efficience technique d`un systeme de reglement

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efficience technique d`un systeme de reglement
1
UNIVERSITE PARIS XII – VAL DE MARNE
Doctorat en Sciences de Gestion
Catherine LAURENT KARYOTIS
EFFICIENCE TECHNIQUE D’UN SYSTEME DE
REGLEMENT-LIVRAISON DE TITRES
Thèse dirigée par Pascal GRANDIN
Soutenue le 6 juillet 2004
Jury :
- Philippe Andrieu, Directeur Général de GesTitres
- Didier Folus, Professeur à l’Université de Caen (Rapporteur)
- Pascal Grandin, Professeur à l’Université de Paris XII – Val de Marne
- Nathalie Mourgues, Professeur à l’Université de Paris XII – Val de Marne
- Jean-Pierre Raman, Professeur à l’Université de Lille I
- Yves Simon, Professeur à l’Université de Paris IX – Dauphine
(Rapporteur)
2
Remerciements
Que le professeur Pascal Grandin soit le premier à être remercié pour sa confiance dans
l’encadrement de ce travail de recherche et son soutien tout au long des différentes étapes.
Que les professeurs Didier Folus, Nathalie Mourgues, Jean-Pierre Raman et Yves Simon et le
Directeur Général de GesTitres Philippe Andrieu, membres du jury, le soient tout autant pour
m’avoir fait l’honneur d’évaluer ce travail.
Par ailleurs, mes travaux de recherche n’auraient jamais abouti sans l’aide de certaines
institutions ou intermédiaires financiers. Aussi suis-je extrêmement reconnaissante envers eux
pour leur soutien continu et leur implication dans mes travaux. Je remercie plus
particulièrement Euroclear France qui a bien voulu, en la personne de Didier Ciornei,
m’ouvrir sa base de données statistiques sans laquelle mon analyse empirique n’aurait pu se
faire, et BNP – Paribas, CCF – HSBC, CDC – Ixis et GesTitres qui ont, dans la mesure du
possible, répondu à mon questionnaire.
J’exprime également ma gratitude à Euroclear France, ex – Sicovam, pour m’avoir donné, au
travers de quatre années vécues chez elle, entre la fin de la dématérialisation des titres et la
mise en place de Relit, le goût et l’envie de réfléchir, plusieurs années après, à l’efficience des
procédures de règlement-livraison de titres. Que Reims Management School aussi soit
remerciée pour m’avoir donné l’occasion, dès 1990, de transmettre mon expérience et ma
passion dans le domaine des titres à ses étudiants et m’avoir soutenue dans la logistique de
mon travail de recherche.
Enfin j’ai une pensée toute particulière pour mon époux, Daniel Karyotis, pour sa perspicacité
et sa patience !
3
Sommaire
Introduction
10
Chapitre I : L’importance progressive des fonctions
post-bourse face à l’évolution des marchés de
capitaux
14
1. Histoire de la compensation
15
1.1 La compensation monétaire
16
1.1.1 Les origines de la compensation en Europe
16
1.1.2 Le développement du clearing en Nouvelle Angleterre : le système Suffolk
18
1.1.3 La compensation dans la théorie de la Banque Libre
21
1.1.4 La création de la Federal Reserve Bank
24
1.2 L’émergence et le rôle des chambres de compensation sur les marchés dérivés
25
1.3 La compensation sur les transactions boursières
29
1.3.1 Les premières ébauches du compte courant de titres
30
1.3.2 La livraison des titres et le règlement des espèces avant la création
d’un dépositaire central
32
2. L’évolution macro-économique des marchés a rendu indispensable la
maîtrise des fonctions post-bourse
34
2.1 L’euromarché, précurseur des innovations
41
2.2 Les marchés financiers nationaux et leur évolution
47
2.2.1 L’amorce de la déréglementation aux Etats-Unis
47
2.2.2 Le « Big Bang » à Londres
51
2.2.3 Les réformes de la Bourse de Paris
53
2.3 Le phénomène de la mondialisation de la finance
58
3. La compensation et le règlement-livraison dans la finance fonctionnelle
70
4
4. Pourquoi l’efficience d’un système de règlement-livraison est-elle
devenue primordiale ?
74
4.1 La notion de chaîne de valeur appliquée aux bourses et systèmes
de règlement-livraison
74
4.2 Les raisons de l’efficience d’un système de règlement-livraison de titres
86
5. La notion de système et son efficience
93
5.1 Approche systémique et réseaux
93
5.2 L’efficience d’un système
99
Conclusion
104
Chapitre II : Les fonctions d’un système de
règlement-livraison de titres
106
1. Les étapes des opérations de règlement-livraison
107
1.1 Schéma général
107
1.2 Les différentes étapes
111
1.3 Une récapitulation des étapes
116
2. Les procédures transfrontalières
118
2.1 Les voies d’accès
118
2.2 Les procédures
125
2.2.1 Cas d’une transaction transfrontalières sur actions
125
2.2.2 Cas d’une transaction sur une euro-obligation
130
3. Taxonomie succincte des systèmes existants
131
4. Les risques attenants aux opérations de règlement-livraison
135
Liminaire : le risque global d’un bancaire
135
5
4.1 Aperçu théorique sur les risques de marché de capitaux
137
4.2 Les risques sur le marché des changes
147
4.3 Les risques spécifiques aux activités de règlement-livraison
151
4.3.1 Le risque de crédit
151
4.3.2 Le risque de liquidité
153
4.3.3 Le risque de défaillance de la banque de règlement
154
4.3.4 Le risque de conservation
154
4.3.5 Les autres risques
155
•
le risque opérationnel
•
le risque systémique
•
une illustration du risque systémique ayant concerné les marchés de valeurs mobilières et
les organismes de compensation
4.4 Les risques attenants aux opérations transfrontalières
162
4.5 Une ébauche de conclusion relative aux risques
164
Conclusion
166
Chapitre III : La France – du compte courant de
titres aux systèmes Relit et RGV
167
1. De la CCDVT à Sicovam
168
1.1 Naissance du compte courant de titres
168
1.2 La circulation des titres avant la dématérialisation
171
2. La volonté d’évolution des structures boursières et post-boursières :
la Commission Pérouse
173
3. La dématérialisation des titres : vers la rationalisation des procédures de back-office
176
4. Le projet Relit
180
4.1 L’industrialisation et les normes internationales
180
4.2 La mise en place du système RELIT
187
6
4.3 Les apports et défauts de Relit
192
5. Relit Grande Vitesse – RGV
194
5.1 Présentation
194
5.2 Une journée RGV
196
5.3 Gestion des titres et des espèces
198
5.4 L’architecture actuelle
200
5.5 Vers le Single Settlement Engine
206
6. Euronext, Euroclear : le premier marché paneuropéen
209
6.1 Du marché unique à la monnaie unique
209
6.2 Euronext
213
6.3 De Sicovam à Euroclear France
215
Conclusion
217
Chapitre
IV :
L’efficience
d’un
système
de
règlement-livraison de titres dans la littérature
économique
218
1. Le rôle d’un dépositaire central
219
1.1 Un pré-requis indispensable pour un système de règlement-livraison efficient
220
1.2 Un exemple d’inefficience lié à l’absence d’un dépositaire central de titres : les suspens
en bourse de Paris sur les valeurs non admises en Euroclear France
226
1.3 Le dépositaire central doit-il être en situation de monopole ?
231
1.4 Le dépositaire central doit-il être géré le système de règlement-livraison de titres ?
242
1.5 De la remise en cause du monopole naturel des dépositaires centraux : l’exemple de
BPSS en France
244
2. L’apport d’une chambre de compensation
248
2.1 Définition et fonctions
248
2.2 Les différentes formes de compensation
253
7
2.3 Pour une compensation bilatérale ou multilatérale
255
2.4 Les avantages et inconvénients d’une chambre de compensation
264
2.5 Vers une consolidation de la compensation : notion de contrepartie centrale
275
2.6 L’exemple de la compensation dans le système français ISB
282
2.7 Une contrepartie centrale : les prestations de Clearnet pour Euronext
285
3. Livraison contre paiement
288
3.1 De la notion de livraison contre paiement
288
3.2 Du délai de J+3 à J+1, voire le principe du straight through processing
290
3.3 L’irrévocabilité des mouvements
297
3.4 Les conditions supplémentaires d’efficience : prêt-emprunt de titres liquides, marchés de
repos, collatéralisation et liquidité intraday
306
3.4.1 Le prêt de titres
309
3.4.2 Les repos
314
3.4.3 La collatéralisation
326
3.4.4 Des liquidités intraday pour les intervenants
331
4. Choix de la monnaie de dénouement
336
4.1 Nécessité d’un règlement en monnaie banque centrale
336
4.1.1 Une définition
336
4.1.2 De l’importance des règlements en monnaie centrale
337
4.2 Choix entre monnaie commerciale et monnaie centrale
346
4.3 Règlement multi-devise
348
4.3.1 Présentation de CLS
348
4.3.2 De l’utilité d’un système de règlement-livraison multi-devise
353
Conclusion
354
Chapitre V : Etude de l’efficience des systèmes
357
1. Problématique et conditions d’efficience
358
2. Eléments de méthodologie
364
8
2.1 Une démarche adaptée
364
2.2 Les difficultés rencontrées et les limites de notre recherche
366
2.2.1 Un marché de la conservation concentré
366
2.2.2 Une absence de comptabilité analytique chez les intermédiaires financiers
369
2.2.3 Un périmètre d’activité évolutif chez les dépositaires centraux depuis la mise en place
d’un système de règlement-livraison de titres
370
3. Un dépositaire central de titres et une contrepartie centrale facilitent la mise en place d’un
système de règlement-livraison
371
3.1 La dématérialisation est un pré-requis à la rationalisation des procédures de règlementlivraison
371
3.1.1 L’impact de la dématérialisation en France
371
3.1.2 Une approche générale des activités d’Euroclear France et d’Euronext Paris
377
3.1.3 Vers une dématérialisation généralisée des valeurs américaines
380
3.2 L’inefficacité d’un marché boursier sans dépositaire : la Bourse de Hong Kong
383
3.3 Un netting multilatéral optimise l’activité de règlement-livraison
395
3.3.1 Le cas de la France
395
3.3.2 Une comparaison internationale des ratios de netting
398
3.4 Une contrepartie centrale est indispensable pour réduire le nombre de mouvements à
dénouer
401
3.4.1 L’absence d’une contrepartie centrale conduit à l’élaboration d’un système de protection
spécifique
401
3.4.2 Clearnet a permis de diminuer le nombre de transactions à compenser
406
4. La technique de la livraison contre paiement minimise les suspens
407
4.1 Etude des comptes débiteurs avant Relit
407
4.2 Etude du taux de suspens depuis 1995
408
4.3 Un pré-appariement et un recyclage des mouvements non dénoués permettent de
rationaliser les systèmes
417
5. Une irrévocabilité en cours de journée et des mécanismes de fluidification des
dénouements
420
5.1 L’insuffisance d’une irrévocabilité en fin de journée
421
5.2 Des systèmes de prêt-emprunt de titres efficients
422
9
5.2.1 Le système inter – SVT en Bourse de Paris
423
5.2.2 Le prêt de titres dans le système français actuel
427
5.2.3 Le prêt de titres automatique chez Clearstream
428
5.3 La technique des pensions livrées comme source de sécurité des systèmes et de l’utilité
d’une mise à disposition de liquidités intradays
431
5.4
Une sécurisation indispensable au travers de la collatéralisation
436
6
Une minimisation des risques au travers des règlements en monnaie centrale
437
6.1 L’ampleur des comptes en banque centrale
437
6.1.1 Etat statistique des comptes ouverts en Banque centrale en France et utilisation de la
monnaie centrale
437
6.1.2 Euroclear France et les comptes espèces
438
6.2 De la nécessité d’une dualité des règlements en monnaies centrale et commerciale
440
6.3 Un règlement multidevise chez les dépositaires centraux domestiques
442
7. La notion d’efficience – X dans les activités post-marché
445
7.1 L’amélioration de la productivité dans les back offices :
445
7.1.1 Etude globale
445
7.1.2 Cas d’un établissement particulier : Le Crédit Commercial de France
447
7.2 Les coûts globaux
451
8. Une ébauche de conclusion de l’enquête
459
8.1 Dépositaire central de titres et contrepartie centrale
460
8.2 Livraison contre paiement et délai de place
461
8.3 Irrévocabilité et mise à disposition de titres et d’espèces
462
8.4 Monnaie centrale et dénouements multidevises
463
Conclusion
465
Conclusion générale
466
Bibliographie
470
10
Introduction
Dans la chaîne de traitement des titres, les fonctions de compensation et de
règlement-livraison, assurées par les infrastructures post-marché, sont
essentielles à la bonne fin des opérations de négociation d’actifs financiers.
Elles font de ces infrastructures des vecteurs potentiels de déstabilisation du
système financier en cas de dysfonctionnement.
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and
Settlement Systems and the International Organization of Securities
Commissions, Recommendation for Securities Settlement Systems, January
2001
Marchesnay
1
définit un domaine de recherche par quatre éléments clés – le but,
l’organisation, l’environnement et les activités – applicables dans les systèmes de gestion. Il
ajoute que la finalité de la recherche en sciences de gestion est l’amélioration des
performances de l’organisation.
Dans le cadre de notre réflexion, les quatre éléments clés sont les suivants :
Le but de notre recherche est l’efficience technique, donc l’optimisation, des procédures
post-boursières. Le terme d’optimisation s’entend comme une diminution (voire une
suppression) des risques pour les intermédiaires financiers, accompagnée d’une
simplification des procédures fournies au meilleur coût.
L’organisation étudiée est la plus opportune pour une place financière en évolution
technologique permanente.
L’environnement est macroéconomique et déréglementé, au sein duquel les agents
requièrent des prestations minimisant les risques et les coûts.
Les activités sont celles des opérations de livraison scripturale des titres négociés en
bourse et le règlement des espèces consécutif aux échanges de valeurs mobilières.
Notre recherche relative aux systèmes de règlement-livraison de titres s’inscrit dans la grille
d’analyse de la finance fonctionnelle qui s’attarde davantage aux fonctions d’un système
financier qu’à ses institutions ; cette finance fonctionnelle, développée par Merton dans les
1
Marchesnay M., De la théorisation en sciences de gestion, Economies et sociétés – Série Sciences de gestion
n°17, avril 1991
11
années quatre-vingts, repose sur le postulat que les fonctions sont plus pérennes dans le temps
et plus constantes dans l’espace que les institutions.
L’intérêt théorique de notre réflexion s’appuie sur l’extension des réflexions développées pour
analyser la gestion des espèces et des systèmes de paiement au domaine des titres. Nous
sommes partis d’une constatation simple : les titres ont subi la même évolution que les
espèces avec quelques décennies de retard. En effet, les mouvements d’espèces ont fait l’objet
de compensation au fil de la croissance des échanges commerciaux, ladite compensation
s’étant progressivement opérée par des systèmes informatisés et, depuis quelques décennies,
la monnaie se dématérialise. Avec du retard sur les espèces, les titres ont suivi une évolution
identique et, avec eux, leur mode de circulation 2.
L’intérêt pratique de notre réflexion a lieu d’être pour apporter un recul aux professionnels.
Ceux-ci ont suivi les évolutions dictées par une conjoncture favorable aux marchés financiers
depuis une vingtaine d’années. Mais si l’activité bourse et gestion de portefeuille a fait l’objet
de nombreuses études universitaires conduisant à l’élaboration de modèles universellement
reconnus, l’activité post-bourse n’a jamais fait réellement l’objet de réflexion théorique,
hormis celles émanant de certaines institutions supranationales ou celles abordant la
sécurisation des systèmes de paiement.
Les activités de back offices sont longtemps restées dans l’ombre, sous prétexte qu’elles
devaient obligatoirement suivre l’évolution des marchés et s’adapter convenablement au
traitement des nouveaux produits financiers. Ainsi, les établissements financiers ont pris
tardivement conscience que le post-bourse était tout aussi important que le trading ; et le back
office est longtemps resté secondaire dans la gestion stratégique d’un intermédiaire financier
ou d’une place financière, alors qu’il convenait pourtant de le valoriser dès les premières
innovations financières. Notre étude apporte, en conséquence, une lecture extérieure des
systèmes et des procédures dont la fiabilité est aujourd’hui aussi cruciale que celle du système
de négociation d’une place financière.
2
En 1950, les opérations de back-office reposent largement sur les traitements manuels – le titre est une activité
de main d’œuvre, à la fois pour remplir les registres qui font état entre sorties – entrées et pour découper les
coupons, classer les titres papier …
En 1990, le titre est une activité d’échange, de traitement et de stockage d’informations numérisées. Sauf
exception, le support papier a disparu et les valeurs mobilières ne voyagent plus que par réseau informatique.
L’entreprise du titre est désormais faite d’ingénieurs d’exploitation, d’hommes systèmes et réseaux qui
surveillent des ordinateurs.
Chabrolles N., Juvin H., Une histoire de la Sicovam, Cinquante années de compte courant de valeurs mobilières
en France, Les Djinns 1992
12
L’intérêt méthodologique de notre réflexion, quant à lui, est intrinsèquement lié aux
difficultés rencontrées dans notre analyse empirique.
Les données existent, pour certaines, mais elles sont évolutives (au fil des prestations offertes
par les systèmes de place), et n’ont jamais été exploitées sur le plan de la recherche
académique.
L’intérêt empirique de notre analyse repose donc sur l’étude de certaines prestations offertes
par les systèmes de paiement que nous avons, en partie, reprises pour les adapter à l’univers
des titres. Rien n’est donné, tout est construit 3. Or, pour construire, il faut architecturer et
donc concevoir cognitivement la charpente avant de l’édifier 4. Pour tester nos hypothèses
d’efficience, nous avons conçu des indicateurs quantitatifs reposant sur l’expérience des
acteurs financiers, intermédiaires et dépositaire central.
Cependant, les prestations d’un système de règlement-livraison de titres s’adaptent aux
besoins de ses utilisateurs. Il est donc difficile de comparer des données dans un univers
mouvant, et ce d’autant plus que le recul des praticiens sur certains indicateurs existe peu ou
prou, et que certaines données ne sont pas diffusées pour des raisons stratégiques.
Un exemple illustre nos difficultés : la mise en place d’un système de prêt-emprunt de titres
automatique est, selon nous, une condition d’efficience d’un système. Or cette prestation
n’existe pas sur la place financière de Paris sur laquelle s’appuie essentiellement notre
réflexion. Il eut été intéressant d’étudier son impact sur la fluidification des opérations de
règlement-livraison chez un prestataire offrant cette fonctionnalité. Notre requête
d’information n’a pas abouti. Nous avons donc contourné ce problème en testant cette
condition d’efficience à partir de données dont nous disposions dans le passé, lorsque Paris
offrait cette prestation sur les valeurs du Trésor français. Mais le contexte était différent, et
l’expérience a été courte ; notre conclusion n’est donc qu’une supputation.
Aussi l’intérêt méthodologique de notre recherche repose sur une approche clairement
exploratoire qui est sans doute l’une des principales limites à notre étude. Cependant
l’insuffisance de données n’a pas amoindri notre motivation tout au long de notre travail,
novateur si nous en jugeons le peu de travaux universitaires dans le domaine des titres.
3
4
Bachelard G, La formation de l’esprit scientifique, Vrin 1938 – 1978
Bogdanov A., Essays in tektology, 1913-1920, English translation by Gorelik G., Interéditions 1980
13
Un objet existe si on est capable de le construire ou d’en exhiber un exemplaire 5. Selon nous,
un système n’existe que s’il est utile pour une économie.
Aussi pouvons-nous reprendre l’hypothèse téléologique développée par les épistémologistes
constructivistes et exposée par Le Moigne 6 : En attribuant au sujet connaissant le rôle décisif
dans la construction de la connaissance, l’hypothèse phénoménologique oblige en quelque
sorte à prendre en compte l’intentionnalité ou la finalité de ce sujet connaissant.
Notre finalité est bien de réfléchir à un système efficient permettant de rationaliser les
opérations post-boursières pour les intermédiaires financiers, en leur offrant des prestations
fiables et sécurisées, et à moindre coût.
Enfin, eu égard au dimensionnement commercial et stratégique d’une place financière, il nous
semble opportun de mentionner présentement l’exemple de la bourse de Londres. En 1998,
puis en 2000, les bourses de Londres et Francfort devaient fusionner, scénario inimaginable
une décennie auparavant ! Certains professionnels s’accordent à penser que l’abandon de
Taurus 7 en 1993 a fragilisé la place financière de Londres pour longtemps.
Parce que la technologie impose la flexibilité sans laquelle il serait impossible d’exister pour
un marché financier, et encore moins de prospérer 8. Ceux qui restent rigides ne survivront
pas. Au-delà de l’activité de trading, les bourses doivent faire évoluer toutes leurs
infrastructures de marché et post-marché.
Dans un premier chapitre, nous exposons l’histoire de la compensation au fil des siècles pour
conclure à la nécessité d’une compensation sur titres sécurisée, rendue indispensable par
l’évolution macroéconomique des marchés. Nous présentons ensuite les procédures et les
risques des opérations post-marché pour nous focaliser sur les systèmes français (chapitre 2 et
3). Puis, dans un quatrième chapitre, nous relevons les conditions d’efficience d’un système
de règlement-livraison telles qu’étudiées dans la littérature. Enfin, après avoir exposé nos
limites, nous étudions l’efficience des systèmes français pour conclure sur les défis et
contraintes à venir.
5
Largeault J., L’intuitionnisme, PUF Que sais-je ?, 1992
Le Moigne J. L., Les épistémologistes constructivistes, PUF Que sais-je ? 1995
7
Le projet Taurus consistait en une dématérialisation des titres et une refonte de ses procédures de règlementlivraison de titres
8
Fawcett A., A quoi ressemblera le marché financier du futur ?, Revue d’Economie Financière n°57, mars 2003
6
14
Chapitre I : L’importance progressive des fonctions
post-bourse face à l’évolution des marchés de
capitaux
Les modalités de la conservation des titres devaient connaître une évolution
semblable à celle connue par la monnaie depuis des siècles ; elle devait se
traduire par une dématérialisation progressive des valeurs mobilières
aboutissant à une simple inscription en compte qui s’inscrit dans la logique
de dématérialisation des supports des échanges, et permet d’accroître la
fluidité du marché et de réduire le délai des opérations sur titres.
Pérouse M., La modernisation des méthodes de cotation, d’échange et de
conservation du marché des valeurs mobilières, Paris 1979
La notion de compensation est ancienne ; elle a évolué au fil des échanges et les marchés de
capitaux se sont organisés progressivement. Depuis le dix-neuvième siècle, des organismes et
bourses sont apparus sur de nombreuses places financières. Au vingtième siècle, les échanges
de capitaux ont crû de façon exponentielle, les autorités et les acteurs se sont ipso facto
adaptés.
Au-delà de l’organisation des marchés stricto sensu, ces acteurs ont développé des procédures
marchés rendues indispensables pour rationaliser la gestion des flux. Ainsi sont nées les
chambres de compensation.
Depuis une vingtaine d’années, après la modernisation des activités de front – office, les
places ont développé des systèmes de règlement-livraison de titres pour répondre aux
exigences de maîtrise des risques et d’efficience technique, face au développement
considérable des marchés de capitaux.
Aujourd’hui l’efficience d’un système de règlement-livraison est devenue indispensable. Elle
concourt à la stabilité du système financier pris dans sa globalité 9.
9
Le Comité des Sages sur la régulation du marché européen requiert un cadre réglementaire en matière de
compensation et de règlement-livraison. Selon lui, ce cadre devrait tenir compte de l’importance capitale d’un
bon fonctionnement des mécanismes européens de compensation et de règlement, condition incontournable de
l’efficacité des marchés de valeurs mobilières. Il devrait aborder les questions systémiques générales et la façon
dont les systèmes de compensation et de règlement-livraison sont essentiels pour le bon fonctionnement de
l’infrastructure des opérations monétaires et des systèmes de paiement.
Communauté européenne, Rapport final du Comités des Sages sur la régulation des marchés européens des
valeurs mobilières, février 2001
15
Dans ce chapitre, nous reprenons les étapes des compensations monétaire et boursière et
l’évolution macro-économique des marchés de capitaux. Puis nous expliquons, dans une
approche fonctionnelle et systémique, pourquoi la maîtrise des fonctions post-bourse est
devenue essentielle pour une place financière.
1. Histoire de la compensation
Historiquement, la compensation s’est d’abord imposée aux opérations interbancaires 10. Mais
les marchés dérivés ont, dès leur création ou presque, conduit à la création des chambres de
compensation, et les premières ébauches de comptes courants de titres datent du début du
dix-neuvième siècle en Europe.
Les maisons de compensation ont permis de réduire certains inconvénients du troc en
permettant aux acteurs économiques d’y déposer leurs biens à échanger afin d’obtenir, pour
une valeur équivalente, des biens déposés par les autres 11.
Certaines places financières, telle celle de Paris, se sont d’ailleurs basées sur l’expérience de
la compensation monétaire pour informatiser leurs procédures post-bourse. En 1979, la
Commission Pérouse
12
, chargée d’étudier les réformes à mettre en place sur la place
financière de Paris, proposait de « conduire à terme les améliorations dans les modalités de la
conservation des titres. Cette évolution comme celle de la monnaie depuis des siècles, devait
se traduire par une dématérialisation progressive des valeurs mobilières aboutissant à une
simple inscription en compte. Cette dématérialisation des titres s’inscrit dans la logique de
dématérialisation des supports des échanges ; elle permet d’accroître la fluidité du marché et
de réduire le délai des opérations sur titres ».
10
Les raisons qui ont poussé le système bancaire à se structurer en réseaux de compensation sont la
simplification des paiements et la réduction de leurs besoins en monnaie de base.
Figuet J.M., Kauffman P., Un régime de « free banking » peut-il s’autoréguler, Revue Française d’Economie,
Printemps 1998
11
Augey D., Bramoullé G., Economie monétaire, Dalloz 1998
12
Pérouse M., La modernisation des méthodes de cotation, d’échange et de conservation du marché des valeurs
mobilières, Rapport de Commission 1979
Pour un développement plus important, le lecteur se référera au chapitre III §2.
16
Par ailleurs, il existe une relation entre les chambres de compensation des marchés de futures
et de titres et les systèmes de paiement, donc les chambres de compensation monétaire 13.
La compensation sur les deux types de systèmes a en effet joué un rôle fondamental entre les
deux parties contractantes ; cependant, elle diffère sur trois points :
L’organisme de clearing sur activités monétaires ou bancaires n’est jamais le représentant
légal des contreparties, n’est pas garant et ne facilite pas les livraisons contre paiement si la
contrepartie n’est pas un établissement bancaire.
Mais s’il est certain que les chambres de compensation bancaire ne remplissent pas ces
fonctions à l’époque actuelle. On rappellera qu’elles l’ont fait dans le passé, notamment avant
la création de la Federal Reserve Bank.
1.1 La compensation monétaire
1.1.1 Les origines de la compensation en Europe
La compensation est historiquement apparue avec le traitement comptable des créances
bancaires.
Au bas Moyen Age, l’interbancarité était en effet atteinte par le moyen des comptes que les
banques avaient les unes chez les autres. Portées en compte courant
14
, les créances de sens
inverses nées des opérations des clients faisaient d’abord l’objet d’une compensation
bilatérale 15. Cette pratique s’est perpétuée longtemps sur la Place bancaire de Lyon au rythme
d’une compensation trimestrielle, à l’instar des pratiques rencontrées sur les anciennes foires
16
.
Cependant, la compensation des créances bancaires gérée par un organisme central n’est
apparue qu’en 1587 en Italie lorsque, à Venise, une banque publique fut créée, Banco del
13
Edwards F., The clearing association in Futures markets : guarantor and regulator in The industrial
organization of the futures markets, Ronald W. Anderson 1984, p : 225-254
14
Le compte courant et le chèque ont été inventés par les grecs. Les orateurs Isocrate (discours relatif aux
« Trapézitiques ») et Démosthène ont vanté leurs mérites en présentant notamment le chèque comme le meilleur
moyen de soustraire une somme d’argent aux risques du voyage. Le terme « trapézite » est celui des changeurs
de monnaie qui installaient une table (trapeza) à Athènes pour offrir des crédits.
15
Bichot J., La monnaie et les systèmes de paiement, Ellipses 1997
16
La France aurait utilisé, dès le 13ème siècle, des systèmes similaires au clearing : les marchandises étaient
achetées et vendues à la foire, et réglées par débit et crédit à court terme. A la fermeture de la foire, toutes les
transactions étaient compensées pour un unique règlement entre chaque participant et la banque.
Davis E.W., Nevin E., The London Clearing Banks, Elek Books 1970
17
Piazza del Rialto, à cette fin ; elle sera remplacée au dix-septième siècle par la Banco del Giro
17
, véritable établissement de clearing.
Si ce phénomène est resté limité en Europe, il s’est généralisé progressivement, et a surtout
démarré de façon plus structurée en Angleterre et en Ecosse.
Londres fut très tôt le principal centre de compensation des paiements nationaux OutreManche ; les banques anglaises avaient en effet, au cours du dix-huitième siècle, ouvert des
comptes courants afin d’annuler leurs créances qui se contrebalançaient. En 1773, une
chambre de compensation était ouverte à Lombard Street à laquelle adhérèrent 31 banques de
la City sur 36
18
. Au préalable, sept banques écossaises s’étaient concertées en 1760 pour
former, à Edimbourg, une chambre de compensation chargée de compenser leurs créances et
dettes réciproques, selon un rythme quotidien 19 (et non trimestriel comme à Lyon).
Dès 1826, les banques du nord de l’Angleterre se réunissaient toutes les semaines pour
échanger entre elles des créances à vue, y compris les billets afin de régler les soldes restants
auprès de la Banque d’Angleterre.
Ces mécanismes se seraient développés, selon certains auteurs (Black 1970, Fama 1980, Hall
1982, Cowen et Kroszner 1987, Wallace 1988
20
) pour des raisons réglementaires qui
imposaient des restrictions relatives à l’intermédiation financière privée
d’Angleterre jouait alors le rôle d’un prêteur en dernier ressort
22
21
; la Banque
pour les systèmes anglais et
écossais, leur apportant de facto une assurance nécessaire parce que ces systèmes étaient assis
sur des dettes à court terme indexées sur l’or. La banque centrale permettait ainsi une
répartition des coûts de l’instabilité du système et du problème de remboursement.
17
« giro » est un dérivé du mot grec « guros » signifiant cercle.
Kindleberger C.P., Histoire financière de l’Europe occidentale, Economica 1986
19
Rivoire J., Histoire de la banque, PUF Que sais-je 1992
20
Black, Fischer, Banking and interest rates in a world without money : the effects of uncontrolled banking,
Journal of Banking Research, Autumn 1970,
Fama E., Banking in theory of finance, Journal of Monetary Economics, January 1980,
Cowen T., Kroszner R.S., The development of the new monetary economics, Journal of Political Economy, June
1987
Wallace N., Another attempt to explain an illiquid banking system : the Diamond and Dybvig model with
sequential service taken seriously, Federal Reserve Bank of Minneapolis Quaterly Review, Fall 1988
21
Cowen T., Kroszner R.S., Scottish banking before 1845 : A model for laissez faire ?, Journal of Money, Credit
and Banking, May 1989
22
un prêteur en dernier ressort est l’entité qui accepte d’endosser les risques que les autres acteurs refusent dans
des circonstances de forte déstabilisation et d’incertitudes.
Guttentag J., Herring R., The lender of last resort function in an international context, Princeton Essays in
International Finance n°151, mai 1983, cité dans Aglietta M., Denise C., Les dilemmes du prêteur en dernier
ressort international, Revue Française d’économie, automne 1999
18
18
La notion de Banque centrale
23
remonterait à 1656, année de création de la Banque du
Parlement de Suède (Sveridge Riksbank), considérée comme la première banque centrale a
priori ; en 1694, la Bank of England fut ensuite créée pour financer l’Etat en émettant des
billets en contrepartie de créances sur la Couronne 24.
En France, la banque centrale fut instaurée en 1800. Auparavant la Caisse des Comptes
Courants fut créée, sous la forme d’une institution privée, pour offrir des prestations
quasiment identiques à celles d’une banque centrale (dont l’émission de monnaie fiduciaire) ;
elle fusionnera par la suite avec la Banque de France. A ses côtés, d’autres banques habilitées
à émettre des billets firent leur apparition, telle la Caisse d’Escompte du Commerce 25, mais
dès 1803 la Banque de France obtint le monopole d’émission 26.
1.1.2 Le développement du clearing en Nouvelle Angleterre : Le système
Suffolk
En mai 1825, une banque de Boston, la Suffolk Bank, proposa un système de clearing pour
les billets de banque, qui resta le seul système dans toute la Nouvelle Angleterre pendant
vingt cinq ans.
Pour adhérer au système, tout établissement bancaire devait disposer d’un minimum de fonds
propres de 100 000 dollars et déposer auprès de la Suffolk un montant minimal de 2000
dollars non rémunéré.
Chaque jour, les billets déposés par les membres étaient triés. Le montant net était ensuite
porté en compte de la banque créditrice en date de valeur du lendemain de la compensation.
Cette compensation sur les billets de banque a permis une réduction considérable des coûts de
remboursement, grâce à un montant moindre de billets en circulation. En outre, la Suffolk
Bank avait fondé une association, avec six établissements bancaires, pour recevoir des billets
23
Une banque centrale est une autorité monétaire centrale dotée du pouvoir d’émission des billets (elle est
également appelée institut d’émission) et met en œuvre la politique monétaire, gère les réserves de change de son
pays, et intervient comme prêteur en dernier ressort.
24
Bichot J., La monnaie et les systèmes financiers, Ellipses 1997
25
La Caisse d’Escompte, créée en 1776, escomptait des lettres de change et émettait des billets. La circulation
des billets a atteint jusqu’à 100 millions de livres en 1787. Mais cette caisse fut réorganisée de force par le
gouvernement et requise de prêter 100 millions au roi en échange d’une extension de 30 ans. Le changement
aboutit à la perte de confiance publique dans ses billets. Les réserves diminuèrent en 1788 et la Caisse fut
liquidée à la Révolution.
Kindleberger C.P., Histoire financière de l’Europe occidentale, Economica 1986
26
Goodhart C., The evolution of Central Banks, The MIT Press 1988
19
étrangers (hors de Boston) pour une faible commission (discount rate), et obtenir un crédit
consécutif à ces dépôts de billets.
En 1836, près de 300 banques (soit la majorité des établissements de la Nouvelle Angleterre)
avaient adhéré au système Suffolk de leur propre gré ; la législation a ensuite (en 1842 pour
l’Etat du Vermont, l’année suivante pour le Massachusetts), accordé des avantages fiscaux
aux banques adhérentes. Au final, 9 millions de dollars étaient compensés par mois en 1841,
pour finir à 30 millions en 1858, équivalant au total du stock des billets en circulation dans le
Massachusetts 27.
Un monopole naturel s’était donc développé à cette époque et la Suffolk Bank était un
dépositaire et un compensateur, mais davantage encore un prêteur. Ce rôle de prêteur
28
a
permis d’accroître la liquidité en Nouvelle Angleterre, tout en étant une activité lucrative.
A la fin du dix-neuvième siècle, Bagehot
29
reprenait le rôle d’un prêteur de dernier ressort
telle une fonction spécifiquement dédiée à une banque centrale afin d’éviter toute violation du
marché lorsque des engagements privés sont pris et non honorés ni reportés
contractuellement.
Finalement, ce système Suffolk fut le système privé le plus important développé aux EtatsUnis, et incontestablement le plus efficient dans la gestion d’un système de paiement et des
fonctions de prêt-emprunt.
Il existe d’autres expériences similaires antérieures à celle de la Suffolk Bank mais de durée
moindre : en 1791, la First Bank of the United States fut fondée avec un capital de 10 millions
de dollars, sous forme de banque commerciale privée. Sa mission consistait en des émissions
de billets et des activités de dépôts et de prêts, et elle fonctionna jusqu’en 1811. En 1816, la
Second Bank of the United States apparut ensuite avec un capital de 35 millions de dollars ;
ses activités furent identiques à la précédente mais elle procédait également à des achats de
titres et à des réceptions de dépôts en provenance du gouvernement fédéral.
27
Rolnick A.J., Smith B.D., Weber W.E., Lessons from a Laissez - Faire Payment system : The Suffolk system
(1825-58), Federal Reserve Bank of St. Louis n°80, May June 1998
28
L’activité de prêteur s’assimile à la notion développée par Thornton en 1802, qui définit le rôle d’un prêteur en
dernier ressort comme attribut souverain d’une autorité monétaire qui stoppe la propagation d’une pénurie de
liquidité due à des échecs de coordination sur les marchés monétaires.
« Sir Francis Baring appela la Banque d’Angleterre ‘la banque des banquiers’ et employa le terme de prêteur en
dernier ressort à son égard en 1797. Henry Thornton fit remarquer en 1802 que la Banque d’Angleterre avait
appris à prêter généreusement dans le cas d’une pénurie interne », Kindleberger, ibid.
20
En 1853, la New York CBCH (commercial-bank clearing house) fut instaurée afin
d’économiser le coût de traitement des chèques en jouant notamment le rôle d’interface entre
banques 30. Son rôle s’est progressivement étendu à la production d’informations relatives à la
qualité des établissements, et elle instaura rapidement des normes minimales en matière de
fonds propres et se dota des pouvoirs d’enquête et de sanction (allant jusqu’à l’exclusion), ce
qui en renforça sa crédibilité. Plus qu’un compensateur de chèques, la CBCH était devenue un
instrument de contrôle des banques, donc un régulateur 31.
Certains auteurs ont étudié l’impact de ces systèmes sur la monnaie.
En premier lieu, pour Calomiris et Kahn 32, il est ressorti que pendant la période d’activité de
la Suffolk Bank, les établissements de la Nouvelle Angleterre auraient été plus stables que les
établissements des autres états, parce que la Suffolk Bank, en plus de son activité de
compensateur, agissait en temps que prêteur en dernier ressort.
En second lieu, selon Fenstermaker et Filer 33, le pourcentage de billets en circulation dans le
total de la monnaie circulant dans l’économie aurait été plus élevé à l’époque de la Suffolk
Bank. Les auteurs ont comparé les billets de banque en circulation auprès des banques de la
Nouvelle Angleterre aux billets en circulation auprès des autres établissements. Il en ressort
que, si pendant la période des First et Second Banks, l’impact sur les variables étudiées est
faible voire inexistant, pendant la période de la Suffolk, la circulation des billets fut plus
importante, même s’il n’y a pas eu d’impact substantiel sur la croissance de monnaie bancaire
34
.
29
« Le meilleur palliatif d’une panique est la confiance dans la banque qui dispose de réserves suffisantes et
saura les utiliser efficacement » Bagehot W., 1873, cité dans Hicks J., Monnaie et marché, Economica 1991.
30
« For New York banks the cost of conducting this vast amount of business did not exceed 8 thousand dollars a
year, which constituted roughly 0.02 % of deposits in the New York CBCH at the end of 1854 », Gibbons 1859.
31
Gorton G., Mullineaux D.J., The joint production of confidence : Endogenous regulation and nineteenth
century commercial – bank clearing houses, Journal of Money, Credit and Banking, November 1987
32
Calomiris C.W., Kahn C.M., The efficiency of Self-regulated payment system : learning from the Suffolk
system, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
33
Fenstermaker van J., Filer J.E., Impact of the First and Second Banks of the United States and the Suffolk
system on New England Bank Money 1791-1837, Journal of Money, Credit and Banking, February 1996
34
Monnaie bancaire : « dépôts en billets de banques transferrables, à l’origine basés sur des dépôts de pièces,
dont on faisait habituellement le commerce avec une prime sur la monnaie (pièces) parce qu’ils étaient
remboursables en pièces possédant un poids et un titre uniformes et de haute qualité » Kindleberger C.P.,
Histoire financière de l’Europe occidentale, Economica 1986
21
1.1.3 La compensation dans la théorie de la banque libre
Ces expériences susnommées tentent de prouver qu’une économie monétaire peut se satisfaire
d’un système privé sans intervention d’une banque centrale.
Ce précepte relève de la théorie de la Banque Libre (Free Banking) développée
essentiellement par White
35
et Selgin 36. Cette théorie s’appuie sur deux principes : la liberté
d’ouverture d’une banque, sans autorisation préalable, sous la forme d’une simple association
et sur un système bancaire sans banque centrale.
L’exemple de développement d’une économie sans intervention d’une banque centrale est
présenté par Selgin 37.
L’auteur crée un pays imaginaire et retrace les étapes :
N°1 : émergence de la monnaie – marchandise
N°2 : développement des banques
Au départ, les banques remplissent un rôle de conservation des pièces (dépositaires) puis
soldent les transactions sur leurs livres, traitement moins onéreux, et ont un rôle de placeurs.
Ce rôle décrit est identique à celui des orfèvres anglais au douzième siècle lorsqu’ils
commencèrent à ouvrir des comptes courants aux commerçants.
Ensuite ces banques peuvent se lancer dans l’activité de prêts, ceux-ci ne pouvant reposer, à
l’origine, que sur leur fortune et revenus propres. Néanmoins, les prêts assis sur les fonds
déposés représentent une innovation : le système prévoit un réservoir de fonds prêtables et
modifie la relation entre la banque et le déposant.
Le dépositaire se transforme en débiteur du déposant ; et le déposant devient un investisseur
qui prête son argent, moyennant rémunération.
Les certificats de dépôts deviennent des reconnaissances de dettes ou des billets à ordre. Ils
sont en effet mis à disposition du banquier tout en pouvant être réclamés à tout moment,
charge au banquier d’en assurer la liquidité.
Par la suite, la capacité des banquiers à prêter repose en partie sur la fongibilité de la monnaie.
35
White L.H., Free banking in Britain, Theory experience and debate, Cambridge University Press 1984
Selgin G., La théorie de la Banque Libre, Les Belles Lettres 1991
37
Selgin G., id.
36
22
N°3: transférabilité et négociabilité
L’économie doit se doter d’un instrument négociable qui puisse changer facilement de main et
remplacer les pièces pour solder les transactions. C’est le cas du billet à ordre émis par la
banque et cessible par endossement. Puis la banque crée des chèques 38 non négociables.
Ces étapes sont celles du développement de la monnaie-banque (en France, Italie, Pays-Bas,
au seixième siècle, les chèques de marchands sans mention du bénéficiaire auraient ouvert la
voie aux billets de banque); la monnaie-banque permet une réduction des pièces en
circulation.
N°4: développement des établissements de compensation
Une compensation multilatérale permet une diminution des besoins en réserve et des
économies de coûts de gestion, parce qu’il y a centralisation en un lieu unique de tous les
règlements.
Ce fut le cas pour Londres, Edimbourg, et New York (Gibbons en 1858 écrit que la New York
Clearinghouse fut créée en 1853 pour économiser les chaussures des porteurs de billets).
Weinberg
39
précise également qu’avant la création de la Fed, compte tenu de la
fragmentation de l’industrie bancaire américaine, la procédure de clearing des chèques a
permis de réaliser des économies substantielles sur les frais d’expédition et de transport.
Dès qu’un tel établissement se crée, toutes les banques veulent y adhérer pour profiter des
avantages de la compensation multilatérale.
Son principal objet est celui de la confrontation et du règlement, à peu de frais, des
engagements mutuels des banques.
Par la
suite, les chambres remplissent d’autres fonctions, devenant “des instruments
d’harmonisation des pratiques bancaires”. Il peut s’agir du rôle d’un bureau de
renseignements sur les risques de crédit, de gestion des « faux » ou d’audit des membres avec
mises au point de ratios.
L’établissement de compensation peut alors aider ses membres en période de crise ; il peut
effectivement emprunter à des membres pour secourir un autre en difficulté ; c’est alors la
base d’un marché intermittent de crédit à court terme.
38
Le chèque a officiellement été introduit en France par une loi du 14 juin 1865, et la première chambre de
compensation a été créée à Paris en 1872, soit un siècle après les premières chambres d’Edimbourg (1760) et de
Londres (1773), Saint-Marc M., Concurrence monétaire internationale et monétarisation in Weiller J. (en
l’honneur de), Croissance, échange et monnaie en économie internationale, Economica 1985
23
Selgin conclut à la mise au point d’un système bancaire parvenu à maturité sans banque
centrale.
Il existe d’autres développements s’apparentant au Free banking :
A titre d’exemple, notons que Fama
40
, dans le prolongement de Hayek
41
,
prône la
suppression de la monnaie, et donc le dépérissement des banques centrales : les moyens de
paiement pourraient être des parts de fonds communs de placements, remplaçant alors les
dépôts convertibles en monnaie fiduciaire. A cette fin, les parts seraient de valeurs variables et
exprimées dans une unité de compte abstraite. En contrepartie des moyens de paiement émis,
chaque fonds détiendrait un portefeuille d’actifs financiers négociables. La valeur des moyens
de paiement mis à disposition du public dépendrait de la valeur du portefeuille; si une perte de
confiance touchant une institution, la valeur de son portefeuille baisserait car elle devrait
vendre des titres sûrs pour respecter la loi du reflux en rachetant les parts excédentaires. Cet
ajustement par les prix devrait supprimer les déplacements contagieux de dépôts qui génèrent
des paniques bancaires 42.
In fine, il n’y aurait plus de monnaie, donc plus de liquidités à gérer, plus de niveau général
des prix et plus de stabilité monétaire à rechercher. L’intervention d’une banque centrale
devient superflue.
White
43
argumente qu’en émettant des dépôts convertibles, les banques offrent une monnaie
de base, expression de la liquidité supérieure; mais cette monnaie est placée hors contrôle
d’une autorité centrale. Les banques soumises à la convertibilité doivent alors respecter la loi
du reflux : directement ou indirectement, toute émission excédentaire par rapport aux besoins
du public retourne à l’émetteur pour être détruite. Le pouvoir d’achat des espèces, équivalent
à celui de toutes les formes de la monnaie en vertu de la convertibilité, est exogène au
système bancaire. Là encore, la banque centrale devient superflue.
39
Weinberg J.A., The organization of private payment networks, Federal Reserve Bank of Richmond Economic
Quaterly, Spring 1997
40
Fama E., Banking in theory of finance, Journal of Monetary Economics, January 1980
41
Hayek (von) F.A., The denationalisation of money, Institute of Monetary Affairs 1976
42
Aglietta M., Brender A., Coudert V., Globalisation financière : l’aventure obligée, Economica 1990
24
1.1.4 La création de la Federal Reserve Bank
Fort des expériences des banques compensatrices et prêteuses, telles les First, Second et
Suffolk Banks, les Etats-Unis ont créé leur banque centrale, la Federal Reserve Bank en 1913,
afin améliorer l’efficience et la stabilité du système de paiement américain, en essayant d’
enrayer les paniques bancaires. Le système fédéral reposait alors, à cette époque, sur un
réseau de collecte des chèques.
En temps normal d’activité, les chambres de compensation opéraient à la compensation et au
règlement en net des chèques. Si des problèmes survenaient (accroissement de la demande
d’or et de billets), comme lors des paniques bancaires de 1857 et 1914, celles-ci pouvaient
créer des titres (certificates) supplémentaires pour les règlements interbancaires. Les banques
désirant en bénéficier devaient apporter des titres en garantie, appelés collatéralisation, ayant
alors pour conséquence l’augmentation de la monnaie, et pouvaient de facto faire face à la
demande de retraits de la part de leur clientèle.
En effet, les banques ayant besoin de liquidités pouvaient emprunter auprès des chambres de
compensation via ce support (clearinghouse loan certificate de maturité comprise entre un et
trois mois), utilisable dans le processus de clearing comme de la monnaie. Si la banque
emprunteuse venait à faire faillite avant le remboursement des titres, la perte était répartie
entre les membres restants 44.
Ces systèmes ne se sont pourtant pas prolongés dans le temps ; une banque centrale a donc été
créée.
Ses fonctions sont celles de clearing (gestion et délivrance des instruments de paiement,
délivrance de ceux-ci et calcul des positions de paiement entre banques) et de règlement
(paiement de ces positions).
Dès lors, les services d’une banque centrale sont les suivants 45 :
43
-
compensation et règlement des chèques,
-
conservation des titres et gestion des opérations sur titres,
-
transferts de fonds,
White L.H., Free banking in Britain, Theory experience and debate, Cambridge University Press 1984
Gorton G., Mullineaux D.J., The joint production of confidence : Endogenous regulation and nineteenth
century commercial – bank clearing houses, Journal of Money, Credit and Banking, November 1987
45
Summers B.J., Clearing and settlement of U.S. dollar payments : Back to the future, Federal Reserve Bank of
St. Louis, September – October 1996
44
25
-
livraison et règlement des titres,
-
agent fiscal
-
agent de règlement via la technique du netting.
Remarquons, d’ores et déjà, que le rôle d’une banque centrale ne s’identifie complètement à
celui d’une chambre de compensation. Pour un développement plus poussé sur ce thème, le
lecteur se référera au chapitre IV § 2.
1.2 L’émergence et le rôle des chambres de compensation sur les
marchés dérivés
L’origine des contrats de futures remonte au dix-huitième siècle lorsque la société East India
émit des warrants pour les marchandises importées ; les marchandises sous-jacentes pouvaient
en conséquence faire l’objet d’un échange de warrants.
Puis d’autres entreprises ont utilisé cette technique et les futures ont pu se régler par livraison
de récépissé d’entrepôt, permettant d’en accroître la négociabilité.
Le Chicago Board of Trade fut ouvert en 1848, cota trois catégories de grains (en s’appuyant
sur la notion de fongibilité) dès 1856, et contrôla et certifia la qualité des grains (anticipant
ainsi sur la notion de rating qui n’apparaîtra sur les marchés financiers que cinquante ans plus
tard
46
).
En 1859, le CBOT centralisa ses négociations en un lieu unique (le floor) et créa une autorité
ad hoc (Self regulatory organisation) pour régler les différends entre ses membres.
Ces instruments négociés permirent de couvrir les variations de prix sans pour autant encore
gérer le risque de crédit et sans compensation stricto sensu (une simple entente bilatérale
pouvait être mise au point entre deux négociateurs).
46
Le rating est un processus d’évaluation du risque attaché à un titre de créance, synthétisé en une note,
permettant un classement en fonction des caractéristiques particulières du titre proposé et des garanties offertes à
l’émetteur. … Moody’s Investors Service Incorporation, fondée en 1913, se serait lancée en 1919 dans la
notation, suivie de Fitch (créée en 1922) et enfin de Standard & Poor’s en 1924.
Karyotis D, La notation financière, une nouvelle approche du risque, Banque Editeur 1995.
26
Il fallut attendre 1883 pour la création d’une chambre de compensation dont la finalité était la
diminution des coûts de transaction, et dont les principes étaient les appels de marge
47
et le
règlement des contrats compensés. Si la CBOT Clearing House a joué un rôle prépondérant
dans la gestion des risques de défaut (l’exemple de la faillite de George Phillips en 1902
aurait provoqué des pertes pour 42 % des membres du CBOT), elle ne s’interposait pas encore
entre les négociateurs 48.
Mais, selon Pirrong
49
, l’efficience du système permit, en 1887, de réduire le temps de
traitement des appels de marge à une heure en centralisant les négociations, et dégageant ainsi
des économies d’échelle.
Même si ses fonctions ont évolué dans le temps et selon les marchés, une chambre de
compensation 50 est une institution financière qui garantit la réussite d’un contrat entre deux
parties acheteur et vendeur 51. Dès la conclusion d’une négociation, cette chambre s’interpose
entre l’acheteur et le vendeur, qui ont en conséquence des obligations envers elle. Afin de
47
- Un appel de marge est un prélèvement ou un remboursement automatique d’un complément de
garantie, nécessaire pour certaines opérations, notamment pour celles des marchés à terme. Ce montant
correspond à la prise en compte de pertes ou de gains potentiels. Il est calculé en fonction du dépôt de garantie et
révisé quotidiennement. Il représente une couverture financière utile pour la sécurité d’un marché.
Matif SA.
- A l’instar des emprunts collatéralisés, un appel de marge prévient d’un défaut de paiement. Mais les
chambres de compensation et les bourses disposent d’autres outils tels les commissions de clearing, les dépôts de
garantie, les limites de variation de cours quotidiens, les limites de positions spéculatives, des capitaux propres
minimum …
Federal Reserve Bank of Chicago, The new tool set, Assessing innovations in banking, The 31 st Annual
Conference on Bank structure and competition, May 1995
48
Kroszner R.S., Can the financial markets privately regulate risk ? The development of derivatives clearing
houses and recent over-the-counter innovations, Journal of Money, Credit and Banking, March 1999
49
Pirrong C., Derivative markets, systemic risk, and monitoring, Working paper, Olin School of business,
Washington University 1998
50
Une chambre de compensation est une institution responsable du fonctionnement quotidien d’un (ou plusieurs)
marché(s) qui en assure la sécurité, fixe les modalités de transaction et de livraison, et agrée les adhérents.
Concrètement, la chambre de compensation veille à ce qu’à la clôture du marché, l’ensemble des soldes
débiteurs des adhérents soit égal à l’ensemble de leurs soldes créditeurs.
En général, elle a pour fonction de :
- habiliter les adhérents ayant accès à la compensation,
- enregistrer chaque opération après sa négociation,
- se porter systématiquement contrepartie de chaque acheteur et chaque vendeur,
- garantir la bonne fin et la sécurité financière des contrats grâce à la perception de dépôts de garantie et à la
compensation des gains et pertes résultant des appels de marge,
- fixer les montants de ces dépôts de garantie,
- calculer et appeler quotidiennement les appels de marge et les dépôts,
- surveiller les positions des opérateurs,
- liquider d’office, partiellement ou totalement, les positions des adhérents défaillants,
- fournir les informations nécessaires aux adhérents,
- surveiller, contrôler le marché,
- organiser la livraison à l’échéance des contrats livrables.
Source : Crédit Lyonnais, Dictionnaire encyclopédique de la Finance, 1993
51
Kolb W.R., Rodriguez J.R., Financial Institutions and Markets, Kolb publishing Company 1994
27
minimiser les risques, elle requiert des dépôts de garantie ; néanmoins, les pertes peuvent
s’avérer plus importantes que lesdits dépôts. Aussi la chambre de compensation a-t-elle
besoin d’une garantie supplémentaire qu’elle peut notamment obtenir par le biais de la
technique du “mark-to-market” 52. Les traders enregistrent leurs gains ou pertes au comptant
chaque jour de bourse ; si un défaut de provision se présente, la position peut être liquidée
grâce au dépôt de garantie
53
, limitant ainsi les risques à la journée. Enfin, la chambre de
compensation supervise la livraison des contrats. Elle procède à l’appariement des
négociations, informe les contreparties concernées, et passe les écritures nécessaires à
l’enregistrement de la transaction (selon la technique du “reversing trade” sur les marchés à
terme pour éviter les livraisons réelles).
A l’instar du CBOT, les autres marchés se sont dotés de chambre de compensation : les
bourses de café et de grain européennes ont créé des caisses de liquidation pour assurer leurs
membres contre les risques de défaut. En 1891, le Minneapolis Grain Exchange fut la
première place de futures à créer une chambre de compensation avec un rôle d’assureur. En
1919, le Chicago Mercantile Exchange apparut et se dota immédiatement d’un département
de clearing.
Mais selon Moser
54
, les systèmes complets et achevés de clearing sur les marchés dérivés
sont nés en Europe. Ce fut le cas en France avec la Caisse de Liquidation, et en Allemagne
avec la Liquidationskasse. Aussi cite-t-il Lavergne
français tel que décrit précédemment par Emery
56
55
, décrivant le système de clearing
à la fin du dix-neuvième siècle de la
manière suivante:
52
« mark-to-market » : réévaluation d’un investissement ou d’un engagement en fonction des cours à un instant
« t ».
53
Le dépôt de garantie est une fraction du prix d’un contrat négocié sur un marché à terme. Il est payé par son
donneur d’ordre, dès lors qu’il reste en position ouverte à la fin d’une journée de bourse, en garantie du paiement
du contrat si celui-ci évolue en défaveur de la position du donneur d’ordre.
Le dépôt de garantie constitue uniquement la garantie (du paiement du contrat à terme) préalable à l’évolution de
la valeur du contrat. En fonction de l’évolution de sa valeur, le donneur d’ordre peut être amené à compléter
quotidiennement une partie de son dépôt de garantie, par des appels de marge. Le donneur d’ordre peut aussi
récupérer tout (lors de la clôture de sa position) ou partie de son dépôt de garantie (la valeur du contrat évolue
favorablement à la position du donneur d’ordre).
Source : Crédit Lyonnais, Dictionnaire encyclopédique de la Finance, 1993
54
Moser J.T., Origins of the modern exchange clearinghouse : A history of early clearing and settlement
methods at Futures Exchanges, Research Department Federal Reserve Bank of Chicago, April 1994
55
Lavergne (de) A., Commodity Exchanges in France, Annals of the American Academy of Social Sciences,
1931
56
Emery H.C., Speculation on the stock and produce exchanges of the United States, Greenwood Press
Publishers 1896
28
Afin de remplacer la sécurité de la collatéralisation qui devrait obligatoire en thèorie mais le
n'’st en pratique, une Caisse de liquidation a été créée. Ses bureaux sont rattachés aux bourses
du Havre, Lille, et Roubaix, et Paris pour la bourse du sucre.
“ Lors d’une transaction, cette caisse s’interpose entre l’acheteur et le vendeur en substituant
au premier contrat, deux nouveaux contrats (le premier entre elle et l’acheteur, le second entre
elle et le vendeur). Les deux contreparties n’ont alors plus de relations entre elles, mais avec
la Caisse de liquidation.”
Ces systèmes de clearing ont été dupliqués aux Etats-Unis ensuite : en 1891 pour la
Minneapolis Chamber of Commerce (renommée ensuite Minneapolis Grain Exchange), en
1899 sur le Kansas City Exchange …
Enfin, en 1925, le Board of Trade Clearing Corporation conserva l’intégralité des titres de
ses membres, alors responsables les uns envers les autres, mettant ainsi en exergue la notion
de mutualisation des risques. Il garantissait les contrats et imposait des règles en matière de
liquidité, de capital et d’activité desdits membres 57.
Au fil des années et de leur croissance d’activités, les marchés de futures ont donc intégré la
nécessité des chambres de compensation. Celles-ci sont en effet précieuses, voire
indispensables, pour assurer le fonctionnement régulier et harmonieux d’un marché. Ceci est
plus important encore lorsqu’il s’agit d’un marché délocalisé tel celui des euro-obligations 58.
En effet, dès qu’une négociation est réalisée entre deux opérateurs, l’organisme de
compensation se substitue aux deux contreparties pour devenir l’unique contrepartie ; aussi
permet-il aux opérateurs de dénouer leurs contrats à une date convenue sans être tenus de
rechercher les contreparties avec lesquelles ils avaient initialement négocié.
Ainsi, la création des chambres de compensation fut une innovation majeure marquant la
naissance effective des marchés à terme et favorisant ultérieurement leur essor, en leur
apportant une garantie de premier ordre et une grande flexibilité 59.
Elles restent le pivot de l’organisation des marchés dérivés. Elles permettent, comme unique
contrepartie vis-à-vis de chaque participant, d’offrir aux opérateurs une organisation simple,
parallèlement à une élimination sensible du risque de contrepartie. Outre la garantie de bonne
57
Kroszner R.S., id.
Simon Y., Techniques financières internationales, Economica 1991
59
Simon Y., Marchés dérivés de matières premières et gestion du risque de prix, Economica 1995
58
29
fin qu’elles fournissent, les chambres de compensation enregistrent les opérations: c’est dire
qu’elles préexistent et que lesdites chambres ne sont pas parties contractantes 60.
1.3 La compensation sur les transactions boursières
Si le seizième siècle fut celui de la création des premières bourses en Europe, il fallut
cependant attendre le dix-neuvième siècle pour constater des ébauches de compensation, voire
le vingtième pour la constitution d’organismes appropriés à une compensation généralisée sur
ces places.
La première notion de bourse émane de la place d’Anvers en 1531, tandis que Paris crée une
“place commune des marchands” en 1563, et Londres le “Royal Exchange” en 1571. C’est
également Anvers qui met au point la première cote en publiant la liste des différents cours
pratiqués. En 1700, Amsterdam cote les actions de la Compagnie des Indes Orientales et
présente les trois conditions réunies d’un marché international, à savoir une monnaie
incontestée (le florin d’or), une prospérité économique notable et une organisation bancaire
puissante 61.
A Paris
62
, le 24 septembre 1724, un édit royal institue légalement la Bourse de Paris et lui
impose une réglementation ; le marché est alors ouvert de 10 à 12 heures. Le 30 mars 1774,
cette bourse de commerce est décomposée en deux segments, la bourse de marchandises
d’une part, et la bourse des valeurs d’autre part.
