves au regard du français, langue maternelle. Faculté d'Education Université de Shebrooke : document inédit. Mestre, J.P. & al. (1993). Promoting skilled problem-solving behavior among beginning physics students. Journal of Research in Science Teaching, 30, 303-317. Palincsar, A.S. & Brown, A. L. (1984). Reciprocal teaching of comprehension-fostering and comprehensionmonitoring activities. Cognition and Instruction, 1 (2); 117-175. Ratziu, I. (2000). Les effets d’une pédagogie intéractive et d’intégration dans l’enseignement des sciences expérimentales. Thèse de doctorat. Louvain-la-Neuve : Université Catholique de Louvain, Faculté de psychologie et des Sciences de l’Education. Tennyson, R.D. & Nielsen, M. (1998). Complexity Theory : Inclusion of the Affective Domain in an Interactive Learning Model for Instructional Design. Educational Technology, 38 (6), 7-12. Viau, R. (1994). La motivation en contexte scolaire. Bruxelles : De Boeck - Wesmael. Wise, K.C. & Okey, J. R. (1983). A meta-analysis of the effects of various science teaching strategies on achievement. Journal of Research in Science Teaching, vol. 20, n°5, 419-435.