Monographie numéro 35 - Tumeur de la parotide
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Monographie numéro 35 - Tumeur de la parotide
Remerciements A l’équipe du CCA et à son président Monsieur G. CHALLIER pour son partenariat exemplaire avec tous les secteurs de l’OTO-RHINO-LARYNGOLOGIE. A l’équipe du CCA-SUD, David MAUMEJEAN, Paolo CERIBELLI. Au Docteur Jérôme PARIS sans qui ce travail n’aurait pas eu tout à fait la même forme. 2 PRÉFACE La prise en charge de la pathologie tumorale parotidienne représente un des problèmes complexes de la spécialité car il faut disposer d’une somme de connaissances importante en anatomie chirurgicale et en histo-pathologie pour aborder cette situation. Il faut également maîtriser une technique opératoire précise car les différents types de parotidectomie sont parfaitement codifiés. Ces connaissances indispensables sont rappelées de façon la plus didactique possible à l’aide d’une importante iconographie. Le tissu salivaire est capable de produire une grande variété de tumeurs au comportement évolutif très variable avec un mode d’expression clinique souvent stéréotypée faite d’une masse indolore asymptomatique de l’aire parotidienne. Les limites de l’examen clinique ont entraîné le développement de méthodes diagnostiques complémentaires comme la cytoponction et le recours à l’imagerie par résonance magnétique nucléaire. L’intérêt de ces examens réside dans leur pouvoir de détection de certaines tumeurs malignes à présentation clinique bénigne. De futurs travaux seront nécessaires pour déterminer la valeur de la cytologie par rapport à l’IRM. En effet, l’IRM apparaît très compétitive par rapport à la cytoponction quant au diagnostic de nature et procure de plus une information anatomique précise. Le traitement chirurgical des adénomes pléomorphes a toujours fait l’objet de nombreuses controverses car le véritable enjeu de l’intervention initiale réside dans le risque de récidive. Cette éventualité reste un problème majeur du fait des difficultés de la chirurgie secondaire. La prise en charge d’une récidive n’est pas univoque et les différentes présentations cliniques et leurs modalités de prise en charge chirurgicale sont présentées dans ce travail. Les connaissances concernant la prévention du risque de récidive ont progressé ces dernières années et il apparaît que la capsule tumorale et son environnement jouent un rôle majeur dans la genèse des récidives. En effet, l’analyse histo-morphologique a mis en évidence la fréquence de pseudo-podes et de nodules satellites dans l’environnement péri-capsulaire. Ces éléments seraient responsables d’un essaimage cellulaire par micro-rupture capsulaire lors de la dissection chirurgicale passant au contact de la tumeur en particulier lorsque la capsule est exposée. A l’heure actuelle, la plupart des auteurs considèrent que les récidives sont en rapport avec des micro ruptures et macro ruptures capsulaires. La mise en place de compte rendu opératoire plus précis indiquant la survenue ou non d’une exposition capsulaire, sa surface ainsi que la mise en place d’un protocole d’étude anatomopathologique indiquant le type d’adénome pléomorphe, les caractéristiques d’épaisseur capsulaire et d’environnement péri-tumoral sont indispensables pour valider cette hypothèse. Les gestes d’énucléation et d’énucléo-résection sont à bannir et le traitement chirurgical des adénomes pléomorphes repose sur la réalisation d’une parotidectomie exo faciale ou totale dépendant de la localisation tumorale et de la survenue ou non de l’exposition de la capsule. 3 PRÉFACE Les tumeurs malignes de la parotide constituent une entité relativement rare et deux types de présentation clinique doivent être différenciés. Les tumeurs malignes avérées, et les tumeurs malignes à présentation clinique bénigne. C’est dans ce cadre que la cytoponction et l’IRM optimisent le plus nettement l’approche diagnostique de la malignité. L’appréciation du stade tumoral ainsi que celui du grade histologique constituent des facteurs qui influent la stratégie thérapeutique chirurgicale et le traitement radiothérapique complémentaire. La conservation, la réparation et la reconstruction du nerf facial constituent des notions fondamentales de la chirurgie parotidienne. Elles sont rappelées dans ce travail ainsi que l’apport plus récent du monitorage. Le dernier chapitre envisage les conditions médico-légales. L’information du patient concernant sa pathologie est prévue par le législateur. Il apparaît donc nécessaire de souligner les problèmes essentiels concernant l’aspect médico-légal tant au niveau du diagnostic qu’à celui du traitement dans le cas particulier de la chirurgie parotidienne. P. GEHANNO 4 B. GUERRIER J.J. PESSEY M.ZANARET AUTEURS & CO-AUTEURS n Professeur P. GEHANNO Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Chef de Service ORL Hôpital Bichat-Claude Bernard 46, rue Henri Huchard 75877 PARIS Cedex 18 e-mail : [email protected] n Professeur B. GUERRIER Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Chef de Service ORL et Chirurgie Cervico-Faciale A Hôpital Gui de Chauliac Avenue Augustin Fliche 34059 MONTPELLIER E-mail : [email protected] n Professeur J.J. PESSEY Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Service d'ORL et de Chirurgie Cervico-Faciale Centre Hospitalier Rangueil-Larrey 1, avenue Jean-Poulhès - TSA 50032 31059 TOULOUSE Cedex E-mail : [email protected] n Professeur M. ZANARET Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Chef de Service ORL CHU Timone 264, rue Saint-Pierre 13385 MARSEILLE Cedex 05 e-mail : [email protected] n Professeur B. BARRY Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Service d'ORL Hôpital Bichat-Claude Bernard 46, rue Henri Huchard 75877 PARIS Cedex 18 e-mail : [email protected] n Professeur A. GIOVANNI Professeur des Universités - Praticien Hospitalier Service d'ORL CHU Timone 264, rue Saint-Pierre 13385 MARSEILLE Cedex 05 e-mail : [email protected] 5 n Docteur M.A. CHRESTIAN Maître de Conférence des Universités - Praticien Hospitalier Service d'anatomopathologie - Professeur PELLISSIER CHU Timone 264, rue Saint-Pierre 13385 MARSEILLE Cedex 05 e-mail : [email protected] n Docteur C. BLANCHET Chef de Clinique-Assistant Hospitalo-Universitaire Service ORL et Chirurgie Cervico-faciale A Hôpital Gui de Chauliac Avenue Augustin Fliche 34059 MONTPELLIER e-mail : [email protected] n Docteur M. MAKEIEFF Patricien Hospitalier Service ORL et Chirurgie Cervico-faciale A Hôpital Gui de Chauliac Avenue Augustin Fliche 34059 MONTPELLIER E-mail : [email protected] n Docteur R. GARREL Chef de Clinique-Assistant Hospitalo-Universitaire Service ORL et Chirurgie Cervico-faciale A Hôpital Gui de Chauliac Avenue Augustin Fliche 34059 MONTPELLIER E-mail : [email protected] n Docteur F. MICHENET Chef de Clinique-Assistant Hospitalo-Universitaire Service ORL Centre Hospitalier Rangueil 1, avenue Jean-Poulhès 31403 TOULOUSE Cedex 4 e-mail : [email protected] n Docteur J. PARIS Chef de Clinique-Assistant Hospitalo-Universitaire Fédération ORL CHU Timone 264, rue Saint-Pierre 13385 MARSEILLE Cedex 05 e-mail : [email protected] n Docteur A. GOZLAN Chef de Clinique-Assistant Hospitalo-Universitaire Service de Radiologie - Professeur JOFFRE Centre Hospitalier Rangueil 1, avenue Jean-Poulhès 31403 TOULOUSE Cedex 4 e-mail : [email protected] 6 TABLE DES MATIÈRES PRÉFACE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 AUTEURS & CO-AUTEURS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 HISTORIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 I - HISTOIRE DE LA CONNAISSANCE ANATOMIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 II - HISTOIRE DE LA CHIRURGIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 III - HISTOIRE DE LA PATHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES . . . . . . . . . . 12 . . I - LIMITES ET RAPPORTS DE LA RÉGION PAROTIDIENNE II - CONTENU DE LA LOGE PAROTIDIENNE . . . . . . . . A - La glande parotide . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - Le nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - Le nerf grand auriculaire . . . . . . . . . . . . . . . . . D - Nerf auriculo-temporal . . . . . . . . . . . . . . . . . . E - Les vaisseaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . F - Les lymphatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III - ANATOMIE RADIOLOGIQUE . . . . . . . . . . . . . . . IV - CONSIDÉRATIONS D'ANATOMIE CHIRURGICALE . . . A - Le plan de couverture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - La dissection du nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . ANATOMIE CHIRURGICALE DE LA RÉGION PAROTIDIENNE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15 15 17 17 18 18 18 18 19 20 21 21 22 ANATOMO-PATHOLOGIE DES TUMEURS PAROTIDIENNES . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 I - HISTOLOGIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 A - TUMEURS BÉNIGNES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1) - Adénome pléiomorphe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2) - Tumeur de Warthin ou Cystadénolymphome . . . . . . . . 3) - Myoépithéliome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4) - Adénome à cellules basales . . . . . . . . . . . . . . . . . 5) - Oncocytome . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - TUMEURS MALIGNES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1) - Adénocarcinome à cellules acineuses . . . . . . . . . . . . 2) - Carcinome muco-épidermoïde . . . . . . . . . . . . . . . . 3) - Carcinome Adénoïde Kystique (CAK) . . . . . . . . . . . . 4) - Tumeur mixte maligne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5) - Adénocarcinomes S.A.I. (sans autre critère d’identification) 6) - Métastases . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - PATHOLOGIE LYMPHOÏDE DE LA PAROTIDE . . . . . . . . II. ANATOMO-PATHOLOGIE PRATIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . A - LA CYTOLOGIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - MACROSCOPIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - LA BIOPSIE EXTEMPORANÉE . . . . . . . . . . . . . . . . . D - L’IMMUNO-MARQUAGE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 28 31 32 33 34 35 35 36 38 39 40 41 42 43 43 43 44 45 7 TA B L E D E S M A TI È R E S EXPLORATION RADIOLOGIQUE DE LA GLANDE PAROTIDE . . . . . . . . . . . . . . . . 47 I - LA SIALOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II - LA SCINTIGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III - L’ÉCHOGRAPHIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . IV - LA TOMODENSITOMÉTRIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . V - L’IMAGERIE PAR RÉSONANCE MAGNÉTIQUE : IRM . . . . . . . A - Caractéristiques IRM de la région parotidienne non pathologique B - IRM et pathologie tumorale maligne . . . . . . . . . . . . . . . . C - IRM et pathologie tumorale bénigne . . . . . . . . . . . . . . . . VI - APPROCHE RADIOLOGIQUE COMPARATIVE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47 47 47 48 49 50 51 53 57 LES TUMEURS BÉNIGNES : PRÉSENTATION CLINIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59 LES TUMEURS MALIGNES : PRÉSENTATION CLINIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 I - DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES GÉNÉRALES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 II - EXAMEN CLINIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63 III - VALEUR DIAGNOSTIQUE DE L’EXAMEN CLINIQUE . . . . . . . . . . . . . . 65 TECHNIQUE CHIRURGICALE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 I - PAROTIDECTOMIES EXO-FACIALE ET TOTALE . . . . . . . . . . . . . 1 - Préparation de la région parotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 - Instrumentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 - Installation du malade . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4 - Incision . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5 - Décollement du lambeau cutané . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6 - Repérage et isolement du ventre postérieur du muscle digastrique . . . 7 - Décollement du conduit cartilagineux jusqu’au processus de Schwalbe 8 - Découverte du tronc du nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 - Ablation du tissu parotidien sous facial . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 - Fermeture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 - Soins post-opératoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II - PAROTIDECTOMIE POLAIRE INFÉRIEURE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 69 69 69 70 70 71 72 73 74 79 80 80 81 VARIANTES TECHNIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 I - INCISION CUTANÉE . . . . . . . . . . . . . . . II - LE LAMBEAU DE SMAS . . . . . . . . . . . . . III - DISSECTION RÉTROGRADE DU NERF FACIAL IV - DÉPRESSION RÉTRO-AURICULAIRE . . . . . V - PLEXUS CERVICAL SUPERFICIEL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87 87 88 91 92 TRAITEMENT DES TUMEURS BÉNIGNES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 Cystadénolymphomes ou Tumeur de Warthin . . . . . . . . . . . Adénomes pléiomorphes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Kystes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Autres tumeurs bénignes : adénomes monomorphes, oncocytomes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 95 95 96 96 TRAITEMENT DES TUMEURS MALIGNES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 I - PRISE EN CHARGE DES TUMEURS MALIGNES D'ASPECT CLINIQUE BÉNIN A - L'attitude vis à vis de la tumeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - L'attitude sur le nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - L'attitude sur les aires ganglionnaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . D - La radiothérapie post-opératoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 . . . . . . . . . . 97 97 97 98 98 II - PRISE EN CHARGE DES TUMEURS MALIGNES AVÉRÉES . . . . . . . . . . . . 99 A - Les parotidectomies totales élargies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99 1) Élargissement à la peau · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 99 2) Elargissement au conduit auditif externe, au pavillon, à la mastoïde · · · · · 99 3) Élargissement postérieur · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 99 4) Élargissement antérieur · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · 100 B - Attitude chirurgicale vis-à-vis du nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 C - Traitement des aires ganglionnaires cervicales . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 D - Radiothérapie post-opératoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 101 E - La radiothérapie dans le cadre des tumeurs inopérables . . . . . . . . . . . . . 102 MÉTASTASES PAROTIDIENNES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 I - PRÉSENTATION CLINIQUE II - TRAITEMENT . . . . . . . III - PRÉVENTION . . . . . . . IV - CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 104 104 105 LES COMPLICATIONS DE LA PAROTIDECTOMIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 I - INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II - LES COMPLICATIONS CHIRURGICALES NON SPÉCIFIQUES . . . . III - PARALYSIE FACIALE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . IV - SYNDROME DE FREY . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . V - COMPLICATIONS RÉSULTANT DE LA SECTION DU NERF GRAND AURICULAIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VI - CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 109 110 111 . . . . . . 112 . . . . . . 113 RÉCIDIVES DES TUMEURS DE LA PAROTIDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 I - FACTEURS FAVORISANTS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . A - Thérapeutiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - Histo-pathologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - Epidémiologiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II - SURVENUE DES RÉCIDIVES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . A - Délais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - Transformation maligne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III - BILAN PRÉ-OPÉRATOIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . A - Clinique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - Imagerie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . IV - PRISE EN CHARGE CHIRURGICALE : . . . . . . . . . . . . . . . . . . A - Première éventualité : récidive après chirurgie parotidienne non réglée . B - Deuxième éventualité : récidive après chirurgie parotidienne réglée avec dissection du nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - Troisième éventualité : récidive itérative unique . . . . . . . . . . . . . D - Quatrième éventualité : récidives itératives multiples . . . . . . . . . . V - PLACE DE LA RADIOTHÉRAPIE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VI - PRÉVENTION DES RÉCIDIVES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . VII - CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 115 115 116 117 117 117 117 117 118 119 119 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 124 126 127 127 129 NERF FACIAL ET CHIRURGIE DE LA PAROTIDE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 I - CONSERVATION DU NERF FACIAL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 II - MONITORAGE DU NERF FACIAL . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 133 A - Appareillage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134 9 B - Mise en place des électrodes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C - Utilisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . D - Résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . E - Indications . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . F - Conclusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . III - RÉPARATION D’UNE BRANCHE DU NERF FACIAL . . . . . . . . . . . . Technique chirurgicale de réparation nerveuse microchirurgicale . . . . . . . IV - RECONSTRUCTION DU NERF FACIAL APRÈS RÉSECTION NERVEUSE Résultats des greffes de nerf pour reconstruction de nerf facial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134 135 135 135 136 137 137 138 140 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . I - LA PREUVE DE L'INFORMATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . A - La charge de la preuve . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . B - Mode de preuve : écrits . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . II - PARTICULARITÉ DE L'INFORMATION EN PATHOLOGIE PAROTIDIENNE A - Retard diagnostique et notion de perte de chance . . . . . . . . . . . . . . B - L’information concernant la chirurgie parotidienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 142 142 142 143 143 144 CONSIDÉRATIONS MÉDICO-LÉGALES 10 HISTORIQUE I - HISTOIRE DE LA CONNAISSANCE ANATOMIQUE Hippocrate (460-370 avant J.C.) décrivait déjà les pathologies des glandes salivaires et particulièrement celles de la parotide, en différenciant les pathologies suppuratives des pathologies tumorales non suppuratives. Dès le XVIème siècle, Ambroise Paré défendait la théorie humorale de la maladie dans un chapitre nommé : « de la tumeur qui est sous les oreilles, nommée parotide ». Il écrivait alors « …la parotide est une tumeur contre nature, occupant les glandules et parties d’autour, qui sont sous les oreilles dites Emonctoires du cerveau : lesquelles, parce qu’elles sont laxes et rares, facilement reçoivent les excréments d’iceluy… » Niels Steenson, ou Nicolai Stenonis (1638-1686) laissa son nom au canal parotidien après sa découverte lors de dissections animales réalisées à Amsterdam en 1660, et fut l’auteur de « De Glandulis Oris et Novis Earundem Vasis ». En 1685, Godefridi Bildoo publiait une dissection détaillée de l’arborescence des canaux excréteurs parotidiens et en 1707 Antonio Maria Valsalva mettait en évidence la présence d’éléments lymphatiques intra-parotidiens. Le nerf facial n’eut sa réalité anatomique qu’en 1677 avec Wrisberg et son nerf éponyme, ainsi que Nommering et Vicq d’Azyr, qui proposèrent la première classification valable des nerfs crâniens. La complexité de la division du nerf dans la parotide fait que l’on parla de plexus facial. II - HISTOIRE DE LA CHIRURGIE Très tôt, l’école française s’est intéressée à la chirurgie de la parotide avec Guillaume de Salicet en 1275, Guy de Chauliac en 1363 et Pierre Franco en 1561. L’intérêt pour la chirurgie parotidienne s’est véritablement développé en Europe à la fin du XVIIIème siècle, en particulier avec Heister, Siebold et Hunter. Au XIXème siècle, quelques pionniers, dont Mott, Warren ou Velpeau marquèrent l’histoire par leurs récits de parotidectomies sans anesthésie, réservées aux patients les plus stoïques et courageux. Malgré le développement progressif de l’anesthésie à partir de la seconde moitié du XIXème siècle, la paralysie faciale, sanction tangible de l’intervention, jointe aux risques hémorragiques per-opératoires firent reculer beaucoup de chirurgiens et les interventions parotidiennes demeurèrent exceptionnelles. Dès le début du XXème siècle, les travaux anatomiques de Grégoire (1912) et McWhorter (1917) ont ouvert l’ère de la chirurgie parotidienne conservatrice. Dès lors, plusieurs techniques de découverte du nerf facial ont été décrites, à partir de l’émergence du trou stylo-mastoïdien (Duval, 1914), du rameau mentonnier (Barbat, 1916), et du rameau cervical (Sistrunk, 1921). En France, Duval et Redon en 1932 puis Padovani et Redon en 1938, ont été les premiers à décrire une technique codifiée de parotidectomie conservatrice du nerf facial après repérage du tronc de ce dernier. Ce n’est qu’en 1941, et sous l’impulsion de Bailey que cette technique s’est popularisée dans les pays anglo-saxons. 11 H I S TO R I Q U E III - HISTOIRE DE LA PATHOLOGIE DES GLANDES SALIVAIRES Le tissu salivaire est capable de produire une grande variété de pathologies tumorales d’évolution non univoque. A ce propos rappelons l’aphorisme de L.V. Ackermann et J.A. Del Regado : « La tumeur habituelle des glandes salivaires est une tumeur dans laquelle la variété bénigne est moins bénigne que les tumeurs bénignes usuelles et la variété maligne est moins maligne que les tumeurs malignes usuelles » Cependant la tumeur qui fit l’objet des plus grandes discussions tant sur le plan clinique qu’anatomo-pathlogique était et reste « la tumeur mixte » C’est Minsenn qui en 1874 introduit le nom de tumeur mixte, faisant référence au double contingent épithélial et mésenchymateux. Un certain degré de confusion quant à la bénignité ou malignité des tumeurs mixtes a tardivement persisté. En 1953, Redon dénommait cette tumeur multicentrique à malignité locale « épithélioma à stroma remanié ». Le terme d’adénome complexe a été suggéré par Foote et Frazell en 1954. Actuellement c’est le nom d’adénome pléiomorphe qui est retenu. La première classification des tumeurs des glandes salivaires fut celle de Masson en 1924, suivi de celle de Foote et Frazell en 1954. En 1970, Eneroth proposa une classification basée sur une étude anatomo-clinique. Cette variabilité de nature et de comportement contraste avec une modalité d’expression clinique souvent stéréotypée, faite d’une masse indolore qui occupe l’aire parotidienne et croît plus ou moins lentement. Or cette symptomatologie peut traduire aussi bien une tumeur bénigne qu’une tumeur maligne. La prise en charge thérapeutique des adénomes pléiomorphes a fait l’objet de nombreuses controverses. A la différence de l’école anglo-saxonne qui prônait un geste limité à une énucléo-résection, l’école française avec Redon, André, Gandon, Laccourreye, Trotoux, Guerrier et Pech considérait à l’époque à juste titre que seule la parotidectomie totale ou sub-totale était susceptible d’éviter les récidives eu égard au pourcentage particulièrement élevé de récidives survenant après un geste limité et régulièrement rapporté dans la littérature anglo-saxonne. Actuellement la prise en charge de la pathologie tumorale a évolué pour plusieurs raisons : Les progrès techniques dans le déroulement de la chirurgie parotidienne ont diminué la morbidité, en particulier la paralysie faciale post-opératoire, risque qui était tellement fréquent, grave et redouté autant par le malade que par le chirurgien, avait fait dire à nos anciens « ne les touchez pas tant qu’elles ne font pas parler d’elles », raisonnement aboutissant à la prise en charge de tumeurs de taille parfois impressionnante et souvent source de difficultés chirurgicales indéniables. Les travaux histologiques actuels ont bien mis en évidence le rôle majeur de la capsule et de l’environnement péri-capsulaire et des variétés histologiques dans la genèse des récidives. Les renseignements pré-opératoires apportés d’une part par la ponction cytologique, d’autre part par l’imagerie moderne en particulier l’IRM, permettent de préciser la topographie et l’environnement péritumoral. Ainsi en cas de petite tumeur bénigne située en dehors du plan du nerf facial, la parotidectomie exo-faciale permettant une dissection chirurgicale au large de la tumeur, semble suffisante pour garantir une exérèse tumorale complète tout en limitant la morbidité. 12 H I S TO R I Q U E RÉFÉRENCES : 1 - BAILEY H. The treatment of parotid gland with special reference to parotidectomy. Brit J Surg 1941;28:337-46. 2 - BAILEY H. The technique of parotidectomy. J Int Coll Surg 1949:103-10. 3 - BARBAT JH. Complete removal of the parotid gland without injury to the facial nerve. Calif State J Med 1916;14:115-6. 4 - BILDOO G. Anatomia Humani Corporis Centum & Quinque Tabulis. Amstelodami: Sumptibus Viduae Joannis a Someren Haeredum Joannis a Dyk Henrici & Viduae Theodori Boom, 1685. 5 - DUVAL P. Conservation des rameaux supérieurs (fronto-palpébraux) du facial dans l'extirpation totale de la parotide en dehors du cancer, technique opératoire. Rev Chir 1914;49:132-7. 6 - DUVAL P, REDON H. Extirpation totale ou subtotale de la parotide avec conservation de la branche supérieure du facial dans les tumeurs dites mixtes de la glande : résultats cliniques. J Chir 1932;39:801-8. 7 - FOOTE FW, FRAZELL EL. Tumors of th emajor salivary glands, Atlas of tumor pathology. Washington: Armed Force Institue of Pathology, 1954. 8 - GREGOIRE R. Le nerf facial dans la parotide. J Anat 1912;48:437-47. 9 - GUERRIER Y, MOUNIER-KUHN P. Histoire des maladies de l'oreille, du nez et de la gorge. Paris: Dacosta, 1980. 10 - HEISTER L. Chapter XCVIII : Of extirpating scirrhous maxillary, and parotid glands. In: A General System of Surgery in Three Parts, 8th ed ed. London, 1767. 11 - LITTRÉ E. Oeuvres complètes d'Hippocrate. Vol. 10. Paris: JB Baillière, 1861. 12 - MALGAIGNE J-F. Oeuvres complètes d'Ambroise Paré revues et collationnées sur toutes les éditions. Vol. I-III. Paris: JB Baillière, 1840. 13 - MCWHORTER GL. The relations of the superficial and deep lobes of the parotid gland to the ducts and to the facial nerve. Anat Rec 1917;12:149-54. 14 - MICHENET Fabien. Les carcinomes primitifs de la glande parotide à propos d'une étude rétrospective portant sur 65 cas. Thèse Médecine Toulouse, 2002. 15 - MINSENN H. Ueber gemischte Geschwülste de Parotis. In: Inaugural Dissertation zur Erlangung des Doctorwürde in der medicin, chirurgie und Geburtshülfe. Gottingen: Druck der Gebrüder Hofer, 1874. 16 - MOTT V. Case of extirpation of the parotid gland. Am J Med Sci 1832;10:17-20. 17 - NICAISE E. La grande chirurgie de Guy de Chauliac, composée en l'an 1363. Paris: Ancienne librairie Germier Baillière et Cie, 1890. 18 - NICAISE E. Chirurgie de Pierre Franco de Turriers en Provence, composée en 1561. Paris: Ancienne librairie Germier Baillière et Cie, 1895. 19 - PADOVANI P, REDON H. Tumeurs mixtes de la parotide, ablation totale de la glande avec conservation complète du nerf facial. Mém Acad Chir 1938;34(31). 20 - REDON H. Discussion on the surgical treatment of parotid tumours. Proc Roy Soc Med 1953;46:1013-20. 21 - SIEBOLD C. Resp. Orth. Dissertatio de Squirrho Parotidis, ejusque Cura, cum Annexa Extirpate Historia. Wurubourg, 1793. 22 - SISTRUNK WE. Mixed tumors of the parotid gland. Minn Med 1921;4:155-9. 23 - STENONIS N. De Glandulis Oris et Novis Earundum Vasis. Observationes Anatomicae in Inclyta Lugdunensi Academia sub Praesidio DD Johannis Van Horne: Publico eruditorum examini, 1661. 24 - VALSALVA AM. De aure human tractatus: Ex Officina Guilielmi vande Water : Academiae Typographia. trajecti ad Rhenum, 1707. 25 - WARREN JC. In: Surgical Observations on Tumors, with Cases and Operations. Boston: Croker & Brewster, 1837. 13 14 ANATOMIE CHIRURGICALE DE LA RÉGION PAROTIDIENNE La région parotidienne est le siège de développement de la pathologie tumorale de la glande parotide mais aussi de la pathologie ganglionnaire et vasculaire malformative. Les différents rapports de cette région rendent compte de la richesse sémiologique rencontrée dans ces pathologies. Les connaissances anatomiques sont de première importance à la fois pour le diagnostic topographique et pour la stratégie chirurgicale. Les différentes structures contenues dans la région parotidiennes seront brièvement rappelées avant d'envisager les rapports anatomiques sous l'angle de la technique chirurgicale des différents types de parotidectomie. I - LIMITES ET RAPPORTS DE LA RÉGION PAROTIDIENNE La région parotidienne appartient aux espaces profonds intermédiaires de la face tout comme l'espace parapharyngé. Figure 1 : Vue latérale droite des espaces profonds de la face. 15 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E En arrière, elle est en rapport avec la région rétrostylienne dont elle est séparée par le diaphragme (rideau) stylien (Figure 2). Figure 2 : Coupe axiale des espaces intermédiaires et profonds de la face. En avant, la loge parotidienne est limitée par le ramus mandibulaire, les muscles manducateurs et le ligament stylo mandibulaire (Figure 3). Ces structures séparent la loge parotidienne de la fosse infratemporale. Figure 3 : Structures ligamentaires musculaires et osseuses qui délimitent la loge parotidienne. 16 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E En haut et en avant, la loge est ouverte sur la fosse infratemporale entre le processus styloïde en dedans et le condyle mandibulaire en dehors. En dedans, la loge parotidienne est en rapport avec la région préstylienne, espace parapharyngé proprement dit. L'aponévrose profonde tendue entre le ligament sphéno-mandibulaire et stylo-mandibulaire sépare incomplètement les deux loges. La paroi médiale de la région parapharyngée répond à la fosse tonsillaire. Sa paroi postérieure est limitée par le diaphragme stylien qui la sépare de l'espace rétrostylien. La région parapharyngée est fréquemment le siège d'extension d'une tumeur du pôle profond de la glande parotide (Figure 4). Figure 4a : Développement tumoral endo facial, superficialisant le nerf facial. Figure 4b : Développement tumoral parapharyngé refoulant le nerf facial en dehors et la région amygdalienne en dedans. Figure 4c : Développement tumoral exo-facial, refoulant le nerf facial en dedans. Ces tumeurs s'insinuent dans l'espace entre le ligament sphéno-mandibulaire et stylo mandibulaire qui constitue une zone de faiblesse. Elles se traduisent cliniquement par un déplissement du pilier antérieur de la tonsille palatine et son déplacement en avant et en dedans. Le voile du palais peut être également intéressé. En bas la loge parotidienne est limitée par la bandelette mandibulaire unissant l'angle de la mandibule au muscle sterno-cléido-mastoïdien et au ligament stylo-mandibulaire. Elle est en rapport en bas avec la région sterno-cléido-mastoïdienne où un développement tumoral de la partie inférieure de la parotide peut faire porter à tort le diagnostic d'adénomégalie sous maxillaire ou de tumeur de la glande sub-mandibulaire. II - CONTENU DE LA LOGE PAROTIDIENNE La région parotidienne contient la glande parotide elle-même, le nerf facial, le nerf grand auriculaire, le nerf auriculo-temporal, l'artère carotide externe et la veine rétromandibulaire. A - La glande parotide La glande parotide est constituée d'un tissu glandulaire exocrine tubulo-acineux qui occupe la quasi-totalité de la loge parotidienne. Elle est artificiellement délimitée en portion endo et exofaciale ou latérofaciale par les branches de division du nerf facial. La parotide présente un prolongement antérieur en dehors et en avant du muscle masséter qui se prolonge par le canal excréteur, le conduit parotidien (ou canal de Sténon). Le conduit sort de la région parotidienne pour gagner la région génienne dans un dédoublement du fascia du masséter à travers le muscle buccinateur et s'abouche dans la cavité orale au niveau du collet de la 2° prémolaire supérieure. 