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Groupe traduction PHARMATERMMD Bulletin terminologique de l’industrie pharmaceutique Volume 21, no 2, 2010 Si la tendance se maintient… Elle ne se maintient pas. Oubliez donc les élections! Le présent texte porte sur l’utilisation d’elective et de selective, et de leurs correspondants français. Nous verrons d’abord les définitions des différents dictionnaires pour ensuite nous pencher sur les contextes d’utilisation de chacun. Enfin, nous aborderons brièvement leur fréquence d’emploi. Elective Voyons d’abord la définition du Dorland’s : « 1. tending to combine with or act on one substance rather than another. 2. subject to the choice or decision of the patient or physician; applied to procedures that are advantageous to the patient but not urgent1. » Une définition semblable figure dans MedTerms, mais elle est très vague et l’explication qui l’acccompagne correspond à la deuxième acception du Dorland’s : « In medicine, something chosen (elected). An elective procedure is […]2. » Du côté des contextes d’utilisation, on retrouve généralement ce terme associé à un acte médical, qui est souvent surgery : elective surgery. Dans Termium Plus3, on recense cependant d’autres emplois : elective induction, elective abortion, elective Caesarean section, elective coronary artery bypass grafting, elective treatment, qui correspondent respectivement à déclenchement programmé, interruption volontaire de grossesse, césarienne de convenance, pontage aorto-coronarien par greffe non urgent et traitement facultatif. Elective est aussi utilisé dans le nom d’un trouble, soit elective mutism4, qui désigne une forme de mutisme dans laquelle on croit l’incapacité de parler attribuable à la mauvaise volonté du patient et qui aura comme correspondants français mutisme électif ou mutisme sélectif, en psychiatrie, comme nous le verrons plus loin. En français, électivité a un sens voisin de la première acception d’elective du Dorland’s : « Propriété de certaines substances (propriété élective) de se fixer sur un type déterminé de cellules ou de tissus5. » La définition du Garnier-Delamare est semblable, mais précise l’aspect d’exclusivité du phénomène : « Propriété de certaines substances de se fixer à des liquides biologiques ou à des éléments anatomiques déterminés, à l’exclusion des autres6. » Électivité n’est pas défini dans le Flammarion ni dans le Larousse médical. Dans les deux ouvrages cités au début du paragraphe précédent, électivité ne s’applique jamais à un acte médical, par exemple à une intervention chirurgicale. D’ailleurs à l’entrée elective, Termium Plus7 propose ajournable comme correspondant d’elective et ajoute l’observation suivante : « En médecine, an “elective surgery”, an “elective admission”, c’est une “intervention ajournable” ou une “hospitalisation ajournable”. » Dans une autre fiche intitulée elective surgery, la même source donne opération ou intervention chirurgicale non urgente. Employé dans ce sens, électif semble donc considéré comme un anglicisme. Dans le Garnier-Delamare, aux entrées récepteur, récepteur hormonal et récepteur morphinique figurent respectivement les contextes suivants d’électivité ou de ses dérivés : « 1º Organe, tissu ou cellule […] influencé électivement par une substance […]8 »; « Structure moléculaire […] sensible de manière élective à l’action d’une hormone9. »; « Structure moléculaire […] fixant électivement la morphine et des substances (médiateurs chimiques) d’action analogue […]10. » En gynécologie, on rencontre le terme associé à transfert (transfert électif d’un embryon11), qui n’est pas un transfert non urgent, mais désigne plutôt une technique dans laquelle un seul embryon est implanté dans l’utérus. Cependant, nous verrons plus loin que certains utiliseront sélectif (transfert