Au fil du temps, toutes les places financières ainsi constituées et en fort développement se
sont penchées sur certaines questions en vue de sécuriser leur fonctionnement 63 :
-
comment garder trace de la propriété des valeurs mobilières, représentée par des titres,
autrement que par la simple conservation physique soumise à différents aléas (destruction,
perte, vol …)
-
comment assurer une gestion aisée des évènements affectant les titres (opérations sur
titres, disparition des entreprises …)
60
Causse H., Les titres négociables, Litec 1993
Desfossé G., Encyclopédie Universalis 1998
62
Lehman P.J., Histoire de la Bourse de Paris, Que sais-je 1997
63
Chabrolles N., Juvin H., Une histoire de la Sicovam, Cinquante années de compte courant de valeurs
mobilières en France, Les Djinns 1992
61
30
-
comment garantir la tenue d’une comptabilité titres au niveau de la place, pour empêcher
la création de faux titres, les erreurs d’attribution …
-
comment assurer la compensation des valeurs mobilières entre intermédiaires afin d’éviter
des mouvements redondants et de se prémunir collectivement contre des risques de
défaillance ?
1.3.1 Les premières ébauches de compte courant de titres
Deux notions sont fondamentales dans l’histoire de la compensation sur titres : le dépôt de
titres individualisé et le dépôt collectif.
Un dépôt de titres individualisé repose sur le principe de la circulation du titre via un
document, appelé récépissé de dépôt ou certificat (le titre ne circule donc plus en propre).
Un récépissé de dépôt est la preuve d’un contrat de dépôt intervenu entre le déposant et un
tiers, appelé dépositaire (le plus souvent, une banque ou l’émetteur de la valeur). Ce récépissé
n’est pas un titre mais constate le dépôt. C’est donc un reçu. Il est établi sur timbre, signé par
le représentant légal du dépositaire, mentionne les conditions du contrat, et est établi au nom
du déposant. Il est donc nominatif et non négociable, sauf s’il est réalisé sous la forme d’un
billet à ordre, et, dans ce cas, transmissible par endossement.
Cette forme de dépôt pouvait, en France notamment, concerner des rentes, des obligations,
des actions ou des parts de fondateurs. Les propriétaires de titres l’utilisaient pour se
décharger de la garde des titres et donc éviter les risques de destruction, perte ou vol et les
manipulations ou toute opération matérielle.
Les titres ainsi déposés par leurs propriétaires restaient individualisés par leurs numéros, alors
reportés sur le récépissé.
Il existait cependant des titres fongibles, c’est-à-dire ayant perdu leur identité en tant que
numéro de titres. Dans ce cas, lorsqu’un dépôt était effectué un jour et qu’ultérieurement son
propriétaire réclamait ses titres, le dépositaire lui rendait des titres de valeur et de jouissance
identiques sans que ce soit les titres identifiés par les mêmes numéros déposés au préalable.
Les titres sont donc traités in genere. Ce fut le cas des rentes perpétuelles, des obligations
remboursables à échéances fixes, des actions ou parts au porteur exclusivement.
31
Ce mécanisme de fongibilité permet alors l’ouverture d’un compte de dépôt de titres, sur
lequel le propriétaire autorise le dépositaire à lui restituer un titre de la même espèce sans
conformité de numéro. C’est le dépôt collectif, au travers des comptes courants de titres. Audelà même du compte courant de titres, notons que la fongibilité des titres est une condition
sine qua non de mise en place de toute structure de compensation.
La première expérience de compte courant de titres
64
fut celle du Ministère français des
Finances qui autorisa, en 1816, l’ouverture de comptes courants de rentes sur des livres
spéciaux affectés aux opérations des agents de change parisiens et des intermédiaires
financiers, mais les applications restèrent rarissimes. Puis en 1854, la Banque de France ouvrit
des comptes courants de valeurs pour les agents de change, utilisables également par les
particuliers, et mouvementés par des virements de titres (le double du bordereau de dépôt était
joint au mandat de virement). Ce système fut abandonné en 1857 car trop lourd à gérer
compte tenu de l’individualisation numérique des titres et la réticence des agents de change.
Le véritable dépôt collectif de titres
65
apparut en Autriche (Sammeldepot) en 1872 avec la
création d’un organisme ad hoc, le Wiener Giro und Kassenvereine ; il fut ensuite introduit en
Allemagne en 1882 par la Bank des Berliner Kassenvereines. Généralisé après la guerre, le
système a considérablement diminué les mouvements de titres entre les établissements
bancaires. Les banques, sur chaque place boursière, étaient affiliées au Kassenvereine ou
Effektgirobank de leur ressort ; ces derniers ont ensuite formé une association permettant
d’effectuer des virements de place à place. Les banques leur remettaient alors les titres leur
appartenant en propre et ceux dont elles étaient dépositaires, après autorisation expresse de
leurs clients. Toute opération concernant ces titres, plutôt que d’être suivie d’une livraison ou
d’un retrait physique de titres, se soldait par inscription sur les livres du Kassenvereine et par
des écritures dans les livres des banques ; le Kassenvereine ne connaissait en effet que les
banques, ignorant les clients finaux. Enfin, l’encaissement des coupons s’effectuait par crédit
des comptes espèces sans détachement ; lors des augmentations de capital, la gestion des
droits de souscription ou d’attribution s’opérait de façon identique à celle des coupons.
En France, après les expériences malheureuses d’ouverture de comptes courants de titres, il
fallut attendre un décret du 11 juin 1930 pour la réouverture de comptes courants de rentes au
64
65
Moreau-Néret O., Les valeurs mobilières, Sirey 1939
Moreau-Néret O., id.
32
porteur. Ces derniers étaient réservés aux établissements de crédit spécialement autorisés par
le ministère des Finances. L’objectif recherché par les autorités de tutelle françaises était
d’alléger la gestion des rentes : les banques détentrices d’un montant important de rentes les
déposaient au Trésor et recevaient en échange une coupure globale (divisible en coupures
partielles leur permettant de retirer les titres réclamés par leur clientèle, le cas échéant). Ce
système fut utilisé pour deux rentes perpétuelles
66
: le 5% 1915 et le 6% 1920. En 1932, ces
rentes furent converties en rentes amortissables ; le décret resta donc inappliqué car, pour une
rente amortissable, il aurait fallu créer autant de coupures qu’il existait de séries.
Le dépôt collectif ne démarrera réellement en France qu’en 1941 avec la création de la
CCDVT – Caisse Centrale de Dépôts et de Virements de Titres (cf. chapitre III).
1.3.2 La livraison des titres et le règlement des espèces avant la création d’un
dépositaire central 67
Le cas de la France
Un titre livré par un vendeur était considéré comme régulier s’il conférait à l’acheteur tous les
droits normalement attachés ; il était alors dit de « bonne livraison ».
Une négociation au comptant devait être suivie d’une livraison effective des titres négociés,
sans compensation ; les livraisons avaient lieu tous les jours dans une salle spécifiquement
dédiée. Le délai de livraison était de 12 jours de bourse après la négociation (selon le décret
du 25 octobre 1934).
Pour une négociation sur le terme, la Chambre Syndicale des Agents de Change s’interposait
entre les agents de change, tous les agents vendeurs livrant à la chambre qui à son tour livrait
les agents acheteurs, le quatrième jour de bourse suivant la liquidation.
66
La notion de rente perpétuelle remonterait au seizième siècle selon les historiens. « François Ier, ruiné par la
guerre du Milanais, décide d’emprunter 200 000 livres tournois, mais son crédit ne lui permet pas de s’adresser à
des « capitalistes ». Il recourt alors à la Ville de Paris. La rente est perpétuelle car le capital n’a pas à être
remboursé ; il ne s’agit plus d’un prêt, mais de l’échange d’un capital (car les commissaires promettent, en retour
du capital, une rente de 25 000 livres, garantie par le produit des aides et taxes perçues à Paris) contre une rente à
terme indéfini. »
Antonellis (de) G., Bayle F., L’histoire des échanges et des transactions, Les Editions de l’Epargne 1988
67
Pour l’essentiel, les exemples donnés présentement sont tirés de l’ouvrage de Moreau-Neret susmentionné.
33
Le règlement espèces entre charges, sur le marché au comptant, faisait l’objet d’une
compensation ; les agents présentant un solde débiteur remettaient, séance tenante, un mandat
de virement sur la Banque de France au nom de la Chambre Syndicale des Agents de Change.
Sur le marché à terme, la compensation était identique mais s’établissait chaque quinzaine et
le quatrième jour de bourse suivant la liquidation.
La charge d’agent de change était en droit d’exiger, à son client, la remise des fonds ou des
titres avant toute négociation. En tout état de cause, le client devait régler le montant de son
achat le jour de l’exécution de l’ordre en bourse. Quant aux fonds provenant de la vente, ils
devaient être mis à la disposition du donneur d’ordre, dès le surlendemain du jour de la
négociation. Toutefois, au cas où le donneur d’ordre n’aurait livré à l’agent de change les
titres à vendre qu’une fois la négociation effectuée, les fonds ne lui étaient dus que le
surlendemain du jour de la remise des titres à cet agent de change.
Le client, après l’exécution de son ordre, recevait un décompte complet, nommé compte de
liquidation. Si le solde était débiteur, le client devait avoir remis les fonds à son agent au plus
tard le troisième jour de bourse après la liquidation. En cas de solde créditeur, le client était
réglé le quatrième jour suivant la liquidation.
Le cas des pays anglo-saxons
•
En Grande Bretagne, le broker 68 de l’acheteur ne connaissait normalement que le jobber
avec lequel il avait traité. Pour rapprocher de façon définitive le vendeur et l’acheteur, le
nom de l’acheteur était inscrit sur un « ticket » remis au jobber, ou à la bourse. Le jobber
vendeur remettait le ticket à son vendeur. Il en résultait une série de transmissions
intermédiaires, jusqu’à ce que le ticket parvienne entre les mains du broker dont le client
avait effectivement vendu les titres.
Afin de simplifier cette procédure lourde, un clearing était effectué pour certaines valeurs : les
brokers fournissaient, au département de la liquidation, la liste des titres dont ils étaient
acheteurs ou vendeurs, faisant ressortir le solde, et le département de la liquidation établissait
les tickets des acheteurs et les transmettait aux brokers des vendeurs.
La livraison des titres au porteur avait lieu le lendemain de la négociation pour le comptant,
en date de liquidation pour le terme (la liquidation était effectuée par le broker acheteur,
68
Un broker est un agent de change, simple courtier.
Un jobber est un contrepartiste habilité à négocier pour compte propre.
34
directement ou indirectement, sauf pour les titres à large marché pour lesquels intervenait une
compensation).
Pour la livraison des titres nominatifs, le broker acheteur faisait connaître à sa contrepartie le
nom et l’adresse de son client, établissait alors un acte de transfert et le faisait signer par le
vendeur, pour transmettre ensuite, moyennant versement de la contre-valeur des titres, par
l’intermédiaire de la bourse, l’acte signé au broker acheteur. Ce dernier devait procéder au
transfert en complétant cet acte par les signatures de l’acheteur et en le déposant, avec le
certificat primitif, à l’émetteur qui délivrait en échange un certificat au nom de l’acheteur.
•
Aux Etats-Unis, tous les titres négociés un jour de bourse devaient être, dès le second jour
plein suivant et avant 14 h 15, livrés par l’intermédiaire vendeur et payés par
l’intermédiaire acheteur.
La livraison et le règlement se réalisaient par compensation, le prêt de titres étant déjà en
vigueur.
Les prêts sur titres étaient consentis le plus souvent pour une durée de 24 heures (s’ils
n’étaient pas dénoncés, ils étaient reconduits tacitement). Les titres remis en garantie à la
banque prêteuse n’apportaient de sécurité que si leur valeur demeurait suffisante ; en effet en
cas de baisse de cours, l’emprunteur devait fournir un supplément de couverture.
Enfin, toutes les banques de New York pratiquaient les prêts espèce. Mais ceux-ci étaient non
réescomptables auprès de la Federal Reserve Bank, à l’exception de ceux dont la garantie
reposait sur des titres du gouvernement.
Aussi les places financières américaines ont-elles très tôt proposé à leurs intermédiaires des
prestations proches de celles requises aujourd’hui par les instances internationales (délai
inférieur à J+3, prêts de titres …).
2. L’évolution macro-économique des marchés a rendu
indispensable la maîtrise des fonctions post-bourse
Vingt années auront suffi pour généraliser, dans l’ensemble des pays industrialisés, une
économie de marchés financiers. Dans les années quatre-vingts, de nombreuses innovations,
35
tant en matière d’instruments négociés qu’en matière de conditions d’échange, ont
profondément modifié les structures en place depuis la fin du dix-neuvième siècle 69.
Il convient cependant de ne pas confondre les innovations de produit et les innovations de
processus
70
bien qu’il soit parfois difficile de les distinguer ; certains produits ou services
nouveaux sont, en effet, impossibles sans un support technologique adapté.
Les innovations de produits sont de nouveaux actifs financiers ou de nouveaux services
offerts par une institution financière : les actifs sont effectivement caractérisés par des
paramètres (montant unitaire, échéance, rendement, risque, fiscalité …), et une innovation
conduit à modifier lesdits paramètres ou leur combinaison.
Les innovations de processus consistent en l’application, par une institution financière, de
technologies nouvelles à leur processus de production (exemple : l’informatique dans la
gestion des moyens de paiement). Levratto
71
décrit les innovations de produits comme étant
une utilisation de nouveaux produits ou services offerts au sens de Schumpeter
72
, et les
innovations de processus comme étant l’emploi de nouvelles technologies permettant une
réduction des coûts de production des produits existants 73.
Cette distinction entre les deux types d’innovations a également permis, dans le passé, de
différencier les systèmes financiers appuyés par les banques de ceux appuyés par les marchés.
Aussi Amable et Chatelain
74
relèvent-ils que dans les systèmes à dominante bancaire, les
innovations de processus sont d’autant plus fortes que les innovations de produits restent
freinées par une moindre pression concurrentielle et par un développement insuffisant du
marché des valeurs mobilières. Dans les systèmes à dominante marchés, les innovations de
produits prédominent, notamment grâce à de faibles barrières à l’entrée.
69
Marnata F., Marchés financiers, Encyclopédie Universalis 1998
Métais J., Szymczak P., Les mutations du système financier français – innovations et déréglementation, La
Documentation Française 1986
71
Levratto N., Où est l’économie industrielle de la finance ?, Revue Française d’Economie vol. VIII – 4, 1993
72
Schumpeter J.A., Théorie de l’évolution économique, Dalloz 1935
Flouzat D. (Economie contemporaine – Croissance, crise et stratégies économiques, PUF 1980) nous rappelle
que Schumpeter (Schumpeter J., History of economic analysis, Oxford University Press, 1954) distingue cinq
cas d’innovations : apparition d’un bien nouveau, mise en œuvre d’une méthode de production plus efficace d’un
bien déjà existant, établissement de nouvelles formes d’organisation, découverte de nouvelles sources de
matières premières, conquête de nouveaux débouchés.
73
Kamien M., Schwartz N.L., Market structure and innovation – a survey, Journal of economic literature, March
1975 (cité par Levratto)
74
Amable B., Chatelain J.B., Efficacité des systèmes financiers et développement économique, Economie
Internationale, 1er trimestre 1995
70
36
Nombreuses sont les innovations émanant des Etats-Unis et appliquées ensuite dans les autres
pays. Mais, nonobstant la prédominance des Etats-Unis dans le domaine des innovations,
l’euromarché nous semble tout aussi important en la matière, voire davantage. Une des
conséquences notables de ces innovations fut la transformation de l’économie des principaux
pays industrialisés, passée d’une économie d’endettement à une économie de marché (appelée
parfois dans la littérature marchéisation 75, ou mobiliérisation 76).
La distinction entre économie d’endettement et économie de marché appartient à Hicks
77
.
Trois éléments permettent alors de distinguer les deux types d’économie :
-
Le taux d’autofinancement : Dans une économie d’endettement, celui-ci est relativement
faible (50, 60 %). Les agents recourent alors systématiquement à l’endettement bancaire
pour se financer. Dans une économie de marché, ce taux avoisine les 100 %, les agents
cherchent alors le complément de ressources dont ils ont besoin sur les marchés de
capitaux.
-
La dette publique : Dans une économie d’endettement, l’Etat se finance par son circuit
propre lui apportant le plus souvent des ressources gratuites. Dans une économie de
marché ce circuit n’existe pratiquement pas ; l’Etat émet alors des titres sur les marchés
financiers pour financer son déficit, d’où l’importance de la dette publique négociable.
-
La banque centrale : Dans une économie d’endettement, son rôle est indispensable pour le
financement des banques dont le besoin de refinancement est structurel. Dans une
économie de marché, ces mêmes banques se refinancent essentiellement par le biais du
marché monétaire, sollicitant alors la banque centrale de façon plus rare ; en conséquence
les interventions de cette dernière sur les marchés de capitaux sont discrétionnaires.
75
Les mutations qui ont caractérisé le système financier depuis les années quatre-vingts ont pris deux aspects :
La désintermédiation est caractérisée par un développement spectaculaire de la contribution des marchés de
capitaux à la collecte de l’épargne et l’allocation des moyens de financement, contribution supérieure à celle des
établissements de crédit ; et une imbrication de plus en plus étroite entre les activités des différents acteurs du
système financier, phénomène qui déborde d’ailleurs largement les frontières.
Le phénomène de marchéisation est, quant à lui, celui de contagion entre les conditions de marché et celles qui
sont consenties aux bons clients.
Source : Patat J.P., Les autorités monétaires face à l’instabilité et aux nouveaux risques du système financiers,
Revue d’Economie Politique n°5, septembre octobre 1988
76
Les agents économiques choisissent, pour se financer, de lever des fonds massivement par émission de titres.
Ferrandier R., Koen V. , Marchés de capitaux et techniques financières, Economica 1997
Plus finement, le phénomène de marchéisation est lié aux banques qui interviennent dans le placement des titres
et lèvent des fonds par émission de titres monétaires et financiers, les emplois et ressources étant constitués de
titres plutôt que de dépôts et crédits bancaires, tandis que le phénomène de mobiliérisation rend compte de la
forte croissance des valeurs mobilières d’une part, dans les placements des particuliers, des entreprises au
détriment des dépôts à vue ou à terme et d’autre part, comme modalité de financement, au détriment des crédits
bancaires.
Poincelot D., Les marchés de capitaux français, Editions Management, Les essentiels de la Gestion 1998
37
C’est donc une libéralisation financière, traduite par un passage d’une économie réglementée
vers une économie déréglementée et libéralisée, passage décrit par McKinnon et Shaw
78
dès
1973, qu’ont connu la plupart des grandes places financières internationales.
Les pays industrialisés, devant financer des déficits budgétaires croissants, ont tous tendu vers
l’économie de marché, en abolissant leur réglementation afin de faciliter la circulation
internationale des capitaux 79.
Concrètement, la libéralisation financière
80
s’est accompagnée d’une mutation des bilans du
secteur privé qui a fortement accru son ratio endettement / PIB et étoffé son portefeuille
d’actifs financiers. L’expansion du crédit est aussi devenue plus sensible aux conditions
économiques sous-jacentes et à la perception du risque, tandis que les liens entre marchés des
actifs et expansion du crédit ont été renforcés. Globalement, il apparaît donc que la solidité de
l’ensemble de l’économie et celle du système financier sont de plus en plus étroitement
imbriquées 81 . Il importe donc désormais d’assurer la stabilité du système financier.
Ce phénomène décrit présentement a touché tous les pays industrialisés et est présenté dans le
schéma 1 82.
77
Hicks J., The crisis in keynesian economics, Basil Blackwell 1974
McKinnon R.I., Money and capital in economics development, Brookings Institution 1973
Shaw P., Financial Deepening in economic development, Oxford University Press 1973
79
La globalisation des marchés financiers s’est réalisée en trois étapes principales : recyclage des pétrodollars et
développement du marché des eurodollars, développement et déréglementation du marché international des
titres, essor des marchés de capitaux émergents.
Gaspera (della) S., Régulation du système financier national et international, Cahiers français n°301 juin 2001
80
Banque des Règlements Internationaux, 71ème Rapport annuel, 2001
81
On remarquera néanmoins que ces liens avaient déjà été vérifiés en 1929.
82
Poincelot D., Les marchés de capitaux français, Editions Management, Les essentiels de la Gestion 1998
78
38
Schéma 1 : Transformation des économies
Facteurs de transformation
Décloisonnement
Concurrence
Désintermédiation
Système
Financier
Unification des
marchés de
capitaux
Transformation de
l’activité
bancaire
Mobiliérisation
Marchéisation
Les facteurs de transformation sont principalement : le décloisonnement visant les marchés, le
développement de la concurrence entre les banques et les opérateurs des marchés sur les plans
national et international ainsi que la désintermédiation.
A ces facteurs de transformation, il convient également de rajouter celui de l’interrelation
entre le système bancaire et les marchés de titres. En effet, ces deux activités ou systèmes
étaient restés dissociés, depuis les années trente, sur la plupart des places financières.
Cinq phénomènes ont permis de rapprocher le système bancaire du marché des valeurs
mobilières
83
: la mobiliérisation stricto sensu de l’économie, l’institutionnalisation des
investissements, l’émergence d’instruments financiers complexes, les opérations de fusion acquisition et la consolidation des intermédiaires.
83
Padoa-Schioppa T., Securities and banking : bridges and walls, London School of Economics, January 2002
39
La mobiliérisation de l’économie se traduit par une augmentation de la demande de titres
de la part des maisons de titres et un accroissement de l’offre de titres émanant des
entreprises qui cherchent à diversifier leurs sources de financement.
Les chiffres de la zone Euro illustrent ce mouvement : la capitalisation boursière atteint les
100% du PIB (et s’en approche encore malgré la baisse des marchés boursiers en 2002),
tandis qu’elle ne s’établissait qu’à 30 % en 1995, pourcentage atteint grâce à l’évolution
favorable des cours, mais également par le doublement du nombre d’entreprises cotées
84
.
L’évolution est identique sur les marchés obligataires sur lesquels le nombre d’émissions
émanant d’entreprises non financières s’est accru de 20 % par an depuis la deuxième moitié
des années quatre-vingt-dix, et qui accueillent désormais des obligations à haut rendement.
L’institutionnalisation des investissements qualifie l’acquisition des valeurs mobilières par
les agents économiques par le biais d’organismes de placements collectifs ou investisseurs
institutionnels 85. La valeur totale des organismes de placement collectifs a été multipliée
par 25 au cours des années quatre-vingt-dix.
Ledit phénomène d’institutionnalisation a permis aux établissements bancaires de
participer au développement de l’économie de marché ; ainsi ces établissements ont-ils
défini une nouvelle stratégie de gestion d’actifs et d’investment banking, leur permettant
d’accroître la part des commissions dans leur revenu global et de « réintermédier »
l’économie. En 2000, les revenus des activités non intermédiées ont représenté 52% du
revenu net total des banques européennes, contre moins de 30% quatre années plus tôt.
L’émergence de produits financiers complexes a généré un transfert et une négociation
des risques. A titre d’exemple, notons que le risque de crédit peut être désormais géré par
le biais d’instruments de marchés, telle la titrisation qui permet une sortie des créances du
bilan des banques.
84
La capitalisation boursière des 56 membres de la Fédération internationale des bourses en pourcentage du PIB
de leur pays est passée de 64,5 % en 1995 à 94,5 % en 1999. En 2001, elle est cependant descendue à 72,5 %.
Source : World Federation of Exchanges, The significance of the Exchange industry, August 2003
85
In the United States, evidence of institutionalization of the stock market can be seen from the ownership
distribution of stocks and the share of trading by individual (referred to as retail trading) and institutions (pension
funds, insurance companies, investment companies, bank trusts, and endowment funds). In 1949, institutional
ownership of NYSE-listed stocks was 13 % ; in recent years, it has been almost 50 %. Moreover, over 80 % of
the volume of trading on the NYSE is done by institutional investors. In 1994, 47.3 % of the market value of the
activity traded OTC stocks was held by institutional investors. This, of course, does not mean that individuals'
ownership of stocks has diminished. Instead, institutions trade on behalf of individuals, who hold through the
instruments of mutual funds, pension funds, and so forth.
Fabozzi F.J., Ferri M.G., Modigliani F., Foundations of Financial Markets and Institutions, Prentice-Hall
International 1998
40
Le regroupement des métiers au sein d’un même groupe (banque et assurance par
exemple) et les opérations de fusion – acquisition ont concouru à développer des
économies d’échelle dans le domaine des activités bancaires et financières.
En conséquence, les banques s’assimilent de plus en plus à des entreprises de services
œuvrant sur les marchés de capitaux. Et on constate un glissement d’un système dominé par
les banques vers un système dominé par les marchés 86.
Pour illustrer ce propos, nous reprenons le tableau (tableau 1) utilisé par Saïdane
87
pour
affirmer que même les pays longtemps dominés par les banques (tels les pays européens hors
Royaume-Uni) convergent vers un système dominé par les marchés.
Tableau 1 : Evolution du recours direct au marché de capitaux par le secteur privé
Etats-Unis
Royaume-Uni
France
Pays-Bas
Italie
Belgique
Espagne
Allemagne
Décembre 1996
68
50
35
50
28
40
32
20
Juin 2001
78
60
60
58
48
45
42
40
(Encours des actions et titres de dette des entreprises non financières
en % du total des crédits bancaires, actions et titres de dette des
entreprises non financières)
En tout état de cause, la création d’une économie de marché repose sur deux conditions : un
système bancaire compétitif et efficace, et des instruments de marché pour la politique
monétaire. Et pour les atteindre, un système de paiement efficient (clearing et settlement) est
indispensable 88.
86
Allen F., Gale D., A welfare comparison of the German and US financial system, European Economic Review
n°39, 1995
87
Saïdane D., Les mutations de l’intermédiation bancaire dans les pays de l’OCDE : Nouveaux revenus,
nouveaux métiers, Revue d’Economie Financière n°66, juillet 2002
88
Blommestein H.J., Transformation of the payment system and the development of money markets in
Transformation of the banking system, Portfolio restructuring, privatisation and the payment system, 1993
41
2.1 L’euromarché, précurseur des innovations
L’euromarché fut, le plus souvent, à l’origine des grandes innovations financières mais
également de la création des centrales de clearing internationales. Il amorça également le
démarrage de l’intégration des places financières.
On a désigné, sous le nom d’euromarchés, des marchés sur lesquels se réalisaient des
opérations de prêts et d’emprunts libellés dans des monnaies autres que celles du lieu où
étaient installées les banques qui les réalisaient 89. Seules les monnaies convertibles pouvaient
être utilisées à cette fin, appelées logiquement eurodevises.
Une eurodevise (ou xéno monnaie) est un instrument monétaire résultant de l’utilisation de
dépôts ou de crédits à court terme en monnaie étrangère détenus par des banques 90.
Précisément, le marché des eurodevises a démarré sa phase de croissance lors de la
réouverture du marché monétaire international du comptant (retour à la convertibilité des
principales monnaies) le 28 décembre 1958
91
; les dépôts en dollar ont alors été placés hors
des Etats-Unis, afin de contrecarrer la réglementation Q, plus particulièrement en Europe
compte tenu de la bonne organisation de ses systèmes bancaires, et furent logiquement
nommés eurodollars. Le phénomène fut, par la suite, étendu à d’autres monnaies et les
professionnels ont défini comme eurodevise toute devise placée en dépôts dans des banques
situées à l’extérieur du territoire d’origine de ladite devise.
En parallèle, lors de la guerre froide, l’URSS décida de placer ses excédents en dollars en
Europe plutôt qu’Outre-Atlantique. La Banque Commerciale pour l’Europe du Nord,
correspondante en Europe de la Banque d’Etat de l’Union Soviétique et devenue la Moscow
Narodny Bank ou Eurobank, détenait alors des dollars pour le compte de l’URSS. Puis
d’autres banques ont bénéficié de dépôts en d’autres devises. Elles ont pu de facto alimenter
un marché international de capitaux actif échappant aux réglementations nationales en
matière, notamment, de change et de crédit.
89
Pébereau M., Politique Economique de la France, IEP Paris Les cours de droit 1985
Blumberg G., Encyclopédie Universalis 2000
91
Herrenschmidt J.L., Déréglementations et innovations financières internationales, Encyclopédie des marchés
financiers Economica 1987
90
42
Les eurodevises furent consacrées ensuite lorsqu’elles ont permis de libeller des moyens de
financement des agents économiques par appel public à l’épargne. Le premier exemple est
celui de l’eurodollar qui donna naturellement naissance à un nouveau compartiment des
marchés de capitaux internationaux.
Le marché des euro-obligations
92
Autostrade fit appel à un syndicat
existe depuis 1963, date à laquelle la société italienne
93
international de banques pour diriger un emprunt de 15
millions de dollars.
Si la syndication bancaire internationale capte une clientèle d’investisseurs du monde entier,
elle représente surtout la caractéristique essentielle d’une euro-obligation.
Globalement, trois raisons ont prévalu au développement d’un véritable marché international
des capitaux 94 : l’interdiction donnée aux banques britanniques, par leur gouvernement, de
financer les relations commerciales entre non-résidents par des livres Sterling, la restauration
de la convertibilité des différentes devises et l’émergence de certains contrôles
gouvernementaux sur les marchés de capitaux.
Outre la réglementation Q suscitée, les Etats-Unis sont également à l’origine de la naissance
de l’euromarché obligataire avec « l’Interest Equalization Tax » ; par son biais, le
gouvernement américain a en effet, en 1963, alourdit la fiscalité des valeurs mobilières
étrangères taxant ses résidents, à hauteur de 15%, sur l’achat de ces valeurs. Les émetteurs
européens ont alors décidé de ne plus émettre sur les marchés américains, donnant une
impulsion supplémentaire aux euromarchés.
Lors de l’abolition de ces deux réglementations, on aurait pu penser que l’euromarché
entrerait dans une phase de stagnation, mais le premier choc pétrolier lui donna une nouvelle
impulsion. Les pays exportateurs de pétrole disposaient d’excédents de trésorerie à placer
tandis que les pays importateurs recherchaient des moyens de financement. L’euromarché a
92
Une euro-obligation est un titre de créance, bénéficiant d’un statut fiscal privilégié, émis en eurodevise par un
syndicat international de banques, placé principalement sur d’autres places financières que celle de la monnaie
ayant servi à libeller l’emprunt.
Bruslerie (de la) H., Gestion obligataire Internationale, Economica 1990
93
Le premier syndicat bancaire remonterait à 1325, lorsque la commune de Florence s’est adressée à quatre
compagnies (Bardi, Peruzzi, Scali et Acciainoli) qui lui ont fourni 50 florins d’or. Un an plus, ces mêmes
compagnies ont prêté 15800 florins au Duc de Calabre.
Antonellis (de) G., Bayle F., L’histoire des échanges et des transactions, Les Editions de l’Epargne 1988
Un syndicat (ou pool) bancaire est un groupe de banques constitué pour participer à l’émission d’actions ou
d’obligations. Cet ensemble de banques est dirigé par un établissement chef de file qui établit les conditions de
l’émission et s’engage à la placer dans le public.
Peyrard J., Dictionnaire de finance, Vuibert 1998
94
Simon Y, Techniques financières internationales, Economica 1991
43
répondu à ces besoins
95
en assurant aux investisseurs une bonne liquidité grâce au
développement d’un marché secondaire.
Au demeurant, l’euromarché a toujours attiré nombre d’investisseurs à la recherche d’une
évasion fiscale car ses titres sont exonérés de retenue à la source. De facto, les investisseurs
individuels représentaient, à son démarrage, plus des trois quarts du marché : ils recherchaient
certes l’absence de retenue à la source, mais également une garantie de l’anonymat (plus que
le rendement) et une protection contre le risque de change. Ultérieurement, lorsqu’un
véritable marché secondaire s’est développé, les institutionnels se sont orientés vers
l’euromarché, en devenant alors les principaux acteurs.
Le marché secondaire est un marché de gré à gré, totalement délocalisé. Mais les places de
Londres, New York ou Luxembourg cotent les euro-titres pour améliorer leur visibilité. Les
opérateurs sont à la fois teneurs de marché (market makers) et dealers (intermédiaires entre
les teneurs de marché et les investisseurs).
La création de l’euromarché ne relève pas de décisions gouvernementales mais de la volonté
des banques, dès les années cinquante, de s’adapter à de nouveaux besoins (recherche de
sécurité puis d’efficacité) 96.
Par sa flexibilité, l’euromarché a répondu aux attentes des agents économiques et fit preuve de
dynamisme. Ce dynamisme s’est d’abord manifesté par l’émission d’obligations à taux
variable (Floating rate notes
97
), introduites sur ce marché dès 1970. Leur taux d’intérêt est
révisé à périodicités constantes (3 ou 6 mois) sur la base de l’évolution du marché monétaire.
Ledit taux était, dans les années soixante-dix, généralement le Libor 98 mais celui-ci devenant
trop élevé, fut remplacé au titre de la référence par le LIBID, voire le LIMEAN ou le taux des
bons du Trésor américain. Au-delà des taux pris en compte, la référence monétaire retenue
pour un titre obligataire démontre réellement le démarrage de l’intégration entre les marchés
monétaire et obligataire.
95
Ce fut le développement des pétrodollars.
Montbrial T. (de), RAMSES 1985-1986 « Le monde déchiffré », IFRI
97
La première FRN a été émise en 1970, proposée sur le marché par Bankers Trust International et S.G.
Warburg. Plus tard, des FRN ont été émises mais, fin 1986, une crise sur les FRN ont donné l’occasion aux
obligations hybrides de les supplanter. Grabbe J.O., International Financial Markets, Elsevier 1991
98
LIBOR : London Interbank Offered Rate, taux offert à Londres par des banques de premier rang sur les dépôts
en eurodollars à six mois, taux prêteur ;
LIBID : London Interbank Bid Rate, taux emprunteur sur Londres ;
LIMEAN : taux moyen interbancaire à Londres – moyenne entre Libor et Libid.
96
44
L’attrait des obligations à taux variable réside dans leur liquidité (assurée par un marché
secondaire particulièrement actif) et leur qualité de signature, apportant un substitut, ou un
complément, de financement aux banques par rapport au marché interbancaire, et une
possibilité de spéculer sur la volatilité des taux aux investisseurs. Le phénomène de
refinancement des banques commerciales via ces obligations a préfiguré la mobiliérisation de
l’économie.
Une autre avancée substantielle est le développement des obligations à option ; l’option peut
porter sur la durée (remboursement anticipé ou prolongation de l’obligation 99), ou la monnaie
100
permettant à l’obligataire de choisir une ou plusieurs monnaies pour se faire régler les flux
(intérêts et/ou remboursement) ; il peut s’agir enfin d’obligation à warrant, c’est-à-dire avec la
possibilité d’acquérir d’autres obligations, des actions ou d’autres supports (or, …) dans des
conditions prédéterminées lors de l’émission du premier emprunt. Existantes depuis les
années vingt aux Etats-Unis, apparues sur l’euromarché dans les années soixante, les
obligations à bons de souscription d’actions ont été fortement sollicitées par les émetteurs à
partir de 1980 101. Les premières obligations à bons de souscription d’obligations sont nées en
1983, les obligations à taux zéro l’ayant été sur l’euromarché en 1981 (peu de temps après
avoir été créées aux Etats-Unis).
Enfin, les swaps sur taux et devises, permettant un échange de termes d’une obligation, ont
été introduits sur l’euromarché en 1981, pour atteindre un paroxysme en 1984, alors que plus
des trois-quarts des euro-obligations étaient assortis de swaps. L’engouement des émetteurs
pour cette technique réside dans le fait qu’ils peuvent accéder à tous les compartiments des
marchés de capitaux.
Les produits nouvellement créés dans les années soixante et le développement induit de
l’euromarché ont incité les grandes places financières à assouplir leurs réglementations.
99
On distingue les « put options » donnant la possibilité à l’investisseur de se faire rembourser par anticipation et
les « call options » ouvrant la possibilité à l’émetteur de rembourser ses titres par anticipation. Le premier type
d’obligation est un produit d’anticipation à la hausse des taux, l’investisseur exercera en effet la clause de
remboursement anticipé s’il y a hausse de taux (pour se placer sur un produit plus rémunérateur). Le second type
est un produit d’anticipation à la baisse des taux pour l’emprunteur qui profitera de ladite baisse en annulant son
emprunt actuel pour refinancer à un taux plus favorable.
100
La formule de « currency linked bond » a été utilisée avant 1970 mais s’est développée sur l’euromarché
dans les années soixante-dix lors des périodes d’instabilité monétaire. Les monnaies étaient essentiellement le
Deutsche Mark et la Livre Sterling puis, à partir de 1980, le Dollar, le Yen ou le Franc Suisse.
101
En 1983, les obligations à warrants représentaient 12% du marché euro-obligataire.
45
La déréglementation
102
et la libéralisation des marchés de capitaux ont démarré aux Etats-
Unis, mais les autres places financières ont ensuite suivi ce mouvement.
En effet, dans un monde de plus en plus ouvert, l’abolition progressive des contrôles des
changes et la réduction des coûts de transaction ont offert la possibilité aux opérateurs de
marché d’arbitrer entre les places selon leur degré de réglementation. En conséquence, les
systèmes financiers ont convergé vers les pratiques de l’euromarché, conduisant à une
certaine homogénéisation structurelle et institutionnelle.
Métais 103, qui développe cette thèse, relève quelques exemples de traits communs :
-
la généralisation de la suppression des plafonds de taux d’intérêt créditeurs sur les dépôts
bancaires,
-
la libéralisation des procédures d’émission sur les marchés obligataires (suppression des
calendriers, introduction des méthodes d’adjudication, élargissement de la gamme des
échéances disponibles, allégement de la fiscalité),
-
la réforme du fonctionnement des bourses de valeurs.
Dautresme
104
fait état de quatre phénomènes dominants qui ont mené à la déréglementation
bancaire et financière :
-
la cherté et l’instabilité des taux d’intérêt, liées à une montée de l’inflation dans le monde
depuis le premier choc pétrolier,
-
l’application, aux opérations financières, des progrès technologiques dans l’informatique
et les télécommunications,
-
l’accroissement des mouvements internationaux de capitaux entre les pays industriels
depuis 1973, avec le flottement général des taux de change,
102
On a souvent associé déréglementation et dérégulation, pourtant ces termes sont quelques peu différents : la
déréglementation est un changement de règles et des politiques officielles dans un secteur, profond certes, mais
qui n’affecte pas l’essence de celui-ci. La dérégulation est un mouvement systémique qui ébranle les fondements
mêmes des domaines qu’il embrasse. Ce qui s’est passé dans le secteur bancaire aux Etats-Unis est d’abord une
déréglementation, mais celle-ci a débouché sur une dérégulation. La déréglementation relève de la finance
légale, la dérégulation de la finance réelle.
Goldfinger C., La géofinance – Pour comprendre la mutation financière, Seuil 1986
Au demeurant, selon Jacquet (Jacquet P., Les principales étapes de la mondialisation financière, Problèmes
Economiques, juin 2000), le terme « déréglementation » n’est pas approprié pour décrire l’évolution observée. Il
s’agit davantage d’une adaptation de la réglementation existante qui conduit à éliminer certaines
réglementations, que la concurrence et l’innovation rendent coûteuses ou désuètes, et à les remplacer par d’autres
réglementations plus efficaces.
103
Métais J., Aspects contemporains des marchés de capitaux, Revue d’Economie Financière n°15, hiver 1990
104
Dautresme D., Economie et marchés de capitaux, Banque Editeur 1985
46
-
l’augmentation des déficits du secteur public, se traduisant par des émissions
considérables d’obligations d’Etats, ce qui a stimulé le développement de marchés libres
dans le système financier.
Selon le même auteur, ces mutations ont alors rendu impossibles à respecter les quatre
contraintes pesant sur le système financier, à savoir :
•
la réglementation des taux d’intérêt servis sur les instruments offerts par les intermédiaires
financiers,
•
la stricte distinction légale entre l’activité bancaire et les opérations sur titres,
•
les réserves obligatoires élevées, non ou peu rémunérées, assises sur certains éléments du
passif des institutions financières,
•
le contrôle des changes et autres réglementations qui ont établi une séparation entre les
marchés financiers internationaux et les marchés financiers domestiques.
La demande et l’offre de capitaux sur les marchés financiers se présentent comme précisé
dans le schéma 2.
47
Schéma 2 : Etat synoptique des emplois et des ressources
sur les marchés financiers internationaux 105
DEPOSANT
Offre de capitaux
Dépôts en
eurodevises
Demande de capitaux
Euro-banque
Intermédiaires
financiers
=
Transformation
bancaire
Crédits en
eurodevises à court
terme et eurocrédits
INVESTISSEUR
Achat de
titres
financiers
Placement des
titres financiers
Placement
limité et non
garanti
Marché
des
euro-devises
Lignes de crédit si
appel de garantie
Euro-banque
Intermédiaires
financiers
=
Entreprises et
institutions
empruntant en eurodevises
Entreprises, institutions
émettant des facilités
d’émissions garanties
Emissions
des titres
financiers
Entreprises, institutions
émettant des facilités
d’émissions non
garanties
Marché des
émissions
internationales
Entreprises, institutions
émettant des euroobligations
Entreprises émettant des
euro-actions
Entreprises, institutions
émettant des obligations
étrangères
Marché des
Obligations
étrangères
2.2 Les marchés financiers nationaux et leur évolution
2.2.1 L’amorce de la déréglementation aux Etats-Unis
Au dix-neuvième siècle
106
, les banques et les compagnies d’assurance ont joué un rôle
fondamental dans le développement des marchés financiers en orientant l’épargne des
105
106
Fontaine P., Hamet J., Les marchés financiers internationaux, PUF Que sais-je? 2003
On notera, parmi l’histoire du New York Stock Exchange, les principales avancées au cours des siècles :
48
ménages vers le financement des entreprises ; les banques par leur rôle d’intermédiation, les
compagnies d’assurance en plaçant directement l’épargne issue de leur clientèle.
Cependant, la crise boursière et bancaire de 1929, et la récession qui l’a suivie provoquèrent
la disparition de nombreuses banques et incitèrent le congrès américain à mettre en place un
cadre réglementaire rigoureux. Ce furent la « réglementation Q » et le « Glass steagall act »,
mesures prises pour assurer une plus grande sécurité aux marchés.
La « réglementation Q » (plafonds en matière de rémunération des dépôts auprès des banques
– 3% pour les comptes d’épargne) limitait les banques dans leur capacité à capter l’épargne, et
le « Glass steagall act » (séparation des banques d’affaires et des banques commerciales) les
freinait dans la course internationale à la compétitivité les empêchant d’atteindre une taille
optimale
107
. Il fallut attendre les années quatre-vingts, années de déréglementation
généralisée dans l’industrie pour que la réglementation Q soit totalement abolie et l’année
2000 pour que le « Glass Steagall Act » connaisse la même évolution.
Parallèlement
108
, dès les années soixante-dix
109
, et plus fortement dans les années quatre-
vingts, les marchés financiers ont eux-mêmes changé. Les marchés standardisés à terme et
d’options sur contrats financiers ont démarré en 1972 avec les premiers futures sur devises
proposés sur l’International Monetary Market. Parallèlement, le premier swap de devises a
été traité dans les années soixante pour des entreprises britanniques bloquées par le contrôle
des changes (les opérations de swaps ont ensuite été adaptées aux taux). Ces instruments ont
ainsi permis la croissance exponentielle des marchés à terme réglementés et OTC – over the
counter.
En 1971, le Nasdaq – National Association of Securities Dealers and Automatic Quotation, a
été créé, premier marché électronique au monde. Son objectif était d’offrir un moyen de
financement par le marché boursier aux petites entreprises à forte croissance. Cet objectif a
- 1792 : Buttonwood agreement,
- 1817 : établissement d’un cours le matin et d’un autre cours l’après-midi,
- 1863 : nouvelle appellation de la bourse NYSE
- 1867 : mise en place du stock-ticker
- 1869 : début de la cotation en continu et démarrage de l’activité des « specialists »
- 1873 : séance boursière de 10 à 15 heures
- 1878 : premier téléphone sur le parquet
- 1915 : cotation en dollar (auparavant cotation en pourcentage du nominal) …
Source : Hamon J., Marchés d’actions Architecture et microstructure, Economica 1995
107
Karyotis C., Circulation internationale des valeurs mobilière, Banque Editeur 1994
108
Allen F., Santomero A. M., The theory of financial intermediation, Journal of Banking and Finance, 1998
109
Notons, cependant, que quelques prémices aux innovations et à la libéralisation des marchés sont apparues
aux Etats-Unis dès les années soixante :
- le grand débat relatif à la négociabilité des commissions sur le Nyse remonte à ces années soixante (Geisst
C.R., Wall Street – A history, Oxford University Press 1997)
- les premiers certificats de dépôts sont apparus aux Etats-Unis en 1961
49
très vite été dépassé, et il est devenu un marché de référence internationale pour l’ensemble
des entreprises. Sa spécificité tient à plusieurs facteurs. C’est un marché délocalisé, dirigé par
les prix, et reposant sur une organisation autorégulée différente des marchés traditionnels, la
NASD (National Association of securities dealers).110
Les innovations de ces trois dernières décennies sur les marchés de capitaux sont donc
nombreuses : options, contrats de futures, swaps de devises et de taux, opérations de
titrisation, création de nouveaux types d’obligations (taux variable), développement de
produits synthétiques, explosion du « commercial paper » …
Et la réglementation financière et boursière s’est également adaptée : libéralisation des
courtages aux Etats-Unis dès 1975, rémunération des comptes courants …
♦ Aperçu d’une chronologie de la période de déréglementation aux Etats-Unis :
1974 : émission de la première obligation à taux variable (par Citibank),
mai 1975 : libéralisation des commissions de courtage en valeurs mobilières,
mai 1978 : création des money markets certificates, nouveaux produits diffusés par tous
les organismes collecteurs de dépôts (durée limitée à 26 semaines, souscription minimale
de 100 000 $, taux équivalents à ceux des bons du Trésor),
Loi bancaire du 31 mars 1980 – Depository institutions deregulation and monetary
control act : celle-ci prévoyait l’abolition de la réglementation Q étalée sur 6 ans et des
lois sur les taux d’intérêt usuraires, et autorisait la création de comptes courants à
rémunération plafonnée, sur le modèle des comptes NOW
111
qui seront ensuite
généralisés à l’ensemble du pays. Ces comptes NOW – Negotiable order of withdrawal
procurent aux épargnants des intérêts sur un compte pratiquement assimilable à un compte
de dépôt à vue ordinaire 112. Cette loi a étendu le système des réserves obligatoires à toutes
les banques commerciales et institutions d’épargne, jusqu’alors réservé aux banques de la
réserve fédérale.
110
Karyotis C., Cherif M., Nasdaq : Le marché phare des entreprises high-tech, Techniques financières et
développement, juin - septembre 2000
111
Les premiers comptes Now ont été créés, dès 1972, par l’Etat de la Nouvelle Angleterre
112
Métais J., Szymczak P., Les mutations du système financier français – innovations et déréglementation, La
Documentation Française 1986
50
Ultérieurement, le régime des réserves obligatoires a été assoupli. Le taux maximum des
réserves sur les dépôts à vue est passé de 16.25% à 12%, tandis que les réserves sur les
dépôts à terme et d’épargne des particuliers étaient supprimées ainsi que celles sur les
dépôts à terme des entreprises à plus de dix-huit mois. Ce changement d’attitude était
fondé sur la prise de conscience que les réserves obligatoires, en pesant sur le compte
d’exploitation des banques, n’agissaient non tant sur l’offre de crédit que sur la demande
de crédit, par un effet prix 113.
Avril 1982 : les autorités boursières autorisent le recours à la technique du « Bought
Deal »
114
, permettant aux emprunteurs de tirer parti de l’évolution des conditions de
marché.
Loi Garn – Saint Germain d’octobre 1982 : menant à une déréglementation des taux
d’intérêt, cette loi est venue compléter la loi bancaire de 1980 en permettant aux banques
d’offrir des money market deposit accounts (à l’instar des money markets funds proposés
par les maisons de courtage et permettant de tirer des chèques),
1984 : élimination de la retenue à la source de 30% sur les intérêts d’obligations souscrites
par les étrangers,
Avril 1986 : libéralisation des taux d’intérêt créditeurs,
1987 : les filiales non bancaires des banques sont autorisées à se livrer à des activités
boursières à condition que les recettes tirées ne dépassent pas 5% (10% en 1989) du
chiffre d’affaires total de ces filiales,
1989 : cinq sociétés holding de banques américaines sont autorisées à souscrire des
émissions de titres et à se livrer au courtage de valeurs mobilières,
1990 : trois banques étrangères sont habilitées à souscrire des émissions de titres et à se
livrer au courtage de valeurs mobilières selon un régime de traitement national,
Aussi, la déréglementation fut-elle progressive aux Etats-Unis ; la capitalisation boursière des
actions est passée, en vingt ans (1975 / 1995), de la moitié à 80 % du produit national brut
américain. Elle fut, en tout état de cause, un catalyseur pour les autres places financières.
113
Bruneel D., Marchés de capitaux : dé- ou re-réglementation, Revue d’Economie Financière n°5/6, juin –
septembre 1988
114
Technique selon laquelle les banques soumissionnent pour la prise ferme d’un emprunt. Celle(s) qui
l’emporte (ent) prend (prennent) à son (leur) actif les titres (dans leur totalité ou pour un pourcentage donné) en
espérant les revendre le plus vite possible en réalisant un profit.
51
2.2.2 Le « Big Bang » à Londres
Face aux évolutions de ses deux principales concurrentes, les places de New York et de
Tokyo
115
, Londres décida de faire exploser son espace boursier, figé sur certains points
depuis deux siècles. La concurrence de New York pour Londres devenait de plus en plus
exacerbée : les portefeuilles commençaient en effet à s’internationaliser et certaines
transactions se détournaient progressivement de Londres au profit de New York, en partie
parce que les négociations de blocs étaient plus aisées et moins coûteuses outre-atlantique.
Les professionnels ont nommé ce phénomène le « big bang », intervenu le 27 octobre 1986.
La première phase de déréglementation débuta en mars 1986, ce fut l’ouverture de la bourse
aux non-résidents, par le biais de prises de participation dans le capital des établissements
boursiers britanniques. Auparavant, les non-résidents étaient autorisés à ne détenir qu’au plus
29,9 % d’un établissement britannique ; à partir de mars 1986, la participation put atteindre
100 % (les premiers à se positionner furent Merill Lynch et Nomura Securities).
La deuxième phase de déréglementation fut l’abandon de la distinction entre « jobbers » et
« brokers » ; le premier était un contrepartiste traditionnel (marchand de titres en gros), le
second un agent de change. Depuis 1986, les intermédiaires et les agents de change ont opté
pour le statut de « market maker », autorisés à passer des opérations pour le compte de leur
clientèle mais également pour leur propre compte.
La troisième phase fut la libéralisation des courtages, qui fut un corollaire à la disparition des
« jobbers » et « brokers » dont la coexistence était liée aux commissions fixes pour les agents
de change et à des écarts potentiels de cours pour les contrepartistes (évitant de facto toute
concurrence entre eux).
115
En 1984, un accord américano-japonais était signé. Il reposait sur quatre volets :
1er avril 1984 : la levée des restrictions sur les opérations de change à terme est promulguée ; 1er juin 1984 :
les restrictions imposées par les autorités sur la faculté des banques de convertir leurs devises en yen dans le
cadre d’opérations croisées sont levées …
- 1er décembre 1984 : les collectivités publiques et les sociétés étrangères (notées «AAA») peuvent émettre
sans garantie des obligations sur le marché de l’euro-yen ; les banques étrangères peuvent être chefs de file
sur les émissions d’euro-obligations en yen ; les banques japonaises peuvent émettre des certificats de dépôt
hors du Japon …
- avril 1985 : les banques peuvent proposer des certificats de marché monétaire d’un montant minimal de 50
millions de yens dont la rémunération est liée à l’évolution des taux du marché (déréglementation des taux
d’intérêt) …
- fin 1985 : les institutions étrangères peuvent intervenir dans la gestion des fonds de pensions japonais ;
l’accès à la Bourse de Tokyo est élargi aux institutions étrangères ; les restrictions sur achats de valeurs
mobilières japonaises par les non-résidents sont supprimées …
-
52
Enfin, le parquet (floor) disparut. La Bourse de Londres a laissé la place à un système
informatique assurant l’acheminement des transactions et la cotation des valeurs, via le SEAQ
– Stock Exchange Automated Quotation. Toutes les opérations étaient délocalisées, se
réalisant sur écran, avec des informations diffusées en temps réel.
En parallèle, les pouvoirs publics instaurèrent des « self regulatory organisations » pour le
contrôle des marchés, sous la tutelle du SIB – Securities and investment Board.
Si de nombreux changements sont intervenus à Londres sur une très courte période en octobre
1986 :
-
une nouvelle réglementation,
-
le développement d’une véritable bourse internationale 116,
-
l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché,
-
des opérations de fusions entre intermédiaires financiers,
-
la liberté des courtages,
-
un nouveau système de cotation assis sur un mécanisme nouveau de négociation,
-
la suppression du parquet au profit d’un réseau d’écrans,
cependant, peu d’efforts ont été destinés à l’amélioration de l’efficience technique et
technologique des opérations de règlement-livraison de titres. En conséquence, les cellules de
back-office des intermédiaires sont restées dans l’incapacité de faire face à la croissance des
activités de front office, conduisant à des risques de suspens colossaux, allant parfois jusqu’à
limiter l’activité de trading de certains établissements 117.
Rappelons, à ce sujet, qu’un projet de très grande ampleur, Taurus, aurait du aboutir dans les
années quatre-vingt-dix. Ce dernier aurait du offrir à la Place de Londres une
dématérialisation des titres et une refonte des procédures de règlement-livraison (le projet
était important, de taille gigantesque, parce que menant de front deux réformes de grande
RAMSES 1985-1986 « Le monde déchiffré », IFRI
116
Trois facteurs essentiels sont nécessaires au développement d’une place financière internationale:
• une économie puissante et une épargne locale abondante,
• une devise solide, si possible jouant un rôle de réserve internationale,
• une tradition d’intermédiaire financier et de liberté des transactions (aptitude à émettre et à négocier n’importe
quelle somme d’argent, capacité à faire fonctionner un grand nombre de marchés avec des produits très
différenciés, possibilité d’effectuer des transactions de façon continue et instantanée, coûts de transaction très
faibles).
Fourçans A., Hubert V., Pene D., Paris : La grande place financière internationale de demain ?, La Revue
Banque n°472, mai 1987
117
Hayter G.A., Telecommunications and the restructuring of the securities markets, in Globalization,
technology and competition : The fusion of the computers and telecommunication in the 1990s, Harvard
Business School Press 1993
53
envergure). En mars 1993, les autorités boursières londoniennes annonçaient l’abandon du
projet, laissant ainsi une longueur d’avance à Paris !
2.2.3 Les réformes de la Bourse de Paris 118
En une décennie seulement, la place parisienne a pu se prévaloir d’un rang international grâce
aux actions de place accompagnées des pouvoirs publics.
La mise en place d’un marché continu nécessitait de maîtriser les principes et techniques de
diffusion en temps réel des conditions de transactions mais également de développer les
activités de contrepartie et enfin d’horodater les ordres de bourse et de mettre au point un
système de routage des ordres et des réponses. La suppression de la dualité de cotation des
valeurs mobilières, marché au comptant et marché à terme, impliquait la création de marchés
dérivés. Enfin, une adaptation des tarifs des intermédiaires aux coûts ne pouvait s’engager que
progressivement pour finir par une liberté de fixation des prix. Globalement, l’ensemble des
propositions de la Commission Pérouse 119 fut retenu et mis en œuvre.
L’innovation en matière de valeurs mobilières
La loi du 3 janvier 1983 permit la création de nouveaux supports pour les émetteurs sur le
marché des fonds propres : Les entreprises publiques purent faire appel public à l’épargne en
émettant des certificats d’investissement ; parallèlement, les entreprises privées purent
accroître leurs capitaux propres, sans entraîner la dilution de leur capital, en émettant des
actions à dividende prioritaire sans droit de vote.
Le marché des capitaux d’emprunt bénéficia également d’innovations. Pendant longtemps, le
seul support obligataire était celui des obligations à taux fixe. En 1974, les émetteurs ont pu
118
Karyotis C., Circulation internationale des valeurs mobilières, Banque Editeur 1994
Recommandations de la Commission Pérouse :
« • Améliorer le fonctionnement du marché secondaire :
- supprimer la dualité de cotation, coûteuse et génératrice d’anomalies,
- autoriser la cotation d’options,
- étendre, dans le temps, l’activité du marché en le rendant « continu »,
- étendre simultanément le marché dans l’espace en recourant aux techniques modernes pour assurer la
diffusion des informations.
• Conduire à leur terme les améliorations, déjà introduites depuis quelques années, dans les modalités de la
conservation des titres, en dématérialisant progressivement les valeurs mobilières.
119
54
opter pour des taux variables ou révisables. En 1981, les premières obligations à coupon zéro
furent proposées aux investisseurs, particulièrement intéressantes parce qu’elles permettent
d’éviter l’inconnu en matière de réinvestissement des flux. Depuis lors, il est même possible
de démembrer des obligations existantes en autant de coupons zéros qu’il existe de flux de
capital et d’intérêts.
Des valeurs mobilières à caractère hybride apparurent également, ce furent les obligations
convertibles à tout moment, les obligations remboursables en actions ou les obligations à bons
de souscription d’actions…
En 1986, l’Etat proposa des obligations assimilables du Trésor qui furent le fleuron de la
modernisation de la place de Paris et proposa, en parallèle, un marché gouverné par les prix
sur ces valeurs, animé par les spécialistes en valeurs du Trésor, dont le statut est celui de
market maker.
En 1988, la société Rhône Poulenc lança la première émission de titres subordonnés à durée
indéterminée, et la loi du 23 décembre de la même année instaura les fonds communs de
créances, véhicule de la titrisation des créances bancaires.
Depuis cette époque, le marché financier français offre une gamme étendue de produits, à la
fois aux émetteurs recherchant de plus en plus de financements désintermédiés, et aux
investisseurs en quête de produits diversifiés et rémunérateurs.
L’unification des marchés de capitaux
Dès la suppression de l’encadrement du crédit, la banque centrale devait pouvoir bénéficier
d’une gamme d’échéances suffisamment profonde pour mener à bien sa politique monétaire
par les taux. En conséquence, le marché monétaire fut réformé, en créant les titres de créances
négociables 120 ouverts à tous, par une loi du 14 décembre 1985.
Grâce à la création du marché des titres de créances négociables, les marchés des capitaux
vont désormais du plus court terme (un jour) au plus long terme, sans rupture. La place
• Inciter les intermédiaires à se montrer plus actifs dans la commercialisation des valeurs mobilières, grâce
notamment à une meilleure adaptation de leurs tarifs. », Lettre de M. Pérouse adressée au ministre de
l’Economie le 11 septembre 1980.
120
Parmi les titres de créances négociables, on trouve :
- les bons du Trésor émis par l’Etat (BTF et BTAN),
- les billets de trésorerie (1 jour à 1 an) émis par les entreprises,
- les certificats de dépôt négociables (1 jour à 2 ans) émis par les établissements de crédit,
- les bons à moyen terme négociables (supérieurs à 1an).
55
financière française offre ainsi à ses agents économiques un marché de capitaux totalement
unifié.
L’ouverture de marchés dérivés
La loi du 11 juillet 1985 a créé le Matif (marché à terme international de France). Il ouvrit le
20 février 1986 en offrant un contrat notionnel (emprunt fictif représentatif d’emprunts de
l’Etat français) et rapidement d’autres contrats furent offerts aux opérateurs désirant se
couvrir contre les variations de taux.
Le 10 septembre 1987, le Monep (marché des options négociables de Paris) offrit des
instruments de couverture aux gestionnaires de portefeuille.
Le développement de l’activité de contrepartie
Le régime des contreparties, créé en 1973, a été assoupli en 1985, en distinguant 121 :
•
les contreparties en régularisation de marché, où l’agent de change s’engage à se porter
contrepartie, en contre – tendance du marché jusqu’à un certain montant,
•
les contreparties en développement de marché ouvertes aux agents de change, aux
banques et aux sociétés de contrepartie décrites dans deux types de comptes : les comptes
Y pour la contrepartie en avance sur le client et les comptes Z pour la contrepartie en
avance sur le marché.