17 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E En arrière et superficiellement, la glande parotide se prolonge sous le méat acoustique externe en recouvrant le muscle sterno-cléido-mastoïdien. Plus profondément, un prolongement postérieur peut exister entre le ligament stylo hyoïdien et le muscle digastrique (Figure 3). B - Le nerf facial Le nerf facial extra-crânien est essentiellement moteur pour les muscles auriculaires et occipitaux en haut, les muscles cutanés cervico-faciaux en avant, le ventre postérieur du muscle digastrique et le muscle stylo-hyoïdien en bas. Son trajet est détaillé plus loin. C - Le nerf grand auriculaire Le nerf grand auriculaire formé par la branche auriculaire du plexus cervical superficiel (branches ventrales des racines C2, C3), apparaît au bord postérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, et se dirige obliquement en haut et en avant vers l'oreille et la région parotidienne. Il chemine en arrière de la veine jugulaire externe parallèlement à elle. D - Nerf auriculo-temporal Ce nerf chemine en dedans et en arrière du pédicule temporal superficiel où il suit un trajet vertical (Figure 5). Il assure l'innervation sensitive de la partie latérale du crâne. Il provient de la V° paire crânienne par la division de la branche postérieure du nerf mandibulaire et entre dans la loge parotidienne après avoir contourné le condyle mandibulaire en dedans. Le nerf auriculo-temporal donne l'innervation parasympathique à la glande parotide issue du ganglion otique. Le ganglion otique reçoit également l'innervation sympathique issue du plexus de l'artère méningée moyenne. La section de ce nerf serait responsable du syndrome de Frey correspondant à une repousse aberrante des fibres sécrétoires vers les glandes sudoripares et les vaisseaux cutanés de la région parotidienne. Figure 5 : Plexus cervical superficiel (NAT : Nerf Auriculo Temporal ; BA : Branche Auriculaire ; BT : Branche Transverse du Cou ; BSC : Branche Supra Claviculaire). E - Les vaisseaux L'artère carotide externe et ses branches de division occupent la partie profonde de la loge parotidienne : artère auriculaire postérieure, artère maxillaire (maxillaire interne) et artère temporale superficielle. Les éléments veineux forment un plexus qui reçoit 4 afférences que sont la veine temporale superficielle, la veine maxillaire, la veine auriculaire postérieure et la veine occipitale. Ce plexus émet deux efférences, une en direction du système veineux externe, la veine jugulaire externe et une, vers le système jugulaire interne, la veine rétromandibulaire (communicante intraparotidienne) qui rejoint la veine faciale ou le tronc thyro-linguo-facial. 18 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E Lors d'une parotidectomie, dans la mesure du possible, la veine jugulaire externe doit être conservée ou liée le plus tard possible pour ne pas mettre le système vasculaire veineux parotidien sous pression, rendant alors la dissection plus hémorragique. Le système veineux qui est en rapport intime avec les branches du nerf facial, représente une aide pour la dissection et parfois permet de situer le nerf sur l'imagerie pré opératoire (Figure 6). Figure 6 a et b : Rapport du système veineux avec le nerf facial qui est superficiel par rapport à la veine ce qui est intéressant pour le localiser en imagerie. F - Les lymphatiques Le système lymphatique parotidien est constitué d'un groupe extra glandulaire et d'un groupe intra glandulaire. Il est le premier relais de la région parotidienne et des régions cutanées fronto-pariétales, temporales et faciales supérieures. 19 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E III - ANATOMIE RADIOLOGIQUE Les progrès de l'imagerie moderne et notamment de l'IRM ont permis de retrouver les schémas d'anatomie descriptive classique et de nous exposer anatomiquement la progression tumorale et son environnement. Cela réalise une véritable confirmation in vivo des coupes. Figure 7a. Coupe transversale IRM de la parotide normale. 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 20 Glande parotide Muscle masséter Muscle ptérygoïdien médial Insertion du muscle sterno-cléido-mastoïdien Ventre postérieur du muscle digastrique Veine retro mandibulaire Espace para-pharyngé Ramus mandibulaire Boule de Bichat Muscle stylo-hyoïdien Artère carotide externe Figure 7b. Coupe transversale IRM de la parotide avec tumeur à extension para-pharyngée. A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E IV - CONSIDÉRATIONS D'ANATOMIE CHIRURGICALE Lors d'une parotidectomie, après incision cutanée, la découverte de la loge parotidienne impose la dissection du SMAS. A - Le plan de couverture Le SMAS cervico-facial est une structure musculo-aponévrotique superficielle. Ce système se compose de muscles cutanés superficiels (muscle platysma, muscle risorius) s'insérant au sein du fascia superficialis et de lames aponévrotiques ou fibreuses qui servent de points d'appui aux muscles. Le SMAS est indépendant des muscles péri-orificiels (oreilles, paupières, lèvres, nez) et du muscle occipito-frontal. Il peut cependant donner des adhérences avec les muscles des paupières (bord latéral du muscle orbiculaire) ou des lèvres (muscles zygomatiques et triangulaire). Le SMAS est une unité anatomique à cheval sur la face et le cou qui présente deux parties : une latéro-faciale, essentiellement aponévrotique, une latéro-cervicale essentiellement musculaire correspondant au muscle platysma. Seul le SMAS facial répond à la loge parotidienne. Il comprend : - Le fascia pré-parotidien, épais et bien individualisable, pouvant contenir des fibres musculaires. Il recouvre la loge parotidienne et se fixe sur le cartilage auriculaire et la région mastoïdienne. Dans la région sous angulo-mandibulaire et mastoïdienne, ce fascia adhère à l'aponévrose cervicale superficielle qui recouvre le muscle sterno-cléido-mastoïdien. - Le fascia jugal, mince et discontinu, séparé en deux parties par le muscle risorius. Ce muscle se développe dans l'épaisseur du SMAS en regard de l'aponévrose massétérine, mais ne s'y insère pas et se jette sur le modiolus para commissural. Le SMAS facial, va en s'amenuisant d'arrière en avant. Il ne dépasse pas le sillon naso-génien. Au bord inférieur de la mandibule, il se prolonge par le muscle platysma. Les rapports superficiels du SMAS peuvent être considérés comme communs au niveau de la face et du cou. Ils se font avec la peau, les nerfs sensitifs et les vaisseaux à destinée cutanée. Le SMAS sépare le pannicule adipeux de la peau du tissu cellulaire sous cutané. Il forme avec la peau une unité - sa face superficielle est reliée à la face profonde du derme par de fins tractus fibreux, isolant des loges adipeuses -. Cette unité est préservée en cas de décollement sous le SMAS, elle est dissociée en cas de décollement sous-cutané. Il permet le glissement du tégument, par rapport aux plans sous-jacents musculo-aponévrotiques ou périostés (Figure 8). Figure 8 : Plans de décollement lors d'une parotidectomie (P : Peau ; S : SMAS, C : Capsule parotidienne, P : Glande parotide). 21 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E Lors d'un abord pour une tumeur superficielle, le décollement directement sous dermique est préféré afin de minimiser le risque d'effraction capsulaire d'une tumeur. En revanche pour une lésion plus profonde, il est préférable de réaliser un décollement sous le SMAS ce qui minimise le risque de souffrance cutanée et permet un redrapage du site de parotidectomie en fin d'intervention ce qui améliore le résultat cosmétique et atténue la dépression rétromandibulaire (Figure 9a et 9b). Figure 9a : Dissection conservatrice du lambeau de SMAS tracté en arrière. Figure 9b : Dissection conservatrice du lambeau de SMAS soulevé. A la partie inférieure de la loge parotidienne, sous le SMAS facial, apparaît le nerf grand auriculaire. Cette branche est souvent sectionnée durant un abord classique de parotidectomie. Cette section a pour effet une anesthésie de l'auricule et de la peau pré auriculaire qui est progressivement réversible en quelques mois. Il peut être conseillé de sectionner cette branche le plus haut possible ce qui permet de conserver une longueur suffisante en cas d'indication de greffe nerveuse du nerf facial. La portion terminale du nerf grand auriculaire peut être à l'origine d'un névrome très gênant pour le patient. Pour certains ce désagrément peut être évité par l'enfouissement de la portion terminale du nerf dans le muscle sterno-cleido-mastoïdien, en fin d'intervention. B - La dissection du nerf facial L'enjeu fonctionnel de la chirurgie parotidienne est la préservation du nerf facial (à condition que l'histologie ou l'invasion tumorale n'impose pas son sacrifice) ce qui nécessite son repérage premier et sa dissection dans la majorité des cas. De ses trois portions extra-crâniennes, rétro, intra et pré-glandulaire, deux sont habituellement découvertes. La portion rétro-glandulaire est intéressée dans l'abord classique de la dissection dite antérograde. La portion pré-glandulaire est abordée directement en cas de dissection rétrograde du nerf facial. 22 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E Enfin, exceptionnellement, la dissection du nerf peut nécessiter un abord de la troisième portion mastoïdienne. C'est le cas dans les tumeurs parotidiennes envahissant l'os temporal ou lors du temps préparatoire de certaines greffes nerveuses. Figure 10 a et b : Division du nerf facial extra-crânien en 3 segments : segment rétro-glandulaire (1), segment intra-glandulaire (2), segment pré-glandulaire (3). Découverte du nerf facial rétro-glandulaire : la dissection antérograde C'est le segment de la découverte classique du tronc du nerf facial. Le nerf facial extra-crânien, faisant suite à la troisième portion intrapétreuse, naît du foramen stylo mastoïdien dans l'espace rétro-stylien selon une direction oblique antéro-inférieure. Il traverse le rideau stylien entre la partie profonde du ventre postérieur du muscle digastrique et le muscle stylo-hyoïdien. Durant ce court trajet rétro-parotidien le nerf facial donne plusieurs branches motrices : le rameau communicant avec le nerf vague, le rameau communiquant avec le nerf glosso pharyngien, le nerf du muscle stylo hyoïdien et du ventre postérieur du digastrique et le nerf auriculaire postérieur. La découverte chirurgicale du nerf facial impose l'identification du ventre postérieur du muscle digastrique en bas qui donne un repère fiable de la profondeur de son émergence. Plus haut la dissection au contact du cartilage du méat acoustique externe permet la libération de la face postérieure de la parotide et la mise en évidence de plusieurs repères. Le processus triangulaire, digitiforme ou pointer de Conley ou apophyse de Schwalbe « montre du doigt » l'émergence du nerf facial située à plus de 5 mm en avant, en dedans et en dessous de lui. Figure 11 : Foramen stylo-matoïdien droit. STM : Suture Tympano-Mastoïdienne FSM : Foramen Stylo-Mastoïdien RD : Rainure du Digastrique. La scissure tympano-mastoïdienne et la rainure du muscle digastrique se joignent en avant exactement au niveau de profondeur du foramen stylo mastoïdien (Figure 11). 23 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E En pratique, après avoir repéré le ventre postérieur du muscle digastrique et avoir disséqué le long du méat acoustique externe jusqu'au repère du facial, le tissu fibreux dit fascia de Loré, qui joint ces deux dissections, est effondré progressivement par des mouvements antéro-postérieurs atraumatiques. Durant ce temps, l'hémostase de l'artère stylo-mastoïdienne est réalisée (Figure 12). Figure 12 : Individualisation de l'artère mastoïdienne, superficielle au nerf facial (parotidectomie gauche) P : pointer Dig : ventre postérieur du muscle digastrique ASM : Artère stylo-mastoïdienne. Le tronc du nerf facial apparaît blanc nacré, de direction oblique vers le l'extérieur et le bas, de 1 à 2 mm d'épaisseur et strié de son vasa nervorum. Une électrostimulation peut affirmer sa réalité (figure 13). Figure 13 : Repérage classique du nerf facial et de sa bifurcation (parotidectomie gauche) D : muscle digastrique P : pointer. Nerf facial intra-glandulaire La poursuite de la dissection dans le segment intra-glandulaire du nerf facial va mettre en évidence sa division en une branche supérieure, temporo-faciale et une branche inférieure, cervico-faciale. La découverte du nerf facial peut être modifiée dans certains cas et comporter alors plus de risque pour le nerf. C'est le cas de tumeurs à développement endofacial qui verticalisent et superficialisent le tronc nerveux. C'est également le cas de l'enfant jeune pour qui l'absence de développement de la mastoïde provoque une situation du nerf facial plus superficielle et plus haute que chez l'adulte. 24 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E Au sein du parenchyme parotidien, les branches cervico-faciales et temporo-frontales se ramifient. Le nombre de divisions, d'anastomoses et le calibre des branches est propre à chaque individu. Les différentes classifications anatomiques des branches n'ont que peu d'intérêt dans la pratique (figure 14). Figure 14. Dissection du nerf facial intra-glandulaire (parotidectomie exo-faciale). La dissection antérograde s'achève à la sortie de la glande parotide où le tissu graisseux profond du SMAS fait suite au tissu glandulaire. Nerf facial pré-glandulaire. C'est le segment de découverte des ramifications terminales du nerf et le premier temps de la dissection rétrograde (cf. chapitre chirurgie). A la sortie de la glande parotide, les branches nerveuses cheminent sous l'aponévrose massétérine (figure 15) et le SMAS, puis se divisent en ramifications destinées aux muscles cutanés de la face et du cou qu'elles abordent par leur face profonde. Figure 15. Dissection des branches pré-glandulaires du nerf facial. 25 A N A T O M I E C H I R U R G I C A L E D E L A R É G I O N P A R O TI D I E N N E RÉFÉRENCES : 1 - BONFILS P., CHEVALIER J.M. - Anatomie ORL, 3, Éd. Flammarion Médecine-Sciences, Paris. 1998. 2 - MAKEIEFF M., QUARANTA N. ET GUERRIER B. - Tumeurs parapharyngées Encycl. Med. Chir. (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris) Oto-Rhino-Laryngologie, 20-605-10, 2000, 14p. 3 - REYT E., RIGHINI C.H. - Découverte du nerf facial lors de la parotidectomie. Les cahiers d'O.R.L.T. XXXI - N°1 p 17-22 4 - GAILLARD J., GANDON J., LAUDENBACH P., JEZEQUEL J., BEAUVILLAIN de MONTREUIL Cl., FONTANEL J.P., MICHEAU C., BROCHERIOU C., RAYNAL M., GUERRIER B., PEYNEGRE R. et ROMANET Ph. La pathologie médicale et chirurgicale de la région parotidienne. Rapport à la Sté Fr. d'Oto-Rhino-Laryngologie et de Pathologie Cervico-Faciale. Ed. Arnette, 1981. 26 ANATOMO-PATHOLOGIE DES TUMEURS PAROTIDIENNES Les tumeurs parotidiennes sont classées d’après la classification de l’OMS de 1992. Cette classification volontairement exhaustive ne tient pas compte de la fréquence des tumeurs. Elle est destinée aux anatomo-pathologistes pour un diagnostic le plus précis possible. Certaines de ces tumeurs sont extrêmement rares. Seules les tumeurs les plus fréquentes et les plus caractéristiques ont été décrites dans ce chapitre. CLASSIFICATION DES TUMEURS DES GLANDES SALIVAIRES - OMS (1992) 1) - Tumeurs bénignes w Adénome pléiomorphe w Myoépithéliome w Tumeur de Warthin w Adénome à cellules basales w Adénome canaliculaire w Oncocytome w Papillome canalaire • Sialadénome papillifère • Papillome inversé • Papillome intracanalaire w Lymphadénome et adénome sébacé w Sialoblastome 2) - Carcinomes w Adénocarcinome à cellules acineuses w Carcinome muco-épidermoïde w Carcinome adénoïde kystique w Adénocarcinome polymorphe de bas grade w Tumeurs mixtes malignes • Carcinomes sur adénome pléiomorphe • Carcinosarcome • Tumeur mixte métastasiante w Carcinome malpighien w Adénocarcinome à cellules basales w Carcinome épithélial – myoépithélial w Adénocarcinome à cellules claires w Cystadénocarcinome w Carcinome indifférencié • A petites cellules • A grandes cellules • Carcinome lymphoépithélial w Carcinome oncocytaire w Carcinome des canaux salivaires w Adénocarcinome sébacé w Carcinome myoépithélial w Carcinome adénosquameux w Adénocarcinome S.A.I. 3) - Métastases 4) - Lymphome 27 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S I - Histologie Rappel histologique Les glandes salivaires sont formées d’un ensemble de ramifications canalaires dont la pièce terminale intra-glandulaire est représentée par les acini. Les acini sont formés de cellules épithéliales bordées de cellules myoépithéliales mal visibles. Les canaux excréteurs sont bordés par des cellules oxyphiles ou cellules claires. Les cellules adipeuses sont plus ou moins abondantes selon l’âge et l’obésité des sujets. Figure 1 - Tissu parotidien normal. 1 : acini. 2 : canaux excréteurs. 3 : cellules adipeuses. A - TUMEURS BÉNIGNES 1) - Adénome pléiomorphe Il s’agit de la tumeur la plus fréquente au niveau de la parotide (80%). Macroscopie C’est une tumeur très ferme, arrondie, lobulée, blanche ; elle est bien délimitée de la parotide adjacente mais elle peut présenter un contour festonné et des îlots satellites déjà visibles à l’échelon macroscopique. Suivant les contingents tissulaires qui la constituent, elle peut être très ferme et caractéristique ou molle et gélatineuse ne permettant pas un diagnostic macroscopique précis. Sur les pièces de parotidectomie, la tumeur fait parfois saillie à la surface du tissu parotidien ou peut être profondément enchâssée dans le tissu glandulaire. Histologie C’est une tumeur caractérisée par un double contingent tissulaire : • Une composante cellulaire « épithéliale-myoépithéliale » qui associe des structures épithéliales canalaires et des nappes de cellules myoépithéliales fusiformes ou plasmocytoïdes. On n’y observe que de rares mitoses et jamais d’anomalies cyto-nucléaires suspectes. • Une composante conjonctive, ou stroma, sécrétée par les cellules myoépithéliales et englobant souvent de très petites cellules myoépithéliales stellaires. Le stroma est toujours étroitement associé aux cellules myoépithéliales y compris à l’échelon cytologique (c’est un critère diagnostique). D’abondance variable, il peut être très lâche et myxoïde ou bien beaucoup plus dense, hyalin et parfois chondroïde. 28 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S Figure 2a. Forme ferme pseudo-cartilagineuse. Figure 2b. Forme molle myxoïde. Figure 2c. Forme charnue. La proportion relative du contingent cellulaire et du stroma détermine les formes histologiques décrites par Seifert : hyper-cellulaire, hypo-cellulaire, et classique ou intermédiaire. Ces notions sont importantes à préciser lors de l’examen anatomo-pathologique car elles déterminent la fragilité de la tumeur lors de la manipulation chirurgicale. Le risque de récidive est majoré dans le cadre des tumeurs hypo-cellulaires, plus fragiles, présentant plus volontiers une capsule fine. A l’examen histologique, l’adénome pléiomorphe est toujours bien délimité et ne présente aucun caractère infiltrant. Il est parfois même encapsulé. La capsule est d’épaisseur variable, épaisse, fine, voire même absente. La périphérie des adénomes pléiomorphes est parfois irrégulière avec développement de pseudopodes et/ou de nodules satellites au proche contact du foyer principal. Le caractère multicentrique de ces tumeurs, anciennement décrit, n’a jamais été retrouvé par la suite. Pour l’anatomo-pathologiste, l’adénome pléiomorphe est une tumeur de diagnostic facile en dehors des formes cellulaires où peut se poser le problème du diagnostic différentiel avec le cylindrome ou le myoépithéliome. Les récidives in situ dans la loge parotidienne sont classiques et pourraient être liées à un essaimage secondaire à une exposition capsulaire (nodules satellites et pseudopodes, micro-rupture) ou à sa rupture accidentelle (tumeurs hypo-cellulaires à stroma myxoïde exposant au risque de rupture chirurgicale, macro-rupture). La transformation maligne demeure rare. Elle est classiquement développée sur des tumeurs évoluant depuis plusieurs années. Il s’agit le plus souvent d’un carcinome (adénocarcinome et carcinome malpighien) mais on peut également observer des sarcomes, et exceptionnellement des carcino-sarcomes. On ne pourra affirmer le diagnostic de tumeur mixte maligne que sur la présence d’éléments caractéristiques d’adénome pléiomorphe dans la tumeur maligne. 29 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 30 Figure 3. Adénome pléiomorphe hypo-cellulaire, capsule épaisse. 1 : Tissu parotidien normal. 2 : Capsule épaisse. 3 : Tumeur hypo-cellulaire. Figure 4. Adénome pléiomorphe à capsule épaisse. 1 : Tissu parotidien normal. 2 : Capsule épaisse. 3 : Contingent cellulaire. 4 : Contingent conjonctif (stroma). Figure 5. Adénome pléiomorphe hyper-cellulaire. 1 : Tissu parotidien normal. 2 : Tumeur hyper-cellulaire, pas de stroma. Figure 6. Adénome pléiomorphe hypo-cellulaire. 1 : Tissu adipeux. 2 : Pas de limitation tumorale par une capsule. 3 : Contingent tumoral conjonctif (stroma myxoïde). Figure 7. Adénome pléiomorphe hypo-cellulaire. 1 : Nodule satellite. 2 : Pseudopode. 3 : Foyer tumoral principal conjonctif. 4 : Fine capsule. Figure 8. Type hypo-cellulaire avec rupture capsulaire chirurgicale. 1 : Coup de pince, rupture capsulaire. 2 : Micro fragment tumoral. 3 : Déchirure tissulaire. A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 2) - Tumeur de Warthin ou Cystadénolymphome Il s’agit de la tumeur bénigne de la parotide la plus fréquente après les adénomes pléiomorphes. Macroscopie C’est une tumeur très bien limitée, charnue, molle, de couleur rose-brun, contenant un matériel kystique épais. Figure 9a & 9b. Aspects macroscopiques de tumeurs de Warthin. Histologie Cette tumeur est caractérisée par des structures kystiques et pseudo papillaires, bordées par des cellules épithéliales très volumineuses éosinophiles (rose fuchsia) d’aspect oncocytaire. L’axe des papilles et le tissu de soutien sont occupés par des nappes de tissu lymphoïde. Elle est bien limitée par une mince capsule. Quelques formes plus massives non kystiques peuvent être décrites. Le caractère multicentrique dans une même glande est classique et des tumeurs de Warthin bilatérales sont occasionnellement observées. Pour l’anatomo-pathologiste, il s’agit d’une tumeur caractéristique de diagnostic facile. Quelques rares carcinomes malpighiens ou adénocarcinomes ont été décrits associés à un cystadénolymphome. Figure 10. Tumeur de Warthin. 1 : Tissu adipeux. 2 : Capsule. 3 : Zone kystique. 4 : Contingent épithélial oncocytaire. 5 : Contingent lymphoïde. Les autres tumeurs représentent 10 à 15% des tumeurs de la parotide et sont souvent de diagnostic plus difficile. 31 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 3) - Myoépithéliome Ces tumeurs représentent 1 à 5% des tumeurs des glandes salivaires, avec une topographie préférentielle : parotide et palais. Macroscopie Il s’agit d’une tumeur bien limitée, ferme, blanche ou beige, assez semblable à une tumeur mixte, mais de contours plus réguliers. Histologie C’est une tumeur très richement cellulaire, dense et homogène. Elle est monomorphe, sans stroma ni cellule épithéliale. Elle est faite de cellules myoépithéliales tantôt fusiformes, tantôt plus ovalaires et plasmocytoïdes. Il n’existe pas d’atypie cyto-nucléaire. Cette tumeur est assez bien délimitée du tissu adjacent et entourée par une capsule d’épaisseur irrégulière, comportant focalement quelques pseudopodes. Pour l’anatomo-pathologiste, ces tumeurs peuvent être de diagnostic difficile avec les adénomes pléiomorphes cellulaires (mais elles ne contiennent ni stroma ni contingent épithélial) et avec les schwannomes lorsque les cellules sont fusiformes. Les immuno-détections de l’Actine musculaire lisse (caractérisant les cellules myoépithéliales) et de la protéine S100 (cellules de Schwann) permettent de faire la distinction entre schwannome (PS100 +) et tumeur myoépithéliale (Actine Musculaire Lisse +). Figure 11. Myoépithéliome, tumeur monotone très dense. Ces tumeurs sont plus agressives et récidivantes que les tumeurs mixtes avec un risque de transformation sarcomateuse plus fréquent. 32 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 4) - Adénome à cellules basales Il s’agit de tumeurs le plus souvent parotidiennes (75%). Macroscopie C’est un nodule arrondi, ferme, bien limité. A la coupe, il est charnu, beige-rosé ou brun. Histologie Il s’agit d’une tumeur monotone faite d’îlots ou de travées de cellules épithéliales basaloïdes de petites tailles comportant des noyaux sombres sans atypie de mitose. Ces îlots sont bordés par une assise caractéristique de cellules basaloïdes palissadiques. Ces nappes cellulaires sont limitées par une membrane basale d’épaisseur variable. Le stroma est assez peu représenté et n’a pas les caractéristiques de celui des tumeurs mixtes. Selon la densité cellulaire et l’architecture prédominante, on distingue plusieurs sous-types parmi lesquels la forme membraneuse difficile à différencier du cylindrome. Figure 12. Adénome à cellules basales (faible grossissement) 1 : Tissu parotidien normal 2 : Capsule épaisse 3 : Zone tumorale avec structures canalaires anastomotiques. Figure 13. Adénome à cellules basales (fort grossissement) 1 : Contingent épithélial en travées anastomotiques 2 : Organisation palissadique des cellules basales. Ce sont des tumeurs très bien limitées par une mince capsule, sans pseudopode. Pour l’anatomo-pathologiste, le diagnostic n’est pas évident compte tenu de la rareté de cette histologie. Dans les formes solides en particulier, la difficulté sera d'identifier un adénocarcinome à cellules basales ; dans les formes membraneuses le diagnostic différentiel difficile est le cylindrome. Quelques rares transformations malignes (adénocarcinomes à cellules basales) ont été décrites. 33 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 5) - Oncocytome C’est une tumeur rare. Macroscopie C’est une tumeur ronde, ferme ; à la coupe elle est charnue homogène, brun-rouge. Il n’y a pas de matériel nécrotique (diagnostic différentiel avec une tumeur de Warthin). Histologie Généralement bien limitées, ces tumeurs sont très monomorphes et composées de grandes cellules oxyphiles, régulières et disposées en nappes massives. Pour l’anatomo-pathologiste, il s’agit d’une lésion caractéristique en ce qui concerne son type, mais son pronostic est très difficile à affirmer : il existe quelques rares oncocytomes malins. Le seul aspect des cellules ne permet pas de porter un diagnostic de malignité. Il sera nécessaire de s’appuyer sur les données architecturales (embols vasculaires, mauvaise limitation de la lésion, envahissement de proche en proche et adhérence aux plans adjacents et en particulier au nerf facial). La valeur des examens cytologiques et extemporanés est donc limitée dans ce cadre. Figure 14. Oncocytome (faible grossissement) 1 : Tissu parotidien normal 2 : Fine capsule 3 : Tumeur massive, monotone, sans stroma. Figure 15. Oncocytome (fort grossissement) Aspect caractéristique des cellules oncocytaires, volumineuses, régulières. 34 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S B - TUMEURS MALIGNES Seules les tumeurs malignes les plus fréquentes sont décrites. Les autres types tumoraux sont trop rares pour faire l’objet d’une description spécifique. 1) - Adénocarcinome à cellules acineuses Il s’agit d’une tumeur représentant environ 20% des tumeurs malignes des glandes salivaires. La topographie préférentielle est parotidienne (90%). Macroscopie C’est une tumeur charnue, rosée, très bien délimitée et parfois encapsulée (dans ce cas, présentation macroscopique de tumeur bénigne). Elle peut présenter un aspect festonné et des nodules satellites. La mauvaise limitation et son caractère multi-nodulaire laissent prévoir son caractère récidivant. Dans le cadre des tumeurs invasives, c’est au moment de la dissection que le chirurgien se rendra compte de l’adhérence de la tumeur témoignant de son caractère invasif. Figure 16. Aspect macroscopique d’un carcinome à cellules acineuses. Histologie Elle est constituée de cellules acineuses séreuses qui peuvent s’organiser de façons très variables, ce qui rend compte du polymorphisme important de cette tumeur : différents types cytologiques et architecturaux peuvent être retrouvés (formes massives, kystiques, folliculaires et parfois papillaires). Les cellules sont très régulières sans anomalies ni mitoses. Le stroma est souvent très pauvre. Figures 17 & 18. Carcinome à cellules acineuses 1 : Tissu parotidien normal 2 : Capsule 3 : Tumeur compacte sans organisation en acini. Pas de canaux. Cellules séreuses. 35 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S Pour l’anatomo-pathologiste, les formes reproduisant le tissu parotidien normal sont caractéristiques et faciles à interpréter. Par contre les formes plus massives ou kystiques peuvent être confondues avec un carcinome muco-épidermoïde, un oncocytome, une métastase parotidienne (carcinome à cellules rénales ; carcinome thyroïdien papillaire ou folliculaire). Les récidives apparaissent le plus souvent dans les 5 ans suivant le diagnostic initial. Le meilleur critère pronostique est le staging clinique. Les critères histo-pronostiques ne sont pas actuellement validés. 2) - Carcinome muco-épidermoïde Ce sont les tumeurs parotidiennes malignes les plus fréquentes. Elles représentent 30% des tumeurs malignes des glandes salivaires. Il s’agit de cancers associant en quantité variable un contingent muco-sécrétant et un contingent malpighien. Les carcinomes muco-épidermoïdes sont classés en trois grades de malignité : faible, intermédiaire et haut grade avec une évolution clinique différente entre les hauts grades et les autres formes. Macroscopie Ce sont des tumeurs plus ou moins bien limitées et encapsulées, charnues, beige-rosées, le plus souvent solides mais dans certains cas présentant un matériel mucoïde et filant à la coupe. D’emblée, on peut repérer les tumeurs de faible grade qui sont bien limitées et comportent des zones kystiques et un matériel mucoïde abondant. De même, les tumeurs de haut grade peuvent être identifiées sur leur aspect solide, mal limité, invasif et adhérent aux structures adjacentes avec de possibles remaniements hémorragiques et nécrotiques. Histologie Les carcinomes muco-épidermoïdes sont caractérisés par la présence de cellules muco-sécrétantes, épidermoïdes, et intermédiaires en proportions variables. La proportion de chacun des contingents varie en fonction du grade histologique. Figure 19. Carcinome muco-épidermoïde de bas grade (faible grossissement) 1 : Tissu parotidien normal 2 : Capsule 3 : Tumeur 4 : Contingent mucoïde abondant. Figure 20. Carcinome muco-épidermoïde de bas grade (fort grossissement) 1 : Stroma 2 : Contingent épidermoïde 3 : Cellules muco-sécrétantes 4 : Mucus. 