Bon baisers de Hongrie
Transcription
Bon baisers de Hongrie
Témoignage Bon baisers de Hongrie « Alors, c’est l’histoire d’une Belge, d’une Turque, d’un Espagnol et d’un Islandais en Hongrie… » Non, ce n’est pas une blague ! Mais bien l’histoire vraie d’un Service volontaire européen auquel j’ai eu la chance de participer. Pendant neuf mois, j’ai découvert le sens du mot interculturalité. à septante kilomètres de la Roumanie, l’Ukraine et la Slovaquie. C’est donc là, que je vais passer les neuf prochains mois. A peine arrivée je fais connaissance avec Lilla, la coordinatrice du projet et Damla, la volontaire turque avec qui je vais vivre. Deux autres volontaires arriveront quelques semaines plus tard : Viljar, l’Islandais et Juan, l’Espagnol. découvrir notre pays et notre culture respective. C’est avec plaisir que j’ai parlé en long et en large du rock belge, des palmes d’or des frères Dardennes ou de la complexité de notre système politique. A côté de la radio, on participe à des activités ponctuelles : promotion des SVE auprès d’adolescents, animation d’enfants, … &H UHWDUG VHUD SOXV TXH EpQpÀTXH SRXU Open-minded, flexible, EVS Damla et moi. En effet, une fois à l’appartement (situé en plein centre-ville… Avant de partir, j’ai suivi une formation oût 2011. Mémoire remis… voilà quel changement pour moi qui ai toujours du BIJ1 durant un week-end. Au proHQÀQOHWHPSVGHVpWXGHVGHUULqUH vécu dans un village), on découvre que gramme : les démarches administratives moi. Bon, on fait quoi maintenant? l’on devra partager notre chambre. On relatives au SVE (ou EVS en anglais), On cherche un boulot ? Oui. Mais non. aura au moins le temps de faire un peu les droits et devoirs du volontaires,… et toujours un mantra qui revient : « Ne pas A 22 ans, je n’étais pas encore prête à connaissance avant. me lancer dans le monde du travail. Je n’avais envie que d’une chose : bouger, voyager, voir autre chose. Une amie me propose un voyage sac-à-dos en NouvelleZélande. C’est tentant mais ça ne me convient pas tout à fait. Si je pars, je veux faire quelque chose d’« utile ». Je veux prendre le temps de rencontrer des gens, de découvrir un pays, une culture. Je me souviens alors d’une discussion avec une autre amie à propos du Service volontaire européen (SVE). Ce programme permet de passer plusieurs mois dans un pays étranger ((principalement ?) en Europe), de participer à un projet, d’acquérir de nouvelles compétences,… et tout ça gratuitement. Bingo. C’est ça qu’il me faut. Les premières démarches administratives passées, je me lance à la recherche d’un projet. Je postule partout, peu importe le pays. Je n’ai que deux exigences : que le projet soit en rapport avec la communication/médias… et qu’il se déroule Welcome party à l’appartement. Un joyeux mix espagnol-turcdans une ville. islandais-roumain-hongrois-belge (Damla Büyükonat ©). A Passer un an dans un village de 500 habitants en Moldavie ou en Lituanie m’effrayait un peu. Les semaines passent HW YLHQW HQÀQ /( PDLO &HOXL TXL P·DQnonce être choisie par une association hongroise. Le 2 avril 2012, après deux avions, un taxi et quatre heures de train, j’arrive dans la ville de Nyíregyháza (à prononcer « ni-règ-di-haza » ou quelque chose comme ça). Nyíregyháza, 110 000 habitants, septième ville du pays, 16 | Le SCIlophone - n°59 Le travail commence rapidement. On travaille pour la Mustarház (la « Maison moutarde »). Le projet principal de l’organisation est l’animation d’une radio locale : Mustar FM (« Moutarde FM »). Une radio où tout le monde est le bienvenu pour parler de ce qu’il veut. Notre job de volontaire est d’assurer un certain nombre de programmes en anglais et dans notre langue maternelle. Les sujets sont libres mais le but premier est de faire avoir des attentes trop précises. Rien ne se passe jamais comme prévu ou presque. Soyez ouverts d’esprit ! » Et c’est vrai. 0RL TXL VXLV SOXW{W GX JHQUH j SODQLÀHU les choses, ici c’est tout le contraire. Tout fonctionne à la dernière minute. Des projets se créent et s’annulent en un claquement de doigt. Des projets de voyages vont et viennent. Des tâches présentées comme urgentes le deviennent moins, VDQV DXFXQH UDLVRQ (W DX ÀQDO FHWWH Témoignage désorganisation organisée est devenue notre routine. Quitte à devenir une sorte de blagues entre volontaires. C’est, en effet, dans