L’informatisation de la Bourse
L’année 1986 marqua le début de l’informatisation de la Bourse de Paris grâce à une séance
du matin permettant une actualisation des cours des valeurs les plus actives du marché à
Règlement mensuel 122. Puis un système informatique de cotation fut mis au point, le système
CAC (Cotation Assistée en Continu), sur l’exemple du système installé en Bourse de Toronto.
Depuis lors, la Bourse est totalement informatisée : l’ordre entre dans le processus via le
réseau de collecte des ordres, est routé vers le carnet d’ordres du négociateur, pour aboutir
121
Mentré (Le rapport), juillet 1986
Conformément aux principes de l’unification des marchés de capitaux européens, le marché à Règlement
mensuel a disparu en Bourse de Paris le 25 septembre 2000, au profit d’un marché au comptant généralisé ;
cependant le législateur a permis que certaines valeurs soient éligibles au Service à Règlement Différé,
permettant aux investisseurs de bénéficier d’un dénouement de leurs ordres en fin de mois boursier.
122
56
dans les machines de cotation du marché centralisé et être exécuté en bourse ; ses conditions
d’exécution sont ensuite retransmises au donneur d’ordre et ledit ordre sera dénoué trois jours
plus tard.
Globalement, la logique du temps réel est respectée, en concordance avec celle d’un marché
continu, les outils étant des ordinateurs en réseau.
La naissance des sociétés de bourse
La loi du 22 janvier 1988 créa de nouvelles structures boursières en « cassant » le monopole
des agents de change : le capital des ex-charges d’agents de change fut progressivement
ouvert aux intermédiaires financiers, donnant naissance aux sociétés de bourse, habilitées
alors à réaliser des opérations pour compte de tiers et pour compte propre.
Depuis la loi du 2 juillet 1996, mise en application de la directive européenne des services
d’investissement, les sociétés de bourse sont des entreprises d’investissement 123 et ont perdu,
en 1999, leur monopole de négociation en bourse.
La bascule de la bourse de Paris sera ensuite complétée par une réforme des procédures de
règlement-livraison de titres avec la mise en place des systèmes Relit et RGV.
In fine, Paris a pu se prévaloir d’un rang international grâce à ces réformes qui lui ont permis
de faire apparaître dix points forts 124 :
-
la dématérialisation des titres,
-
la simplification et la sécurité de la circulation des titres,
-
l’existence d’un dépositaire central,
-
le système de négociation et de cotation en continu,
-
le système de diffusion numérique par satellite,
-
le système de règlement-livraison simultané avec un délai de place,
123
Une entreprise d’investissement peut :
- recevoir et transmettre des ordres pour le compte de tiers,
- négocier pour compte propre ou pour compte de tiers,
- gérer des portefeuilles pour compte de tiers,
- faire du placement (garanti et prise ferme).
Dans cette catégorie, on retrouve, à Paris, les sociétés de bourse, les agents du marché interbancaire et les
sociétés de gestion.
Source : Karyotis C., La place financière de Paris, 2ème Edition, Banque Editeur 2001
124
Conseil National du Crédit, Rapport « Evaluation technologique du système financier français », octobre
1991
Pour l’explication de certains concepts, le lecteur se reportera aux chapitres ultérieurs.
57
-
une bonne transparence du marché lié au mariage des ordres qui permet une diffusion
automatique et immédiate de la négociation qui en résulte,
-
l’existence d’une chambre de compensation et le système de garantie de bonne fin sur le
marché (ISB) permettant de faire cohabiter des négociateurs de surfaces financières
différentes,
-
une facilité d’accès pour de nouveaux émetteurs (Second Marché),
-
les marchés dérivés (Matif, Monep).
Pour clore ce développement relatif à la déréglementation, nous préciserons que, selon nous,
l’apothéose de la déréglementation s’illustre par la privatisation des bourses elles-mêmes. Dès
1993, les Bourses de Stockholm et de Sidney innovaient en la matière en présentant leurs
propres actions à l’appel public à l’épargne. Depuis, d’autres ont suivi en Europe : Milan,
Francfort, Paris et autre Londres … Et fin 2003, le dépositaire central norvégien VPS
annonçait sa future privatisation.
Les bourses ont opté, au fil des années, pour des statuts différents, comme présenté dans le
graphique 1.
Graphique 1 : statuts des bourses en 2002
associations
20%
privatisées
30%
cotées
20%
autres
12%
sociétés
anonymes
18%
Source : Gallai L., Cost and revenu survey 2002,
World Federation of Exchanges, August 2003
58
2.3 Le phénomène de mondialisation de la finance
Il est parfois difficile de distinguer la mondialisation de l’internationalisation et de la
globalisation.
Veltz
125
distingue la mondialisation (processus d’ouverture des espaces économiques,
mesurée par les investissements directs à l’étranger) de la globalisation ; celle-ci relève, selon
lui, d’un concept stratégique qui valorise les interdépendances des positions géographiques
résultant de la diversité des demandes et des situations. Ladite stratégie prend alors des formes
organisationnelles qui assurent la coordination ne touchant pas forcément de manière
identique les différentes activités. La globalisation n’est pas la mise en place d’un réseau
d’unités substituables mais repose sur des concentrations privilégiées, les interactions à base
territoriale étant un facteur de performance essentiel.
Pour Sachwald 126, la mondialisation se caractérise par l’interaction de deux phénomènes. Le
premier est la mobilisation internationale des ressources : des facteurs de production
« nationaux », et jusque là relativement immobiles, malgré l’existence d’entreprises
multinationales, deviennent de plus en plus mobiles
127
; la seconde caractéristique de la
mondialisation est l’ampleur que prend le jeu concurrentiel. Et là, notons que les nations, et
donc les marchés financiers sont en concurrence. La mondialisation de l’économie ne
condamne pas les nations. Elle les met en compétition, en obligeant chacune d’entre elles à
faire de son mieux 128. Cette idée peut être, selon nous, étendue aux places financières.
Pour Govindarajan et Gupta
129
, la globalisation désigne l’interdépendance économique
croissante des pays telle qu’elle se reflète dans l’augmentation des flux transfrontaliers de
biens, de services, de capitaux et de savoir-faire. A cet égard, les auteurs notent qu’en 1970, le
volume des transactions transfrontalières en actions et obligations, en pourcentage du PIB,
était inférieur à 5 % aux Etats-Unis, en Allemagne et au Japon ; en 1996, ce volume atteignait
respectivement 152 %, 197 % et 83 % dans les trois pays concernés.
125
Cité dans Reich R., L’économie mondialisée, Dunod 1993
Sachwald F., Les défis de la mondialisation, innovation et concurrence, Masson 1994
127
La fluidité des capitaux a été favorisée à la fois par le jeu combiné des mutations technologiques et des
innovations financières, et par l’institutionnalisation de la gestion de l’épargne domestique (Opcvm en France,
fonds de pension chez les anglo-saxons).
Pébereau M., La globalisation financière et les marchés émergents, Universalis 1998
128
Guaino H., Le mythe de la mondialisation, Le monde, 24 mai 1996
126
59
Selon Castells
130
, Braudel
131
déjà parlait d’économie mondiale au seizième siècle en
Occident, dans laquelle l’accumulation du capital s’effectuait dans le monde entier ; mais une
économie globale est une économie capable de fonctionner comme unité en temps réel à
l’échelle planétaire. Ainsi c’est seulement depuis la fin du vingtième siècle que l’économie
mondiale est en mesure de devenir véritablement globale, grâce à l’infrastructure nouvelle
fournie par les technologies de l’information et de la communication. L’argent circule presque
instantanément entre les pays ; les capitaux et, par conséquent, l’épargne et l’investissement
sont liés les uns aux autres au niveau mondial, des banques aux fonds de retraite, en passant
par les bourses et les opérations de change.
La mondialisation de la finance constitue donc un phénomène plus radicalement nouveau que
l’intensification et la diversification des échanges.
La Banque des Règlements Internationaux
132
distingue les activités bancaires mondiales et
internationales : la principale différence entre ces deux types d’activités tient à la façon de
financer les actifs étrangers – créances sur des emprunteurs domiciliés hors du pays du siège.
Une banque internationale utilise les fonds provenant de son marché interne et une banque
mondiale des fonds collectés sur le marché étranger lui-même. Autrement dit, la première est
centrée sur des activités transfrontières, tandis que la seconde finance les emplois locaux par
des ressources locales 133.
La finance internationale, c’est à dire les flux de capitaux et les transactions financières
transfrontalières, existait déjà bien sur. Mais, au cours des années quatre-vingts, les opérations
internationales se sont multipliées très rapidement, en même temps qu’elles se sont
diversifiées : le stock des prêts bancaires internationaux (transfrontaliers et prêts en devises à
des nationaux) représentaient 4 % du produit national brut des pays de l’OCDE en 1980, et 44
129
Govindarajan V., Gupta A.K., Le nouveau paysage économique mondial, Guide de la Mondialisation – Les
Echos, Village Mondial 1999
130
Castells M., La société en réseaux – L’ère de l’information, Fayard 1998
131
Braudel F., Civilisation matérielle et capitalisme – XV et XVII èmes siècles, Armand Colin 1967
132
Banque des Règlements Internationaux, Rapport trimestriel, mars 2002
133
Cette distinction est illustrée par le cas d’une banque établie aux Etats-Unis et dont les actifs étrangers sont
constitués de prêts à des emprunteurs au Japon. Dans le cas d’une banque internationale, les fonds peuvent être
obtenus aux Etats-Unis (dépôts de résidents américains) puis prêtés au Japon, ou par le biais de fonds déposés
auprès d’une banque américaine par un résident japonais. Le caractère mondial a lieu d’être lorsque les fonds
sont reçus au Japon par la filiale nippone puis prêtés par cette filiale, ou lorsque les fonds sont directement versés
par le résident des Etats-Unis à la filiale nippone (c’est d’abord le déposant qui supporte le risque de transfert et
non la banque). Source : BRI, ib.
60
% en 1991, soit 17 trillions de dollars. Les transactions sur le marché des changes ont connu
également une formidable croissance, pour atteindre environ 900 milliards de dollars par jour
au début des années quatre-vingt dix. Les différentes places financières ont vu de plus en plus
d’intervenants étrangers participer à leurs opérations, les nombreuses opérations de croissance
externe transfrontalières ayant bien sûr alimenté ce phénomène. Aussi l’ensemble de ces
opérations a-t-il renforcé l’interdépendance entre les différentes places financières dont le
krach boursier d’octobre 1987 fut le symbole menaçant 134.
Haberer
135
qualifie de global un marché dès lors qu’il réunit les qualificatifs intersectoriel –
intermarché – multidevises – multi-crédits – multi-termes, et délimite ses contours par le fait
qu’un opérateur, pouvant disposer d’une signature internationalement reconnue, puisse se
procurer des capitaux dans la devise qu’il désire, quand il le désire et où il le désire.
Historiquement l’internationalisation des activités financières a connu trois périodes
successives, selon Laubier 136 :
Pendant les années cinquante et soixante, les banques ont accompagné leur clientèle nationale
dans des opérations à l’étranger, créant pour cela des filiales ad hoc. De la fin des années
soixante jusqu’au milieu des années soixante-dix, le marché des euromonnaies s’est
développé sous l’effet conjoint des restrictions réglementaires aux Etats-Unis (conduisant les
banques à solliciter les places étrangères pour trouver des fonds), et des excédents financiers
des pays producteurs de pétrole. Enfin, grâce aux innovations financières facilitées par la
déréglementation et la substitution des marchés de capitaux aux crédits bancaires comme
instruments de financement, un marché financier global s’est développé.
La globalisation des marchés de capitaux 137 a été amorcée par les entreprises multinationales
en quête d’une gestion globale de leur trésorerie, requise par les fluctuations des taux de
134
Aglietta et Brender relèvent qu’une étude systématique de la volatilité intrajournalière des cours de bourse à
Londres a relevé qu’il y avait, dans les semaines qui ont précédé le krach de 1987, trois pointes de volatilité :
l’ouverture (jusqu’à 9h45) pendant laquelle les nouvelles parvenues depuis la fin de la séance précédente
s’incorporent aux prix, le moment où les statistiques officielles britanniques sont habituellement publiées (11h15
– 11h45) et celui où Wall Street ouvre (14h30, heure de Londres). Cette étude ne permet pas, certes, d’expliquer
le krach en lui-même, mais la raison de sa propagation internationale.
Aglietta M., Brender A., Globalisation financière et risque de système, Cahiers Economiques et Monétaires
n°37, 1990
135
Haberer J.Y., La globalisation des marchés de capitaux, Revue d’Economie financière, septembre 1988
136
Laubier (de) D., Internationalisation des activités financières, Economie et Humanisme, septembre 1986
137
Haberer J.Y., La globalisation des marchés internationaux, Revue d’Economie Financière, septembre 1988
61
change et d’intérêt, les innovations financières et la déréglementation. Et le premier marché
global fut d’ailleurs l’euromarché.
Boissieu
138
précise que la globalisation financière a été renforcée par la diffusion rapide de
l’innovation financière. Pratiquement impossible à protéger par un dépôt de brevet, à la
différence de l’innovation industrielle, parce que d’imitation très aisée, l’innovation financière
s’est accélérée grâce à l’intégration des marchés de capitaux nationaux et internationaux, à
l’intervention des banques étrangères et à la nécessité, pour chaque grand pays, de maintenir
la compétitivité de son système financier.
Enfin, Bourguinat
139
aborde la globalisation financière au travers la « règle des trois D » :
décloisonnement, déréglementation, désintermédiation.
-
Décloisonnement : La condition nécessaire de la globalisation financière a été celle de
l’ouverture des marchés nationaux associée à l’éclatement des compartiments préexistants
sur lesdits marchés. On a assisté alors à la déspécialisation des activités, notamment aux
Etats-Unis avec des distinctions rendues de plus en plus floues entre les banques
commerciales et les “investment banks”.
-
Déréglementation : Aux Etats-Unis, les innovations financières ont été proposées presque
simultanément avec la nouvelle politique monétaire. Ensuite, elles se sont propagées sur
l’ensemble des grandes places financières. Ces nouveaux produits ont permis de gérer
l’instabilité des taux d’intérêt et de change et de passer d’un marché à un autre ou d’une
devise à une autre.
-
Désintermédiation par la titrisation : La titrisation
140
a permis aux banques de soustraire
du bilan le maximum de créances douteuses et de se faire intermédiaires pour les placer
auprès d’emprunteurs finals sous forme d’effets renouvelables.
Si aujourd’hui la déréglementation semble être à l’origine des graves problèmes rencontrés
sur les marchés financiers depuis l’année 2000, rappelons cependant qu’elle a été à l’origine
du développement de certains marchés : Le marché déréglementé de l’eurodollar, créé il y a
plus de trente ans, atteint plusieurs milliards de dollars sans avoir connu, au préalable
138
Boissieu (de) C., Revue Française d’Economie Vol. II,1, hiver 1987
Bourguinat H., Finance Internationale, Puf 1999
140
La titrisation consiste à placer des effets à court terme renouvelables et qui donne à l’emprunteur l’assurance
d’un financement a long terme, avec, le plus souvent, l’engagement par la banque de reprendre elle-même ce
papier si elle ne trouve pas acquéreur sur le marché. Bourguinat, id.
139
62
d’incidents majeurs. La stabilité d’un marché est davantage due aux régulateurs privés qu’aux
instances publiques. Avant que les régulateurs ne mettent sur pied des standards de capitaux
minimum ou de liquidités, les systèmes bancaires privés ont développé leurs propres systèmes
de clearing aux siècles derniers. De la même manière, les marchés OTC se sont développés de
façon exponentielle sans réglementation nationale 141.
La technologie a toujours imprimé sa marque sur la finance 142 : le développement des réseaux
bancaires en Angleterre a été facilité par l’essor du chemin de fer dès le milieu du dixneuvième siècle, et les transactions financières internationales se sont multipliées après la
pose de câbles sous-marins à travers la Manche puis l’Atlantique vers 1860. Après le
téléphone, le télex puis les réseaux informatiques, l’utilisation internationale du fax et du
courrier électronique donne une impulsion nouvelle aux transactions internationales. En
conséquence les marchés monétaires sont déjà mondiaux et le marché des actions le devient.
Plus récemment, les progrès techniques dans la banque ont amené un développement en trois
phases 143:
-
l’automatisation des grands processus de production a permis la bancarisation des
économies avec les traitements de masse gérés par les systèmes informatiques batchs,
-
l’introduction des ordinateurs personnels, dans les années quatre-vingts, et de la gestion en
base de données ont permis la création des énormes réseaux et plate – formes techniques
de gestion des échanges ; c’est alors que se sont créés les gros systèmes interbancaires de
règlement et de livraison qui ont consacré la marchéisation totale des économies et ont
accru la vitesse de transmission des informations et des flux,
-
le développement des réseaux et de l’Internet.
A titre d’exemple, ces techniques ont induit des progrès de productivité dans les flux des
moyens de paiement : 13 % par an en moyenne, sur les six dernières années, à la Société
Générale.
Depuis les années quatre-vingt-dix, les ordinateurs ne fonctionnent plus seuls mais en réseau,
amenant un changement du système technologique avec des interactions sociales et
141
Kroszner R.S., The role of private regulation in maintening global financial stability, CATO Journal, Winter
1999
142
Rose H., La métamorphose du monde de la finance in Art du Management, Village Mondial 1997
143
Bouton D., Institutions financières et canaux de transmission de la politique monétaire, Banque de France –
Colloque : Nouvelles technologie et politique monétaire, Novembre 2001
63
organisationnelles. Ainsi le coût moyen du traitement de l’information serait-il passé de 75 $
par million d’opérations en 1960 à moins d’un centième de cent en 1990
ans seulement, le coût des ordinateurs a été divisé par 1 900
145
144
. Et, en quarante
!
Les progrès de la technologie et le développement des nouveaux instruments financiers ont
conduit à la création d’un marché mondial de capitaux. Horizontalement, les réseaux
internationaux de communication (Swift, Reuter …) ont permis l’interconnexion, en temps
réel, des différents marchés nationaux. Verticalement (entre compartiments), les courroies de
transmission, telles les swaps ou les arbitrages, se sont mises en place et ont fait de chaque
marché particulier (marché monétaire, marché des changes, marchés à terme) autant de
compartiments dépendants d’un marché unifié à l’échelle du monde 146.
Si autrefois il était possible de localiser les places financières de façon tangible, aujourd’hui,
cette notion n’est plus valable depuis la globalisation des marchés. Les transactions peuvent,
en effet, être effectuées sans nécessaire concentration géographique
147
: négociation à
Londres, dénouement à Paris, gestion des titres chez un dépositaire international, traitement
des opérations comptable en mode délocalisé.
Aujourd’hui 148, les réseaux électroniques de transactions fonctionnent 24 heures sur 24 entre
New York, Londres, Tokyo et Bonn, transformant la notion même de bourse « nationale ».
Des courtiers étrangers sont membres de bourses domestiques. Et d’ici quelques années, une
seule chambre de compensation mondiale pourrait traiter toutes les actions échangées au
niveau international, ce qui provoquerait un accroissement supplémentaire des placements à
travers les frontières.
144
Castells M., La société en réseaux – L’ère de l’information, Fayard 1998
Price of computers and peripherical equipment relative GDP deflator (Year 2000 = 1000) :
1960 : 1 869 004
1970 : 199 983
1980 :
27 938
1990 :
7 275
2000 :
1 000
Gehrig B., Economic Environment Future flows, International securities services association, The New
Securities Lanscape, 11th International Symposium, June 2002
146
Bourguinat H., Investissement direct étranger et globalisation financière, Colloque organisé par la revue
Eurépargne en septembre 1990.
147
Hannoun H., Places financières et banques centrales, Revue d’Economie Financière, mars 2000
148
Reich R., L’économie mondialisée, Dunod 1993
145
64
Face à ce phénomène de mondialisation, toutes les grandes places sont confrontées à des
identiques problèmes 149 :
le statut de leurs intermédiaires,
l’efficacité de leur système de cotation,
la sécurité des transactions,
l’efficience technique de leur système de règlement-livraison de titres,
la diversité des produits proposés aux agents économiques.
Depuis une vingtaine d’années, la maîtrise des coûts est devenue un objectif primordial. A
cette fin, il convient de raccourcir au maximum le délai entre les opérations conclues sur le
marché et leur contrôle, enregistrement et règlement. La logique est devenue celle du temps
réel. Un risque administratif est source de conséquences coûteuses en termes financiers mais,
également, en termes d’image commerciale, la sécurité des transactions est devenue
indispensable et la fonction administrative de back-office tend à se rapprocher d’une fonction
d’aiguillage de flux normalisés et sécurisés vers des centres internationaux 150.
Enfin, nous conclurons notre réflexion sur la globalisation des marchés financiers en
appliquant les cinq caractéristiques d’une industrie globale (déterminée par Porter et al.
151
)
aux places financières et, tout particulièrement, aux systèmes de règlement-livraison :
-
un niveau élevé de dépenses en recherche et développement (à titre d’exemple, la mise en
place et le fonctionnement du système Relit en bourse de Paris avait été évalué à 15
millions de francs par intermédiaire financier),
-
l’existence de produits homogènes dans différents pays (la standardisation des produits
financiers a permis leur diffusion plus large et leurs traitements post-bourse plus aisés),
-
des économies d’échelle importantes (le lecteur se reportera chapitre IV §1),
-
des coûts de transport faibles (cf. le coût de transport de l’information, comme vu cidessus),
-
une primauté donnée aux prix et à la qualité (le lecteur se reportera au §4 du chapitre
présent).
149
Gastinel H., Bernard E., Les marchés boursiers dans le monde – situation et évolution, Montchrestien 1996
Andrieu P., Ravisé J.P., L’automatisation des back-office de marchés ou la longue marche vers les autoroutes
de l’information, Revue d’Economie Financière n°32, Printemps 1995
151
Porter M., Hout T., Rudden E., How global companies win out ?, Harvard Business Review, September –
October 1982
150
65
Les principaux facteurs de la globalisation, selon Porter 152, sont présentés dans le schéma 3.
Schéma 3 : facteurs de globalisation
-
besoins des consommateurs
demandes globales
circuits de distribution
globaux
marketing transférable
Facteurs de coûts
-
économies d’échelle globales
baisse des coûts de transport
croissance des coûts de
recherche et développement
différence de coûts entre pays
-
politique de libre-échange
normalisation technique
réglementations commerciales
communes
déréglementation
Globalisation
potentielle
Facteurs concurrentiels
-
Facteurs de marché
-
Facteurs
gouvernementaux
-
exportations, importations
interdépendance économique
des nations
concurrents multinationaux
globalisation de la
concurrence
Considérons les facteurs pour les appliquer aux activités boursières et post-boursières, sachant
que ces arguments sont développés dans les chapitres suivants.
♦ Les facteurs gouvernementaux :
-
Les barrières douanières et réglementaires représentaient un des principaux obstacles à
l’échange international : force est de constater qu’au moins en Europe, elles ont été levées
progressivement pour permettre une libre circulation des capitaux.
-
L’intégration économique de grandes zones facilite la création de marchés intérieurs
libres, mais également l’unification des conditions techniques et réglementaires: l’Euro
152
Porter M., Stratégor – Politique générale d’entreprise, InterEditions 1993 2ème édition
66
existe, sa zone monétaire est devenue réalité, même si l’unification des réglementations
n’a pas encore totalement abouti ; de la même manière, il existe une zone dollar.
♦ Les facteurs liés aux marchés et à la demande :
-
Les réseaux de communication pour le transport de l’information boursière et postboursière constituent des infrastructures nécessaires à la globalisation. Le réseau
international Swift 153 en un exemple probant. Plus encore, le transport de l’information a
été considérablement réduit grâce à la mise en place des systèmes de routage des ordres et
de diffusion boursière.
-
l’homogénéisation de la demande internationale : tous les investisseurs internationaux
requièrent les mêmes produits financiers, une même gestion internationale de portefeuille,
une même approche de la gestion des risques ….
♦ Les facteurs de coûts :
-
une hausse des coûts de recherche permet à une entreprise d’étendre sa zone d’activité. Ce
fut le cas des centrales de clearing internationales qui, suite à la baisse des transactions sur
les euromarchés, se sont spécialisées sur les négociations transfrontalières.
-
les économies d’échelle sont un puissant facteur de globalisation. Elles sont devenues
incontestables depuis la mise en place des dépositaires centraux et la dématérialisation des
titres. En outre, les coûts de transaction ont fortement diminué depuis l’informatisation
des bourses 154.
En décembre 2002, une étude a montré que les coûts de transaction sur les marchés d’actions
étaient plus faibles sur Euronext que sur le London Stock Exchange. Cette étude a été réalisée
sur un échantillon de 105 valeurs comparables cotées à Londres et à Paris, en tenant compte
153
Swift – Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication est un réseau interbancaire
international créé en 1971 par plus de 200 banques de 15 pays au total, sous la forme d’une coopérative.
Aujourd’hui, il compte 5500 utilisateurs présents dans plus de 150 pays, il achemine 700 millions de messages
par an, et peut traiter 200 messages à la seconde. Son principe repose sur la transmission de messages normalisés
couvrant tous les domaines de l’activité financière internationale, selon un protocole de communication.
Selon Bounie (Bounie D., Monnaie, typologie des systèmes de paiement électronique et enjeux bancaires,
Système d’information et management n°1, Vol. 5, 2000), on appelle protocole de communication une norme
qui désigne l’ensemble des règles (syntaxe) et procédures (dialogue) qui permet de gérer la transmission
sécurisée de données entre deux points sur un réseau.
154
Trading transactions costs are falling Worldwide. From 1996 : 4 to 1998 : 3, costs declined by 10 – 53 %,
averaging about 16 %. Explanations include competition for order flow, shifts of trading strategies to
accomodate liquidity differences, more institutional trading, and pressure from new trading systems and
regulatory authorities. Adoption of automated trading technology contributes to trading cost reductions.
67
de leur flottant, de leur liquidité et de leur secteur d’activité. Selon Davidoff 155, l’écart de prix
entre Paris et Londres s’explique par l’organisation d’Euronext qui centralise sur son carnet
tous les ordres de détail, alors que l’exécution d’une part prépondérante de ces ordres est
internalisée par des intermédiaires spécialisés à Londres.
L’étude 156 fait ressortir les coûts présentés dans le tableau 2.
Tableau 2 : Mesure des coûts de transaction
Spread affiché
Spread effectif
Profondeur effective
Euronext
Paris
0.1483
(0.15959)
0.1445
(0.07542)
0.0028
(0.00228)
London Stock Exchange
Différence
0.2958
(0.1877)
0.1881
(0.11498)
0.0004
(0.00031)
- 0.1475
- 0.0436
0.0024
Note : Les statistiques sont basées sur 113 valeurs françaises et 308 valeurs britanniques incluses
dans l’indice Dow Jones STOXX TMI (Total Market Index, cotées en continu. Le premier spread
est une moyenne pondérée. Les deux suivants sont des moyennes pondérées par les volumes
de négociations quotidiens (€)..
Par ailleurs une analyse préalable (reprise par la présente étude) a montré une diminution
régulière des coûts de transaction qui ressortent comme indiqué dans le tableau 3 .
Tableau 3 : Coûts des négociations de septembre 1996 à décembre 1998
Belgique
Canada
France
Allemagne
Italie
Pays-Bas
Espagne
Suède
Suisse
Royaume-Uni
Etats-Unis
Coûts totaux
35.0
52.4
29.5
37.7
34.8
42.2
41.9
35.8
38.5
54.5
35.0
Coûts explicite
25.4
25.3
22.8
24.3
26.3
23.0
32.5
26.2
29.8
39.3
25.4
Coûts implicites
9.6
27.1
6.7
13.4
8.5
19.3
9.5
9.6
8.7
15.2
9.6
Sources : Elkins / Mc Sherry
Domowitz I., Liquidity, Transaction costs, and reintermediation in electronic markets, Journal of Financial
Research 2002
155
Davydoff D., Bourse Information – La lettre mensuelle d’Euronext Paris, mars 2003
156
Davydoff D., Gresse C., Trading costs analysis : A comparison of Euronext Paris and the London Stock
Exchange, December 2002
68
Les auteurs précisent que les coûts ont régulièrement diminué, notamment les coûts
implicites, même si ces derniers entrent encore à hauteur d’un tiers du coût global. Entre 1996
et 1998, ils ont baissé trois fois plus que les coûts explicites, grâce à la mise en place de
nouvelles technologies (introduction de systèmes de trading sophistiqués et facilité accrue de
l’accès à l’information).
On entend par coûts explicites les commissions, les frais de courtage et les impôts. On entend
par coûts implicites la différence entre le prix auquel est conclue la transaction et la véritable
valeur de l’actif acheté. Aussi ces coûts implicites reflètent-ils la liquidité d’un marché.
♦ Les facteurs concurrentiels :
L’évolution de la concurrence, l’extension géographique des marchés et la formation de
grands ensembles économiques intégrés ont fait disparaître les marchés protégés. C’est
notamment le cas pour le dénouement des transactions transfrontalières. Mais également le
cas des bourses privatisées. Celles-ci ne sont plus à l’abri d’un rachat par un concurrent. En
atteste la tentative, non aboutie certes, d’offre publique lancée par OM Grupp sur la bourse de
Londres.
Citons également le principe de la « cross-subsidization », développé par Hamel et Prahalad
157
, qui consiste en une utilisation de ressources financières dégagées par une filiale dans une
région du monde pour financer la lutte concurrentielle d’une autre dans une autre région. Les
entreprises doivent donc assurer une présence commerciale pour aborder une autre zone
géographique. Selon nous, la stratégie d’Euronext entre dans ce concept : face aux
tergiversations des places de Londres et Francfort quant à leur fusion, la Place financière de
Paris a proposé une fusion avec d’autres places européennes pour créer la première bourse
paneuropéenne
158
. Au-delà de la fusion des trois places composant, à l’origine, Euronext,
cette dernière s’est positionnée à Londres en rachetant le Liffe, pour les activités de produits
dérivés, puis Crest pour les activités de règlement-livraison.
Globalement, il existe trois modèles de bourse, quant à la stratégie passée et à venir d’une
place financière, développés par Galper 159.
157
Hamel G., Prahalad C.K., Do you really have a global strategy?, Harvard Business Review, July August 1985
Pour un rappel des faits historiques, le lecteur se réfèrera au chapitre III § 6.
159
Galper J.L., Change in Industry, Three Business Model for Exchanges, FIBV Working Paper, August 1999
158
69
Le premier modèle est celui d’une bourse globale (global exchange), tels le New York Stock
Exchange ou le London Stock Exchange, ou encore Euronext. C’est la bourse qui offre les
plus grosses capitalisations, la plus forte liquidité et le volume de transactions le plus
important dans un pays ou dans une zone économique donnée. Cette bourse draine des
investisseurs domestiques et internationaux en apportant à ses émetteurs une lisibilité
internationale.
Le deuxième modèle est celui d’une bourse régionale (regional exchange). C’est une bourse
qui se focalise sur une région locale, elle offre des cotations à ses entreprises, les investisseurs
étant d’origine essentiellement locale. Cette bourse peut éventuellement se spécialiser dans un
secteur économique spécifique, à l’instar de la Bourse de Stockholm surtout dédiée aux
valeurs des télécommunications.
Le troisième modèle est celui d’une bourse diversifiée (diversified exchange). Elle domine
une région économique mais offre, au-delà d’une cotation de valeurs traditionnelles, une
activité autre. Un exemple probant est celui de la Bourse de Paris qui vend par delà les
frontières son système informatique de cotation. Sa stratégie s’inscrit alors dans un
développement technologique. Un autre exemple est celui de la Bourse de Johannesburg qui
aide au développement des bourses voisines, elle s’inscrit dans un développement
économique.
En suivant tel ou tel modèle, les bourses se sont développées dans le passé, et se
développeront encore dans un avenir proche, à condition toutefois qu’elles sachent identifier
leurs forces. Aussi devront-elles mettre en avant leur infrastructure afin de conserver leur rang
et se développer par ailleurs.
70
3. La compensation et le règlement-livraison dans la finance
fonctionnelle 160
L’analyse institutionnelle se focalise sur les institutions existantes telles les banques ou les
autorités de tutelle. Or celles-ci évoluent au cours du temps, fusionnent ou disparaissent au
profit d’autres, tandis que leurs fonctions, même en évolution permanente, sont davantage
pérennes. Les marchés et systèmes financiers ont en effet évolué ces vingt dernières années,
comme traité ci-dessus, au gré des transformations macroéconomiques et des innovations
financières et technologiques. Les agents économiques ont davantage sollicité lesdits marchés
en tant qu’émetteurs et investisseurs, menant de facto à un accroissement considérable des
volumes traités. Aussi les intermédiaires financiers et leurs autorités de tutelle ont-ils suivi les
mêmes évolutions.
Fort de ce constat, un certain nombre d’auteurs préfèrent analyser les fonctions des
institutions plutôt que les institutions elles-mêmes ; Merton et Bodie
163
, Rose
164
, Sanford
165
161
, Hubbard
162
, Kohn
ont ainsi développé la notion de finance fonctionnelle. L’argument
avancé par ces auteurs est celui des changements fondamentaux des marchés financiers depuis
une trentaine d’années : au fil de ces modifications, voire des innovations, les institutions ont
évolué tandis qu’elles offrent toujours les mêmes prestations à leur clientèle, quel que soit le
marché ou le produit négocié.
Leur approche repose sur deux principes 166 :
-
Les fonctions sont plus stables que les institutions, elles changent moins au fil du temps et
varient moins entre les pays.
160
The principal precept is what architect Henry Louis Sullivan pointed out more than a century ago : Form
follows function, or perhaps more commonly stated necessity is the mother of invention.
Considine J., Improving the continuity of the securities infrastructure end-to-end, Gehrig B., Economic
Environment Future flows, International securities services association, The New Securities Lanscape, 11th
International Symposium, June 2002
161
Bodie Z., Merton R.C., Finance, Prentice Hall 2000 ;
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Perold F., Sirri R., Tufano P., La finance sans frontière,
Economica 1998
162
Hubbard R.G., Money, the Financial Market and the Economy 3ème edition, Addison-Wesley 2000 (first
edition 1994)
163
Kohn M., Financial Institutions and markets, McGraw-Hill 1994
164
Rose R.S., Money and capital markets, Burr Ridge, fifth edition 1994
165
Sanford C.S., Financial markets in 2020, Federal Reserve Bank of Kansas City Economic Symposium,
August 1993
71
-
La forme institutionnelle s’adapte à la fonction : l’innovation et la concurrence constantes
entre les institutions aboutissent finalement à ce que les fonctions du système financier
soient de plus en plus performantes et efficaces.
Pour Oldfield et Santomero
167
, les services financiers tels l’origination, la distribution des
paiements sur titres, les services de dettes ou de titres sont stables dans le temps. Et les
principaux d’entre eux sont offerts par les cellules de back-office des institutions.
Depuis très longtemps, les cellules de back-office des institutions financières doivent être en
mesure de proposer différents services à leur clientèle d’émetteurs, d’investisseurs
institutionnels ou encore d’investisseurs individuels. Il est possible de dresser une typologie
des besoins selon le type de clientèle 168.
• les émetteurs requièrent des institutions financières :
-
La tenue de leurs comptes nominatifs : comptes de nominatif pur et administré, garantie
de la validité des inscriptions transcrites dans le registre, gestion des renseignements à
transmettre aux actionnaires,
-
La gestion des assemblées générales : aide à la préparation, à l’organisation, paiement du
droit de timbre, dépouillement des votes (rôle le plus important),
-
Le service financier : paiement des coupons et remboursements (respecter l’échéance,
préparer le paiement, informer la place, mettre les fonds à disposition des autres
intermédiaires…),
-
La gestion des opérations sur titres : l’intermédiaire étant centralisateur de ces opérations,
il doit informer les autorités, gérer la publication au Balo
169
, coordonner des co-
domiciles, remettre les fonds à l’émetteur, publier les résultats, demander l’éventuelle
cotation des titres nouveaux …
-
La gestion de l’actionnariat des salariés et des stock options.
• Les particuliers réclament :
-
166
La gestion de leurs transactions sur titres,
Bodie Z., Merton R., Finance, Village Mondial, Paris/Pearson Education France 2001
Oldfield G., Santomero A., Risk management in financial institutions, Sloan Management Review, Fall 1997
168
AFTI, Critères d’appréciation des back-offices, Djinns 1995
169
Bulletin des annonces légales obligatoires.
167
72
-
L’administration des titres (contrat de prestations avec services de base, reporting
éventuel),
-
La gestion des opérations sur titres (paiement des coupons, autres opérations sur titres,
assemblées générales …).
• Les institutionnels requièrent :
-
Les services traditionnels de gestion des ordres, suivi des opérations de règlementlivraison, gestion des opérations sur titres et autres déclarations fiscales,
-
La gestion des opérations de clearing de titres avec reporting précis en terme de délais
pour gérer les risques de règlement-livraison,
-
Des informations sur les assemblées générales,
-
Des reportings sur récupérations d’impôts …,
avec un respect des normes (ISIN, ISO, SWIFT …).
Merton et Bodie
170
affirment que l’innovation et la concurrence entre institutions apportent
une plus grande efficacité dans l’accomplissement des fonctions d’un système financier.
Ces fonctions sont les suivantes :
transferts de ressources,
gestion des risques,
clearing & règlement,
mise en commun de ressources et de répartition du capital des entreprises,
gestion de l’information relative aux prix,
gestion des problèmes liés aux asymétries d’information.
Les transferts de ressources dans le temps et l’espace sont du ressort des marchés stricto
sensu. La gestion des risques s’entend surtout en matière de partage de ces risques. La mise en
commun des ressources, ou pooling, concerne les ressources des ménages qui devraient
systématiquement s’orienter vers les entreprises au titre des moyens de financement offerts à
celles-ci par les marchés de capitaux. La gestion de l’information relative au prix doit être
efficace afin de faciliter les prises de décision des investisseurs pour leur gestion de
portefeuille. La gestion des problèmes relatifs aux asymétries d’information appartient à tout
marché qui veut préserver les principes de transparence totale et d’équité pour ses
73
investisseurs (tout investisseur potentiel est supposé détenir toutes les informations relatives
aux fonctionnements du marché et des titres qu’il propose). A contrario, un marché opaque est
forcément destiné à tomber en désuétude.
Enfin le clearing et le règlement des transactions permettent de faciliter les échanges, mais les
mécanismes de compensation et de règlement des échanges de titres doivent être conçus pour
tenir compte des coûts et des risques associés à ces transactions 171.
Selon Hubbard
172
, les marchés financiers doivent permettre un partage des risques en
maximisant la liquidité et en diffusant suffisamment d’informations aux investisseurs afin de
maintenir une transparence totale. A ces fins, un marché se doit de rapprocher les emprunteurs
et les épargnants, d’offrir une liquidité
173
parfaite des titres et de fournir des systèmes de
négociation et de règlement-livraison de titres efficaces.
D’autres auteurs approchent également la finance par une nomenclature fonctionnelle. Si pour
Sanford 174, la fonction de compensation et de règlement permet simplement le traitement des
transactions, pour Kohn
175
et Rose
176
, elle permet de fournir de la liquidité au système
financier. En effet un système de règlement efficient doit permettre d’allouer des crédits
intrajournaliers à ses participants en tant qu’instruments de politique monétaire ou
simplement pour fluidifier le dénouement des transactions.
170
Bodie Z., Merton R.C., Finance, Prentice Hall 2000
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Sirri R., Tufano P., La finance sans frontière, Economica
1998
172
Hubbard R.G., Money, the Financial Market and the Economy 3ème edition, Addison-Wesley 2000
173
La liquidité est la possibilité pour un actif d’être certainement réalisable dans un bref délai et sans perte.
Keynes J.M., Traité sur la monnaie, MacMillan 1930.
Sur les marchés de valeurs mobilières, la liquidité est la caractéristique d’un marché où l’on peut effectuer des
opérations d’achat et de vente sans provoquer de trop fortes variations de cours.
174
Sanford C.S., Financial markets in 2020, Federal Reserve Bank of Kansas City Economic Symposium,
August 1993
175
Kohn M., Financial Institutions and markets, McGraw-Hill 1994
176
Rose R.S., Money and capital markets, Burr Ridge, fifth edition 1994
171
74
4. Pourquoi l’efficience d’un système de règlement-livraison
est-elle devenue primordiale ?
4.1 La notion de chaîne de valeur appliquée aux bourses et systèmes
de règlement-livraison
La chaîne de valeur des opérations de marché et post-marché est présentée le schéma 4 177.
Schéma 4 : Chaîne de valeur
Investisseur
Allocation
d’actifs
Gestionnaire
de fonds
Gestion des
investissements
Négociateur
Négociation
Bourse
Trading
Compensateur
Clearing &
Netting
Dépositaire
central &
conservateur
Règlement
Conservateur
Conservation
Plus précisément, les services clés de la chaîne des valeurs d’une transaction de titres sont
repris par Giddy et al. 178 en 14 points :
177
Kirby A., Reducing settlement risk and cost : the role of Swift, DVP : Cross-border securities settlement,
Paris 5&6 October 1995
178
Giddy I., Saunders A., Walter I., Alternative models for clearance and settlement : the case of the single
European capital market, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
75
Services de pré – règlement :
1. Information et services analytiques (ex : Reuters, Bloomberg)
2. Systèmes de trading (ex : Seaq, Globex)
Services types de règlement :
3. Gestion des informations relatives aux négociations (communication des négociations,
matching, vérification, reporting régulier)
4. Compensation and netting
5. Règlement-livraison : livraison des titres matérialisés ou non
6. Paiement : transfert définitif des fonds
7. Services de dépôts titres et espèces
Services annexes :
8. Services basiques de conservation : coupons, remboursements, certificats globaux,
exercices des droits de vote, gestion fiscale
9. Services connexes de conservation: comptabilité et reporting, change, vente de droits ;
information prévisionnelle des opérations sur titres
10. Offre de crédit et autres services de cash, et mise à disposition de titres pour faciliter les
dénouements ; gestion de la collatéralisation
11. Services fiduciaires : gestion de portefeuille, cash management, prêts de titres et d’espèces
pour les institutionnels
12. Services analytique : mesures de performance, analyses de tendance, valorisation en temps
réel des portefeuilles
13. Services aux émetteurs: contrats de trustees
ADR
179
180
179
, gestion des titres nominatifs ou des
, gestion des opérations sur titres
Un trustee est propriétaire des titres, il a donc le droit de jouir et de disposer des biens. Il exerce les droits et
obligations du propriétaire des titres vis-à-vis de la société émettrice et du teneur de compte.
Sefkali Z., Valuet J.P., La société émettrice et l’intermédiaire financier français face au trustee et au nominee,
Revue de Droit Bancaire et de la Bourse n°38, juillet – août 1993
180
- Les ADR – American depository receipts sont des certificats négociables émis par une banque américaine
en contrepartie de titres étrangers déposés hors des Etats-Unis. Les émetteurs d’ADR détiennent leur stock de
titres d’origine (titres primaires) chez un dépositaire dans le pays d’origine. C’est un titre américain et, entre
intervenants, il se traite comme une valeur locale nominative.
Karyotis C., Circulation internationale des valeurs mobilières, Banque Editeur 1994
- Les ADRs offrent les avantages suivants :
Les transactions sont dénouées en J+3 comme pour les valeurs américaines,
Les ADR sont exemptés de frais de conservation (dus normalement pour les valeurs étrangères),
Ils sont plus facilement livrables et enregistrables que les actions ordinaires,
Ils autorisent le vote par procuration …
76
14. Services de prêts
Il existe donc trois familles de services :
-
La gestion des négociations,
-
Le règlement-livraison (réalisé par les dépositaires domestiques ou internationaux),
-
L’activité de crédit et conservation.
Les auteurs précisent qu’au-delà de l’efficience du processus de règlement-livraison de base,
les limites et faiblesses des services de conservation, de crédit et de prêt de titres sont des
freins à l’intégration d’un marché financier, spécialement pour les institutionnels 181; aussi
requièrent-ils un service de transactions sans coûts excessifs ou complications, donc une
intégration verticale des prestations, allant de la cotation au règlement.
Galper 182 reprend les principes de chaîne de valeur, développés par Porter 183, qu’il applique à
l’industrie boursière.
Il y a une vingtaine d’années, le traitement d’une opération boursière était considéré comme
une prestation globale. Désormais, il est possible de différencier les étapes : un investisseur
peut solliciter différents intermédiaires ou entreprises de marché pour obtenir un service
d’informations d’une part, et un service de routage et de gestion de ses ordres d’autre part.
En conséquence, la chaîne de valeur des activités boursières (qui consiste à assister les
investisseurs finaux dans leur conduite des transactions sur un marché liquide afin qu’ils
maximisent leur retour sur investissement) repose sur deux maillons essentiels :
-
la gestion des données et informations (knowledge-based) ayant pour objet de fournir
l’information relative aux produits financiers aux investisseurs,
Simms R.A., Investments – International with ease : ADRs are one way for investors to diversify into
international equities, thereby enhancing their portfolio returns and reducing risk, Financial Planning, January
2000
181
Dès le début des années quatre-vingt-dix, les institutionnels avaient besoin des prestations suivantes : le
règlement-livraison de tous les produits, la gestion des opérations sur titres, des délais garantis. Pour cela, il leur
fallait une technologie de pointe pour la gestion de leur poste clients, donc des systèmes de règlement-livraison
électroniques gérés en temps réel.
Collombet M., Piermay M., Le marché discret de la conservation titres des institutionnels, Banque Magazine,
janvier 1996
Galper J.I., Value Chain control in financial markets : Stock Exchanges and central securities depositories,
International Federation of Stock Exchanges Working Paper, April 2000
183
Porter M., L’avantage concurrentiel, comment devancer ses concurrents et maintenir son avance –
Interéditions 1986
77
-
la gestion des produits (commoditized) offrant les activités de matching, clearing et
règlement des négociations.
Pour cette gestion des produits, hors négociations particulièrement complexes, il y a peu de
différences, pour l’utilisateur final, entre fournisseurs. Ceux-ci ne peuvent alors se
différencier qu’au travers de leur réputation et de leurs prix.
Galper étudie la structure qu’une bourse peut mettre en place en liaison avec son dépositaire
central pour maintenir sa position concurrentielle.
Ses hypothèses reposent sur une entreprise de marché cotée, à laquelle tous les négociateurs
ont accès, et un marché gouverné par les ordres. Ce marché est considéré liquide sans
intervention de market makers. La bourse gère elle-même l’activité de clearing.
Galper procède par étapes, au nombre de 8, pour établir la structure de la bourse.
Etape n°1 : lister les activités
Elles sont les suivantes :
-
gestion du marché secondaire avec publication des cours,
-
gestion des informations qualitatives et quantitatives pour les investisseurs,
-
gestion des conditions d’introduction
-
transmission des ordres matchés au système de clearing et de règlement,
-
assurance d’une bonne infrastructure de la gestion des valeurs,
-
surveillance des infrastructures comptables, légales et technologiques.
Etape n°2 : Etat des inputs et outputs de l’entreprise pour chacune de ses activités
principales (schéma 5)
78
Schéma 5 : Chaîne de valeur générique
Décision de cotation
Activité boursière
Cotation /
introduction Information relative aux introductions
Etude des informations
financières pour valorisation
Titres cotés
Divulgation des
Informations
financières
Gestion des données relatives aux
négociations
Diffusion des informations
financières
Gestion des données relatives à la
compensation et au règlement
Demande d’informations
Conseil
Capital
disponible
Confiance
Matching des négociations
Coûts
Compensation & règlement
Décision de négociation
Autres
facteurs
Confirmation
Soumission des
ordres
Méthode de coûts
Gestion des ordres
Information
Marketing
Demande d’informations
Diffusion des informations
79
Le contrôle des bourses sur la chaîne de valeur varie d’une place à l’autre, mais le principe
dominant est celui d’un contrôle du matching et du clearing des ordres.
A titre d’exemple, citons celui de la Bourse de Paris qui compense ses négociations dans son
système Clearnet pour les transmettre, ensuite, chez Euroclear France pour le traitement de la
suite de la chaîne de valeur.
Une vue plus large des activités de bourse est présentée dans le schéma 6.
Schéma 6 : Activités boursières
Autres informations relatives au marché
Gestion des informations externes
Mise à
disposition des
informations
financières
Presse
Confirmation d’enregistrement ou
dépôts
Investisseurs
Diffusion des
informations
Règlement
Demande d’informations
financières
Données
relatives aux
négociations
Taux de
dénouement
Nombre des transactions en
provenance des investisseurs
Compensation
Matching
Confirmation
Soumission des ordres
Coûts de transaction
Transmission des
ordres
Régulation
Présentation des ordres en bourse
Réputation
80
Etape n° 3 : Identifier l’activité dégageant le revenu le plus important
Le revenu incontestablement le plus important d’une bourse provient de son activité de
trading, via les produits de transactions perçus. Néanmoins les coûts de transaction payés par
les investisseurs dépendent intrinsèquement des produits offerts sur la place et de
l’infrastructure de cette place. Les autres activités, quant à elles, si elles semblent secondaires,
sont cependant utiles pour attirer les investisseurs.
Pourtant, lesdits investisseurs se focalisent sur une prestation globale pour choisir leur plateforme de négociation, une bourse doit donc offrir une chaîne de traitement des ordres totale,
allant de la collecte des ordres jusqu’à leur règlement sur un marché liquide.
Etape n°4 : Identifier les maillons critiques de la chaîne actuelle
Si l’information diffusée par la bourse semble essentielle, une place financière doit également
être consciente de l’importance des activités de clearing et de règlement. Celles-ci sont, en
effet, des conditions sine qua none de viabilité des places financières. Elles doivent être
capables de traiter des pics d’activité, pour maintenir la liquidité du marché.
Etape n°5 : Identifier les clients potentiels pour le revenu principal
Les négociateurs, principaux acteurs au côté des émetteurs, recherchent, lorsqu’ils négocient
pour compte propre, une profondeur de marché, en matière d’information et de négociation.
S’ils négocient pour compte de tiers, ils recherchent, pour les investisseurs internationaux,
l’importance des grosses capitalisations (blue-chips) et les possibilités de diversification des
portefeuilles.
Etape n°6 : Identifier les menaces des nouveaux entrants
Les concurrents des négociateurs traditionnels sont les discount brokers. Les concurrents des
discount brokers sont les négociateurs intraday, tandis que ces derniers ont pour concurrents
les prestataires Internet.
81
Enfin, les bourses elles-mêmes, restent en concurrence les autres avec les autres. Cependant la
concurrence entre centres financiers n’est pas nouvelle
184
: Au quinzième siècle, Gênes, une
des premières bourses, a perdu son influence au profit de la république de Venise. Au dixseptième siècle, Amsterdam, avec ses banques et sa bourse, est devenue le plus grand centre
financier, avant d’être supplantée par Londres, en concurrence avec Paris, à la fin du dixneuvième siècle, alors que le vingtième siècle est marqué par la suprématie de New York.
A ce niveau de l’analyse, il nous semble opportun d’appliquer les principes de Porter aux
places financières 185 .
Selon M. Porter 186, la dynamique de la concurrence dépend de cinq forces :
- le pouvoir de négociation des fournisseurs,
- le pouvoir de négociation des clients,
- la menace des services de substitution,
- la menace de nouveaux entrants,
- la rivalité entre firmes existantes,
qui agissent comme exposées dans le schéma 7.
Schéma 7 : Les cinq forces de Porter
Nouveaux
entrants
Fournisseurs
Concurrents
du secteur
Clients
Substituts
184
Lelièvre F., Fonctionnement, dysfonctionnement et impact réel du système financier – Quel avenir pour les
places financières, Cahiers français n°301, juin 2001
185
Karyotis C., Les systèmes de règlement-livraison européens : Vers l’unification des marchés, Banque Editeur
2000
186
Porter M., L’avantage concurrentiel des nations, InterEditions 1993
82
Si l’on applique ce schéma aux bourses d’actions, on peut imaginer que la lutte entre places
financières est intense.
-
Les fournisseurs sont les entreprises cotées, et leur degré de concentration est fort ; en
France, les quarante plus fortes valeurs (CAC 40) totalisent 80 % des transactions
boursières.
-
Les clients sont les investisseurs. Sur tout marché, ils négocient les prix et la qualité de
service 187 ; leur pouvoir de négociation augmente. En outre, sur un marché de produits
standardisés. Face à un marché d’investisseurs individuels fortement atomisé, les
investisseurs institutionnels ont, quant à eux, un poids considérable. Les gérants de fonds
exigent une transparence et une liquidité parfaite des marchés, et vont vers la bourse la
moins chère.
-
Les services de substitution sont les services de négociations électroniques. A l’heure de
l’informatisation totale des bourses, celles-ci ne maîtrisent plus la filière titres. Lorsque les
cotations s’effectuaient sur un parquet (à la criée) et que les titres circulaient sous la forme
papier, les bourses géraient leurs valeurs, de leur admission à leur compensation.
Actuellement, les conditions d’admission, certes encore déterminées par les autorités,
échappent de plus en plus aux marchés ; la réglementation appartient à des instances
supranationales et les opérations de règlement-livraison de titres répondent aux exigences
de politique monétaire. Seule la formation des cours stricto sensu appartient en propre aux
187
• Les critères d’appréciation des services sont :
- Les supports matériels du service et de sa production,
- Le respect des engagements sur les performances du service,
- La réactivité du prestataire aux aléas et à l’évolution des caractéristiques de la demande du client,
- La compétence technique et cognitive du prestataire,
- La crédibilité du prestataire,
- La sécurité définie comme l’absence de risque dans la prestation et de méfiance à l’égard du prestataire,
- La facilité d’accès au service,
- La communication avec le client,
- La compréhension du besoin.
La qualité d’un service se mesure par l’écart entre les attentes de la clientèle à l’égard du service et la perception
qu’elle a de la qualité du service après consommation.
Berry L.L., Parasuraman A., Zeithaml V.A., Delivering quality service : balancing customer perceptions and
expectations, Free Press 1990
• Selon la normalisation internationale, la qualité d’un bien ou d’un service est l’ensemble des propriétés et
des caractéristiques qui lui confèrent l’aptitude à satisfaire des besoins exprimés ou implicites.
Bancel-Charensol L., Delaunay J.C., Jougleux M., Les services dans l’économie française, Armand Colin 1999
83
bourses, à condition que les ordres leur arrivent. Mais elle s'effectue désormais par voie
informatique. Ipso facto, il existe des moyens de substitution faisant apparaître de
nouveaux entrants.
-
Les nouveaux entrants sont les prestataires de services informatiques. Les négociations,
depuis leur informatisation, peuvent être en effet délocalisées. Ces nouveaux entrants sont
des prestataires informatiques tels Reuters ou Bloomberg, ou encore des établissements
financiers.
A titre d’exemple, Goldman Sachs et Dow Jones ont créé, aux Etats-Unis, une entité
commune (Opti Mark) offrant un traitement sur actions sans intermédiaires ; Merill Lynch et
Goldman Sachs ont ouvert une bourse électronique, Primex Trading, destinée aux
investisseurs institutionnels. Pour chaque valeur, deux prix sont affichés : le « bid » proposé
par les acheteurs et le « ask » demandé par les vendeurs, les courtiers intervenant entre ces
deux prix.
On compte, selon le FESCO 188, en 2000, 27 ECN ou ATS.
Précisément, aux Etats-Unis, un ATS – alternative trading system, est un système automatisé
d’exécution des ordres qui offre des fonctionnalités de matching et d’exécution reposant sur
l’internalisation. Un ECN – electronic communication network est un système de matching
automatique des ordres entre acheteurs et vendeurs (le terme d’Ecn s’applique à des réseaux
privés). L’exécution des ordres passant par un Ecn reste externalisée, donc effectuée par une
bourse réglementée.
Leur positionnement, aux Etats-Unis, par rapport aux marchés réglementés et centralisés, se
présente tel qu’indiqué dans le schéma 8 189 .
188
FESCO – Forum of European Securities Commissions, The regulation of Alternative Trading Systems in
Europe, A Paper of the EU Commission, September 2000
189
CSC – AFTI, Etude sur les infrastructures post-marché en Europe et aux Etats-Unis, Conférence 24 juin 2002
84
Schéma 8 : Les ECN face aux bourses réglementées
Investisseurs institutionnels
Investisseurs individuels
3
1
Intermédiaires
2
4
ECN / ATS
5
6
ECN / ATS
7
Market makers
Bourses réglementées
8
9
Services
1
2
Matching pour négociations de bloc
ou ordres importants / recherche des
meilleures conditions d’exécution
Matching des ordres
3
Matching des ordres
+ ventes croisées + conseil
4
Matching des ordres
5
Matching des ordres
6
7
8
9
Matching des ordres
Exécution des ordres
Exécution des ordres
Exécution des ordres
Remarques
Exemples
d’acteurs
Activité innovante et à forte
marge
Activité industrielle et à faible
marge
Activité industrielle et à forte
marge
Instinet, ITG /
Posit
MarketXT
Activité industrielle et à faible
marge
Activité industrielle et à faible
marge
Activité de Market maker
Non applicable
Non applicable
Non applicable
Archipelago,
Jiway
Island
Schwab,
E*Trade
Jiway
Selon la même étude, les Ecn et Ats auraient drainé, en 2002, 30% du volume du Nasdaq et 5
% du volume du Nyse. En 1999 déjà, les marchés privés électroniques avaient réussi à
85
détourner, à leur profit, 22 % des transactions du Nasdaq et 6 % de celles du New York Stock
Exchange190.
A titre d’exemple, citons le cas de l’introduction en Bourse de Paris d’Automa-Tech en
novembre 1999. Pour la première fois en France, un courtier en ligne (ConSors France) a
proposé à ses clients de participer directement sur son site à l’introduction en bourse de la
société. Ces clients ont été servis à près de 50 % tandis que, dans le cadre de l’offre
traditionnelle (à prix ferme), les ordres inférieurs à 100 titres ont été servis à 4,24 %. Pour ce
faire, le courtier s'est vu réserver une tranche de 70 000 titres. Ce chiffre de 50 % est
cependant à relativiser, seuls 10 % des clients du courtier ont demandé des titres via Internet ;
il y a fort à penser que, lorsque ce type de pratiques se sera développé, le taux baissera
considérablement. Mais le phénomène illustre bien la concurrence générale faite par Internet
191
aux bourses et à leurs méthodes traditionnelles, et aux intermédiaires financiers classiques.
La lutte entre bourses ne peut qu’être draconienne, exacerbée par des coûts fixes importants
(coûts de fonctionnement informatiques, amortissements des investissements dans les
systèmes de place …).
Etape n°7 : Identifier les maillons critiques des activités principales
La liquidité du marché secondaire s’appuie sur le nombre d’investisseurs présents sur le
marché, et cet élément dépend de la tendance générale des investisseurs, de la qualité des
produits proposés, des informations disponibles et de la réduction potentielle des coûts de
transactions et des risques.
Etape n°8 : Relier les maillons de la chaîne aux compétences clés ou aux avantages
stratégiques de l’entreprise
190
Prudhomme C., Renault E., Les marchés électroniques en Europe menacent l’existence des bourses
classiques, Le Monde, 16 septembre 1999
191
Notons qu’Internet permet de réunir les principes du libre – échange au sens d’Adam Smith : un grand
nombre d’offreurs et de demandeurs et une parfaite transparence.
Lemarignier M., Le capitalisme transformé par la nouvelle économie, L’art de la Stratégie Les Echos, 8 juin
2000
86
Le challenge essentiel d’une bourse 192 réside dans le maintien, voire l’augmentation, du flux
d’investisseurs. A cette fin, la bourse se doit d’améliorer constamment la qualité et la diversité
de ses produits négociables, en maintenant une information fiable et en minimisant ses coûts
et risques.
La minimisation des coûts et des risques passe, entre autres, par l’efficience du système de
règlement-livraison de titres. La bourse doit, en effet, assurer à ses clients, outre une qualité
de négociation, une prestation de traitement post-bourse desdites négociations. En
conséquence, elle doit maîtriser l’ensemble de la filière titres, allant de la collecte des ordres,
leur acheminement, leur confrontation et jusqu’à leur règlement.
Car une bourse offre, outre les possibilités de cotation pour ses entreprises et la gestion de
ladite cotation, la diffusion d’informations et les prestations de règlement des négociations 193.
Qu’elle gère elle-même ou non le système de règlement-livraison de titres, elle doit offrir, à
ses clients, une chaîne performante de gestion des ordres de bourse et de leur traitement postbourse.
4.2 Les raisons de l’efficience d’un système de règlement-livraison
de titres
Il existe plusieurs notions d’efficience dans le domaine des marchés financiers.