36 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S Les carcinomes de bas grade : Ils sont classiquement kystiques. Les kystes sont bordés par des cellules mucoïdes. On retrouve quelques groupes de cellules malpighiennes et intermédiaires dispersés dans la tumeur sous la forme d’îlots cellulaires solides. Les formations kystiques à contenu mucoïde peuvent empiéter sur la parotide saine sans signification péjorative, mais il n’existe pas d’invasion nerveuse. Les cellules ne montrent pas d’anomalies cyto-nucléaires suspectes. Les carcinomes de grade intermédiaire : Ce sont des tumeurs plus solides et plus cellulaires que les tumeurs de bas grade. Les kystes sont moins nombreux. Le contingent malpighien prédomine par rapport au contingent muco-sécrétant. On constate un discret polymorphisme cellulaire avec quelques mitoses. Les lobules tumoraux empiètent assez largement sur le tissu parotidien adjacent témoignant ainsi de l’agressivité locale de ces tumeurs. Les carcinomes de haut grade sont caractérisés par la quasi disparition du contingent mucoïde qu’il faut rechercher avec soin pour poser le diagnostic. Cette forme est caractérisée par un contingent de cellules malpighiennes et intermédiaires (petites cellules rondes à cytoplasme basophile). Les anomalies cyto-nucléaires témoins de la malignité sont fréquentes ainsi que les signes d’agressivité cytologique. Figure 21. Carcinome muco-épidermoïde de haut grade (faible grossissement) 1 : Tissu adipeux normal 2 : Architecture anarchique avec stroma fibreux 3 : Lobules épithéliaux dédifférenciés 4 : Persistance d’une muco-sécrétion. Figure 22. Carcinome muco-épidermoïde de haut grade (fort grossissement) 1 : Stroma fibreux 2 : Ilots épithéliaux faits de petites cellules intermédiaires. Pour l’anatomo-pathologiste, le diagnostic différentiel dépend du grade histologique. Il comprend les adénocarcinomes à cellules acineuses, les carcinomes malpighiens primitifs ou métastatiques et les carcinomes rénaux métastatiques. Les tumeurs de faible grade peuvent récidiver localement en cas d’exérèse insuffisante (l’invasion tumorale n’est pas toujours facile à repérer lors de la chirurgie), par contre les métastases sont rares. Les tumeurs de haut grade ont un pronostic plus péjoratif avec récidives locales, métastases ganglionnaires, cutanées, pulmonaires et osseuses. 37 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 3) - Carcinome Adénoïde Kystique (CAK) Les CAK représentent environ 12% de tous les cancers des glandes salivaires et 5% environ des cancers de la parotide (les CAK sont beaucoup plus fréquents dans les glandes salivaires accessoires que dans la parotide). Il s’agit d’une tumeur d’évolution lente qui, pouvant classiquement s’accompagner d’une atteinte du nerf facial. Macroscopie C’est une tumeur solide, ferme, blanc-beige ou rosée, tantôt bien limitée mais non encapsulée, parfois invasive. Histologie Il s’agit d’une tumeur non encapsulée et très infiltrante. Elle associe différents aspects architecturaux : cribriforme (le plus classique), tubulaire et canalaire, trabéculaire et solide. Tous les types histologiques sont constitués par des cellules tumorales uniformes, petites et sombres. La basale épithéliale est classiquement épaisse et souvent hyaline (ce sont ces accumulations de basale entre les cellules tumorales qui définissent la forme cribriforme). Le stroma est très nettement délimité du contingent épithélial. Il peut présenter un aspect hyalin ou myxoïde. La présence d’invasion nerveuse est très caractéristique des CAK. Pour l’anatomo-pathologiste, le diagnostic est généralement facile dans les formes cribriformes mais peut être beaucoup plus difficile dans les formes mixtes ou solides et peut être confondu avec une tumeur mixte cellulaire, un carcinome polymorphe de bas grade, un adénome à cellules basales et un carcinome canalaire parotidien. Figure 23. Carcinome adénoïde kystique (faible grossissement) 1 : Tissu adipeux 2 : Ilots Lobules épithéliaux cribriformes caractéristiques 3 : Stroma 4 : Zone de dédifférenciation. Figure 24. Carcinome adénoïde kystique (fort grossissement) 1 : Parotide normale 2 : Invasion nerveuse par les lobules épithéliaux. Les récidives sont très fréquentes et suivent souvent les trajets nerveux. Les métastases ganglionnaires sont rares et les métastases à distances sont classiquement tardives, le plus souvent après plusieurs récidives. Des facteurs histo-pronostiques (classification de Szanto) ont été proposés. Leur valeur reste très discutée. 38 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 4) - Tumeur mixte maligne Parmi les tumeurs mixtes malignes, les plus fréquentes (90%) sont les carcinomes développés dans un adénome pléiomorphe pré-éxistant. Beaucoup plus rares (10%) sont les véritables tumeurs mixtes malignes ou carcino-sarcomes associant un double contingent épithélial malin et conjonctif malin, survenant d’emblée. Les carcinomes développés sur tumeurs mixtes pré-existantes peuvent apparaître comme une poussée évolutive rapide d’une tumeur évoluant depuis longtemps (2 à 50 ans) ou comme l’évolution d’une récidive. Ces tumeurs représentent 7% des carcinomes des glandes salivaires et le risque de dégénérescence est évalué entre 4 à 6%. Macroscopie Les mêmes aspects que ceux des adénomes pléiomorphes bénins sont retrouvés, mais ces tumeurs sont mal limitées et parfois invasives et adhérentes. Elles comportent des foyers de nécrose et d’hémorragie. Histologie Il s’agit d’un adénocarcinome qui peut présenter toutes les formes des carcinomes parotidiens. On peut également constater la présence de foyers indifférenciés. Il est nécessaire de retrouver les structures d’un adénome pléiomorphe résiduel dans la tumeur pour affirmer le diagnostic de carcinome sur adénome pléiomorphe. Dans les formes les plus différenciées, c’est le caractère invasif, destructeur, la présence de foyers de nécrose et d’hémorragie ainsi que l’invasion nerveuse et vasculaire qui vont permettre de poser le diagnostic. Pour l’anatomo-pathologiste, le diagnostic de malignité est facile dans les formes invasives, le problème étant d’affirmer la coexistence avec un adénome pléiomorphe. Lorsque l’invasion est minime et la tumeur très bien différenciée, toute la difficulté est d’affirmer la malignité de la lésion. Figure 25. Tumeur mixte maligne 1 : Ilots épithéliaux. 2 : Stroma abondant. 3 : Foyer de cellules myoépithéliales, résidu de la tumeur mixte initiale. Figure 26. Tumeur mixte maligne 1 : Ilots épithéliaux. 2 : Stroma abondant. 3 : Foyer de cellules myoépithéliales, résidu de la tumeur mixte initiale. 39 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 5) - Adénocarcinomes S.A.I. (sans autre critère d’identification) Il s’agit de tumeurs épithéliales malignes ne présentant pas de caractéristique permettant de les classer dans un groupe particulier. C’est l’une des tumeurs épithéliales les plus fréquentes des glandes salivaires après les carcinomes muco-épidermoïdes et les carcinomes à cellules acineuses. Ces tumeurs ne présentent pas de caractéristiques cliniques ni évolutives spécifiques à la parotide. Parmi ces carcinomes, certains sont indifférenciés caractérisés par des cellules anaplasiques disposées en nappes ou en îlots irréguliers. Leur pronostic est très péjoratif. Figure 27. Adénocarcinome peu différencié 1 : Ilots cellulaires irréguliers 2 : Stroma peu abondant. Figure 28. Adénocarcinome SAI à fort grossissement. Cellules épithéliales atypiques avec noyaux volumineux, irréguliers, clairs (quelques mitoses). Figure 29. Adénocarcinome SAI à fort grossissement. Cellules épithéliates atypiques avec noyaux volumineux, irréguliers, clairs (quelques mitoses). 40 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S 6) - Métastases Les métastases intra-parotidiennes les plus classiques sont celles des carcinomes de la région temporo-faciale. Les trois grands types tumoraux sont : carcinome épidermoïde, mélanome malin et carcinome à cellules de Merckel. C’est dans ce contexte que l’immuno-marquage s’avère utile pour caractériser les métastases de diagnostic difficile et les différencier des carcinomes parotidiens primitifs. 41 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S C - PATHOLOGIE LYMPHOÏDE DE LA PAROTIDE La parotide est également un organe lymphoïde. Dans ce contexte, la présence d’îlots lymphoïdes et de ganglions intra-parotidiens est banale. La pathologie lymphoïde parotidienne est largement méconnue et sous-évaluée (environ 17% des tumeurs malignes des glandes salivaires principales). Elle couvre tous les aspects de la pathologie lymphoïde en étant dominée par les hyperplasies lymphoïdes réactionnelles et les lymphomes MALT. De diagnostic parfois extrêmement difficile, cette pathologie nécessite des compétences particulières tant sur le plan cytologique qu’histologique, et une gestion spécifique des prélèvements. L’apport de l’examen cytologique est essentiel dans ce domaine : s’il ne permet pas toujours de caractériser les lésions de façon précise et parfois même de trancher entre bénin et malin (hyperplasies lymphoïdes et lymphomes à petites cellules matures), il permet par contre de prévoir le type de chirurgie et de gérer au mieux le prélèvement. Dans l’idéal, la pièce fraîche sera envoyée rapidement au laboratoire et fera l’objet d’appositions pour analyse cytologique, de prélèvements de tissu frais pour examen cytogénétique, de prélèvements congelés pour étude immuno-histochimie et biologie moléculaire, et d’une fixation appropriée à déterminer avec le pathologiste. Si le transfert rapide dans un laboratoire compétent est impossible, le minimum indispensable est représenté par des appositions sur lames et une fixation convenable de la pièce d’exérèse. La description histologique des lymphomes sort du cadre de cette étude. Une entité mérite d’être soulignée en raison de ses implications cliniques et thérapeutiques : L’Hyperplasie Lympho-épithéliale Kystique du HIV Ces lésions sont souvent bilatérales et surviennent dans un contexte particulier : dysimmunité ou immuno-suppression. Il s’agit de lésions nodulaires à la fois charnues et kystiques de couleur brun-rouge à l’examen macroscopique. Sur le plan histologique, les structures kystiques uniques ou multiples, sont bordées par un épithélium malpighien mince et sont sous-tendues par une population lymphoïde mature sans anomalie avec épithéliotropisme. Il est parfois difficile de les différencier des kystes branchiaux. En l’absence de tout contexte spécifique, leur découverte implique un bilan clinique et biologique à la recherche de la pathologie dysimmunitaire sous-jacente. Figure 30a. Hyperplasie lymphoïde kystique. Figure 30b. Hyperplasie lymphoïde kystique, détail cellulaire. 1. Revêtement épithélial 2. Tissu lymphoïde. 42 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S II. Anatomo-pathologie pratique L’anatomo-pathologie ne se limite plus à un examen histologique standard visant à donner le diagnostic des tumeurs et éventuellement leur pronostic. Elle doit être conçue comme une aide au diagnostic préopératoire, et à la prise en charge thérapeutique. Elle dispose d’un arsenal technique sous-estimé. Ce chapitre, résolument pratique, a pour but de faire le point sur les différentes techniques diagnostiques mises à la disposition des chirurgiens. A - LA CYTOLOGIE La cytologie parotidienne est une cytologie difficile en raison du caractère très hétérogène et des multiples formes des tumeurs des glandes salivaires. Dans son application diagnostique, elle ne prétend pas caractériser de façon précise toutes les tumeurs. Son but est de différencier entre bénignité et malignité, et de diagnostiquer quelques tumeurs caractéristiques de façon fiable (adénome pléiomorphe, cylindrome, cystadénolymphome, oncocytome). Par ailleurs, elle permet de différencier les tumeurs salivaires primitives des lésions lymphoïdes (ganglions hyperplasiques ou lymphomateux), en sachant qu’il est très difficile parfois d’en affirmer la bénignité. Néanmoins, la mise en évidence d’une pathologie lymphoïde impliquera un protocole macroscopique et des prélèvements spécifiques (envoi du ganglion en pièce fraîche). La cytoponction permet ainsi une meilleure information des patients et une meilleure planification de la stratégie chirurgicale. De réalisation simple, la cytoponction est un examen pré-opératoire bien toléré par les patients. Plusieurs techniques sont décrites : celles avec aspiration et celles sans aspiration. Afin de limiter le nombre d’examen non contributif, chaque nodule parotidien est ponctionné à trois reprises. Le matériel prélevé par ponction est étalé sur le plus de lames possible. Il est souvent très réduit et il n’est pas rare de n’avoir qu’un seul étalement par passage. Selon l’organisation des équipes de soins, la cytoponction peut être réalisée par le chirurgien ou par l’anatomopathologiste. Les points clef d’une ponction réussie sont, d’une part la technique de ponction elle même, d’autre part la rapidité à effectuer l’étalement ; le ponctionneur doit en outre s’assurer dans le même temps (et à l’œil nu) de la suffisance du matériel cellulaire prélevé. Il a été démontré que la pratique régulière de la cytoponction permettait d’améliorer sa sensibilité et sa spécificité. La valeur diagnostique de la cytoponction à l’aiguille fine pour le diagnostic de malignité ou de bénignité est très bonne. Selon les séries, la sensibilité varie entre 79 et 100% et la spécificité entre 86 et 100% . Alors que la valeur de différenciation malin-bénin de la cytoponction est très fiable, sa valeur prédictive de diagnostic histologique est beaucoup plus réservée (sauf dans le cadre des adénomes pléiomorphes), et particulièrement dans le cadre des tumeurs malignes. B - MACROSCOPIE Il est préférable d’éviter d’ouvrir les pièces d’exérèse chirurgicale au bloc opératoire. En effet, le sens de l’ouverture pas toujours respecté ainsi que les phénomènes de rétraction tissulaire qui sont immédiats, font perdre les repères et rendent difficile l’appréciation des marges de la tumeur et de leurs rapports avec les limites de résection. Sur le plan technique, certaines règles s’imposent : 43 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S w Ouvrir une pièce chirurgicale suivant le plus grand plan de section, en passant par le milieu de la tumeur que l’on palpe. La tranche doit être nette et il ne faut pas séparer les 2 plans de section pour que le pathologiste puisse reconstituer la pièce. Figure 31. Technique d’ouverture de la pièce opératoire. Ouverture du lobe superficiel sur un plan médian, dans son plus grand axe. • Repérer la pièce par des fils. • Dans le cas d’une tumeur d’aspect malin ou qui est très adhérente : ne pas ouvrir mais orienter la pièce d’exérèse et repérer par des fils la ou les zones d’adhérence afin de faciliter l’encrage (encre de chine) et l’examen des limites de résection. Quelques tumeurs sont caractéristiques dès l’examen macroscopique : Les tumeurs mixtes sont en général faciles à repérer. Elles sont très fermes, charnues, souvent très blanches, luisantes et de contours festonnés. Elles sont très bien limitées et sans adhérence aux tissus avoisinants. Les cystadénolymphomes sont également très bien limités, de couleur rose sombre à rouge brun, d’aspect charnu. Ces tumeurs sont molles et laissent apparaître le plus souvent un matériel d’aspect suppuré lorsqu’on les ouvre. A l’opposé, les cancers invasifs très fermes mal limités, adhérents aux structures avoisinantes sont en général assez facilement identifiables avant même d’avoir ouvert la pièce d’éxérèse. Leurs limites sont souvent difficiles à apprécier sur le plan macroscopique, ce qui justifie un protocole de prélèvement spécifique, guidé par les repères du chirurgien et l’encrage de la surface. Il est préférable de ne pas ouvrir ces lésions. Toutes les tumeurs nodulaires charnues qui ne présentent pas l’aspect des tumeurs mixtes caractéristiques ou des cystadénolymphomes peuvent entrer dans n’importe quel cadre et devront être considérées comme des tumeurs de diagnostic difficile, laissant prévoir un examen extemporané aléatoire et une réponse histologique retardée . C - LA BIOPSIE EXTEMPORANÉE Lors d’une parotidectomie, la biopsie extemporanée reste indispensable et fait partie intégrante de l’acte chirurgical. Elle est considérée comme difficile dans le cadre de la pathologie parotidienne. Les limites à connaître sont d’ordre technique. Le matériel d’extemporanée comporte des artéfacts liés à la congélation qui le rend beaucoup plus difficile à interpréter sur le plan histologique. Les coupes à congélation sont souvent épaisses et la coloration rapide ne permet pas une analyse fine des cellules. 44 A N A T O M O - P A TH O L O G I E D E S TU M E U R S P A R O TI D I E N N E S Dans ce contexte, l’interprétation est basée sur la macroscopie permettant d’orienter les prélèvements extemporanés sur les zones les plus significatives et confirmée par l’histologie qui se basera plus sur l’architecture de la lésion que sur les critères cellulaires. Seules les lésions très caractéristiques (adénome pléiomorphe classique, cystadénolymphome, oncocytome, certaines formes d’adénomes à cellules basales, carcinome adénoïde kystique dans sa forme caractéristique) pourront donner lieu à une réponse formelle. Dans tous les autres cas, l’examen implique dialogue et concertation entre pathologiste et chirurgien. Il est nécessaire que le pathologiste soit informé de tous les éléments du dossier au moment de l’extemporanée (cytologie et IRM) ainsi que des données per-opératoires (adhérence tumorale anormale…). Il aura ainsi entre les mains tous les éléments lui permettant de proposer le diagnostic le plus précis possible. Pour permettre au chirurgien de décider au mieux de sa stratégie thérapeutique, le pathologiste devra également préciser les limites de son interprétation. Compte tenu des limites de l’examen extemporané, un grading histo-pronostique fiable et définitif n’est pas envisageable. En revanche, le pathologiste peut le plus souvent donner une notion quant à l’agressivité de la tumeur et si les impératifs de dialogue et de concertation sont respectés, les erreurs d’extemporanée et les actes chirurgicaux inadaptés sont rares. D - L’IMMUNO-MARQUAGE Les tumeurs parotidiennes sont suffisamment caractéristiques pour que l’étude immuno-histochimique ne soit pas systématiquement nécessaire à leur diagnostic. L’immuno-marquage permet de caractériser les différents constituants des glandes salivaires (cellules épithéliales, cellules myoépithéliales, canaux intercalaires, éléments du tissu de soutien). Cette technique a démontré son utilité pour préciser l’histogénèse de certaines tumeurs primitives. Les immuno-détections sont d’une grande aide pour trancher entre tumeurs malignes primitives peu différenciées et métastases ou pour caractériser la nature et l’origine d’une métastase. Dans le cadre de la pathologie lymphoïde, elles sont indispensables. RÉFÉRENCES : 1 - ELLIS GL. Atlas of tumor pathology - Tumors of the salivary glands. Washington : AFIP, 1996. 2 - PILCH BZ. Head and neck surgical pathology. Philadelphia : Lippincott Williams & Wilkins, 2001. 3 - WENIG BM. Atlas of head and neck pathology. Philadelphia : Saunders, 1993. 4 - SEIFERT G. Histological typing of salivary gland tumours, 2nd edition ed. Berlin : Springler-Verlag, 1991. 5 - JANDU M, WEBSTER K. The role of operator experience in fine needle aspiration cytology of head and neck masses. Int J Oral Maxillofac Surg 1999 ; 28(6) : 441-4. 6 - BARTELS S, TALBOT JM, DITOMASSO J, et al. The relative value of fine-needle aspiration and imaging in the preoperative evaluation of parotid masses. Head Neck 2000 ; 22(8) : 781-6. 7 - AL-KHAFAJI BM, NESTOK BR, KATZ RL. Fine-needle aspiration of 154 parotid masses with histologic correlation: ten-year experience at the University of Texas M. D. Anderson Cancer Center. Cancer 1998 ; 84(3) : 153-9. 8 - MACLEOD CB, FRABLE WJ. Fine-needle aspiration biopsy of the salivary gland: problem cases. Diagn Cytopathol 1993 ; 9(2) : 216-24; discussion 24-5. 9 - WEINBERGER MS, ROSENBERG WW, MEURER WT, ROBBINS KT. Fine-needle aspiration of parotid gland lesions. Head Neck 1992 ; 14(6) : 483-7. 10 - YOUNG JA. Diagnostic problems in fine needle aspiration cytopathology of the salivary glands. J Clin Pathol 1994 ; 47(3) : 193-8. 45 EXPLORATION RADIOLOGIQUE DE LA GLANDE PAROTIDE L’imagerie des glandes salivaires s’est considérablement développée ces dernières années. L’intérêt de la radiologie est de procurer au clinicien une information anatomique ainsi qu’une information sur la nature de la tumeur investiguée. L’objet de ce chapitre est de définir les indications respectives de chaque examen et d’évaluer la valeur diagnostique de l’IRM dans le cadre de la pathologie tumorale parotidienne. I - LA SIALOGRAPHIE Cet examen n’a plus aucune indication dans la pathologie tumorale de la glande parotide. Son intérêt se cantonne à l’évaluation de lésions inflammatoires non tumorales qui sont à l’origine de la modification du système canalaire. II - LA SCINTIGRAPHIE La radio-isotopie appliquée à la pathologie salivaire n’a aucune indication en pathologie tumorale parotidienne courante. En effet, l’examen est limité par la résolution technique qui ne visualise que les tumeurs supérieures à 1,5 cm. Introduit dans les années 1980 dans le cadre du diagnostic des cystadénolymphomes et des oncocytomes qui concentraient le Technétium, ses résultats extrêmement variables ne lui ont pas permis de démontrer un véritable intérêt et son utilisation dans le cadre de la pathologie tumorale parotidienne est aujourd’hui tombée dans l’oubli. III - L’ÉCHOGRAPHIE Les avantages certains de l’échographie sont : son faible coût, sa large disponibilité, sa réalisation simple et son caractère non invasif ni douloureux. Son domaine d’application le plus performant est la distinction entre masse kystique et masse solide. La sensibilité de l’échographie dans la détection des tumeurs du lobe superficiel de la parotide est proche de 100%, tout en différenciant ces lésions des lésions extra-glandulaires superficielles. A l'inverse, l’examen est limité dans l’exploration du lobe profond à cause de la branche montante de la mandibule et l'apophyse mastoïde. Figure 1. Echographie partidienne avec tirs doppler : formation nodulaire, hypoéchogène, bien limitée. Pas d'hyper-vasculation. De nombreux travaux ont précisé les caractères ultrasonographiques propres aux tumeurs bénignes et malignes. En résumé, les tumeurs bénignes de plus de 1cm apparaissent homogènes, avec contours nets et réguliers. Les tumeurs malignes présentent un écho inhomogène, des limites irrégulières et floues. En deçà de 1 cm, les critères de malignité sont peu discernables. 47 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E Figure 2. Formation hypo-échogène développée au contact du ramus mandibulaire, à contours bien limités. Au doppler couleur, les tumeurs malignes apparaissent plus vascularisées que les tumeurs bénignes. L’échographie peut guider les cytoponctions à l’aiguille fine des tumeurs de petite taille. ÉCHOGRAPHIE AVANTAGES Non invasif Rapide Bonne discrimination tissulaire Bonne sensibilité diagnostique de tumeur Possibilité d’acquisition dans tous les plans INCONVÉNIENTS Opérateur dépendant Faible définition des structures profondes Information osseuse limitée IV - LA TOMODENSITOMÉTRIE La tomodensitométrie a été introduite dès la fin des années 1970 comme méthode diagnostique en pathologie tumorale parotidienne. L’intérêt de l’examen réside dans l’exploration du lobe profond et vient à ce niveau compléter les manques de l’échographie. L’examen dépiste presque 100% des tumeurs parotidiennes ; le nerf facial n’est pas visualisé par la tomodensitométrie. Tomodensitométrie après injection de produit de contraste iodé : rehaussement d'une tumeur parotidienne gauche intéressant le lobe profond avec extension à la région para-pharyngée et muscles ptérygoïdiens. 48 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E L’étude de l’espace para-pharyngé est rendue possible et Som a décrit un plan graisseux de faible densité entre parotide et espace para-pharyngé, refoulé en dedans par les tumeurs parotidiennes et en dehors par les tumeurs para-pharyngées bénignes. La tomodensitométrie permet une évaluation précise du volume tumoral mais sa valeur diagnostique de nature tumorale apparaît très inconstante. L’utilisation de produit de contraste permet d’apprécier le rehaussement de certaines tumeurs intra-glandulaire (hémangiome) mais a surtout l’avantage d’augmenter la sensibilité de détection tumorale. La tomodensitométrie permet la réalisation d’un bilan d’extension loco-régionale et la détection d’adénopathies nécrotiques satellites plaide en faveur de la malignité. TOMODENSITOMÉTRIE AVANTAGES Champ de vision large Sensible à la calcification tissulaire Sensible à la participation osseuse Bonne discrimination tissulaire Non opérateur dépendant INCONVÉNIENTS Acquisition transversale quasi exclusive Nécessité de produit de contraste Irradiant V - L’IMAGERIE PAR RÉSONANCE MAGNÉTIQUE : IRM L’IRM constitue l’examen de choix dans l’exploration des processus tumoraux parotidiens. Cet examen présente un intérêt majeur dans l’exploration de la pathologie tumorale des glandes salivaires. Il s’agit d’un examen non invasif, procurant une excellente résolution anatomique et une information de nature tumorale très fiable. L'intérêt de l'IRM par rapport à la tomodensitométrie est sa meilleure résolution spatiale, en particulier dans l'exploration de la région para-pharyngée. L'IRM permet de plus une analyse topographique précise des rapports entre tumeur et axes vasculaire et nerveux. Enfin, l'IRM à l'avantage de pouvoir détecter certains diagnostics spécifiques avec fiabilité (tumeur mixte, lipome, hémangiomes…) La valeur diagnostique de malignité ou de bénignité de l’IRM est très bonne, similaire à celle de la cytoponction. Selon les séries, les valeurs de sensibilité et de spécificité sont comprises entre 80 et 100%. La valeur prédictive du type histologique tumorale de l’IRM pour les tumeurs bénignes apparaît assez fiable (particulièrement pour les adénomes pléiomorphes), alors qu’elle est nulle pour le diagnostic histologique des tumeurs malignes. I.R.M. AVANTAGES Non invasif Reconstruction dans tous les plans Excellente discrimination tissulaire Non opérateur dépendant INCONVÉNIENTS Faible disponibilité Faible définition des corticales osseuses Durée d’acquisition importante Non toléré par tous (claustrophobie) Deux séquences sont utilisées. La séquence T1 est considérée comme anatomique parce qu’elle associe une bonne résolution spatiale à un bon contraste tissulaire. La séquence T2 est plus utile pour mettre en évidence les processus pathologiques essentiellement de nature hydrique (œdème, inflammation, nécrose…) 49 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E A - CARACTÉRISTIQUES IRM DE LA RÉGION PAROTIDIENNE NON PATHOLOGIQUE 1 - Le parenchyme parotidien Le parenchyme parotidien normal présente un signal intermédiaire en T1, plus intense que le muscle mais moins intense que la graisse périphérique, en raison de son contenu partiellement graisseux. La capsule périphérique apparaît fine, régulière, hypo-intense, discrètement lobulée. En fonction du degré de trophicité de la glande, son organisation lobulaire apparaît plus ou moins apparente. Aucune séparation capsulaire entre le lobe superficiel et le lobe profond n’est décelable. 2 - Canal de Sténon Le canal de Sténon apparaît comme une structure canalaire de 2 à 3 mm de diamètre, hypo intense en T1, hyper intense en T2, circonscrite par la graisse buccale, décrivant son trajet habituel latéro-massétérin avant de pénétrer dans le muscle buccinateur. Le segment extra parotidien du canal, s’étendant de la cavité orale au hile glandulaire, est visible constamment. Les branches intra parotidiennes ne sont perçues que dans deux tiers des cas, et s’abouchent de manière caractéristique à environ 90° sur le canal principal. 3 - Nerf facial La visibilité du nerf facial intra parotidien reste très discutée. Bien que pour Dailiana, la partie du nerf s’étendant du pôle postéro supérieur au niveau de la veine rétro-mandibulaire soit perçue dans 72% des cas, la majorité des auteurs ne discriminent pas le nerf des autres structures canalaires et septales en aval de son point de pénétration dans la loge parotidienne. Plusieurs constructions ont été proposées afin de prédire le trajet du nerf facial, et indiquer la nature exo ou endo-facial de certaines tumeurs. 4 - Ganglions intra-parotidiens La parotide peut contenir 20 à 30 ganglions. Les ganglions intra-parenchymateux mesurent moins d’un centimètre, sont bien limités, leur cortex est hypo-intense en T1 (hile iso-intense parfois visible), iso ou discrètement hyper-intense en T2, avec rehaussement cortical homogène sans zone de nécrose. 5 - Les structures vasculaires La veine rétro-mandibulaire et l’artère carotide externe apparaissent sous la forme de structures tubulaires bien limitées, suivies d’une coupe à l’autre et dont le signal T1 est variable. Ce signal s’homogénéise et devient hyper intense après injection de gadolinium. 6 - Extension tumorale para-pharyngée L’origine parotidienne d’une tumeur de grande taille ou de localisation profonde est parfois difficilement affirmée par l’examen clinique. L’imagerie et en particulier l’IRM, s’appuie sur trois critères pour l’affirmer. Le centre de la masse doit être latéral à l’espace para-pharyngé. La masse envahit l’espace para-pharyngé de dehors en dedans, déplaçant médialement la graisse de cet espace. La masse élargit la distance entre l’angle mandibulaire et le processus styloïde. 50 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E B - IRM ET PATHOLOGIE TUMORALE MALIGNE La première étape consiste à différencier les tumeurs bénignes des tumeurs malignes. Certains aspects communs aux tumeurs malignes permettent d’orienter le diagnostic radiologique vers la malignité. Plusieurs signes IRM paraissent évocateurs de malignité. 1 - L’extension tumorale L’infiltration tumorale des espaces adjacents (masticateur, parapharyngé, carotidien, sous digastrique) et de la graisse sous cutanée est caractéristique des carcinomes ; les tumeurs bénignes compriment le muscle au lieu de l'envahir. Cependant, toutes les tumeurs malignes ne sont pas infiltrantes. Il n’existe pas de corrélation entre le grade histologique de la tumeur et le degré d’infiltration. L’association de ganglions locorégionaux infiltrés, nécrotiques est très évocatrice de malignité. 2 - La morphologie lésionnelle L’existence d’une capsule incomplète et de contours mal limités n’est pas spécifique de malignité même si la présence d’une fine capsule complète évoque plutôt une lésion bénigne. De petites lésions malignes à contours nets sont parfois notées. 3 - Le signal Un hypo-signal T2 semble prédictif d’une malignité. Le caractère homogène ou non de la lésion en séquences T1 et T2 ainsi qu’après injection de gadolinium ne semble pas avoir de valeur prédictive de malignité ou de bénignité. La taille tumorale, sa prise de contraste et sa topographie sont des critères non discriminants. T1 gado (figure 4b). T1 (figure 4a). Les critères de malignité, au nombre de quatre, sont ici tous réunis : - Hypo-signal T2 Signal très hétérogène Contours irréguliers Infiltration adjacente La tumeur parotidienne présente un volumineux développement para-pharyngé, refoulant en dedans la graisse para-pharyngée. T2 (figure 4c). Figures 4a, 4b & 4c. IRM d'une tumeur mixte maligne de la parotide gauche. 51 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E T1 gado (figure 5b). T1 (figure 5a). Dans ce cas de métastase intra-parotidienne de mélanome malin (photos 5a, 5b, 5c), les critères de malignité sont au nombre de trois : - Signal très hétérogène - Contours irréguliers - Infiltration adjacente T2 (figure 5c). Figures 5a, 5b &5c. IRM d’une métastase intra-parotidienne de mélanome. 52 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E C - IRM ET PATHOLOGIE TUMORALE BÉNIGNE 1 - Adénome pléiomorphe L’adénome pléiomorphe a classiquement des contours bien limités, d’aspect lisse ou lobulés. En séquence T1, la tumeur est en hypo ou iso-signal par rapport au parenchyme glandulaire adjacent, comportant parfois des foyers hémorragiques hyper-intenses. En séquence T2, la tumeur présente un hyper-signal franc et peut être hétérogène. On note en séquence T1 gadolinium une prise de contraste tissulaire. Aucun de ces critères n’est spécifique. T1 (figure 6a). T1 gado (figure 6b). T2 (figure 6c). Figures 6a, 6b & 6c. Adénome pléiomorphe de la parotide droite. 53 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E 2 - Tumeur de Warthin En séquence T1, les cystadénolymphomes ont un aspect en iso ou hypo-signal avec parfois des hyper-signaux focaux, aspécifiques, témoignant de la présence de cristaux de cholestérol, d’un contenu très protidique ou de remaniements hémorragiques. En séquence T2, une hyper-intensité s’observe dans les formes kystiques, alors que les formes charnues peuvent présenter un hypo-signal. Ses contours sont réguliers sans encapsulation. Après injection de gadolinium, le rehaussement est hétérogène, tissulaire pour les parties charnues, pariétal périphérique pour les composantes kystiques. T1 (figure 7a). T1 gado (figure 7b). T2 (figure 7c). Figures 7a, 7b & 7c. Tumeur de Warthin de la parotide gauche. 