La vision du monde chez Maupassant révèle un pessimisme

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La vision du monde chez Maupassant révèle un pessimisme
La vision du monde chez Maupassant révèle un pessimisme invétéré, qui s’est
exprimé sous des formes diverses au cours de sa carrière littéraire.
LA NÉGATION DE L’ESPÉRANCE
• Maupassant nie tout ce qui peut entretenir l’espérance chez les hommes.
• Il nie également la Providence, car Dieu « est ignorant de ce qu’il fait » ;
• Il nie la croyance au génie humain, car l’homme n’est rien de plus qu'une
bête, à peine supérieur aux autres : « Nous ne savons rien, nous ne devinons
rien, nous n’imaginons rien. »
• La philosophie donne des explications saugrenues de problèmes dont la
solution nous échappera toujours ; la science se heurte aussi à
l’inconnaissance ;
• La religion est une duperie.
• Quant à la vie sociale, elle étale le spectacle affreux de « l’éternelle,
universelle, indestructible et omniprésente bêtise ».
• Chaque être est isolé, impénétrable pour son semblable : aussi les liens qui
se nouent entre les humains, amour et amitié, n’offrent que des consolations
illusoires.
L’EXPESSION DU DÉSESPOIR
• Le sarcasme. Maupassant sonde les bassesses du cœur avec une délectation
vengeresse, grossit le trait jusqu’à la caricature et se plaît à scandaliser.
• La pitié. Lorsque sa santé s’altère, Maupassant tend à quitter le ton
sarcastique pour se pencher avec sympathie sur la misère humaine. Il peint
des bourgeois crédules et niais, mais sans s’égayer à leurs dépens ; il évoque
avec émotion contenue la vie misérable des vieilles filles, des malades, des
vieillards et des gueux.
• L’angoisse. Cependant, le progrès de son mal et l’abus des drogues
provoquent en lui de fréquents états d’angoisse, dont il cultive les affres et les
effets délirants. Plusieurs contes témoignent de son goût morbide pour la
peur : il analyse ce sentiment irraisonné qui s’empare parfois de l’âme
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anxieuse et la fait frissonner comme si une menace pesait sur elle (La Peur);
il peint des névrosés qui redoutent le bruit, la solitude et la nuit (Apparition,
Lui ?); un obsédé qui se convainc qu’un être invisible hante sa maison et
s’acharne contre lui (Le Horla). Tous ces récits traduisent sous une forme
dramatique l’horreur anxieuse de Maupassant devant le mystère.
Tous ces contes, une trentaine en tout, écrits vers la fin de la vie de l’auteur,
sont inspirés par l’angoisse, la hantise de l’invisible, l’idée du suicide (La
Peur, Lui ?, Solitude, Le Horla, L’Endormeuse).
L’ART DE MAUPASSANT
Ses idées esthétiques
• Il est un des maîtres du conte fantastique et son art rappelle celui d’Edgar
Poe. Écrits surtout dans ces dernières années, les contes de la peur de
l’angoisse sont inspirés par ses troubles nerveux, ses hallucinations, son
inquiétude devant le mystère.
• Maupassant estime légitime le désir qu’ont les réalistes et les naturalistes de
« faire vrai », mais il conteste leurs prétentions à exprimer la seule vérité et la
vérité tout entière.
• L’art est « la vérité choisie et expressive » : le romancier ou le conteur devra
donc éliminer tout ce qui n’est pas utile à son sujet et mettre en pleine
lumière, par la seule adresse de la composition, ce qui est essentiel et
caractéristique.
• « Le réaliste, s’il est artiste, cherchera non pas à nous donner la
photographie de la vie, mais à nous en donner la vision plus complète, plus
saisissante, plus probante que la réalité même. »
La maîtrise du conteur
Les contes de Maupassant illustrent ses conceptions esthétiques. Grâce à un
choix judicieux de moyens, ils donnent une impression de simplicité,
d’équilibre et de condensation.
• L’auteur fixe d’abord son décor avec une brièveté expressive : cour de
ferme, place de marché, jardin public, compartiment de chemin de fer.
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• Il campe ensuite ses personnages : quelques particularités physiques,
quelques gestes familiers, etc.
• Il entame finalement son récit, volontairement simple et même banal : une
« histoire arrivée » de pêche ou de chasse ; un fait divers de la vie
campagnarde ou de la vie parisienne ; mais bientôt, des incidents imprévus
précipitent l’action vers sa conclusion inéluctable, souvent tragique, sans que
l’auteur se départisse de son calme apparent.
• Le style de Maupassant confirme cette impression de sobriété expressive.
L’écrivain ne tire aucun effet ni de la sonorité des mots, ni de leur
agencement dans la phrase ; il suit la ligne la plus banale : pourtant, sous sa
simplicité familière et sa limpidité alerte, il cache une technique d’une
étonnante sûreté.

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