Zufferey
194
les reprend une à une, en précisant que ces trois notions sont indispensables à
l’efficacité d’un marché secondaire :
-
efficacité technique : capacité ou efficience opérationnelle (interne). Il s’agit pour les
systèmes de permettre l’information des investisseurs, la négociation et la conclusion des
192
Désormais, une place financière doit se concevoir comme une entreprise qui fournit son savoir-faire, ses accès
aux plates-formes de négociation, ses réseaux de commercialisation, ses produits et sa recherche. Paris dispose
d’une plate-forme technologique efficace dont les prix sont compétitifs : système de négociation (NSC), chambre
de compensation (Clearing 21), système de règlement-livraison (Relit, RGV), système de transferts sécurisé en
monnaie centrale (TBF), système de compensation de virement interbancaire de gros montant (PNS). Les
activités de la place financière de Paris représentait, en 2000, 4.4 % du PIB et 660 000 emplois directs.
Landau J.P., Tricou J., L’industrie des services financiers : nouvel environnement, nouveaux enjeux, Revue
d’Economie Financière n°57, mars 2000
193
Valdez S., An introduction to global financial markets, MacMillan 2000 3rd edition
194
Zufferey J.B., La réglementation des systèmes sur les marchés financiers secondaires, Editions universitaires
de Fribourg Suisse 1994
87
transactions, puis leur règlement de la manière la plus rapide possible, la meilleure marché
et la plus sûre,
-
efficience informative : aptitude du marché à générer pour ses produits des prix qui
intègrent toutes les informations à disposition dans le public,
-
efficience institutionnelle : capacité du marché à maintenir et renforcer la confiance à long
terme des investisseurs dans sa stabilité et son intégrité, soit essentiellement dans le fait
que les facteurs de risque communs à tous les produits offerts sur le marché concerné
demeurent quantifiables et mesurables.
Nous nous focaliserons sur la première notion et, plus particulièrement, à celle ayant trait aux
opérations de règlement.
L’industrie financière est, par définition, instable
195
parce qu’un manque de confiance dans
les institutions peut se répercuter sur l’économie réelle, et sa fragilité n’est pas limitée au
système domestique mais transmissible sur le plan international.
Dans ce contexte, les autorités financières doivent s’attarder sur les problèmes suivants 196:
-
La mise en place d’une surveillance prudentielle efficace qui implique un contrôle étendu
aux maisons de titres opérant au travers de filiales non soumises à surveillance. Cette
surveillance des établissements doit se faire sur une base consolidée, afin d’évaluer
correctement la solidité réelle du groupe financier. Enfin, elle nécessite une bonne
coordination entre les différents responsables nationaux et internationaux.
-
L’élaboration de mécanismes régulateurs
197
des systèmes de paiement et de règlement,
ainsi que des systèmes transfrontières de compensation interbancaire.
-
La recherche d’un meilleur dosage entre discipline du marché et intervention publique qui
exige que les autorités limitent leur intervention au minimum requis en cas de perturbation
avec, néanmoins, une plus grande surveillance prudentielle.
195
Un système financier est instable parce qu’il existe toujours un délai entre les opérations de débit et de crédit,
impliquant de facto un risque de défaut omniprésent, que certains actifs sont illiquides, et que les régulateurs
maîtrisent mal l’insolvabilité potentielle des acteurs. Schwartz A.J., Coping with financial fragility : a global
perspective, Journal of Financial Research 9, 1995
196
Siac I., Les marchés d’actifs financiers in Finances Internationales, A. Colin 1993
197
Or en matière de titres, la situation antérieure aux résolutions du Groupe des Trente était inefficiente,
génératrice de coûts et exposant les participants et les autorités de tutelle à des risques inutiles. Aussi l’initiative
du Groupe des Trente est-elle apparue comme une opportunité de moderniser le système financier, de réduire le
88
Aujourd’hui, une entreprise ne peut pas survivre sans un back-office efficient, qui comprend
toutes les prestations post-marché (pertes et profits, calcul de commissions, gestion des
marges, service de caisse, règlement-livraison et conservation des titres, contrôle de
provisions et appariement des instructions) 198. Ceci, peut s’étendre, selon nous, aux places
financières.
Les opérations post-bourse, notamment le clearing et le règlement, peuvent impacter le coût
des négociations. Ici le clearing comprend le calcul des obligations des deux contreparties et
se réfère souvent aux services d’une contrepartie centrale qui facilite le netting des
transactions et la gestion du risque de crédit des participants. Le règlement relève de la notion
juridique de la livraison contre paiement 199.
Dans la recherche de performance d’une place financière à l’échelle mondiale, toute place
financière a quatre défis à relever 200 :
-
La liquidité, c’est-à-dire, la capacité pour un marché d’absorber des transactions sur un
volume important de titres sans variations trop significatives des cours,
-
L’efficacité qui s’apprécie alors au regard des performances techniques et des coûts de
transactions ; lesdites performances se mesurent en terme de rapidité d’exécution des
ordres, de facilité de routage des ordres et des réponses, et d’efficacité du système de
règlement-livraison de titres, lequel attire de plus en plus l’attention des investisseurs, à la
suite de quelques crises restées célèbres (« crise de la paperasse » à New York
201
, crise
des back-offices à Londres, crise des suspens à Paris),
-
La transparence qui se mesure par une déontologie claire et rigoureuse des autorités et une
circulation parfaitement fiable des informations,
-
La sécurité qui s’entend par des mécanismes de garantie mis en place par les autorités
pour éviter tout effet de contagion.
En effet, l’intensification de la rationalisation, de la consolidation et de la compétition dans
l’industrie financière résulte en une demande de plus en plus pressante pour une efficacité
risque systémique et d’améliorer les flux de capitaux transfrontaliers. Bernard L.W., Clearance and settlement –
an international blueprint, Financier, June 1990
198
Schmerken I., Wall Street’s back-offices : the 1990s avant garde, Wall Street Computer Review, February
1990
199
Steil B., Building a transatlantic securities market, Council on Foreign Relations, ISMA 2002
200
Delpit B., Schwartz M., Le système financier français, Montchrestien 1993
89
accrue des infrastructures du marché, à savoir en termes de compensation, de netting, de
dénouement performant et de gestion flexible de collatéral. Ces besoins pourront être satisfaits
par des améliorations technologiques qui permettront de rendre plus efficaces les techniques
d’investissement et d’émission de titres par un accès à moindre coût aux multiples marchés
202
.
L’importance systémique
203
d’un système de règlement-livraison de titres est essentiellement
due au fait :
-
qu’il contribue au bon fonctionnement des marchés financiers (ceux-ci doivent
assurer le dénouement des transactions dans des conditions optimales de sécurités
et d’efficacité),
-
qu’il est intrinsèquement lié au système de paiement (le règlement des opérations
boursières s’effectue dans les livres de la banque centrale et requiert souvent la
mise en place de crédit intradays par la banque centrale au profit des
intermédiaires) 204,
-
qu’il est indispensable à l’exécution des opérations de politique monétaire (via
les opérations de marché telles le refinancement des pensions livrées ou la
garantie des crédits intradays).
En conséquence, les instances internationales
205
ont revu leurs recommandations en matière
de prestations de règlement-livraison, arguant qu’un dysfonctionnement des systèmes de
règlement-livraison de titres pouvait entraîner des perturbations systémiques sur les marchés
boursiers et systèmes de règlement. La liquidité d’un marché peut même être impactée par ces
dysfonctionnements potentiels, en ce sens qu’un intermédiaire pourrait hésiter à négocier sur
une place ne disposant pas d’un système de règlement-livraison efficient. De nouvelles
recommandations doivent couvrir tous les systèmes de tous les pays, développés ou
émergents, tout au long de la chaîne de traitement post-bourse (confirmation, compensation et
201
A la fin des années soixante aux Etats-Unis, les marchés financiers ont été obligés de fermer une journée par
semaine pour permettre aux intermédiaires financiers de régler les suspens !
202
Bomans L., Large A., The hub and spokes clearance – settlement model, Euroclear June 2001
203
Hervo F., Ros T., Infrastructures post-marché et stabilité financière, Revue de Stabilité Financière, Banque de
France, Novembre 2002
204
Le lecteur se réfèrera à l’encadré fin de chapitre.
205
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for securities settlement systems,
January 2001
90
règlement, conservation des titres) et quelles que soient les valeurs traitées, actions,
obligations d’Etat ou du secteur privé, et titres du marché monétaire.
Enfin, dans la mouvance du développement théorique de la finance fonctionnelle, les
recommandations édictées se focalisent d’abord sur les fonctions ou prestations à améliorer et
non sur les institutions. En effet, si chaque place offre des prestations quasiment semblables
en matière d’opérations post-bourse, certaines ne disposent que d’un dépositaire central gérant
l’ensemble des prestations, tandis que d’autres ont séparé les institutions : plusieurs bourses
pour une même place, systèmes de confirmation et de règlement indépendants …
Un mauvais fonctionnement des chambres de compensation d’instruments financiers ou des
systèmes de règlement-livraison de titres pourrait avoir des conséquences importantes pour la
stabilité financière ainsi que pour la sécurité des systèmes de paiement par lesquels les
règlements en provenance des systèmes de règlement-livraison sont exécutés
206
. De plus, le
bon fonctionnement de ces systèmes est essentiel pour l’exécution des opérations de politique
monétaire
207
. Aussi l’organisation et les règles de fonctionnement des systèmes de paiement
et de règlement-livraison doivent-elles être conçues de telle manière qu’ils ne puissent pas
être un facteur de déclenchement ou de propagation du risque systémique ; leurs coûts de
fonctionnement se répercutent également sur le coût des transactions financières ou des
paiements et les systèmes doivent alors permettre de mobiliser les garanties associées aux
opérations de politique monétaire et aux opérations de crédits intrajournaliers dans les
meilleures conditions de sécurité et d’efficacité possibles.
Globalement, un système de règlement-livraison stimule la croissance d’une place financière
208
.
206
Le krach de 1987 a révélé la nécessité de renforcer les systèmes de règlement-livraison de titres dans le
monde. En octobre 1987, l’accroissement des volumes négociés et de la volatilité des cours a augmenté les
risques financiers des chambres de compensation et de leurs membres. Le rapport Brady a soulevé des problèmes
de règlement-livraison sur les marchés peu liquides conduisant à développer l’incertitude chez les investisseurs.
G. Corrigan, président de la Fed à l’époque, affirmait que la plus grande menace pesant sur la stabilité du
système financier pouvait provenir d’un défaut majeur des systèmes de compensation et de règlement-livraison.
Chakravorti S., Managing cross-border settlement risk : The case of Mexican ADRs, Financial Industry Studies,
September 1998
207
Bulletin de la Banque de France n°84, décembre 2000, La surveillance de la sécurité et de l’efficacité
des instruments de paiement, des systèmes de paiement et des systèmes de compensation et de règlement de
titres.
- Karyotis C., Les systèmes de règlement-livraison européens, Vers l’unification des marchés, Banque Editeur
2003, 2ème édition
208
High-cost or inefficient CSD services can potentially increase the cost of trades and thus inhibit investor
demand. There is therefore a « feedback » effect from CSD efficiency to investor demand inducing a
complementary between the demand for the underlying tradable assets and the demand for CSD services.
91
Le cadre théorique de l’efficience d’un système de paiement, et d’un système de règlementlivraison de titres, selon nous, s’entend comme celui qui étudie le couple minimisation des
risques et minimisation des coûts (risk-cost trade-off paradigm) 209.
Plus les systèmes de paiement et de règlement-livraison de titres sont efficients (c’est-à-dire
performants, moins coûteux et minimisant les risques), plus les marchés financiers sont
profonds et liquides. Lato sensu, ceci signifie qu’une bonne gestion des transactions, dans une
économie de marché, repose indiscutablement sur l’efficience du système de paiement et du
système de règlement-livraison de titres 210.
Une diminution des coûts de transaction encourage une hausse des volumes de transaction et
donc de la liquidité du marché. Sur des marchés plus liquides, les entreprises s’introduisent
davantage ; ce qui peut permettre de réduire encore les coûts pour les investisseurs qui, en
outre, auront un choix plus important en matière de volumes 211.
De surcroît, sur le plan des transactions internationales, pour juger de l’attractivité d’une
place, il ne faut pas s’arrêter au seul système informatique de traitement mais au couple
banques conservatrices – système de règlement-livraison. Il faut de bons réseaux bancaires
pour rabattre les affaires sur une place donnée et un bon système de dénouement pour
conclure les opérations et asseoir la réputation d’une place.212
Les bourses émergentes l’ont compris. Dès leur création, elles ont adopté des systèmes de
règlement-livraison et des systèmes de paiement efficaces, basés sur les modèles les plus
performants des places boursières traditionnelles. Car un processus de clearing efficient
permet de simplifier les flux d’information (avec une réglementation et une transparence ad
hoc). Mais un système efficient permet également de décentraliser et d’automatiser les
fonctions de clearing (création de chambre de compensation privée) pour réduire les délais
dans le processus de paiement, et enfin de mettre en place des procédures de sécurité pour
réduire les ordres de paiement erronés ou non autorisés. Un processus de règlement efficace,
Giddy I., Saunders A., Walter I., Alternative models for clearance and settlement : the case of the single
European capital market, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
209
Gilbert R.A., Did the Fed’s founding improve the efficiency of the US payments system, Federal Reserve
Bank of St. Louis Review May – June 1998
210
Hancock D., Humphrey D. B., Payment transactions instruments and systems : a survey, Journal of Banking
& Finance, 1998
211
Goldberg L., Kambhu J., Mahoney J.M., Radecki L., Sarkar A., Securities trading and settlement in Europe :
Issues and outlook, Federal Reserve Bank of New York, April 2002
212
Boissieu (de) C., Adaptation du système relit aux opérations transfrontières, Rapport de mission 1994
92
quant à lui, engendre des transferts irrévocables et inconditionnels, permettant une gestion des
risques de liquidité et de crédit par les participants eux-mêmes, et du risque systémique par les
autorités publiques 213.
Afin de démontrer l’importance de l’efficience d’un système de règlement-livraison de titres,
nous reprenons l’exemple de l’évolution du système Fedwire aux Etats-Unis :
Gilbert et al.
214
expliquent que le Federal Reserve Board a créé le « Gold settlement Fund »
pour régler les transferts intra et inter – districts par voie scripturale, puis a mis en place un
système « leased-wire communication » entre ses banques fédérales pour gérer sans frais leurs
transferts quotidiens. En 1918, ces deux systèmes ont formé le futur système Fedwire,
devenu, ensuite dans les années soixante, inefficient pour cause de risques opérationnels ;
dans les années quatre-vingt ledit système a été revu et Fedwire est devenu un RTGS – Realtime Gross Settlement System (système à règlement brut de gros montants).
Aussi les auteurs tirent-ils la conclusion suivante : Un système de paiement doit être capable
de répondre aux évolutions des marchés et de la technologie, c’est-à-dire être flexible sur ses
applications, sa gestion, son réseau, son management des risques et sur sa structure, en accord
avec son gestionnaire et ses clients.
En conséquence le gestionnaire du système de paiement, ou du système de règlementlivraison, doit savoir percevoir l’évolution de ses clients et la prendre dûment en compte, et
doit, à tout moment, connaître le degré de satisfaction de ses clients pour éviter que ces
derniers n’utilisent d’autres systèmes concurrents.
Dans un rapport relatif aux mécanismes de compensation et de règlement-livraison
215
et de
leur évolution dans le futur, la commission européenne définit un système de règlementlivraison efficient comme étant celui qui offre les services appropriés au juste coût, qui soient
compétitifs et sûrs. Il ajoute que, pour être compétitif au niveau mondial, un marché financier
doit présenter la solidité et la liquidité nécessaires et être efficace, sûr, transparent et d’un bon
rapport coût – efficacité. Si les coûts d’utilisation des systèmes de compensation et de
règlement-livraison sont trop élevés, ou si l’infrastructure ne permet de disposer des
fonctionnalités souhaitées, les participants au marché pourraient renoncer à investir ou
213
OECD, Transformation of the banking system : Portfolio restructuring, privatisation and the payment system,
1993
214
Gilbert M. A., Hunt D., Winch C. K., Creating an intregrated payment system : The evolution of Fedwire,
Federal Reserve Board of New York, July 1997
215
Andria (rapport) – Parlement Européen, Les mécanismes de compensation et de règlement-livraison dans
l’Union européenne – principaux problèmes et défis futurs, Document de séance du 4.12.2002
93
recourir à d’autres méthodes, potentiellement plus risquées, pour assurer le dénouement de
leurs transactions.
5. La notion de système et son efficience
Nous présentons ici quelques éléments de l’analyse systémique pour nous permettre de mieux
approcher l’efficience technique d’un système de règlement-livraison de titres.
Tout système est un ensemble d’éléments interdépendants qui constituent visiblement une
structure organisée. En ce sens, un marché financier est un système dont les composantes sont
les dispositions commerciales et réglementaires et les opérateurs 216.
Le but d’un système reste l’atteinte d’un objectif. Ce système est généralement ouvert, c’està-dire qu’il interagit avec son environnement. Il peut être formé de sous – systèmes et peut
lui-même être partie intégrante d’un supra – système.
Si nous reprenons cette définition, donnée par Aubert
217
, et l’appliquons à notre sujet, un
système de règlement-livraison interagit avec l’environnement du marché financier, il est
composé de systèmes de gestion des titres (systèmes d’appariement et de dénouement des
transactions…), et fonctionne en parallèle des systèmes de gestion des ordres, des systèmes de
conservation des titres et des systèmes de paiement ; il est partie intégrante du système
financier 218.
5.1 Approche systémique et réseaux
Un système est un ensemble d’éléments en interaction (interrelations mutuelles) entre eux et
avec l’environnement 219.
216
OCDE, Risques systémiques dans les marchés de valeurs mobilières, 1991
Aubert B., Les technologies de l’information et l’organisation, Gaëtan Morin Editeur 1997
218
Les acteurs financiers sont fortement interdépendants, leur activité « fait système », d’où l’expression de
« système financier ».
Plihon D., Regulation du système financier national et international : Faut-il, et comment, réguler les marchés
financiers ?, Cahiers français n°301, juin 2001
219
Bertalanffy von L., General systems theory, foundation, development, applications, G. Braziller 1968
217
94
Le Moigne
220
décrit un système comme étant quelque chose qui, dans un environnement
donné, pour une finalité précise, fonctionne d’une manière particulière selon une structure
stable au départ, et se transformera dans le temps, conformément à l’évolution des pratiques.
Aussi un système de règlement-livraison est-il la réunion de systèmes de gestion des ordres
après leur exécution en bourse et des procédures post-boursières, dans un environnement de
marchés internationaux, qui a pour finalité d’optimiser le post-bourse, en dénouant les
transactions boursières, selon une structure reposant sur des ordinateurs en réseaux, et
évoluant dans le temps, au fil des risques et des coûts à minimiser.
Si un système est quelque chose qui opère une transformation entrée – sortie
221
, un système
de règlement-livraison, selon nous, transforme des ordres de bourse en des imputations dans
des comptes titres et des comptes espèces.
Il repose sur des systèmes d’informations dont les fonctions de base sont 222 :
-
La saisie (pour obtenir des données sous une forme permettant leur stockage, leur
traitement, leur transmission)
-
La transmission (déplacement des données dans l’espace)
-
Le stockage (conservation organisée)
-
Le traitement (création de données nouvelles…)
-
La restitution (des données sous une forme communicable)
Les apports des technologies sont la compression du temps et de l’espace, l’expansion de
l’information stockée, sa flexibilité d’usage.
Un système de règlement-livraison de titres se définit comme étant :
-
du point de vue formel, un système opérant à la livraison définitive des titres d’un vendeur
à un acheteur,
-
du point de vue fonctionnel, un système reposant sur la simultanéité des règlements
espèces et des livraisons de titres,
220
Le Moigne J. L., La théorie du système général, 2° Edition PUF 1984
Melèse J., L’analyse modulaire des systèmes de gestion, Ed. Hommes et techniques 1972
222
Reix R., Systèmes d’information et management des organisations, 3° Edition Vuibert 2000
221
95
-
du point de vue praxéologique, un système permettant de minimiser les suspens, c’est-àdire d’optimiser la gestion post-bourse des transactions en limitant les risques.
Au-delà de l’approche systémique, force est de constater que les marchés financiers, et avec
eux les systèmes sur lesquels reposent leurs procédures, se sont appuyés sur les réseaux.
A la fin du dix-neuvième siècle, le succès des marchés à terme de céréales repose,
notamment, sur les conséquences directes de la précision et de la prévisibilité des livraisons à
venir. Un siècle plus tard, les places financières se sont informatisées. En conséquence, il est
devenu possible d’effectuer une transaction sur le réseau lui-même sans utiliser les services
d’un intermédiaire financier.
La technologie applicable aujourd’hui aux marchés financiers peut être analysée, d’un point
de vue économique, comme un exemple de réseaux. Il s’agit d’un réseau d’informations
disposant de multiples points d’entrée. L’organisateur détermine, dans ses règles, quels
opérateurs ont le droit d’envoyer des messages pour signaler leurs intentions d’acheter ou
vendre des quantités de titres à des prix donnés et comment ils doivent le faire. L’entreprise
de marché transforme ensuite ces informations en transactions à travers le processus de
découverte des prix. Un autre réseau, dont le degré de dépendance vis-à-vis du premier peut
varier, se charge de régler et livrer les opérateurs 223.
Les fonctions des réseaux au sein de ces marchés financiers peuvent alors s’analyser comme
présentées dans le schéma 9 224.
223
Champarnadaud F., Remay V., Places financières et concurrence entre marchés boursiers, Revue d’Economie
Financière, mars 2000
224
Prométhée, Networks and markets : more than a marriage of convenience, Perspectives n°21, December 1992
96
Schéma 9 : Fonctions des réseaux sur les marchés financiers
Information sur l’offre
et la demande de
valeurs mobilières
Edition de comptes
Transaction et
formation des
prix
Routage
Supervision
Initiation des ordres
Programmes
d’ordres
automatiques
Confirmation
Règlement et livraison
Conservation
Prêt de titres
Selon Bressand et Distler
225
, les innovations technologiques ne trouvent véritablement leur
place sur la scène internationale qu’à condition que puissent s’instaurer des relations
satisfaisantes entre opérateurs, superviseurs et utilisateurs. Aussi, selon eux, le développement
rapide du réseau de règlement-livraison d’Euroclear n’a pu se poursuivre qu’en transformant
la structure initiale (dans laquelle Morgan était opérateur et superviseur) en une coopérative.
225
Bressand A., Distler C., Le « village global », technologies d’information et marchés-réseaux, Futuribles
n°192, 1994
97
Pour qu’un réseau soit viable, il lui faut trois composantes :
-
l’infrastructure : les acteurs doivent pouvoir entrer en contact les uns avec les
autres,
-
l’infostructure : c’est l’ensemble des règles privées et publiques rendant possible
l’établissement et la bonne fin des contrats,
-
l’infoculture : ce sont les attentes et les règles non écrites qui conditionnent le
type d’initiatives que chacun peut prendre et la manière dont seront réglés les
problèmes auxquels les règles préétablies n’ont pas prévu de réponses.
Curien
226
reprend ces mêmes notions pour présenter la morphologie des réseaux et les
applique à la banque. Les dépôts et crédits, et les produits financiers sont les services finals,
élaborés et transformés par le jeu des transactions sur les marchés (front office) ; ils sont
collectés et distribués à travers une infrastructure de guichets et l’ensemble des opérations est
coordonné par un système d’information
227
et de gestion (back office), constituant
l’infostructure.
Dans le cadre des activités titres et des systèmes de règlement-livraison, la première
composante requiert l’interconnexion. La seconde composante est donnée, par exemple, par la
Directive européenne sur les services d’investissement de 1993 avec les principes de corégulation et de reconnaissance mutuelle. Et la troisième composante consiste en ce que les
acteurs du système financier se perçoivent et conçoivent leurs stratégies dans une perspective
globale (c’est l’exemple des recommandations du Groupe des Trente édictées en 1989 228).
226
Curien N., Economie des réseaux, La découverte 2000
L’expression « système d’information » remonte, en France aux années soixante-dix. Le concept a émergé
aux Etats-Unis, dans les années soixante, sous le nom de Management Information Systems. Un système
d’information considère des informations répétitives, des ensembles d’informations, utilisant les mêmes canaux,
les mêmes supports, et portant sur des choses analogues ; il s’inscrit dans un système social où il existe des
règles et fonctionne sous la responsabilité d’une autorité régulatrice ; il prend en charge tous les éléments
nécessaires à la recopie, au transport et à la mise en forme de l’information et machines placés en des lieux
différents.
Un système d’information se définit donc par l’information qu’il véhicule et par la manière dont il l’exprime sur
ses différents supports.
Peaucelle J. L., Systèmes d’information, Encyclopédie de gestion, 2° Edition 1997
228
Le lecteur se reportera au §4.1 du chapitre III
227
98
Reprenant le rapport Stoffaës
229
, BNP - Paribas
230
applique la notion de services d’intérêt
économique général aux chambres de compensation et dépositaires centraux de titres. Ces
institutions sont, en effet, des infrastructures de réseaux assurant des fonctions centrales de
facilités essentielles pour les marchés financiers, tandis que les services financiers liés à la
prise de risque de crédit et à l’accès aux infrastructures post-marché, sont ouverts à la
concurrence.
Les infrastructures post-marché présentent trois caractéristiques :
-
elles offrent à tous les utilisateurs des services qu’ils ne peuvent exercer euxmêmes et dont le coût diminue avec le nombre d’utilisateurs,
-
elles sont nécessaires à tous les opérateurs des marchés financiers concurrentiels
qui ne pourraient exercer leurs activités sans accéder à ces opérations à un coût
économique ou concurrentiel,
-
elles ont été mises en places pour limiter les risques encourus sur les marchés
financiers, en permettant d’éviter les défaillances ou les erreurs dans les
opérations de compensation et de règlement-livraison, et dégager des économies
d’échelle.
Le long de la chaîne titres, le rôle de chaque infrastructure se décrit au travers de quatre
pôles :
-
la bourse, lieu de rencontre entre les émetteurs et les investisseurs : elle apporte
de la liquidité aux valeurs listées et remplit une mission d’intérêt général en
offrant la découverte des prix,
-
la chambre de compensation joue le rôle d’une assurance contre la faillite d’un
participant de marché,
-
le dépositaire central de titres remplit une mission notariale (en garantissant
l’existence des titres négociés) et une mission de gestion du système de
règlement-livraison de titres (en assurant une circulation efficace et sûre des
titres).
-
La banque centrale joue le rôle d’agent de règlement (en assurant la sécurité du
règlement espèces des transactions).
229
Stoffaës C (Rapport du Groupe de réflexion présidé par), Vers une régulation européenne des réseaux, juillet
2003
230
BNP – Paribas, Contribution de BNP – Paribas Securities Services au « Livre vert sur les services d’intérêt
général » de la Commission Européenne du 21 mai 2003, septembre 2003
99
5.2 L’efficience d’un système
La notion d’efficience est définie par Simon 231 en 1957 : c’est le choix entre diverses options
qui produit le meilleur résultat pour l’application de possibilités données.
Celle d’efficience technique stricto sensu est développée, la même année, par Farrell 232 : elle
consiste en la maximisation du niveau de production à obtenir pour une combinaison donnée
de facteurs. Son concept indique donc le degré de succès dans l’utilisation des ressources
productives.
Enfin, une notion particulière est celle d’efficience – X développée par Leibenstein
233
en
1966. Elle repose sur l’idée que les entreprises n’exploitent pas leurs ressources de façon
optimale. A conditions identiques en termes de technologie et de combinaisons de facteurs de
production, certaines entreprises n’obtiennent pas les mêmes résultats que les autres eu égard
à la productivité. Pour un nombre d’inputs donné, l’efficience – X se mesure par la différence
entre le niveau de production observé dans l’entreprise et le maximum possible. La notion
d’efficience – X renvoie à celle d’inefficacité technique
d’identifier les causes d’inefficacité potentielle
235
234
. Mais il est souvent difficile
. Cette notion est donc peu opérationnelle
pour les systèmes de règlement-livraison de titres. Nous la reprenons cependant pour une
étude de prestations post-bourse particulières dans un établissement bancaire donné 236.
Il semble que tout gestionnaire de système ait un objectif suprême : l’efficience du
fonctionnement du système, c’est-à-dire en d’autres termes, un objectif de réduction des
coûts. Un gestionnaire tant soi peu vigilant surveille son système et identifie les points de
231
Simon H., A study of Decision – Making processes in Administrative Organisation, Administrative
Behaviore, The Free Press 1957
232
Farrell M.J., The measurement of productive efficiency, Journal of Royal Statistical Society, 1957
233
Leibenstein H., Allocative efficiency versus X – efficiency, American Economic Review, June 1966
234
Les inefficiences résultent d’imperfections dans l’organisation interne des entreprises.
Frantz R., Intrafirm (In)efficiencies : Neoclassical and X – efficiency perspectives, Journal of Economic Issues,
September 1988
Ceci s’applique notamment pour les banques car l’inefficience – X se révèle par nature essentiellement technique
en ce sens qu’elle représente simplement une sur utilisation des moyens de production plutôt que leur mauvaise
affectation.
Berger A.N., Humphrey D.B., Smith F.W., Economies d’échelle, fusions, concentration et efficacité :
L’expérience dans la banque américaine, Revue d’Economie Financière n°27, 1993
235
Jeffers E., Oheix V., Concurrence et concentration bancaires en Europe, Revue d’Economie Financière n° 72,
novembre 2003
236
Cf. Chapitre V.
100
gaspillage exagérés ; si c’est un bon gestionnaire, il fait de son mieux pour éliminer ces
gaspillages dans le but de réduire les coûts totaux de fonctionnement du système 237. Car une
production est efficiente si tous les produits sont fabriqués au moindre coût.
L’efficacité d’un système peut être mesurée en tant que contribution à la réalisation des
facteurs clés de succès d’une entreprise 238.
Dans notre réflexion globale, l’entreprise est la bourse de Paris, d’une part, et Euroclear
France, d’autre part. Leurs facteurs clés peuvent être, à titre d’exemples, la baisse des coûts de
transaction, le nombre d’entreprises cotées, les volumes de transactions ou le rapport
capitalisation boursière / PIB, pour la première ; le nombre de livraisons contre paiement ou le
nombre de comptes gérés, pour la seconde.
Mais faut-il évoquer l’efficience ou l’efficacité ?
Les innovations de process contribuent à développer davantage l’efficacité ("effectiveness")
que l’efficience ("efficiency"), leurs objectifs étant d’améliorer la qualité de service. Tandis
que la notion d’"effectiveness" renvoie au résultat, celle d’"efficiency" renvoie à la
performance. Gallouj
239
, qui aborde ainsi ces notions, cite l’exemple des guichets
automatiques de banque : leur installation prévaut, outre à la réduction des coûts, surtout à
l’augmentation de la qualité du service en facilitant les retraits d’argent, dans un marché
bancaire et financier saturé.
La différence entre ces deux notions se résume dans le schéma 10 240.
237
Marmuse C., Performance in Encyclopédie de Gestion 2ème édition, Economica 1997
Reix R., Systèmes d’information et management des organisations, 3° Edition Vuibert 2000
239
Gallouj F., Economie de l’innovation dans les services, L’Harmattan 1994
240
Coulter M., Robbins S.P., Management, 6th edition, Prentice Hall International 1999
238
101
Schéma 10 : Distinction entre efficacité et efficience
Efficience
Efficiency
(moyens à mettre en œuvre)
Utilisation des
ressources
Gaspillage élevé
Gaspillage faible
Efficacité
Effectiveness
(objectif à atteindre)
Atteinte de l’objectif
Degré élevé
Degré faible
Focalisation du management pour tendre
vers :
Un faible gaspillage des ressources
(high efficiency)
un degré élevé d’atteinte des objectifs
(high effectiveness)
Par efficience, on entend l’utilisation de ressources dans la prestation de services de paiement,
la prise de mesures visant à encourager l’innovation, la détermination des prix et la pertinence
des services de paiement. Dans l’étude des prestataires de services de paiement, la prestation
de services au coût le plus compétitif constitue un objectif spécifique ; l’efficience du point de
vue du fournisseur (efficience de l’offre) de services de paiement se manifeste par un coût
moyen peu élevé. Le rythme de l’innovation technologique est également source d’efficience.
Un système suffisamment souple pour absorber rapidement les nouvelles technologies et les
innovations profite aux fournisseurs et aux utilisateurs ; mais il nécessite un environnement
institutionnel et réglementaire souple. Pour les utilisateurs, l’efficience se manifeste, certes au
travers des coûts bas, mais également au travers de la notion de qualité ; celle-ci se rapporte à
des caractéristiques telles que la vitesse et la certitude du règlement ainsi que la facilité
d’accès aux instruments. Enfin, la capacité de renseigner les utilisateurs sur la disponibilité,
les risques et les prix des prestations du système concourent à l’amélioration de l’efficience.
Un système de paiement compétitif attire une vaste gamme d’utilisateurs et, grâce à
102
l’utilisation économique qu’il fait des ressources, contribue de façon positive à l’efficience de
l’économie aux niveaux national et international 241.
C’est dans ce cadre que notre recherche d’efficience technique s’inscrit.
Notre schème de causalité structurelle repose sur le fait qu’un système de règlement-livraison
est sous la dépendance du système financier. Notre schème fonctionnel est l’étude des
exigences d’un système de règlement-livraison dans un système financier fiable, sécurisé et
fonctionnant à moindre coût.
Un système de règlement-livraison est donc, pour nous, un système qui minimise les coûts et
les risques.
Les domaines d’efficience d’un système sont au nombre de trois 242 :
-
le coût du traitement du système central déterminé par l’opérateur, c’est-à-dire le
coût de traitement des opérations et échanges entre les participants ; ce coût est
explicite et pris, en général, en compte dans les commissions et frais payés par
les participants ;
-
le coût de traitement des participants eux-mêmes, qui prend en compte la
préparation des instructions, la transmission et la réception des messages, le
traitement interne et le rapprochement des instructions ;
-
le coût des liquidités qui dépend du volume de liquidités que le système impose
aux participants de détenir pour traiter leurs échanges ; c’est donc un coût
d’opportunité de la détention de telles liquidités (par rapport aux autres besoins
de liquidités) et les conditions dans lesquelles des liquidités intradays sont mises
à disposition ; en conséquence, il peut s’agir soit d’un coût explicite (tarification
des opérateurs), soit d’un coût implicite (coût d’opportunité de la détention des
sûretés).
Au-delà de ces coûts, il nous semble important de rajouter d’autres éléments mis en place par
les autorités ad hoc pour limiter les risques, à savoir : le coût des sûretés, les pénalités pour
241
Banque du Canada et Ministère des finances, Le système de paiement au Canada, document d’information
générale à l’intention du Comité consultatif sur le système de paiement, mai 1997
242
Bank for International Settlements, Core principles for systemically important payment systems, January
2001
103
découverts intradays ou encore les limites imposées aux participants quant au montant de
leurs emprunts.
Une absence d’efficience se mesure par :
-
une mauvaise performance opérationnelle liée, par exemple à des problèmes
techniques ou des délais de traitement trop longs ou variables ;
-
une surcapacité persistante ;
-
une ampleur des coûts, éventuellement répercutée sur les frais facturés à la
clientèle ;
-
des frais de démarrage ou d’exploitation élevés (lorsqu’un participant adhère au
système ou le quitte).
Deux indicateurs font alors apparaître l’inefficience :
-
des échanges maintenus dans les files d’attente par manque de liquidités titres ou
espèces suffisantes pour un règlement rapide ;
-
des obligations pour les participants de détenir des liquidités intradays
considérables parce que le mécanisme des files d’attente manque de souplesse.
En tout état de cause, l’ensemble des acteurs a saisi les enjeux de l’efficience technique d’un
système de règlement-livraison de titres :
les autorités de tutelle afin de minimiser les risques,
les prestataires (institutions financières) afin de réduire les coûts,
les utilisateurs afin d’optimiser leurs modalités de gestion post-bourse des
transactions.
104
Conclusion
Les espèces ont rapidement fait l’objet d’une compensation dans l’histoire des échanges. Les
valeurs mobilières, quant à elles, sont nées plus tardivement et les transactions ont crû
progressivement seulement. Aussi l’amélioration de leur traitement n’est-elle apparue cruciale
qu’un siècle environ après la naissance des bourses.
Mais dans la seconde moitié du vingtième siècle, les marchés financiers ont évolué au fil de la
déréglementation, des innovations financières et de la marchéisation des principales
économies. Les procédures boursières d’abord, et post-boursières ensuite, ont alors pris toute
leur importance dans la stratégie de développement international des places financières et de
leurs acteurs.
Certains économistes se sont tournés vers une nouvelle approche, celle de la finance
fonctionnelle. Face à l’évolution incessante des institutions domestiques et supranationales, ils
ont remarqué que les procédures, à quelques modifications près, restaient identiques dans le
temps et dans l’espace. Ils ont, en conséquence, réfléchis à la performance de ces fonctions
elles-mêmes plutôt que de s’intéresser aux institutions souvent différentes d’une place à une
autre.
Et parmi ces fonctions, celle de règlement-livraison leur est apparue fondamentale dans
l’accomplissement technique, stratégique et commercial d’une place financière.
Il est désormais possible de décliner les activités boursières et post-boursières sous la forme
d’une chaîne de valeurs. De facto, une bourse et ses membres peuvent faire valoir des
arguments techniques et commerciaux tout au long de cette chaîne pour attirer les émetteurs,
les investisseurs et les intermédiaires financiers.
Les bourses sont devenues des entreprises gérant des systèmes informatiques.
Un système de règlement-livraison a lieu d’être pour transformer des ordres de bourse en des
imputations dans des comptes titres et espèces.
Et son efficience repose essentiellement sur une minimisation des risques et des coûts.
105
Schéma 11 : Lien entre système de paiement et système de règlement-livraison
Source : Bank for International Settlements, Real-time gross settlement system, March 1997
La nature de la relation entre un système RTGS et un système de règlement-livraison de titres
dépend essentiellement de la structure et du mode de gestion de ce système de règlementlivraison. Le lien est particulièrement important si le système de règlement-livraison répond aux
normes du modèle I de la Banque des Règlement Internationaux, qui opère en temps réel, sur une
base brute pour les titres et les espèces.
Ensuite la nature de la relation dépend également du fait que le gestionnaire du système de
règlement-livraison de titres gère ou non lui-même les comptes espèces de ses participants.
Néanmoins, dans les deux cas, la gestion des espèces consécutives passe en continu par le
RTGS .
A titre d’exemple, nous montrons ci-dessous l’exemple des systèmes suisses, Secom (système de
règlement-livraison de titres) et SIC (RTGS).
SECOM
SIC
File d’attente
File
d’attente
Titres
non
non
oui
Provision
titres
Message de
règlement
espèces
oui
Transfert
irrévocable des
titres
OK
Débit / crédit
irrévocables
106
Chapitre II
Les fonctions d’un système de règlement-livraison
La modernisation d’une place financière ne peut se limiter au front – office et
au routage des ordres, sous peine de voir ses bénéfices réduits par des
traitements administratifs lourds et peu sécurisés. La croissance du volume
des transactions et l’absence de règles communes avaient conduit à une
multiplication des procédures de règlement-livraison. Ces insuffisances
pouvaient ternir l’image d’une place et engendrer des coûts prohibitifs pour
chacun des intervenants. Toute place se doit d’améliorer la sécurité de son
marché des valeurs mobilières, d’assurer la neutralité nécessaire à la gestion
de la trésorerie des intervenants, de contribuer à la réduction des coûts liés
au traitement des opérations de règlement-livraison.
Suant G., Relit : Expérience d’un projet de Place, Paris 1992
Les procédures post-marché entrent en fonction dès lors qu’une transaction est intervenue
entre deux contreparties sur un marché, quel que soit le marché et quelque l’actif financier
négocié. Il s’agit, pour une négociation boursière, de livrer les titres et de régler les espèces.
Depuis une vingtaine d’année, ces procédures sont informatisées permettant de minimiser le
temps de traitement. Mais les risques demeurent à chaque étape du processus, et sont d’autant
plus forts que le nombre d’intermédiaires est important.
En outre, les traitements, donc les risques, diffèrent selon qu’il s’agit d’une transaction
domestique ou d’une transaction transfrontalière.
La plupart des grandes places financières ont progressivement adopté des systèmes de
règlement-livraison de titres leur permettant de s’adapter à un délai de place et à la
simultanéité des règlements espèces et des livraisons de titres. Aussi les risques ont-ils
diminué au fil de l’informatisation des procédures.
Dans ce chapitre, nous abordons les procédures de règlement-livraison des transactions
domestiques et transfrontalières et les risques y attenant.
107
1. Les étapes des opérations de règlement-livraison
1.1 Schéma général
La chaîne de traitement du titre recouvre l’ensemble des opérations qui assurent la bonne fin
des transactions menées par les intervenants sur un marché financier (achats et ventes fermes,
cessions temporaires, prêt-emprunt de titres …). Les filières de traitement reposent sur trois
pôles fonctionnels essentiels – la
négociation, la compensation et les opérations de
règlement-livraison – qu’il est possible de transcrire comme exposées dans le schéma 1
243
:
Schéma 1 : Filière de traitement des titres
Nature des opérations
Fonctions et systèmes utilisés
Engagement de l’opération
Négociation
Gestion des risques
Compensation
•
•
•
•
Règlement-Livraison
Dénouement en comptes
•
•
243
Réception et enregistrement des
opérations
Calcul des positions nettes
Gestion des dispositifs de maîtrise
des risques
Transfert des ordres vers le système
de règlement-livraison
Dénouement
des
engagements
réciproques de l’acheteur et du
vendeur
Passation des écritures en compte
assurant le caractère définitif des
transactions
Duvivier A., Hervo F., La chaîne de traitement des opérations sur titres en Europe, Bulletin de la Banque de
France n°99, mars 2002
108
Tandis qu’une négociation boursière a eu lieu entre deux agents économiques, les procédures
post-bourse 244 s’enclenchent, automatiquement, depuis quelques années :
-
Assurer la livraison des titres sur le compte titres de l’acheteur et débiter son compte
espèces du montant correspondant ;
-
Créditer, à l’inverse, le compte espèces du vendeur du même montant, moins les courtages
et les frais, et débiter son compte titres.
La procédure est, en apparence, simple. En réalité, elle est extrêmement complexe puisqu’elle
ne s’achèvera, au mieux et sur les places les plus avancées techniquement, que trois jours
après la transaction. Et elle met en jeu, outre le vendeur et l’acheteur, leurs banques
gestionnaires des comptes titres et leurs négociateurs, l’organisme de clearing, le dépositaire
central gestionnaire du système de règlement-livraison de titres et teneur de comptes titres
central, et la banque centrale. Les règlements et livraisons de titres concernent la chaîne
d’accords puis d’échanges de titres contre espèces consécutives aux négociations sur valeurs
mobilières.
Depuis les années quatre-vingts, les grandes places financières internationales sont
confrontées à un accroissement considérable du volume d’échange et à une mondialisation
des marchés
245
. La modernisation et l’automatisation des procédures de règlement et de
livraison des titres constituaient, et constituent encore, un enjeu décisif pour une place dans sa
quête de compétitivité au niveau international et dans la performance de ses intermédiaires 246.
Désormais les procédures sont automatisées, mais l’enjeu crucial est devenu celui de la
sécurisation desdites procédures.
Parce que les places sont interconnectées, les montants négociés colossaux, les systèmes de
paiement et de règlement-livraison de titres sont reliés les uns aux autres, et qu’une
défaillance d’un système ou d’un intermédiaire peut se propager d’un système à un autre,
d’une place à une autre, tout système de règlement-livraison de titres doit être efficient, afin
de minimiser les risques, mais également les coûts.
244
Le post-marché, qui regroupe l’ensemble des traitements administratifs des titres et instruments financiers
(circulation, comptabilisation …) est le prolongement technique de l’intermédiation de marché. En pratique, les
exigences des investisseurs, la compétition entre places financières ainsi que la complexité et les coûts croissants
de ces métiers, qui imposent une logique industrielle, font de plus en plus de ces fonctions techniques des
métiers à part entière.
Guerchonovitch P., Les métiers des titres en France, Bulletin de la Banque de France, janvier 1997
245
L’économique d’Aristote était domestique. Depuis des siècles, elle est devenue politique ; et cette politique
est indispensable aujourd’hui à tous les niveaux, régional, national, continental, mondial.
Barreau H., L’épistémologie, PUF Que Sais-je ? 1990
109
Au-delà de cette présentation générale, les étapes des traitements post-bourse se décomposent
telles qu’exposées dans le schéma 2 247.
246
Bacot F., Dubroeucq P.F., Juvin H., Le Nouvel age des marchés français, Editions Les Djinns 1989
Karyotis C., Les systèmes de règlement-livraison européens, Vers l’unification des marchés, Banque Editeur
2003 2ème Edition
247
110
Schéma 2 : Procédures de règlement-livraison
Donneur
d’ordre A
J
Donneur
d’ordre B
Réponse
après
exécution
routage
Réponse
après
exécution
routage
Marché
Confirmation
&
compensation
Compensateur
A
Compensateur
B
Dépositaire
Central
non
Appariement
(matching)
oui
Information et gestion prévisionnelle
suspens
Solde
créditeur
Contrôle de
Provision titres
Solde
débiteur
Prêt ou
Pension
Demande de prêt ou
pension irrecevable
Contrôle de
Provision
espèces
Solde
créditeur
Solde
débiteur
Demande
De prêt
Compensation : mouvements en titres et espèces
J+3
111
Selon le schéma 2, après une décision d’investissement, intervient une négociation (sur un
marché réglementé ou non) qui se terminera par un dénouement, donc un règlement en
espèces et une livraison de titres entre deux contreparties.
Avant le dénouement, un appariement (ou matching) des instructions de l’acheteur et du
vendeur est nécessaire pour réduire au maximum les risques de mésentente entre les deux.
Celui-ci doit également s’accompagner d’un reporting.
Après appariement, le dépositaire informe les négociateurs afin qu’ils procèdent à une gestion
prévisionnelle efficace en titres et en espèces.
La phase dénouement de la négociation démarre ensuite par un contrôle de provisions (afin de
minimiser les risques de non-livraison pour l’acheteur et de défaut de règlement pour le
vendeur).
Le dénouement s’effectue selon le principe de la livraison contre paiement, accompagnée
d’une information destinée aux intermédiaires et est définitivement entériné par imputation
des comptes titres et comptes espèces des intermédiaires.
1.2 Les différentes étapes
L’étape préalable aux opérations de règlement-livraison est évidemment la conclusion d’une
transaction.
Dans une grande majorité des cas, cette transaction se conclut sur un marché réglementé mais
il peut également s’agir d’une transaction de gré à gré ou d’une transaction via un ECN –
Electronic Communication Network. Et selon l’origine du mouvement, les risques rencontrés
dans les phases de règlement-livraison ne sont pas identiques.
Un marché réglementé est considéré comme tel lorsque son fonctionnement est assuré par une
entreprise de marché.
Cette dernière fixe les règles relatives aux :
-
conditions d’accès à ce marché et d’admission à la cotation,
-
dispositions d’organisation des transactions,
-
conditions de suspension des négociations sur instruments financiers,
-
enregistrement et publicité des négociations.248
112
Certains auteurs
249
qualifient de réglementé un marché sur lequel une chambre de
compensation intervient pour enregistrer la négociation et «s’intercaler » entre l’acheteur et le
vendeur, afin de se substituer à l’un ou l’autre en cas de faillite d’une des deux contreparties.
Cependant cette différence entre marché réglementé et marché de gré à gré commence
progressivement à s’estomper depuis que l’activité des chambres de compensation s’étend aux
marchés de gré à gré, telle Clearnet pour Euronext 250.
La passation d’un ordre par un ECN a des conséquences totalement différentes sur les
opérations de règlement-livraison.
Rappelons que le principe d’un ECN repose sur un rapprochement, via ledit système, entre les
acheteurs et les vendeurs, garantissant l’anonymat des investisseurs et proposant des frais de
transaction réduits. De surcroît, les investisseurs accèdent simultanément à toutes les places
internationales ; les systèmes sont en effet accessibles 24 heures sur 24, permettant ainsi de
réceptionner et traiter les ordres au-delà des plages d’ouverture des bourses traditionnelles.
Une typologie rapide des systèmes électroniques sur les marchés de gré à gré permet de
distinguer 251 :
-
les systèmes de transactions permettant de rapprocher les intérêts réciproques des
participants (matching) et de conclure des transactions ; il y a confrontation d’une offre et
d’une demande, donc un marché.
-
Les systèmes de distribution, plates-formes propres aux établissements qui opèrent dans
une optique de distribution et centralisation des volumes et visent à établir et à sécuriser
une relation bilatérale entre l’intervenant de marché et ses clients finaux.
-
Les systèmes d’émission et d’adjudication sur le marché primaire qui automatisent la
relation entre l’émetteur et les intermédiaires de marché en charge de la distribution, voire,
le cas échéant, permettent aux émetteurs de « toucher » directement les investisseurs
finaux.
248
Directive européenne sur les services d’investissement du 10 août 1993
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Sirri R., Tufano P., La finance sans frontière, Economica
1998
Simon Y., Marchés dérivés de matières premières et gestion du risque de prix, Economica 1995
250
Des tendances ont été observées, spécialement de la part de marchés de gré à gré organisés fonctionnant sur la
base de conventions cadres de place pour se rapprocher des principes de fonctionnement des marchés
réglementés, notamment en bénéficiant de l’élément essentiel que constitue la reconnaissance de la validité
juridique de la compensation.
Stephan P., in Bonneau T. (sous la direction de), La modernisation des activités financières, GLN Joly Editions
1996
249
113
Ces systèmes alternatifs de transaction sont alimentés par l’intermédiaire de réseaux dédiés ou
Internet. Certains, les systèmes multilatéraux, remplissent une fonction de découverte de prix
en amont des bourses qu’ils alimentent ensuite de leurs flux d’ordres ; d’autres sont
internalisés, au sein d’un établissement bancaire par exemple, pour gérer le flux des ordres
émanant des entités et de la clientèle de l’établissement 252.
Si le développement des ECN remet en cause les formes traditionnelles de l’intermédiation
financière, ce phénomène est cependant antérieur à Internet. En effet 253, dès la fin des années
soixante-dix, des « discount brokers » ont concurrencé les grandes maisons de titres en offrant
un service basique de simple négociation sur de gros volumes à des clients peu enclins à
acquérir, directement ou indirectement à travers les commissions de négociation, des services
annexes tels ceux de l’analyse ou de la recherche. La stratégie des discount brokers trouve
ensuite son aboutissement dans le « on-line broker » qui permet de peser sur les prix,
notamment pour l’activité de détail. A priori, Internet peut développer à l’infini des
transactions bilatérales. Il convient donc qu’il soit récupéré par les marchés organisés pour
préserver transparence et liquidité.
Le dénouement de la transaction boursière, dans le cadre d’un ECN, n’est pas automatique,
chaque partie devant traiter directement avec une centrale de clearing ; il y a donc un risque
plus fort de non-livraison ou de non-règlement.
Après la transaction, les termes de celle-ci font l’objet d’un contrôle des conditions (valeur
concernée, nombre de titres, cours de la négociation, contre-valeur en espèces, date de
règlement et contrepartie concernée). Cette phase est celle de la confirmation. Dans un
système de négociation électronique, la confirmation est effectuée par le système lui-même.
Ces systèmes de confirmation électronique (ETC – electronic trade confirmation) apportent à
leurs utilisateurs 254 :
251
sécurité (pas de papier égaré, contrôle des messages),
Fouquet F., Haas F., Impact des mutations technologiques sur les marchés de gré à gré, Bulletin de la Banque
de France n°86, février 2001
252
Duvivier A., Hervo F., La chaîne de traitement des opérations sur titres en Europe, Bulletin de la Banque de
France n°99, mars 2002
253
Choinel A., Rouyer G., Le marché financier, Banque Editeur 1999
254
Cadin T., Rester compétitif grâce aux ETC ?, Banque Stratégie n°112, janvier 1995
114
-
rapidité (confirmation au fil de l’eau, réponse obligatoire et rapide de la contrepartie …),
-
standardisation des messages,
-
simplification du processus en cas d’erreur dans la confirmation,
-
référencement automatique des codes.
Dans les autres systèmes, la confirmation est effectuée, soit par la bourse, soit par l’organisme
de compensation, sur la base des informations fournies par les contreparties. Sur les marchés
de gré à gré, les contreparties procèdent elles-mêmes à cette confirmation par des moyens
électroniques, fax ou messagerie spécialisée.
Si la négociation est effectuée pour le compte d’un tiers (clientèle particulière ou
institutionnelle), et non pour compte propre du participant, celui-ci doit notifier les termes
exacts de la transaction, par le biais d’une procédure de validation de la transaction.
Compte tenu de l’importance de cette phase et des complications que les erreurs peuvent
engendrer dans la suite du processus de règlement-livraison, des efforts sont entrepris, depuis
quelques années, pour simplifier et automatiser le processus de confirmation, voire de le gérer
au fil de l’eau.
Avant le dénouement, certaines places proposent une compensation ou « netting ».
Pour les différents types de compensation existants, le lecteur se réfèrera au chapitre IV § 2.2.
Le dépositaire central procède, ensuite, à l’appariement (ou matching) des avis d’opéré, étape
qui, avec la confirmation, prépare le dénouement des transactions boursières : calcul des
obligations des deux contreparties, livraison et paiement, sur une base nette ou brute, selon
qu’il y a compensation ou non.
Les ordres de livraison de titres et de règlement espèces doivent, alors, être transmis au
gestionnaire du système de règlement-livraison de titres ou système de clearing.
La livraison des titres s’opère maintenant sur toutes les grandes places financières
internationales par virements scripturaux, même si les titres ne sont pas dématérialisés.
Conformément aux recommandations du Groupe des Trente, les virements de comptes à
comptes sont enregistrés auprès de l’organisme teneur de comptes titres, à savoir le
dépositaire central de titres.
115
Un dépositaire central est conservateur, pour le compte de ses participants
255
, de valeurs
mobilières et exécute les livraisons des titres sur instructions des participants ou des
organismes de compensation, tandis qu’un organisme de clearing rapproche les instructions
d’achat et de vente des intermédiaires financiers pour déterminer, valeur par valeur, les soldes
nets en titres et espèces (il procède ainsi à la compensation des mouvements sur valeurs).
Parfois, les deux types d’organismes sont confondus ; c’est le cas de la France 256.
Enfin, un dépositaire central peut directement gérer des comptes espèces et, ipso facto, opérer
aux transferts d’espèces pour le compte de ses participants. C’est le cas des centrales de
clearing internationales, Clearstream et Euroclear Bank. A défaut, la gestion des comptes
espèces appartient à la banque centrale ou à une banque commerciale.
Le transfert des titres et des espèces est provisoire ou irrévocable.
Un transfert provisoire, ou conditionnel, signifie qu’il est, à tout moment, annulable par une
des deux contreparties. Dans le cas contraire, il est dit irrévocable, c’est-à-dire non révocable
par le donneur d’ordre – le vendeur des titres ou le payeur des espèces. Cependant, même
qualifié d’irrévocable, un transfert peut être annulé par un tiers, le plus souvent, le
gestionnaire du système de règlement-livraison de titres.
Ensuite, il deviendra irrévocable et définitif, ou inconditionnel, c’est-à-dire éteignant
l’obligation d’effectuer ledit transfert.
C’est ce transfert définitif qui constitue, légalement, livraison des titres dans un sens et
règlement des espèces dans l’autre sens.
La norme internationale requise pour la livraison et le règlement est celle de la livraison
contre paiement. Celle-ci consiste en une simultanéité des livraisons de titres et des
255
Notons qu’un intermédiaire n’est pas forcément affilié d’un dépositaire central, dans ce cas, charge à lui de
faire sous-traiter ses transferts de titres auprès d’un participant direct.
256
Selon le règlement général du Conseil des Marchés Financiers :
« les dépositaires centraux assurent la circulation des instruments financiers entre leurs adhérents, vérifient
l’existence d’une stricte égalité entre le nombre total des instruments financiers d’une émission et le nombre des
instruments inscrits aux comptes de leurs adhérents, s’assurent du respect de leurs règles de fonctionnement par
leurs adhérents et informent le Conseil des Marchés Financiers de tout manquement d’un adhérent par rapport à
la réglementation.
Les gestionnaires de systèmes de règlement et de livraison d’instruments financiers assurent, entre les
participants, la livraison des instruments et le paiement des espèces de façon concomitante, doivent faire
approuver les règles de fonctionnement desdits systèmes par le Conseil des Marchés Financiers, déterminent les
conditions dans lesquelles le dénouement des opérations acquiert un caractère irrévocable, assurent l’identité
entre le nombre des instruments financiers d’une même émission et le nombre des instruments financiers en
circulation, doivent proscrire toute activité susceptible d’entraîner un conflit d’intérêt avec la gestion des
systèmes, s’assurent du respect de leurs règles de fonctionnement par leurs adhérents, informent le Conseil des
Marchés Financiers de tout manquement d’un adhérent par rapport à la réglementation ».
116
règlements espèces, c’est-à-dire à une même date de valeur. Plus encore, ce principe devrait
systématiquement être accompagné d’un transfert en valeur même jour, les fonds pouvant
alors être utilisés par leur bénéficiaire le jour de leur réception.
Lorsque la livraison des titres et le règlement des espèces, donc l’imputation dans les comptes
titres et espèces des deux contreparties de la négociation, sont effectués, le processus de
règlement de la transaction boursière est achevé.
1.3 Une récapitulation des étapes 257
Nous récapitulons les procédures de règlement-livraison de titres dans ce schéma 3.
Schéma 3 : Procédures de livraison de titres et de règlement espèces
Client
acheteur
Négocia
teur
acheteur
2, 3
2, 3
Bourse
1, 4, 8
1, 4, 8
4, 5, 7, 8
Conservateur
Négocia
teur
vendeur
3
4, 5, 7, 8
Agent de Clearing
(dépositaire)
6, 7
Client
vendeur
6, 7
Conservateur
7, 8
8
8
8
Agent de
règlement
Agent
payeur
8
8
Agent
payeur
Guadamillas M., Keppler R., Securities clearance 9and settlement systems, a guide to best practices,
WorldBank April 2001
257
Banque
centrale
117
Commentaires du schéma 3
Exécution des ordres :
1.
2.
3.
Les clients acheteur et vendeur entrent leurs ordres auprès de leur négociateur respectif.
Les négociateurs exécutent les ordres en bourse.
La bourse envoie à l’agent de clearing et aux négociateurs les avis d’opéré.
Compensation :
Gestion des négociations / matching / confirmation
4.
Les négociateurs, des acheteur et vendeur, transmettent les modalités de la négociation. Ils délivrent
une confirmation à leur client précisant les conditions d’exécution.
5. L’agent de clearing compare les avis d’opéré et renvoie une confirmation aux négociateurs.
6. Pour les investisseurs institutionnels, la confirmation est directement envoyée à leurs intermédiaires.
Les confirmations doivent être théoriquement effectuées au plus tard en J+1.
Calcul des soldes
7.
L’agent de clearing envoie aux négociateurs, conservateurs et banques de règlement les soldes titres
(en brut, en compensé bilatéral ou multilatéral) et les soldes espèces (en brut, en compensé bilatéral
ou multilatéral). En cas d’erreur, les informations sont retraitées entre les acteurs.
Le vendeur doit présenter un compte approvisionné en titres ainsi que l’acheteur en espèces.
Mise à disposition des titres
• Valeurs scripturales : les titres dématérialisés ou inscrits en comptes sont disponibles dans le
compte titres du négociateur chez le dépositaire. Théoriquement, les titres sont bloqués jusqu’au
dénouement, et non utilisables pour d’autres transactions.
• Valeurs matérialisées : le négociateur doit être en mesure de les mettre à disposition le jour du
dénouement.
Mise à disposition des espèces
• Paiement via un agent de règlement : Lorsque le négociateur ou l’agent payeur dispose d’un
compte espèce auprès d’un agent de règlement (généralement une banque), l’agent de clearing
communique le montant du règlement avant le jour du dénouement. L’agent payeur du
négociateur (généralement une banque) ou le conservateur transmettent les fonds avant
expiration du délai de paiement.
• Paiement direct par le négociateur : Le négociateur acheteur fournit directement les fonds, au
jour du règlement, par un moyen de paiement donné (un chèque par exemple) ou procède au
paiement direct au profit du négociateur vendeur.
L’agent de clearing peut éventuellement garantir le netting des transactions et le règlement des
espèces. Sur la plupart des places, le dénouement s’effectue dans un délai compris entre J+1 et J+5.
Dénouement :
8.
Les titres sont livrés en échange des espèces.
Livraison des titres
• Elle a lieu via un dépositaire lorsque les titres sont dématérialisés ou inscrits en compte
• Ou directement entre négociateurs pour les valeurs physiques.
Règlement
• Il intervient par l’intermédiaire d’un agent de règlement
• Ou directement entre négociateurs via un moyen de paiement donné.