54 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E 3 - Lipome En séquence T1, le lipome est en hyper-signal, hétérogène, d’intensité équivalente à celui du tissu graisseux de la joue. En séquence T2, on note un hyper-signal persistant. Après injection de gadolinium, le rehaussement est hétérogène. Le lipome présente des contours réguliers. T1 (figure 8a). T1 gado (figure 8b). T2 (figure 8c). Figures 8a, 8b & 8c. Lipome du prolongement antérieur de la parotide gauche. 55 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E 4 - Kyste En séquence T1, le kyste est en hypo-signal et apparaît très bien limité. En séquence T2, on note un hyper-signal franc, indiquant la nature liquidienne du contenu. Après injection de gadolinium, le signal du kyste est inchangé en séquence T1. Le kyste est de forme arrondie, à contours réguliers. T1 (figure 9a). T1 gado (figure 9b). T2 (figure 9c). Fig 9a, 9b & 9c : Kyste liquidien de la parotide droite. 56 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E VI - APPROCHE RADIOLOGIQUE COMPARATIVE L'analyse radiologique procure une information plus ou moins précise selon le type d'investigation. Les figures 10a, 10b et 10c, correspondent au bilan radiologique réalisé chez une patiente de 43 ans, présentant une tumeur parotidienne droite. Figure 10a. Formation nodulaire hypo-échogène à contours irréguliers. Pas de diagnostic spécifique. Figure 10b. Formation nodulaire tissulaire du lobe superficiel de la parotide droite, partiellement rehaussée. Pas de diagnostic spécifique à ce stade. Figure 10c. Formation parotidienne droite du lobe superficiel, en hyper signal T2, rehaussée, évoquant un adénome pléiomorphe. 57 E X P L O R A T I O N R A D I O L O G I Q U E D E L A G L A N D E P A R O TI D E RÉFÉRENCES 1 - WITTICH GR, SCHEIBLE WF, HAJEK PC. Ultrasonography of the salivary glands. 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J Oral Maxillofac Surg 2001; 59(5):525-8; discussion 529-30. 58 LES TUMEURS BÉNIGNES : PRÉSENTATION CLINIQUE La découverte, habituellement fortuite par le patient, d'une tuméfaction dans la région parotidienne est le motif de consultation. Cette tuméfaction siège dans l'aire de projection de la région parotidienne sous le lobule de l'oreille, en arrière de la branche montante de la mandibule. Cependant, les prolongements anatomiques, plus ou moins développés, de la glande : région mastoïdienne, pôle postérieur de la région sous mandibulaire, partie médiane de la joue, oropharynx, sont autant de sites possibles de développement d'une tumeur parotidienne. Il faut donc toujours penser à cette possibilité d'une étiologie parotidienne lorsque l'on découvre une tuméfaction dans l'une des régions citées. Les erreurs diagnostiques les plus fréquentes concernent les localisations au niveau du prolongement jugal faisant évoquer le diagnostic de kyste dermoïde de la joue ainsi que les localisations au pôle inférieur pouvant en imposer pour une adénopathie cervicale haute ou une tumeur de la glande sous maxillaire (photo 1). Photo 1 - Patient présentant un adénome pléiomorphe du prolongement jugal ayant pour antécédent une intervention pour « kyste demoïde » de la joue. La taille, la consistance, la mobilité, par rapport au plan cutané et en profondeur, sont appréciées par la palpation. Photo 2 - Tumeur du pôle inférieur de la parotide se présentant cliniquement comme une tuméfaction de la région cervicale haute ou de la région sous maxillaire. 59 L E S T U M E U R S B É N I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E L'adénome pléiomorphe est la plus fréquente des tumeurs parotidiennes. C'est l'éventualité diagnostique que l'on retient en premier, en présence d'une tuméfaction arrondie ou fusiforme (photo 3), de consistance ferme, non douloureuse. La tumeur est parfois légèrement sensible à la palpation appuyée, de taille et d'ancienneté très variables, atteignant préférentiellement les patients de sexe féminin. Photo 3 - Patiente présentant un adénome pléiomorphe en pleine parotide. De petite taille, de 1 à 3 cm de diamètre, elle est parfois plus importante, ayant fréquemment, dans ce cas, fait l'objet d'un accroissement récent. Souvent cette tuméfaction donne sous le doigt l'impression d'être superficielle, immédiatement ou presque immédiatement sous cutanée. Plus rarement, elle est profonde, au maximum enclavée et non mobilisable, entre le bord antérieur de la mastoïde et le bord postérieur de la branche montante de la mandibule. Exceptionnellement, elle se développe au niveau du prolongement para-pharyngé et se manifeste au niveau de l’oropharynx (photo 4). Photo 4 - Patient présentant un adénome pléiomorphe du lobe profond à expression para-pharyngée. 60 L E S T U M E U R S B É N I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E Le cystadéno-lymphome, tumeur de Warthin, est typiquement différent par sa topographie et sa consistance. De siège habituellement postéro-inférieur, il est fluctuant à la palpation sauf dans les cas où la masse liquidienne intra-tumorale est sous tension. Il peut être bilatéral et se rencontre fréquemment chez le sujet de sexe masculin, classiquement après 50 ans. (photo 5). Certaines tumeurs malignes de bas grade (carcinomes muco-épidermoïdes, carcinomes à cellules acineuses et certains carcinomes adénoïdes kystiques) peuvent prendre l’apparence de tumeurs bénignes, en particulier une présentation sur le mode adénome pléiomorphe-like. Dans ce cadre, l’examen clinique a une valeur diagnostique « malin-bénin » faible. Ces limites ont entraîné le développement de méthodes diagnostiques complémentaires telles que la cytoponction et l’IRM. Photo 5 - Patient présentant une tumeur de Warthin du pôle inférieur. 61 LES TUMEURS MALIGNES : PRÉSENTATION CLINIQUE I - DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES GÉNÉRALES La pathologie maligne de la parotide est fréquemment sous-estimée : l’incidence varie de 26 à 32 % des tuméfactions parotidiennes opérées selon les séries (Freling, Spiro). La plus vaste étude épidémiologique, réalisée par Wahlberg, à partir des données du registre suisse du cancer, sur 2283 patients présentant un carcinome parotidien, révèle une légère prédominance masculine pour ces tumeurs avec 1.1 homme atteint pour 1 femme. L’âge moyen du diagnostic est de 61.7 ans (DS 17.3). Les carcinomes indifférenciés et les adénocarcinomes « no otherwise specified » surviennent plus tardivement, respectivement à 70 ans et 65 ans en moyenne. Les tumeurs malignes de la parotide sont rares chez l’enfant et l’adolescent (2% des cas). II - EXAMEN CLINIQUE Interrogatoire Devant une masse de la région parotidienne, l'interrogatoire cherche à préciser : la date d'apparition, l'allure évolutive (rapide ou lente, progressive ou par poussées), si elle s'accompagne de douleurs et s'il existe des antécédents d'exérèse d'une tumeur dans le vaste territoire des nœuds lymphatiques afférents parotidiens : § § § § la peau des régions frontale et temporale, de la racine du nez, de la pommette, de la partie postérieure de la joue, du conduit auditif externe et du pavillon de l’oreille, la glande lacrymale, les paupières, la conjonctive et l’œil, en partie la lèvre supérieure, la muqueuse de l’oreille moyenne y compris la trompe d’Eustache, la membrane tympanique, la muqueuse de la joue, la partie postérieure des fosses nasales, le voile du palais, la partie palatine de la gencive des molaires et le sinus frontal. Examen clinique L’examen général recherche des signes pouvant orienter vers un lymphome ou une néoplasie primitive extra-parotidienne. L'examen de la région parotidienne indique : le siège de la tumeur : dans la partie superficielle, inférieure ou profonde de la glande (en sachant qu'il est souvent difficile d'affirmer, avec certitude, qu'une tumeur appartient à la portion profonde), dans le prolongement masséterin ou dans le prolongement pré-tragien, § sa consistance : dure, ferme, rénitente ou molle, homogène ou non, § sa mobilité par rapport aux plans profonds et aux plans cutanés, § et ses dimensions. Ces deux derniers critères sont particulièrement importants, car ils permettent de définir le stade T selon la classification clinique TNM. Le tableau 1 décrit la nouvelle classification UICC de 2002 qui est la plus couramment utilisée en Europe . § 63 L E S T U M E U R S M A L I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E Tableau 1 : CLASSIFICATION TNM 2002 CLASSIFICATION T DE L’UICC (UNION INTERNATIONALE CONTRE LE CANCER) TX Renseignements insuffisants pour classer la tumeur primitive T1 Tumeur = 2 cm dans son plus grand diamètre sans extension macroscopique extra-parenchymateuse (peau, tissus mous, os, nerf) T2 Tumeur > 2 cm et = 4 cm dans son plus grand diamètre sans extension macroscopique extraparenchymateuse (peau, tissus mous, os, nerf) T3 Tumeur > 4 cm avec extension extraparenchymateuse (sans atteinte des structures listées en T4 et sans atteinte microscopique uniquement) T4A Tumeur avec atteinte de la peau, de la mandibule, du conduit auditif externe ou du VII T4B Tumeur envahissant la base du crâne, la ptérygoïde ou la carotide CLASSIFICATION N N0 Pas de signe d'atteinte des ganglions lymphatiques régionaux N1 Présence d'une seule adénopathie homo-latérale = à 3 cm. N2 N2A Présence d'un seul ganglion homo-latéral > à 3 cm et = à 6 cm dans sa plus grande dimension N2B Présence d'adénopathies homo-latérales multiples, toutes = à 6 cm N2C Présence d'adénopathies bilatérales ou contrôlatérales = à 6 cm N3 Présence d'une adénopathie > à 6 cm dans sa plus grande dimension CLASSIFICATION PAR STADES STADE 64 EQUIVALENCE TNM Stade I T1a, N0, M0 T2a, N0, M0 Stade II T1b, N0, M0 T2b, N0, M0 T3a, N0, M0 Stade III T3b, N0, M0 T4a, N0, M0 Quel que soit T (sauf T4b), N1, N0 Stade IV T4b, quel que soit N, M0 Quel que soit T, quel que soit N, M1 Quel que soit T, N2 ou N3, M0 L E S T U M E U R S M A L I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E L'examen clinique comporte également : § § § § un examen cervical, à la recherche d'adénopathies, un examen bucco-pharyngé à la recherche d’une extension parapharyngée et de la présence de sang au canal de Sténon, une exploration de la motricité faciale pour dépister un discret déficit, notamment au niveau de la branche mentonnière qui est la plus fragile, un examen des téguments de la face et du cuir chevelu à la recherche d’une lésion ou de cicatrices d'interventions antérieures. III - VALEUR DIAGNOSTIQUE DE L’EXAMEN CLINIQUE Le plus souvent il n’existe aucun caractère clinique permettant de différencier une tumeur bénigne d’une tumeur maligne, en particulier lorsque la tumeur est de petite taille. Spiro rapporte ainsi 69% de patients asymptomatiques concernant sa série de 354 tumeurs malignes et Fitzpatrick 84%. Cependant l’examen clinique peut mettre en évidence des signes fortement évocateurs de malignité : des douleurs (qui évoquent un envahissement cutané ou nerveux : nerf auriculo-temporal ou branche auriculaire du plexus cervical superficiel), une parésie faciale, une fixité, une croissance rapide ou la présence d’adénopathies. w w w w w w La douleur est notée, dans seulement 6% à 15% des cas de tumeurs malignes de la parotide selon les séries (Eneroth, Spiro). La douleur est plus fréquente en cas de tumeur maligne mais n’est pas spécifique des carcinomes adénoïdes kystiques. Elle peut être notée dans le cadre des tumeurs bénignes. Une parésie ou une paralysie faciale sont rapportées dans 12% à 22% des cas selon les séries (Pedersen, Spiro). Une tumeur fixée ou à l’origine d’une infiltration dermique est toujours fortement suspecte de malignité. Elle est notée dans 6% à 58% des tumeurs selon les séries (Kane, Pedersen). Certaines tumeurs bénignes peuvent cependant s'enclaver dans l’espace mastoïdo-mandibulaire, sans que cette fixité ait une signification pronostique péjorative. Des adénopathies cervicales sont notées dans 18% à 21% des cas (Spiro, Pedersen). L’augmentation rapide de la taille d’une tuméfaction parotidienne connue est en faveur d’un carcinome sur adénome pléiomorphe. Olsen à propos de 73 cas de carcinome sur adénome pléiomorphe, rapporte que dans 31% des cas, ce carcinome survient sur une tuméfaction connue depuis plus de 20 ans. En revanche, l’ancienneté d’une tuméfaction et la lenteur de sa croissance ne sont pas garantes de sa bénignité. Spiro rapporte ainsi 9% de tumeurs malignes évoluant depuis plus de 10 ans lors du diagnostic. 65 L E S T U M E U R S M A L I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E Figure 1 - Tumeur parotidienne maligne à présentation clinique bénigne (adénome pléiomorphe - like). Figure 2 - Tumeur évocatrice de malignité. Figure 3 - Tumeur maligne historique. 66 parotidienne fortement L E S T U M E U R S M A L I G N E S : P R É S E N TA TI O N C L I N I Q U E RÉFÉRENCES : 1 - ENEROTH CM. Histological and clinical aspects of parotid tumors. Acta Otolaryngol 1963 ; Suppl. 191 :71-75. 2 - FITZPATRICK PJ, THERIAULT C. Malignant salivary gland tumors. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1986 ;12 :1743-1747. 3 - FRELING MJM, MOLENAAR WM, VERMY A. Malignant parotid tumors :clinical use of MR imaging and histologic correlation. Radiology 1992 ;185 :691-696. 4 - KANE WJ, THOMAS V, McCAFFREY, KERRY D, LEWIS J. Primary Parotid Malignancies Arch Otolaryngol Head and Neck Surg 1991 ;117 :307-315. 5 - OLSEN KD, LEWIS EL. Carcinoma ex pleomorphic adenoma. A clinicopathologie review. Head and Neck 2001 ;9 :705-712. 6 - PEDERSEN D, OVERGAARD J, SOGAARD H, OVERGAARD M. Malignant parotid tumors in 110 consecutive patients : treament, result and prognosis. Laryngoscope 1992 ;102 :1064-1069. 7 - SPIRO RH. Salivary neoplasms : overview of a 35 years experience with 2807 patients. Head and Neck Surg 1986 ;8 :177-184. 8 - WAHLBERG P, ANDERSON H, BIORKLUND A, MOLLER T, PERFEKT R. Carcinoma of the parotid submandibular glands – a study of survival in 2465 patients – Oral Oncology 2002 ;38 :706-713. 67 TECHNIQUE CHIRURGICALE Il existe plusieurs variétés de parotidectomies, superficielle ou exofaciale - polaire inférieure totale simple avec dissection antérograde ou rétrograde - élargie à la peau avec ou sans sacrifice du nerf facial - associée ou non à un curage, à une greffe nerveuse. Dans ce chapitre abordant la technique chirurgicale, nous envisagerons successivement et uniquement à propos de cas cliniques, que : Parotidectomies exo-faciale et totale. Parotidectomie polaire inférieure Parotidectomie avec dissection rétrograde en chirurgie de première intention ; Les problèmes liés à la chirurgie des récidives et aux élargissements cutanés, ainsi que la réparation par greffe seront abordés dans les chapitres spécifiques. I - PAROTIDECTOMIES EXO-FACIALE ET TOTALE Quelle que soit la technique de parotidectomie prévue, il est des règles générales à respecter concernant la préparation du malade et de la région parotidienne, l’installation du patient, l’instrumentation. 1 - Préparation de la région parotidienne Les cheveux doivent être soigneusement rasés devant et derrière l’oreille uniquement dans la partie du visage et du cou exposés dans le champ opératoire ; La barbe sera rasée le matin de l’intervention ; La peau du visage et du cou seront soigneusement désinfectés à la BÉTADINE* la veille et le matin de l’intervention après la toilette ; Habituellement un shampoing à la BÉTADINE* est effectué lors de la douche préopératoire. 2 - Instrumentation La taille des instruments (pinces à disséquer et à hémostase – ciseaux - porte aiguille – écarteurs décolleur) doit être adaptée à cette chirurgie. Il est indispensable de disposer d’une coagulation bipolaire avec des pinces de taille adaptée, d’un moyen optique grossissant (lunettes – dans certains cas, le recours au microscope peut devenir indispensable) et d’un neurostimulateur à usage unique. Le monitorage du nerf facial en per-opératoire n’est pas systématique du moins dans la chirurgie de première intention et nous décrirons son utilisation dans le cas particulier de la chirurgie des récidives. Instrumentation adaptée par la taille. Pince bipolaire obligatoire - Neurostimulateur à usage unique - Lunettes grossissantes. 69 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E 3 - Installation du malade Intubation Le patient peut être intubé soit par voie buccale soit par voie nasale ce qui a l’avantage de pouvoir mieux écarter la branche verticale de la mandibule et de permettre ainsi un meilleur accès au tissu parotidien sous facial et au prolongement pharyngé. Figure 1 - Intubation par voie nasale - Cou en extension - Tête tournée du côté opposé. Position opératoire Le patient est installé : cou en extension - tête tournée du coté opposé à la parotide atteinte et maintenue par un bandeau - billot sous les épaules de manière à bien dégager la région cervicale. Les cheveux sont soigneusement maintenus en dehors du champ opératoire, le plus souvent par des bandelettes collées en bordure du champ. Figure 2 - Mise en place des champs et du champ collant transparent en avant pour voir l’hémiface et les contractions musculaires éventuelles. 4 - Incision Dessin du tracé de l’incision L’incision est tracée au crayon dermographique en suivant classiquement les contours d’un S italique. En fait elle est constituée de trois parties : • la supérieure, verticale, prétragienne dans un pli de peau sur une longueur de 2 à 3 cm, • la moyenne contournant le lobule de l’oreille et se dissimulant sous le pavillon ; elle ne doit pas trop se prolonger en arrière en particulier chez le sujet âgé, afin d’éviter de faire un angle trop aigu, source de nécrose, pour amorcer la troisième partie de l’incision, 70 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E • l’inférieure, courbe , située dans la mesure du possible dans un pli de peau et dont la longueur sera fonction du développement et du siège (limitée en cas de tumeur haute et de petite taille – plus importante en cas de tumeur volumineuse et / ou bas située). Figure 3 - Tracé de l’incision. Des repères seront tracés pour faciliter la suture en fin d’intervention. Il vaut mieux commencer par la partie inférieure de l’incision afin de ne pas être gêné par un saignement venant de plus haut et la mener de bas en haut. L’hémostase à la coagulation bipolaire doit être rigoureuse. 5 - Décollement du lambeau cutané Suivant le siège de la tumeur il peut se faire dans deux types de plans : • En cas de tumeur superficielle, il se fera sous la peau dans le tissu cellulo-graisseux au ras des bulbes pileux qui apparaissent nettement en particulier chez l’homme afin de rester à distance de la tumeur. • En cas de tumeur profonde, il est mené sous le plan du SMAS qui sera gardé en tension. Il ne doit pas dépasser : • en bas, le plan de la veine jugulaire externe - dont la section entre deux ligatures ne sera pas faite trop précocement afin de ne pas favoriser le saignement au niveau de la parotide, • en avant la limite antérieure de la glande parotide afin d’éviter tout traumatisme d’une branche terminale du nerf facial. Des fils, tracteurs, au nombre de trois à quatre sont passés en avant sur la tranche de section du lambeau cutané. Figure 4 - Décollement cutané limité en bas et en avant à la veine jugulaire externe. 71 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Un fil tracteur est mis en place en arrière sur le lobule de l’oreille et, pour certains, accroché à un poids pour maintenir le lobule de l’oreille écarté, pour d’autres, fixés sur la partie postéro-supérieure des champs. Dans la partie cervicale, lors du décollement, le nerf grand auriculaire est repéré sur les fibres superficielles du muscle sterno-cleido-mastoïdien. A ce niveau du cou, il n’ y a pas de muscle peaucier du cou et les fibres du muscle sterno-cleido-mastoïden sont immédiatement sous la peau. Le muscle sterno-cleido-mastoïden est dégagé jusqu’à son bord antérieur. Figure 5 - Décollement cutané s'arrêtant en bas au niveau de la veine jugulaire externe et en avant aux limites antérieures de la glande afin d'éviter le traumatisme des branches du nerf facial à leur émergence. 6 - Repérage et isolement du ventre postérieur du muscle digastrique Il est habituel de faire ce temps en premier car les insertions postérieures de ce muscle constitue le premier repère de découverte du nerf facial apportant un premier renseignement sur sa profondeur. Il faut prendre garde dans ce temps de dissection de rester superficiel par rapport au muscle et de ne pas disséquer en dessous de lui car dans cette région (sous-digastrique) se trouvent de nombreux dangers vasculo-nerveux, en particulier le nerf spinal. Une fois le ventre postérieur du muscle digastrique parfaitement individualisé et disséqué, le chirurgien se porte à la partie supérieure pour mettre en évidence le deuxième repère de découverte du nerf facial. Figure 6 - L’écarteur maintient écarté, la veine jugulaire externe, le grand nerf auriculaire et le pôle inférieur de la glande pour voir le ventre postérieur du digastrique au dessus et plus profond par rapport au bord antérieur du muscle sterno-cleido-mastoïdien. 72 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E 7 - Décollement du conduit cartilagineux jusqu’au processus triangulaire de Schwalbe (pointer de Conley) Ce plan est très facile à trouver et le dégagement de la partie antérieure du conduit cartilagineux se fait de façon exsangue du moins dans sa partie supérieure ; en bas, il faut se méfier de la présence d’une collatérale de l’artère occipitale pouvant gêner la dissection et dont l’hémostase est parfois difficile. Figure 7 - Entre le pointer et les insertions du ventre postérieur du muscle digastrique, se trouve du tissu fibreux qu’il faudra sectionner pour aborder le nerf facial. Le tissu fibreux situé à la partie postérieure de la glande parotide entre ventre postérieure du muscle digastrique et conduit cartilagineux, est sectionné de la superficie vers la profondeur, en faisant l’hémostase chemin faisant pour ne pas être gêné par le sang en profondeur. Parfois la présence d’une collatérale de l’artère occipitale impose sa ligature pour éviter tout saignement intempestif lors de l’abord du tronc. Figure 8 - Ligature de l’artère stylo-mastoïdienne. Le champ opératoire doit être parfaitement exsangue pour le temps suivant, temps le plus important de l’opération. 73 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E 8 - Découverte du tronc du nerf facial Elle se fait en disséquant parallèlement à la direction du tronc du nerf jusqu’à sa bifurcation. En cas de doute sur la certitude dans l’identification du tronc du nerf on peut le stimuler à l’aide d’un neuro-stimulateur à usage unique et s’assurer de la contraction des muscles de la face. Figure 9a - Découverte du tronc du nerf facial. Figure 9b - Dissection du tronc du nerf jusqu’à sa bifurcation en amorçant la parotidectomie. Une fois le tronc du nerf isolé, il est suivi jusqu’à sa bifurcation pour identifier ses branches de division et adapter la technique opératoire au siège de la tumeur et au type de parotidectomie, superficielle exofaciale ou totale. Figure 10 - Identification des différentes branches de division à partir de la bifurcation ; dans ce cas, présence d’une branche intermédiaire qui semble soulevée. 74 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure11 Quel que soit le type de parotidectomie, les principes de la chirurgie des tumeurs parotidennes vis à vis du tronc du nerf ou de ses branches sont toujours les mêmes – Identification – Tunnelisation - Section - pouvant se faire selon les habitudes du chirurgien à l’aide du bistouri électrique ou des ciseaux après hémostase à la coagulation bipolaire. Chaque fois qu’une branche a été identifiée, isolée et disséquée du parenchyme parotidien il faut revenir soit vers le tronc soit vers l’une des deux premières branches de division pour identifier la branche collatérale sus ou sous jacente à la branche disséquée précédemment et refaire le même travail d’identification, tunnelisation et section et ainsi de suite, afin d’identifier et disséquer toutes les branches de terminaison du nerf. Lorsque l’on parvient à l’émergence des branches du tissu parotidien, il faut être vigilant car les branches peuvent se rapprocher les unes des autres, voire se croiser et s’exposer ainsi à la section. Figure12 Figure13 Figures 11-12-13 : La section du tissu parotidien superficiellement à la branche intermédiaire permet de constater qu’elle est sur la tumeur et donc que celle-ci est sous faciale à ce niveau. Cette dissection doit se poursuivre jusqu’à son émergence afin de pouvoir décroiser le tissu parotidien péri-tumoral de cette branche. 75 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 14 - Décroisement du tissu parotidien péri-tumoral par rapport à la branche intermédiaire. Figure 15 - Dissection de la branche cervico-faciale et de ses branches en exerçant une traction sur le tissu parotidien péri-tumoral (toujours exercer la traction sur le tissu parotidien à distance de la tumeur pour ne pas la rompre accidentellement). Figure16 - Poursuite de la dissection de la branche cervico-faciale et de ses branches, le tissu parotidien et la tumeur qui est, à ce niveau, exo-faciale étant maintenu en traction. 76 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 17 - Libération du tissu parotidien - où se trouve la tumeur - au niveau de partie moyenne et antérieur de la glande, de manière à pouvoir le basculer vers le bas. Figure 18 - Bascule du tissu parotidien vers le bas de manière à réaliser la dissection des branches inférieures de division. Figure 19 - Poursuite de cette dissection d’arrière en avant jusqu’à leur émergence de la glande. 77 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 20 - Fin de la parotidectomie exo-faciale par section du tissu fibreux antérieur à la glande, après s’être assuré de la situation des différentes branches nerveuses sous jacentes. Figure 21a - Parotidectomie exo-faciale terminée. Noter l’absence de tissu parotidien à l’endroit où la tumeur avait un développement sous-facial. Figure 21b - Pièce opératoire vue par sa face profonde. On note une exposition capsulaire qui impose la totalisation de la parotidectomie. 78 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Durant la parotidectomie superficielle, le canal de Sténon a été identifié, lié et enlevé avec tout le tissu parotidien qui l’entoure (prolongement péristénonien) de volume variable selon les individus. Concernant le déroulement de la parotidectomie, plusieurs éventualités techniques, pour contourner la tumeur et éviter ainsi son effraction, source de récidives, nous sont offertes en fonction du siège de la tumeur : • En cas de tumeur bas située, il est préférable de faire la parotidectomie superficielle de haut en bas alors qu’en cas de tumeur haut située, il est plus simple de la faire de bas en haut, • Si la tumeur se trouve à la partie moyenne, la parotidectomie superficielle est menée d’arrière en avant. Lorsque la parotidectomie superficielle exo faciale est terminée, on peut soit faire l’hémostase et refermer sur drainage aspiratif, soit totaliser en enlevant le tissu glandulaire sous facial. 9 - Ablation du tissu parotidien sous facial Elle doit être particulièrement soigneuse en regard du siège de la tumeur et celle-ci impose parfois la ligature des vaisseaux maxillaires internes et temporaux superficiels. Pour enlever tout le tissu parotidien profond, il faut mettre en place un écarteur sur la branche montante de la mandibule pour passer en avant de l’artère carotide externe qui ne sera liée qu’en cas de nécessité comme ce peut être le cas parfois pour une tumeur du prolongement pharyngien de la parotide ; Cette ablation est longue, minutieuse et souvent fastidieuse, car les branches doivent être écartées doucement, sans traction violente ; parfois, on peut mettre les branches en traction sur un lac de chirurgie vasculaire élastique afin de faciliter leur mobilisation. Figure 22 - Parotidectomie totale terminée. La veine jugulaire interne, liée en bas mais non reséquée de manière à éviter une majoration de la dépression, cache la carotide externe. 79 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E 10 - Fermeture Auparavant, il est indispensable de mettre en place un drain aspiratif en prenant garde que celui-ci ne vienne pas au contact du nerf facial. Figure 23 - Mise en place du drain de Redon (sous le muscle SCM pour éviter de venir au contact du nerf). Figure 24 - Fermeture cutanée en deux hémi-surjets. La fermeture se fait en deux plans, au niveau des parties cervicales et moyennes de l’incision, plan profond au fil résorbable de petite taille (N° 4/5 0) et plan cutané, en un plan à la partie supérieure, le plan cutané pouvant être réalisé en points séparés ou en surjet. Un pansement légèrement compressif est mis en place à la fin de l’intervention. 11 - Soins post-opératoires Ils doivent s’assurer de l’absence de saignement au niveau du bocal du drain de Redon ou d’hématome au niveau du pansement en cas de mauvais fonctionnement du drainage, ce qui n’est pas rare dans cette chirurgie car il est parfois difficile d’obtenir une étanchéité parfaite dans la région sous lobulaire. En cas de parésie faciale post-opératoire, souvent présente à une intensité variable, il est indispensable de faire des soins oculaires (larmes artificielles – occlusion de l’œil la nuit) La kinésithérapie postopératoire sera commencée dés que possible. Aucune antibio-prophylaxie n’est indiquée dans ce cadre. 80 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E II - PAROTIDECTOMIE POLAIRE INFÉRIEURE La parotidectomie polaire inférieure est une technique de chirurgie partielle de parotidectomie indiquée dans certains cas de tumeurs bénignes développées préférentiellement dans le pôle inférieur comme les cystadénolymphomes ou tout autre adénome monomorphe. On peut également avoir recours à cette technique pour l'exérèse d’adénopathies situées dans la partie inférieure de la parotide en vue d’analyse anatomo-pathologique. Cette parotidectomie se réalise de façon identique à une parotidectomie exo faciale quant à la recherche et à l’identification du tronc du nerf. Une fois le tronc identifié, on se porte ensuite jusqu’à la bifurcation et seulement les branches issues de la branche de division cervico-faciale seront isolées et disséquées jusqu’à leur sortie de la glande. Cette dissection des différentes branches se fait en commençant par la branche de terminaison la plus supérieure pour finir par la branche la plus inférieure. Chemin faisant tout le tissu parotidien est ainsi pédiculisé vers la partie inférieure de la parotide, la veine jugulaire externe sera identifiée, liée ou non, et le tissu parotidien enlevé et adressé au laboratoire d’Anatomie Pathologique pour analyse extemporanée. S’il s’agit d’une lésion de type adénome pléiomorphe, une parotidectomie exo faciale sera réalisée, par contre, s’il s’agit d’un cystadénolymphome l’intervention peut être considérée pour certains comme terminée. Cas clinique : Figure 25 - Projection cutanée de la tumeur en regard du pôle inférieur. Figure 26 - Aspect échographique de cette masse parotidienne hétérogène plus ou moins bien limitée aux contours mal définis et développée au niveau du pôle inférieur. 81 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 27 - Aspect tomodensitométrique de cette masse hétérogène dont le siège apparaît postéro-inférieur en plein parenchyme glandulaire. Figure 28 Figure 29 Figure 30 Aspect de la masse en IRM avec meilleure localisation de celle-ci, en dehors du plan veineux, tant sur l’incidence transversale que frontale, évoquant une localisation exo faciale. 82 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 31 - Décollement du lambeau cutané. Figure 32 - Répérage du ventre postérieur du muscle digastrique. Figure 33 - Ligature des artérioles, collatérales de l’artère occipitale qui gênent l’abord du tronc du nerf. 83 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 34 - Découverte du tronc du nerf facial après hémostase de l'artère. Figure 35 - Dissection du tronc du nerf jusqu’à sa bifurcation en sectionnant le tissu glandulaire superficiel au tronc. Figure 36 - Début de la dissection de la branche cervico-faciale en commençant par sa collatérale supérieure. 