ces moments-là que l’un de nous disait dans un sourire : « Open-minGHGÁH[LEOH«WKDW·V(96ªRX©'RQ·WDVN It’s Hungary ». c’est l’hospitalité hongroise. Ce que l’on peut prendre pour de la froideur n’est en IDLWTXHGHODWLPLGLWp,OVXIÀWGHIDLUHOH premier pas. Les Hongrois sont d’abord étonnés de voir des étrangers vivre en dehors de Budapest. Ils le sont encore plus quand Ce joyeux bordel ne s’arrêtait pas une ils apprennent qu’on va vivre en Hongrie fois le travail terminé. Une Turque, un pendant neuf mois. Mais après, ils feront Espagnol, un Islandais et une Belge qui le maximum pour vous faire découvrir vivent ensemble, ça donne un mélange leur culture : goûter leur goulash (qui intéressant et amène des situations inat- est une soupe et non un ragoût), boire tendues. Des choses qui nous paraissent de la palinka (eau-de-vie locale qui peut naturelles se révèlent, en fait, cultu- atteindre les 60-70° quand elle est fait relles : expliquer que le verre se recycle maison), manger du tejföl (sorte de et qu’il ne faut donc pas le mettre à la crème aigre qu’ils rajoutent partout, SRXEHOOH SUHQGUH OH UpÁH[H G·HQOHYHU un peu comme les Américains avec le ses chaussures avant de rentrer dans ketchup), se promener dans les vignes de l’appartement (une véritable règle de Tokaj, célébrer Pâques à coup de poèmes vie pour les Turcs); s’étonner de la moue et de lancers de parfums,… dégoutée de ses colocs quand on leur propose de faire des pêches au thon; Pour diverses raisons, les autres volonretenir un cri d’effroi quand on voit un taires ont décidé de partir plus tôt. Alors Espagnol mettre une tasse entière d’huile que je devais partager ma chambre, me d’olive pour préparer un gazpacho;… voilà seule dans notre grand appart, le c’est dans ces moments-là que le mot comble. Les connaissances hongroises interculturalité prend tout son sens. Dans faites durant les mois précédents ces petits instants de vie mais aussi dans deviennent encore plus précieuses. les discussions que j’ai pu avoir. Parler de Chaque vendredi, je reçois un sms ou un la crise en Espagne avec Juan; des droits coup de téléphone pour les retrouver. Je humains presque inexistant en Turquie me sens toujours la bienvenue, que ce avec Damla; de la situation des Roms soit pour boire un (des) verre(s), partiavec Lilla et d’autres amis hongrois;… de ciper à une soirée jeux de société (pas quoi comprendre le sens de l’expression évident de jouer au Risk en hongrois) ou « Europe à deux vitesses » et surtout partager un repas. C’est durant ces trois d’ouvrir les yeux sur la chance que j’ai derniers mois que j’ai réalisé combien d’être née en Belgique. A LIRE Ayant fait des études en journalisme, j’ai été plutôt contente de découvrir http://www.hu-lala.org/, le site parfait pour suivre l’actualité hongroise en français. A ECOUTER Pour écouter Mustar FM: http:// t u n e i n . co m / r a d i o / M u s t a r - F M 896-s106495. Si, comme moi, vous avez du mal avec le hongrois, écoutez la radio vers 13h pour suivre les émissions des volontaires. Chloé Docquier les Hongrois sont des gens serviables et attentionnés. Et ces nouvelles amitiés P·RQW IDLW SDV PDO UpÁpFKLU (VWFH TXH j’aurais été aussi ouverte envers des étrangers en Belgique? Pour une soirée de temps en temps, probablement. Mais de là à faire l’effort de parler anglais chaque week-end, de proposer des activités,… je n’en suis pas certaine. En tout cas, maintenant, je n’attends qu’une chose: pouvoir rendre la pareille. Chloé Docquier volontaire au SCI (1) Bureau international de la jeunesse L’hospitalité hongroise Remontons le temps. Quelques jours avant mon départ pour mon projet SVE, un ami me lance « Amuse-toi bien en Roumanie. Heu, non… Ukraine….heu Pologne ? ». Hongrie. C’est en Hongrie que je pars. Faut dire que pour beaucoup l’Europe de l’Est reste méconnue. On imagine des pays froids, des gens froids, des routes en terre et tout le monde qui se déplacent en carriole. Certes, dans les campagnes plus reculées, on n’est pas loin de ce cliché. Mais les villes hongroises cherchent à se mettre au niveau des villes de l’Europe de l’Ouest. Niveau météo, c’est le pays des extrêmes. -20°C en hiver, quasi 40°C en été. Le thermomètre aime faire le grand écart. Mais s’il y a bien une chose qui ne change pas Le SCIlophone n°59 | 17 ©) Le centre de Nyíregyháza (Damla- Büyükonat