9.
Les fonds sont finalement enregistrés auprès de la banque centrale et, sur le plupart des places,
considérés comme irrévocables. Théoriquement, les titres ne sont livrés que lorsque les espèces sont
réglées et inversement, selon le principe de la livraison contre paiement.
118
2. Les procédures transfrontalières
Globalement, les transactions transfrontalières font intervenir davantage d’intermédiaires que
dans le cadre d’une transaction domestique ; aussi les risques sont-ils accrus.
2.1
Les voies d’accès
Au préalable, notons qu’il existe trois types de transactions internationales, illustrés par les
exemples ci-dessous 258 :
La transaction internationale stricto sensu :
Une banque française achète à un fonds de pension américain des obligations émises par la
Banque Mondiale.
La transaction nationale en valeurs mobilières étrangères :
Un résident allemand, client d’une banque allemande, achète des actions néerlandaises cotées
en bourse de Francfort. Cette négociation s’opère sur un marché national. L’ordre est passé
par un agent du pays et exécuté en bourse par un négociateur de ce même pays. La transaction
est dénouée par l’organisme de compensation national.
La transaction sur les marchés étrangers :
Un résident suisse demande à sa banque de vendre à Paris des actions d’une société française.
La banque répercute l’ordre à son négociateur pour exécution en Bourse de Paris. Le
négociateur informe la banque française de la négociation qui remonte jusqu’à la banque
suisse.
On dénombre, ensuite, cinq options possibles pour le dénouement des transactions
transfrontalières présentées dans le schéma 4 259.
258
259
C. Karyotis, Circulation internationale des valeurs mobilières, Revue Banque Editeur, 1994.
Bank for International Settlements, Cross border securities settlements – mars 1995
119
Schéma 4 : Dénouement des transactions transfrontalières
Dépositaire
central
Place
d’émission
Agent
local
Autres
places
Contrepartie
non-résidente
Accès
direct
Agent
local
Global
Custodian
Contrepartie
non-résidente
Agent
local
Contrepartie
non-résidente
Global
custodian
Agent
local
Dépositaire
international
Dépositaire
central
domestique
Contrepartie
non-résidente
Contrepartie
non-résidente
Dépositaire
international
Liens entre
dépositaires
domestiques
♦ Voie n°1 : Accès direct
L’accès direct suppose de passer par le dépositaire domestique du pays de l’émission, ce qui
est exceptionnel. Cette voie n’est en effet possible que lorsque les dépositaires acceptent
l’affiliation d’un non-résident. Si tel est le cas, l’établissement doit respecter les normes
réglementaires du dépositaire, investir dans une interface technologique et disposer d’un accès
au système de paiement de la place. A défaut, celui-ci doit souvent passer par une filiale
d’établissement.
120
♦ Voie n°2 : Accès par un agent local, lui-même participant du dépositaire du pays de
l’émission.
Cet agent local (un établissement financier) offre alors à l’investisseur les prestations de
conservation, gestion d’opérations sur titres, dénouement et règlement. Ses prestations
peuvent aller au-delà de celles-ci : gestion des espèces, facilités de crédit, transactions de
change, prêt-emprunt de titres…
♦ Voie n°3 : Accès par un global custodian
Cet accès est essentiellement proposé aux investisseurs institutionnels. Le global custodian –
conservateur international, assisté d’un réseau de sub-custodians, offre à l’investisseur un
point d’entrée unique plus facile à gérer et moins onéreux que l’appel à un réseau de
conservateurs multiples. La gestion du réseau d’intermédiaires locaux (sub-custodians)
appartient effectivement au global custodian 260.
♦ Voie n°4 : Accès par un dépositaire international
L’avantage de cette voie est identique à la précédente. Le point d’entrée aux systèmes est
unique pour l’investisseur et les dépositaires internationaux bénéficient d’économies
d’échelle, compte tenu de leur masse critique de participants.
♦ Voie n°5 : Utilisation de liens bilatéraux entre dépositaires
C’est évidemment le cas le plus fréquent et le plus ouvert aux investisseurs. Un exemple
d’efficience des liens entre dépositaires centraux nous est donné par ceux noués entre les
dépositaires scandinaves OM, OMLx et NOS (respectivement dépositaires suédois, norvégien
et finlandais). Une instruction introduite par un intermédiaire dans le carnet d’ordres d’une
bourse est compensée par la chambre de compensation dont il est membre ; si sa contrepartie
est membre d’une autre chambre de compensation, la négociation est dénouée par le biais de
260
Pour une définition plus précise d’un global custodian et de ses prestations, le lecteur se reportera à la fin de
ce paragraphe.
121
la liaison « inter-clearing ». Un intermédiaire peut, en conséquence, détenir une position sur
une bourse et choisir ensuite sa chambre de compensation 261.
Mais il existe deux limites (sauf cas très particuliers) : Les liaisons nouées par les dépositaires
sont limitées aux valeurs cotées sur les places desdits dépositaires (et elles ne sont pas
toujours réciproques) d’une part, et les livraisons sont essentiellement réalisées en franco
paiement d’autre part.
Ces liaisons, souvent bilatérales et appelées « spaghetti links », permettent à un investisseur
d’accéder à un marché local par le biais de son propre dépositaire central. Au total, si n
dépositaires centraux créent des liaisons bilatérales, il y a n(n-1) connections interdépositaires 262.
Le terme de global custody
263
est apparu pour la première fois en 1974, utilisé par la Chase
Manhattan Bank. C’est un service bancaire centralisé de conservation, d’administration et de
règlement de valeurs mobilières internationales. La Banque de France définit le global
custody comme un service de gestion de portefeuilles internationaux de titres ayant pour
vocation de faciliter les activités internationales de placements. L’Issa 264 le définit comme un
établissement ayant pour objet de fournir à ses clients utilisateurs de plusieurs devises, un
service de règlement et de reporting relatif à des transactions effectuées dans des pays
étrangers, dans des devises qui ne sont ni celles du client, ni celle du global custodian. Le
global custodian utilise également toutes les catégories d’investissement.
Certains professionnels proposent une définition plus détaillée : Le global custody est la
gestion par un établissement financier unique de portefeuille de valeurs internationales. Il
recouvre les activités suivantes : conservation de titres, opérations d’achat et de vente,
encaissement des dividendes et des intérêts, opérations de change, opérations de prêt-emprunt
de titres, suivi des fiscalités nationales, évaluation quotidienne des portefeuilles, diffusion
d’informations sur la vie des entreprises. Le global custody permet aux investisseurs
internationaux d’obtenir, d’un prestataire unique et de façon presque instantanée, la situation
de leur portefeuille quel que soit le nombre de places internationales sur lesquelles celui-ci est
réparti 265.
261
Bank of England, Links between exchange traded derivatives clearing houses, Quaterly Bulletin, May 1998
Giddy I., Saunders A., Walter L., Alternative models for clearance and settlement: the case of the single
European capital market, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
263
Karyotis C., La circulation internationale des valeurs mobilières, Banque Editeur 1994
264
Nikonoff J., ISSA 5, Rapport de l’Ambassade de France aux Etats-Unis, New York 1985
262
122
En tout état de cause, les global custodians n’offraient, jusqu’à la moitié des années quatrevingts, que des services de base tels ceux suscités. Mais les investisseurs institutionnels ont
suivi l’internationalisation des marchés en gérant des portefeuilles de plus en plus
sophistiqués, réclamant de la part de leurs prestataires des garanties contractuelles sur les
délais d’exécution des opérations de règlement-livraison et des paiements d’opérations sur
titres, et une information sur leurs stocks et flux de titres plus fréquente, plus précise et plus
analytique. Ipso facto, les global custodians se sont adaptés et offrent désormais des services
complets. A cette fin, ils ont développé des services destinés à améliorer la performance de
gestion des institutionnels dans trois domaines 266 : la contractualisation des dates de
paiement, l’automatisation de la gestion de la trésorerie devises, l’optimisation de la masse de
titres détenus en stocks (prêt de titres). En garantissant le règlement-livraison des transactions,
les global custodians s’engagent à payer ou à livrer à une date prédéterminée, à régler les
produits d’opérations sur titres, assumant alors le risque en principal, et permettant à leurs
clients d’optimiser leur gestion prévisionnelle, d’autant plus qu’ils réinvestissent les coupons.
Le global custodian intervient lors d’une négociation sur valeurs étrangères et répond aux
demandes de l’investisseur en procédant au règlement de l’achat dans la devise locale,
recouvrant les produits des opérations sur titres, conservant les titres et traitant les questions
fiscales. Schématiquement, il offre à sa clientèle la possibilité de trouver un intermédiaire
financier unique pour l’ensemble de ses opérations internationales en valeurs mobilières ; ce
n’est autre qu’une centralisation de la conservation des titres étrangers sur une seule banque,
permettant de facto la consolidation instantanée des informations relatives à l’ensemble des
portefeuilles gérés. Il s’appuie sur un réseau de conservateurs locaux situés sur les grandes
places financières internationales, appelés local custodians.
Les prestations d’un global custodian sont présentées dans les schémas 5 et 6 267.
265
Villeneuve (de) J.F., Dictionnaire technique de la bourse et des marchés financiers
Dufloux J.L., Rigal J.F., La différenciation par l’offre à valeur ajoutée, Banque Stratégie n°112, janvier 1995
267
Castries (de) J., Hoeltgen T., Global custody : y a-t-il un marché pour les banques françaises ?, Banque
Magazine n°526, avril 1992
266
123
Schéma 5 : Les prestations d’un global custodian
Réceptionner
« Forex »
Comptabiliser
« Forex »
Informer
Sousdépositaires
Dénouer
Comptabiliser
Opérations
Positions
Evaluation
Suspens
Informer le
client
Base de
données
centrales
Opérations
sur titres
Réconcilier
les positions
Autorités
gouvernementales
Réclamer
l’avoir fiscal
Privé
•
•
•
•
Télex
Informations
dénouement
RESEAU DE SOUS - DEPOSITAIRES
Contrôler
Valider
Swift
Réceptionner
les ordres
Client
124
Nous prenons pour finir, dans le schéma 6, l’exemple type d’une procédure de dénouement
dans le cadre d’une sous-traitance par un global custodian 268.
Schéma 6 : Dénouement avec un global custodian
Global custodian
(Paris)
ordre
Broker
n°1
Confirmat/
Exécution
Gestionnaires
Détail des ordres
• destinataire
• place boursière
• valeurs
• cours
• quantités
• montant
• frais courtage
• date de
dénouement
• etc…
Matching
ordre
Broker
n°2
Confirmat/
Exécution
Matching
Marché
Marché
Service titres
(cellule custody)
Broker
Broker
Reporting J+1
Système
de place
(Tokyo)
Global ou sub –
custodian
268
FRONTIERE
Instruction LCP
Confirmat/
Reporting
Global ou sub –
custodian
Système de
place
(New York )
Confirmat/
Reporting
Global ou sub –
custodian
Basle P., Global custody : la stratégie avant la logistique, Banque Stratégie n°112, janvier 1995
125
2.2
Les procédures
Selon qu’il s’agisse de transaction internationale sur valeurs domestiques ou de transaction
sur euro-obligations, les procédures sont différentes.
2.2.1 Cas d’une transaction transfrontalière sur actions 269
Nous reprenons, dans le schéma 7, les procédures d’une transaction internationale sur une
valeur domestique.
Schéma 7 : Transaction internationale
1. achat
Investor
4. confirm.
+ ap. marge
2. achat
Local
broker (A)
Front office
Back office
Back office
5.
transfert
d’espèces
& Forex
5. LCP
àX
5. LCP en
provenance
de Y
Local
Custodian
(B)
Titres
6. LCP en
provenance
de Y
9.
3. vente
Bourse
4.
4.
Contrepartie centrale
Custodian X
(sub custodian
de B)
7. LCP en
provenance de 1
LCP à X
7. LCP en
provenance
de Y
Local custodian de
A
Clearer espèces
6. Transfert
d’espèces &
Forex
Broker
domestique
(2)
Front office
Back office
7. LCP vers Y
9. confirmation
Custodian Y
(sub custodian
de A)
Espèces
269
4.
Broker
domestique
(1)
Front office
3. achat
Local custodian de
B
Clearer espèces
7. LCP
vers 1
Système de
règlementlivraison
Dépositaire
central
Banque centrale
nationale
7. transfert
d’espèces
Giovannini Group, Cross-boarder clearing and settlement arrangements in the European Union, Brussels
November 2001
126
Soit un investisseur à l’origine d’une négociation passée par un négociateur domestique (A) et
dénouée via un local custodian (B) ; les trois acteurs sont présents sur la même place
boursière. La négociation s’effectue sur une place étrangère. Le négociateur domestique (A)
utilise les services d’un broker étranger (1) qui cherche une contrepartie (2) sur la place
étrangère. S’il existe une contrepartie centrale, la négociation sera compensée par celle-ci.
Dans ce cas, le négociateur domestique a besoin d’un custodian (Y) et d’un agent de
règlement étranger. Le local custodian (B) utilise les services d’un custodian étranger (X).
Les étapes nécessaires au dénouement de cette transaction sont les suivantes :
-
N°1 : La transaction débute avec un investisseur désirant acheter une valeur étrangère ; il
transmet un ordre d’achat à son négociateur local (A).
-
N°2 : Le négociateur local (A) transmet l’ordre de son client à son correspondant (1) sur la
place étrangère.
-
N° 3 : Le correspondant étranger (1) cherche une contrepartie auprès d’un autre broker (2)
pour matcher l’ordre en bourse étrangère ; la transaction matchée est, ensuite, transmise à
la contrepartie centrale.
-
N°4 : La confirmation de l’ordre est transmise à chaque partie, et l’instruction de livraison
de (2) à (1) est automatiquement envoyée au dépositaire domestique de la place étrangère.
-
N°5 : Le négociateur local (A) indique à son custodian étranger (Y) la réception des titres
du broker étranger (1) et la livraison au custodian étranger (X). Le transfert des espèces (et
la conversion) du négociateur (A) vers le dépositaire étranger est effectué via le système
de paiement étranger. L’investisseur demande à son local custodian (B) de recevoir les
titres de la part du custodian étranger (Y) de son négociateur local (A) et transfère les
fonds nécessaires au paiement au profit du local custodian (B).
-
N°6 : Le local custodian (B) demande à son custodian étranger (X) de recevoir les titres de
la part du custodian étranger (Y) du broker étranger (A). Le transfert des fonds de
l’investisseur est réalisé entre le local custodian (B) et son agent de règlement.
-
N°7 : La livraison des titres entre les deux brokers étrangers (1 et 2) est effectuée ; le
broker étranger (1) les livre alors à son custodian (Y) qui les livre à l’autre custodian (X),
via le système de règlement-livraison de titres du dépositaire étranger ; les transferts
identiques en espèces sont réalisés entre les parties impliquées.
-
N°8 : La contrepartie espèce est réglée auprès de la banque centrale du pays.
127
-
N°9 : La confirmation est envoyée à toutes les parties concernées et la transaction sur
titres est enregistrée entre le custodian étranger (Y) et le local custodian (B), puis entre ce
dernier et l’investisseur.
Si la transaction transfrontalière est compensée selon le principe de la novation auprès d’une
contrepartie centrale, les deux contreparties doivent être membres de ladite chambre. Ils
doivent livrer et régler à la chambre, impliquant que les participants et la chambre aient un
lien, direct ou indirect, avec les systèmes utilisés par les places.
A titre d’exemple, nous pouvons citer BrokerTec qui offre les fonctionnalités d’une
contrepartie centrale pour des obligations européennes réglées dans les systèmes avec qui ont
un lien avec la London Clearing House.
Les transactions internationales impliquent donc différents systèmes de règlement-livraison de
titres et représentent des sources de coûts et de risques supplémentaires pour les investisseurs.
En atteste une étude de coût réalisée par l’Association Française des Titres (AFTI) en 2002
270
. La comparaison a porté sur les frais liés à une opération de bourse, basée sur un service
standard attendu par un investisseur institutionnel. Ce service regroupe la prise en charge des
processus de rapprochement avec les contreparties, les traitements spécifiques à
l’environnement de l’opération, la flexibilité sur les algorithmes de netting en fonction des
demandes du client, la gestion du cash fournie en temps réel …
De cette étude, il ressort les éléments présentés dans les tableaux 1, 2 et 3.
270
AFTI, Etude comparative sur les coûts des opérations titres Europe / USA, 2002
128
Tableau 1 : Prix complet pour l’investisseur pour un ordre traditionnel
Type d’ordre
Moyenne
Etats-Unis
Europe
Ordre passé sur son
marché domestique
70 à 85 €
85 €
67 à 90 €
60 à 75 €
10 €
75 €
10 €
60 à 75 €
7 à 15 €
85 à 115 €
100 à 115 €
85 à 115 €
60 à 75 €
75 €
60 à 75 €
25 à 40 €
25 à 40 €
25 à 40 €
Prix broker
Pour un ordre de 30 000 €
Prix custodian
Ordre cross border
(marché Européen pour un
investisseur américain et
inversement)
Prix broker
(Pour un ordre de 30 000 €)
Prix custodian
Le prix du broker (tableau 1) est structuré de manière identique pour les deux zones étudiées ;
il est indépendant du caractère domestique ou international de l’ordre et reste fonction du type
de service offert (comme l’indique le tableau 2).
Tableau 2 : Décomposition du prix
Moyenne
Ordre traditionnel
20 à 25 bp
soit 60 à 75 €
1. coût de la recherche et du 80 à 90 %
front-office
soit 54 à 60 €
2. coût technique
10 à 20 %
soit 6 à 15 €
Ordre industriel
2 à 5 bp
soit 6 à 15 €
Etats-Unis
25 bp
soit 60 à 69 €
80 à 90 %
soit 60 à 69 €
10 à 20 %
soit 6 à 15 €
2 à 5 bp
soit 6 à 15 €
Europe
20 à 25 bp
soit 60 à 75 €
80 à 90 %
soit 54 à 60 €
10 à 20 %
soit 6 à 15 €
2 à 5 bp
soit 6 à 15 €
Le prix du custodian est structuré de la même manière entre les deux zones, à savoir (tableau
3) :
- un prix de l’opération domestique de l’ordre de 10 €, dont 15 à 20 % des coûts
externe d’infrastructure,
-
un prix de l’opération cross border de l’ordre de 25 à 40 €, dont 1/3 de coûts
externes du local custodian, et 2/3 de coûts internes.
129
Tableau 3 : Décomposition du prix du custodian
Opération cross border
Moyenne
25 à 40 €
1. proportion du coût interne équivalent
au coût interne d’une opération
32 à 20 %
domestique
soit 8 à 8.5 €
2. surcoût opératoire interne par rapport à 28 à 55 %
une opération domestique
soit 7 à 22 €
Etats-Unis
25 à 40 €
Europe
25 à 40 €
34 à 20 %
soit 8.5 €
26 à 55 %
soit 6.5 à 21.5 €
36 à 45 %
soit 9 à 18 €
36 à 45 %
soit 9 à 18 €
3. coût du local custodian
40 à 25 %
soit 10 €
40 à 25 %
soit 10 €
40 à 25 %
soit 10 €
Opération domestique
10 €
10 €
10 €
1. coûts internes
80 à 85 %
soit 8 à 8.5 €
15 à 20 %
soit 1.5 à 2 €
85 %
soit 8.5 €
15 %
soit 1.5 €
80 à 85 %
soit 6 à 12.5 €
15 à 20 %
soit 1 à 2.5 €
2. coûts externes
Au final, les prix varient entre une opération domestique et une opération cross border, avec
un surcoût de 15 à 30 euros pour un ordre transfrontalier 271, soit 20 à 35 % du coût complet
d’un ordre classique.
Les ordres de grandeurs sont de :
-
70 à 85 € pour une opération domestique,
-
85 à 115 € pour une opération cross border.
L’étude fait ressortir que ce surcoût est lié à l’organisation des custodians pour lesquels le
prix d’une opération cross border est 2.5 à 4 fois plus élevée qu’une opération domestique.
Cela s’explique par l’intervention de deux acteurs (global et local custodian) au lieu d’un ; ce
qui entre à hauteur du 1/3 du surcoût. Il y a même redondance de traitement entre les deux
acteurs en matière de comptabilisation des opérations et de gestion des instructions de
règlement-livraison notamment. Ce surcoût s’explique également par une moindre
271
Les ordres transfrontaliers génèreraient toujours environ 12 milliards de dollars de pertes annuelles pour les
intermédiaires financiers.
130
« industrialisation » des opérations réalisées sur titres étrangers dans les chaînes de traitement
des global custodians ; ce qui entre à hauteur des 2/3 restant du surcoût, soit entre 7 et 22 €.
Il conviendrait donc, à terme, de standardiser et normaliser l’ensemble des processus de
traitement des opérations transfrontalières 272.
2.2.2 Cas d’une transaction sur une euro-obligation
Lorsqu’une transaction a lieu sur une euro-obligataire, les procédures sont telles que
présentées dans le schéma 8.
Schéma 8 : Transaction sur euro-obligation
1. Achat
Négociateur (1)
Front office
Investisseur
3.
Confirmation +
appel de
marge
Back office
Marché OTC
2. Achat
2. Vente
Négociateur (2)
Front office
Back office
4. Instructions de réception
et LCP
4. Instructions de réception du broker 1
Système de règlement-livraison
et dépositaire
internationaux
5. Règlement
4. Instruction de
transfert des fonds
272
Correspondent
espèces de
l’investisseur
Banque correspondante
Et réseau de banques
Selon Omgeo, le taux d’échec dans le processus de traitement des opérations sur titres, de 0.90 % aux EtatsUnis et en Europe, passe à 25 % pour les opérations transfrontalières.
131
Un investisseur transmet un ordre à son négociateur (1) ; ce dernier cherche un broker (2)
pour mener à bien une transaction OTC 273. La transaction est dénouée auprès d’un dépositaire
international, alors que la contrepartie espèce est traitée par le correspondant espèce de
l’investisseur et le réseau de banques correspondantes.
-
N°1 : Un investisseur envoie un ordre d’achat sur une euro-obligation à son négociateur
(1).
-
N°2 : Le négociateur (1) cherche un autre broker (2) pour une vente de gré à gré.
-
N°3 : Le négociateur (1) confirme les termes de la négociation et procède à l’appel de
marge.
-
N°4 : Le broker (1) envoie au dépositaire international les instructions de réception des
obligations de la part du broker (2) et les livre à l’investisseur. Ce dernier envoie au
dépositaire international l’ordre de recevoir les titres du broker (1) ; pour les espèces, le
traitement est identique. [Le broker (2) envoie la même instruction en sens inverse].
-
N°5 : La transaction est dénouée chez le dépositaire international, les espèces étant réglées
via le réseau de correspondants espèces.
3 Taxonomie succincte des systèmes existants
La Banque des règlements internationaux, à la suite d’un questionnaire transmis aux
gestionnaires des systèmes de règlement-livraison de titres des pays du Groupe des Dix, a
recensé trois approches structurelles de processus de livraison contre paiement que nous
reprenons dans le tableau 4 274.
273
OTC : over the counter, négociation de gré à gré
Le mot « counter » signifiant guichet de banque, le terme « OTC » a été donné au marché de gré à gré en
souvenir du temps où les titres étaient vendus au guichet.
274
Bank for International Settlements, Delivery versus payment in securities settlement systems, September
1992
132
Tableau 4 : Les différents modèles de systèmes de règlement-livraison de titres
Modèles
Traitement
Mode de transfert
Gestionnaires
Conditions
d’irrévocabilité
Risques
1
3
Titres en brut
Espèces en brut
Transferts définitifs des
titres et des espèces
simultanés
Titres en brut
Titres en net
Espèces en net
Espèces en net
Transfert définitif des Transferts irrévocables des
titres en cours de journée
titres et des espèces en fin
Transfert définitif des
de journée
espèces en fin de journée
Gestionnaire des titres et
Titres gérés auprès d’un
Titres gérés auprès d’un
des espèces identique
dépositaire
dépositaire
Espèces gérées auprès
Espèces gérées auprès
d’une banque de
d’une banque de
règlement
règlement
Transferts irrévocables dès
Transferts des titres
Transferts des titres par
l’imputation aux comptes
irrévocables et définitifs débit et crédit en cours de
titres et espèces
dès l’imputation dans les
cycle avec information
comptes titres
prévisionnelle mais
Transferts des espèces
imputation dans les
irrévocables en cours de
comptes en fin de cycle
journée mais définitifs en
Avant toute imputation
fin de journée
des titres, espèces
provisoires seulement
Risque en principal
Risque en principal
Risque en principal non
éliminé
éliminé mais le système
éliminé pour le vendeur
Risque de liquidité
requiert des encaisses
Risques de liquidité et de
extrême
titres et espèces
remplacement limités
considérables
grâce au netting
Car si défaut d’un
participant, annulation de
A défaut risque de suspens
Problème : livraison
tout ou partie de ses
importants, voire situation antérieure au règlement garantie du paiement
transferts
de blocage
nécessaire permet de
Ou au moins
risque de liquidité accru
accroissement des risques
supprimer le risque en
pour les contreparties
de remplacement et de
principal pour le vendeur
+
liquidité
risque systémique
potentiel
Minimisation des
risques
Gestion des files d’attente
Facilités de prêts de titres
Crédits intraday
Mais attention aux risques
de non-remboursement
nécessité d’une
collatéralisation ou/et d’un
plafonnement des crédits
Autres remarques
Gestion des titres :
meilleure garantie si
règlement en temps réel
Exemples de Systèmes
2
RGV
(traitement au fil de l’eau)
Clearstream
(traitement par lot)
Si garantie du paiement :
risque sur le garant plafonner les positions
nettes débitrices
+
pour éviter défaillance de
la banque de l’acheteur :
valeurs même jour
Système de prêt-emprunt
de titres liquide et efficace
pour éviter les réactions en
chaîne consécutives à
l’annulation des transferts
+
plafonnement des débits
Les opérations sur titres peuvent n’être réglées qu’au
bout de plusieurs heures, voire en fin de journée
dans l’intervalle, risque de révocation des opérations
risque en principal et de liquidité
Relit +
LDT
(système italien)
133
• Modèle n°1 : Les transferts de titres et d’espèces s’effectuent en brut, les deux transferts
sont simultanément définitifs.
Ce modèle repose sur des écritures comptables simultanées ; il nécessite en conséquence un
gestionnaire central de titres et d’espèces. A défaut, le dépositaire central doit être
directement, et en temps réel, relié au gestionnaire des comptes espèces. Les transferts sont
définitifs et irrévocables, après un contrôle de provisions titres et espèces chez les deux
contreparties.
Si les risques sont minimisés dans ce modèle, ce dernier requiert des encaisses titres et
espèces importantes pour ses participants. En l’absence de provisions suffisamment
dimensionnées chez lesdits participants, le nombre de mouvements en suspens s’accroît
considérablement. Afin d’éviter ces suspens, les gestionnaires des systèmes doivent alors
gérer des files d’attente et offrir des facilités de prêts. Cependant, le risque de nonremboursement de ces facilités est à considérer et à gérer (prises de garantie, limite du
découvert intrajournalier en fonction de la surface financière du participant …).
• Modèle n°2 : Le transfert de titres s’effectue en brut, le transfert des espèces en net ; le
transfert des titres est définitif au fil de l’eau, celui des espèces l’est en fin de traitement.
Ce modèle repose sur des transferts de titres en cours de cycle et des transferts d’espèces en
fin de cycle. Selon ce principe, le vendeur se trouve face à un risque qui, certes, est diminué
par la compensation des mouvements espèces, mais existe cependant tout au long du cycle de
traitement. Pour les minimiser, la banque de l’acheteur peut prendre l’engagement irrévocable
de régler la banque du vendeur, selon le principe d’un paiement garanti, en se protégeant ellemême par le biais de sûretés sur les titres.
• Modèle n°3 : Les transferts de titres et d’espèces s’effectuent en net et sont définitifs en fin
de traitement.
Ce modèle 3 repose sur des livraisons contre paiement en net ; les titres sont gérés par le
dépositaire, et les espèces potentiellement gérées par un tiers. Cependant, les imputations en
comptes titres et espèces ne sont effectuées qu’en fin de cycles. De facto, l’inconvénient
majeur de ce modèle est qu’il est générateur de risque systémique. En effet, en cas de
134
provision insuffisante chez un participant, tous les mouvements de celui-ci sont bloqués ou
annulés ; pour minimiser ce risque, le système de règlement-livraison de titres doit pouvoir
s’appuyer sur un marché de prêt-emprunt de titres performant, donc liquide, et imposer
systématiquement une limite des positions débitrices nettes espèces.
De façon synthétique, il est possible de résumer les avantages et inconvénients des trois
modèles de la façon suivante 275 :
•
Le modèle 1 permet d’éliminer le risque de règlement via la livraison contre paiement
mais requiert la mise en place de crédit au profit des participants, à défaut il est trop
onéreux en liquidités. Le risque de règlement est alors déplacé des participants aux
créditeurs, et devient un risque de crédit traditionnel (à minimiser via une
collatéralisation).
•
Le modèle 2 expose les vendeurs au risque principal : dans un système de paiement
irrévocable, ce risque est transféré à la banque de l’acheteur qui s’engage irrévocablement
à régler la banque du vendeur en fin de cycle. Le risque de règlement est alors, encore une
fois, transformé en un risque de crédit classique.
•
Le modèle 3 peut éliminer le risque principal en assurant que les transferts de titres seront
effectués lors de la réception finale des fonds. Néanmoins, le défaut d’un participant peut
engendrer une suppression de tout ou partie du transfert et fait courir à sa contrepartie un
risque de remplacement ou de liquidité.
Un quatrième système dans lequel les transferts espèces et titres s’effectuent en net et au fil de
l’eau nous semblerait opportun à rajouter. Celui-ci aurait alors la vertu de minimiser les
mouvements en nombre de titres échangés et en montants, en évitant les asymétries de
traitement entre les titres et les espèces.
Mais ce système, dans la pratique, semble totalement inadapté. En effet, le netting de titres et
le traitement au fil de l’eau sont incompatibles à moins d’un très fort volume de négociation.
A défaut, le temps réel n’est plus respecté et, de facto, un traitement par « batchs »
276
successifs devient plus rationnel. La Fédération internationale des Bourses de valeurs
275
Dale R., Risk Management and public policy in payment, clearing and settlement systems, International
Finance Vol.1 Issue 2, December 1998
276
Un traitement par batchs est un traitement par lots successifs en cours de journée
135
remarque, dans une étude de septembre 1999
277
, que les systèmes de règlement-livraison de
titres ont tendance, depuis 1996, à passer d’un batch fin de journée à plusieurs batchs en cours
de journée. Des progrès ont donc été faits.
4 Les risques attenants aux opérations de règlement-livraison
Les risques encourus par les intermédiaires financiers, quant à leur gestion post-boursière des
transactions, sont quasiment identiques à ceux encourus sur les marchés des changes. En
effet, on remarque que ceux relatifs au marché des changes et aux systèmes de paiement ont
davantage été étudiés dans la littérature économique et monétaire que les risques attenants aux
opérations de règlement-livraison. En conséquence, dans nos développements futurs, nous
étudierons les moyens de réduire les risques dans les systèmes de paiement pour les
repositionner dans les opérations post-bourse, compte tenu des analogies entre lesdits
systèmes de paiement et les systèmes de règlement-livraison de titres 278.
Dans un premier temps, nous donnerons quelques définitions des principaux risques et,
ensuite, nous les étudierons de façon plus précise en les replaçant dans le contexte des
opérations de règlement-livraison de titres.
Liminaire : le risque global d’un établissement bancaire
Les établissements bancaires sont confrontés à des risques de plus en plus liés les uns aux
autres, de telle manière qu’il devient difficile de les traiter individuellement. Aussi Plihon 279
évoque-t-il une constellation du risque bancaire qu’il illustre comme indiqué dans le schéma
9, s’inspirant d’un rapport de la Commission Bancaire 280.
277
FIBV, Clearing and settlement best practices report, September 1999
L’interconnexion et les analogies entre les deux types de systèmes sont présentés dans le chapitre I § 5
279
Plihon D., Les banques nouveaux enjeux nouvelles stratégies, La Documentation Française 1998
280
Commission Bancaire, Livre Blanc sur la sécurité des systèmes d’information dans les établissements de
crédit, 2ème édition, mars 1996
278
136
Schéma 9 : Constellation du risque bancaire
Risques de management
Equipe dirigeante mal informée ou défaillante, actionnaires divisés …
Risques éthiques
Non respect des règles …
Risques de stratégie
Rentabilité, risque, communication
…
Risques politiques
Risques bancaires et
financiers
Risque
global
de la
banque
Risques extérieurs
Politique, social, systémique
Risques de contrepartie
Signature, crédit, défaillance,
risques pays (*)
Risques d’illiquidité
Risques techniques
Risques opérationnels
Techniques, technologiques,
juridiques, administratifs …
Risques environnementaux
Risques de taux
Risques de marché
Prix des actifs, taux de change,
règlement-livraison
Risques sur système
d’information
Défaillance, panne, fraude,
mauvaise organisation …
*:
- Pour l’essentiel, la mondialisation des prêts substitue le risque – pays, plus large au risque de transfert.
Stricto sensu, le risque de transfert représente le risque qu’un emprunteur, à même de faire face à ses
engagements en monnaie locale (le jugement sur le crédit était valide), ne soit pas autorisé à obtenir des
devises pour effectuer le paiement. Le risque – pays est un concept plus vaste, couvrant le risque d’une
modification du contexte juridique, de la fiscalité ou des circonstances économiques à l’intérieur d’un pays.
Source : Banque des Règlements Internationaux, Rapport trimestriel, mars 2002
- Le champ du risque – pays s’est progressivement élargi à de nouveaux risques financiers liés aux
fluctuations des changes, des taux d’intérêts, des cours de bourse … Selon N. Chevillard (Nord-Sud Export),
il pèse désormais à la fois un risque de volatilité économique, c’est-à-dire de brusque retournement
conjoncturel, et un risque systémique, à savoir la menace qu’une crise de change et/ou boursière se
transforme en une crise bancaire généralisée.
Source : Van Eeckhout L., Avec la mondialisation, le risque – pays change de nature, Le Monde 18 janvier
2000
137
4.1
Aperçu théorique sur les risques de marché de capitaux
Les opérateurs et les autorités de tutelle boursières ont décelé six risques fondamentaux
associés aux marchés dérivés
281
. Ces risques peuvent, pour l’essentiel, être transposés aux
opérations de marchés fermes et aux activités post-bourse.
Lesdits risques sont les suivants :
Risque de crédit ou de contrepartie :
Le risque naît lorsque la contrepartie est défaillante et augmente lorsque les échéances sont
éloignées. Il existe dès qu’un agent prend sur un tiers un engagement relatif à un contrat
financier qui l’oblige à payer ou rembourser un capital et des intérêts ou des commissions. Il
est avéré lorsque le cocontractant est incapable de respecter ses obligations ou refuse de le
faire et il perdure jusqu’au terme du contrat 282.
Dans les opérations de règlement-livraison de titres, ce risque peut être minimisé par
l’intervention d’une chambre de compensation qui s’interpose alors entre l’acheteur et le
vendeur.
Risque de marché :
Le risque naît lorsque des pertes peuvent apparaître à cause des variations de valeur des actifs
sous-jacents.
Risque de règlement :
Le risque naît lorsque la livraison des titres n’est pas simultanée du règlement des espèces.
Risque opérationnel :
Le risque est lié à une défaillance humaine ou technique.
Risque juridique :
L’exemple cité par l’étude relative aux marchés dérivés américains est « celui lié à
l’incertitude qui a longtemps pesé sur l’applicabilité du Commodity Exchange Act aux
281
Marchand C., Mérieux A., Les marchés financiers américains, Revue d’Economie Financière – La
Bibliothèque, 1995
282
Nicolas E., Gérer les risques de contrepartie, Economie Internationale n°75, 1er trimestre 1998
138
contrats d’échanges (swaps), dont la conséquence aurait été de rendre illégales certaines
opérations de gré à gré ».
Risque systémique :
Le risque naît lorsqu’un opérateur n’est pas en mesure d’honorer ses engagements, entraînant
des défaillances en chaîne, et mettant de facto en difficultés l’ensemble des acteurs du marché
283
. Il existe sur tous les marchés
(organisés ou de gré à gré) et pour toutes activités
financières (un exemple récent et largement étudié est celui de l’établissement Barings
Brothers 284). En tout état de cause, l’éventualité d’un risque systémique peut provenir tant du
système de paiement, des marchés interbancaire ou monétaire, que des marchés au comptant
et dérivés et de leurs procédures post-boursières. En effet, s’il n’y pas synchronisation (via
une chambre de compensation notamment) dans la gestion des moyens de paiement, quelle
que soit l’origine de l’utilisation de ces moyens de paiement (systèmes de paiement ou de
règlement-livraison de titres), la potentialité d’un risque systémique existe 285.
Ainsi un choc dans un système financier peut-il se répercuter à d’autres sous-systèmes tels un
système de paiement ou un système de règlement-livraison de titres parce que ces systèmes
forment une chaîne complexe de flux interdépendants 286.
Mishkin
287
, en définissant le risque systémique comme étant celui qui surgit lorsqu’un
événement soudain et généralement inattendu secoue les marchés financiers et les empêche
283
« Un effet de contagion dans le système bancaire peut toucher des établissements solvables, puis le système
financier, puis l’économie toute entière », Kaufman G., Bank contagion : a review of the theory and evidence,
Journal of Financial Research, 1994
284
« 1995 : la Barings est mise en liquidation parce que fin 1994 un trader développe un programme d’arbitrage
entre les deux marchés de futures cotant le Nikkei 225 à Singapour et à Osaka. L’indice frôle les 20 000 points,
le trader se porte long sur les 2 marchés pour 8 milliards de dollars, en même temps il est court sur les taux
d’intérêt, en janvier 1995, le Nikkei chute de 2000 points et la Barings perd 800 millions $. Pour faire face aux
appels de mage, le trader essaie de se refinancer en vendant des puts sur le Nikkei. La prime encaissée par les
ventes de l’option lui procure de la liquidité immédiate mais il vend un droit de vente et s’engage au fur et à
mesure qu’il est exercé à acheter le Nikkei 225 à un prix plus élevé que celui du marché. Le trader enregistre
une perte colossale approchant 1 milliard $ » Bourguinat H., Finance Internationale, Puf 1999
Remarque : « En 1890 la Barings Brothers dut suspendre les paiements à cause d’investissements bloquées dans
des valeurs foncières argentines. Le chancelier offrit à la Banque d’Angleterre une lettre d’indemnité. Celle-ci
fut refusée. A sa place le gouverneur amena les banques principales de Londres, y compris la Banque
d’Angleterre, à garantir les dettes de la Barings », Kindleberger C. 1986 cité par Thoris G., Analyse économique
des systèmes, A. Colin 1997
285
Freixas X., Parigi B.M., Rochet J.C., Systemic risk, interbank, and liquidity by the Central Bank, Journal of
Money, Credit and Banking, août 2000
286
Corrigan G., Payment, clearance and settlement systems : The systemic risk connection in Risk, reduction,
payment, clearance and settlement systems, Goldman Sachs 1996
287
Mishkin F. S., Un filet de sécurité contre la récession économique, L’Art de la gestion des risques, Les Echos
octobre 2000
139
d’acheminer efficacement le flux de capitaux là où les opportunités d’investissements sont les
meilleures, cite des exemples de faillites qui auraient pu conduire à des risques majeurs pour
les systèmes financiers :
La Federal Reserve Bank a, en effet en 1984, consenti un soutien financier de 5 milliards de
dollars à la Continental Illinois National Bank, tandis que la quasi-faillite du fonds LTCM
(Long Term Capital Management) a provoqué une baisse de 75 points de base sur le taux
principal des fonds fédéraux américains.
Plus encore
288
, les risques d’illiquidité, voire d’insolvabilité ne sont pas limités à la seule
sphère financière ; ils peuvent être supportés par l’ensemble du système économique. Le
risque n’est alors ni individualisable ni diversifiable. Le phénomène de globalisation
financière a pour conséquence de mondialiser le risque
de système au travers des
transformations technologiques et réglementaires et l’internationalisation de la sphère
financière. L’ensemble des mécanismes financiers est devenu, en effet, un système, c’est-àdire un ensemble d’éléments en interaction dynamique, un système ouvert, soumis et nourri
par l’économie réelle, donc à autonomie relative. Or, si le phénomène de globalisation est
porteur d’efficacité (coûts minimisés et rapidité de la diffusion d’informations de plus en plus
claires), il complique cependant les procédures et les produits (devenus plus opaques).
Ainsi, selon Lespès, les origines et formes du risque de systèmes prennent désormais trois
formes. Il y a le dérèglement du marché se traduisant par des fluctuations importantes du prix
des actifs sans rapport avec leur valeur fondamentale. Ensuite, il y a le dérèglement du crédit
bancaire conduisant à des situations de surendettement et d’effondrement du crédit. Enfin, il y
a dérèglement des mécanismes de paiement. Le risque prend alors appui sur un des éléments
susmentionnés et devient systémique en se propageant grâce aux multiples interrelations
constitutives de la globalisation.
Ce risque systémique est particulièrement fort sur les activités post-bourse : un compte titres
ne pouvant être débiteur, que se passe-t-il lorsque la transaction a été effectuée en bourse sans
qu’il y ait provision sur le compte du vendeur ? Il existe heureusement divers moyens de
réduire ce risque (système de prêt-emprunt de titres, irrévocabilité des mouvements …).
La compensation et le règlement interbancaires forment un domaine où le risque de système
peut provoquer presque immédiatement des désordres économiques et financiers très étendus.
L’intensification et l’intégration des transactions financières y génèrent des risques de
140
montants très élevés, tant de crédit que de liquidité pure 289. Il nous semble que ce phénomène
constaté sur les marchés monétaires peut être translaté aux opérations de règlement-livraison.
Cependant, si le risque systémique existe, nous partageons le point de vue de Kaufman. Ce
risque est plus fort en théorie qu’en pratique. Les expériences historiques prouvent, en effet,
que les causes intrinsèques de propagation se sont rarement avérées 290.
Tous ces risques évoqués n’existent pas systématiquement, ou au moins dans les formes
décrites, dans le cadre des opérations post-boursières ; cependant les régulateurs
internationaux se soucient de plus en plus de toutes les formes de risques possibles,
considérant que toutes les activités boursières peuvent générer des problèmes, et certains
d’entre eux peuvent être transposables aux opérations de règlement - livraison. En effet, les
changements structurels du système financier ont affecté la nature et les canaux de
transmission du risque systémique à 5 niveaux.
Ils ont 291:
-
renforcé l’importance des mécanismes de paiement et de règlement, suite à l’explosion
des volumes traités,
-
accru les risques de marché avec le développement rapide des marchés de titres et
instruments dérivés ainsi que des contrats de change,
-
accéléré considérablement le rythme de propagation des perturbations,
-
souligné le rôle vital de l’offre de liquidités dans l’activité financière,
-
rendu les marchés et institutions plus opaques et les intervenants moins homogènes.
Santomero et Oldfield
292
, étudiant les différents services financiers basiques (origination,
distribution, gestion des opérations sur titres, intermédiation et market making), recensent les
288
Lespès J.L., Le risque de système in Finances Internationales, A. Colin 1993
Aglietta M., Moutot P., L’évolution des structures financières des grands pays industrialisés et la prévention
du risque de système dans l’union économique et monétaire, Cahiers Economiques et Monétaires n°41, 1993
290
Systemic risk for both banking and exchange rate appears to be more serious in perception than in reality. The
historical evidence suggests that direct causation (chain reaction) contagion rarely if ever occurs. Common shock
contagion occurs more frequently, but primarily on a rational, information-based basis. Banks and countries with
similar risk exposure to those of the bank or country experiencing the initial adverse shock will also be adversely
affected. But the extent that neither information nor processing if information is free or immediate, innocent
banks or countries may be adversely impacted temporarely during the sorting out period. However, the effect is
rarely sufficient strong to drive innocent banks into insolvency or depreciate innocent banks countries’
currencies permanently.
Kaufman G., Banking and currency crises and systemic risk : Lessons from recent events, Federal Reserve Bank
of Chicago Economic Perspectives, 05.01.00
291
Siac I, Les marchés d’actifs financiers in Finances Internationales, A. Colin 1993
289
141
risques y attenant : le risque de système, le risque de crédit (entre un débiteur et un créditeur),
le risque de contrepartie (dans une transaction), tous ces risques étant sujets également à un
risque juridique ; et enfin les risques opérationnels. C’est au sein de ces risques opérationnels
qu’ils classent les risques liés aux procédures de règlement et livraison, qui augmentent avec
l’activité grandissante sur les marchés, les montants négociés de plus en plus importants, les
pannes potentielles des systèmes.
En tout état de cause, le risque est devenu multidimensionnel, et concerne toutes les
entreprises, financières ou non, selon Nivollet
293
. Il peut être mesuré selon six dimensions
majeures pour une entreprise : risque de marché, risque de compensation, risque de liquidité,
risques opérationnels et juridiques. Selon le même auteur, le risque de compensation est un
risque de livraison effectuée à la suite d’un échange de monnaies, d’instruments financiers ou
de commodités, au début ou à la fin d’une transaction. Une institution financière fait face à un
risque de compensation quand elle s’est libérée de ses obligations contractuelles, mais n’a pas
reçu le montant en question de la part de sa contrepartie. La globalisation des marchés et la
complexité croissante des produits ont contribué à accroître ledit risque et les participants aux
marchés d’actifs financiers doivent être davantage conscients du timing des règlements.
En effet, ce risque peut, plus facilement, se déplacer d’un système à un autre, d’un marché à
un autre ou d’une place financière à une autre, compte tenu de l’interconnexion des places et
de l’intégration verticale des marchés 294 :
-
il y a source de contagion horizontale par le biais de l’interconnexion des places : la
solidarité des places est assurée par les procédés de cotation automatique permettant de
coter des valeurs sur différentes places et chaque bourse est influencée par ses
informations propres mais également par celles qui sont communes à tous les marchés,
combiné soit avec le recouvrement des heures d’ouverture des grandes bourses, soit avec
leur proximité,
-
il y a source de contagion verticale entre les marchés : outre une diffusion instantanée de
l’information, il y a également intégration des marchés financiers et monétaires via les
taux, ou intégration des marchés de valeurs mobilières et des instruments à terme …
292
Oldfield G.S., Santomero M.A., Risk management in financial institution, Sloan Management Review Fall
1997
293
Nivollet B., Vers une gestion globale des risques, Finance d’entreprise et finance de marché – l’Art de la
finance, Financial Times Limited et Editions Village Mondial 1998
294
Aglietta M., La maîtrise du risque systémique international, Economie Internationale n°76, 1998
142
La fragilité
295
d’un système financier peut venir de la structure du système bancaire, de
l’intensité et de la crédibilité des informations relatives aux contrats financiers, et enfin, de
l’interconnexion des intermédiaires financiers au travers de leurs propres expositions au
risque et des systèmes de règlement. Pour ce dernier cas, il existe, en effet, un réseau
complexe d’exposition des banques via le marché interbancaire, les systèmes de paiement de
gros montant et les systèmes de règlement-livraison de titres
296
. Les banques jouent un rôle
particulièrement important dans ces systèmes. En cours de journée, leur exposition peut être
très forte ; un défaut de l’une d’entre elles peut avoir des conséquences immédiates sur la
capacité des autres établissements à régler leurs obligations.
Parmi les risques de contrepartie, certains conduisent à une perte totale en capital, d’autres
amènent les intermédiaires confrontés à une défaillance à retrouver une opération de
substitution. Enfin, il reste toujours un risque de livraison ou de règlement tant que le
règlement n’est pas effectué.
Aussi le risque de contrepartie peut-il être scindé en trois risques que nous exposons cidessous via les exemples chiffrés donnés par Bienstock 297 :
-
le risque direct :
Une banque A prête à une banque B le 30 mars N, 10 millions d’unités monétaires, pour une
échéance prévue au 30 juin N, à un taux annuel de 10%.
Le 30 juin N, la banque B s’avère être en règlement judiciaire, et la banque A ne peut
récupérer ses fonds. Sa perte s’élève à 10 000 000 (capital) + 255 556 (intérêts sur la période
de 92 jours).
-
le risque de remplacement :
Le 15 janvier N, une banque A négocie avec une banque B un FRA (Future rate agrement),
échéance 6 mois – 15.07.N dont les conditions sont les suivantes : montant nominal 10
millions d’unités, taux prêteur à 3 mois de 10,5% garanti par la banque A.
295
Bandt (de) O., Hartmann P., Systemic risk : a survey, European Central Bank Working Paper n°35,
November 2000
296
Folkerts-Landau D., Systemic financial risk in payment system in Determinants and systemic consequences
of international capital flows, IMF Occasional Paper n°77, 1991
Humphrey D.B., Payments finality and risk of settlement failure in Technology and the regulation of financial
markets : securities, futures and banking ed. by Saunders A., and Lawrence, 1986
297
Bienstock C., Les risques sur opérations de marché, Revue d’Economie Financière n°18, 1991
143
Le 15 juillet N, si le taux prêteur 3 mois constaté sur les marchés est inférieur à 10,5%, la
banque B versera à la banque A la différence entre ce taux et le taux de marché. Si le taux de
marché est supérieur à 10,5%, la banque A devra verser à la banque B la différence entre les
deux taux.
Le 30 avril N, la banque B est en faillite. La banque A ne peut plus bénéficier du FRA négocié
précédemment. Les conditions du marché font qu’un FRA ayant strictement les mêmes
caractéristiques (taux prêteur à 3 mois à partir du 15.07.N) ferait ressortir un taux garanti de
10%. La perte serait dans ce cas de : 10 000 000 * 0.5% * 92/360 = 12 778.
A l’inverse, une évolution favorable du marché conduisant le nouveau taux de FRA à 11%
aurait fait gagner à la banque A 12 778.
-
le risque de livraison :
Le 29 août N, la banque A achète au comptant 5 millions $ contre € à la banque B à un cours
de 1,18. Dès l’ordre négocié, l’information est passée aux services administratifs de la banque
A qui vont générer le paiement à la banque B de 1 118 000 €. En revanche, elle ne saura
qu’elle a effectivement reçu les $ par la banque B que 4 jours après (le 31.08.N étant un
samedi).
La banque A traite à nouveau, le 30 août N, une opération de change au comptant avec la
banque B. Il s’agit, cette fois, d’une vente de 3 millions $ contre CHF, à un cours de 0,77.
Instruction est donnée de virer 3 millions $ à la banque B, qui doit verser en contrepartie 2
310 000 CHF.
Le 2 septembre N, la banque A se rend compte, grâce à l’efficacité de ses services
administratifs, qu’aucun versement n’a été fait par la banque B au titre de l’opération du 29
août. La banque A a déjà, en revanche, versé à la banque B 1 118 000 € et 3 000 000 $.
Le risque ressort davantage avec les éventuels décalages horaires : La compensation des €
s’effectue sur la place de Paris à onze heures, celle des dollars à seize heures à New York soit
vingt-deux heures à Paris. Le pointage des comptes en $ ne s’effectue donc que le lendemain
matin.
Nicolas
298
considère que le risque de règlement-livraison est un risque de contrepartie
spécifique, c’est-à-dire associé audit risque de contrepartie classique sans en être un stricto
sensu. Selon lui, le risque de règlement-livraison ne se manifeste que le jour d’échéance du
contrat. Et, s’il a des conséquences aussi importantes que le risque de contrepartie classique
144
(perte en capital …), il peut cependant, dans la pratique, correspondre à un incident technique
ou à une impossibilité momentanée pour la contrepartie de procéder au règlement-livraison
prévu. En conséquence, dans le cas présent, il ne constitue qu’un retard et non une perte.
L’auteur conclut alors qu’il n’appartient pas au risque de contrepartie traditionnel.
Nous préciserons, pour notre part, que s’il s’agit souvent d’un retard de règlement-livraison, il
n’est cependant pas permis, pour un établissement financier, de négliger la défaillance de ses
contreparties sur ces opérations post-boursières, à l’instar de ce qui est fait sur les autres
activités financières, statistiquement plus souvent sujettes à ces risques de contrepartie.
Parmi les risques opérationnels, on recense essentiellement les risques administratif, juridique
et informatique :
le risque administratif relève de l’organisation d’un back-office qui a en charge la bonne
fin d’une opération ; à cette fin, ledit back-office doit assurer correctement la confirmation
des opérations, leur enregistrement, le déclenchement des versements à effectuer et le
suivi des sommes à recevoir.
Bienstock nous donne un exemple avec un délai de règlement-livraison à 7 jours :
20 millions € d’OAT 299 sont vendus par un opérateur de la salle des marchés d’une banque A
à un investisseur allemand, qui traite pour la première fois avec cette banque. Les titres seront
livrés et les espèces réglées 7 jours après la transaction.
Malheureusement, le back-office de la banque A a communiqué de mauvaises instructions de
paiement à l’investisseur qui voit les sommes versées revenir chez lui au bout de quelques
jours. Il recontacte la banque A qui lui donne cette fois-ci des instructions de paiement
correctes.
Au total, 10 jours se sont écoulés entre la date à laquelle la banque A aurait dû recevoir les
fonds et celle du paiement effectif. 20 millions € non placés, par exemple à un taux au jour le
jour de 10%, induisent un manque à gagner quotidien de 5 556 €.
298
299
Nicolas E., Gérer les risques de contrepartie, Economie Internationale n°75, 1er trimestre 1998
Obligations assimilables du Trésor
145
le risque juridique peut résulter parfois de l’absence de contrats - cadres ou d’un
traitement d’un ordre donné par téléphone (sans confirmation écrite).
L’exemple fourni par Bienstock est celui d’un opérateur d’une banque A qui négocie
régulièrement des rémérés avec un opérateur d’une banque B, par l’intermédiaire de courtiers.
Chaque transaction donne lieu à une confirmation par télex, et aucun contrat n’est échangé.
Or, il s’avère que l’opérateur de la banque B est congédié et la direction de ladite banque
conteste les opérations de son ex-collaborateur.
La banque A constate alors que les télex en sa possession ne constituent que de faibles
preuves juridiques, toutes les caractéristiques du réméré ne s’y retrouvant pas. Seul un
règlement à l’amiable entre les deux établissements est à souhaiter !
En définissant les dimensions du risque, Nivollet 300 précise que le risque juridique couvre les
relations avec des contreparties, les normes de rédaction et de documentation des contrats,
ainsi que les risques de non-conformité aux réglementations et aux reporting réglementaires.
Une situation juridique risquée, précise-t-il, existe à partir du moment où les contrats ou les
obligations réglementaires ne sont pas applicables ou pas totalement remplies.
Enfin, notons qu’un problème juridique spécifique est celui de la règle du « zéro heure » 301 :
En effet, comme dans les systèmes de paiement, la problématique de la règle dite du « zéro
heure », recouvre le risque qu’une autorité judiciaire ou administrative prononce une décision
d’insolvabilité à l’égard d’un membre d’une chambre de compensation ou d’un participant à
un système de règlement-livraison ; elle impose alors une annulation rétroactive de toutes les
instructions émises par cet établissement dans le système considéré, entre le début de la
journée et l’heure à laquelle la décision intervient.
Sur le plan européen, des dispositions ont été prises afin d’éliminer ce risque, qui peut
représenter une source de perturbation majeure pour les systèmes.
La directive sur les caractères définitifs des règlements, depuis 1999, prévoit que les
instructions émises dans les systèmes sont réputées irrévocables dans les conditions prévues
par les règles de chaque système, jusqu’au moment précis où la décision d’insolvabilité est
connue du gestionnaire du système.
300
Nivollet B., Vers une gestion globale des risques, Finance d’entreprise et finance de marché – l’Art de la
finance, Financial Times Limited et Editions Village Mondial 1998
301
Hervo F., Ros T., Infrastructures post-marché et stabilité financière, Revue de Stabilité Financière, Banque de
France, Novembre 2002
146
Le risque informatique enfin résulte d’un dysfonctionnement dans les procédures
informatiques.
La disparition du papier diminue les risques certes mais nécessite que l’outil informatique
réponde à de strictes normes de sécurité, et requiert des procédures de back-up 302.
L’une des meilleures illustrations de ce risque est celui de la panne informatique de la Bank of
New York
303
en 1985. Cette panne a entraîné, pour la Bank of New York, une incapacité
d’exécuter correctement ses transactions, créant ainsi une impasse de 26 milliards de dollars
(soit 12 fois ses fonds propres). Sa défaillance fut évitée par l’intervention de la Federal
Reserve Bank (la banque a emprunté 22.6 milliards de dollars à la Fed qui accepta en
contrepartie d’une garantie à hauteur de 36 milliards $, la charge d’intérêt de la banque s’est
alors établie à 5 millions $
304
) et une remise en ordre rapide du système informatique. Le
lendemain, tout fonctionnait à nouveau correctement, mais les intérêts dus sur l’avance de la
Fed s’établissaient à plus de 5 millions de dollars !
Les marchés eux-mêmes ne sont pas exempts de risque opérationnel. Citons l’exemple du
London Stock Exchange qui, en avril 2000, a connu une panne de son système informatique
pendant près de huit heures. Cette panne a impacté les transactions certes, mais également le
LIFFE (London International Futures Exchange). Celui-ci utilise directement les cours de
bourse au comptant pour valoriser ses contrats de futures. Ipso facto, l’absence d’ajustement
des portefeuilles a conduit nombre d’investisseurs à revendre leurs titres européens amenant
une chute des cours sur les autres marchés européens 305.
302
Un effort didactique important doit être fait par les participants aux multiples systèmes. En effet, si les
systèmes sont proches dans leur conception, des particularités significatives dans le traitement des flux peuvent
rendre toute incompréhension porteuse de risque de fonctionnement.
Chazelas F., Maîtriser les risques de système de règlement, Banque & Stratégie, octobre 1998
303
Berger A.N., Hancock D., Marquardt J. C., A framework for analyzing efficiency, risks, costs, and
innovations in the payment system, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
Goldfinger C., La géofinance – Pour comprendre la mutation financière, Seuil 1986
304
Sender H., The Day the computers went down, Institutionnal Investor, March 1986
305
McPhail K., Managing operational risk in payment, clearing and settlement systems, Bank of Canada
Working Paper, February 2003
147
4.2
Les risques sur le marché des changes
Même s’il existe des risques divers, tels ceux évoqués sur les activités de marché, le risque
essentiel existant sur le marché des changes est celui de règlement, c’est-à-dire de défaut de la
contrepartie.
Depuis de nombreuses années, il fait l’objet d’études et de suivis particuliers par les banques
centrales, car, si ce risque advient dans un contexte non maîtrisé, il impacte directement les
systèmes de paiement nationaux des devises concernées compte tenu des montants échangés
sur le marché des changes
306
, et en conséquence, la structure bancaire globale des pays
touchés (les banques commerciales dans leurs opérations interbancaires et la banque centrale
dans ses opérations monétaires).
La Banque des Règlements Internationaux 307 a, en effet, défini l’exposition au risque, donc la
perte potentielle, dans le règlement d’une opération de change comme étant égale à la valeur
totale de la devise achetée ; le risque naît dès le moment où l’instruction de paiement de la
devise vendue ne peut plus être annulée unilatéralement et dure jusqu’au moment de la
réception irrévocable de la devise achetée.
Le processus de règlement comporte différentes étapes au cours desquels l’exposition au
risque n’est pas identique pour les participants au système :
-
la révocabilité : l’instruction de paiement relative à la devise vendue n’est pas émise ou
peut être annulée unilatéralement ; l’exposition au risque n’existe pas ;
-
l’irrévocabilité : ladite instruction de paiement ne peut plus être annulée unilatéralement
mais la réception des fonds relatifs à la devise achetée n’est pas encore échue ; le risque
porte sur le montant acheté ;
306
Une enquête de la Banque des règlement Internationaux, en 1995, relevait que le montant quotidien des
opérations réalisées sur les marchés des changes mondiaux (comptant, terme sec et contrats d’échange de
devises) s’élevait à 1 230 milliards de dollars à l’époque. (sources : Bank for International Settlements, Risque
de règlement dans les opérations de changes, mars 1996).
Notons que, malgré une diminution sensible depuis quelques années, l’activité sur le marché des changes
traditionnel s’élevait, en avril 2001, à 1210 milliards de dollars (Londres est toujours en position dominante avec
une part de marché de 31.2%, Paris n’ayant qu’une part de 3%, ce qui la classe au neuvième rang mondial).