84 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 37 - Poursuite de la dissection de la branche cervico-faciale et de ses collatérales jusqu’à leur émergence. Figure 38 - Dissection de la veine jugulaire externe qui, dans ce cas, ne sera pas liée mais placée sur fil tracteur au dessus de la tumeur. La traction sur ce fil permet de maintenir écartée la branche cervico-faciale. Figure 39 - Mise en place d’un autre fil tracteur sur la veine jugulaire externe à son émergence en deçà de la tumeur et traction du pôle inférieur de manière à terminer la dissection des branches les plus inférieures. 85 TE C H N I Q U E C H I R U R G I C A L E Figure 40 - Décrochage postérieur en sectionnant le tissu glandulaire en arrière de la tumeur sous le tronc du nerf. Figure 41 - Parotidectomie polaire inférieure terminée. Figure 42 - Avant la fermeture des plans superficiels et après avoir mis en place le drainage, comblement de la dépression par suture du lambeau de SMAS - qui dans ce cas avait pu être réalisé- aux plans postérieurs. 86 VARIANTES TECHNIQUES I - INCISION CUTANÉE Le tracé de parotidectomie dit classique, pré-auriculaire puis prolongé inférieurement dans la région sous mandibulaire, a été décrit initialement par Adson et Ott en 1923. De légères modifications ont été proposées par la suite, basées sur le tracé initial. Afin de dissimuler l’incision cutanée, Appiami et Delfino (1984) puis Ferreira et al. (1990) ont proposé de remplacer l’extension sous mandibulaire du tracé par une incision rétro-auriculaire pré-capillaire, type lifting facial. Cette incision totalement dissimulée permet d’atténuer la cicatrice cutanée cervicale des tracés classiques. Les tumeurs parotidiennes du lobe profond avec extension para-pharyngée et les tumeurs très antérieures ne peuvent être traitées par ce type de tracé à cause d’une moins bonne exposition chirurgicale. II - LE LAMBEAU DE SMAS Le SMAS correspond au plan sous-cutané fibreux clivé entre la couverture aponévrotique de la glande et la peau. Le décollement se porte en avant jusqu’à l’aponévrose massétérine, sans la dépasser afin de ne pas léser les branches du nerf facial à leur sortie de la glande parotide. La confection d’un lambeau de SMAS (Système Musculo Aponévrotique Superficiel) est facultative. Pour certains elle est systématique dès lors que sa conception n’entraîne pas d’exposition capsulaire. Sa réalisation a un intérêt fonctionnel en limitant l’incidence du syndrome de Frey et esthétique en atténuant la dépression rétro-mandibulaire. Figure 43 - Réalisation du lambeau de SMAS par dissection superficielle au ras du derme et en profondeur au ras de la glande. Figure 44 - Lambeau de SMAS terminé et soulevé de manière à montrer le plan glandulaire intact. 87 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S III - DISSECTION RÉTROGRADE DU NERF FACIAL La dissection rétrograde du nerf facial est une variante de technique chirurgicale permettant à partir de la découverte des branches extraglandulaires du nerf facial de retrouver de façon rétrograde, le tronc du nerf . On peut y avoir recours dans deux circonstances : en chirurgie de première intention de façon exceptionnelle, lorsque la localisation de la tumeur de la parotide est telle qu’elle ne permet pas l’accès direct au tronc du nerf facial, en utilisant les repères décrits dans la technique classique, sans risque de créer une effraction tumorale. en chirurgie de deuxième intention lors de la chirurgie pour récidives d’adénomes pléiomorphes, quand il y déjà eu dissection du tronc du nerf et de ses branches lors de la première intervention. Dans cette circonstance beaucoup plus fréquente, cet artifice technique est particulièrement intéressant car il permet d’éviter d’intervenir en zone déjà opérée. Points particuliers de technique : La recherche des branches terminales du nerf facial se fait dans la portion pré-glandulaire lors de leur trajet sur le muscle masséter pour les branches inférieures ou dans le tissu cellulo-graisseux pour les branches supérieures. ◆ en chirurgie de première intention, le choix de la recherche des branches de terminaisons supérieures ou inférieures va se faire en fonction du siège de la tumeur. Si la tumeur a un développement postérieur et inférieur, le choix se portera sur les branches de terminaison de la branche temporo-faciale, par contre, si la tumeur se situe dans la partie moyenne et supérieure de la glande parotide, il faudra rechercher pour la dissection rétrograde, les branches de terminaison de la branche cervico-faciale. De toute façon, que la recherche se fasse au niveau des branches de terminaison de la branche cervico-faciale ou de celles de la branche temporo-faciale, celle-ci se fait toujours de la même façon. Il faut se porter à la limite de la glande parotide, au niveau du facial préglandulaire, disséquer à l’aide d’une pince selon le trajet des branches, identifier chacune des branches, confirmer l’identification par neuro-stimulation et ensuite, par dissection rétrograde rejoindre la branche de division principale qui donne l’accès au tronc. Cas clinique : Dans ce cas (chirurgie de première intention) nous avons décidé de rechercher dans un premier temps les branches de division temporo-faciales qui se distribuent en éventail à la sortie de la parotide, les branches les plus fines étant situées près du pédicule temporal superficiel et les branches les plus importantes étant situées à la partie moyenne. Figure 45 - Volumineuse tumeur au contact du trou stylo-mastoïdien. 88 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S Figure 46 - Repérage des branches de division temporo-faciale. Figure 47 - Neurostimulation pour confirmation. Figure 48 - Identification de toutes les branches et poursuite de la dissection rétrograde vers la branche temporo-faciale 89 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S Figure 49 - Dissection rétrograde de la branche temporo-faciale vers la bifurcation ; on aperçoit la tumeur qui est plaquée sur le nerf et que l’on écarte par traction inférieure du parenchyme glandulaire. Figure 50 - Identification de la bifurcation et du tronc du nerf et dissection de la branche de division cervico-faciale en écartant vers le bas la tumeur. Figure 51 - Poursuite de la dissection de la branche cervico-faciale et identification de ses collatérales. 90 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S Figure 52 - Poursuite de la parotidectomie exo-faciale avec dissection de toutes les branches. Figure 53 - Poursuite de la parotidectomie exo-faciale en disséquant toutes les branches jusqu’à leur émergence et en terminant par les plus inférieures. ◆ en chirurgie de deuxième intention lors de la chirurgie pour récidives, les difficultés sont toutes autres. En effet, si l’identification des branches terminales du nerf en périphérie, est relativement facile, il n’en est pas de même pour identifier les branches de division, la bifurcation et le tronc du nerf car ils sont entourés d’un magma fibreux rendant parfois toute identification des fibres nerveuses impossible. Très souvent cette gaine fibreuse est laissée en place pour éviter d’interrompre la continuité du nerf. Nous verrons ce point particulier de techniques lors de la chirurgie des récidives. IV - DÉPRESSION RÉTRO-AURICULAIRE Toute parotidectomie est à l’origine d’une dépression rétro-auriculaire d’autant plus marquée que la résection glandulaire a été importante. Plusieurs techniques ont été proposées afin de palier cette dépression et de limiter la survenue d’un syndrome de Frey (voir complication des parotidectomies). Les comblements par greffon de tissu adipeux ou greffon de fascia lata proposés initialement ne sont plus utilisés à cause de la nécessité d’ouverture d’un second site chirurgical avec risque infectieux majoré et de leur résorption fréquente. L’utilisation d’un caillot de sang placé dans la loge de parotidectomie a été proposée par Trotoux en 1994. 91 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S Le lambeau de muscle sterno-cléido-mastoïdien à charnière supérieure proposé par Jost en 1968 permet un comblement mais présente une atrophie musculaire à long terme. Le lambeau de SMAS décrit initialement par Casler et Conley en 1991 a l’avantage d’être un moyen de comblement très physiologique et constitue la technique la plus répandue. Zaoli a proposé en 1989 l’utilisation d’un lambeau de fascia temporalis comme tissu de comblement. Son prélèvement est réalisé après extension verticale temporale de l’incision pré-auriculaire. Il est réservé aux cas où le lambeau de SMAS ne peut être réalisé. Certains implants synthétiques ont été utilisés en prévention du syndrome de Frey et comme moyen de comblement. Les effets secondaires de ces implants et en particulier l’augmentation du taux de fistule salivaire limitent leur intérêt et leur utilisation. La technique d’injection de graisse autologue selon Coleman permet un comblement secondaire, technique dont l’évaluation est en cours. V - PLEXUS CERVICAL SUPERFICIEL La branche auriculaire est souvent sectionnée durant un abord classique de la loge parotidienne. Cette section a pour effet une anesthésie de l’auricule et de la peau pré-auriculaire qui est habituellement réversible en quelques mois. Il peut être conseillé de sectionner cette branche le plus haut possible ce qui permet de conserver une longueur suffisante en cas d’indication de greffe Figure 54 Figure 55 Figures 54 - 55. Enfouissement de l’extrémité proximale du nerf grand auriculaire sectionné dans le muscle sterno-cleido-mastoïdien pour atténuer la symptomatologie d’un éventuel névrome. 92 V A R I A N TE S TE C H N I Q U E S nerveuse du nerf facial. En fin d’intervention, l’enfouissement de la portion terminale du nerf grand auriculaire dans le corps du muscle sterno-cléido-mastoïdien rendrait moins symptomatique un éventuel névrome post-opératoire souvent très gênant pour le patient. RÉFÉRENCES 1 - ADSON AW, OTT WO. Preservation of the facial nerve in the radical excision of the parotid tumor. Arch Surg 1923;6:739-42. 2 - APPIANI E, DELFINO MC. Plastic incisions for facial and neck tumors. Ann Plast Surg 1984;13(4):335-52. 3 - BOZZETTI A, BIGLIOLI F, SALVATO G, BRUSATI R. Technical refinements in surgical treatment of benign parotid tumours. J Craniomaxillofac Surg 1999;27(5):289-93. 4 - CASLER JD, CONLEY J. Sternocleidomastoid muscle transfer and superficial musculoaponeurotic system plication in the prevention of Frey's syndrome. Laryngoscope 1991;101(1 Pt 1):95-100. 5 - CASSADY CL. A new concept in the treatment of Frey's syndrome: the use of interpositional dermal grafts. An experimental study in the dog. Laryngoscope 1977;87(6):962-74. 6 - DULGUEROV P, QUINODOZ D, COSENDAI G, et al. Prevention of Frey syndrome during parotidectomy. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 1999;125(8):833-9. 7 - FERRERIA JL, MAURINO N, MICHAEL E, et al. Surgery of the parotid region: a new approach. J Oral Maxillofac Surg 1990;48(8):803-7. 8 - GUERRIER Y. Traité de technique chirurgicale ORL et cervico-faciale, tome 4 : Cou et Cavité Buccale. Seconde édition Masson 1998. 9 - JOST G, LEGENT F, BAUDELOT S. [Filling of residual depressions after parotidectomy by a sterno-cleido-mastoid flap]. Ann Chir Plast 1968;13(3):187-91. 10 - ROARK DT, SESSIONS RB, ALFORD BR. Frey's syndrome-a technical remedy. Ann Otol Rhinol Laryngol 1975;84(6):734-9. 11 - TROTOUX J. [Technique of intraoperative treatment of a retro-mandibular defect after parotidectomy. Use of a blot clot]. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 1994;111(1):35-7. 12 - ZAOLI G. [Filling of the residual depression after parotidectomy with a composite arterial subcutaneous flap]. Ann Chir Plast Esthet 1989;34(2):123-7. 93 TRAITEMENT DES TUMEURS BÉNIGNES Dans la prise en charge chirurgicale de ces tumeurs, plusieurs possibilités sont à notre disposition, parotidectomie partielle (le plus souvent polaire inférieure ou sous-faciale), parotidectomie superficielle (latéro-faciale ou exo-faciale) et parotidectomie totale, toutes ces interventions se faisant avec identification, dissection et conservation du nerf facial. Les indications doivent tenir compte de la nature histologique, du siège et du volume tumoral. Cystadénolymphomes ou Tumeur de Warthin Rencontré le plus souvent chez l’homme, c’est le plus fréquent des adénomes monomorphes. Il nécessite en cas de siège médian une parotidectomie latéro-faciale et en cas de siège postéro-inférieur une parotidectomie polaire inférieure. Certains auteurs préfèrent faire systématiquement une parotidectomie superficielle complète compte tenu de la possible multifocalité de cette tumeur, multifocalité pouvant expliquer les rares récidives observées dans la chirurgie de ce type histologique de tumeur. Les formes endofaciales sont exceptionnelles et imposent une parotidectomie totale. Adénomes pléiomorphes Le grand principe de la chirurgie de ce type tumoral est d’en faire l’exérèse sans voir la capsule, c'est-à-dire en ayant suffisamment de tissu parotidien entre la tumeur d’une part, et les plans de couverture et le nerf facial d’autre part. L’indication dépend donc du siège de la tumeur et de son volume pour obtenir cette marge de sécurité. Dans les tumeurs développées dans le tissu parotidien latérofacial, cette marge de sécurité ne peut véritablement être obtenue que dans les tumeurs de petite taille (moins de deux centimètres) et seules celles-ci seront traitées par parotidectomie latéro-faciale. Dans les autres cas de tumeurs à développement exo-facial, une parotidectomie totale sera pratiquée comme pour les tumeurs à développement endofacial ou à expression endo-pharyngée. Dans les indications concernant la chirurgie des adénomes pléomorphes, outre le siège et l’exposition capsulaire, deux autres critères doivent être pris en compte, l’âge et les renseignements apportés par l’examen extemporané. Concernant l’âge, certains auteurs préfèrent faire une parotidectomie totale chez les enfants et les sujets de moins de 20 ans même pour les petites tumeurs latéro-faciales compte tenu du risque potentiel de récidive plus important dans cette population. De même chez les personnes âgées de plus de 70 ans, porteurs d’une tumeur volumineuse développée dans le parenchyme exofacial, une parotidectomie latérofacial peut être suffisante eu égard aux délais habituels d’apparition des récidives. Dans les cas où lors de l’analyse en extemporanée, un doute est émis sur une possible transformation maligne « à confirmer lors de l’analyse définitive » il nous semble préférable de faire une parotidectomie totale, car en cas de confirmation lors de l’analyse définitive, une reprise, même précoce, expose à des difficultés et des risques pour le nerf facial plus importants qu’une chirurgie totale pratiquée en première intention. 95 T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S B É N I G N E S Kystes Certains kystes de la parotide peuvent se présenter comme une tumeur bénigne et feront l’objet d’une parotidectomie partielle ou exofaciale selon le volume du kyste et les nécessités de l’exposition. Autres tumeurs bénignes. Adénomes monomorphes – Oncocytomes Les tumeurs à développement exo-facial feront l’objet selon le siège et le volume de parotidectomies polaire inférieure ou latéro-faciale. Ce n’est que dans les tumeurs à développement sous facial que sera réalisée une parotidectomie totale. 96 TRAITEMENT DES TUMEURS MALIGNES I - PRISE EN CHARGE DES TUMEURS MALIGNES D'ASPECT CLINIQUE BÉNIN Cette situation concerne la majorité des tumeurs malignes, environ 80% d'entre elles, qui se présentent en effet sous le masque d'une tumeur anodine. Il n'y a pas de paralysie faciale même fruste, il n'y a pas de myoclonie lors de la palpation de la tumeur, pas d'envahissement cutané et généralement pas de douleur. L'imagerie parfois a pu alerter mais c'est la cytologie qui habituellement apporte la mauvaise nouvelle, soit de façon péremptoire indiscutable, soit de façon plus nuancée, évoquant une suspicion de malignité. Toutes les variétés de tumeurs malignes peuvent se présenter sous le masque clinique de la bénignité, mais plus particulièrement les carcinomes muco-épidermoïdes, les carcinomes adénoïdes kystiques et les carcinomes à cellules acineuses. La stratégie chirurgicale dans cette circonstance de tumeur maligne cliniquement "non invasive" se discute quant à la tumeur elle-même, parotidectomie totale ou non, au nerf facial sacrifice ou dissection et au drainage lymphatique curage systématique, geste guidé par l'histologie extemporanée ou abstention. Enfin, bien sûr le problème de la radiothérapie post-opératoire va être discuté en fonction de nombreux paramètres. A - L'ATTITUDE VIS À VIS DE LA TUMEUR : Il n'existe aucune étude prospective randomisée, stratifiée en fonction du stade tumoral comparant la survie des petites tumeurs exofaciales T1 ou T2 en fonction du type de parotidectomie réalisée, exofaciale ou totale, chez des patients ayant tous subi une radiothérapie post-opératoire. Il y a ce qu'il est convenu d'appeler un consensus professionnel fort qui conseille une parotidectomie totale quelle que soit la taille de la tumeur lorsque l'on a affaire à une lésion maligne. L'enjeu vital et le faible risque supplémentaire notamment sur le nerf facial supportent cette attitude péremptoire d'une chirurgie radicale sur la parotide. Nous restons fidèles, dans l'état actuel des connaissances, au principe d'une totalisation. En revanche, pour les tumeurs T1 et T2 traitées par parotidectomie exofaciale dont la malignité n’est affirmée qu’en post-opératoire, et dont la résection est satisfaisante sur le plan anatomo-pathologique, il n’y a pas lieu de totaliser secondairement d’autant qu’il s’agit de tumeurs de bas grade de malignité. B - L'ATTITUDE SUR LE NERF FACIAL L'attitude à adopter vis-à-vis du nerf facial, lorsqu'il n'y a pas de déficit pré-opératoire, est bien entendu le point clef de la stratégie chirurgicale lorsqu'il s'agit d'une tumeur maligne. Dans la mesure où il n'y a pas de déficit pré-opératoire, il est possible de supposer que le facial pourra être préservé et cette perspective, sans garantie, pourra être annoncée au patient. Cependant, l'absence de paralysie faciale n'est pas toujours prédictive de réséquabilité. Plusieurs séries de la littérature rapportent un taux de paralysie faciale qui va de 12 à 32% mais globalement un sacrifice du nerf qui se situe aux alentours de 20%. Aucune étude ne montre la supériorité d'une chirurgie radicale "au carré" avec sacrifice de principe du facial, en supposant bien entendu qu'il soit macroscopisquement sain et disséquable, par rapport à une chirurgie d'épargne nerveuse qui est actuellement la plus recommandée. 97 T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S M A L I G N E S Cependant, cette attitude systématiquement conservatoire, lorsqu'elle est chirurgicalement possible, mérite peut-être d'être nuancée dans le cas particulier des carcinomes adénoïdes kystiques dont on connaît le tropisme pour les gaines nerveuses. En conclusion, bien entendu, lorsqu'il n'y a aucun problème de dissection du nerf facial, il doit être conservé. Des difficultés de dissection peuvent être acceptables pour tout type de tumeur maligne si l'on parvient à réaliser un clivage de bonne qualité entre la tumeur et le périnèvre. En revanche, des difficultés de clivage lorsque l'on a affaire à un carcinome adénoïde kystique vont conduire à une attitude radicale avec sacrifice du nerf. Si l'on a la notion cytologique préopératoire de cette variété tumorale, le patient devra être particulièrement alerté sur un risque de sacrifice nerveux. C - L'ATTITUDE SUR LES AIRES GANGLIONNAIRES Dans ce type de situation, il n’y a habituellement pas d’adénopathie palpable ou révélée par l'imagerie. Nous préconisons cependant à titre systématique la réalisation d’un évidement des zones II et III avec biopsie extemporanée. En cas de positivité, un curage conservateur sera réalisé. Figure 1 : parotidectomie totale avec évidement des zones II et III. D - LA RADIOTHÉRAPIE POST-OPÉRATOIRE Les indications de la radiothérapie post-opératoire dans le cadre des tumeurs de petite taille T1 et T2 se discutent en fonction de l'histologie définitive. C'est ainsi qu'il y a un assez large consensus pour éviter une radiothérapie post-opératoire dans les tumeurs de bas grade, complètement réséquées, si elles sont d'une taille inférieure à 2 cm (carcinome muco-épidermoïde de grade I et II, carcinome à cellules acineuses). Il faut bien entendu qu'il y ait une notion macroscopique et microscopique de résection en zone saine. En revanche, la radiothérapie est indiquée pour toutes les tumeurs de haut grade de malignité quelque soit leur taille et leur type histologique. Les modalités de l'irradiation L'irradiation est habituellement réalisée par une association d'électrons et de photons jusqu'à une dose égale ou supérieure à 60 Gy, si il y a des limites d'exérèse envahies ou un envahissement du nerf facial. Lorsqu'il existe des adénopathies métastatiques, la dose délivrée doit être fonction, comme cela est habituel, de l'existence ou non d'une rupture capsulaire avec un surdosage à 65 Gy sur les sites en rupture. L'irradiation des aires ganglionnaires est unilatérale. 98 T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S M A L I G N E S L'irradiation conformationelle avec modulation d'intensité, qui permet d'adapter les isodoses d'irradiation au volume cible tumoral, en diminuant le taux de complications locorégionales liées à l'irradiation parasite des tissus nobles, a fait l'objet d'études préliminaires dans les cancers de la parotide avec préservation de la parotide contro-latérale. C'est une possible voie d'avenir. En conclusion, pour les tumeurs se présentant sous l'aspect d'une tumeur bénigne et donc majoritairement de petite taille, la radiothérapie post-opératoire n’est pas systématique. Elle est indiquée en cas de marges d'exérèse envahies ou insuffisantes (de l'ordre du millimètre), en cas d’envahissement du lobe profond, en cas d’invasion de la gaine périneurale, lorsqu'il y a des adénopathies métastatiques ou bien entendu, lorsqu'il s'agit d'une tumeur de haut grade de malignité ou avec une agressivité locale importante. Un seul de ces critères doit conduire à une indication de radiothérapie post-opératoire. Dans le cas particulier des CAK, l’irradiation est systématique pour la plupart des auteurs. II - PRISE EN CHARGE DES TUMEURS MALIGNES AVÉRÉES La nature maligne d’une tuméfaction parotidienne peut être connue avant l’intervention : soit en présence d’une tumeur présentant des signes cliniques évocateurs de malignité et pour laquelle une ponction cytologique a pu affirmer la nature maligne ; soit en cas de récidive d’une lésion maligne avérée. A - LES PAROTIDECTOMIES TOTALES ÉLARGIES L'exérèse glandulaire, quelle que soit son importance, peut être étendue aux structures avoisinantes : peau, muscle (sterno-cléido-mastoïdien, masséter, digastrique) ou os (mandibule, malaire, apophyse mastoïde, conduit auditif externe). En dehors des ré-interventions avec excision de la cicatrice cutanée première, une telle chirurgie est rarement pratiquée. Avant de proposer des interventions aussi mutilantes, il faut être certain qu'il existe un bénéfice pour le patient et discuter des autres possibilités thérapeutiques. Cette chirurgie se conçoit difficilement sans une association à un curage ganglionnaire cervical. Toutefois, l’ablation des tissus péri-parotidiens peut être réalisée sans impliquer fatalement une section du nerf facial. Ce sera le cas lorsqu'une tumeur aura, par exemple, une extension cutanée tout en restant à distance des éléments nerveux. 1) Élargissement à la peau Lorsque la peau est envahie, ou proche de la tumeur, une résection large s'impose, passant à distance de la zone suspecte. Pour reconstituer le plan cutané à la fin de l'intervention, on peut utiliser des autoplasties musculo-cutanées classiques, ou des lambeaux libres. 2) Elargissement au conduit auditif externe, au pavillon, à la mastoïde Le tragus et le cartilage du conduit constituent le plus souvent une barrière à l'extension tumorale. Parfois l'extension tumorale exige une exérèse partielle ou sub-totale de ces éléments. Afin d'éviter une sténose, il est important de respecter la peau du conduit quand l'envahissement le permet. En cas d'envahissement majeur, il est possible d’adjoindre, à la partie supérieure de l'incision classique, une seconde branche rétro-auriculaire qui permet l'ablation du conduit, du pavillon et, éventuellement, d'une portion de la mastoïde. 3) Élargissement postérieur L'exérèse comporte une résection partielle du tiers supérieur du sterno-cléido-mastoïdien. Cette résection peut intéresser une partie de la mastoïde. Elle conduit, ainsi, sur le tympanal, 99 T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S M A L I G N E S l'apophyse styloïde et les éléments du diaphragme stylien. Le digastrique, et au besoin, les muscles styliens sont désinsérés. 4) Élargissement antérieur La parotidectomie est ici complétée d'une résection partielle ou totale de la branche montante de la mandibule et de sa couverture musculaire. Figure 2 - Carcinome à cellules acineuses (récidive). Figure 3 - Parotidectomie élargie au plan cutané, reconstruction par lambeau libre de grand dorsal. 100 Figure 4 - Parotidectomie élargie au plan cutané, reconstruction par lambeau pédiculé de grand dorsal. T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S M A L I G N E S B - ATTITUDE CHIRURGICALE VIS-À-VIS DU NERF FACIAL La dissection complète du tronc du nerf facial et de ses branches doit toujours être tentée. Ce n’est que si la tumeur est adhérente au nerf, ou l’envahit, que ce dernier doit être sacrifié. Le sacrifice du VII dépend plus de l’envahissement constaté en per-opératoire que du type histologique de la tumeur maligne. Une section du nerf, au niveau du tronc ou d’une de ses branches est réalisée en cas de dissection impossible entre le nerf et la tumeur du fait d’un envahissement macroscopique. Le nerf est ainsi souvent conservé, totalement dans plus de 50% des cas selon les séries (50% pour Spiro, 56% pour Kane) ou partiellement. Plusieurs publications ont montré que la préservation du nerf facial n’aggravait pas le pronostic (Garden, Carinci). Cependant Casler, à propos des carcinomes adénoïdes kystiques classés T2 ou T3, l’exérèse monobloc sans dissection du facial, semblerait apporter une amélioration de la survie. Les lésions T4 (de plus de 6 cm) ont un pronostic tout aussi péjoratif, quelle que soit l’attitude choisie. C - TRAITEMENT DES AIRES GANGLIONNAIRES CERVICALES Compte tenu du caractère homo-latéral à la lésion parotidienne de l’ensemble des adénopathies observées en cas de tumeur maligne parotidienne, ce traitement n’intéresse que les aires ganglionnaires situées du côté de la lésion. Pour les patients N0, il est nécessaire d’effectuer un curage des zones II et III. Pour les patients avec adénopathie palpable, l’attitude couramment admise et que nous préconisons, est de réaliser un curage fonctionnel conservateur, à chaque fois que cela est réalisable intéressant les zones II et III éventuellement complété en fonction des données de l’analyse anatomo-pathologique extemporanée. D - RADIOTHÉRAPIE POST-OPÉRATOIRE Garden et al. rapportent les résultats de la radiothérapie post-opératoire sur une large cohorte de patients dont l’exérèse macroscopique était complète. Ils retiennent, de leur étude, les indications suivantes, actuellement admises par la plupart des auteurs : limites d’exérèse chirurgicales envahies, tumeur de haut grade, § marges d’exérèse infra-millimétriques, § extension tumorale extra-glandulaire , § invasion périneurale, § adénopathies envahies, § extension au lobe profond. Ils confirment les bons résultats obtenus, au niveau local et régional, pour ces patients à risque : 9% de récidives locales et 6% de récidives ganglionnaires. Cependant le taux de récidive sur l’ensemble de la série est de 29% avec la survenue pour 18% des patients de métastases à distance. § § L’irradiation sur le site tumoral recommandée par ces auteurs est de 60 Gy minimum en 30 fractions en utilisant un champ homolatéral combinant électrons à haute énergie et photons. Une irradiation supérieure à 60 Gy est préconisée pour diminuer de façon significative le taux de récidive des patients présentants des limites d’exérèse microscopiques envahies par la tumeur ou un envahissement du nerf facial. Concernant l’irradiation des aires ganglionnaires, seul le côté homolatéral à la lésion est irradié, les adénopathies controlatérales étant exceptionnelles. L’indication concerne tous les patients présentant des adénopathies envahies et les tumeurs de haut grade : adénocarcinome, carcinome muco-épidermoïde et carcinome épidermoïde. Les 101 T R A I TE M E N T D E S TU M E U R S M A L I G N E S doses préconisées sont de 60 Gy en cas d’adénopathies envahies et de 50 à 55 Gy en l’absence d’adénopathies envahies. E - LA RADIOTHÉRAPIE DANS LE CADRE DES TUMEURS INOPÉRABLES : En ce qui concerne les tumeurs inopérables d’emblée ou les récidives tumorales multiples inextirpables, la radiothérapie n’est réalisée qu’à titre palliatif. Le pronostic est particulièrement sombre. Cependant la supériorité de la neutronthérapie pour améliorer le contrôle local de la maladie est établie depuis 1981 par Carreral puis par d’autres études. Laramore montre que le taux de récidives loco-régionales à 10 ans, de patients présentant des tumeurs inopérables et traités par neutronthérapie sont significativement moins fréquentes que pour les patients traités par radiothérapie conventionnelle. Par contre la survie n’est pas améliorée par ce traitement. Les décès surviennent par métastases à distance dans le premier groupe et par évolutivité loco-régionale dans le second. Buchholz, à propos de 51 patients traités par neutronthérapie, compare les patients n’ayant pas été opéré du fait d’une tumeur trop volumineuse, aux patients ayant bénéficié d’une intervention, mais dont l’exérèse a été incomplète. Le taux de contrôle loco-régional à 5 ans semble être meilleur après neutronthérapie. Cependant les différences observées entre les deux groupes de patients ne sont pas significatives. Il est cependant intéressant de constater que les auteurs ne rapportent aucun cas de paralysie faciale liée à l’irradiation. Ces études montrent que la neutronthérapie, bien que n’étant pas toujours disponible, est un recours possible dans le cadre des tumeurs inopérables d’emblée, ou après récidive. RÉFÉRENCES 1 - BUCHHOLZ TA, LARAMORE GE, GRIFFIN BR, KOH WJ, GRIFFIN TW. The Role of fast neutron radiation therapy in the management of advanced salivary gland malignant neoplasms. Cancer 1992 ;69(11) :2779-88. 2 - CARINCI F, FARINA A, CALCARO C, PASTORE A. Parotid gland carcinoma :surgical strategy based on local risk factors. J Craniofac Surg 2001 ;12(5) :434-437 3 - CARRERALL M, ERRINGTON RD – The implication of improved treatment of malignant salivary gland tumors by fast neutron radiotherapy. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1981 ;7 :1737-1738. 4 - GARDEN AS, EL-NAGGAR AK, MORRISON WH, CALLENDER DL, PETERS LJ, INT J. Posoperative radiotherapy for malignant tumors of the parotid gland Radiation Oncology Biol Phy 1997 (37) 1 :79-85. 5 - KANE WJ, THOMAS V, McCAFFREY, KERRY D, LEWIS J. Primary Parotid Malignancies Arch Otolaryngol Head and Neck Surg 1991 ;117 :307-315. 6 - LARAMORE GE, KRALL JM, GRIFFIN TW, DUNCAN W, RICHTER MP, SAROJA KR, MAOR MH, DAVIS LW. Neutron versus photon irradiatin for unresectable salivary gland tumors :final report of and RTOG-MRC randomized clinical trial. Radiation Therapy Oncology Group. Medical Research Council. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1993 30 ;27(2) :235-40. 7 - SPIRO Rh, ARMSTRONG J, HARRISON L, GELLER Nl, LIN S. Carcinoma of major salivary glands. Recent trend. Arch Oto-laryngol Head Neck Surgery 1989 ;115 :316-321. 