sélectif) pour désigner la même notion. Électif est aussi employé dans des contextes qui ont trait à des maladies touchant surtout certaines parties du corps plutôt que d’autres. Ainsi en pathologie, on voit trouble électif : « […] qui n’affecte pas l’ensemble d’une fonction. Amnésie élective12 »; en rhumatologie, formes électives proximales13 qui désignent des formes de polyarthrite rhumatoïde dans laquelle ce sont surtout les articulations proximales qui sont atteintes; en dermatologie, atteinte élective14 des coudes, des genoux, des faces antérieures des tibias, etc., dans le psoriasis. Selective Dans le Dorland’s, les définitions de selectivity et de selective sont respectivement les suivantes : « in pharmacology, the degree to which a dose of a drug produces the desired effect in relation to adverse effect15. » et « 1. having a high degree of selectivity. 2. discriminating; making a choice from multiple alternatives; singling out in preference16. » La deuxième acception de selective est semblable aux deux acceptions d’elective, puisqu’elle implique un choix, une préférence, que celle-ci soit celle d’une substance pour un récepteur (selective NPY receptor Y-5 antagonists17) ou d’un médecin pour un traitement (selective therapies18). Signalons que dans toutes les sources de langue anglaise que nous avons consultées, nous n’avons pas trouvé d’exemple de l’utilisation de selectivity pris dans le sens d’une comparaison entre l’efficacité d’un médicament et la survenue d’effets indésirables, soit la première acception de la définition du Dorland’s. Parmi les principaux dictionnaires médicaux de langue française, seul le Larousse donne une définition de sélectif. Cependant, le sens du terme est très spécifique et n’a rien à voir avec le caractère non urgent d’un traitement ni l’affinité d’une substance pour un récepteur : « Qualifie une intervention (chirurgicale ou contrôlée radiologiquement) agissant sur une partie précise de l’organisme. Ce terme est en particulier employé pour désigner la section de quelques fibres nerveuses (par opposition à la section de tout un nerf) qui exercent une action spécifique. Les opérations sélectives permettent de ne pas modifier le fonctionnement des autres organes, dont les fibres nerveuses sont laissées en place19. » Par contre, nombreux sont les contextes où sélectif se rapporte à l’affinité particulière d’une substance pour une molécule, un récepteur ou même un organe : inhibiteurs sélectifs de la 11 HDS120; « […] substances qui agiraient sélectivement sur les ß1-récepteurs21 »; cardiosélectif22, agent bloquant sélectif du recaptage de la sérotonine23. Sélectif, employé dans ce sens, est synonyme d’électif. Le terme apparaît aussi dans d’autres domaines que la pharmacologie. Dans Termium Plus24, on le retrouve, entre autres, en immunologie (selective theory of antibody production), en radiologie (selective coronary graft angiography, selective localization [of the radioactive agent], dans les épreuves de laboratoire (selective parathyroid venous sampling for PTH measurement). Ces termes correspondent respectivement à théorie sélective [de la production des anticorps], graphographie coronaire sélective, localisation sélective [d’un élément radioactif], prélèvement sélectif veineux pour doser la parathormone. Il figure aussi en médecine de la reproduction : transfert sélectif d’un embryon25. Bref, l’emploi de sélectif est très répandu dans de nombreuses spécialités médicales. Fréquence d’emploi d’électif et de sélectif Une étude exhaustive de la fréquence d’emploi des deux termes dépasse le cadre du présent article. Cependant, certaines tendances semblent se dessiner. Par exemple, Ovid Site Search relève cinq articles comportant elective26 dans leur titre contre 19 pour selective27. Dans MedicineNet Search, il s’agit de 86 occurrences d’elective28 