Source : L’activité des marchés de change et de produits de gré à gré sur la Place de Paris en avril 2001, Bulletin
de la Banque de France, décembre 2001
307
Bank for International Settlements, Risque de règlement dans les opérations de changes, mars 1996
Bank for International Settlements, Supervisory guidance for managing settlement risk in Foreign Exchange
Transactions, juillet 1999
148
-
l’indétermination : l’instruction de paiement ne peut plus être annulée, la réception des
fonds est échue, mais le caractère définitif de la réception des fonds n’est pas prononcé ; le
risque porte sur le montant acheté ;
-
l’impayé : la banque n’a pas reçu de sa contrepartie les fonds relatifs à la devise achetée ;
le montant est impayé à l’échéance, le risque perdure ;
-
le règlement final : le paiement final est effectué ; le risque de règlement n’existe plus.
Ces différents états sont présentés dans le schéma 10.
Schéma 10 : Exposition au risque
ETAT 1
Conclusion
de
l’opération
ETAT 2
Heure limite
pour l’annulation
unilatérale de
l’instruction de
paiement de la
devise vendue
ETAT 3
ETAT 4
Echéance de la
réception
irrévocable de la
devise achetée
Constatation de
la réception
irrévocable de la
devise achetée ou
de l’impayé
L’exposition au risque est égale à la somme des opérations correspondant aux états 2 et 4,
pour l’établissement qui détermine, dès l’échéance, s’il y a eu réception irrévocable des
devises ou impayé. L’établissement qui ne détermine pas immédiatement s’il a reçu ou non
les montants échus ne peut pas calculer son exposition au risque.
Au total, on détermine :
-
l’exposition minimale comme étant la somme des opérations correspondant aux états 2 et
4 (montant des opérations pour lesquelles la banque ne peut plus annuler unilatéralement
le paiement de la devise vendue, mais n’a pas encore reçu les fonds relatifs à la devise
achetée),
-
l’exposition maximale comme étant la somme des opérations aux états 2,3 et 4, c’est-àdire l’exposition minimale majorée du montant des devises achetées qui auraient dû être
reçues mais ne l’ont pas été.
149
En pratique, l’étude de la BRI révèle que la durée du risque des règlements des opérations de
change pour une transaction au comptant ou à terme (état 2) était, lors de l’étude 308, comprise
entre un et deux jours ouvrés, à laquelle il convient de rajouter un ou deux jours
supplémentaires pour savoir si les banques ont bien reçu à l’échéance la devise achetée (état
3).
Le risque de défaut sur la contrepartie est souvent appelé risque Herstatt, du nom de la banque
allemande ayant fait faillite en 1974.
Kamata
309
mesure ledit risque comme étant une fonction du délai de livraison et donne
l’exemple suivant :
Soit une transaction d’un million de dollars entre une banque A et une banque B ; A vend des
yens pour acheter des dollars ; les yens sont livrés à 15 heures, heure japonaise via GaitimeYen System, tandis que les dollars sont livrés à 18 heures, heure américaine, via le système
Chips
310
; le délai de livraison est alors égal à 3 h + 14 h de décalage (les yens étant livrés
avant les dollars).
La banque A, acheteur de dollars, est donc exposée au risque à hauteur de 1 million $ x 17
heures, soit à hauteur de 17 millions $ par heure.
Kamata conclut que les moyens de réduire ce risque résident dans la mise en place d’un
netting par novation (cf. schéma 11), afin de réduire le montant de l’exposition au risque, et
d’une procédure de livraison contre paiement, afin de diminuer le délai.
308
Cette étude a porté sur 80 banques des pays du G10.
Kamata S., Measuring « Herstatt risk », Bank of Japan monetary and economics studies September 1990
310
CHIPS = Clearing House Interbank Payments System, coopérative de droit privé, offrant à ses participants un
règlement sous la forme de paiements nets.
Le lecteur se référera au schéma ci-dessous pour comprendre le fonctionnement général de Chips.
Un exemple de fonctionnement nous est donné par Shapiro (Shapiro A.C., Multinational financial management
6th edition, John Wiley & Sons Inc. 1999) :
FujiBank a vendu 15 millions $ à Citibank contre 1.5 milliards de yens à Tokyo. Afin de finaliser la transaction,
FujiBank doit transférer 15 millions $ à Citibank. En conséquence, FujiBank entre la transaction dans son
terminal Chips, avec les codes du vendeur et du destinataire, le message est alors enregistré auprès de Chips.
Après confirmation de la part de FujiBank, le message est transmis de Chips à Citibank. Les ordinateurs de
Chips enregistrent le débit et le crédit sur les comptes des deux établissements concernés. A la clôture de la
journée (16h30, Eastern Standard Time), Chips envoie un reporting relatif aux positions débit et crédit des deux
membres. La banque en position débitrice a jusqu’à 17h45 pour transférer le montant requis de Fedwire (système
de règlement brut en temps réel géré par la Fed.) à Chips. Chips transfert les fonds via Fedwire pour règlement.
Le processus est totalement clôturé à 18 heures.
Le règlement sur le marché des changes s’opère en J+2, il existe donc un risque de crédit sur ces journées.
309
150
Cependant, reprenant l’exemple de la banque Herstatt 311, il affirme que ces deux moyens sont
insuffisants, encore faut-il que les différentes places financières s’entendent sur la notion
d’irrévocabilité, et unifient leur définition de ladite irrévocabilité des paiements.
Schéma 11 : Exemple du clearing aux Etats-Unis
dollar
Clearer US
Clearer US
Chips net
Chips net
correspondant
Système brut
ou net
Baker R., Le choix d’une plate-forme unique, Banque Stratégie, octobre 1998
311
La banque Herstatt et la Delbrueck Bank avaient conclut un contrat mark contre dollar, Delbrueck ayant
acheté des marks contre des dollars pour un règlement en date du 26 juin 1974. A cette date de règlement, la
Banque Herstatt était suspendue par les autorités de tutelle. Arguant que l’instruction de paiement en dollars était
révocable, Delbrueck a poursuivi son correspondant new yorkais, Manufacturers Hanover Trust, en dommages et
intérêts, mais a perdu. Cette transaction impliquait des marks et des dollars, ces derniers devant être livrés
ultérieurement. En fait, les marks ne pouvaient être reçus tandis que Delbrueck avait réglé les dollars, compte
tenu du délai de livraison. Théoriquement, la Banque Herstatt aurait dû livrer les marks plus tôt. Delbrueck aurait
pu simplement stopper le processus de paiement en dollars et éviter tout risque, mais elle avait réglé lesdits
dollars avant la suspension de la Banque Herstatt. Le problème, ici présent, émane donc de la prise en compte de
la notion d’irrévocabilité des paiements différente selon les systèmes.
151
4.3
Les risques spécifiques aux activités de règlement-livraison 312
4.3.1 Le risque de crédit
Le risque de crédit est toujours, dans les opérations boursières, celui qui naît lorsque la
contrepartie ne remplit pas ses obligations à l’échéance du dénouement ou ultérieurement.
Lors d’une défaillance d’un participant, sa contrepartie peut perdre l’opportunité des gains sur
le contrat en cours ou perdre les titres à livrer ou les paiements à régler.
Le premier cas, la perte des gains potentiels, est souvent appelé risque de remplacement ou
risque de pré-règlement
313
. La contrepartie confrontée à ce risque est alors obligée de
remplacer la transaction en suspens par une autre.
312
A chaque fois qu’il nous est apparu opportun de développer le point de vue de tel ou tel auteur, cela a été fait.
Néanmoins, il nous semble souhaitable de préciser les principaux auteurs ou études ayant abordé les risques
spécifiques aux activités de règlement-livraison, à savoir :
- Bank for International Settlements, Delivery versus payment in securities settlement systems, septembre
1992
- Bank for International Settlements, Disclosure framework for securities settlements systems, February 1997
- Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for Securities Settlement Systems,
November 2001
- Bernard L.W., Clearance and settlement – an international blueprint, Financier, juin 1990
- Boissieu (de) C., Adaptation du système relit aux opérations transfrontières, Rapport de mission 1994
- Borio C.E.V., Van den Bergh P., The nature and management of payment system risks : an international
perspective, Bank for International Settlements Economic papers n°36, February 1993
- Bulletin de la Banque de France n°84, décembre 2000, La surveillance de la sécurité et de l’efficacité des
instruments de paiement, des systèmes de paiement et des systèmes de compensation et de règlement de
titres
- European Central Bank, Standards for the use of EU securities settlement systems in ESCB credit
operations, janvier 1998
- European Central Bank, Assessment of EU securities settlement systems against the standards for their use
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Novembre 2001
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- OCDE, Risques systémiques dans les marchés des valeurs mobilières, 1991
- Rutz Roger D., Clearance, payment and settlement systems in the futures, options and stocks markets,
Review of Futures Markets 7, 1988
152
En effet, le gain potentiel sur un contrat financier s’entend comme étant la différence entre le
prix de marché de l’actif concerné par ledit contrat au moment de la défaillance et le prix
convenu lors du contrat : pour un vendeur, il y a risque de remplacement si le prix du marché
est inférieur au prix du contrat ; pour un acheteur, ce risque existe lorsque le prix de marché
est supérieur au prix du contrat. Compte tenu de la volatilité des cours et de l’incertitude qui
en découle, les deux contreparties d’une transaction boursière sont systématiquement
exposées au risque de remplacement. Son ampleur est une fonction croissante de la volatilité
des cours et du délai de règlement. En effet, il surgit lors d’un changement du prix d’un actif
ou lorsque le délai entre le règlement irrévocable et la livraison finale est trop important. Il est
réduit dès lors qu’un netting et un système de livraison contre paiement sont mis en place 314.
Le second cas, la perte totale des titres à livrer ou des espèces à régler, est appelé risque en
principal, ou risque de règlement. Il existe pour le vendeur, lorsque celui-ci a livré les titres
sans avoir reçu les espèces, et pour l’acheteur, en sens inverse.
En principe le risque de règlement peut être éliminé en reliant le système de paiement au
système de gestion des titres avec le principe de la livraison contre paiement. Cependant les
systèmes de livraison contre paiement requièrent de gros besoins de liquidités pour leurs
participants : ceux-ci doivent, en effet, maintenir des réserves suffisamment importantes pour
financer leur découvert en cours de journée. Afin d’éviter ce surcoût en liquidités, les
gestionnaires des systèmes de règlement-livraison de titres leur accordent des lignes de crédit
mais, dans ce cas, le risque de règlement devient un risque de crédit (qui pourra être réduit
avec la technique de la collatéralisation) 315.
Enfin, notons que selon une étude établie par des cabinets d’audit
316
auprès de 25 grands
groupes bancaires internationaux, peu d’établissements communiquent sur le risque de
défaillance lié aux processus de règlement-livraison (16% de l’échantillon) mais une part
croissante d’entre eux évoque ce risque dans le périmètre des activités générant du risque de
313
Pour gérer le risque de pré-règlement, on parle parfois de système pré-matching : Ceci consiste pour les
clearers à « éclairer » les contreparties en affichant dans le système de règlement-livraison les instructions
bloquées dans les livres du clearer.
Hayab A., DVP and securities settlement : where do we go from here ?, Conférence Insig, 5&6 October 1995
314
Gilbert A., Gollob E., Hargraves L., Mead R., Parkinson P., Stehm J., Taylor M.A., Clearance and settlement
in U.S. securities markets, Staff Studies Federal Reserve Bulletin Fall 1991
315
Dale R., Risk Management and public policy in payment, clearing and settlement systems, International
Finance Vol.1 Issue 2, December 1998
316
Deloitte Touche Tohmatsu, Ernst & Young, KPMG, Mazars & Guérard, Les établissements de crédit :
Doctrines et pratiques, L’information financière 2001, CPC 2001
153
crédit. Même si les autorités de tutelle suivent de plus en plus ce risque, elles n’ont pas émis
de recommandations particulières en matière de communication financière.
4.3.2 Le risque de liquidité
Il existe également, pour les deux contreparties, un risque de liquidité en date du règlement.
Ce risque de liquidité se définit comme le risque qu’une contrepartie ne remplisse pas
totalement ses obligations à l’échéance, mais à une date ultérieure non prévue à l’avance.
Dans ce cas, c’est davantage une non-exécution qu’une défaillance, et de facto ne s’assimile
pas à un risque de crédit. Pourtant, ce type de risque est difficile à évaluer quant à la frontière
entre risque de liquidité et risque de crédit, au moment du défaut de règlement ou de livraison.
Rochet et Tirole 317 ont illustré les risques de crédit et/ou de liquidité en prenant le cas de
deux banques A et B, sachant que A est en difficulté.
Trois cas de figure se présentent alors :
-
A envoie un message à B, afin qu’un compte d’un client de B soit crédité. Si B attend que
l’opération soit clôturée avec succès avant de créditer le compte de son client, il ne prend
alors aucun risque. Par contre, s’il crédite immédiatement le compte de son client, il court
un risque de crédit.
-
A envoie un message de paiement à B pour compte propre (dans le cas d’un
remboursement de prêt par exemple), et B prête les fonds immédiatement. Dans ce cas, B
est face à un risque de liquidité. Même si B a pris en compte le risque que A ne rembourse
pas le prêt, tant que le règlement n’est pas irrévocable, il existe toujours un risque de
crédit. B anticipe la confirmation du remboursement et ainsi est conduit vers une seconde
transaction qui, si le paiement de A n’est pas irrévocable, lui permettra de rechercher des
actifs liquides.
-
B prête à A, il existe un risque de crédit classique.
Le vendeur est confronté au risque de liquidité s’il est obligé d’emprunter des espèces, voire
vendre des actifs, pour éviter des réactions en chaîne. L’acheteur l’est si l’absence de livraison
des titres attendus le contraint à emprunter des titres.
154
Le coût associé à ce risque dépend de la liquidité du marché : plus un marché est liquide,
moins le coût d’ajustement est élevé.
4.3.3 Le risque de défaillance de la banque de règlement
Tout acheteur ou vendeur est confronté à un risque de défaillance de la banque de règlement.
Si la banque de règlement est défaillante, les dénouements sont interrompus, impliquant alors
des pertes significatives et des pressions en matière de liquidité pour les participants au
système. Ce phénomène est plus dramatique encore si l’ensemble des participants règle ses
transactions auprès d’une banque unique. En conséquence, si tel est le cas, ladite banque
unique devrait être systématiquement la banque centrale.
4.3.4 Le risque de conservation
Celui-ci réside en une mauvaise gestion de la conservation des titres : le conservateur peut
perdre les titres physiques, faire des erreurs dans la conservation scripturale ou être défaillant,
voire insolvable.
Les intermédiaires sont confrontés à ce risque de conservation avec leur dépositaire central ou
avec leur établissement mandaté pour la conservation de leurs titres (dans la relation entre
affilié et sous-affilié par exemple).
Ce risque prend des proportions plus fortes encore sur les transactions internationales (cf. cidessous § 4.4).
L’un des moyens de réduire ce risque consiste en l’application de la ségrégation
318
des
comptes, pour le conservateur, entre les titres détenus pour compte propre et ceux détenus
pour compte de tiers.
Mais on remarquera que le risque de conservation a changé de nature au fil du temps.
317
Rochet J.C.,Tirole J., Interbank lending and systemic risk, Journal of Money, Credit and Banking,
November 1996
318
La ségrégation des avoirs repose sur le principe d’ouverture de deux comptes par valeur pour un participant :
un compte de titres pour les titres appartenant en propre à l’établissement, un compte titres pour les titres détenus
par l’établissement pour compte de tiers (clientèle, Opcvm …).
155
Depuis que les banques existent, les déposants ont toujours souhaité transférer leurs risques de
détention d’un bien à un tiers. Or, pour les titres, la notion de dépôt s’est transformée, depuis
la dématérialisation, en une notion de conservation scripturale, amenant, de facto, de
nouveaux risques. Le dépositaire, ou conservateur, doit désormais, outre conserver les titres,
les gérer et, au-delà même, gérer l’ensemble des droits qui en sont détachés. En devenant
teneur de compte, le dépositaire prend alors un risque identique à celui de la banque : il
participe à des systèmes de paiement et de règlement-livraison et prend connaissance
d’informations sur son client. Il tient à jour une comptabilité selon un cahier des charges
rigoureux, établit des liens avec les émetteurs, les dépositaires centraux, les chambres de
négociation et les négociateurs. En participant aux systèmes de place, il est potentiellement
confronté aux risques inhérents à l’adhésion aux dits systèmes.
Ses engagements pris deviennent donc définitifs au-delà d’un terme fixé par les règles du
système, et ne peuvent être remis en cause, si ce n’est en se mettant d’accord avec sa
contrepartie pour passer des instructions en sens inverse. Les risques sont donc
particulièrement importants pour un teneur de compte qui s’engage dans le cadre d’un
système alors même qu’il n’aurait pas reçu préalablement les fonds ou titres de la part de son
donneur d’ordres 319.
4.3.5 Les autres risques
•
Risque opérationnel
Comme dans tout système, il existe toujours un risque opérationnel (déficience de systèmes
ou de contrôle, erreurs 320 …) pouvant réduire l’efficacité du système de règlement-livraison,
pouvant alors générer des difficultés sur la liquidité des participants.
319
Goutay P., L’encadrement réglementaire des risques de la conservation vise davantage à protéger qu’à
sanctionner, Agefi Supplément spécial Conservation de titres, 24 octobre 2002
320
En atteste une enquête (Fulcrum Research survey of European institutional sentiment towards current issues
in European trading system, September 2002) menée en 2002 auprès d’investisseurs institutionnels européens
qui a conclut que le coût d’une erreur sur une opération domestique était de 182 € et sur une opération
transfrontalière de 388 €.
Dans la même lignée, Swift a estimé le coût de réparation d’une opération transfrontalière à 220 €.
Par ailleurs, Omgéo (fournisseur de services de gestion des transactions, joint-venture DTCC – Thomson
Financial) a évalué le coût d’un ordre traité par électronique à 4 € et celui d’un ordre traité manuellement à 12 €.
Enfin, Swift affirme que les investissements réalisés par les institutions pour rationaliser et automatiser leur
processus de traitement leur ont déjà apporté une baisse du coût de traitement d’un ordre clientèle particulier de
62 % (entre 1996 et 2000, ce coût serait passé de 29 à 12 €).
156
Par ailleurs, le traitement des opérations post-bourse doit faire l’objet d’une réglementation
stricte, applicable à tous les acteurs. En son absence, il existe un risque juridique qui peut
engendrer d’autres risques tels ceux suscités.
Dans le cadre de la réforme du ratio Cooke (futur ratio Mac Donough), une étude
321
sous
l’égide du Comité de Bâle a été menée en 2001 sur les sinistres avérés par catégorie de risque
opérationnel et par type d’activité bancaire.
Cette étude a fait ressortir les éléments présentés dans le tableau 5 322.
321
Cole R., BIS Working Paper on the regulatory treatment of operational risk, September 2001
Etude du Risk Management Group, 2001, reprise et analysée par Draf et Falgéras (Draf K., Falgéras V., A
chaque ligne de métier sa maîtrise du risque opérationnel, Banque Stratégie, Décembre 2002).
322
157
Tableau 5 : Répartition des sinistres (nombre/montant) par ligne de métier et catégorie d’événement
Prise en compte des sinistres excédant 10 000 euros – Résultats obtenus sur un échantillon de 30 banques
Fraude interne
Fraude externe
Sinistres
attenant à la
sécurité
Corporat
e finance
Trading
& sales
Retail
banking
Commercial
banking
Paiement
&
3 293
0.13%
68 819
2.67%
4
25 231
3
6 109
0.04% 0.98% 0.03% 0.24%
16
826
6
7 837
0.14% 0.03% 0.05% 0.30%
114 937
419 198 575 3 693 53 836
4.45% 3.69% 7.69% 32.55% 2.09%
287 275
519
78 765
68
3 569
3.05%
732
0.60%
12
11.13%
règlement
0.03%
2 265
Services
de
conserva- 0.09%
tion
Asset
8 566
management
0.33%
Retail
426
brokerage 0.02%
Sinistres sur
gestion de
comptes clients
Dommages sur
actifs physiques
Problèmes de
systèmes
131 012
15
15
0.13% 5.07% 0.13%
36
89 038
107
0.32% 3.45% 0.94%
267 385 722 641
2.35% 14.94% 5.65%
44
23
76 159
16
0.00%
100
0.00%
60 174
2.33%
13 534
3
0.03%
350
3.09%
63
6 221
0.24%
1 797
0.07%
1 359
Problèmes sur
exécution,
livraison &
process
28 432
33
1.10% 0.29%
325 593
34
708
0.30% 12.62% 6.24%
191 617 1 758
19
0.17% 7.42% 15.5%
135 346
13
288
1
4 767
4.58%
60
0.14%
718
0.20%
8
2.95%
1 058
0.39%
21
0.52%
2 045
0.56%
28
0.05%
2 638
0.11% 5.24% 2.54%
111 993
48
593
0.11%
6
0.18%
267
0.53%
2
0.03%
374
0.07%
12
0.04%
7 517
0.19%
31
0.08%
859
0.25%
10
0.10%
1 707
0.42%
8
43 244
5.23%
347
0.05%
0.01%
0.02%
0.01%
0.11%
0.29%
0.27%
0.03%
0.09%
0.07%
0.07%
1.67%
3.06%
4
603
4
1 037
10
8 968
32
644
2
34 302
233
0.04% 0.02% 0.04%
4
596
2
0.04% 0.02% 0.02%
277 803
533 518 140 4 289
0.04%
1 845
0.07%
75 325
0.09% 0.35% 0.28%
94
11
17 387
0.10% 0.67% 0.83%
382 716 861 985
561
0.02%
77 289
2.92%
3.37%
27.76%
2.99%
4.34%
9
0.08%
464
0.02%
5 646
0.22%
20 012
0.02% 1.33% 2.05%
187
26 029
420
1.65% 1.01% 3.70%
311 896 557 4 380
4.09%
0.78%
2.74%
Total
Coût moyen
par événement
194 093
71
2 734
498 434
910
548
1 006 658
7 174
141
596 008
1 018
585
123 951
770
161
56 233
416
135
54 120
285
190
52 490
727
72
2 581 987 11 344
Total
228
10.76%
4.70%
20.07%
37.81%
Signification des chiffres :
Montant des sinistres (en K€)
% par rapport au montant total de sinistres
8.68%
Nombre de sinistres
% par rapport au nombre total de sinistres
34.72% 38.61%
100%
100%
158
Au regard de ce tableau 5, on constate que, pour chaque activité, le risque opérationnel lié à la
catégorie « exécutions, processus de gestion et règlement-livraison » est prépondérant tant en
matière de nombre d’incidents que de montants en jeu.
Ceux-ci semblent s’expliquer par les ruptures de charge dans les processus de gestion des
ordres, notamment le non-respect de toutes les contraintes clients lors de l’acte de gestion
(ordre) ou de la négociation (exécution) source de litiges commerciaux, l’absence de contrôle
de cohérence entre l’ordre saisi par le gérant et l’exécution faite par le négociateur, ou une
standardisation des marchés encore incomplète. Ceci entraîne alors des difficultés dans les
différents rapprochements négociateurs, contreparties, dépositaires et systèmes de règlementlivraison dans les opérations transfrontalières.
Aussi, pour minimiser ce risque opérationnel, les intermédiaires financiers généralisent-ils de
plus en plus la technique du straight through processing.
•
Risque systémique
Le risque systémique existe dans les opérations post-bourse parce qu’une défaillance peut
entraîner d’autres défaillances au sein du système de règlement-livraison ; plus encore,
compte tenu de l’interconnexion des systèmes et des marchés, cette réaction peut s’étendre
aux autres systèmes et marchés.
Le plus souvent, le risque systémique en matière de règlement provient davantage de
l’insolvabilité potentielle d’un participant (choc idiosynchratique) que du fonctionnement
interne défectueux du système lui-même (choc systématique)
323
. Pourtant, un exemple peut
être donné par le dysfonctionnement du système RGV en septembre 2001 en place de Paris.
323
Chocs systémique dans un système financier:
Choc initial
Propagation du choc
- Choc idiosyncrasique
- Choc systémique
limité
Choc systémique large
Evénement simple (affectant une institution
ou un marché)
Faible (sans
Fort (faillite d’une
défaillance ou crash) institution ou crash
d’un marché)
Evènement large (affectant plusieurs
institutions ou marchés)
Faible (sans
Fort (faillite d’une
défaillance ou crash) institution ou crash
d’un marché)
Contagion
Contagion
Contagion menant à
une crise systémique
Contagion menant à
une crise systémique
Crise systémique
Bandt (de) O., Hartmann P., Systemic risk : a survey, European Central Bank Working Paper n°35,
November 2000
159
En effet, le 20 septembre 2001, Euroclear France a bouclé la journée comptable sans prendre
en compte environ 5000 mouvements de livraison contre paiement du système SLAB de RGV
et Relit +, provoquant ipso facto des suspens s’élevant à près de 11 milliards d’euros (contre
0.5 milliards de suspens en fin de journée en période normale). De plus, d’importants retards
de traitement ont été enregistrés le lendemain – journée comptable du 21 septembre – dans le
traitement d’environ 800 pensions livrées : les suspens ont alors atteint 6,8 milliards € ce jour
là.
Cette situation résultait d’une succession d’incidents informatiques : la correction d’une erreur
initiale (donnée manquante dans un référentiel) a été mal effectuée, entraînant, par effet de
chaîne, une succession d’erreurs, puis des retards importants.
Une cellule de crise de Place, sous l’égide de la Banque de France, a été conduite, l’aprèsmidi du 20 septembre, à se prononcer sur l’alternative suivante : soit accorder un délai
supplémentaire à Euroclear France, soit respecter les délais habituels. Cette cellule, constituée
essentiellement de trésoriers espèces, a opté pour le respect des horaires, permettant aux
établissements de disposer du délai nécessaire pour emprunter les espèces manquantes si
nécessaire.
Au final, Euroclear France n’a pas estimé devoir indemniser les participants parce qu’elle
aurait pu traiter les 5000 mouvements en cause si la Place lui avait accordé un délai
supplémentaire ; elle estime que les trésoriers espèces ont été privilégiés face aux trésoriers
titres.
Enfin, le risque systémique peut naître d’une incompatibilité de systèmes entre eux (par
exemple avec une différence d’échéanciers entre la collecte et le paiement des fonds). Cela
peut alors engendrer des pressions croissantes sur les utilisateurs qui peuvent alors s’exercer
sur les liquidités, ce qui ne manquerait pas de poser des problèmes de liquidités en cas
d’accroissement des volumes négociés.
•
Une illustration du risque systémique ayant concerné les marchés de valeurs mobilières et
les organismes de compensation 324 :
Selon Davis
325
, quatre périodes de désordres sur les euromarchés sont intéressantes pour
mieux appréhender ce qu’est un risque systémique :
160
-
1974 : faillite de la banque Herstatt,
-
1982 : crise d’endettement
-
1986 : problème sur le marché des billets à taux variable
-
1987 : krach sur le marché des actions.
Les analogies détectées lors de ces crises ou krachs sont les suivantes :
les crises financières faisaient suite à un gonflement de la dette et à une accumulation
substantielle d’actifs, avec souvent un comportement grégaire des prêteurs, des primes de
risques faibles et une concentration des risques ;
elles ont été consécutives à un changement de régimes aux conséquences imprévisibles ou
imprévues (avant 1974, le système des changes fixes a fait place à celui des changes
flottants ; avant 1982, le second choc pétrolier est intervenu ; et avant 1987, il y a eu des
mutations structurelles importantes sur les marchés de capitaux internationaux) ;
l’innovation et la diminution des ratios de fonds propres des prêteurs et des emprunteurs
ont été des phénomènes importants ;
les crises ont suivi une période de resserrement des politiques monétaires et/ou de
récession ;
elles se sont accompagnées d’une forte accentuation du rationnement du crédit par les prix
et les quantités offertes, sans empêcher pourtant les emprunteurs d’obtenir des ressources
par d’autres biais ;
la transmission internationale
326
a été forte et rapide mais l’action des autorités a permis
d’éviter des conséquences systémiques et macroéconomiques graves.
Il s’avère qu’une défaillance sur les marchés de capitaux perturbe nettement les processus
d’épargne et d’investissement et compromet, de fait, la confiance des investisseurs.
En 1987, l’impact de l’effondrement des cours sur la sphère économique réelle s’est traduit
par des tensions inflationnistes consécutives aux mesures d’assouplissement monétaire prises
par les autorités pour faire face à la crise boursière. L’impact sur le marché des valeurs
324
OCDE, Risques systémiques dans les marchés des valeurs mobilières, 1991
Davis E.P., Instability in the euromarket and the economics theory of financial crisis, Bank of England
Discussion Paper n°43, October 1989
326
La transmission des crises, sur le plan international, est d’autant plus importante que, si les banques ont
souvent un rôle de déclencheur de crise (telle celle de 1997 sur les marchés émergents), les investisseurs
institutionnels ont, quant à eux, un rôle essentiel de transmetteurs des crises. Plihon D., Les investisseurs
institutionnels, nouveaux acteurs de la finance internationale, Cahiers Français n°289, janvier – février 1999.
325
161
mobilières a été, quant à lui, sensible en 1988 par un effet dépresseur sur le volume des
transactions du marché secondaire et sur le nombre d’émissions du marché primaire.
Le risque systémique extrême est celui d’une défaillance d’une ou plusieurs maisons de titres
qui provoque d’autres défauts de paiement en règlement des transactions financières, compte
de l’interrelation entre intermédiaires financiers et marchés. En outre, la solidité et l’efficacité
des systèmes de paiement et de compensation diffèrent d’une place à l’autre.
Aussi lors du krach de 1987, plusieurs éléments ont-ils été mis en évidence :
-
le manque de fonds propres de certains organismes de place, telle la Hong Kong Futures
Guarantee Corporation (que les autorités ont dû renflouer) ;
-
la quasi-faillite d’organismes de compensation consécutive à des défauts de paiement de
leurs participants, telle l’Option Clearing Corporation aux Etats-Unis, qui sans
l’intervention de sa maison mère, aurait pu déclencher des difficultés chez d’autres
organismes de compensation ;
-
le sentiment d’inquiétude face aux difficultés de ces organismes de compensation (le
paiement tardif du Chicago Mercantile Exchange d’un montant élevé d’un transfert au
titre de marges a suscité des suspicions chez les participants) ;
-
l’accroissement des suspens (plus de trois semaines sur la place de Londres), plus élevés
là encore qu’en période normale.
Rétrospectivement, on observe le cheminement du mécanisme : Une forte baisse des cours de
valeurs mobilières s’est propagée sur d’autres marchés, entraînant de facto des défauts de
paiement d’un ou plusieurs intermédiaires de premier plan, provoquant alors une crise du
système central d’opérations bancaires et des paiements.
Le passage d’une étape à une autre soulève des questions relatives à :
-
l’organisation et la capacité des marchés,
-
l’interconnexion entre marchés de titres et marchés dérivés,
-
l’utilisation de nouvelles techniques d’arbitrage,
-
les dysfonctionnements des systèmes de règlement et de compensation,
et nous démontre ainsi que les opérations de règlement-livraison de titres peuvent être
génératrices de risques systémiques.
162
4.4 Les risques relatifs aux opérations transfrontalières
Si les activités boursières transfrontalières génèrent globalement les mêmes risques que les
opérations domestiques, celles-ci peuvent être d’une ampleur plus forte dès lors que le
nombre d’intermédiaires impliqués est plus important.
Lesdites opérations transfrontalières impliquent généralement des transactions de change qui
occasionnent également des risques de liquidité et des coûts de remplacement 327. L’usage des
conservateurs étrangers ou supranationaux accroît, en outre, le risque de conservation et le
risque juridique du fait des différentes législations en vigueur sur les différentes places
financières.
La multiplication des canaux de règlement-livraison transfrontaliers augmente les sources de
problèmes de conservation (entre les global et sub custodians par exemple) et leur ampleur.
Lors d’un litige consécutif à une opération transfrontalière, la question est souvent posée de
savoir à quelle juridiction se référer pour le traiter.
Comme indiqué plus haut, le risque de conservation est accru dès que les intermédiaires
traitent des opérations transfrontalières.
En effet, les établissements détenant des titres pour compte de tiers (leur clientèle notamment)
n’ont pas la possibilité d’en disposer à leurs propres fins. C’est là une différence essentielle
entre la gestion des devises (lorsque les banques sont dotées du pouvoir de création
monétaire) et la gestion des titres. Si le teneur de compte utilise les titres en conservation pour
327
La spécificité des transactions transfrontalières sur valeurs mobilières est que la branche paiement est une
transaction de change. Par conséquent, les opérations transfrontières combinent les risques de remplacement et
en principal des transactions sur titres et de change. L’interconnexion de systèmes nationaux de règlementlivraison et de paiement aux caractéristiques juridiques et fonctionnelles spécifiques est un facteur d’occurrence
du risque systémique. La réduction de ce risque passe par la généralisation de la livraison contre paiement pour
les titres et de systèmes à règlement brut pour le change, et ce avec une harmonisation des heures d’ouverture
entre les principaux marchés. En effet, l’interconnexion des différents réseaux standardisés de jure conduit à la
réduction du risque en principal. Seul le risque de remplacement, inhérent aux transactions sur les produits
financiers et de change, persiste. L’occurrence de ce risque est malgré tout préoccupante en raisons des délais
d’appariement, de la volatilité des actifs et des taux de change.
Figuet J.M., Le risque systémique dans les systèmes interbancaires de paiement de gros montant, Revue
d’Economie Politique, janvier-février 1999
163
compte de tiers à des fins de compte propre (pour les revendre ou les prêter), il pratique le
tirage sur la masse 328, condamné par les autorités de tutelle.
Karlin
329
prend l’exemple d’une banque française détenant, pour le compte de clients, des
titres malais (dont l’économie est qualifiée d’émergente). Si cette banque choisit un
dépositaire malais, elle court le risque qu’il n’exécute pas correctement ses ordres, gère mal
les opérations sur titres, ou se comporte de façon frauduleuse. Pourtant, il devra mettre à
disposition de ses clients les valeurs malaises dont ils sont propriétaires. Il devra donc les
racheter à condition que le marché soit liquide. Les banques sont donc extrêmement attentives
à la qualité de leurs dépositaires. A défaut, elles prennent un risque de conservation et
préfèrent alors s’adresser à un global custodian.
Pourtant 330, ledit risque de conservation, dont il est question avec un dépositaire central, peut
s’appliquer également aux global custodians, car ces derniers ouvrent de multiples comptes
auprès des dépositaires centraux nationaux en vue de dénouer les transactions avec d’autres
établissements qui ne sont pas en relation directe avec les dépositaires. Ipso facto, ils offrent à
leur clientèle un rôle d’intermédiaire et leur défaut peut être un élément de transmission de
crises, et ce, d’autant plus, qu’ils sont également membres des systèmes de paiement
nationaux.
Enfin
331
, les règlements et livraisons enregistrés hors du champ d’action d’un dépositaire
domestique posent des problèmes. Lorsque diverses contreparties traitent avec un même
conservateur, il est possible de dénouer les transactions boursières directement dans les livres
dudit conservateur plutôt que de dénouer auprès du dépositaire central du pays de l’émetteur.
Cette situation est, certes, possible dans le dénouement d’une transaction domestique dès lors
qu’une banque domestique est conservateur pour de nombreux participants sur un marché,
mais elle est plus courante encore dans le cadre d’un dénouement transfrontalier. Les
conservateurs internationaux dénouent de gros montants entre leurs participants
328
Selon la Commission des Opérations de Bourse, la technique du tirage sur la masse consiste à « utiliser des
titres pris sur le compte global de l’établissement chez le dépositaire central de titres pour remplir les obligations
d’un opérateur qui ne dispose pas de ces titres ».
329
Karlin M., Circulation internationale des titres, Encyclopédie des marchés financiers, Economica 1997
330
Bandt (de) O., Hartmann P., Systemic risk : a survey, European Central Bank Working Paper n°35,
November 2000
331
Bank for International Settlements, CPSS – IOSCO joint task force on securities settlement systems,
Recommendations for securities settlement systems, January 2001
164
internationaux via des opérations de débit et crédit. Et les liens entre dépositaires permettent
le dénouement des opérations sur titres étrangers par un dépositaire non-résident.
Or, lorsqu’une transaction boursière est dénouée par un autre intermédiaire que le dépositaire
central de l’émetteur, le processus de dénouement obéit à la réglementation de
l’intermédiaire ; celle-ci peut alors différer de celle du dépositaire central local et cette dualité
de situations peut engendrer des risques nouveaux.
L’hétérogénéité des contextes juridiques et fiscaux entraîne des difficultés lorsqu’il s’agit, par
exemple, de s’assurer de l’irrévocabilité d’un mouvement de titres : le transfert définitif n’est,
en effet, possible que dans le pays d’origine de la valeur (dans le livre de l’émetteur ou auprès
du conservateur central) ou de la devise (auprès de la banque centrale). Ou encore, lorsqu’il
s’agit de la notion du droit de propriété, les législations diffèrent d’un place à une autre : le
transfert de propriété est acquis dès l’échange sur certains places, ou lors de la livraison
seulement sur d’autres places.
Par conséquent
332
, s’il y a règlement entre un système à irrévocabilité intrajournalière et un
système à irrévocabilité en fin de journée, les livraisons dans le premier système ne devraient
être, en réalité, considérées comme disponibles qu’en fin de journée, afin d’éviter tout risque
de défaut. Par ailleurs, une liaison entre systèmes qui nécessite la mise en place d’un crédit ou
d’un prêt de titres pour couvrir un décalage entre la livraison effective dans un système et la
réception définitive dans l’autre, est source de risque de crédit entre ces deux systèmes.
4.5 Une ébauche de conclusion relative aux risques 333
Les risques attachés aux différents systèmes – paiement, règlement et livraison de titres –
varient selon le type de transactions traitées.
Les paiements interbancaires génèrent des risques de crédit intrajournaliers ; les transactions
de change et les opérations de règlement-livraison de titres impliquent un échange de valeurs
faisant émerger, au moins à court terme, des risques de crédit (principal et de remplacement).
Parallèlement, les transactions sur les marchés dérivés, pour lesquels les contrats peuvent
332
Hills B., Competition and co-operation : Developments in cross border securities settlement and derivatives
clearing, Bank of England - Quaterly Bulletin, May 1998
333
Dale R., Risk Management and public policy in payment, clearing and settlement systems, International
Finance Vol.1 Issue 2, December 1998
165
s’étaler sur de longues durées à échéance de plus d’un an parfois, exposent la contrepartie
centrale à un risque de remplacement.
Aussi ces différents risques relèvent-ils de techniques de gestion différentes.
Dans les systèmes de paiement de gros montants, la technique de couverture des risques
consiste en un plafonnement et une collatéralisation des transactions.
Sur les marchés des changes, les techniques de netting (bilatéral ou multilatéral),
accompagnées du principe de paiement contre paiement
334
sont évoquées, voire mises en
places, pour minimiser les risques.
Dans les systèmes de règlement-livraison de titres, le principe de la livraison contre paiement
est retenu pour réduire le risque principal tout en diminuant le délai de livraison pour
minimiser le risque de remplacement.
Enfin, l’amplitude du risque systémique varie selon les systèmes ou marchés.
Les systèmes de paiement et le marché des changes peuvent être sources de risque systémique
majeur, alors que les systèmes de règlement-livraison de titres sont générateurs de risque
systémique plus faible. Parce que l’exposition des participants et des organismes au risque
relève davantage du risque de remplacement que du risque en principal.
En conséquence, les banques centrales sont davantage actives dans la prévention de ce risque
dans les systèmes de paiement, par le biais de leur garantie apportée au système de paiement
ou de la gestion des liquidités intradays, que dans les systèmes post-marchés (dérivés et
cash), sur lesquelles elles interviennent essentiellement sous la forme de recommandations.
334
payment versus payment : dans un système d’opérations de change, mécanisme permettant de s’assurer qu’un
transfert définitif d’une devise est effectué si, et seulement si, un transfert définitif de l’autre (ou des autres)
devise(s) a lieu.
166
Conclusion
Les systèmes de règlement-livraison reposent sur le principe de la simultanéité des règlements
espèces et des livraisons de titres en un temps déterminé selon des règles de place.
Ces deux grands principes ont permis, d’une part de réduire le temps de traitement des
opérations post-bourse et, d’autre part de diminuer les principaux risques, de crédit et de
liquidité, y attenant.
Certains systèmes reposent sur une compensation totale des titres et espèces, d’autres gèrent
ces mêmes titres et ces mêmes espèces en brut.
Les risques ont d’abord été étudiés sur le marché des changes, et ce depuis la faillite de la
Banque Herstatt en 1974. Mais face aux montants négociés et aux nouveaux produits
financiers créés, il est des faillites qui sont désormais inscrites dans l’histoire des marchés de
capitaux. En conséquence, les autorités de tutelle et les intermédiaires financiers ont été
sensibilisés à la gestion des risques.
Depuis la fin des années quatre-vingts, des acteurs se sont penchés sur les risques spécifiques
aux activités post-bourse. Et les dépositaires centraux ont créé des systèmes de règlementlivraison qui ont, dès lors, permis de réduire considérablement les risques, même si le risque
« zéro » n’existe pas !
167
Chapitre III : La France - du compte courant de titres
aux systèmes Relit et RGV
Il y a cinquante ans, les valeurs mobilières cessaient d’être des titres au porteur
circulant de main en main, pour être regroupées chez un dépositaire central,
responsable de leur inscription en compte courant. L’événement était et demeure
important. Important, parce qu’il marque la naissance d’un dépositaire central,
gérant et comptable des titres détenus en France. Important et fondamental pour la
place financière de Paris parce qu’il pose un principe, celui de l’inscription en
compte, et une technique, celle du compte courant de titres, qui président à cinquante
années d’évolution des traitements des titres et qui sont, aujourd’hui encore, un atout
pour l’ensemble des acteurs. Pour les entreprises cotées, la procédure facilite la
gestion des comptes, l’identification des actionnaires, les opérations en capital, tout
en améliorant la sécurité des émissions. Pour les intermédiaires, elle contribue à
améliorer l’économie des traitements administratifs consécutifs aux opérations sur
titres ou à leur négociation. Aux investisseurs, elle apporte une transparence, mais
surtout une sécurité remarquables.
Serre A., Préface de « Une histoire de la Sicovam, Cinquante années de
compte courant de valeurs mobilières en France »
Si la place financière de Paris n’a pas créé le compte courant de titres (car les kassenvereines
l’avaient fait avant elle), elle a, cependant, été la première à en généraliser le principe en
dématérialisant ses titres.
Entre 1949 et 1984, les autorités de tutelle et les intermédiaires financiers français se sont
efforcés de conquérir les petits porteurs quant à l’avantage du dépôt de titres auprès d’une
institution. Aussi Sicovam a-t-elle réussi son pari de dématérialisation des titres sans
encombre. Incontestablement, ce fut un avantage pour réformer et informatiser les procédures
de règlement-livraison de titres.
Et depuis 1991, date de montée en charge total du système Relit, la Bourse de Paris est
totalement informatisée, de la collecte des ordres à la fonction de négociation pour finir par la
livraison des titres et le règlement des espèces.
Nous présentons, dans ce chapitre, l’évolution historique du compte courant de titres et du
dépositaire central français dont la consécration fut la dématérialisation des titres le 3
novembre 1984. Puis nous abordons l’informatisation complète des procédures de
conservation et de livraison de titres qui a concouru à la mise en place des systèmes Relit et
RGV.
168
1. De la CCDVT à Sicovam
1.1
Naissance du compte courant de titres
Exceptionnellement rares sont les sujets relatifs au post-marché développés dans le passé par
les universitaires. Aussi, les procédures de livraison de titres et les problèmes de conservation
des valeurs mobilières ont-ils, le plus souvent, échappé aux théoriciens. Nos recherches sur
l’historique en la matière n’ont révélé qu’une étude universitaire relativement approfondie :
une thèse de droit de 1957
335
dont nous nous sommes essentiellement inspirés pour retracer
l’histoire du compte courant de titres en Europe et plus particulièrement en France avec la
création de la Sicovam.
L’action au porteur, individualisée par un numéro de titre, a toujours prévalu en France et
préférée des français face à la forme nominative. Si cette forme offre des avantages en matière
de circulation des titres (par simple remise desdits titres), elle souffre d’un manque de
sécurité, étant soumise aux risques de perte ou de vol. En outre, avant dématérialisation des
titres, chaque mise en paiement de coupons nécessitait le détachement de ces coupons pour
encaissement, et ceci pour des montants relativement faibles. En conséquence, les
commissions, courtages et autres droits de garde ne couvraient pas systématiquement, voire
rarement, les frais liés aux opérations sur titres.
Nonobstant ces imperfections, il aurait été logique de généraliser la forme nominative en
France, mais, dans ce cas, la circulation des titres serait devenue plus complexe à gérer pour
les intermédiaires. Bien que fonctionnant très correctement dans les pays anglo-saxons, la
forme nominative était, en effet, difficile à généraliser en France de par la forte dilution du
capital des entreprises française, tandis que les fortunes aux Etats-Unis sont davantage
concentrées, et les transferts de titres peu nombreux. Par conséquent, une généralisation du
nominatif aurait pu accroître les frais de façon drastique pour les services titres des
intermédiaires financiers français.
Le législateur a ainsi réformé le système de détention et de circulation des titres, en
introduisant le principe du dépôt collectif de titres auprès d’un dépositaire central, à l’instar
335
Avéran-Horteur L., De la CCDVT à la Sicovam, le compte courant d’actions, thèse de doctorat 1957
169
des Kassenvereines allemandes. A cette fin, la loi du 28 février 1941 créa la CCDVT – Caisse
Centrale de Dépôts et de Virements de Titres, ayant pour mission de « recevoir tous dépôts de
valeurs mobilières pour le compte des agents de change, des courtiers en valeurs mobilières
336
, des banques …, dont elle a accepté l’affiliation, et faciliter, par des opérations de
virements de compte à compte, la circulation de ces valeurs »337.
Ce fut la première ébauche d’un organisme central en France (après les tentatives échouées du
Trésor ou de la Banque de France, vues dans le chapitre I). Au total, toutes les valeurs actions
au porteur des sociétés françaises furent concernées car tout détenteur d’actions au
porteur devait les déposer chez un établissement affilié qui devait obligatoirement les remettre
à la CCDVT ; celle-ci, grâce à la tenue de comptes et à l’utilisation des virements, permettait
alors une circulation simple des actions par des écritures comptables, à la condition que les
titres soient fongibles 338.
A la liquidation de la CCDVT, on recensait 570 millions d’actions déposées, émanant de plus
de 1500 sociétés, représentant une économie de coûts de gestion des titres pour les
intermédiaires comprise entre 20 et 45%, selon la taille des établissements, par rapport à la
conservation individuelle. L’économie de coût était tout aussi substantielle en matière de
gestion des opérations sur titres : 1.21 F pour le détachement de coupon d’un titre déposé à la
CCDVT contre 3.95 F pour celui d’un titre conservé individuellement ; le coût d’une
augmentation de capital pour une valeur admise à la CCDVT était de 23 000 F, contre 920
000 F pour une autre.
Cette expérience de dépôt collectif et obligatoire a été cependant mal vécue par la population
française qui s’estimait dépossédée de sa fortune par cette contrainte, d’autant plus mal perçue
encore que l’organisme avait été créé pendant l’occupation allemande 339.
336
Les courtiers en valeurs mobilières ont disparu en 1962
Article 1, loi du 18 juin 1941
338
Avéran L., id.
339
« L’inquiétude a engendré la révolte lorsqu’un simple arrêté du 15 septembre 1941 a reconnu à la CCDVT
non plus un droit concurrent à celui des autres banques, mais un monopole à l’effet de recevoir certaines valeurs
déterminées par elle-même. Elle recevait un monopole dont l’étendue ne dépendait que d’elle-même. La Bourse,
au vu de cet arrêté, a accusé une forte baisse. Les parts de fondateurs, dispensées du dépôt, ont fait prime. Des
campagnes verbales et de presse se sont déclenchées contre la CCDVT. Toutes ces protestations sont restées
vaines…
De telle sorte que c’est la résignation du public qui a accueilli la loi du 5 février 1943. Celle-ci impose le dépôt
de toutes les actions de certaines sociétés qui seront progressivement désignées par des arrêtés. Elle supprime
donc la condition de négociation ou d’émission qui subordonnait l’application de l’alternative légale : conversion
au nominatif ou dépôt. Celui qui avait pu valablement conserver ses titres sous la forme au porteur était obligé de
les convertir ou de les déposer dès lors qu’il les voyait figurer au tableau annexé à un arrêté », Tunc A., Journal
des Tribunaux 6 juillet 1947 (hebdomadaire judiciaire belge).
337
170
Une loi du 5 juillet 1949 abrogea les lois relatives à la création et au fonctionnement de la
CCDVT, promulguant de facto sa disparition. Néanmoins, les intermédiaires et les porteurs
avaient compris l’enjeu et les avantages du dépôt auprès d’un dépositaire. Aussi le décret du 4
août 1949 mit-il fin au dépôt obligatoire pour laisser le libre choix aux détenteurs de les
déposer auprès d’un nouveau dépositaire central, Sicovam – Société Interprofessionnelle pour
la Compensation des valeurs mobilières (créée le 30 décembre 1949).
Le compte courant de titres venait d’apparaître en France et se généralisera en 1984 par la
dématérialisation des titres. Le fondement de la technique du compte courant de titres repose
sur l’élimination des servitudes matérielles imposée par la gestion des titres physiques, en
adaptant aux valeurs mobilières les procédés de gestion déjà éprouvés pour les espèces.
Sommairement, il s’agit de scripturaliser les titres (comme la monnaie) et par-là même, de
faire disparaître leur matérialisation physique.
Trois principes prévalaient pour les détenteurs optant pour le dépôt en Sicovam :
-
la fongibilité 340 des titres inscrits en compte : tout titre déposé perdait son identité en tant
que numéro,
-
la suppression du détachement de coupons ou de droits, puis ultérieurement des titres
amortis,
-
le régime des oppositions : « toute opposition sur un titre déposé en compte courant est
sans effet dans la mesure où elle est publiée postérieurement au dépôt du titre en
cause »341.
Si une opposition frappait un titre déposé, la Sicovam délivrait à l’émetteur une attestation
donnant la date du dépôt, et l’opposition était ensuite ratifiée d’office au Bulletin Officiel des
Oppositions par la Chambre des Agents de Change.
Si, au départ, seules les actions étaient admises aux opérations de Sicovam, le législateur a
permit, au fil du temps, d’étendre le principe du compte courant de titres à d’autres valeurs
mobilières.
Le décret du 13 décembre 1957 accepta, sous réserve d’approbation ministérielle, l’admission
«d’autres valeurs mobilières à l’exception des obligations » ; ce furent les certificats pétroliers
342
340
(qui préfiguraient les certificats d’investissement créés en 1983).
La fongibilité consiste en une restitution des titres in genere et non in specie, c’est la base du compte courant
de titres.
341
Article 16, alinéa 2 du décret du 4 août 1949
171
Le décret du 14 septembre 1964 autorisa l’admission des obligations convertibles, phénomène
révélateur du développement du marché obligataire français (entre 1950 et 1960, le total des
émissions obligataires des entreprises du secteur privé fut multiplié par 17, contre 7 pour les
actions). Par ailleurs, le décret du 22 août 1977 permit l’admission des obligations
amortissables par tirage au sort de numéro de titres. Nonobstant la non-fongibilité de ce type
de titres, Sicovam mit en pratique un mécanisme de répartition proportionnelle, entre affiliés,
des titres amortis.
Enfin, le décret du 18 mars 1971 permit l’admission de « toute valeur mobilière ou catégorie
de valeur mobilière inscrite ou non à la Cote officielle » ; ainsi les Sicav ont-elles, dès leur
création, été admises en compte courant.
Ces admissions successives, en France et sur les autres places financières, des valeurs
mobilières aux opérations de compensation auprès des dépositaires centraux démontrent que
très tôt les dépositaires se sont mobilisés pour assurer la sécurité des transactions boursières et
ce dans un esprit de célérité des procédures pour minimiser les coûts de traitement postbourse.
1.2
La circulation des titres avant la dématérialisation
La circulation des valeurs après négociation boursière s’effectuait par le biais de virement de
comptes à comptes. Il fut en effet prévu, lors de la création de Sicovam, que « les
établissements affiliés ne pouvaient se livrer entre eux les actions versées à leurs comptes
courants ou susceptibles d’y être versées que par le moyen d’un virement effectué par
l’organisme interprofessionnel 343 ».
Ainsi, le titulaire d’un compte donnait l’ordre au teneur de compte de créditer un autre compte
par le débit du sien ; l’affilié débiteur (vendeur) établissait un virement au nom du créditeur
(acheteur). Le bénéficiaire de l’ordre de virement le transmettait à Sicovam qui, au vu de
l’ordre, créditait le compte du bénéficiaire. Notons qu’un virement ne pouvait être émis que si
la provision du vendeur était suffisante ; dans le cas contraire, Sicovam se réservait le droit
d’annuler les virements, à charge pour elle de réclamer des pénalités à l’affilié concerné.
342
certificats représentatifs de droits pécuniaires attachés aux actions dont l’Etat était détenteur dans deux
sociétés pétrolières (Compagnie Française des Pétroles et Société Nationale des Pétroles d’Aquitaine), et qu’il
attribuait lors d’un appel public à l’épargne.
343
Article 7, alinéa 1 du décret du 4 août 1949
172
La procédure de compensation ne fut opérationnelle qu’à partir de 1950, année au cours de
laquelle les compensations entre intermédiaires boursiers furent étendues à l’ensemble des
actions cotées en bourse de Paris.
Pour ce faire, deux séries de listes étaient établies par les intermédiaires :
-
une première série de listes établies par nature de valeur, comprenant toutes les quantités
de titres négociés et le montant de chaque opération. Chaque liste devait faire ressortir le
solde, en titres et en espèces, des opérations traitées dans la journée pour chaque valeur ;
-
une seconde série de listes établies par intermédiaire de bourse ne reprenant que les
récapitulations des listes précédentes pour les valeurs traitées par le même intermédiaire.
Chaque liste fournissait, par agent de change ou courtier, un solde pour chaque nature de
valeur, et un solde unique pour les espèces.
Au moment du règlement (en fin de mois ou par quinzaine), deux autres groupes de listes
étaient préparés :
-
un groupe de listes par valeur reprenant tous les soldes quotidiens ; chaque liste faisait
ressortir le solde définitif en titres et en espèces résultant des négociations de la période ;
-
un groupe de listes par intermédiaire reprenant les soldes des listes précédentes concernant
les valeurs traitées par chaque agent, ressortant un solde espèces unique par agent.
Chaque intermédiaire recevait ou remettait un virement Banque de France pour règlement des
soldes espèces ; la livraison des titres s’effectuait, valeur par valeur, par débit ou crédit des
comptes en Sicovam, conformément aux ordres de virements reçus, la compensation
multilatérale étant de rigueur pour les titres en compte courant. Au préalable, une première
compensation était effectuée par la Chambre des Agents de Change pour les valeurs cotées à
terme, le jour de la liquidation.
Enfin, l’hypothèse d’une faillite d’un établissement affilié à Sicovam fut expressément prévue
par le décret de 1949 : « En cas de faillite ou de liquidation judiciaire d’un établissement, la
revendication des propriétaires d’actions déposées dans cet établissement s’exercera
conformément à l’article 574 du code de commerce sur la masse des actions de même nature
existant dans l’établissement ou versées à son compte courant. Si cette masse est insuffisante
173
pour assurer l’intégralité des restitutions dues, elle sera partagée entre les propriétaires dans la
proportion de leurs droits » 344.
Ce système de dépôt facultatif proposé par Sicovam, a permis certes de simplifier certaines
procédures, mais n’est cependant pas exempt de défauts. La coexistence d’actions au porteur
et de titres en comptes courants, impliquait encore la confection matérielle des titres, faisait
perdurer les opérations de dépôt et retrait de titres vifs, voire nécessitait l’impression de
coupures multiples. En outre, ce système dual ne permettait pas l’application d’une nature
juridique unique des titres. En effet, seul un dépôt unique et obligatoire peut engendrer une
substitution du compte aux titres papier et donc une création de valeurs scripturales.
Mais, si les intermédiaires, au fil des années, ne s’opposaient plus à la généralisation du
compte courant, les porteurs de titres restaient traditionnellement attachés à une détention
matérielle.
Il aura fallu près de quarante ans pour faire évoluer ces mentalités en vue de généraliser les
comptes courants de titres, et procéder à la dématérialisation totale des valeurs mobilières.
Pourtant, même si cette démarche fut lente en France, la place financière de Paris est la
première au monde à avoir dématérialisé l’ensemble de ses titres et, de facto, elle est un
exemple pour la sécurisation des opérations post-bourse, dont s’inspireront ensuite les autres
bourses (l’Espagne et la Suède sont, à ce jour, les seuls pays à avoir dématérialisé la totalité
de leurs titres, à l’instar de la France).
2. La volonté d’évolution des structures boursières et postboursières : la Commission Pérouse 345
En juillet 1979, le Ministre de l’Economie ordonnait la constitution d’un groupe de travail
relatif à la modernisation des méthodes de cotation, d’échange et de conservation des valeurs
mobilières en France. Ce groupe, présidé par M. Pérouse, a donné lieu à la rédaction d’un
rapport dont les idées ont servi à l’édification de la place financière de Paris telle que nous la
connaissons actuellement.
344
Article 12, alinéa 1 du décret du 4 août 1949
174
Les grandes orientations de la réforme boursière furent la modernisation du régime des titres,
la mise au point d’un marché continu et l’adaptation de la tarification des ordres de bourse.
Il s’est avéré que des études de coûts avaient été menées auprès des grands établissements
bancaires et démontraient des coûts exorbitants de traitement des opérations post-boursières.
Ainsi en est-il ressorti que les coûts moyens réels directs étaient approximativement de :
-
100 F par bordereau pour le paiement d’un coupon,
-
100 F par bulletin pour la souscription d’un emprunt,
-
200 F par bulletin pour une augmentation de capital.
Ces coûts étaient d’autant plus importants qu’ils existaient quel que soit le montant de
l’opération traitée et s’expliquaient par les différentes phases résultant d’un ordre de bourse :
démarchage, réception de l’ordre (avec vérification de l’état du compte du client),
acheminement de l’ordre vers la bourse, contrôle de l’exécution, acheminement de la réponse
vers le guichet, mouvements sur le compte espèces du client, envoi d’un avis d’opéré au
client, règlement de fonds et livraison des titres entre intermédiaires, gestion des suspens de
titres, entrée des titres en conservation, dépôt en Sicovam ou remise au client.
Or, le temps consacré par les utilisateurs d’un marché à effectuer leurs transactions est aussi
un élément important du coût de fonctionnement de ce marché. L’efficience d’un marché peut
être impactée par la variable temps, mesurant la durée de passation d’un ordre. L’objectif d’un
marché n’est pas seulement de permettre la réalisation des transactions, il est aussi de faire en
sorte que ces transactions se déroulent au moindre coût 346, et dans des délais rapides.
En matière de compensation de titres entre intermédiaires, la non – fongibilité générale des
titres et la non – intégration des traitements informatiques de conservation aux circuits de
routage des ordres imposaient aux intermédiaires de gérer trois systèmes de livraison des titres
(en plus des systèmes ou procédure du marché à terme 347 de l’époque) :
345
Pérouse M., La modernisation des méthodes de cotation, d’échange et de conservation du marché des valeurs
mobilières, Rapport de Commission 1979
346
Carlton W. D., Perloff M.J., Economie industrielle, De Boeck Université 1998
347
« Le 24 octobre 1983 est décidée l’unification des modes de négociation avec la création d’un marché à terme
unique à règlement mensuel, accompagné de l’unification des cotations qui se substitue au double cours d’un
même titre, au comptant et à terme ». Lehmann P.J., Histoire de la Bourse de Paris, PUF Que sais-je 1997
175
-
un système à périodicité bimensuelle réservé aux valeurs admises en Sicovam et
totalement fongibles, utilisé par les agents de change et les sept plus grands établissements
de crédit 348,
-
un système à périodicité hebdomadaire pour les actions non admises en Sicovam et les
obligations à séries, utilisé exclusivement par les agents de change,
-
un système sans compensation pour la plupart des obligations, utilisé par l’ensemble des
intermédiaires financiers.
En conséquence, les premières recommandations de la Commission furent la simplification du
régime des titres, conduisant à une innovation majeure et unique à l’époque sur l’ensemble
des places financières du monde : la dématérialisation des titres.
La Commission a d’ailleurs argumenté cette réforme en précisant qu’elle était identique « à
celle suivie par la monnaie au cours des siècles, puisque, après avoir été métallique, puis
fiduciaire, elle s’est scripturalisée, avant d’aller jusqu’à revêtir l’aspect de simples signaux
informatiques grâce à l’existence des cartes à mémoire ».