102 MÉTASTASES PAROTIDIENNES Les carcinomes cutanés des mélanomes et carcinomes épidermoïdes sont la première cause de métastase parotidienne. Ils représentent dans certaines séries jusqu’à 30% des tumeurs malignes. I - PRÉSENTATION CLINIQUE Deux types de présentation clinique doivent être individualisés : l’atteinte parotidienne isolée et l’atteinte parotido-cervicale. L’atteinte parotidienne isolée, sans lésion primitive cutanée retrouvée, ne peut être différenciée des autres tumeurs parotidiennes et l’approche diagnostique clinico-cyto-radiologique est d’un grand intérêt car elle permet de suspecter la malignité de certaines tumeurs à présentation clinique bénigne. L’atteinte parotido-cervicale est différente et d’emblée évocatrice de malignité, orientant la démarche diagnostique. Quelque soit le type de présentation et systématiquement devant toute tumeur parotidienne, l’interrogatoire et l’examen clinique doivent rechercher une lésion de la peau ou des antécédents de chirurgie cutanée ou de traitement dermatologique de la région péri-auriculaire, auriculaire, fronto-temporale, jugale postérieure ou palpébrale. On recherchera alors chez ces patients les indications concernant le traitement de la tumeur primitive (valeur de l’indice de Breslow pour les mélanomes, critères de malignité pour les carcinomes épidermoïdes). Il est fréquent que les antécédents de chirurgie cutanée soient méconnus du patient. Il apparaît que c’est la localisation anatomique plus que le caractère peu différencié ou invasif qui est un facteur de risque de métastase parotidienne. Caldwell et al. ont démontré que l’indice de Breslow des mélanomes de la tête et du cou était peu corrélé à l’incidence des métastases parotidiennes. La survenue habituelle des métastases régionales pour les mélanomes et les cancers épidermoïdes cutanés se situe au cours des trois premières années après le traitement de la lésion primitive. Le pronostic général des mélanomes de la tête et du cou est plus péjoratif que les formes des extrémités. La présence de métastases ganglionnaires cervicales et parotidiennes est un élément pronostique péjoratif pour les mélanomes et les carcinomes épidermoïdes. L’atteinte parotidienne isolée comporte un meilleur pronostic que l’atteinte cervico-parotidienne au cours des métastases de carcinomes épidermoïdes cutanés. Photo 1 : métastase parotidienne d’un carcinome épidermoïde cutané. 103 M É TA S TA S E S P A R O TI D I E N N E S II - TRAITEMENT Les ganglions parotidiens sont au nombre d’une vingtaine, répartis en deux groupes : un groupe extra-glandulaire et un groupe intra-glandulaire pour l’essentiel exo facial. Ils drainent les régions cutanées frontale, temporale, jugale postérieure et pré-auriculaire, la racine du nez, la lèvre supérieure et l’oreille externe. Graham et al. soulignaient que tous les ganglions se situaient en dehors de la veine faciale postérieure, mais qu’en raison de la variabilité de la situation de la veine par rapport au nerf facial, toute dissection exofaciale était susceptible d’être incomplète sur le plan ganglionnaire. Ainsi, ils préconisaient la réalisation d’une parotidectomie totale systématique. D’autres auteurs estiment néanmoins que la parotidectomie exofaciale est suffisante en cas de lésion exo-faciale clinique et radiologique. Photo 2 : aspect macroscopique d’une métastase ganglionnaire intra-parotidienne d’un mélanome malin. III - PRÉVENTION On constate fréquemment l’apparition de métastases régionales alors que la lésion primitive est contrôlée. La prévention de ces métastases parotidiennes ou parotido-cervicales soulève le problème de la gestion des patients N0 cliniques parotido-cervicaux au stade du traitement de la lésion initiale. L’attitude doit être adaptée au type histologique. Les patients porteurs de mélanome stade I (classification de l’AJCC 2001) sont considérés comme présentant peu de risques d’avoir des métastases ganglionnaires occultes et ne font donc pas l’objet d’évidement de principe. En revanche les stades II sont susceptibles d’êtres atteints par des métastases occultes. Les études après évidement de principe ont montré des taux de métastases occultes cervicales qui variaient de 10 à 40% selon les auteurs et pour la parotide de 5% à 51%( O’Brien et al. 5%, Vaglini et al. 30%, Shah et al. 51%). Le scanner et l’échographie n’ont pas démontré leur supériorité à la clinique dans la détection des métastases occultes. La sensibilité du scanner dans la détection des métastases de mélanomes est de 55,3%, avec une spécificité de 84,4%. Le PET-scan a un seuil de détection de 0,4 cm avec une sensibilité de 94% et une spécificité de 83,3%. Malgré l’amélioration des seuils de détection, seul l’examen histologique permet la détection des micro-métastases. L’intérêt de l’évidement de principe des mélanomes de stade II est très controversé. Une seule étude randomisée a montré un bénéfice de l’évidement de principe sur la survie de patients porteurs de mélanomes d’épaisseur intermédiaire, et seulement dans le sous groupe âgé de moins de 60 ans. Les données des études rétrospectives sont divergentes. Lorsque l’évidement est réalisé, son type est le plus souvent probabiliste et adapté au site de la lésion initiale en fonction du drainage lymphatique anatomique. Les lésions primitives situées en avant d’une verticale centrée sur le conduit auditif externe sont traitées par parotidectomie et évidement des groupes II, III, IV. Les primitifs en arrière d’une verticale centrée sur le conduit auditif externe sont traités par évidement des groupes V et des ganglions occipitaux et rétro-auriculaires. Les lésions primitives situées au niveau de la partie antérieure de la face justifient un évidement des groupes I, II, III. 104 M É TA S TA S E S P A R O TI D I E N N E S Toutefois selon O’Brien et al. la ligne coronale passant par les deux conduits auditifs externes ne peut être considérée comme un repère fiable de démarcation entre le drainage lymphatique antérieur et postérieur. Les lésions primitives proches de cette ligne justifient le traitement des sites ganglionnaires parotidiens et rétro-auriculaires. L’intérêt de l’évidement est de permettre en cas de positivité de proposer un traitement complémentaire. Certains auteurs proposent la radiothérapie de principe comme alternative au curage de principe, en particulier lorsque l’irradiation sur le site primitif est décidée en complément de l’exérèse large. Devant le caractère probabiliste de l’évidement de principe, la recherche du ganglion sentinelle se positionne comme une alternative intéressante. Son intérêt est de concentrer l’analyse histologique sur un petit groupe de ganglions afin d’améliorer la sensibilité de détection des micro-métastases et de réduire les risques de morbidité liés à l’évidement de principe. L’absence d’invasion du ou des ganglions sentinelles implique l’absence d’invasion de l’ensemble des aires ganglionnaires. Cette attitude permet de sélectionner les patients porteurs de métastases occultes qui devront bénéficier d’un évidement ganglionnaire, et qui sont susceptibles de bénéficier d’un traitement complémentaire. Il s’agit d’une technique exigeante sur le plan du plateau technique mais désormais validée dans les mélanomes de la tête et du cou. Son principe repose sur l’identification du premier relais ganglionnaire par radio-traceur et agents colorants, et le prélèvement du ou des ganglions concernés afin de réaliser une analyse histologique poussée. Décrite par Morton et al. en injectant du « bleu » en per-opératoire au niveau du site de la lésion initiale, cette technique permet le repérage dans 82% des ganglions sentinelles au niveau de la tête et du cou. Les seuils de détection ont pu être augmentés avec l’utilisation conjointe de radiotraceurs à 95-96%, après réalisation d’une lympho-scintigraphie préalable à l’intervention chirurgicale et repérage per-opératoire par radiocaméra du radiotraceur piégé au niveau ganglionnaire. Pour des mélanomes du cuir chevelu, de la région auriculaire et de la face, dans 95% un ganglion sentinelle parotidien a été mis en évidence, avec un taux de faux négatifs de 3,1%. Dans l’étude d’Ollila et al., où la moyenne de l’indice de Breslow était de 2,78 mm, 10,5% des ganglions sentinelles étaient positifs. La conduite à tenir pour les patients porteurs de carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou N0 est également débattue. Il n’existe pas d’étude prospective qui démontre ou infirme l’intérêt de l’évidement de principe. Rowe et al. ont dégagé les critères de risque de survenue de métastases. Il s’agit de la taille tumorale supérieure ou égale à 2 cm, de l’épaisseur supérieure ou égale à 4 mm, des formes peu différenciées, des localisations de l’oreille et des lèvres ou sur cicatrice, des formes récidivantes, des formes avec invasion périneurale et des patients immunodéprimés. La présence au moins d’un de ces critères de risque doit bénéficier d’un évidement de principe adapté à la localisation anatomique de la lésion primitive selon les principes décrits pour les mélanomes. IV - CONCLUSION Les métastases parotidiennes sont essentiellement secondaires aux mélanomes et aux carcinomes épidermoïdes cutanés de la face et du cou. La prise en charge diagnostique de ces tumeurs parotidiennes métastatiques ne diffère pas de celle des autres tumeurs parotidiennes. Elles bénéficient également de l’apport de la cytoponction et de l’imagerie telle que l’IRM. Les modalités de leur traitement sont bien documentées dans la littérature. Les attitudes thérapeutiques diffèrent selon le type tumoral en cause (carcinome épidermoïde ou mélanome) et son stade. Les métastases parotidiennes et parotido-cervicales surviennent le plus souvent alors que la lésion primitive cutanée est contrôlée. La recherche du ganglion sentinelle est une alternative intéressante à l’évidement de principe pour prévenir l’apparition d’un problème métastatique. 105 M É TA S TA S E S P A R O TI D I E N N E S RÉFÉRENCES 1 - MC KEAN ME, LEE K, MC GREGOR IA. The distribution of lymph nodes in and around the parotid gland : an anatomical study. Br J Plast Surg 1985 ; 38 : 1-5. 2 - BALCH CM, SOONG S, SHAW HM, et al. An analysis of prognostic factors in 8500 patients with cutaneous melanoma. Dans : Balch CM, Houghton AN, Milton GW, et al. Eds. Cutaneous melanoma, 2nd ed . Philadelphia : Lippincott, 1992. 3 - O’ BRIEN CJ, PETERSEN-SCHAEFER K, RUARK D, COATES AS, MENZIE S, HARRISON RI. Radical, modified and selective neck dissection for cutaneous malignant melanoma. Head Neck 1995 ; 17 : 232-241. 4 - KHURANA VG,MENTIS DH, O’ BRIEN CJ, HURST TL, STEVEN GN, PACKHAM NA. Parotid and neck metastases from cutaneous squamous cell carcinoma of the head and neck. Am J Surg 1995 ; 170 : 446-450. 5 - STORM FK, EILBER FR, SPARKS FC, MORTON DL. A prospective study of parotid metastases from head and neck cancer. Am J Surg 1977 ; 134 : 115-119. 6 - CALDWELL CB, SPIRO RH. The role of parotidectomy in the treatment of cutaneous head and neck melanoma. Am J Surg 1988 ; 156 : 318-322. 7 - O’BRIEN CJ, MCNEIL EB, MCMAHON JD, PATHAK I, LAUER CS, JACKSON MA. Significance of clinical stage, extent of surgery, and pathologic findings in metastatic cutaneous squamous carcinoma of the parotid gland. Head Neck 2002 ; 24(5) : 417-22. 8 - ROWE DE, CAROLL RJ, DAY CL. Prognostic factors for local recurrence, metastasis, and survival rates in squamous cell carcinoma of the skin, ear and lip. 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Am J Surg 1991 ; 162 : 320-323. 15 - BALCH CM, BUZAID AC, ATKINS MB, CASCINELLI N, COIT DG, FLEMING ID, HOUGHTON A JR, KIRKWOOD JM, MIHM MF, MORTON DL, REINTGEN D, ROSS MI, SOBER A, SOONG SJ, THOMPSON JA, THOMPSON JF, GERSHENWALD JE, MCMASTERS KM. A new American Joint Commitee on Cancer staging system for cutaneous melanoma. Cancer 2000 ; 88 : 1484-1491. 16 - MERKEL S, MEYER T, PAPADOPOULOS T, SCHULER G, GÖHL J, HOHENBERGER W, HERMANEK P. Testing a new staging system for cutaneous melanoma proposed by the American Joint Committee on Cancer. European Journal of Cancer 2002 ; 38 : 517-526. 17 - LENTSCH EJ, MYERS JN. Melanoma of the Head and Neck : Current Concepts in Diagnosis and Management. Laryngoscope 2001 ; 111 : 1209-1222. 18 - MILTON GW, SHAW HM, MCCARTHY WH, PEARSON L, BALCH CM, SOONG SJ. Prophylactic lymph node dissection in clinical stage 1 cutaneous malignant melanoma : results of surgical treatment in 1319 patients. Br J Surg 1982 ; 69 : 108-111. 19 - BALCH CM. 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Annals of Surgery 1998 ; 227(5) : 764-771. 24 - BALCH CM, SOONG SJ, BARTOLUCCI AA, URIST MM, KARAKOUSIS CP, SMITH TJ, TEMPLE WJ, ROSS MI, JEWELL WR, MIHM MC, BARNHILL RL, WANEBO HJ. Efficacy of an elective regional lymph node dissection of 1 to 4 mm thick melanomas for patients 60 years of age and younger. Ann Surg 1996 ; 224 : 225-266. 25 - URIST MM, BALCH CM, SOONG SJ, MILTON GW, SHAW HM, MCGOVERN VJ, MURAD TM, MCCARTHY WH, MADDOX WA. Head and neck melanoma in 534 clinical stage I patients- pronostic factors, analysis and results of surgical treatment. Ann Surg 1984 ; 200 : 769-775. 26 - WANEBO HJ, COOPER PH, YOUNG DV, HARPOLE DH, KAISER DL. Pronostic factors in head and neck melanoma-effects of lesion location. Cancer 1988 ; 62 : 832-7. 27 - FISHER SR. Cutaneous malignant melnoma of the head and neck. Laryngoscope 1989 ; 99 : 822-36. 28 - GOEPFERT H, JESSE RH, BALLANTYNE AJ. Posterolateral neck dissection. 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Annals of Surgical Oncology 1999 ; 6(2) : 150-154. 107 LES COMPLICATIONS DE LA PAROTIDECTOMIE I - INTRODUCTION La chirurgie parotidienne est une chirurgie techniquement difficile car elle nécessite une dissection soigneuse des branches du nerf facial au sein d’une glande salivaire très vascularisée. Les complications sont relativement fréquentes et surviennent soit au décours immédiat de l’intervention soit à distance. Elles sont de 2 types : les complications non spécifiques, liées à la chirurgie (hématomes et infections) et les complications propres à la chirurgie de la glande parotidienne (paralysie faciale, syndrome de Frey, fistules salivaires). Leur diagnostic et leur prise en charge précoce sont nécessaires car, pour la plupart, elles relèvent d’un traitement spécifique. II - LES COMPLICATIONS CHIRURGICALES NON SPÉCIFIQUES Les complications observées au cours de la chirurgie parotidienne sont, comme pour tout geste chirurgical avec incision cutanée, des complications infectieuses, hémorragiques et cutanées. Elles sont peu rapportées dans les grandes séries de la littérature car, relativement rares et souvent facilement résolues, elles sont moins attendues que les séquelles à type de paralysie faciale. Les complications infectieuses de la chirurgie parotidienne sont rares car il s’agit d’une chirurgie propre non contaminée dans la classification d’Altemeier, avec un taux d’infection du site opératoire attendu de moins de 1% qui ne justifie pas d’une antibioprophylaxie pré-opératoire. Le taux d’infections du site opératoire rapporté par H Laccourreye et al. est de 0,8% sur une série de 229 parotidectomies. JMH Debets et JDK Munting en ont observé 2%. Leur traitement repose le plus souvent sur un drainage par ouverture de la plaie chirurgicale avec des lavages et un traitement antibiotique oral efficace sur les Streptocoques et le Staphylococcus aureus qui sont les germes le plus souvent rencontrés. Il est exceptionnel que l’importance de l’abcès et de l’infection nécessite une reprise chirurgicale sous anesthésie générale. Les hématomes post-opératoires après chirurgie de la parotide sont relativement fréquents probablement du fait de la très grande vascularisation de la région. Il s’agit le plus souvent d’hématomes limités ne nécessitant pas de reprise chirurgicale, rarement d’hémorragies vraies. La parotidectomie serait l’intervention chirurgicale en ORL la plus grande pourvoyeuse d’hémorragies postopératoires. Dans une série portant sur 3700 interventions cervico-faciales, YL Matory et RH Spiro rapportent une hémorragie post-opératoire chez 1,5% des patients (1,7% des parotidectomies, 1,6% des thyroïdectomies et respectivement 1,3 et 1,1% des curages avec ou sans geste associé). H Laccourreye et al. ont observé dans leur série de 229 patients présentant un adénome pléiomorphe, 1,7% d’hémorragies et 6,1% d’hématomes post-opératoires. JMH Debets et JDK Munting sur une série de 150 parotidectomies pour tumeurs rapportent 5% d’hématomes post-opératoires. Les complications cutanées de la chirurgie parotidienne sont soit précoces, pour ce qui concerne les nécroses cutanées, souvent situées dans la portion de l’incision cutanée sous le lobule de l’oreille, soit chez les patients fumeurs soit lorsque l’incision a un angle trop aigu. Elles sont souvent sans conséquences mais nécessitent des pansements itératifs et peuvent influer sur l’aspect esthétique de la cicatrice. Les complications cutanées tardives sont les cicatrices chéloïdes, redoutables dans une chirurgie de la face. 109 L E S C O M P L I C A TI O N S D E L A P A R O TI D E C TO M I E III - PARALYSIE FACIALE La paralysie faciale est la complication la plus redoutée par le chirurgien et le patient. Elle est parfois attendue dans les interventions parotidiennes pour cancer avec sacrifice du tronc du nerf ou d’une de ses branches. La section accidentelle du nerf ou d’une de ses branches principales lorsqu’elle survient doit être immédiatement réparée par greffe ou suture nerveuse. Si le nerf est respecté, la paralysie faciale lorsqu’elle est observée peut être complète ou partielle, provisoire le plus souvent ou plus rarement définitive. Les paralysies faciales temporaires sont le plus souvent partielles et incomplètes mais le délai de récupération est de 6 à 18 mois, à l’origine d’une gêne sociale et fonctionnelle importante pour le patient. La fréquence avec laquelle une paralysie faciale post-opératoire est observée peut dépendre de nombreux facteurs : − Le type de tumeur bénigne, maligne ou dans le cadre d’une parotidite chronique ; les caractéristiques propres à la tumeur pouvant poser des difficultés de dissection au contact du nerf − La taille de la tumeur − La situation de la tumeur par rapport au plan du nerf facial − La notion d’antécédents de parotidectomie, surtout s'il y a eu dissection préalable du nerf − De la nature de l’intervention : parotidectomie totale ou exo faciale − De facteurs plus discutés tels que l’expérience de l’opérateur, l’âge du patient et la durée de l’intervention. La nature de la pathologie parotidienne pour laquelle l’intervention est décidée a certainement un rôle important dans la fréquence des paralysies faciales post-opératoires. Les reprises chirurgicales, notamment pour récidive d’un adénome pléiomorphe après une intervention préalable de parotidectomie, sont de grandes pourvoyeuses de paralysies faciales post-opératoires. Dans une série de 51 patients opérés d’une récidive d’adénome pléiomorphe, Glas et al rapportent des paralysies faciales plus graves et plus fréquentes chez les patients ayant des antécédents de parotidectomie avec dissection du facial (30% de paralysies faciales post-opératoires ) que chez les patients n’ayant pas d’antécédents de dissection du nerf (10%). Les paralysies faciales provisoires post-opératoires sont plus fréquentes lorsque la pathologie opérée est une parotidite chronique. Deux études récentes ont rapporté 68% et 60% de paralysies faciales post-opératoires après une chirurgie pour parotidite chronique mais aucune paralysie faciale définitive n’a été observée par les auteurs. La fréquence avec laquelle des paralysies faciales sont observées dépend également de la nature bénigne ou maligne de la tumeur. Le très grand nombre de facteurs entrant en compte rend l’analyse des facteurs de risque difficile car ils peuvent être interdépendants. Dans la mesure où dans la littérature aucune étude ne fait d’analyse multivariée de ces facteurs de risque, le risque de paralysie faciale ne peut être étudié que dans les études utilisant la même technique chirurgicale pour la même tumeur et notamment dans le traitement des adénomes pléiomorphes où les études sont nombreuses et les techniques chirurgicales répertoriées pour analyser la fréquence des récidives. Dans une méta-analyse récente sur les études de la littérature dans le traitement des adénomes pléiomorphes, Witt met en évidence que lorsqu’une parotidectomie totale est pratiquée, le nombre de paralysies faciales temporaires et définitives est plus élevé que lorsqu’une parotidectomie exofaciale est pratiquée. L’incidence des paralysies faciales transitoires est 2,3 fois plus élevé au cours des parotidectomies totales (en moyenne 60%) qu’au cours des parotidectomies exofaciales (en moyenne 26%). Les paralysies faciales définitives sont 2 fois plus fréquentes au cours des parotidectomies totales (4%) qu’après une parotidectomie exo faciale (1,9%). La séquelle faciale la plus fréquente est une parésie du rameau mentonnier du nerf, observée en post-opératoire jusque chez 60% des patients au cours des parotidectomies totales. O Laccourreye et al. montrent que le délai de récupération d’une paralysie faciale post-opératoire est d’autant plus long que l’âge du patient est élevé. La paralysie faciale transitoire récupère dans 110 L E S C O M P L I C A TI O N S D E L A P A R O TI D E C TO M I E 50 à 60% des cas au cours des 6 premiers mois et dans le reste des cas entre le 6ème et le 18ème mois post-opératoire. La taille de la tumeur de plus de 3 cm et la durée de l’intervention sont considérées par Dulgurov et al comme les principaux autres facteurs de risque de paralysie faciale ; Mra retrouve que l’âge du patient au delà de 40 ans est corrélé avec une plus grande fréquence de survenue d’une paralysie faciale. H. Laccourreye ne retrouve aucun facteur de risque (âge, sexe du patient, taille de la tumeur, expérience du chirurgien) qui intervienne dans la survenue d’une paralysie faciale. L’utilisation d’un monitoring per-opératoire du nerf facial est indubitablement d’une grande aide pour le chirurgien mais son impact sur la diminution des paralysies post-opératoires n’a pas pu être démontré sur des études rétrospectives et n’a jamais été étudié de manière prospective car jugé non éthique par les équipes qui l’utilisent de manière courante. IV - SYNDROME DE FREY Le syndrome de Frey décrit en 1923 par madame Lucie Frey sous le nom de syndrome du nerf auriculo-temporal associe une hyperhydrose et un érythème cervico-facial survenant lors de l’alimentation. Parmi les multiples hypothèses étiopathogéniques qui tentent d’expliquer cette symptomatologie, l’hypothèse la plus vraisemblable est celle d’une régénération des branches axonales du nerf parasympatique destinées aux glandes sudoripares sous-cutanées. Cette symptomatologie apparaît 1 à 2 mois après l’intervention (le plus souvent dans les 6 mois post-opératoires), elle est retrouvée à l’interrogatoire dans plus de 50% des cas mais n’est invalidante que chez 5 à 15% des patients. La fréquence du syndrome de Frey après parotidectomie est très élevée s'il est recherché de manière systématique. Le test utilisé pour mettre en évidence un syndrome de Frey est le test à l’amidon de Minor. Ce test, très peu utilisé en France, consiste à badigeonner la peau d’une solution iodée (iode + huile de ricin + alcool à 95%) et à la saupoudrer de farine. La mastication de citron déclenche la symptomatologie du syndrome de Frey et au contact de la sueur l’iode vire au violet permettant d’objectiver l’existence d’un syndrome de Frey et son étendue. Ce test est positif chez presque 100% des patients si il est fait de manière systématique après l’intervention. D’autres tests sont utilisés le test blotting paper qui consiste à comparer le poids du papier après et avant absorption de la sueur et un test modifié du test de Minor qui consiste à appliquer sur la peau un papier sec préalablement imbibé d’iode qui vire au violet au contact de la sueur. L’incidence fonctionnelle du syndrome de Frey après parotidectomie est liée à l’importance du sacrifice de tissu parotidien. Dans sa méta-analyse, RL Witt montre que le syndrome de Frey est 10 fois plus fréquent après une parotidectomie superficielle qu’après une énucléation de la tumeur. Il est observé chez 47% des patients après parotidectomie totale et chez 17% des patients après parotidectomie superficielle. De très nombreuses techniques chirurgicales ont été proposées pour prévenir la survenue d’un syndrome de Frey. Les techniques visant à sectionner pendant l’intervention le nerf auriculo-temporal n’ont pas fait la preuve de leur intérêt. De nombreuses techniques d’interposition entre la plaie opératoire et la peau de muscle temporal de fascia, de SMAS, de derme, de graisse ou de derme artificiel (Alloderm®) ont en outre, l’intérêt d’améliorer l’aspect esthétique post opératoire en diminuant la dépression pré-masséterine et rétro-angulo-mandibulaire. Les implants pour la plupart diminuent de manière objective la survenue d’un syndrome de Frey. La dure-mère lyophilisée n’est plus commercialisée en raison du risque de contamination par le prion responsable de la maladie de Creutzfeld-Jacob, elle n’était pas efficace. Elle a été utilisée en comparaison à d’autres implants [polyglactine 910-polydioxanone (Ethisorb®), polytétrafluoroethylène (e-PTFE)] par Dulgerov et al sur une série de 70 patients. L’efficacité de ces implants ne fait aucun doute puisque le taux de syndrome de Frey mis en évidence par des tests objectifs était de 76% chez les patients n’ayant pas eu d’implant, de 72 % chez les patients ayant eu de la dure-mère lyophilisée et de respectivement 14 et 8% pour les patients ayant eu une inter- 111 L E S C O M P L I C A TI O N S D E L A P A R O TI D E C TO M I E position de polyglactine 910-polydioxanone (Ethisorb®) et de polytétrafluoroethylène (e-PTFE). Govindaraj et al. dans une étude prospective randomisée montrent l’intérêt du derme acellulaire (Alloderm®). L’utilisation de ces implants est cependant significativement associée à un plus grand nombre de fistules salivaires qui surviennent chez un patient sur 2 ou sur 4, ou de collection séreuses ce qui est un inconvénient majeur. L’utilisation du muscle sterno-cleïdomastoïdien, de muscle temporal ou du fascia du muscle temporal, alourdit de manière importante la procédure chirurgicale mais donne de bons résultats en terme de diminution de l’incidence du syndrome de Frey. C’est actuellement l’interposition du SMAS qui est la technique la plus utilisée et qui semble donner les meilleurs résultats puisque le taux de syndrome de Frey après test objectif est de moins de 8% dans les études de la littérature chez des patients ayant le plus souvent été opérés d’une parotidectomie exofaciale. Le traitement des syndromes de Frey utilise de nombreuses techniques médicales ou chirurgicales. Parmi les traitements médicaux des applications locales au moment des repas de crèmes antisudation (à base de glycopyrolate), d’agents anticholinergiques (à base de scopolamine) de crèmes antiallergiques (à base de chrorure d’aluminium) ont été proposées et sont souvent jugées contraignantes et insuffisantes par le patient qui, soit interrompt le traitement si la symptomatologie est peu invalidante, soit si elle est invalidante, est demandeur d’une solution plus « radicale ». Les techniques chirurgicales sont, pour la section du nerf de Jacobson d’une efficacité variable, ou pour les techniques d’interposition de muscle ou de fascia temporalis complexes et à risque pour le nerf facial. L’utilisation de toxine botulique (Botox®) a révolutionné le traitement des syndromes de Frey invalidants. La technique consiste à injecter, avec une aiguille intra dermique, 0,1ml de solution contenant 2,5UI de neurotoxine botulique par surface de 1 cm² de peau sur la zone cutanée préalablement repérée par l’ingestion de citron. La durée moyenne d’efficacité de ce traitement est de 17 mois et même si des ré-injections sont souvent nécessaires, le bénéfice apporté par ce traitement est important. La survenue d’une fistule salivaire après chirurgie de la parotide est une complication relativement rare mais qui pose parfois des problèmes de traitement. L’incidence de la survenue d’une fistule salivaire est décrite avec des fréquences très variables dans la littérature. La plupart des auteurs, surtout les équipes qui pratiquent des parotidectomies totales, n’en observent aucune ou très peu [3% pour Debets et al.] ou n’en font pas état, alors que leur incidence atteint 11% dans une série. Le plus souvent un pansement compressif maintenu pendant quelques jours règle le problème. Dans les formes résistantes au traitement local, il n’y a pas de consensus sur les modalités de prise en charge. L’application de moules compressifs associée à des anticholinergiques par voie générale est une technique fréquemment utilisée avec succès. De multiples autres techniques ont été utilisées : une reprise chirurgicale pour parotidectomie totale, une section du nerf de Jacobson, des gestes locaux de fermeture de la fistule, voire de la radiothérapie. La toxine botulique a été utilisée par Guntinas-Lichius et al. chez une patiente en injection directe dans le lobe profond de la glande salivaire resté en place, permettant un tarissement de la fistule pendant 11 mois. V - COMPLICATIONS RÉSULTANT DE LA SECTION DU NERF GRAND AURICULAIRE La section du nerf auriculaire est fréquente au cours de la chirurgie de la parotide. Le nerf grand auriculaire est une branche sensitive qui se divise en 2 branches antérieure et postérieure. La branche postérieure innerve la sensibilité de la région mastoïdienne, du lobule de l’oreille et de la conque alors que la branche antérieure assure l’innervation sensitive de la région parotidienne et de l’angle mandibulaire. La plupart des chirurgiens sectionnent ce nerf au cours d’une parotidectomie , mais également au cours des curages ganglionnaires cervicaux. La section est à l’origine de la perte de sensibilité dans la région cervicale et surtout du lobe de l’oreille dont les patients se plaignent souvent. La fréquence des plaintes fonctionnelles des patients a été de 57% dans une 112 L E S C O M P L I C A TI O N S D E L A P A R O TI D E C TO M I E étude rétrospective portant sur 53 patients ayant été opérés de la parotide avec section du nerf. La symptomatologie régresse progressivement dans l’année suivant la chirurgie, probablement du fait de la régénération partielle du nerf ou de la compensation par les nerfs adjacents. Deux études ont étudié l’apport d’une préservation de la branche postérieure du nerf possible chez 70% des patients après parotidectomie et constatent une diminution des séquelles sensitives. La durée de l’intervention est prolongée de 10 à 15 minutes pour identifier et préserver ce rameau postérieur. La survenue d’un névrome au niveau de la section du nerf est exceptionnellement rapportée dans la littérature. Il se manifeste par la survenue d’une tuméfaction cervicale sensible, pouvant évoquer une adénopathie. Le traitement repose sur la section par coagulation du nerf et son enfouissement dans le muscle sterno-cleïdo-mastoïdien. VI - CONCLUSION La parotidectomie est une intervention chirurgicale à l’origine de nombreuses complications post-opératoire. Ces complications sont le plus souvent transitoires pour ce qui concerne la paralysie faciale. Le syndrome de Frey est une complication fréquente, heureusement souvent peu invalidante et qui bénéficie actuellement de l’utilisation de la toxine botulique. La fréquence des complications est liée au type d’intervention pratiquée : elles sont significativement plus fréquentes après une parotidectomie totale qu’après une parotidectomie exo-faciale. Ces complications sont d’autant plus difficiles à supporter par le patient que l’indication opératoire initiale était une pathologie bénigne ou fonctionnelle. L’information du patient dans la période pré-opératoire est indispensable, idéalement accompagnée d’un support écrit. RÉFÉRENCES 1 - JOHNSON JT, WAGNER RL. Infection following uncontaminated head and neck surgery. . Archives Otolaryngol. 1987, 113: 368-9,. 2 - Groupe de travail de l’ANDEM. L’antibioprophylaxie en chirurgie. Le Concours Médical 1996 ; 41 (suppl) ; 29-44. 3 - LACCOURREYE H, LACCOURREYE O, CAUCHOIS R, JOUFFRE V, MENARD M, BRASNU D. 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RÉCIDIVES D’ADÉNOME PLÉIOMORPHE C’est dans ce type histologique que le risque de récidives est le plus fréquent et leur meilleur traitement demeure encore leur prévention d’où l’importance à bien connaître les facteurs favorisants. I - FACTEURS FAVORISANTS Ils sont de plusieurs ordres : A - Thérapeutiques 1) Ponction à l’aiguille fine - Biopsie La ponction à l’aiguille fine n’est pas reconnue à l’heure actuelle comme facteur favorisant. Par contre, la biopsie est à proscrire avant toute chirurgie pour tumeur de la parotide. 