contre 279 pour selective29. De plus, dans les cas où elective est utilisé, la plupart du temps il est question d’actes médicaux (intervention ou procedure), sauf pour elective mutism, alors que selective apparaît dans différents domaines. Dans les articles français de la base de données article@inist, on obtient trois articles pour électif30 et dix pour sélectif31. Électif semble donc moins employé que sélectif. Conclusion L’emploi d’électif dans le sens de non urgent ou facultatif demeure un anglicisme. D’autre part, sélectif est synonyme d’électif lorsqu’il désigne l’affinité particulière d’une substance pour un récepteur, un liquide biologique ou un organe. Enfin, sélectif se retrouve dans de nombreux domaines, dans les contextes où il est question d’un choix, et les utilisateurs semblent l’employer plus fréquemment qu’électif. Donc, électif n’est plus « tendance ». Oublions les élections et employons sélectif. Louise LeBlanc Chargée de cours Université de Montréal Références 1. Dorland’s Illustrated Medical Dictionary, 31st edition, Philadelphia, Saunders, 2007, p. 606. 2. http://www.medterms.com/script/main/art.asp?. 3. http://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alphafra.html?lang=fra&srchxt=ELECTIVE. 4. http://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alphafra.html?lang=fra&srchxt=ELECTIVE. 5. Manuila, L. et coll., Dictionnaire médical Manuila, 10e édition, Paris, Masson, 2004, p. 160. 6. Garnier, Marcel et coll., Dictionnaire illustré des termes de médecine, 29e édition, Paris, Maloine, 2006, p. 271. 7. http://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alphafra.html?lang=fra&srchxt=ELECTIVE. 8. Garnier, Marcel et coll., op. cit., p. 742. 9. Ibid., p. 743. 10. Ibid. 11. http://wwwsciencedirect.com/science?_ob=ArticleURL&. 12. Le Nouveau Petit Robert. Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Dictionnaires Le Robert, 2003, p. 847. 13. http://www.medix.free.fr/cours/polyarthrite-rhumatoïde.php. 14. http://www-sante.ujfgrenoble.fr/sante/corpus/disciplines/dermato/psoriasis/123/lecon12. 15. Dorland’s Illustrated Medical Dictionary, op. cit., p. 1714. 16. Ibid. 17. http://www.ovid.com/site/catalog/Book/4517.jsp. 18. http://www.ovid.com/site/catalog/Book/3886.jsp. 19. Larousse médical, 3e édition, Paris, Larousse/VUEF, 2003, p. 933. 20. http://services.inist.fr/cgi-bin/public/views_doc. 21. Dictionnaire de médecine Flammarion, 8e édition, Paris, Flammarion MédecineSciences, 2008, p. 27. 22. Garnier, Marcel et coll., op. cit., p. 140. 23. http://www btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alpha-fra.html?lang=fra&srchxt =SELECTIVE. 24. http://www.btb.termiumplus.gc.ca/tpv2alpha/alpha-fra.html?lang=fra&srchxt =SELECTIVE. 25. http://www.sciencedirect.com/science?_ob=ArticleURL&_udi=B6W8J. 26. http://www.ovid.com/cgibin/texis.cgi/webinator/search5/?pr=newovid2&order=r&query. 27. http://www.ovid.com/cgibin/texis.cgi/webinator/search5/?pr=newovid2&order=r&query. 28. http://search.medicinenet.com/search/search_results/default.aspx?query=Elective&search. 29. http://search.medicinenet.com/search/search_results/default.aspx?Searchwhat=1&query. 30. Inist-Cnrs - Services@inist, Artcile@inist, Compte@inist, Form@inist. 31. Inist-Cnrs - Services@inist, Artcile@inist, Compte@inist, Form@inist. Dépôt légal – 1er trimestre 1990 ISSN 0847 513X Copyright© 2010 Tous droits réservés. Le contenu de cette publication ne peut être reproduit en tout ni en partie sans le consentement écrit du Groupe traduction. Les opinions exprimées dans cette publication n’engagent en rien Les compagnies de recherche pharmaceutique du Canada. Ont collaboré à ce numéro de Pharmaterm : Josée Caron, Pfizer Canada Inc. Manon Genin, Pfizer Canada Inc. Isabelle Lapointe, Pfizer Canada Inc. Pour consulter Pharmaterm en ligne : www.groupetraduction.ca.