Aux fins de la dématérialisation, les modes de détention des titres ont été unifiés par la
généralisation de l’inscription des valeurs mobilières en comptes Sicovam. Les comptes titres
pouvaient être ouverts, au choix du détenteur, auprès de l’émetteur ou son mandataire, ou
auprès d’un intermédiaire financier assurant alors l’anonymat vis-à-vis de l’émetteur.
Cette réforme devait permettre d’éviter « d’avoir à vérifier l’état des titres et des coupons, leur
bonne jouissance, à procéder à des contrôles de numéros, à des comptages, au remplissage de
bordereaux multiples … … amenant des avantages majeurs, dont la réduction des coûts de
gestion administrative pour les intermédiaires (estimés entre 40 et 45%) ».
Elle devait également accroître la fluidité du marché en réduisant les délais des opérations sur
titres telles les augmentations de capital ou les offres publiques.
Globalement, la dématérialisation des titres était favorable à tous les agents économiques :
-
Les détenteurs devaient être désormais à l’abri des pertes et vols, sans que leur anonymat
ne soit remis en cause ; leur gestion de portefeuille pouvait être optimisée par l’absence de
retard en matière de paiement des coupons ; leur droit de garde devaient être réduits.
348
BNP, Crédit Lyonnais, Société Générale, Crédit Agricole, Caisse des Dépôts et Consignations, Paribas,
Indosuez .
176
-
Les émetteurs n’étaient plus contraints de faire imprimer leurs titres et pouvaient contacter
plus facilement leurs actionnaires par le biais des gestionnaires de comptes titres ; ils
réduisaient enfin leurs charges en matière de tarifs appliqués pour leur service financier ;
-
Les intermédiaires réduisaient leurs coûts de gestion de leur chaîne titres
349
, rationalisée
par la dématérialisation.
Consciente de ces avantages, la place financière de Paris décida de dématérialiser ses titres en
1983. Elle a d’ailleurs donné à la France une réelle avance technique en matière de livraison
de titres aux yeux des investisseurs internationaux qui attendent des cotations rapides, un
marché continu, des dates d’exécution proches et des délais de livraison rapides 350.
3. La dématérialisation des titres : vers la rationalisation des
procédures de back-office
La dématérialisation des titres, votée le 3 novembre 1983 et entrée en vigueur un an plus tard,
consista en une généralisation des comptes courants de titres. Aussi les titres ont-ils perdu leur
existence physique et leur preuve de détention ne résulte plus que d’une inscription en
compte.
Sicovam est, par conséquent, devenu le gestionnaire des comptes titres de la Place financière
de Paris, pour les établissements teneurs de compte, et garante de l’étanchéité du système de
détention et de circulation des valeurs mobilières.
Une question nous semble néanmoins opportune à poser : y-a-t-il une différence entre la
dématérialisation des titres qui prévaut depuis 1984 et le principe du dépôt volontaire des
titres (hormis le fait que la dématérialisation induise un dépôt généralisé et obligatoire). Car,
dans l’histoire des titres en France, les dépôts obligatoires et facultatifs se sont succédés.
349
Une chaîne titre représente, encore en 1999, 200 millions de francs, en considérant la fourchette basse.
André L., « Il faut un dépositaire central européen » , Banque Stratégie, septembre 1999
350
Fourçans A., Hubert V., Pene D., Paris : La grande place financière internationale de demain ?, La Revue
Banque n°472, mai 1987
177
En fait, aucune restitution ne s’inscrit à la suite du dépôt obligatoire et la dématérialisation
signifie interdiction pure et simple de matérialiser d’une certaine façon les valeurs mobilières.
Dans le cadre du dépôt volontaire, le déposant peut récupérer ses titres, même si le contrat
revêt un aspect collectif au travers de la fongibilité. Aussi la dématérialisation, interdisant la
forme individuelle et papier du titre au porteur, a-t-elle instauré un nouvel instrument de
preuve reposant d’une part sur les inscriptions de l’émetteur ou de l’intermédiaire habilité et,
d’autre part, sur les inscriptions Sicovam 351.
Les teneurs de comptes sont:
-
Les intermédiaires habilités, par le Trésor et Sicovam, à tenir des comptes titres ; dès leur
habilitation, ils deviennent affiliés Sicovam. Au cas où l’intermédiaire estime le cahier des
charges de Sicovam trop lourd à gérer, il a la possibilité d’obtenir le statut de sous-affilié ;
si tel est le cas, il sous-traite sa comptabilité Sicovam à un affilié de plein exercice.
-
Les émetteurs habilités de droit, depuis la dématérialisation, à gérer les titres provenant de
leurs propres émissions, et ce pour les titres inscrits sous la forme “nominatifs purs”
352
.
Le plus souvent, les entreprises industrielles et commerciales ont donné mandat à un
établissement bancaire pour la gestion de leur comptes titres (la banque obtient alors le
statut de “service titre” dudit émetteur).
Sicovam admet à ses opérations les valeurs mobilières inscrites aux Premier, Second et
Nouveau marchés, les Sicav, les parts de fonds communs de créances et toutes autres valeurs
sur décision de son conseil d’administration.
Notons également que depuis l’unification des procédures de règlement-livraison sur les
marchés financier et monétaire, Sicovam admet également les titres de créances négociables
353
.
Les principes comptables reposent sur une comptabilité en partie double, valeur par valeur, et
sur la notion de droit constaté : “Dès qu’un droit est né et certain, au nom d’un client, il doit
être inscrit à son compte sans qu’il soit nécessaire d’attendre l’exécution des opérations
auxquelles la constatation de ce droit peut donner lieu”.
351
Causse H., Les titres négociables, Litec 1993
en opposition aux titres nominatifs administrés dont la comptabilisation en Sicovam est effectuée au nom
d’un intermédiaire habilité.
353
Auparavant les titres de créances négociables étaient gérés en Banque de France, et compensés via
SATURNE – Système automatisé de traitement unifié des règlements de créances négociables.
352
178
Ces principes se devaient d’être édictés pour une totale étanchéité du régime de détention des
titres ; dans le cas contraire, un excédent de titres en circulation par rapport au total des titres
inscrits au capital de l’émetteur conduit à une inflation de titres ; l’inverse est synonyme de
titres en déshérence.
A cette fin, Sicovam, lors de toute introduction en bourse ou d’émission de titres nouveaux
(augmentation de capital, lancement d’emprunt obligataire…) ouvre, sur instruction de
l’émetteur, un compte émission structurellement débiteur. Les contreparties de ce compte sont
les crédits des affiliés représentant leurs avoirs pour le compte de leur clientèle ou pour leur
compte propre.
Pour chaque opération enregistrée, l’équation [Total du compte émission = Somme des avoirs
des affiliés] est systématiquement vérifiée.
Le système de détention des titres sur une place ayant dématérialisé ses valeurs mobilières se
présente comme précisé dans le schéma 1.
Schéma 1 : Vue générale des comptes titres dans un système dématérialisé
Compte émission
Comptabilité
Dépositaire
Comptabilité
Intermédiaire
Client
1
Affilié
Affilié
Affilié
Affilié
A
B
C
Z
Client
x
Client
1
Client
x
Client
1
Client
x
Client
1
Après chaque négociation boursière, les flux de titres et d’espèces sont tels qu’exposés dans le
schéma 2.
Schéma 2 : Flux après négociation
Banque
vendeur
Négociateur
vendeur
Flux titres
Flux espèces
Négociateur
acheteur
Banque
acheteur
Client
x
179
Pour une négociation, les intermédiaires devaient envoyer chez Sicovam trois virements de
titres ; les mouvements entre sociétés de bourse faisaient cependant l’objet d’une
compensation auprès de l’autorité de tutelle. En contrepartie de ces mouvements de titres, les
espèces empruntaient le chemin inverse auprès de la Banque de France.
Plus précisément,
-
le vendeur émettait un ordre de virement à destination de Sicovam et un duplicata à
destination de l’acheteur, le plus souvent sur support papier,
-
l’acheteur, à réception dudit duplicata, émettait alors un virement Banque de France
envoyé au vendeur,
-
chaque contrepartie suivait ensuite leurs positions titres en Sicovam et espèces en Banque
de France.
Néanmoins, il n’existait aucune règle de place quant aux délais à respecter par les deux
contreparties, quant à une éventuelle simultanéité des mouvements espèces et titres, ou quant
aux procédures à respecter. Avant la mise en place de Relit, on a dénombré jusqu’à 23 filières
de transferts de titres et d’espèces différentes.
Enfin, un compte-titre ne pouvant, en aucun cas, présenter un solde débiteur, un contrôle de
provision en titres devait être effectué. Avant l’informatisation des procédures de règlementlivraison de titres, ledit contrôle de provision était réalisé a posteriori, c’est-à-dire, après
comptabilisation des mouvements de titres. Si un compte s’avérait débiteur, Sicovam
procédait à des écritures rectificatives, contrepassant l’écriture qui avait rendu tel ou tel solde
débiteur. Mais la contrepassation de certaines écritures pouvait entraîner un nouveau solde
débiteur pour lequel il fallait contrepasser une autre écriture et ainsi de suite … Le contrôle
des provisions de titres après enregistrement pouvait donc générer des comptes débiteurs en
chaîne, et ipso facto, augmentait le délai de traitement des opérations post-boursières.
Face à ces imperfections et des surcoûts entrainés par ces traitements, les pratiques postboursières ont été informatisées totalement.
180
4. Le projet Relit
Relit – Règlement Livraison de Titres fut le premier système informatique de place de gestion
des procédures post-boursières démarré en 1990 en Bourse de Paris. Il consacrait la
modernisation de la Bourse amorcée en 1986 et avait pour objectifs l’amélioration de la
sécurité du marché boursier et de la trésorerie des intervenants, et la réduction des coûts
induits par les procédures de back-office. Il reposait sur l’industrialisation des processus et
l’adéquation de la place aux normes internationales 354.
Force est de constater que pour mieux s’adapter en permanence à la concurrence, tout système
utilisé sur un marché donné doit être prêt à évoluer sans cesse pour tenter de mieux répondre
aux besoins nouveaux des participants et profiter des changements incessants des technologies
disponibles
355
. Il est admis que la place financière de Paris a répondu aux exigences de ses
intermédiaires.
4.1
L’industrialisation et les normes internationales
La banque, et plus particulièrement l’activité titres, sont entrées progressivement dans une
phase d’industrialisation, à l’instar des autres activités de service. En effet, l’utilisation des
nouvelles technologie et la création de systèmes de production nouveaux ont permis aux
banques de délivrer des services en s’appuyant sur des concepts industriels grâce à la
standardisation desdits services 356.
Dans les années quatre-vingts, près de 30.000 avis d’opéré sont traités quotidiennement en
Bourse de Paris, donnant lieu à 100.000 mouvements dénoués selon la même fréquence. La
place financière de Paris est passée de l’artisanat à l’industrie lourde où l’implantation d’une
chaîne de traitement de titres représentait, dans les années quatre-vingts un investissement de
plusieurs centaines de millions de francs. Les transactions se nouent et se dénouent en J+3, et
réclament, de facto, une synchronisation rigoureuse entre compensation, livraison et
354
Dubroeucq P.F., Lanciaux D., La réforme des procédures et de livraison de titres, Revue Banque Septembre
1987
355
Gillet R., Minguet A., Microstructure et rénovation des marchés financiers en Europe, PUF 1995
356
Levitt T., Production-line approach to service, Harvard Business Review, septembre octobre 1972
Levitt T., The industrialization of services, Harvard Business Review, septembre octobre 1976
181
règlement des titres et de l’argent
357
. En conséquence, les flux des intervenants doivent être
régulés correctement. A défaut, quid des ordres négociés en bourse et non dénoués ? Les
mouvements tombent en suspens.
Aussi, en 1987 et 1988, les difficultés rencontrées par les négociateurs exclusifs de l’époque,
les sociétés de bourse, ont fait éclaté la crise des suspens. Celle-ci est née de l’explosion sans
précedent des volumes négociés en bourse : en dix années, entre 1976 et 1986, le montant
annuel des transactions en bourse de Paris a été multiplié par 39, passant de 54 milliards à
2000 milliards de francs, et parallèlement la capitalisation boursière a été multipliée par 8,
passant de 400 milliards de francs à 3200 milliards de francs.
On dénombrait alors 600.000 opérations en suspens de dénouement, comparées au volume de
100.000 transactions quotidiennes
358
, et il fallait pas moins de 13 jours pour dénouer une
opération. En conséquence, les autorités de tutelle boursières et comptables ont requis de la
part des intermédiaires l’apurement et la régularisation de ces suspens.
Par ailleurs, depuis une trentaine d’années, diverses instances internationales réfléchissent à
des améliorations des systèmes de règlement – livraison, notamment en matière de
transactions internationales. Il s’agit d’accroître l’efficience des systèmes et de limiter les
risques. Des systèmes de règlement-livraison de titres disparates et de qualités inégales pour
leurs participants accroissent les coûts et les risques pour les investisseurs.
A cette fin, un groupe informel, constitué au sein de la FIBV (Fédération Internationale des
Bourses de valeurs), le Groupe des Trente, a publié un rapport en 1989. Celui-ci a conclu que
la mise en place d’un organisme mondial de clearing était difficile mais que des standards
étaient indispensables. Aussi le Groupe a-t-il formulé neuf recommandations prises en compte
sur la plupart des places financières internationales, même si certaines bourses ne satisfont
pas, encore aujourd’hui, à toutes les recommandations.
-
recommandation n°1 : « Tous les appariements de transactions entre participants directs
du marché doivent être effectués en J + 1 »
357
Deschanel J.P., Gizard B., A la découverte de la Bourse – manuel d’économie boursière, Collection Major,
PUF 1999
358
Serre A., Réforme des back-offices : le projet Règlement - Livraison, Revue Banque n°487, octobre 1988
182
-
recommandation n°2 : « Les participants indirects du marché doivent être affiliés à un
système d’appariement des transactions, qui assure la confirmation des détails de
l’opération »
-
recommandation n°3 : « Chaque pays doit disposer d’un organisme central de dépôt de
valeurs mobilières organisé et géré de manière à favoriser l’affiliation la plus large
possible des membres de l’industrie des valeurs mobilières »
-
recommandation n°4 : « Chaque pays doit, moyennant une analyse des volumes et des
participants des marchés, déterminer si un système de compensation et de règlement par
soldes est susceptible de réduire les risques et d’accroître l’efficacité. Si tel est le cas, ce
système doit être rapidement implémenté »
-
recommandation n°5 : « La livraison contre paiement doit être la méthode utilisée pour le
règlement de toutes les transactions sur valeurs mobilières »
-
recommandation n°6 : « Les paiements découlant du règlement des transactions et du
service financier des titres doivent être informatisés pour tous les instruments et pour tous
les marchés par l’adoption de la clause – valeur même jour (same day found) »
-
recommandation n°7 : « Un système de règlement continu (rolling settlement) doit être
adopté par tous les marchés. Le dénouement doit intervenir en J+3 »
-
recommandation n°8 : « Le prêt et l’emprunt de titres doivent être encouragés comme un
moyen d’accélérer le règlement – livraison des transactions »
-
recommandation n°9 : « Chaque pays doit adopter, pour les messages se rapportant aux
valeurs mobilières, la norme élaborée par l’Organisation internationale de normalisation
(ISO) ».
Depuis lors, d’autres groupes de réflexion internationaux se sont penchés sur l’optimisation
des procédures de règlement-livraison. Plutôt que de les présenter un à un, nous avons opté
pour un tableau synthétique 359, présentant les rapports édictés par ces groupes (tableau 1).
359
Karyotis C., Fonctionnement du post-marché des titres en Europe : comment organiser une « zone
domestique » pour le rendre efficace – Panorama général, Conférence AFTI, Paris 27 juin 2003
183
Tableau 1 : Etat des travaux de réflexion des instances professionelles
Année
Organisations
professionnelles
1989
Recommandat° du
Groupe des 30
1990
Autorités de
contrôle
Autorités
bancaires
IOSCO, Rapport
du comité
technique
BRI, rapports
Angell et
Lamfalussy
1991
1992
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Autorités
politiques
OCDE, Risques
systémiques sur les
marchés de titres
ISSA, Rapport sur
les risques globaux
de conservation
BRI, LCP dans les
systèmes
de
règlementlivraison de titres
ISSA,
BRI, Cadre
Recommandat°
réglementaire pour
systèmes de
règlementlivraison
BRI, Systèmes de
paiement de gros
montants
ECSDA, Rapport IOSCO,
Institut monétaire
du
groupe de Régulations
des européen,
travail n°4
titres
Standards
+ BCE, Agrément
des systèmes de
règlementlivraison
IOSCO, Pratiques BRI,
Principes
de clearing et généraux
pour
règlement
systèmes
de
paiement
ISSA,
Recommandat°
ISSA, Rapport sur IOSCO – BIS, Recommandations pour
les risques globaux systèmes de règlement-livraison
de conservation
ECSDA,
BCE, Consultation
Dénouement
transfrontalier
ECSDA, Clearing
européen
Recommandation
du Groupe des 30
II
Rapport
Giovannini I
Rapport Andria
Rapport
Giovannini II
184
Afin de rationaliser les procédures post-boursières et d’être conformes aux exigences
internationales, la Place de Paris a décidé de lancer, en 1986, une réforme des systèmes de
règlement-livraison de titres, avec deux objectifs principaux : fiabiliser les procédures et aux
maîtriser les coûts.
En Bourse de Paris, l’évolution du métier des titres a connu trois phases principales
l’instar du développement de l’informatique
-
361
360
,à
:
la dématérialisation (années quatre-vingts) : point de départ de la modernisation et de
l’informatisation des activités “titres” ;
-
l’informatisation (1990-1995) : mise en place des systèmes Relit et Saturne dotant le
marché français d’une structure automatisée de dénouement des transactions sur actions et
sur produits de taux ;
Cette phase a conduit à une amélioration notable de la productivité, permettant de traiter
des volumes de plus en plus importants, dans un environnement où les risques
opérationnels sont maîtrisés, et à des coûts unitaires de plus en plus faibles ;
-
la sécurisation (fin des années quatre-vingt-dix) : apparition des systèmes de règlementlivraison sécurisés tels RGV pour les titres, TBF et PNS 362 pour les espèces qui apportent
le temps réel, l’irrévocabilité des dénouements et la mise à disposition de monnaie
360
Tessier J., La nouvelle conservation : un métier générateur de valeur ajoutée, Banque Stratégie, septembre
1999
361
Selon Garsuault P. et Priami S., La banque : Fonctionnement et stratégie, Economica 1995,
« le développement de l’informatique a connu trois grandes périodes : la phase de démarrage (mécanographie,
saisie), celle d’industrialisation (implantation de systèmes de plus en plus lourds, développement de chaîne),
celle de recherche de productivité (rationalisation), et une quatrième phase (dans les années quatre-vingt-dix) :
décentralisation et recherche de valeur ajoutée ;
362
TBF – Transfert Banque de France est le système de gros montant à règlement brut en temps réel de la place
de Paris, lancé en octobre 1997 et fonctionnant exclusivement en monnaie centrale. Son mécanisme repose sur
les comptes courants de règlement (CCR), tenus en Banque de France au nom des établissements et imputés au
fil de l’eau. Ses participants peuvent en outre émettre et recevoir des VGM – Virement Gros Montant, à
destination des autres systèmes de place (RGV – RELIT Grande Vitesse, système de règlement-livraison de
titres ou PNS) et des autres RTGS européens via Target. Il propose enfin un « balayage » des files d’attente
(permettant de vérifier l’imputation d’une opération de crédit au profit d’un groupe de comptes si les opérations
en attente au débit ne peuvent pas être imputées, optimisant ainsi l’imputation générale des mouvements), et
offre des simulations relatives aux imputations des systèmes exogènes362.
PNS - Paris Net Settlement est un système hybride offrant un règlement net irrévocable en temps réel et en
monnaie centrale.
PNS et TBF fonctionnent avec des normes de message identiques
afin de permettre aux banques de choisir
l’un ou l’autre des systèmes, en fonction de leur besoin d’irrévocabilité immédiate et de leurs limites dans PNS
ou de leur liquidité dans TBF.
Karyotis C., Les systèmes de paiement, Revue de l’AFTE octobre 2001
185
centrale aux participants en supprimant quasiment l’intégralité du risque de contrepartie
sur les opérations de règlement-livraison entre participants.
Notons que ces phases sont celles d’une industrialisation des services 363.
Or les banques utilisent depuis une trentaine d’années la technologie pour le traitement des
opérations de masse et l’offre de services à la clientèle ; la banque et la finance se sont donc
progressivement transformées en une industrie du traitement de l’information, et leurs
“réseaux de transport” sont le support de l’interbancarité 364.
Enfin, chez les intermédiaires financiers, il est également possible de parler d’industrialisation
de l’activité titres ; la conservation s’assimile, en effet, à l’industrie lourde, en ce sens que
plus les volumes augmentent, plus le coût unitaire baisse. Citons l’exemple du Crédit
Agricole, qui gèrent plus de 10 000 ordres de bourse par jour et qui pourrait, sans investir
davantage, en traiter dix fois plus 365.
La notion de processus industriel repose, en effet, sur le fait que les facteurs de production
hommes – machines soient combinés de telle manière qu’il soit possible de traiter, par des
techniques répétitives, des quantités importantes de matière. Dans la banque, cette matière
comprend des données, des instructions de clientèle ou des stocks de positions comptables
espèces ou titres 366.
363
Gadrey (Gadrey J., L’économie des services, La Découverte 1992) reprend l’exemple de la banque pour
illustrer l’industrialisation des services.
Il recense quatre phases de transformation:
• Un service traditionnel préindustriel (années 50) : le service est traditionnel, fondé sur des relations
personnalisées et sur des supports techniques rudimentaires.
• Une Quasi – industrialisation « produits – services » de masse (années 60 et 70), accompagnée d’économies
d’échelles, avec un accent sur la productivité mais une clientèle passive et peu segmentée et des systèmes
techniques encore lourds et centralisés.
• Une conception des produits en relation avec la fonction commerciale et le marketing (années 80) : des
économies d’échelle mais également de variété deviennent possibles ; la clientèle est désormais ciblée et
segmentée (il ne suffit plus de concevoir et de proposer des produits et des services, il faut les vendre et aller
à la rencontre de la clientèle dans un environnement devenant plus concurrentiel ; la fonction commerciale
s’introduit en force au niveau des agences, l’organisation se décentralise, contribuant à faire monter les
exigences de service.
• Une recherche prioritaire de services à forte valeur ajoutée (années 90) : les clients deviennent de plus en
plus exigeants et actifs, les banques doivent vendre des résultats, conseiller, trouver des solutions, réduire
l’incertitude. La partie simple du service doit être automatisée: au-delà de l’acte de vente simples, des
solutions plus complexes, individualisées, appuyées sur une gamme très étendue de produits, doivent être
proposées. On passe de la standardisation des prestations à la définition de méthodes de résolution de
problèmes et le self-service se développe pour certaines fonctions simples ou moins interactives.
364
Sitruk H., L’impact des réseaux sur les banques et l’économie bancaire, Revue d’Economie Financière n°32
1995
365
Duchène J., Conservateurs de titres : la révolution, Le guide des métiers de la banque, Banque Editeur 1998
366
Lencquesaing (de) E., Pour une industrialisation des traitements administratifs, Banque Magazine n°547, avril
1994
186
Aujourd’hui, la bourse se révèle être une industrie d’échelle et de concentration, gouvernée
par des logiques de « point mort » et de taille critique. C’est un phénomène identique à celui
de la grande distribution : être plus gros pour proposer le plus grand nombre de produits, au
meilleur prix et faire venir le plus grand nombre de clients. Par ailleurs, la maîtrise de la
technologie est devenue un enjeu majeur de la compétition qui permet de différencier et
d’établir le prix de revient des services – clés
367
. Le modèle requis pour une bourse est
désormais le modèle de marché automatisé et gouverné par les ordres. La technologie est donc
un levier indispensable, et cela se matérialise par les investissements réalisés sur les platesformes de collecte des ordres et de cotations ainsi que sur les systèmes de règlement-livraison
et de garantie 368.
Le principal facteur de compétitivité
369
d’une place dépend essentiellement de deux
paramètres : les économies d’échelle et les externalités. Celles-ci sont fonction, pour une large
part, du nombre, de la diversité et de la taille des participants, et des opérations, ce qui, par
des effets de synergie, d’expérience et de proximité, renforce la position de place. De là
dépend un accès plus aisé et plus rapide aux informations grâce aux contacts qui permettent
de résoudre les problèmes d’asymétrie d’informations, de dénouer des conflits et d’introduire
un potentiel plus grand de confiance. Le traitement de l’information lui-même représente des
coûts fixes suffisamment importants qui ne peuvent être rentabilisés que sur un marché très
large. De là dépend aussi un recours plus facile aux fonds d’expertise et pôles de compétence
qui attirent à leur tour la main d’œuvre qualifiée. De là dépend enfin une gamme de produits
et services offerts plus large et une propension à l’innovation plus forte. La liquidité des
marchés est significative de ces rendements d’échelle croissants. Si une place traite de gros
volumes de titres, cela attire de nouveaux émetteurs, ce qui fait progresser à nouveau la
liquidité. En définitive, la place bénéficie de “gains croissants” de réputation qui attirent à
nouveau l’activité.
367
Collecte des ordres, constitution de la liquidité, établissement du prix, diffusion d’informations, exécutions
des transactions et garantie de bonne fin.
368
Ruimy M., La bourse en France, Cahiers Français n°301 : Bourse et marchés financiers, juin 2001
369
Arvisenet (d’) Ph., Petit J.P , Echanges et finance internationale, Banque Editeur 1997
187
4.2 La mise en place du système RELIT
Deux principes de base ont fondé le système RELIT : la simultanéité des réglementslivraisons et l’application d’un délai standard.
Le dénouement des transactions d’achat et de vente entre intervenants devait, désormais, se
réaliser par la livraison de titres contre le paiement des espèces à une même date de valeur, et
ce, selon un délai normalisé applicable à tous. Ledit délai a été fixé au départ à 5 jours puis à
3 jours au début de 1992. Dès lors, la France respectait la norme internationale de J+3
370
,J
371
et
étant le jour de la négociation boursière, J+3 étant le jour du dénouement.
L’architecture de Relit reposait sur quatre systèmes informatiques : ISB, SBI, SLAB
Dénouement, procédant aux trois fonctions principales du règlement-livraison : l’ajustement,
la préparation (compensation) et le dénouement des transactions.
ISB (Inter - Sociétés de bourse) traitant les opérations réalisées entre sociétés de bourse, SBI
(Société de Bourse – Intermédiaires) enregistrant les ajustements réalisés par les
intermédiaires à réception des avis d’opéré émanant des sociétés de bourse, ces systèmes
préparent le dénouement des transactions. SLAB (Système de Livraison par Accord Bilatéral)
apparie et enregistre les opérations hors bourse ; Dénouement effectue simultanément
l’échange des titres contre espèces, et gère les mouvements consécutifs aux opérations sur
titres
370
372
.
A l’époque où Relit a été conçu, le marché à Règlement Mensuel existait à Paris : le délai sur ce marché était
alors de L+5, L étant le jour de la liquidation boursière.
371
En 1990, le système SLAB s’intitulait « Gré à Gré ».
372
Une opération sur titre est un événement, voulu par l’émetteur ou le législateur, modifiant au minimum une
caractéristique d’une valeur mobilière. Il existe des OST administratives (sans impact comptable) et des OST
comptables (automatique ou non). A titre d’exemple, une réduction de la valeur nominale (split) est une OST
administrative, un détachement de droit d’attribution sans rompus (1 action nouvelle pour 1 ancienne) est une
OST comptable automatique tandis qu’un échange avec rompus est une OST comptable non automatique
(requérant l’intervention du détenteur de titres).
188
Le système Relit est présenté dans ce schéma 3.
Schéma 3 : Architecture du système Relit
CAC
Banque
Négociation
Ajustement
SLAB
SBI
Société
de
Bourse
ISB
Compensation
Livraison
DENOUEMENT
Paiement
Réseau SIT/Bourse
Les banques et les sociétés de bourse dialoguent avec les systèmes centraux SBI, SLAB et
Dénouement grâce au réseau SIT/Bourse
373
qui leur permet d’émettre ou de recevoir les
messages de règlement/livraison. Pour le système ISB, les sociétés de bourse ont recours à un
réseau spécialisé. L’ensemble des opérations à dénouer selon les procédures édictées par Relit
proviennent des systèmes SLAB, SBI, ISB, et sont prises en charge par le système
Dénouement 374.
Le système Relit s’articule donc autour de quatre fonctions :
-
l’ajustement qui permet d’établir un accord définitif entre l’acheteur et le vendeur sur les
termes de leurs transactions. Cette fonction permet de pouvoir procéder à des
régularisations le cas échéant ;
-
la préparation qui permet de regrouper certains traitements intermédiaires pour, ensuite,
élaborer automatiquement les instructions de livraison et règlement, chaque acteur devant
alors évaluer ses disponibilités titres et espèces dont il aura besoin en cours de journée ;
373
374
SIT : Système Interbancaire de Télécompensation
Lanciaux D. (sous la direction de), Relit : Expérience d’un projet de Place, Paris 1992
189
-
le dénouement qui permet, en premier lieu, l’échange de titres contre espèces et, en second
lieu, d’identifier les défaillances potentielles ainsi que leurs coûts et impacts. Ladite
fonction repose sur l’optimisation du nombre de transactions à dénouer ;
-
le prêt-emprunt de titres qui propose des moyens pour maximiser le nombre de
règlements-livraisons possibles en prêtant des titres aux intervenants qui n’en
disposeraient pas suffisamment au moment du dénouement.
Les deux premières fonctions sont remplies par les systèmes SBI, ISB et SLAB selon
l’origine des mouvements à dénouer.
Plus précisément, les systèmes ISB, SBI, Slab et Dénouement offrent les prestations
suivantes :
ISB – Inter Sociétés de Bourses 375
Son objectif est d’ajuster les transactions entre les négociateurs qui disposent alors d’une
information prévisionnelle sur leurs soldes de titres à livrer ou à recevoir.
En amont de ce système, les informations proviennent du système de cotation CAC (devenu
NSC) pour lesquelles l’ajustement est opéré par ledit système, mais également des systèmes
de saisies internes aux sociétés de bourse, à l’époque où certaines d’entre elles n’étaient pas
reliées au CAC via le système COCA (Connexion au CAC).
ISB contrôle la cohérence et la validité des informations transmises par le vendeur et avertit
les négociateurs sur l’ensemble des négociations validées. L’appariement doit être réalisé en
J+1 maximum.
Une fonction de compensation est également assurée par le système ISB via une garantie de
livraison des titres pour l’acheteur et permet l’appel au système de prêt-emprunt de titres si
nécessaire, évitant de facto l’effet domino des défauts de livraison.
Enfin, tout mouvement en cours de dénouement pouvant faire l’objet d’une opération sur
titres, le système ISB (à l’instar des autres systèmes de préparation), propose une
régularisation possible des mouvements via le module « OST sur flux ». Notons alors que le
droit de l’opération sur titres revient à l’acheteur dès la date de la négociation et non à la date
du dénouement.
SBI – Sociétés de bourse / Intermédiaires 376
375
376
Lanciaux D., Le système « inter – société de bourse, Revue Banque octobre 1988
Colin P., Le système entre « société de bourse et intermédiaires », Revue Banque octobre 1988
190
Ce système remplit les mêmes fonctions que le précédent.
En amont, l’intermédiaire financier envoie un ordre à sa société de bourse pour exécution sur
le marché et, en retour, reçoit un avis d’opéré de la part du négociateur spécifiant l’exécution
en valeur nette.
L’avis d’opéré est routé automatiquement vers l’intermédiaire donneur d’ordres et vers le
système SBI, et rapproché du carnet d’ordres de l’intermédiaire.
En cas d’accord, l’intermédiaire transmet alors celui-ci au titre d’une acceptation, alors
irréversible sur le plan technique, valant en conséquence instruction de livrer les titres contre
encaissement de la contre-valeur s’il s’agit d’une vente, ou de recevoir les titres contre
paiement s’il s’agit d’un achat.
En cas d’erreur, l’intermédiaire transmet un message de refus stipulant les motifs ; l’avis
d’opéré est alors annulé chez le négociateur qui en émettra un nouveau.
Si l’ordre n’est pas exécuté, l’intermédiaire peut émettre un message de réclamation si
l’exécution s’avère possible.
SLAB – Système de Livraison par Accord Bilatéral 377
Ce système traite les opérations hors bourse, à savoir, celles des marchés primaire et gris sur
obligations, les rémérés civils, les opérations externes sur Sicav (souscription et rachat), les
livraisons contre paiement confirmées
378
et les négociations hors bourse par choix des
intervenants.
Il offre, outre des prestations d’ajustement et de préparation identiques aux deux systèmes
précédents, la possibilité de dénouer les mouvements dans un délai plus rapide que le délai
réglementaire, au gré des intervenants (entre J et J+100).
Dans la pratique, deux intervenants s’accordent sur les termes d’une négociation (prix,
quantité, date de dénouement …) et les transmettent au système SLAB, qui, à son tour, les
transmettra au système Dénouement.
Dénouement 379
Ce système permet le dénouement, sur un cycle de 24 heures, des opérations de livraison
contre paiement transmises par les trois systèmes de préparation et d’ajustement, des francos
377
Debost C., Un système « gré à gré », Revue Banque octobre 1988
Une livraison franco confirmée est une livraison de titres avec un montant net espèces égal à 0, le dénouement
de la partie titres étant effectué le lendemain de la négociation, et les espèces réglées hors système de place le
jour même.
379
Piganeau D., Le système de dénouement, Revue Banque octobre 1988
378
191
confirmés transmis par le SLAB, des francos de couverture, des mouvements internationaux,
des écritures Sicovam (écritures rectificatives ou consécutives à des opérations sur titres) ou
complémentaires, des opérations de prêt-emprunt de titres …
Le dénouement est finalisé lors de l’imputation des comptes titres en Sicovam et des comptes
espèces en Banque de France ; son processus de traitement repose alors sur un chaining
380
.
les opérations sont classées par ordre de priorité puis des cycles d’imputation sont lancés
successivement, permettant de reprendre les opérations tombées en suspens pour les dénouer.
A 18 heures au plus tard, la journée comptable est close : les comptes titres ont fait l’objet
d’imputations consécutives aux transactions, les mouvements espèces étant ensuite transmis
en Banque de France pour imputation dans les comptes espèces des participants.
Outre le principe de la simultanéité des livraisons de titres et des règlements espèces, en un
délai normalisé et obligatoire (J+3), le système Relit a permis à ses participants de pouvoir
procéder à une gestion prévisionnelle en titres. Dès lors, il est devenu possible, pour un
établissement financier, de gérer ses titres tel qu’il le faisait pour les espèces depuis
longtemps, et donc de rentabiliser ses avoirs.
En effet, Relit contrôle les provisions titres a priori, évitant de facto les soldes débiteurs en
chaîne, et demande à ses participants de se couvrir le cas échéant sur un laps de temps donné.
A défaut de couverture, le système sanctionne le participant concerné, et le mouvement
rendant le solde débiteur tombe en suspens, pour être traité dans un chaining ultérieur, voire le
lendemain ou plus tard.
A l’issue des traitements des systèmes de préparation, ces derniers transmettent les soldes
prévisionnels en titres, valeur par valeur, les participants doivent alors, avant le démarrage de
la phase de dénouement, se couvrir en titres pour mener à bien le règlement-livraison de leurs
transactions. Cette couverture est effectuée par le biais de franco de couverture ou l’appel au
système de prêt-emprunt de titres.
Enfin, les communications entre le système Relit et les participants s’opèrent par le biais du
réseau SIT-Bourse, utilisant le réseau SIT.
380
Le chaining est un traitement répétitif d’imputation en temps différé ligne à ligne assuré par le système de
dénouement pour dénouer séquentiellement les opérations de la journée. Si le dénouement ne peut être effectué,
l’opération traitée est mise en suspens.
192
Le SIT – Système Interbancaire de Télécompensation
381
, créé en 1983, est un système
d’échange de moyens de paiement de petits montants entre établissements de crédit ; il repose
sur le principe d’échanges bilatéraux entre participants, traités en continu et compensés à
heures fixes. Les établissements de crédits traitent par le réseau SIT les virements, les avis de
prélèvement, les lettres de change, les titres interbancaires de paiement, les retraits d’espèces
aux distributeurs automatiques de billets, les paiements par cartes bancaires et les chèques.
SIT-Bourse, au départ exclusivement réservé au routage des ordres de bourse et de leurs
réponses, a été étendu, lors de la mise en place de Relit, aux avis d’opéré.
Les messages du système SBI font l’objet d’une transmission en « Y » : les avis d’opéré et les
accords et refus sont acheminés vers l’intermédiaire donneur d’ordres (avis d’opéré) ou la
société de bourse (accord ou refus) et, simultanément, vers le système central.
4.3 Les apports et défauts de Relit
Si Relit a permis à Paris d’adopter très tôt la plupart des recommandations du Groupe des
Trente, et s’il a conduis, dès sa mise en place, à réduire les suspens
382
, il n’en demeure pas
moins que ce système n’était pas exempt de critiques.
♦ Certaines recommandations du Groupe des Trente n’étaient pas respectées à Paris :
La recommandation n°2 requiert que les investisseurs institutionnels doivent être affiliés à un
système d’appariement des transactions ; ce n’était pas le cas à Paris avec Relit.
La recommandation n°6 requiert la clause « same day funds », règlement valeur jour, pour
tous les instruments et tous les marchés : jusqu’à la disparition du marché à Règlement
mensuel, cette recommandation n’était pas respectée.
La recommandation n°8 précise que les opérations de prêt-emprunt de titres doivent être
encouragées comme un moyen d’accélérer le règlement-livraison des transactions ; or s’il
381
Karyotis C., Les systèmes de paiement, Revue de l’AFTE octobre 2001
Le SIT est la première Chambre de compensation automatisée de masse au monde en terme de volumes
échangés. 11 milliards d’opérations ont été échangées et compensées par le SIT en 2002, soit 45 millions
d’opérations par jour.
382
Entre 1986 et 1991, le montant total des suspens est passé de 30 milliards FF à 1 milliard FF en Bourse de
Paris
193
existait un système de prêt - emprunt de titres automatique pour les valeurs du Trésor
383
,
Relit n’a pas permis d’en développer un performant pour l’ensemble des valeurs cotées.
♦ Le contrôle des provisions espèces dans Relit était compliqué :
Lorsque Relit a démarré en Bourse de Paris, il n’était absolument pas question que la Banque
de France délègue une quelconque gestion des comptes espèces des établissements financiers
au dépositaire central. Aussi les autorités de tutelle ont-elles dû mettre au point un système
permettant à Sicovam de surveiller les provisions espèces de ses affiliés : ce fut la PONA –
Position Nette Acheteuse Autorisée.
Ladite Pona était établie par la Banque de France, pour chaque teneur de compte, en fonction
de ses fonds propres et de ses activités titres. Son montant était communiqué à Sicovam
chaque journée comptable, et elle pouvait se reconstituer au fur et à mesure des crédits
espèces liés aux opérations de dénouement. Relit permettait donc de gérer les provisions titres
et espèces avant les règlements - livraisons, mais ne permettait pas à Sicovam d’offrir de
réelles prestations de clearing, les imputations dans les comptes espèces des institutions
financières étant toujours du ressort de la banque centrale.
Plus précisément, la gestion des espèces dans Relit a évolué dans le temps, de la manière
suivante :
1990 - 1992 : un dépôt de garantie était constitué en Banque de France la veille du
dénouement et un chaining unique contrôlait les espèces en fonction du dépôt ;
1992 - 1994 : les affiliés déclaraient le matin la somme qu’ils allouaient en Banque de
France au règlement de leurs achats, un chaining unique contrôlait les espèces en fonction
de ladite déclaration et un chaining supplémentaire était refait si un affilié n’avait pas la
somme prévue (moyennant une pénalité due par l’affilié) ;
383
En novembre 1987, Sicovam a proposé aux spécialistes en valeurs du Trésor un service de dénouement des
transactions sur OAT selon le principe de la livraison contre paiement, accompagné d’un système de prêt
emprunt de titres. Ce fut une première en France et même, un « mini-Relit », compte tenu des prestations
offertes.
Les principes de ce système se présentaient de la manière suivante :
• les SVT et Sicovam communiquaient au travers d’un réseau téléinformatique, accessible par microordinateur ;
• les SVT transmettaient leurs instructions à Sicovam et celle-ci leur retournait les informations relatives à la
comptabilisation en titres et en espèces ;
• un système de prêt-emprunt de titres permettait à un SVT d’obtenir un prêt sur demande ou un prêt
automatique, s’il tombe en défaut de provision.
Depuis la fin des années quatre-vingt-dix, le système SVT a disparu parce qu’il a été intégré dans le système
SLAB de Relit.
194
1994 - 1998 384 : Sicovam opérait à un multi-chaining et communiquait les résultats
espèces à ses affiliés tôt dans la journée, mais le contrôle global des espèces était réalisé
en fin de journée par la Banque de France. Si un établissement était débiteur en espèces,
Sicovam procédait à un nouveau chaining.
5. Relit Grande Vitesse – RGV
Face à ces critiques relatives au système Relit, les autorités de place ont désiré faire évoluer le
système de règlement - livraison de titres à Paris pour :
-
faire face à l’accroissement des volumes traités,
-
simplifier la gestion des titres pour les intermédiaires, en leur offrant un seul prestataire de
place (au lieu de deux auparavant, les valeurs mobilières étant gérées en Sicovam, les
titres de créances négociables l’étant en Banque de France 385),
-
sécuriser le (ou les) système(s),
-
proposer deux traitements différents selon qu’il s’agit d’opérations de bourse ou
d’opérations de gros montants.
5.1 Présentation
Le système de règlement-livraison RGV est opérationnel depuis le 9 février 1998, offrant les
caractéristiques du temps réel, de l’irrévocabilité instantanée des mouvements, de la
collatéralisation et du règlement espèces en monnaie banque centrale. Les systèmes RGV et
TBF (Transferts Banque de France) sont des systèmes de paiement de gros montant mis en
place avant l’euro, donnant à Paris des avantages incontestables sur ses concurrents. RGV fut
le premier système à avoir obtenu la certification sans réserve de la Banque Centrale
384
Cette gestion des espèces, telle que présentée, existe toujours dans le système Relit +.
Le système Saturne – Système Automatisé de Traitement Unifié des Règlements de Créances Négociables,
mis en place en 1988 par la Banque de France, a progressivement été abandonné dès 1995, pour disparaître
définitivement le 15 juillet 1998. Depuis lors, les titres de créances négociables sont compensés en Sicovam.
385
195
Européenne
386
: il offre l’irrévocabilité instantanée des dénouements en monnaie banque
centrale avec le principe du temps réel.
Depuis lors, le Conseil des gouverneurs de la BCE 387 a accrédité d’autres systèmes 388.
Les valeurs traitées dans RGV sont :
- les obligations assimilables du Trésor, les emprunts d’Etat (français et autres nationalités
européennes) 389 et les bons du Trésor,
- les obligations françaises,
- les titres de créances négociables,
- les émissions internationales,
- les fonds communs de créances.
Le système a donc d’abord été conçu pour les produits de taux, corroborant la notion de titres
de créances voulue par les autorités monétaires et boursières. En effet les titres de créances
négociables, sous leur forme globale de gestion, contiennent, désormais, non seulement les
titres du marché monétaire mais également les valeurs mobilières de type obligataire. En
conséquence, la confrontation des aspects juridiques et des aspects financiers permet de saisir
386
European Central Bank, The single monetary policy in stage three, Specification of the operational
framework, January 1997 ; European Central Bank – Assessment of EU securities settlement systems against the
standards for their use in ESCB credit operations, September 1998
Les standards à respecter sont les suivants :
- Standard 1 : cadre réglementaire légal.
- Standard 2 : règlement en monnaie centrale.
- Standard 3 : absence de risque de conservation.
- Standard 4 : régulation par le contrôle d’autorités de tutelle compétentes.
- Standard 5 : Transparence en matière de gestion des risques et conditions participation aux systèmes.
- Standard 6 : procédures de gestion des risques.
- Standard 7 : règlement définitif en cours de journée.
- Standard 8 : harmonisation des jours et heures d’ouverture.
- Standard 9 : fiabilité opérationnelle et procédures de sauvegarde adéquates.
387
Communiqué de Presse Banque centrale Européenne du 21 février 2001
388
Les systèmes de règlement de titres ont poursuivi leurs efforts en vue de renforcer leur conformité aux
attentes de la BCE. A cet égard CADE – système espagnol a introduit des mécanismes de règlement-livraison en
temps réel. Par conséquent, il existe désormais les systèmes CADE (Espagne), Euroclear France, Monte Titoli
(Italie), Necigef (Pays-Bas), Interbolsa (Portugal) et APK/RM (Finlande) pouvant être utilisés sans restriction.
389
« Fin octobre 1999, près de 5 milliards d’euros de dettes d’Etat européennes ont été transférées en
conservation dans les livres de Sicovam SA. Suite à l’accréditation de trois nouveaux liens par la Banque
Centrale Européenne le 7 octobre 1999, les premières dettes d’Etat belges et espagnoles ont été transférées en
Sicovam SA et l’ensemble des dettes d’Etat les plus liquides de l’Euroland peuvent désormais être utilisées
comme collatéral dans RGV : Allemagne, Autriche, Belgique, Espagne, Finlande, Hollande, Italie ». Sources :
Sicovam SA.
196
l’un des moyens par lesquels la dynamique du marché triomphe des catégories qui l’entravent
390
.
Les opérations traitées par RGV sont :
- l’achat et la vente de titres sur les marchés gris, primaire et secondaire,
- les virements franco,
- les pensions livrées,
- les opérations de prêt-emprunt de titres de gré à gré,
- les opérations de politique monétaire.
Les principes de RGV sont 391 :
- un système de règlement adapté aux salles de marché,
- une sécurité accrue grâce à l’irrévocabilité des dénouements,
- une adaptation totale aux recommandations du groupe des Trente,
- un prêt de titres garanti par un pool bancaire,
- une gestion des garanties titres pour les systèmes de règlements espèces,
- un système unique pour tous les produits de taux,
- une extension possible à d’autres valeurs,
- un traitement adapté aux opérations de gré à gré.
5.2
Une journée RGV
Globalement, une journée comptable RGV s’organise comme exposée dans le schéma 4.
390
Goyet C., Les titres de créance : une catégorie nouvelle, à mi-chemin entre valeurs mobilières et instruments
financiers, Petites Affiches, mars 2002
391
Sicovam SA
197
Schéma 4 : Une journée RGV
J 20h
Fin de la journée
1er Cut -Off
BDF
1er Cut -Off
BDF
J 18h30
Espèces →
J 17h30
Espèces →
Transferts
TBF/RGV
possibles
J 17h
BDF
Traitement de nuit
Dénouements
fréquents au
fil de l’eau
J 15h
Espèces →
J 8h
Remarques relatives au schéma :
- Dénouements au fil de l’eau : soit au fur et à mesure que les mouvements arrivent.
- Espèces → BDF : les soldes en espèces, liés aux opérations dénouées dans RGV, sont
basculés dans le système TBF de la Banque de France, et les soldes des affiliés pour RGV
reviennent à 0.
- Cut - off : arrêté comptable de la Banque de France, le premier est provisoire, le second est
définitif.
Le système RGV opère au dénouement des transactions boursières selon les principes
suivants :
- contrôle de la provision titres chez le vendeur et de la provision espèces chez l’acheteur,
- si les provisions sont insuffisantes, le système offre des possibilités de couverture aux
participants sous forme de prêt de titres ou de pension livrée (cf. infra),
- dès le dénouement effectué, les titres sont irrévocablement au compte de l’acheteur et les
espèces au compte du vendeur.
198
5.3 Gestion des titres et des espèces
Nous reprenons ci-dessous les différents points de traitement des titres et des espèces.
La gestion des titres
Celle-ci repose sur des soldes irrévocables, c’est-à-dire certains, non remis en cause par le
système quelle que soit la position de la Banque de France, et des soldes révocables.
La gestion des pensions livrées
On appelle pension livrée une cession temporaire de titres en pleine propriété contre espèces,
assortie d’un engagement irrévocable du cédant et du cessionnaire, le premier à reprendre les
titres et le second à les rétrocéder pour un prix et à une date convenue à l’avance 392.
Disposer d’une gestion efficace des pensions livrées est un atout essentiel pour une place
financière ; les liens sont effectivement très étroits entre la liquidité d’un marché de l’argent et
un marché actif et sécurisé de pensions livrées, parce qu’une politique monétaire doit pouvoir
reposer sur une sécurité totale en matière d’échanges en monnaie centrale.
La gestion des espèces dans RGV
RGV permet une gestion des positions nettes espèces reposant sur le principe d’un pouvoir
d’achat garanti. Cette garantie est apportée par la technique de la collatéralisation en stock ou
en flux. La collatéralisation des flux a lieu lorsqu’un achat de titres est à dénouer sans qu’il y
ait les espèces nécessaires ; ces titres sont alors mis en pension.
Enfin, le pouvoir d’achat des affiliés peut se reconstituer en cours de journée par plusieurs
biais :
- virement du compte TBF de l’affilié au compte RGV,
- pensions entre affiliés,
- alimentation d’un compte de titres collatéralisables,
- emprunt de titres collatéralisables.
199
• Conclusion sur RGV
RGV a été conçu essentiellement pour le traitement des opérations de gros montants sur titres
de taux, dans un respect de sécurité et d’efficacité, devenues indispensables depuis
l’explosion de l’activité sur ces types de titres. Le système est capable de traiter toutes les
opérations de marché entre les intermédiaires et la Banque de France. Il est, à ce titre, le
support exclusif des interventions de la Banque de France sur le marché monétaire et permet
un accès à la zone euro via TARGET.
Ses principes généraux sont 393:
-
l’irrévocabilité instantanée des dénouements,
-
le temps réel,
-
la collatéralisation qui permet d’utiliser des titres en garantie des opérations d’achat,
-
le règlement espèces en monnaie banque centrale.
Les participants au système RGV bénéficient donc de l’accès le plus efficace au
refinancement en euros auprès du système européen de banques centrales pour les titres
français et étrangers.
392
393
Pour un développement plus important sur les pensions, le lecteur se reportera au chapitre IV § 3.4
Sicovam SA
200
5.4 L’architecture actuelle
Pour répondre aux besoins de la Place, les deux systèmes ont évolué : il existe, depuis juin
2001, RGV et Relit +, dont l’architecture peut se résumer sur le schéma 5.
Schéma 5 : Relit + et RGV
ISB
SBI
SLAB
Irrévocable
à heures fixes
Irrévocable
au fil de l’eau
RELIT +
RGV
Passent par le système RGV :
-
les achats et ventes sur les marchés gris, primaire et secondaire,
-
les mouvements franco,
-
les opérations de pensions livrées et prêts de titres,
-
les opérations de politique monétaire,
201
sur les valeurs suivantes :
-
OAT et emprunts d’Etat,
-
Obligations françaises,
-
Titres de créances négociables,
-
Emissions internationales
-
Fonds communs de créances.
Les systèmes de préparation et d’ajustement fonctionnent toujours de façon identique, à
quelques exceptions près.
Les fonctions d’ISB (schéma 6) sont celles de réception et contrôle des négociations,
valorisation des opérations, compensation des négociations, gestion des dépôts de garantie
et appels de marge, préparation du dénouement pour une livraison contre paiement et
diffusion d’information auprès des participants.
Schéma 6 : Système ISB
Négociateur
Avis d’exécution
Clearnet
NSC
Dérivés
Négociateur
Transmission de
l’ordre
•
Clearnet ne garantit pas les valeurs les moins liquides
Euroclear France Relit +
•
Euronext
202
Les fonctions du système SBI (schéma 7 )sont la réception et le contrôle des avis d’opéré
et de leurs réponses, l’ajustement de ces avis et la gestion du « culot
394
», la préparation
au dénouement et l’information des participants.
Schéma 7 : SBI
Prestataires en
services
d’investissement
OK /
non
ajustement
Avis d’opéré
Sociétés
De
Bourse
Traitement du
culot
EUROCLEAR
Dénouement
Relit +
En phase de préparation, SBI sépare les opérations au comptant des opérations SRD (service à
règlement différé).
Le système SLAB présente quelques particularités spécifiques : il réceptionne et contrôle
les opérations, procède à un pré-appariement et un appariement des instructions, valorise
les opérations avec la Banque de France, annule ou modifie, le cas échéant, les
instructions, prépare à la livraison contre paiement, informe ou relance les participants, et
traite les cessions temporaires de titres.
Le pré-appariement, spécifique au système Slab, est une prestation supplémentaire qui a lieu
d’être pour sécuriser au maximum les instructions. A titre d’exemple, lorsqu’il s’agit d’une
transaction transfrontalière et que les titres sont déposés auprès d’un dépositaire central
étranger, le participant français ne s’engagera pas avant d’avoir reçu les titres pour un achat ;
la phase de pré-appariement lui permet cette attente.
394
Le culot est le traitement des avis d’opéré n’ayant pas fait l’objet d’une réponse au soir du traitement, c’est-àdire en J+2 pour un dénouement en J+3.
203
Les opérations avec la Banque de France traitées dans SLAB sont les appels d’offre effectués
dans le cadre de la politique monétaire : la Banque de France précise à Euroclear France les
montants accordés aux banques qui, en parallèle, transmettent leurs instructions. Euroclear
valorise alors les titres déposés en garantie, c’est-à-dire calcule le montant de ladite garantie.
De la même manière, le système gère les pensions livrées intrajournalières et les cessions
temporaires de titres : il procède à leur mise en place et à leur restitution, modifie les
échéances et gère les opérations sur titres, le cas échéant, traite les versements d’intérêts et les
remboursements.
Le système Dénouement prend en compte les opérations issues des filières bourse (ISB et
SBI) et gré à gré (SLAB), les mouvements unilatéraux et mouvements « Sicovam », les
opérations sur titres (sur soldes et sur flux) et les suspens, dont l’origine émane des
participants, des sous-systèmes, de la Banque de France, d’Euroclear France et du système
lui-même (opérations automatiques).
Le traitement de ces opérations s’établit selon les principes de la simultanéité des livraisons
de titres et des règlements des espèces, de l’irrévocabilité du dénouement (au fil de l’eau pour
RGV, à heures fixes pour Relit +), du fonctionnement et de la diffusion des informations en
continu.
Très précisément RGV offre une irrévocabilité au fil de l’eau et contrôle, en conséquence, la
provision titres du vendeur et espèces de l’acheteur, tandis que Relit + offre l’irrévocabilité
des mouvements espèces après contrôle dans TBF (le dénouement s’opère donc sans contrôle
espèces) ; l’irrévocabilité des mouvements n’est alors effective qu’en fin de journée.
L’organisation générale est synthétisée dans le schéma 8.
204
Schéma 8 : Organisation générale des systèmes Relit et RGV
Solde comptable
Dénouement
révocable
RELIT +
Dénouement
irrévocable
RGV
Solde révocable
Solde irrévocable
Déversement positions espèces dans TBF
Solde irrévocable
Dénouement
révocable
RELIT +
Solde révocable
Dénouement
irrévocable
RGV
Solde irrévocable
Le pouvoir d’achat dans RGV est constitué de la somme des garanties espèces (Banque de
France), des positions espèces des dénouements et des titres collatéralisables. Aussi Euroclear
France gère-t-il des comptes Banque Centrale, le pouvoir d’achat de ses participants, leurs
besoins de trésorerie (liés aux négociations boursières, mais également aux pensions livrées,
virements de gros montants et intérêts et remboursements).
La gestion des titres s’opère, quant à elle, selon la ségrégation des avoirs.
En conclusion, il nous semble opportun de schématiser une journée de traitement (Schéma 9) :
Schéma 9 : Une journée comptable
J-1
20h00
Début de la journée comptable
Premier chaining de nuit : C10
Franco à effet (suspens J-1) et (J)
Dépôts/retraits et transferts valeurs (J)
OLI/VIE (suspens J-1) et (J)
Mouvements Sicovam (J)
Ecritures Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (J)
Deuxième chaining de nuit : C20
J
LCP ISB/SBI/SLAB (suspens J-1) et (J)
Mouvements Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (J)
F10 : Phase de couverture spontanée
Premier chaining du matin : C24
9h45
10h
Franco à effet (suspens C10)
Franco de couverture (suspens de F10)
Dépôts/retraits et transferts valeurs (suspens de C10)
OLI/VIE (suspens C10) et (J)
Mouvements Sicovam (suspens de C10) et (J)
Ecritures Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (suspens de C10) et (J)
F20 : Phase de couverture spontanée
Deuxième chaining du matin : C28
10h45
11h
LCP ISB/SBI/SLAB (suspens de C20)
LCP SLAB (J)
Mouvements Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (suspens de C20) et(J)
Troisième chaining du matin : C30
Franco à effet (suspens C24 sauf franco de réénitialisation)
Franco de couverture (suspens de C24 et F20)
J
Dépôts/retraits et transferts valeurs (suspens de
C24)
OLI/VIE (suspens C24) et (J)
Mouvements Sicovam (suspens de C10) et (J)
Ecritures Sicovam (J)
F30 : Phase de couverture spontanée
11h45
12h
Chaining de fin de matinée : C35
LCP SLAB (J)
LCP ISB, SBI, SLAB (suspens C28)
Franco à effet (suspens C30)
Franco de couverture (suspens de C30 et F30)
Dépôts/retraits et transferts valeurs (suspens de C30)
OLI/VIE (suspens C30) et (J)
Mouvements Sicovam (suspens de C28 et C30) et (J)
Ecritures Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (suspens de C28 et C30) et (J)
205
206
13h30
13h45
J
15h
15h30
16h45
17h15
17h30
18h30
Chaining de début d’après-midi : C40
LCP SLAB (J)
LCP ISB, SBI, SLAB (suspens C35)
Franco à effet (suspens C35)
Franco de couverture (suspens de C35) et (J)
Dépôts/retraits et transferts valeurs (suspens de C35)
OLI/VIE (suspens C35) et (J)
Mouvements Sicovam (suspens de C35) et (J)
Ecritures Sicovam (J)
LCP régularisation OST/flux (suspens de C35) et (J)
Chaining d’après-midi : C50
Tous mouvements en suspens à l’issue du C40
Franco de couverture (J)
OLI/VIE (J)
Mouvements Sicovam (J)
Ecritures Sicovam (J)
Chaining complémentaire : C60
OLI/VIE (J)
Mouvements Sicovam (J)
Ecritures Sicovam (J)
Remontées de suspens du C50
Chaining complémentaire : C70
Mouvements Sicovam (J)
Ecritures Sicovam (J)
5.5 Vers le Single Settlement Engine
A la suite de la fusion d’Euroclear et de Crest, le groupe Euroclear a décidé de migrer ses
systèmes domestiques et internationaux vers un moteur de dénouement unique (SSE – Single
Settlement Engine) pour tous les titres du groupe. Le système permettra des réductions de
coûts car les opérations domestiques et transfrontalières seront dénouées par mouvements de
comptes en interne. Les participants au systèmes pourront concentrer leur activité de
dénouement à partir d’un compte unique, en utilisant de la monnaie banque centrale ou
commerciale, réduisant les coûts liés à la fragmentation des marchés et systèmes 395.
Nous reprenons ci-dessous des exemples de fonctionnement du SSE (schémas 10 et 11) 396.
395
Mérère J., Vers un règlement-livraison paneuropéen, Analyse Financière n°6, 1er trimestre 2003
Euroclear, The Single Settlement Engine and subsequent business model deliverables, Consultation Paper ;
June 2003 ; Euroclear, Delivering low-cost cross border settlement, January 2003
396
207
Schéma 10 : : Etapes du processus et règlement irrévocable
(exemple d’une transaction OTC)
(I) système
d’un
dépositaire
central ou
international
input, matching,
pré-règlement ⊇
⊄
Transfert d’instruction
∠
Client
SSE
⊂ position en
titres et espèces
⊆ mise à jour des
espèces
Reporting des
dénouements
Enregistrement
légal des
avoirs
mise à jour
complète en titres
et espèces
Mise à jour des comptes
du vendeur avec
irrévocabilité
≈
∈
Juridiction du marché
domestique
1.
La gestion des inputs, du matching et autres fonctions de pré-règlement est effectuée
auprès du système domestique ou international concerné.
2.
Le dépositaire central instruit le SSE pour dénouement de la transaction.
3.
Le SSE traite les transactions en titres et en espèces dès lors que les comptes présentent
des provisions suffisantes.
4.
Si tel est le cas, la plate-forme SSE bloque les titres et espèces concernés, et instruit des
débits et crédits prévisionnels, qui deviendront ensuite définitifs chez le dépositaire
concerné.
5.