2) Enucléation – Effraction tumorale Une insuffisance d’exérèse et/ou une erreur technique (ouverture accidentelle de la tumeur) dans la chirurgie initiale sont les facteurs qui sont le plus souvent retrouvés dans la littérature. Ainsi les énucléations réalisées en première intention sont à l’origine de 20 à 45% des récidives ; celles-ci auront un développement rapide, car secondaire à un ensemencement du champ opératoire lié à une exérèse faite par dissection au contact de la capsule tumorale, source d’effraction capsulaire. Dans la chirurgie des adénomes pléiomorphes, il est capital de disséquer à distance de la tumeur pour éviter de sectionner et laisser en place des prolongements péri-tumoraux, source de récidives. En cas de tumeur molle, friable, à capsule déhiscente, l’ensemencement du champ opératoire peut être consécutif à une manipulation trop « agressive », point de départ d’une dispersion de cellules tumorales non apparentes aux yeux du chirurgien. A l’opposé une prise en charge correcte, par parotidectomie réglée, passant au large de la tumeur, induit un faible taux de récidive de l’ordre de 2%. B - Histo-pathologiques 1) Théorie de la multifocalité L’existence de foyers tumoraux à distance de la tumeur principale, laissés en place au décours d’un geste chirurgical limité, serait à l’origine de récidives. Si cette éventualité était considérée comme fréquente pour Delarue (48%), elle est exceptionnelle pour d’autres (2%), voir niée par 115 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E certains travaux qui ont démontré que les foyers de multifocalité ne seraient en fait que des expansions périphériques de la masse principale. Ces expansions dans des plans de coupes différents ont été pris pour des foyers tumoraux indépendants. Cependant pour Batsakis, la réalité des adénomes multicentriques est indiscutable mais exceptionnelle (0,5% des cas). Cette hypothèse de la multifocalité, certes rare, pourrait expliquer la survenue de récidives tardives toutes aussi rares. 2) Théorie de la multinodularité L’examen microscopique d’un adénome pléiomorphe retrouve fréquemment de multiples nodules satellites en périphérie de la capsule qui peut par ailleurs être déhiscente. Cette extravasation tumorale (pseudopodes) dans le tissu parotidien péritumoral crée ainsi des nodules satellites. Ces nodules sont responsables du développement des récidives lorsqu’ils sont laissés en place dans le champ opératoire. 3) Type histologique de la tumeur Stennert a publié une étude prospective de 100 cas successifs d’adénomes pléiomorphes opérés dont les types histologiques se répartissaient de la façon suivante 51% de formes myxoïdes,35 % de formes cellulaires, 14% de formes classiques. Il note dans 98% des cas une capsule très mince (< à 20 µm) et cela quelque soit le type tumoral. Dans les formes myxoïdes par contre, dans 71% des cas il existe une déhiscence de la capsule alors qu’elle n’existe que dans 11% des cas dans le type cellulaire et de 43 % dans les formes classiques. Ce même auteur note l’existence de pseudopodes dans 26% des adénomes pléiomorphes dont 33% dans les formes myxoïdes. Cette étude montre que les types myxoïdes présentent les critères histologiques les plus favorables au développement d’une récidive. C - Epidémiologiques 1) Age Plus le sujet est jeune (avant 30 ans) lors de la prise en charge initiale de la tumeur ( Mac Gregor Renehan -Laskavi), plus le risque de récidives est important en particulier sur le mode multinodulaire (Laskavi). Un biais dans l’étude de ce paramètre (Norman ) peut être lié à une insuffisance du traitement initial. En effet, une chirurgie plus limitée exposant moins aux complications et aux séquelles surtout sur le plan esthétique, a pu être préférée chez un sujet jeune à fortiori chez une jeune femme. Il est vrai cependant que l’étude des dossiers de patients porteurs de récidives tumorales fait ressortir le jeune âge des patients lors de la prise en charge chirurgicale initiale de l’adénome pléiomorphe dont l’histoire clinique est souvent émaillée de plusieurs épisodes chirurgicaux. Bien que l’insuffisance du geste chirurgical initial reste le facteur le plus important, d’autres hypothèses ont été soulevées : une agressivité particulière sur le plan histologique à l’origine d’une pullulation tumorale plus rapide (Chilla), un temps de suivi plus long exposant de facto à un plus grand risque de récidives (Maran). 2) Volume - Siège Ce facteur est surtout net en cas de volumineuses tumeurs de la parotide sous faciale à expression parapharyngée car l’exérèse plus difficile se fait souvent au contact de la capsule tumorale, majorant le risque d’effraction accidentelle en particulier lors de « l’accouchement » du prolongement parapharyngé. 116 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E II - SURVENUE DES RÉCIDIVES A - Délais Un patient opéré d’un adénome pléiomorphe doit être surveillé sur une longue période. En effet, il est classiquement admis que les récidives surviennent dans les 10 ans qui suivent la chirurgie, mais certains auteurs ont rapporté la survenue de récidives au-delà de 20, voire 30 ans après le traitement initial (Carew – Guidice). Il est vrai cependant que la durée du suivi constitue un biais majeur dans l’évaluation comparative sur la validité des différents traitements chirurgicaux rapportés dans la littérature, car peu d’études ont un suivi sur une période de 20 ans et plus. B - Transformation maligne Il est classique que dans son évolution naturelle, l’adénome pléiomorphe puisse se transformer dans 1 à 3 % des cas. Cette transformation maligne est de 10% lors de la survenue de récidives, surtout si elles sont multiples. Ce risque augmente au fur et à mesure des récidives. III - BILAN PRÉ-OPÉRATOIRE A - Clinique 1) - Interrogatoire Il doit reconstituer l’histoire de la récidive en retrouvant les différents événements chirurgicaux. Les caractéristiques de la première intervention doivent être précisées : type d’exérèse (simple biopsie – énucléation – parotidectomie partielle avec ou sans repérage et dissection du nerf facial - parotidectomie totale), date, délai écoulé entre intervention et apparition de la récidive, mode d’évolution et bilan d’imagerie. L’idéal est d’être en possession du compte rendu opératoire et du compte rendu anatomo-pathologique. En cas d’interventions multiples, il faut faire les mêmes démarches pour chaque intervention et savoir que les difficultés de la reprise et en particulier le risque de paralysie faciale augmentent avec le nombre d’interventions. La réalisation d’une radiothérapie sera précisée (date, lieu et doses). 2) - L’examen clinique Il note : − L’état de la cicatrice, sa situation classique ou transjugale, son aspect, − La multiplicité ou non de la récidive, − Le siège des nodules qui peuvent être retrouvés préférentiellement dans la région parotidienne, soit de façon éparses, soit le long de la cicatrice cutanée, soit en périphérie de la zone d’exérèse, − En cas de réalisation de comblement par un lambeau musculaire aux dépens du muscle sterno-cleido-mastoïdien, des nodules peuvent être palpés dans la partie supérieure du muscle. Un examen de l’oropharynx s’assurera de l’absence de récidives à expression parapharyngée. La recherche d’une paralysie faciale même fruste et /ou d’adénopathies doit être systématique. Figure 1 - Cicatrice transjugale totalement inadaptée. L’examen clinique doit être complété tous les cas par une IRM. 117 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 3 - Récidive au niveau de l’oropharynx, consécutive à une biopsie première. Figure 2 - Récidives situées à la partie inférieure de la région parotidienne. B - Imagerie L’IRM nous apporte deux types de renseignements fondamentaux pour la prise en charge chirurgicale : − l’état du parenchyme glandulaire restant (quantité et répartition), renseignement important lorsque l’on ignore la nature exacte du geste initial. − le nombre et le siège des nodules afin de préciser s’il s’agit d’une récidive unique, ce qui est rare, ou multiple. En effet, il n’est pas rare qu’une récidive unique sur le plan clinique dévoile sa multiplicité en imagerie. En cas de récidives multiples, l’imagerie précise le nombre, la taille, mais aussi le siège, en particulier la présence de nodules dans le tissu parotidien profond, sous facial, parapharyngé et périglandulaire. Ce bilan peut également mettre en évidence un envahissement ganglionnaire passé inaperçu à l’examen clinique. Récidives multiples chez un patient déjà opéré de deux interventions, la première énucléo-résection , la seconde parotidectomie totale. Figure 4 - Nodule parapharyngé. 118 Figure 5 - Nodules cervicaux. Figure 6 - Nodules sous maxillaires. R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E IV - PRISE EN CHARGE CHIRURGICALE : La prise en charge chirurgicale d’une récidive d’adénome pléiomorphe n’est pas univoque et le chirurgien va être confronté à plusieurs éventualités. A - Première éventualité : récidive après chirurgie parotidienne non réglée (pas de découverte du facial). C’est le cas le plus simple d’un patient n’ayant pas été opéré selon les règles classiques de la chirurgie parotidienne, le diagnostic initial étant erroné. La tumeur de la parotide a été le plus souvent confondue avec une pathologique kystique dermique ou sous dermique et opérée par un abord direct. La récidive apparaît le plus souvent sous la forme d’une masse isolée, habituellement au lieu et place de la tumeur initiale. L’imagerie met en évidence la quasi totalité du tissu parotidien. Dans cette circonstance où il n’y pas eu de dissection du nerf facial, la prise en charge est simplifiée. On retrouve des difficultés lors du décollement du plan cutané car la tumeur initiale étant superficielle, la récidive est le plus souvent directement sous-dermique. La réalisation du lambeau doit être très prudente pour ne pas entraîner d’effraction tumorale au niveau de la zone d’adhérence cicatricielle. L’opération se déroule ensuite selon la technique classique, en réalisant systématiquement une parotidectomie totale compte tenu du risque de multifocalité des récidives même si celle-ci apparaît unique et bien limitée au bilan d’imagerie. Cas clinique : Figure 8 - Malgré le caractère unique et limité de la masse,une parotidectomie totale a été réalisée, pour limiter le risque de récidives itératives. Figure 7 - IRM montrant une récidive d’un adénome pléiomorphe superficiel de la parotide, ayant fait l’objet d’une énucléation par un abord limité et ayant récidivé rapidement. 119 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E B - Deuxième éventualité : récidive après chirurgie parotidienne réglée avec dissection du nerf facial. C’est la plus redoutée des chirurgiens car la récidive survient chez un patient préalablement opéré de parotidectomie « totale » ou de parotidectomie exo-faciale avec dissection du nerf facial, parfois en deuxième intention après une première énucléo-résection . Cette récidive est fréquemment multi-nodulaire, siégeant préférentiellement sur la cicatrice et en périphérie dans la région parotidienne. Dans ces cas, qui ne doivent être pris en charge que par des équipes entraînées, le protocole chirurgical est rigoureux car il s’agit d’une chirurgie longue, difficile et dangereuse pour le nerf facial. Cas clinique 1 - Mise en place d’un monitoring du nerf facial lors de l’installation de l’opéré afin de faciliter l’identification des différentes branches nerveuses . Figure 9 - Mise en place des électrodes pour monitoring du nerf. 2- Tracé de l’incision qui comporte toujours la résection de l’ancienne cicatrice et souvent des nodules sous cutanés adjacents. Figure 10 - Cicatrice antérieure. 120 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 11 - Tracé de la résection cutanée sur l’ancienne cicatrice. Figure 12 - Décollement du lambeau cutané en partant de la berge antérieure de la résection cutanée pour éviter de léser le nerf facial au niveau du tronc ou de la bifurcation. 3- Dissection rétrograde après identification des différentes branches terminales. Le repérage du tronc du nerf facial étant le plus souvent impossible selon les techniques habituelles, il est pratiquement obligatoire de faire une dissection rétrograde, c'est-à-dire identifier les différentes branches de terminaison du nerf facial en périphérie de la glande et dissection rétrograde de celles-ci pour essayer de parvenir au niveau de la bifurcation puis du tronc. Figure 13 - Recherche et identification des branches de terminaison de la branche cervico-faciale en avant sur l’aponévrose massétérine pour commencer la dissection rétrograde. 121 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 14 - Dissection rétrograde : celle-ci se fait dans le tissu cicatriciel sous contrôle de la sonde de neurostimulation. Figure 15 - Poursuite de la dissection rétrograde jusqu’à la zone de l’ancienne cicatrice où on voit nettement des nodules de récidives sous cutanés au contact des branches nerveuses. Figure 16 - Résection cutanée qu’il faut faire à ce temps de dissection car le nerf facial a été localisé en profondeur. 122 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 17 - Poursuite de la résection cutanée qui permet l’ablation des récidives superficielles. Figure 18 - Ablation de la récidive profonde sous faciale et rétromasséterine avec mise à nu de la face superficielle du ramus mandibulaire. Figure 19 - Vue en fin d’intervention ; persistance d’un tissu de fibrose autour du tronc du nerf et de sa bifurcation. 123 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Parfois, il est impossible d’individualiser celui-ci même en ayant recours au microscope opératoire et souvent un tissu fibreux sera laissé en place autour du tronc. Si un comblement par un lambeau musculaire a été préalablement effectué, les difficultés sont maximales car les nodules peuvent se trouver à l’intérieur des fibres musculaires. Ainsi en cas de comblement par un lambeau aux dépens du bord antérieur du muscle sterno-cléido-mastoïdien, des nodules de récidives tumorales peuvent être retrouvés dans le corps du muscle sterno-cléido-mastoïdien, au niveau de la zone charnière des fibres du lambeau de retournement. Cette chirurgie est minutieuse, toujours longue et difficile. Des sacrifices nerveux peuvent être nécessaires en cas de transformation maligne d’où la nécessité de prévoir une équipe capable de prendre en charge une greffe nerveuse, le patient ayant été préalablement informé de cette possibilité. Les suites opératoires sont beaucoup plus lourdes que dans les parotidectomies de première intention. La paralysie faciale postopératoire est constante, souvent à un degré important. La pratique du monitoring permet d'atténuer les séquelles faciales. Le temps de récupération de cette paralysie est souvent très long (un an et plus) et peut ne pas être complète. Dans cette éventualité, malgré toute la minutie et la rigueur observées dans le déroulement de la chirurgie, le patient n’est pas à l’abri d’une récidive ultérieure dans des délais impossibles à préciser, ce dont il aura été préalablement informé. C - Troisième éventualité : récidive itérative unique Le patient a été opéré de parotidectomie totale et une récidive survient souvent très à distance de la première intervention, fréquemment au niveau du prolongement masséterin. Cas clinique : L’IRM préopératoire confirme le caractère unique, bien limitée de la récidive ainsi que son siège antérieur au contact du muscle masséter. Figure 20 - Récidive chez un patient déjà opéré de parotidectomie totale gauche (notez la vacuité de la région parotidienne). Dans cette éventualité il nous semble préférable : − de limiter le monitoring du nerf facial aux territoires médians de la face, − de ne pas reprendre l’ancienne incision, car trop éloignée de la récidive et exposant trop le nerf facial lors du décollement du lambeau cutané, − de faire un nouvel abord cutané en regard de la récidive, − de n’identifier que les branches en rapport avec la récidive, − de se limiter à l’ablation sans effraction de la récidive, de laver et de fermer. 124 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 21 - Mise en place des électrodes de neurostimulation-neurodétection dans le territoire des branches destinées à la partie médiane de la face. Tracé d’une nouvelle incision curviligne, selon les lignes de tension, en regard de la récidive. Figure 22 - Identification des branches du nerf facial qui sont superficielles par rapport à la masse et qui vont être, après dissection, écartées. Figure 23 - Exérèse tumorale d’avant en arrière en maintenant les branches écartées. 125 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E Figure 24 - Ablation de la récidive sans effraction, lavage et fermeture. Figure 25 - Pièce d'exérèse. D - Quatrième éventualité : récidives itératives multiples Cas de malades multiopérés et/ou présentant une multitude de récidives dans les muscles de la joue et éventuellement dans la région infra-temporale. Dans ces cas, la chirurgie ne sera jamais satisfaisante car non radicale et plusieurs attitudes peuvent se discuter : − l’abstention avec surveillance, cette attitude sera préférée chez le sujet âgé mais elle a l’inconvénient d’ignorer une transformation maligne ; − l'énucléo-résection multiple. Elle s’adresse à toutes les lésions accessibles permettant l’obtention d’une analyse histologique pouvant éventuellement orienter vers une radiothérapie post-opératoire. 126 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E V - PLACE DE LA RADIOTHÉRAPIE La radiothérapie n’a pas sa place dans le traitement initial d’un adénome pléiomorphe, en particulier une énucléation ne doit pas être suivie de radiothérapie pour pallier son insuffisance. Il n’en est pas de même après chirurgie pour récidives. En effet Renehan a montré en cas de récidive multinodulaire que le taux de récidives à 15 ans après traitement de la première récidive était de 24 % pour la chirurgie seule alors qu’elle n’était que de 8% pour le traitement combiné. Dans la littérature certains travaux défendent également cette attitude en réservant la radiothérapie aux patients à hauts risques de récurrence (récidives multiples opérées de nombreuses fois - Carew - Vigili). Samson pense également qu’il est préférable de préserver le nerf facial et de proposer une irradiation plutôt qu’une chirurgie sacrifiant une branche nerveuse. Notre attitude est donc de recommander une chirurgie la plus complète possible sans sacrifice du nerf facial sauf en cas de transformation maligne avérée. Une radiothérapie ne sera envisagée qu’en cas de transformation maligne ou de résidus tumoraux volontairement laissés en place soit pour éviter une lésion du nerf facial soit du fait de leur inaccessibilité. Il est certain que l’indication d’une radiothérapie dans une pathologie bénigne chez un sujet jeune doit toujours être discutée. La littérature est non consensuelle et montre autant d’articles favorables à cette attitude que d’autres défavorables. L’intérêt de l’association chirurgie radiothérapie demande à être évaluée ce qui sera difficile compte tenu de la longueur de l’évolution et il faudra mettre en opposition les risques propres à la radiothérapie de cette région et le gain thérapeutique qu’elle peut apporter. VI - PRÉVENTION DES RÉCIDIVES La connaissance des caractéristiques histo-morphologiques des adénomes pléiomorphes est fondamentale afin de mieux comprendre leurs modes de récidive et d’adapter ainsi la stratégie thérapeutique. La capsule tumorale joue un rôle majeur dans la genèse des récidives. La plupart des travaux ont mis en évidence la fréquence des effractions capsulaires, que ce soit sous la forme de pseudopodes ou de nodules satellites. L’étude histopathologique permet de définir les adénomes pléiomorphes à risque de récidive. Les types hypo-cellulaires présentent plus volontiers une capsule fine constituant ainsi le sous-type histologique le plus fréquemment rencontré dans les récidives. La présence de pseudopodes est considérée comme un risque supplémentaire de récidive. Il est admis que celle-ci survient secondairement à des micro-ruptures capsulaires, suite à une dissection au contact de la capsule, sectionnant pseudopodes et nodules satellites laissés dans le site opératoire. Toute dissection au contact de la tumeur doit être évitée afin de ne pas exposer sa « capsule ». Les macro-ruptures capsulaires seraient plutôt à l’origine de récidive multinodulaires alors que les récidives uninodulaires seraient plutôt le fait des micro-ruptures. Plusieurs travaux ont clairement écarté le concept de tumeur multicentrique évoqué initialement. Ainsi, l’approche chirurgicale basée sur une parotidectomie totale systématique anciennement préconisée ne semble plus justifiée d’autant que le taux de récidive après parotidectomie exofaciale et parotidectomie totale sont tous deux inférieurs à 3%. De plus, le temps opératoire et la morbidité post-opératoire des parotidectomies totales sont toujours supérieurs. Une dissection chirurgicale dans l’environnement capsulaire de l’adénome pléiomorphe ne peut pas toujours être évitée, et ce quelque soit la précaution chirurgicale. Donovan et al. ont décrit 50% d’exposition tumorale incontournable liée à la localisation tumorale par rapport au nerf facial et à la superficie glandulaire. De même, les travaux de McGurk ont retrouvé un contact entre adénome pléiomorphe et division du nerf facial dans 50% des cas, expliquant la fréquence incompressible d’exposition capsulaire (« bare area des auteurs anglo-saxons ») lors de la réalisation de parotidectomies avec identification du nerf facial. Malgré ces données, le taux de récidive après parotidectomie est incomparablement plus faible qu’après énucléation où l’exposition capsulaire est complète. Il semble donc que le risque de récidive réside dans le degré d’exposi- 127 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E tion capsulaire. Les caractéristiques histopathologiques et particulièrement celles de la capsule et des pseudopodes et/ou des nodules satellites condamnent la technique d’énucléation, pourvoyeuse de récidive. La parotidectomie exofaciale représente aujourd’hui la procédure chirurgicale minimale d’exérèse d’une tumeur de la parotide, en respectant une marge de tissu sain de « sécurité » autour de la tumeur. Il n’existe aucun consensus quant à la taille de la marge péri-tumorale à respecter. En cas d’effraction capsulaire traumatique, la parotidectomie totale et le rinçage à l’eau stérile (cytolyse osmolaire des cellules essaimées) du lit chirurgical, a pour but d’éviter la survenue secondaire de récidive. Figure 26 - Petite tumeur. Exérèse à distance de la capsule. Figure 27 - Tumeur de taille moyenne. Exérèse à distance de la capsule avec faible marge de sécurité. Figure 28 - Tumeur volumineuse. Exérèse entraînant une large exposition capsulaire, sans marge de sécurité. 128 R É C I D I V E S D E S TU M E U R S D E L A P A R O TI D E VII - CONCLUSION Compte tenu de la gravité des récidives, il est évident que le meilleur traitement de celles-ci est leur prévention en particulier en évitant toute erreur chirurgicale lors de la première intervention, c'est-à-dire en pratiquant une parotidectomie large adaptée au siège de la tumeur, à sa taille et à l’âge du patient, n’hésitant pas à totaliser de principe après lavage en cas d’effraction accidentelle de la tumeur. RÉFÉRENCES : 1 - BANKAMP D. G. AND BIERHOFF E., Proliferative activity in recurrent and nonrecurrent pleomorphic adenoma of the salivary glands, Laryngorhinootologie, 78, 77-80, 1999. 2 - BARTON J., SLEVIN N. J. and GLEAVE E. 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En effet, la survenue d’une paralysie faciale constitue un handicap majeur aux lourdes conséquences sociales; et les procédés de reconstruction, aussi performants soient-ils, ne permettent pas une restitution ad integrum de la fonction faciale. Actuellement, une attitude conservatrice du nerf facial est indiquée chez tous les patients ayant une fonction faciale normale en pré-opératoire et dont le processus tumoral n’envahit pas les rameaux nerveux. Dans les cas de tumeurs bénignes en première main, le nerf doit être totalement disséqué de la tumeur pour être préservé. A l’inverse, le problème peut être plus délicat dans le cadre des tumeurs malignes ou l’envahissement tumoral peut atteindre une branche ou le tronc du nerf facial qui devra alors être reséqué. Le bilan pré-opératoire (IRM et cytoponction) permet d’orienter le diagnostic de nature et ainsi d’informer le patient sur les risques chirurgicaux accrus de lésion du nerf facial dans le cadre des tumeurs malignes. Quoiqu’il en soit, la décision finale de préservation ou de résection nerveuse ne sera prise qu’au moment de l’acte chirurgical, en fonction de l’état du nerf facial, des possibilités de dissection de la tumeur et de la nature histologique. L’intervention chirurgicale minimale sur la parotide est la parotidectomie exo faciale avec découverte première du tronc du nerf à sa sortie du trou stylo-mastoïdien. Cette technique limite les risques de section accidentelle du nerf facial et la découverte de son tronc représente le principe de base de toute intervention sur l’aire parotidienne. L'abord rétrograde du nerf facial à partir d'une de ses branches périphériques, est peu utilisé essentiellement parce que les repères sont moins reproductibles et parce que la dissection rétrograde est plus difficile. Dans quelques cas particuliers et notamment dans le traitement chirurgical des récidives ainsi que celui des volumineuses tumeurs endo-faciales, l'abord rétrograde peut être utile. II - MONITORAGE DU NERF FACIAL La chirurgie de la parotide est une chirurgie spécifique dans laquelle le geste opératoire est entièrement déterminé par la présence du nerf facial. La difficulté du geste opératoire dépend du repérage premier du nerf et de la dissection de la totalité des branches nerveuses. Le monitorage du nerf facial trouve son intérêt dans le repérage ou la dissection du nerf ou d’une de ses branches. Nous distinguerons deux éventualités, la chirurgie première et la chirurgie des récidives, éventualités où compte tenu des difficultés opératoires, l’utilité du monitoring s’avère très différente. 133 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E A - Appareillage : Plusieurs appareils de stimulation nerveuse sont compatibles avec la chirurgie parotidienne. Les appareils les plus adaptés sont les neurostimulateurs-détecteurs mono ou multicanaux (INOMED : Neurosign 100 et 400, MEDTRONIC-XOMED : Nim 2-4 canaux) d’utilisation commune dans la chirurgie de la base du crâne. L’appareillage comprend des jeux d’électrodes réutilisables ou à usage unique selon les circonstances et une sonde de stimulation restérilisables ou à usage unique. Compte tenu des directives actuelles, il est préférable d’avoir recours au matériel à usage unique, les industriels ayant constitués des « packages » qui n’aggravent pas le coût. Ces appareils apportent à l’opérateur et à son équipe une information à la fois auditive, sous la forme de sons d’alerte plus ou moins forts et visuelle par l’intermédiaire de diodes luminescentes ou d’ondes d’EMG sur écran, stimuli dont l’intensité varie en fonction de l’importance de la stimulation. L’appareil répond à une stimulation mécanique à proximité d’une branche nerveuse. Il peut également être utilisé comme neurostimulateur, la branche nerveuse recherchée étant détectée et identifiée par une sonde de stimulation. La stimulation nerveuse est modulable en intensité, ce qui permet une adaptation de l’intensité en fonction de la distance par rapport au nerf. B - Mise en place des électrodes Avant la réalisation des champs opératoires et après désinfection cutanée, les électrodes sont mises en place de façon stérile, au niveau des muscles orbiculaires des lèvres et de l’œil par introduction tangentielle à la peau. Elles sont maintenues par des adhésifs afin d’éviter tout déplacement intempestif sous les champs. On s’assure avant de les recouvrir par les champs opératoires du bon fonctionnement du signal de détection. La sensibilité est réglable sur l’appareil en fonction des demandes de l’opérateur. Figure 1 - Sonde de neurostimulation restérilisable Figure 3 - Branchement des électrodes au boîtier accroché à la table du côté opposé au chirurgien, pour éviter tout débranchement intempestif et vérification du bon fonctionnement avant de faire les champs opératoires. 134 Figure 2 - Mise en place des électrodes qui seront ensuite maintenues par des adhésifs. N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E C - Utilisation Lors de la recherche du nerf ou de ses branches de division primaire et/ou secondaire le monitorage peut être utilisé comme un stimulateur, le déclenchement du signal prévenant l’opérateur de la proximité de la branche nerveuse. Dans la chirurgie de première intention où la dissection ne présente pas de difficultés particulières, le déclenchement du signal avertit de la proximité du tronc ou d’une branche. Une fois le nerf identifié, la dissection se poursuit de façon classique et le monitoring n’a pas d’utilité particulière en dehors d’information sur les conséquences des manipulations que l’on effectue sur le nerf ou dans son voisinage. Dans la chirurgie des récidives, la recherche des branches nerveuses et du tronc du nerf est beaucoup plus difficile et la dissection se fait le plus souvent de façon rétrograde. Une fois les branches distales du nerf identifiées dans une zone non précédemment opérée, la dissection progresse vers la bifurcation d’abord puis le tronc du nerf pour aborder la zone de la précédente exérèse. Les difficultés d’exposition nerveuse sont alors maximales, les tissus fibrosés ne permettent pas de dissection au contact des branches nerveuses, l’aspect blanchâtre caractéristique des filets nerveux n’est plus apparent. Le monitorage devient dans ces conditions une aide précieuse qui permet à l’opérateur de suivre les filets nerveux sans les dénuder, sans altérer l’épinèvre. La modulation de l’intensité de stimulation permet de s’assurer de la proximité plus ou moins grande du nerf. On peut alors progresser vers la bifurcation du nerf. Il est important dans ces manœuvres de ne pas stimuler le nerf à des intensité trop fortes ou de façon trop intempestive afin d’éviter l’apparition de clonies durables et gênantes et conserver une bonne réactivité du nerf à des intensités modérées. La stimulation nerveuse permet ainsi dans la plupart des cas un gain de temps, une meilleure garantie de sécurité vis-à-vis du nerf et une atténuation de l’intensité de la paralysie faciale post-opératoire. D - Résultats Dans la littérature, peu de résultats concernant l’application du monitorage du nerf facial à la chirurgie parotidienne sont publiés. Si beaucoup d’opérateurs s’aident de neurostimulateur à usage unique à certaines phases de l’intervention, l’utilisation d’un monitorage continu du nerf facial n’est pas du domaine courant. Quelques publications font état de son utilisation dans la chirurgie de première intention. Certains auteurs (Wolf, Terrel, Dulguerof) ont ainsi rapportés des complications faciales moins importantes et une diminution du temps opératoire. Ces résultats ne sont pas retrouvés dans d’autres articles dans lesquels la comparaison des résultats d’un groupe de patients opérés sous monitoring et d’un groupe sans monitoring ne différent pas de façon significative (Witt). Dans notre expérience, nous utilisons le monitorage de façon systématique uniquement dans la chirurgie des récidives, ce qui a permis une diminution du temps opératoire et une diminution de l’intensité de la paralysie faciale. Ces constations sont comparables à d’autres travaux présentés (Cillero-Ruiz, Olsen). En cas de récidive unique antérieure, le monitoring permet d’aborder rapidement la zone de la récidive, d’isoler les branches nerveuses situées à proximité de la tumeur. Ceci évite et limite la dissection dans les tissus fibreux, diminuant l’exposition nerveuse en apportant une plus grande sécurité vis à vis du nerf. Toutefois, il faut nuancer cet enthousiasme et savoir se méfier d’un « collaborateur électronique » susceptible de dysfonctionnement. E - Indications 1) - En chirurgie de première intention Le monitorage per-opératoire du nerf facial n’a pas prouvé son intérêt de façon formelle. Les repères habituels de découverte du nerf sont généralement fiables et la dissection des branches se fait sans difficultés. Habituellement le nerf facial est facilement repéré au niveau du tronc du nerf après son émergence du trou stylo-mastoïdien. Les difficultés de repérage du tronc du nerf facial peuvent êtres dues au siège, au développement, au volume de la tumeur. Ainsi en cas de tumeur à 135 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E développement endo-faciale, le trajet du tronc du nerf peut être modifié dans son trajet rétroglandulaire en se verticalisant et se superficialisant s’exposant à un traumatisme lors de sa découverte. Dans ces éventualités - tronc du nerf difficilement accessible sans risque de rupture de la tumeur ou accès dangereux pour le nerf - le monitorage peut faciliter la détection du nerf à fortiori si sa dissection se fait de façon rétrograde. Enfin dans certains cas particuliers comme celui de la chirurgie des tumeurs para-pharyngées, les appareillages 4 canaux apportent un confort supplémentaire car ils permettent le monitorage simultané du VII et des autres paires crâniennes. 2) - Chirurgie de deuxième intention Dans cette circonstance plusieurs éventualités peuvent se rencontrer : Première éventualité : chirurgie incomplète lors du geste initial et adressé rapidement pour complément d’exérèse. Lors de la première intervention a été pratiqué un geste limité, simple énucléation ou résection parotidienne partielle. Le nerf facial n’a pas été découvert ou seulement au niveau de sa partie proximale. Le patient peut être adressé rapidement après le premier geste pour complément d’exérèse ou présenter rapidement une poursuite évolutive sur le tissu parotidien restant. Il s’agit donc d’une intervention de complément d’exérèse. Dans ces cas, techniquement, il n’y a pas ou peu de difficulté à repérer le nerf facial. Cependant quelques difficultés peuvent être rencontrées dans la dissection des branches nerveuses dans la zone de la précédente exérèse, et il est très important que l’exérèse soit la plus complète possible à ce niveau. Bien que dans cette éventualité chirurgicale, le risque vis-à-vis du nerf facial est moindre, le monitorage du nerf facial s‘avère intéressant surtout pour intervenir en zones déjà disséquées. Deuxième éventualité : chirurgie pour récidives à distance après un geste initial ayant comporté une dissection du nerf facial. Le premier chirurgien a effectué une parotidectomie classique exo faciale par exemple et la récidive est soit profonde dans le tissu parotidien endo-facial soit en périphérie le long des branches de division du nerf. Dans cette éventualité, il s’agit souvent de récidives multiples. Cette éventualité est la plus redoutable pour le chirurgien et pour le nerf facial car l’identification des différentes branches et leur dissection seront très difficiles. Compte tenu de ces difficultés prévisibles, il est nécessaire d’avoir recours à tous les moyens possibles pour diminuer le risque facial et le monitorage per-opératoire du nerf facial est un moyen parmi d’autres (dissection rétrograde - microscope opératoire - instruments de microchirurgie) pour améliorer le contrôle du nerf. Dans notre pratique, le monitorage continu du nerf facial à l’aide du neurostimulateur utilisé dans la chirurgie de la base du crâne s’est révélé être une aide précieuse. Le recours au monitorage permet d’éviter de sectionner une branche du nerf en facilitant son identification mais n’évite ni les difficultés de repérage ni de dissection du nerf. Il permet un gain de temps. F - Conclusion Le monitorage du nerf facial en chirurgie parotidienne est utile en chirurgie de la parotide chaque fois que l’on craint une difficulté particulière dans le repérage et la dissection du nerf facial. Ces difficultés sont rares en chirurgie de première intention mais pratiquement constantes dans la chirurgie des récidives d’où son plus grand intérêt dans cette dernière circonstance. 136 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E III - RÉPARATION D’UNE BRANCHE DU NERF FACIAL Dans de rares cas, une lésion accidentelle d’une branche du nerf facial peut survenir. Dans le cas d’une section nerveuse nette, une micro-suture nerveuse bout à bout doit être réalisée dans le même temps opératoire afin de rétablir la continuité de la branche nerveuse. Dans le cas d’une dilacération nerveuse, secondaire à une manipulation traumatique du nerf, des phénomènes de neurapraxie et d’axonotmesis peuvent survenir. La constatation d’une dilacération per-opératoire du nerf pose des problèmes beaucoup plus complexes et deux situations sont distinguées : − La dilacération nerveuse n’a pas entraîné de rupture complète du rameau nerveux. Si après la résection de la zone endommagée, une suture nerveuse bout à bout est possible, la réparation nerveuse est souhaitable. − La dilacération a entraîné une rupture complète de la branche nerveuse. Dans ce cas, il est nécessaire de réséquer les zones trop endommagées et de rétablir la continuité nerveuse par utilisation d’un greffon nerveux d’interposition. Les résultats de ce type de réparation sont toujours moins satisfaisants qu’après micro-suture bout à bout. Le nerf facial est exclusivement moteur dans son trajet extra crânien. Une des difficultés majeures de la réparation nerveuse est la distribution complexe des fibres motrices constituant le nerf. Les sutures bout à bout doivent être réalisées sous microscope opératoire afin de s’assurer de la bonne coaptation des fibres nerveuses. Les sutures sont placées au niveau épi et/ou péri neural, au moyen d’un mono-filament 10/0 afin de ne pas léser les fibres nerveuses sous-jacentes. Figure 4 - Structure d’un nerf périphérique (section transversale). Technique chirurgicale de réparation nerveuse microchirurgicale Après repérage des rameaux à suturer, les extrémités libres sont placées dans leur position normale. Les nerfs sont manipulés au moyen de pinces saisissant seulement l’épinerve qui doit être totalement disséqué des tissus environnants. Le microscope opératoire permet une bonne Figure 5 - Suture sous microscope opératoire, suture épi et périnerveuse. Figure 6 - Suture nerveuse sur greffon. 137 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E visualisation des faisceaux axonaux constituant le nerf et de s’assurer de la bonne orientation de chaque extrémité. Dans la mesure où une tension de base existe en permanence au niveau des rameaux nerveux, un espace sépare constamment les deux extrémités légèrement rétractées après rupture nerveuse. Les sutures sont alors réalisées. En cas de tension trop importante, un greffon d’interposition nerveux doit alors être mis en place. En cas de nécessité d’un greffon nerveux d’interposition, le nerf grand auriculaire ou une autre branche du plexus cervical superficiel sont des greffons disponibles dans le champ opératoire. Dans le cas où ces nerfs ne sont pas utilisables, le nerf sural constitue la meilleure alternative. Ces greffons nerveux doivent bénéficier d’un environnement bien vascularisé pour assurer leur survie. Figure 6 - Perte de substance nerveuse sur une branche du nerf facial (parotidectomie gauche). Figure 7 - Réparation nerveuse d’une branche du nerf facial par greffon nerveux d’interposition. IV - RECONSTRUCTION DU NERF FACIAL APRÈS RÉSECTION NERVEUSE La résection chirurgicale du nerf facial lors d’une parotidectomie est réalisée le plus souvent chez les patients présentant un envahissement malin des structures nerveuses. Lorsque le tronc du nerf facial ou l’une de ses branches a été sacrifié, un contrôle extemporané de la négativité des limites s’impose. Le tropisme neurologique de certaines histologies telles que les carcinomes adénoïdes kystiques, peut être responsable d’un envahissement non visible en macroscopie et il faut systématiquement envisager une analyse en biopsie extemporanée des recoupes des sections nerveuses. Dans certains cas, les recoupes peuvent amener à réaliser un abord otologique exposant l’intégralité de la troisième portion. Il peut s’agir soit d’un patient présentant une paralysie faciale pré-opératoire, soit d’un patient à fonction pré-opératoire normale. Dans tous ces cas, le traitement de choix après résection est la suture sur greffon nerveux sous microscope opératoire. Figure 8 - Greffon nerveux de nerf sural. 138 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E La technique repose sur l’utilisation d’un greffon d’interposition, placé entre les deux extrémités du nerf à reconstruire. Le greffon de nerf périphérique doit être du même diamètre que celui du nerf à reconstruire, afin de permettre des sutures congruentes. Une hémostase méticuleuse du site opératoire est fondamentale car tout hématome empêcherait la revascularisation du greffon nerveux. Afin d’optimiser une greffe nerveuse visant à reconstruire plusieurs branches entre la partie proximale du nerf (tronc du nerf facial) et plusieurs extrémités distales (branches du nerf facial), le greffon est inversé et son extrémité distale est divisée en plusieurs faisceaux de manière à reconstruire les différentes branches. Cette procédure de division du greffon peut être délicate. En effet, le nombre de branches à individualiser pour reconstruire les rameaux du nerf facial est limité par le nombre de faisceaux nerveux composant le greffon. En pratique la reconstruction des branches périphériques se fait en règle à trois niveaux (région haute, moyenne et inférieure). Lorsque la résection du nerf facial a été réalisée juste après sa sortie du trou stylo-mastoïdien, une anastomose microchirurgicale nerveuse ne peut être réalisée par manque d’exposition nerveuse. Le nerf facial doit alors être dégagé au niveau de sa troisième portion intra pétreuse (mastoïdienne) après réalisation d’une mastoïdectomie. L’anastomose peut ensuite être réalisée dans des conditions techniques plus confortables, dans la mastoïde. Figure 9a - Parotidectomie gauche en position opératoire avec résection du nerf facial jusqu'à son coude avec la deuxième portion dans la mastoïde. Extrémité distale du VII sous les cotons, extrémité proximale repérée dans la mastoïde après incision transfixiante du conduit auditif externe. Figure 10a Figure 9b - Reconstruction totale du nerf facial gauche par greffon nerveux sural. Suture de l’extrémité proximale dans la mastoïde. Sutures des branches distales du VII. Figure 10b Résultat d’une greffe totale de nerf facial gauche (nerf sural). 139 N E R F F A C I A L E T C H I R U R G I E D E L A P A R O TI D E Résultats des greffes de nerf pour reconstruction de nerf facial Comme l’indiquent plusieurs travaux, les résultats des greffes de nerf facial sont supérieurs à ceux des greffes nerveuses en général. Cependant, bien que la majorité des patients bénéficient d’une amélioration fonctionnelle faciale après reconstruction ou réparation nerveuse, la fonction faciale n’est pas restituée ad integrum. La suture bout à bout donne de meilleurs résultats que l’utilisation d’un greffon d’interposition. L’utilisation d’un greffon provoque une modification de toute l’anatomie interne du nerf. Etant donné que seul 30% des axones s’anastomosent à un autre axone au niveau d’une suture, une réparation par greffon d’interposition avec deux sutures nerveuses transmet au mieux 10% des fibres. Cependant, la densité d’innervation des muscles de la face étant très importante et la force musculaire nécessaire faible, une grande tolérance clinique à des zones de dénervation caractérise la face et explique ces bons résultats. Les travaux de Reddy et al. ont démontré que 75% des patients ayant bénéficiés d’une greffe nerveuse après parotidectomie radicale présentaient une paralysie faciale grade III (classification de House et Brackmann) 2 ans après l’intervention. Dans cette étude, les résultats fonctionnels étaient d’autant meilleurs que les patients étaient jeunes puisque 100% des sujets de moins de trente ans avaient obtenu un grade III. Baker et Conley ont retrouvé 95% d’amélioration fonctionnelle faciale après greffe nerveuse. Il semble que la radiothérapie post-opératoire n’ait pas ou peu d’effet sur la qualité fonctionnelle des résultats après greffe nerveuse. Des parésies post-opératoires plus ou moins localisées sont courantes de même qu’une faiblesse fonctionnelle et des syncinésies. Alors que ces parésies sont très bien tolérées chez les patients préalablement informés, les syncinésies survenant plus volontiers chez les patients jeunes ayant récupéré une bonne fonction motrice sont plus géantes socialement. L’utilisation de toxine botulique de type A permet d’améliorer ces patients présentant des syncinésies, en provoquant des zones de parésie mieux tolérées. Par ailleurs, la toxine permet également une symétrisation faciale lorsqu’elle est utilisée au niveau de l’hémi-face saine. RÉFÉRENCES : 1 - DULGEROV P, MARCHAL F, LEHMANN W. Postparotidectomy facial nerve paralysis : possible etiologic factors and results with routine facial nerve monitoring. Laryngoscope 1999;109:754-62 2 - TERELL JE, KILENY PR, YIAN C, ESCLAMADO RM, BRADFORD CR, PILLSBURY MS, WOLF GT. 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J.O. du 05 mars 2002), à cette différence près, que ce qui était présenté jusque là sous la forme d'une obligation pour les médecins est désormais affirmée comme un droit pour les patients. Le médecin s'engage à soigner le malade et non à le guérir. Il a donc une obligation de moyens et non une obligation de résultat qui n'est retenue par la jurisprudence qu'en matière d'analyse médicale et de prothèse dentaire. La conséquence de cette doctrine est de mettre la preuve de la faute du médecin à la charge du patient. Le consentement du patient doit être éclairé par une information "simple, approximative, intelligible et loyale" selon les termes de la cours de cassation du 21 février 1961 dit arrêt Rousselin. Mais cet arrêt est dépassé par les nouvelles jurisprudences ainsi que par l'article 35.1 du Code de déontologie qui indique "le médecin doit à la personne qu'il examine, qu'il soigne et qu'il conseille une information loyale claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu'il propose". On constate une évolution des idées vers une demande d'information exhaustive : moins l'acte s'avère vital pour la santé ou la survie du patient, plus l'information doit être précise et étendue, voire totale, pour l'arrêt de la cour de cassation du 14 janvier 1992 dit arrêt Le Quang. La nécessité du consentement libre et éclairé s'impose aussi bien en médecine privée qu'en médecine hospitalière publique car l'accord du patient est fondé sur les principes généraux du droit garantissant à la dignité de la personne humaine. Le consentement des investigations et des soins n'est pas une obligation pour le malade : il existe un véritable droit au refus de soins affirmé par la deuxième chambre civile de la cour de cassation dans un arrêt du 19 mars 1997 qui énonce que "Nul ne peut être contraint, hors les cas prévus par la loi, de subir une intervention chirurgicale". Que ce soit au cours d'une consultation ou à l'occasion d'une hospitalisation, le patient doit donc être bien informé, clairement et complètement sur un certain nombre d'éléments : § § § § § L'état de santé et l'affection dont il est atteint Son évolution prévisible Les investigations nécessaires Les alternatives thérapeutiques éventuelles avec leurs avantages et leurs inconvénients Le traitement retenu avec ses caractéristiques, ses effets secondaires, ses conséquences et ses risques ; ces derniers sont la cause de la quasi-totalité des procès civils et posent la question d'une part des risques graves, d'autre part des risques dit exceptionnels. 141 C O N S I D É R A TI O N S M É D I C O - L É G A L E S § Les risques graves : Le principe est posé par les arrêts du 14 octobre 1997, du 17 février, du 27 mai et du 07 octobre 1998. Les risques graves, qui avaient déjà été pris en considération par des arrêts plus anciens, notamment un arrêt du 17 novembre 1969, peuvent se définir comme étant ceux qui sont de nature à avoir des conséquences mortelles, invalidantes, ou même esthétiques lourdes, compte tenu de leur répercussion psychologique ou sociale. Il s'agira par exemple de la perte ou de la diminution importante d'une fonction. § Les risques exceptionnels : L'arrêt sus visé du 07 octobre 1998 précise : "hormis les cas d'urgences, d'impossibilité ou de refus du patient d'être informé, un médecin est tenu de lui donner une information loyale, claire et appropriée sur les risques graves afférents aux investigations et soins proposés et il n'est pas dispensé de cette obligation par le seul fait que ces faits ne se réalisent qu'exceptionnellement." Cela a mis clairement fin à une jurisprudence antérieure qui autorisait le médecin à ne pas révéler à son patient les risques exceptionnels. Cet arrêt comme un autre du même jour, s'il vise la justification de l'absence d'informations par leur genre, l'impossibilité ou le refus du patient, n'exclut pas bien au contraire, ce que l'on pourrait appeler "une limitation thérapeutique de l'information lorsqu'il apparaît au médecin que l'information est de nature à avoir une influence négative sur la réussite des investigations ou des soins". I - LA PREUVE DE L'INFORMATION A - La charge de la preuve Par l'arrêt du 27 février 1997, arrêt HEUDREL repris depuis par 5 nouvelles décisions de la cour de cassation, par de nombreux jugements et arrêts des tribunaux et cours d'appel, la cour de cassation a décidé que : "celui qui est légalement ou contractuellement d'une obligation particulière d'information doit apporter la preuve de l'exécution de cette obligation." Dès lors un médecin, tenu d'une obligation légale d'informer son patient, doit prouver qu'il a exécuté cette obligation. B - Mode de preuve : écrits Le principe de base résultant du code civil est que, hormis les cas où les dispositions légales spéciales imposent un mode de preuve particulier, la preuve est libre ; plus exactement elle peut se faire suivant l'une des cinq modalités énumérées par l'article 1 316 du Code Civil : écris, témoignages, présomptions, aveux, serment, ces deux derniers modes étant d'application marginale. Il n'existe pas de réglementation générale de la preuve en matière d'information et de consentement du patient. Il existe des règlements particuliers à certains actes médicaux qui imposent un écrit signé, par exemple en matière de recherche biomédicale ou de prélèvement. Logiquement par un arrêt du 14 octobre 1997, la cour de cassation a rappelé que la preuve de l'information peut être faite par tous les moyens. Elle peut notamment se faire par des présomptions : ensemble des faits, circonstances ou éléments, dont le juge déduit que la preuve de la délivrance de l'information au patient est reportée. Il pourra ainsi tenir compte du nombre de consultations ayant précédé l'intervention, les mentions dans les dossiers médicaux, fiches, compte rendus, de la pratique habituelle du médecin concerné en matière d'information, de lettres à des confrères ou aux patients, de l'attitude, de la personnalité et de l'activité de ce dernier. On doit cependant convenir que l'écrit (même s'il ne règle pas tout, car il peut exister des contestations sur son contenu) permet de conserver une trace de l'information. A cet égard, les fiches d'informations réalisées par les Sociétés Savantes, paraissent tout à fait heureuses. Il importe 142 C O N S I D É R A TI O N S M É D I C O - L É G A L E S cependant de souligner que les médecins apprécient toujours, dans l'intérêt de son patient, l'opportunité d'une remise de ces fiches et qu'il lui incombe, dans le cadre du dialogue singulier avec le malade, de les lui expliquer et de répondre à ces questions. Concernant la preuve de leur délivrance, il s'agit là encore en droit, d'une question de pur fait qui n'implique pas une signature systématique du patient. Cependant les fiches d'informations du consentement, signées par le patient paraissent pertinentes. II - PARTICULARITÉ DE L'INFORMATION EN PATHOLOGIE PAROTIDIENNE A - Retard diagnostique et notion de perte de chance Les données de la littérature concernant les retards diagnostiques en pathologie cervico-faciale et leurs implications médicaux légales sont extrêmement rares. Le diagnostic est l'élément clef de la décision médicale. Il renvoit à la conscience et à l'attention du médecin qui doit savoir prendre le temps de recourir aux examens adaptés et si nécessaire solliciter l'avis de confrères expérimentés. Cette question permet de souligner combien les règles juridiques sont équilibrées : l'erreur de diagnostic n'engage la responsabilité que si elle résulte d'une faute. C'est la jurisprudence qui détermine, au cas par cas, s'il y a faute ou seulement erreur. Le diagnostic illustre parfaitement les constantes de la responsabilité médicale : nécessité de la faute, difficulté de la preuve, absence de certitude ou de critère immuable. L'erreur de diagnostic peut-elle être fautive ? C'est le cas lorsqu'elle résulte de la méconnaissance des données acquises de la science qui fait que le médecin va négliger de faire pratiquer des investigations, des explorations ou qu'il a mal interprété une symptomatologie ou un résultat d'examen. Le retard diagnostique est une faute susceptible d'engager la responsabilité du médecin à condition que le lien de causalité avec le préjudice soit établi avec certitude. Serait aussi fautif le médecin qui néglige de faire pratiquer des examens qui lui auraient permis de suspecter l'existence d'une tumeur parotidienne cancéreuse. La perte de chance Initialement, en droit, la perte de chance est un préjudice consistant en un empêchement de parvenir à un objectif ou d'obtenir quelque chose. En matière médicale, le dommage réel est parfaitement connu ; c'est dramatiquement le décès ou ce sont les complications qui ont abouti à telle incapacité, telle invalidité ou tels soins supplémentaires ; or, à ce dommage réel et connu, on substitue un dommage différent et flou : la perte de chance de guérison ou de survie. La perte de chance de guérison ou de survie La perte de chance est également avancée lorsqu'une faute est relevée et qu'il n'est pas certain que le lien de causalité entre cette faute et le dommage existe. Il s'agit donc, en quelque sorte d’une présomption de causalité entre la faute commise par le médecin et le préjudice de la victime, le juge admettant que celle-ci a perdu une chance de guérir. Le doute profite ainsi à la victime. Notion d'accélération ou d'aggravation Le retard diagnostique ou dans la mise en œuvre du traitement peut être à l'origine de l'accélération d'un processus tumoral antérieur menant à l'état constaté par l'expert ou ayant mené au décès du blessé. L'expert doit donc connaître l'état antérieur avec le maximum de précision et doit poser le diagnostic rétrospectif et expliquer en quoi cette pathologie aurait inexorablement conduit à l'état constaté même sans traitement ce qui implique ici encore une parfaite connaissance du 143 C O N S I D É R A TI O N S M É D I C O - L É G A L E S processus en question. Le caractère irréversible du processus est le critère décisif de la catégorie d'accélération. Dans la mesure du possible l'expert doit donner une idée et un ordre de grandeur du délai par lequel le sujet serait arrivé à l'état constaté ou au décès. Nous savons qu'un tel constat est difficile et incertain, mais il aide le décideur à établir une comparaison de durée et à situer le niveau de ce qui a été perdu sur le plan fonctionnel. Si l'expert n'est pas en mesure de donner un tel avis c'est que la qualification d'accélération d'un processus irréversible est inexact et qu'il faut lui substituer celle d'aggravation. En pratique devant une tumeur parotidienne peut-on poser une indication opératoire sans au préalable réaliser des examens complémentaires, à savoir échographie, IRM, ponction cytologique ? Le but de ces investigations complémentaires est certes, de confirmer la nature parotidienne de la tumeur et d'essayer, dans la mesure du possible, de différencier les tumeurs bénignes des tumeurs malignes. Ceci aurait l'avantage d'informer le patient d'une manière plus précise quant à la mise en œuvre du traitement chirurgical, des risques opératoires notamment en ce qui concerne le nerf facial. B - L’information concernant la chirurgie parotidienne Cette information doit porter sur trois points : − l’indication opératoire, − le délai pour intervenir, − les risques opératoires. L’indication opératoire D’une manière générale, il est classique de proposer un traitement chirurgical à toute tumeur parotidienne et ceci pour deux raisons essentielles : − absence de certitude au plan anatomo-pathologique, − possibilité, certes faible, mais classique, de dégénérescence d’une tumeur bénigne. Le délai pour intervenir Sauf cas particulier, notamment dans les tumeurs parotidiennes ou fortement suspectes de malignité (paralysie faciale, adénopathie cervicale, cytologie et imagerie contributives) il est classique de prendre en compte pour fixer la date de l’intervention : − des désirs du patient, tout refus de sa part devant être respecté et nécessite une information complémentaire, − des données cliniques et paracliniques avec notamment la notion d’évolutivité ; habituellement ce délai se doit d’être « raisonnable ». Les risques opératoires En dehors de la dépression sous angulo-mandibulaire, conséquence de toute parotidectomie totale, les risques opératoires peuvent être classés en trois catégories : a) Les risques habituels de toute chirurgie, c’est-à-dire les complications hémorragiques, les hématomes, les troubles de la cicatrisation b) Les risques spécifiques liés à la chirurgie parotidienne tel que le syndrome de Frey, l’hypoesthésie de la région parotidienne et du lobule c) Les risques graves, essentiellement représentés par la paralysie faciale. 144 C O N S I D É R A TI O N S M É D I C O - L É G A L E S Les informations concernant les risques vis-à-vis du VII, doivent être complètes, explicites et dépendent du type de chirurgie : En chirurgie de 1ère intention : − Après parotidectomie totale, le pourcentage de paralysie faciale transitoire ou définitive est difficile à évaluer avec précision ; pour preuve, les résultats de deux auteurs Laccoureye et Piquet qui font état respectivement de 68,3 % et de 9,7 % de paralysie faciale transitoire, c’est-à-dire habituellement régressive en quelques mois et de 3,6 % et 9,7 % de paralysie faciale définitive. − Après parotidectomies exofaciales, le pourcentage d’atteinte faciale post opératoire retrouvé dans les littératures varie de 16 à 64 % alors que celui des paralysies définitives est de 0 à 16 %. Si l’atteinte du VII dépend de plusieurs facteurs : § − Localisation de la tumeur (lobe superficiel ou profond), − Rapport avec les branches du VII, − Type histologique, − L’expérience de l’opérateur. Il apparaît qu’il n’existe aucun élément prédictif certain, pré ou per opératoire de l’atteinte du VII. Certains auteurs ont pensé que le monitorage du nerf facial dans cette chirurgie diminuerait ce risque mais, à l’heure actuelle, il n’y a aucune publication permettant d’affirmer que ce risque est atténué de façon formelle par cette pratique, rendant de ce fait le recours à une telle pratique non-obligatoire mais seulement optionnelle. Il convient également d’informer le patient qu’en cas de paralysie faciale post-opératoire sans section du nerf, la récupération survient le plus souvent dans le 1er mois, aidée par une kinésithérapie adaptée ; elle est habituellement complète après le 6ème mois mais il a été noté des récupérations plus tardives, jusqu’à 18 mois. En chirurgie de 2ème intention Il faut informer le patient des risques non négligeables d’atteinte du nerf facial et ce d’autant plus, si le nerf facial a été disséqué lors du 1er temps opératoire ; dans cette situation, le monitorage du nerf facial apporte un confort, une sécurité per-opératoire appréciable mais là encore, cette technique, si elle peut être recommandée, n’est pas obligatoire. § Le danger de paralysie faciale augmentant au fur et à mesure des interventions pour récidives itératives, peut être discutée, l’indication de la radiothérapie, avec ses limites et ses effets secondaires. En chirurgie pour tumeur maligne Il faut informer le patient que, dans la majorité des cas, l’intégrité du facial peut être conservée mais, qu’en fonction de l’extension tumorale, la sécurité carcinologique peut nécessiter le sacrifice d’une branche ou du tronc du facial. Il est nécessaire d’aborder les possibilités de rétablissement de la continuité nerveuse avec l’exposé des différentes techniques, leurs limites et leurs pronostics. § Enfin, en cas de paralysie faciale pré-opératoire, il convient d’insister sur le fait que la chirurgie d’exérèse ne permet pas une récupération de la fonction. 145 Monographies du CCA Groupe L’impédancemétrie . . Les potentiels évoqués dynamiques . . . . . . . . J.J. Valenza M. Ohresser Syndromes vestibulaires centraux Aspect nystamographique La dissection du rocher . . . . . . G. Freyss, E. Vitte . . . . P. Fleury Prélude à la chirurgie de l’oreille moyenne Les tympanoplasties . . . . . . . . . J.M. Basset, G. Aben-Moha, P. Candau P. Roulleau, L. Gomulinski, M. François L’otospongiose dans la pratique. Les surdités de l’enfant . . . . . . . . P. Elbaz, D. Doncieux, B. Frachet, F. Leca, G. Fain P. Marie, P. Narcy, M. François, P. Contencin Le neurinome de l’acoustique . . . Méthodes d’investigation en oto-neurologie . Actualités et perspectives Congrès d’oto-neurologie . . . . J.M. Sterkers M. Ohresser La chirurgie de l’oreille moyenne vue par P. Fleury . La chirurgie des tumeurs du trou déchiré postérieur . Le laser en O.R.L. Nez - Sinus . P. Fleury, J.M. Basset, S. Bobin, M. Bre, D. Coupez, P. Candau P. Tran Ba Huy, J. Achouche, O. Laccourreye, B. George, D. Bastian C. Peytral P. Lerault, C. Freche . . . . . . . . . . . . . . . . Repères et balises Les otoémissions dans la pratique . . . . P. Elbaz, D.T. Kemp, Ph. Betsch, J.M. Fiaux, F. Leca, P. Miller, G. Challier La prothèse auditive . . L’ostéo intégration en otologie . . . . . . . . . M. Bonnevialle, G. Challier P. Roulleau, Y. Manach, C. Hamann La chirurgie partielle des épithéliomas du pharyngo-larynx La rhonchopathie chronique . . . . . Anatomie du voile . . . . . . . Pratique des tests d’audition en consultation . . Troubles de la déglutition de l’adulte . . . . Chirurgie du nerf facial . . . . . . Les surdités génétiques . . . . . . Pathologies Temporo-mandibulaires . . . . Sinusites : du diagnostic au traitement . . . Le neurinome de l’acoustique : la neurofibromatose de type II H. Laccourreye F. Chabolle, B. Fleury P. Lerault, M. Jakobowicz, H. Chevallier, E. Attias F. Legent, P. Bordure, M.L. Ferri-Launay, J.J. Valenza J. Lacau St Guily, S. Chaussade O. Sterkers G. Lina-Granade, H. Plauchu, A. Morgon C. Levy, B. Meyer, G. Vincent, K. Marsot-Dupuch J.P. Fombeur, D. Ebbo J.M. Sterkers, O. Sterkers Poches de rétraction et états pré-cholestéatomateux Vidéonystagmoscopie, vidéonystagmographie . Regard et paupières . . . . . L’otospongiose . . . . . . Corde vocale . . . . . . La dacryocystorhinostomie . . . . Les surdités, de la prothèse à l'implant . . . . . . . . . Surdité de l'enfant . . P. Roulleau, C. Martin Ph. Courtat, A. Sémont, J.-P. Deroubaix, E. Hrebicek E. Mahe, S. Poignonec, J. Soudant, G. Lamas P. Elbaz, D. Ayache S. de Corbière, E. Fresnel P. Klap, J.-A. Bernard A. Casenave, B. Frachet, C. Hamann, M. Mondain, O. Sterkers E-N. Garabédian, F. Denoyelle, R. Dauman, J-M. Triglia, E. Truy, N. Loundon, P. Bouaziz, J. De Lorenzi . . . . . 147 Ouvrage exclusivement réservé à l'enseignement des médecins spécialistes. COPYRIGHT Tous droits de traduction et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays. Loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective », et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » [alinéa 1er de l'article 40]. Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. ISBN 2-905238-28-3 Imprimé en France Dépôt légal 3e trimestre 2003 Imprimé par GE : 180, bd de l'Europe - 93370 Montfermeil - Tél. : 01 43 30 99 99 148