Le SSE envoie un message de mise à jour des compte titres au dépositaire. Après
réception de ce message, ledit dépositaire mouvemente les comptes. Et l’irrévocabilité
des mouvements est alors prononcée.
6.
Le dépositaire confirme, à la plate-forme SSE, la finalité du règlement. A réception de
cette confirmation, le SSE met à jour les comptes titres et espèces, délivrant les titres et
les espèces pour une réutilisation ou une nouvelle transaction.
7.
Le SSE transmet un reporting au dépositaire, qui le retransmettra à son client.
208
Schéma 11 : Etapes du processus et règlement irrévocable
(exemple d’une transaction OTC intra-groupe)
(I) système d’un
dépositaire central
ou international
input, matching,
pré-règlement ⊇
⊄
Transfert des
instruct°
SSE
⊄
(I) système d’un
dépositaire central
ou international
⊂ position en
titres et espèces
∇
∇
⊆ mise à jour des
Enregistrement
légal des
avoirs
Mise à jour des comptes
du vendeur avec
irrévocabilité
∈
Reporting
des
dénouements
espèces
input, matching,
pré-règlement ⊇
Reporting des
dénouements
Enregistrement
légal des
avoirs
mise à jour
complète en titres
et espèces
Mise à jour des comptes
de l’acheteur
…
Juridiction du marché
domestique 1
≈
Juridiction du marché
domestique 2
1.
La gestion des inputs, du matching et autres fonctions de pré-règlement est effectuée
auprès du système domestique ou international concerné.
2.
Le dépositaire central instruit le SSE pour dénouement de la transaction.
3.
Le SSE traite les transactions en titres et en espèces dès lors que les comptes présentent
des provisions suffisantes.
4.
Si tel est le cas, la plate-forme SSE bloque les titres et espèces concernés, et instruit des
débits et crédits prévisionnels, qui deviendront ensuite définitifs chez le dépositaire
concerné.
5.
Le SSE envoie un message de mise à jour des compte titres au dépositaire. Après
réception de ce message, ledit dépositaire mouvemente les comptes. Et l’irrévocabilité
des mouvements est alors prononcée.
6.
Le dépositaire du vendeur envoie un message au dépositaire de l’acheteur.
L’enregistrement est alors avalisé légalement.
7.
Le dépositaire de l’acheteur envoie un message de confirmation, en retour, au
SSE. Celui-ci met à jour les comptes titres et espèces, délivrant les titres et les espèces
pour une réutilisation ou une nouvelle transaction.
8.
Le SSE transmet un reporting au dépositaire, qui le retransmettra à son client.
209
Selon Euroclear, le nouveau système permettra en 2008 (année de la migration totale de
l’ensemble des systèmes concernés par le SSE) de diminuer les coûts des transactions
transfrontalières de près de 90 %
397
. En effet, hors mise en commun des systèmes, les
transactions franco-anglaises, par exemple, sont traitées comme des transactions
transfrontalières ; lorsque le système SSE sera opérationnel, elles se traiteront comme des
transactions domestiques. Or une transaction interne traitée par une centrale de clearing
internationale, telle Euroclear, coûte 1 € seulement, contre 18 à 30 € pour une transaction
transfrontalière.
6 Euronext, Euroclear : le premier marché paneuropéen 398
6.1 Du marché unique à la monnaie unique
L’article 2 du Traité de Rome stipulait que «la Communauté a pour mission, par
l’établissement d’un marché commun et par le rapprochement progressif des politiques
économiques des Etats – membres, de promouvoir un développement harmonieux des
activités économiques dans l’ensemble de la Communauté, une expansion continue et
équilibrée, une stabilité accrue, un relèvement accéléré du niveau de vie et des relations plus
étroites entre les Etats qu’elle réunit ».
Un marché unique passe par une union douanière ; celle-ci fut réalisée dès 1968. Mais il
persistait encore des contraintes non tarifaires. En 1970, le rapport Werner précisait qu’une
Union monétaire entre les pays de la Communauté européenne serait gage de stabilité et
avançait qu’une harmonisation des politiques économiques était indispensable. En 1979, le
397
Euroclear évalue les réductions de coût de traitement à environ 90 %, et donne les exemples ci-dessous :
Home market delivery
Current range of Group
Current domestic charge Percentage savings
charges
Belgium
£ 15.50 - £ 21.60
£ 1.90
88 % - 91 %
France
£ 0.34 - £ 7.30
28 p – 72 p
97 % - 91 %
Ireland
£ 4.30 - £ 7.30
10 p – 50 p
93 % - 98 %
Netherland
£ 8.90 - £ 14.60
£ 1.60
82 % - 89 %
United Kingdom
£ 6.40 - £ 10.80
10 p – 50 p
95 % - 98 %
Euroclear, Delivery a domestic market for Europe, 4 July 2002
398
Karyotis C., Les systèmes de règlement-livraison européens - Vers l’unification des marchés, Banque Editeur
2003, 2ème édition
210
Système Monétaire Européen créait l’Ecu, avec un mécanisme de taux de change stables mais
ajustables entre les devises de la Communauté.
En 1985 la Commission européenne rédigeait le Livre Blanc sur l’achèvement du marché
intérieur, à la suite duquel elle élaborait un plan d’action, adopté par le Conseil des ministres
en janvier 1986, appelé « Acte unique ».
Au 1er janvier 1993, le marché unique était réalisé en garantissant quatre principes : la libre
circulation des biens, des hommes, des capitaux et des services.
Jacques Rueff avait affirmé, en 1949, que «l’Europe se fera par la monnaie
399
ou ne se fera
pas » !
L’idée européenne 400 est née d’un constat – le nationalisme conduisait l’Europe à un déclin –
et d’une intuition – les intérêts des nations ne sont immuables – ils
peuvent être
méthodiquement transformés : la création de « solidarité de fait », selon la formule de Jean
Monnet, peut faire tomber les frontières nationales, et il est alors possible de transcender les
intérêts nationaux dans un nouvel intérêt européen construit et défendu par des institutions
originales. La mémoire avait opposé les nations et les avait conduites à un suicide collectif, un
marché commun pouvait les rassembler. La construction européenne a été un processus plus
qu’un projet.
En juin 1989, le Conseil européen de Madrid approuva un plan en trois phases pour la
création d’une Union économique et monétaire, la première étape étant fixée au 1er juillet
1990.
En février 1992, les chefs d’Etat et de gouvernement signèrent, à Maastricht, le traité sur
l’Union européenne, entré en vigueur le 1er novembre 1993, après ratification par tous les
Etats membres.
Les trois phases devaient permettre la création de la monnaie unique, l’Euro :
399
Pour qu’une monnaie existe, il faut qu’une organisation collective suffisamment solide lui donne sa valeur et
crée la confiance indispensable à sa circulation. La monnaie est ainsi l’expression d’une volonté politique
collective. L’euro illustre à merveille cette idée puisqu’il est l’héritier d’une organisation humaine
qu’exprimèrent en leur temps la drachme athénienne, le denier romain ou le solibus byzantin.
Ruimy M., La monnaie, au cœur de la relation marchande, Cahiers français n°315, juillet – août 2003.
211
• Phase 1 : 1er juillet 1990 – 31 juillet 1993
- mise en place d’une coordination des politiques monétaires,
- libération complète des mouvements de capitaux.
• Phase 2 : 1er janvier 1994 – 31 décembre 1998
- création de l’Institut Monétaire Européen et de la Banque Centrale Européenne le 1er
juillet 1998,
- renforcement de la coordination des politiques monétaires et économiques.
• Phase 3 : 1er janvier 1999
- politique monétaire unique menée par la BCE,
- fixation définitive et irrévocable des taux de change entre les monnaies,
- introduction de l’Euro.
Ces phases ont été respectées, la parité entre l’euro et les devises nationales a été fixée le 31
décembre 1998, les bourses européennes des pays in ont basculé en euros le 4 janvier 1999.
La création du marché financier européen, unifié ou en voie d’unification, trouve son origine
dans la Directive sur les services d’investissement. La directive du 15 mars 1993 porte sur
l’adéquation des fonds propres des entreprises d’investissement et des établissements de
crédit. La directive du 10 août 1993 affecte davantage le domaine des valeurs mobilières. Elle
développe la notion de « passeport européen », principe de reconnaissance mutuelle de la part
des Etats des agréments délivrés par les autorités compétentes du pays. Et elle définit la
notion de marché réglementé.
L’euro en tant que monnaie internationale :
Toute monnaie, domestique ou internationale, doit remplir les fonctions suivantes 401 :
-
Réserve de valeur (monnaie de placement et de financement au titre privé et
monnaie de réserve au titre public),
-
Moyen d’échange (monnaie de règlement pour les échanges, monnaie
d’intervention au titre public),
-
Unité de compte (monnaie de fixation de prix et de facturation au titre privé,
monnaie de référence ou de rattachement au titre public).
400
Guéhenno J.M., Le modèle européen in Ramses – L’entrée dans le XXIème siècle, Dunod 2000
212
Si l’euro peut devenir monnaie internationale, les seuls décideurs en seront les opérateurs des
marchés, donc les intervenants extérieurs à « l’Eurosystème ».
En 2000, les fonctions de l’euro en tant que monnaie internationale n’ont pas toutes atteint
leur apogée, conformément à une étude réalisée par la Banque Centrale Européenne 402.
En tant que monnaie de financement, on constate que la part des emprunts internationaux
stricto sensu
403
libellés en euro s’élevait à 26 % à la fin 2000. Ce qui représente, à taux de
change égal, une hausse de 7 % par rapport à fin 1998. Cette part, en tenant compte des
emprunts lancés sur le marché international pour tous les émetteurs, y compris ceux de la
zone Euro, atteint 34 %. L’utilisation de l’euro par les établissements de crédit pour leurs
moyens de financement (dépôts transfrontaliers, dépôts domestiques en euro ou émissions
d’actions internationales) progresse régulièrement depuis 1999 ; l’euro représente, fin 2000,
22 % des actifs bancaires internationaux.
En tant que monnaie d’investissement, la part des actifs libellés en euro dans les portefeuilles
obligataires atteint, fin 2000, 32 %, contre 47 % pour le dollar et 14 % pour le yen. Sa part,
dans les portefeuilles actions, n’est que de 25 %, contre 50 % pour le dollar.
En tant que monnaie d’échange et monnaie de cotation, l’euro souffre de la prédominance
historique du dollar. Mais notons qu’en tant que monnaie de règlement l’euro joue un rôle non
négligeable. Aussi, au cours de l’année 2000, en termes de volume, sa part est-elle passée de
22.8 % à 32.5 % (cette part, en termes de valeur, est passée, quant à elle de 42.4 % à 39.7 %
au cours de la même époque).
En tant que monnaie de réserve, l’euro ne représentait que 12.5 % des actifs de réserve
étrangers des pays membres du Fonds Monétaire International. Certes, c’est la seconde
monnaie au monde, mais loin derrière le dollar dont la part s’élève à 66.2 %.
Enfin, en tant que monnaie de référence (Anchor currency), notons que l’euro joue une
fonction importante dans 56 pays hors zone Euro qui s’y réfèrent dans leur régime de taux de
change. C’est présentement une preuve de confiance que lesdits pays démontrent dans la
stabilité de la politique monétaire.
401
Banque Centrale Européenne, Le rôle international de l’euro, Bulletin mensuel, Août 1999
ECB, Review of the International Role of the Euro, 2001
403
Les titres émis dans une monnaie différente de celle du pays de l’émetteur.
402
213
Néanmoins, selon que l’on considère une définition « étroite » ou « large » d’une monnaie
internationale, le poids de l’euro diffère.
On entend par rôle international de l’euro l’utilisation de la monnaie par les non-résidents de
la zone euro. Du point de vue des financements, seuls les titres émis par des non-résidents
doivent être considérés.
Une définition large d’une monnaie internationale établit qu’un titre de créance émis par un
résident d’une zone donnée est international s’il est destiné à des investisseurs internationaux.
La définition étroite exclut les actifs généralement considérés par les opérateurs de marché
comme véritablement internationaux, même s’ils proviennent de la zone euro. La définition
large couvre, par contre, le cas dans lequel l’émetteur ainsi que le détenteur des titres sont
résidents de la zone, même si l’émission était initialement destinée à être réellement
internationale.
Sur la base de la définition large, la part de l’euro (41.5 % en juin 2003) est pratiquement
égale à celle du dollar (42.5 %)
404
. Selon la définition étroite, la part de l’euro dans les
encours des titres de créances internationaux émis ressort à 30.4 % (contre 43.7 % pour le
dollar) à la mi-2003. Quatre ans auparavant leur part respective était de 21.7 % et 46.8 % !
6.2 Euronext
Le 20 mars 2000, les bourses de Paris, Bruxelles et Amsterdam annonçaient leur fusion 405. La
première entité paneuropéenne créée sous le nom d’Euronext NV représentait, à l’heure de
l’accord, plus de 1300 sociétés cotées pour une capitalisation globale de 2380 milliards
d’euros.
Euronext est une société de droit néerlandais ; les systèmes parisiens de cotation (NSC) et de
compensation (clearing 21) devaient être retenus et la migration des autres systèmes devait
être établie pour septembre 2001, tandis que le dénouement des transactions devait être
enregistré auprès d’Euroclear et sa nouvelle filiale Sicovam SA.
404
Banque Centrale Européenne, Le rôle international de l’euro : les principales évolutions survenues depuis le
début de la phase III de l’Union économique et monétaire, Novembre 2003
405
La concentration des bourses n’est pas un phénomène nouveau, surtout sur une zone à monnaie unique. Aux
Etats-Unis, entre 1940 et 1980, le nombre de bourses régionales est passé de 18 à 7. Des concentrations
semblables ont eu lieu en France (disparition des bourses régionales) ou en Allemagne (fédération des bourses
régionales).
Champarnadaud F., Remay V., Places financières et concurrence entre marchés boursiers, Revue d’Economie
Financière, mars 2000.
Mais il nous semble important de souligner qu’Euronext est la seule fusion transfrontalière qui existe à ce jour.
214
Les étapes chronologiques de la première bourse paneuropéenne sont :
-
le 22 septembre 2000 : fusion des bourses de Paris, Bruxelles et Amsterdam par
la naissance d’Euronext N.V.,
-
le 3 octobre 2000 : Euronext publie ses premiers indices (Euronext 100 et Next
150),
-
le 9 janvier 2001 : Euronext lance NextTrack dédié aux fonds indiciels,
-
le 1er février 2001 : Clearnet fusionne avec les chambres de compensation belge
et néerlandaise, créant la première chambre européenne de contrepartie et de
compensation transfrontalière,
-
fin 2001 : mise en place d’une plate-forme unifiée de négociation pour les valeurs
mobilières,
-
le 8 janvier 2002 : Euronext acquiert le LIFFE devenant Euronext.Liffe.
-
le 6 février 2002 : la BVLP – Bolsa de Valores de Lisboa e Porto rejoint
Euronext et devient Euronext Lisbonne,
-
le 8 février 2002 : La bourse de Varsovie et Euronext signent un accord de cross
membership et de cross-trading,
-
le 8 mars 2002 : Clearing 21 est installé à Bruxelles et progressivement utilisé
pour tous les marchés comptant et dérivés d’Euronext Amsterdam, Bruxelles,
Lisbonne et Paris,
-
le 27 mai 2002 : Euronext lance Next-Warrants, un segment de produits dédié
aux warrants, associé à une nouvelle plate-forme électronique,
-
fin 2002 : mise en place d’une plate-forme unifiée de négociation pour les
produits dérivés,
-
en mars – avril 2003 : Les marchés dérivés de Bruxelles et Paris basculent sur la
plate-forme électronique LIFFE CONNECTTM,
-
le 6 mai 2003 : EuroMTS et Euronext s’associent pour lancer les premiers
indices paneuropéens consacrés aux emprunts d’Etat,
-
le 25 juin 2003 : Clearnet et la London Clearing House annoncent leur fusion,
formant le premier groupe de chambres de compensation et contreparties
centrales d’Europe.
Euronext aujourd’hui, c’est :
-
Un peu plus de 1400 valeurs cotées pour une capitalisation de près de 1500
milliards d’euros en 2003,
215
-
Entre 6 et 9 millions de négociations par jour, pour des volumes quotidiens
compris entre 4 et 7 milliards d’euros.
6.3 De Sicovam à Euroclear France
Euroclear gère le plus important système de clearing international via un réseau de
participants présents dans plus de 80 pays. Ceux-ci sont les banques centrales, les
établissements de crédit, les custodians, les négociateurs boursiers (brokers/dealers) et les
investisseurs institutionnels.
Son système offre un point d’entrée unique à ses participants pour livrer et régler les
négociations transfrontalières.
Euroclear 406 assure les rôles d’un dépositaire central international, par le biais d’un réseau de
conservateurs situés dans les pays des valeurs qu’il gère, et d’un organisme de compensation
traditionnel. Mais au-delà desdites prestations traditionnelles, Euroclear (comme Clearstream)
gère les comptes espèces stricto sensu. Aussi les participants peuvent-ils retirer ou déposer
des espèces, procéder à des virements de fonds entre eux et convertir une devise en une autre.
En effet, les valeurs internationales admises aux opérations d’Euroclear sont libellées en
différentes devises. Elle est donc obligée de gérer, par participant, autant de comptes espèces
qu’il existe de monnaies de libellé d’émissions. Euroclear gère des comptes dans plus de 40
406
Euroclear et Cedel (devenu Clearstream) sont nés avec les euromarchés. Les retards constants dans la
livraison des obligations et les risques de pertes dus à la nécessité de transférer physiquement les certificats de
propriété avaient fini par déclencher une crise de liquidité sur le marché des euro-obligations, au cours des
années soixante. Il en résultait que les entreprises avaient d’importantes masses de leur capital immobilisées dans
des transactions en attente de compensation. En outre, les risques encourus par les établissements financiers
fournisseurs de crédits pour des opérations de transfert de titres augmentaient dangereusement. Cette situation de
blocage donna l’idée à Morgan Guaranty Trust de mettre en place un système informatisé capable de compenser
les échanges de valeurs mobilières négociées sur plusieurs places financières et d’assumer le rôle de dépositaires
des émissions internationales. Euroclear a été créé en 1968.
Miecret P., Avantages d’un système supranational de règlement-livraison : l’expérience d’Euroclear, La
Synthèse Financière, 2 octobre 1995
Face à la montée en charge très rapide de l’activité d’Euroclear, une soixantaine d’établissements financiers
(principaux concurrents de Morgan) ont décidé de contrecarrer ce monopole international en créant Cedel. Les
deux centrales offraient, dès leur création, à leurs participants d’origine planétaire une compensation
internationale, parce qu’elles proposaient des livraisons contre paiement multidevises.
Karyotis C., Circulation internationale des valeurs mobilières, Banque Editeur 1994
216
devises différentes. Enfin, des prêts d’espèces des institutions sont possibles, sous forme de
découverts autorisés.
Les centrales de clearing internationales offrent depuis leur création la livraison contre
paiement, les contrôles de provisions titres et espèces étant réalisés simultanément chez elles.
♦ Euroclear aujourd’hui : vers une consolidation européenne
Après la création d’Euronext, les autorités de tutelle concernées ont eu pour objectif
d’optimiser tous les traitements boursiers et post boursiers. Aussi dès janvier 2001, Euroclear
a-t-il fusionné avec Sicovam, devenue filiale à 100 % d’Euroclear Bank, pour continuer
ensuite avec les fusions des dépositaires belge (CIK) et néerlandais (Necigef). Depuis, le
Liffe est entré dans le périmètre d’Euronext et CrestCo a fusionné avec Euroclear.
La structure actuelle du Groupe Euroclear ressort alors sur le schéma 12 407 .
Schéma 12 : Le groupe Euroclear
Euroclear plc
Shareholders
Former CREST
shareholders
and
Sicovam
Holding
Euroclear plc
97.6 %
Other user
shareholders
100 %
CrestCo
407
2.4 %
Euroclear
Bank
100 %
100 %
Euroclear
France
Euroclear
Netherland
CrestCo & Euroclear, Delivering a domestic market for Europe, July 2002
20 %
Clearnet
217
Au total, Euroclear compte 1300 actionnaires, dont Euronext et le London Stock Exchange.
Conclusion
Grâce à la généralisation du compte courant de titres, consacrée par la dématérialisation, la
place financière a réussi l’industrialisation de son activité titres.
Avant l’informatisation des procédures de négociation, qui s’est traduite par la disparition du
Palais Brongniart, la France avait su faire disparaître le titre papier. Pourtant, malgré la
dématérialisation totale des titres, les procédures de livraison n’étaient pas uniformisées ; on
recensait 23 filières de livraison et on dénonçait les suspens chez les négociateurs parisiens.
Face à ces retards de livraison, les autorités politiques ont requis la mise au point d’un
système de règlement-livraison de titres informatisé, sécurisé et conforme aux attentes de la
communauté financière internationale.
Ce fut Relit.
Mais les volumes de transaction ont crû considérablement dans les années quatre-vingt-dix, et
Relit ne satisfaisait plus aux contraintes de sécurisation des systèmes de paiement. Des
règlements en monnaie centrale devenaient indispensables et, avec eux, une irrévocabilité en
temps réel.
Ce fut RGV.
En 1999, les marchés financiers européens basculaient en euro ; et en 2000, la première
bourse paneuropéenne naissait. Il convenait, dans la continuité des activités de marché,
d’étendre la collaboration entre places européennes, aux activités post-marché.
Ce fut la fusion entre Euroclear et les dépositaires domestiques des places d’Euronext.
Des étapes phénoménales ont été franchies depuis la création de Sicovam, mais dans la
concurrence exacerbée dans lesquelles évoluent les bourses actuellement, si Relit et Rgv
représentent des améliorations certaines et nécessaires, elles ne sont pas suffisantes.
Les défis de temps réel et autre réduction du taux de suspens demeurent.
218
Chapitre IV : De l’efficience d’un système de
règlement-livraison de titres
Les mécanismes de compensation et de règlement des échanges de titres sont
conçus pour tenir compte des coûts et des risques associés à ces transactions.
Les risques proviennent de la possibilité que l’une des parties à une
transaction ne remplisse pas ses opérations. Des éléments clés de la gestion
des risques sont les accords de netting, l’utilisation efficace des actifs fournis
en garantie dans le cadre d’une transaction, le principe de règlement contre
livraison, l’immobilisation des titres et l’extension du crédit.
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Perold F., Sirri R.,
Tufano P., La finance sans frontière, Economica 1998
Avant la mise en place d’un système de règlement-livraison de titres, il convient d’en
déterminer son gestionnaire. Si celui-ci peut être une entité ad hoc, créée à cette fin, il nous
semble que le dépositaire central est le gestionnaire le plus opportun. En tout état de cause, un
dépositaire central de titres est un pré-requis à l’efficience d’un tel système, et avec lui une
scripturalisation des livraisons des titres.
Un dépositaire central permet de contenir le risque de conservation, comme une contrepartie
centrale réduit le nombre d’opérations à dénouer.
Ensuite, le système doit s’appuyer sur la simultanéité des livraisons de titres et des règlements
espèces dans un délai, le plus court possible certes, mais surtout respecté par tous, pour
minimiser les risques de suspens, temporaires ou définitifs.
Enfin, au-delà des mécanismes de fluidification des dénouements, le règlement doit, dans la
mesure du possible, être effectué en monnaie centrale pour réduire au maximum le risque de
règlement.
Nous présentons donc, dans ce chapitre, l’apport d’un dépositaire central et d’une chambre de
compensation, puis abordons les prestations de base d’un système de règlement-livraison de
titres, à savoir la livraison contre paiement avec irrévocabilité des mouvements, mécanismes
de mises à disposition de titres et d’espèces, et règlement en monnaie centrale.
219
1. Le rôle d’un dépositaire central
Tel que présenté dans le chapitre II, un dépositaire central conserve les valeurs mobilières et
exécute les livraisons des titres pour le compte de ses participants 408.
Selon Hervo et Ros
409
, la fonction première d’un dépositaire central est d’ordre notarial et
consiste à enregistrer l’ensemble des titres existants et les opérations effectuées sur ces titres.
Grâce à ses relations avec les émetteurs de titres et avec les investisseurs, il s’assure à tout
moment que le nombre de titres présents sur les comptes des intermédiaires correspond au
montant des titres portés au compte de l’émetteur.
Il est donc teneur de comptes titres et ladite fonction, selon nous, peut s’assimiler à une
fonction régalienne telle celle pratiquée par les banques centrales pour les espèces depuis leur
création.
L’intérêt majeur d’un dépositaire central est celui de l’immobilisation des titres physiques,
parce qu’à défaut d’avoir dématérialisé les titres, une place financière sécurise ses procédures
de règlement-livraison avec un dépositaire central de titres : celui-ci assure, en effet, la
conservation des titres dans ses coffres, permettant alors une circulation scripturale des
valeurs mobilières. Outre une réduction des délais, cette forme de circulation et conservation
des titres évite tout risque de perte et diminue les coûts des activités marchés.
Comme le mentionne Galper 410, dans un monde interconnecté tel celui des marchés
financiers, une entreprise maîtrisant ses coûts, sa réglementation et son infrastructure attirera
de larges volumes. Ceci s’applique aux bourses et dépositaires centraux. En premier lieu, une
bourse doit faciliter les transactions à ses investisseurs, résidents et non-résidents. En second
lieu, elle doit être accompagnée d’un dépositaire central performant, à défaut, les opérateurs
traiteront leurs opérations post-bourse sur une autre place. Un dépositaire inefficient est
408
It is a facility (or an institution for holding securities) which enables securities transactions to be processed by
book-entry. Physical securities may be immobilized by the depositories or securities may be dematerialized. In
addition to safekeeping, a central securities depository may incorporate comparison, clearing and settlement
functions.
Group of Thirty, Global clearing and settlement – A plan for action, 2003
409
Hervo F., Ros T., Infrastructures post-marché et stabilité financière, Revue de Stabilité Financière, Banque de
France, Novembre 2002
220
d’ailleurs un obstacle à l’investissement des non-résidents et n’encourage pas les investisseurs
locaux 411.
Une place financière doit être en mesure d’offrir l’intégralité des prestations boursières et
post-boursières.
1.1 Un pré-requis indispensable pour un système de règlementlivraison efficient
A l’heure de l’informatisation totale des procédures post-bourse, un dépositaire central
apparaît comme une pierre angulaire de l’organisation et du fonctionnement de tout système
de titres. Sa mise en place permet, en effet, d’améliorer l’efficience et la sécurité de ce
système par le biais de l’immobilisation des titres chez lui plutôt que chez les investisseurs.
A en croire les statistiques présentées dans le tableau 1 412, les places financières ont, de fait,
compris l’enjeu de la création de dépositaires centraux permettant de faciliter la
scripturalisation des transferts de titres.
Tableau 1 : Dépositaires centraux dans le monde
Année
1950
1960
1970
1980
1990
1999
2000
•
410
Nombre de dépositaires centraux
2
3
7
13
28
102
122 *
dont 20 dépositaires en état de démarrage d’activité ou planifiés.
Galper J.I., Value Chain control in financial markets : Stock Exchanges and central securities depositories,
International Federation of Stock Exchanges Working Paper, April 2000
411
Till B., FIBV clearing and settlement best practices Report 1999, unpublished paper, 39th Annual FIBV
general assembly, Bangkok October 18, 1999 in Galper J.I., Value Chain control in financial markets : Stock
Exchanges and central securities depositories, International Federation of Stock Exchanges Working Paper,
April 2000
412
Guadamillas M., Keppler R., Securities clearance and settlement systems, a guide to best practices,
WorldBank April 2001
221
Et les statuts légaux de ces dépositaires diffèrent selon les places, comme le confirme le
tableau 2
413
.
Tableau 2 : Forme juridique des dépositaires dans le monde
Dépositaires dépendants de la bourse
30 %
Dépositaires dépendants de la Banque Centrale
20 %
Dépositaires exclusivement privés
15 %
Dépositaires sous forme de société à but non lucratif
15 %
Autres
20 %
Selon nous, un dépositaire central est donc un pré-requis indispensable à toutes prestations de
base d’un système de règlement-livraison efficace.
-
Il permet une centralisation des opérations post-bourse associant la conservation des titres
et les transferts consécutifs aux négociations gérés par une entité unique. Cette
centralisation est devenue d’autant plus opportune que, sur une même place, les
participants sont parfois membres de plusieurs chambres de compensation. Or, un défaut
de paiement d’un participant sur un marché peut se propager sur d’autres marchés via les
diverses chambres de compensation. Un dépositaire central peut, dans le cas présent,
limiter ces réactions en chaîne en proposant une immobilisation ou une collatéralisation
des titres faisant l’objet de transactions 414.
-
Il facilite l’automatisation des procédures, permettant de facto une réduction des délais et
des erreurs induites par les procédures manuelles ; la réduction du délai de dénouement
des transactions boursières passe, en effet, inévitablement par une circulation scripturale
des valeurs mobilières, donc par une inscription en compte des titres auprès d’une autorité
de tutelle habilitée ;
-
Indirectement, en facilitant le développement des opérations de prêts et emprunts de titres
415
et la collatéralisation, il accroît la liquidité du marché, donc l’efficience des systèmes
de trading et de règlement.
413
Galper J.I., Value Chain control in financial markets : Stock Exchanges and central securities depositories,
International Federation of Stock Exchanges Working Paper, April 2000
414
- Humphrey D.B., Sato S., Transforming payment systems (Meeting the needs of emerging market
economies), World Bank Discussion papers, 1995
- ECSDA, Report on DVP links between Ecsda members, September 1998
415
Environ un tiers des dépositaires centraux offrent cette prestation de prêt-emprunt de titres
222
Dans le cadre plus large de l’efficience des systèmes de paiement de gros montants, la
circulation scripturale des valeurs mobilières via un dépositaire
central est
indiscutablement essentielle à la flexibilité du système et à la technique de la
collatéralisation requise par une banque centrale 416.
-
Enfin, l’immobilisation des titres, voire leur dématérialisation
417
, élimine tout risque de
perte ou de vol des titres papier. Un dépositaire central dématérialise les titres ipso facto
parce qu’il permet, à défaut d’une suppression totale du support papier sur le plan
juridique, l’immobilisation desdits titres en les conservant dans ses coffres ; il enregistre
alors le nom des propriétaires sous une forme électronique. Perold
418
indique que
l’immobilisation des titres, avec la création du Central Certificate Service auquel a
succédé le Depository Trust Corp., a été un élément essentiel de la résolution de la crise
de back offices aux Etats-Unis à la fin des années soixante. Il va même au-delà en
précisant que l’absence d’immobilisation a été à l’origine de la crise du marché boursier
de Bombay en 1992. En effet, précise-t-il, cette crise a été provoquée par l’exploitation de
la part de certains opérateurs des délais importants dans la procédure de règlement dus à la
nécessité de livrer physiquement les titres.
Dans une étude relative à l’activité de global custody en France, Whiteley 419 explique qu’un
arbitrage est nécessaire entre rentabilité et coût de traitement, en prenant également l’exemple
du marché indien : En novembre 1994, 2 480 sociétés étaient cotées en bourse de Bombay.
Pourtant aucune exigence particulière de solidité financière n’existait pour les 629 brokers.
Plus encore, il n’y avait pas de dépositaire central.
En conséquence, le dénouement s’opérait en deux temps durant la semaine qui suivait la fin
de la transaction. Les dates de paiement et de réception des fonds (procédure de règlement)
étaient déterminées par les brokers et la bourse, et pouvaient être modifiées jusqu’à la veille
de la date prévisionnelle de dénouement. Aussi la date de règlement pouvait-elle s’établir
jusqu’à 37 jours après le début de la période de dénouement ! Enfin les frais de dénouement
pouvaient s’élever à 500, voire 600 $ par opération.
416
Folkerts-Landau D., Garber P., Schoenmaker D., The Reform of wholesale payment systems, Finance &
Development, June 1997
417
La plupart des places financières n’ont pas dématérialisé leurs titres pour des raisons légales, et non pas
opérationnelles : leurs lois définissent, en effet, les valeurs mobilières comme des « documents » ou assimilés
qui requièrent donc l’existence d’instruments tangibles.
International securities services association, Recommendations 2000 – Status Report 2001
418
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Perold F., Sirri R., Tufano P., La finance sans frontière,
Economica 1998
419
Whiteley M., Global custodians en France : des progrès à faire, Revue Banque n°558, avril 1995
223
Cet exemple nous démontre qu’en l’absence d’un dépositaire central, les procédures de
dénouement sont particulièrement lourdes et onéreuses.
L’immobilisation des titres auprès du dépositaire central ou leur dématérialisation, en
permettant une livraison scripturale, apporte des économies d’échelle ou, tout simplement,
des économies induites par l’automatisation des procédures
420
. En réduisant les coûts et en
améliorant la vitesse et l’efficience du règlement, les livraisons scripturales peuvent
également aider au développement des opérations de prêt-emprunt de titres ou pensions.
Rappelons que ces prestations améliorent la liquidité des marchés et facilitent l’utilisation de
la collatéralisation, outil de gestion du risque de contrepartie.
En atteste l’introduction d’un système de livraisons scripturales à la Federal Reserve Bank,
pour les valeurs du Trésor, qui a permis des économies d’échelle considérables : une
augmentation de 10% des volumes de transactions impacte les coûts de traitement à hauteur
de + 6,5% seulement 421. Mishkin 422 remarque également que la scripturalisation des valeurs
du Trésor américain, dès 1976, a permis de limiter les coûts de transfert sur le marché
secondaire et le coût d’émission sur le marché primaire.
De la même manière, Hancock et Humphrey
423
, étudiant l’impact des changements
technologiques dans les systèmes de paiement américains, remarquent des effets d’échelle
similaires : des études (Bauer et Hancock 1995, Bauer et Ferrier 1996
424
) démontrent que,
pour le système ACH – Automated Clearing House, utilisant la méthode des batchs, une
hausse de 10 % des volumes n’induit qu’une hausse de 4.8 % des coûts de productions ; en
conséquence ledit système a enregistré une baisse annuelle des coûts de 10 %, entre 1989 et
1998, tandis que Fedwire enregistrait une même diminution à hauteur de 8 % par an les
premières années de la décennie quatre-vingt-dix. En effet, le développement des chambres de
420
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for securities settlement systems,
January 2001
421
Belton T.M. 1984, Economies of scales in book-entry securities, Financial Studies Section, Board of
Governors of the Federal Reserve System
422
Eakins S.G., Mishkin F.S., Financial Markets and institutions, Addison-Wesley 1999
423
Hancock D., Humphrey D. B., Payment transactions instruments and systems : a survey, Journal of Banking
& Finance, 1998
424
Bauer P. W., Hancock D., Scale economies and technological change in Federal Reserve ACH payment
processing, Federal Reserve Bank of Cleveland Economic Review 31, 1995
Bauer P.W., Ferrier G.D., Scale economies, cost efficiencies and technological change in Federal Reserve
payments processing, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
224
compensation a permis d’accélérer les transferts électroniques et, donc de diminuer les coûts :
en 1995, le coût de traitement d’un paiement par ACH s’élevait à 1.4 cents par transaction
(contre 2.5 pour un chèque). Les auteurs concluent que près du tiers de la baisse du coût réel
unitaire, enregistrée entre 1989 et 1994, peut être attribuée aux changements technologiques.
Les dépositaires centraux gèrent généralement plusieurs types de valeurs mobilières et
proposent différents services. Ils permettent donc des économies d’échelle et de gamme 425.
La circulation scripturale des valeurs mobilières est donc un pré-requis indispensable à la
réduction du cycle de règlement-livraison qui, elle-même, réduit le risque du coût de
remplacement ; elle facilite, de plus, la mise en place des livraisons contre paiement,
permettant d’éliminer le risque en principal 426.
Enfin un dépositaire central permet de diminuer le risque de règlement en remplissant
éventuellement le rôle d’une chambre de compensation.
Humphrey et Sato
427
ont représenté l’intervention d’un dépositaire central dans le cycle de
paiement comme indiqué dans le schéma 1.
425
Giddy I., Saunders A., Walter I., Alternative models for clearance and settlement : the case of the single
European capital market, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
Le lecteur se reportera au paragraphe relatif à la contrepartie centrale pour de plus amples développements sur
les économies d’échelle et de gamme.
426
Cf. § 3 de ce même chapitre.
427
Humphrey D.B., Sato S., Transforming payment systems (Meeting the needs of emerging market economies),
World Bank Discussion papers, 1995
225
Schéma 1 : Cycle de paiement et dépositaire central
Vendeur
Dépositaire
Acheteur
Transfert de propriété
Crédit
espèces
(3)
Système de paiement de gros montant
Réseau informatique
Débit
espèces
Banque
centrale
Le dépositaire permet, d’une part, de minimiser les risques liés aux opérations de règlementlivraison en adoptant des règles et des procédures de livraison contre paiement, et remplit,
d’autre part, le rôle d’une chambre de compensation, compense et transmet le mouvement
espèces au système de paiement de la Banque centrale (si ledit dépositaire est une banque
habilitée à gérer le système de paiement, il procède lui-même au règlement de la transaction).
Généralement, la mise en place d’un système de netting et de livraison contre paiement repose
sur deux organismes 428:
-
la chambre de compensation qui offre un netting des ordres d’achat et de vente,
accompagné souvent d’une prestation d’ajustement,
-
le dépositaire central qui permet une immobilisation ou une dématérialisation des titres et
des espèces 429.
En intégrant des systèmes ad hoc, le dépositaire peut assurer à ses participants l’irrévocabilité
des transferts par la technique de la livraison contre paiement.
428
Gilbert A., Gollob E., Hargraves L., Mead R., Parkinson P., Stehm J., Taylor M.A., Clearance and settlement
in U.S. securities markets, Staff Studies Federal Reserve Bulletin Fall 1991
429
Outre les gains de productivité qui peuvent en être retirés, la dématérialisation est un préalable indispensable
à la mise en œuvre de dispositifs de prévention des titres.
Trichet J.C, Le système de paiement français, Bulletin de la Banque de France, décembre 1994
226
1.2 Un exemple d’inefficience lié à l’absence d’un dépositaire
central de titres
Les suspens en bourse de Paris sur valeurs non admises en Euroclear
France 430
Si la quasi-totalité des valeurs cotées en Bourse de Paris est admise aux opérations
d’Euroclear – France, il en existe, cependant, quelques-unes unes non concernées par la
normalisation et la standardisation des procédures de règlement-livraison. C’est le cas de
certaines valeurs françaises proposées sur le compartiment des valeurs radiées du Marché
Libre 431 et de quelques valeurs internationales.
Malgré leur faible activité, ces valeurs sont pourtant susceptibles de générer de nombreux
suspens. Une première enquête du Conseil des Marchés Financiers
432
et de la Commission
Bancaire, entreprise en 1998 auprès d’un échantillon d’établissements financiers, a conclu que
plus de 90 % des suspens supérieurs à 8 jours émanaient de valeurs non admises en Sicovam.
En conséquence, il a été décidé, par les autorités de tutelle, de recenser l’ensemble des
suspens de dénouement sur lesdites valeurs.
L’enquête a porté sur les négociations en bourse intervenues avant le 01.04.1999 et non
dénouées en date du 20.04.1999, pour l’ensemble des valeurs françaises et pour les valeurs
étrangères dont les suspens dépassaient 2 000 euros.
221 réponses au total ont été enregistrées (y compris celles des intermédiaires n’ayant pas de
suspens à déclarer) donnant les résultats suivants :
3635 déclarations de suspens, concernant 60 prestataires conservateurs, pour 167 valeurs.
L’ensemble représentait alors 2381 suspens pour un montant global de 17,3 millions €.
430
Riou Y., Traullé B., Enquête de l’inspection du CMF sur les suspens de dénouement relatifs aux valeurs non
admises en Sicovam, Revue CMF n°23, novembre 1999
Riou Y., Traullé B., L’apurement des suspens de valeurs non admises chez le dépositaire central Sicovam SA,
Revue CMF n°34, janvier 2001
431
ex « Hors-cote »
432
Devenu l’Autorité des Marchés Financiers en décembre 2003, suite à sa fusion avec la Commission des
Opérations de Bourse
227
Les déclarations transmises au CMF émanaient de 35 établissements de crédit, pour 976
déclarations, et de 25 entreprises d’investissement, pour 2659 déclarations ; la part
considérable de ces dernières s’explique par leur position dans le circuit des transactions (elles
sont, en effet, pour une même négociation, en position de contrepartie à la fois d’un
établissement de crédit et d’une autre entreprise d’investissement).
L’appariement général des suspens décelés a montré que 70% des opérations étaient
identifiées de la même façon par les deux parties de la transaction, mais 30% des suspens
étaient non reconnus par la contrepartie de marché.
L’examen des valeurs concernées par ces suspens a fait ressortir une forte concentration du
nombre de transactions, et plus encore, des capitaux en jeu, sur les actions de la Banque des
Règlements Internationaux (BRI), comme l’atteste le tableau 3.
Tableau 3 : Etat des suspens sur la place de Paris
Nombre de suspens
en capitaux
en K€
BRI
919 (39%)
11 825 (68%)
Autres valeurs étrangères
445 (19%)
1 473 (9%)
Valeurs françaises
1 017 (42%)
4 005 (23%)
L’importance des suspens BRI s’expliquait à la fois par la valeur de négociation des titres et
par des contraintes statutaires qui pèsent sur le circuit de règlement-livraison. Ces actions sont
nominatives et ne sont libérées qu’à hauteur du quart du capital, les acheteurs étant soumis au
droit d’agrément de l’émetteur dont les registres sont tenus à Bâle. En outre la Banque de
France doit, préalablement à la transmission des bordereaux de transfert, valider la transaction
après enquête de solvabilité sur la personne de l’acheteur.
Les autres valeurs étrangères concernées, pour plus de 90% des capitaux en suspens, sont 4
valeurs marocaines (2 radiées et 2 dont la cotation avait été suspendue), et 3 valeurs suisses
radiées.
Pour les valeurs françaises, la moitié des capitaux concernait les deux titres les plus actifs de
l’époque (ABC Arbitrage pour 35% et Caapaction pour 15%), auxquels il convenait de
rajouter les titres « La Voix du Nord » (16%), dont les transactions avaient été réalisées une
228
dizaine d’années auparavant mais non encore dénouées, à l’époque de l’enquête, pour cause
de caractère litigieux.
L’ancienneté moyenne des suspens sur valeurs françaises était d’environ 1 mois (sauf pour La
Voix du Nord), celle des titres BRI était de 5 mois, et celle des autres valeurs étrangères de 6
mois environ.
En conclusion de cette enquête, le CMF a requis :
-
la poursuite des travaux de résorption des suspens,
-
l’amélioration des procédures et des délais de dénouement : modernisation du circuit des
ordres de mouvement, mise en œuvre de la dématérialisation des valeurs marocaines,
réexamen des procédures de règlement-livraison des titres BRI
433
, fixation de délais de
dénouement pour chaque catégorie de valeurs, adaptation des procédures de rachat
applicables à ce type de valeurs.
Au 30 novembre 1999, soit 7 mois après cette enquête, le CMF a procédé à un second
recensement (tableau 4).
Celui-ci a concerné toutes les valeurs françaises et valeurs étrangères marocaines et suisses,
sans montant minimal de transactions, dont les dates de négociations étaient inférieures au
01.09.1999.
Les résultats ont été les suivants : 168 (contre 224 au premier recensement) prestataires
teneurs de comptes – conservateurs ont répondu, pour 77 valeurs (contre 167) , 1909 suspens
(contre 2381) totalisant 16.6 millions € (contre 17,3 millions €).
L’analyse des données doit prendre en compte les éléments différant entre les deux
recensements (champ des prestataires consultés et des valeurs demandées plus restreint).
Au total, les déclarations émanaient de 132 établissements de crédit et de 36 entreprises
d’investissement. L’appariement des suspens déclarés par les acheteurs et vendeurs a montré
que 73% des opérations étaient identifiées de la même façon par les deux parties.
433
Les délais nécessaires à la livraison des titres BRI ne correspondent pas aux normes en vigueur pour les
marchés réglementés.
229
Tableau 4 : Résultat du second recensement
Nombre de
suspens
Suspens
totaux
Suspens
appariés
Suspens
restants
Ancienneté
des suspens
Valeurs françaises
Montants
%
K€
3 486
100
Valeurs BRI
Montants
%
K€
12 081
100
Autres valeurs françaises
Montants
%
K€
1 091
100
2 538
73
8 175
68
620
57
948
27
3 906
32
471
43
Nombre de suspens sur
valeurs françaises
Nombre de suspens sur
valeurs BRI
Nombre de suspens sur
valeurs étrangères
(hors Voix du Nord)
Total
Juin à
septembre
1999
Janvier à
mai 1999
Antérieurs
à décembre
1998
510
100
884
100
353
100
301
60
511
58
22
6
106
20
176
20
12
4
103
20
197
22
319
90
L’ancienneté moyenne d’un suspens sur une valeur française et sur la valeur BRI était
comprise, en général, entre 3 et 6 mois ; les suspens sur valeurs marocaines et suisses étaient
essentiellement antérieurs au 31 décembre 1998, notamment parce que les valeurs marocaines
avaient été suspendues de cotation en Bourse de Paris.
Les suspens BRI étaient, en novembre 1999, en légère progression par rapport à l’enquête
précédente. Par un communiqué du 11 septembre 2000, la BRI a annoncé un projet de reprise
de 72 % du montant total des suspens sur valeurs non admises en Sicovam (contre 68
précédemment), la totalité des actions détenues par ses actionnaires privés sur les Places de
Paris et Zurich, et leur retrait de cotation. Cependant, les suspens en cours devaient faire
l’objet d’un apurement.
Notons qu’au début 2002
434
, 200 anciens actionnaires de la BRI ont assigné la Banque en
justice, procédure également dirigée contre la Banque de France et J.P. Morgan, considérés
comme à l’origine du retrait forcé des actionnaires de la BRI. Cette dernière a, en effet,
modifié ses statuts en janvier 2001 : les minoritaires ont reçu une offre de 16 000 francs
230
suisses par action à ce titre. Ce montant a été considéré comme spoliateur et les minoritaires
requièrent une indemnité de 30 millions €.
Pour les valeurs françaises, les suspens ont eu tendance à diminuer. 672 suspens pour
3.486.000 € (contre 1017 pour 4 millions € auparavant). Sur cet encours, 162 suspens pour
1.731.000 € sont imputables à La Voix du Nord, qui ont, depuis lors, été régularisés.
Pour les valeurs étrangères, les valeurs suisses étaient en recul quant à leurs capitaux en
suspens pour un tiers ; les valeurs marocaines ont fait l’objet d’une résorption de 17 % des
suspens en capitaux. Mais, compte tenu de la dématérialisation des valeurs sur la Place
marocaine, la Bourse de Paris a suspendu les cotations des valeurs concernées le 22 mars
1999. Depuis le 4 septembre 2000, Euroclear – France est affiliée à Maroclear admettant, de
facto, une valeur à ses opérations. Pour les autres valeurs, les prestataires français devaient
désigner un correspondant au Maroc, participant de Maroclear, à qui remettre les titres vifs
pour inscription et livraison scripturale auprès du dépositaire central en faveur du
correspondant de la contrepartie à qui ils doivent les titres.
Ces exemples ont été pris pour démontrer qu’en l’absence d’un dépositaire central teneur de
comptes titres, les livraisons de titres consécutives aux négociations boursières engendrent
non seulement des suspens de dénouement colossaux, mais également des risques de nonlivraison.
Cette conclusion est corroborée par l’avantage d’une dématérialisation des titres promulguée
par un dépositaire central (tel celui du Maroc). Celui-ci permet des livraisons scripturales sur
un plan domestique, mais facilite également la circulation internationale des titres (et donc la
multi-cotation des valeurs) par le biais d’accord entre dépositaires nationaux.
Enfin, remarquons l’exemple de la bourse russe, qui nous semble quant à la nécessité de créer
un dépositaire central
435
: Le développement du marché financier russe s’est, au départ,
essentiellement focalisé sur l’activité front – office, négligeant alors les activités de
dépositaire et d’enregistrement des titres. En conséquence, le personnel des banques
conservatrices devait voyager dans le pays, voire à l’étranger, pour procéder à
434
435
Les Echos du 8 janvier 2002
Lawrence B., A central European diary, Central European, March 1998
231
l’enregistrement des titres achetés en bourse, ce qui pouvait prendre plusieurs semaines.
Aussi, la plus grande banque domestique russe, Unexim, à chercher à créer un dépositaire
central gérant un système de règlement-livraison afin de réduire le délai de règlement des
transactions boursières et, de facto, de réduire les coûts de transfert, qui pouvaient s’élever
jusqu’à 250 $.
Depuis lors, un dépositaire central a été créé, sous le nom de DCC – Depository Clearing
Company, agissant comme agent de transfert et gérant un système de clearing et règlement
pour les titres cotés sur le RTS – Russian Trading System. En conséquence, les coûts de
transaction ont baissé de moitié en un an et les frais de conservation d’environ 10 à 20 points
de base 436.
1.3 Le dépositaire central doit-il être en situation de monopole ?
Historiquement, les dépositaires centraux ont été créés sous la forme d’un monopole légal en
vue de gérer la livraison des titres sur leurs livres tandis que, sur la plupart des places, les
espèces continuaient d’être réglées en banques centrales. Il est incontestable, au vu des
éléments évoqués ci-dessus, qu’ils ont nettement contribué au développement de l’efficience
économique des marchés concernés par le biais d’effets d’échelle et de réseaux.
Ces dépositaires sont désormais connectés aux systèmes de clearing et de règlement, menant
de facto à une intégration verticale des services boursiers et post-boursiers, permettant alors
aux intermédiaires financiers de bénéficier d’une amélioration de la compétitivité, basée sur
des prestations meilleures à moindre coût.
Un dépositaire central et un système de règlement-livraison de titres sont, de facto, des
infrastructures incontournables pour l’exécution des opérations de post-marché. Les
dépositaires centraux sont donc en position de monopole naturel 437.
La création d’un système de règlement-livraison nécessite en effet :
436
Leighton O., Your shares in their hands …, Central European, March 1998
Un monopole naturel se traduit par la situation d’une entreprise dont le coût de production est toujours
inférieur à la somme des coûts de production de deux ou plusieurs entreprises qui produiraient ensemble la
même quantité qu’elle.
437
232
-
la conclusion d’accords, en amont, avec une ou plusieurs bourses et chambres de
compensation, et, en aval, avec un ou plusieurs dépositaires centraux et banques centrales,
-
des investissements importants financés par les utilisateurs,
-
un important laps de temps (Relit a démarré, en tant que projet, en 1987 et n’a démarré,
sur le plan opérationnel, qu’en 1990, 1991).
En outre, un tel système requiert, pour ses utilisateurs, une obligation d’accès au réseau et
l’inter connectivité, l’exigence de qualité de services et une accessibilité tarifaire.
Cependant, afin de ne pas tomber dans les défauts des situations de monopole, un dépositaire
central doit être doté d’une réglementation spécifique afin qu’il n’abuse pas de sa position
monopolistique en matière d’innovation et de coût.
Aussi faut-il veiller à ce que trois conditions nécessaires au développement des innovations
soient réunies 438 :
-
la contestabilité du marché 439 (qui dépend essentiellement de la technologie),
-
le mode de gouvernance (qui permet d’assurer aux utilisateurs que le prestataire prendra
systématiquement en compte leurs besoins),
-
le mécanisme de régulation (qui permet de maximiser le profit pour l’ensemble des
acteurs d’une place).
On constate donc que les activités de règlement-livraison ont subi une tendance vers la
consolidation des infrastructures commandée par des externalités positives, des économies
d’échelle et de gamme, et un besoin de standardisation 440.
Carlton W. D., Perloff M.J., Economie industrielle, De Boeck Université 1998
438
- The issue of pressure to innovate arises to the extent that the consolidation process leads towards monopoly –
like situations in the provision of clearing and settlement services.
In a unregulated monopoly, there is a serious risk that a single provider would abuse its dominant position to the
detriment of its members. In a monopoly, the incentive for investing in innovation would depend on three main
factors. First, the constestability of the market which, in turn, depends on the dominant technology. Second, the
existence of appropriate governance mechanisms to ensure that owners and management of systems take into
account the need of the users of the system. Third, effective regulatory mechanism that put fair constraints on
pricing policy and profit maximisation.
Giovannini Group, Second report on EU clearing and settlement arrangements, Brussels April 2003
- Entities holding securities in custody should employ accounting practices and safekeeping procedures that
fully protect customers’ securities. It is essential that customers’ securities be protected against the claims of
a custodian’s creditor.
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for securities settlement systems,
January 2001
439
Un marché est contestable si l’entrée et la sortie sont libres.
440
Payment systems may share the characteristics of a variety of economic networks, and as such their value to
users and participants may increase as more users are attracted. Standardisation has helped to avoid
233
Une externalité positive, ou économie externe, est une action qui engendre des bénéfices pour
d’autres agents économiques que son auteur.
Le clearing et les règlements bénéficient d’externalités issues de la mise en place d’une masse
critique qu’un système centralisé peut offrir : sur le long terme, un ou plusieurs systèmes
peuvent dominer le marché, amenant de facto une maximisation du netting. Tandis qu’un
nouveau participant utilisera les services d’une contrepartie centrale, il bénéficiera des
services existants, en offrant une opportunité supplémentaire à la compensation ou au
dépositaire central 441.
On parle d’économie d’échelle lorsque le coût moyen baisse quand la production augmente.
Les activités de clearing et de règlement-livraison sont incontestablement propices à de telles
économies : elles reposent, en effet, sur la technique du « data processing », donc insensibles
à la hausse d’activité. Ceci est d’ailleurs corroboré par les statistiques bancaires qui
démontrent que la conservation des titres repose sur une gestion quantitative des données,
s’assimilant, de facto, à de l’industrie bancaire lourde 442.
En attestent les chiffres des acteurs mondiaux (Tableau 5).
fragmentation of payment systems in some countries. Standards can have a number of positive effects on
efficiency and competition.
Tresoldi C., Report on the activity of the CPSS Working Group on retail payment system,
Bank for International Settlements, The contribution of payment systems to financial stability, May 2000
441
Hills B., Rule D., Parkinson S., Young C., Central counterparty clearing houses and financial stability,
Financial Stability Review, Bank of England, 1999
442
Le métier de conservation de titres est le prototype d’une activité de back-office, car c’est un métier de
logisticien d’actifs financiers. A cette fin, il faut être capable à tout moment d’assurer la traçabilité auprès du
client. Dans cette activité, la capacité de faire baisser les coûts grâce à la maîtrise des systèmes d’information
travaillant sur des masses croissantes de titres constitue un avantage compétitif majeur. A l’échelle mondiale, les
cinq premiers acteurs représentent 80 % de l’activité, et la taille critique s’établit à 2000 milliards de dollars.
Perthuis (de) C., Internet et industrialisation des métiers financiers : les implications stratégiques, Revue
d’Economie Financière n°69, mars 2003
Et Perdrix M. nous parle d’industrie pour la gestion des moyens de paiement en France car le niveau des
investissements est important. Il note cependant que cette industrie ne fonctionne pas selon la logique du prix de
marché et n’équilibre pas globalement ses coûts car les charges comme les seuils d’investissement sont très
élevés et loin d’être équilibrés par les recettes directes dans un environnement fortement concurrentiel et exposé
à la désintermédiation. (Perdrix M., Modernisation de la gestion des moyens de paiement, Revue d’économie
financière 1996). Ce principe, selon nous, et compte tenu des coûts d’investissement des autorités et des
intermédiaires dans les systèmes déjà abordés plus haut, peut s’appliquer aux activités post-bourse.
234
Tableau 5 : Acteurs mondiaux de la conservation
Rang
Banques
Actifs totaux
Parts de marché
(en milliards $)
(en %)
1
Bank of New York
6.775
15
2
JP Morgan
6.700
15
3
State Street
6.200
14
4
Citibank N.A.
5.400
12
5
Deutsche Bank
3.661
8
Source : Globalcustody.net 2003
Une économie de gamme résulte de la demande des clients en faveur d’un large éventail de
produits et services à un coût relativement peu élevé. Deux marchés boursiers ou systèmes de
règlement de titres intégrés sont ainsi en mesure de développer de nouveaux produits et
services à un coût unitaire moindre que s’ils agissent seuls
443
. Un processus d’intégration
permet d’offrir une large gamme de services sans que les clients aient besoin de mettre en
place différentes interfaces et procédures pour avoir accès à différents marchés.
Globalement, il est possible d’affirmer qu’il y a économie de gamme dans la gestion des
moyens de paiement lorsque le total des coûts de gestion de deux ou plusieurs instruments de
paiement est inférieur à la somme des coûts de gestion, à volumes identiques, de chaque
instrument pris individuellement. Ces économies de gamme ont alors deux sources possibles :
en premier lieu, les coûts fixes de gestion d’un instrument peuvent être étendus à la gestion
d’autres instruments (par exemple, si les ordinateurs dédiés à la gestion d’un instrument ne
sont pas saturés, ils peuvent gérer d’autres instruments) ; en second lieu, les coûts de
production réunis peuvent être minimisés si les charges variables sont partagées lors de
l’utilisation des ressources informatiques, par exemple, pour différents instruments 444.
Il nous semble possible d’étendre cette notion développée par Humphrey et al. aux opérations
de règlement-livraison de titres : Le rapport Giovannini de 2001
445
fait ressortir un coût
relativement élevé des règlements externes des centrales de clearing internationales lorsque
443
Bulletin mensuel de la BCE, février 2000
Humphrey D.B., Keppler R., Montes-Negret F., Cost recovery and pricing of payment services : theory,
methods and experience, World Bank August 1997
445
Giovannini Group, Cross-boarder clearing and settlement arrangements in the European Union, Brussels
November 2001
444
235
les volumes de transactions sont faibles. Selon ce groupe de travail, ce phénomène serait dû
aux économies d’échelle dans le processus de règlement-livraison 446.
Les dépositaires centraux, créés souvent avec un monopole légal, ont contribué à l’efficience
économique des marchés grâce à ces effets d’échelle et de réseaux
447
. Aujourd’hui, ces
dépositaires sont connectés aux systèmes de trading, clearing et règlement, avec des capitaux
souvent mis en commun. Les économies de gamme 448 sont alors incontestablement possibles.
Elles dérivent du besoin d’offrir aux intermédiaires des prestations de trading, clearing et
règlement de façon séquentielle. Elles seront donc possibles s’il y a intégration verticale tout
au long de la chaîne de valeur des transactions. Cette intégration minimisera les coûts et les
risques par rapport à la multiplication des dépositaires et systèmes aux standards différents,
voire incompatibles. Cependant, les autorités doivent, lors d’une intégration verticale, veiller à
limiter les externalités négatives. Celles-ci peuvent, en effet, se traduire par un accroissement
du risque systémique (un réseau unique est source de contagions), ou par un abus de
l’institution en situation de monopole (baisse de la compétitivité et donc hausse des tarifs des
prestations) 449.
Dans le cadre de sa réflexion sur une contrepartie centrale, la Banque Centrale Européenne 450
s’est penchée sur la question du monopole naturel de l’activité de compensation, afin,
notamment, d’éviter aux intervenants et utilisateurs de devoir financer plusieurs
infrastructures de marché identiques sur différentes places financières. Aussi préconise-t-elle
une contrepartie multidevises et multi-produits, arguant qu’une marge sur une position longue
446
Une approche tarifaire élaborée par le groupe de travail Giovannini est présentée à la fin du chapitre présent
(tableau 23).
447
The economies of scale are such that it’s possible to envisage all european volume going over one
infrastructure, similar to the Depository Trust & Clearing Corp. But it also useful to look at the U.S. experience
to see why this is not likely to be achievable in Europe in the immediate future. There, the contribution of
clearing and settlement systems to total revenue of their affiliated exchanges ranged from around 11 percent to
over 50 percent.
Cruickshank D., What’s the future of clearance, settlement in the european mart ?, Securities Industry News,
05.07.2001
448
Padoa-Schioppa T., Clearing and settlement of securities : a European perspective, Speech at the Symposium
of the Deutsche Bundesbank, 5 September 2001
449
Hart L.T., Russo D., Schönenberger A., The evolution of clearing and central counterparty services for
exchange-traded derivatives in the United States and Europe : a comparison, European Central Bank Occasional
Paper Series N°5, September 2002
450
Le processus de consolidation de la compensation avec contrepartie centrale dans la zone Euro, Bulletin
mensuel de la BCE, août 2001
236
dans un contrat à terme sur obligations pourrait, par exemple, être compensée par une marge
sur une position courte correspondante sur le marché au comptant des obligations 451.
A ce niveau de l’analyse, elle s’interroge alors sur le problème du monopole naturel de
l’activité de compensation. Si une structure unique permet de maximiser les effets réseaux et
les économies d’échelle, il convient cependant de ne pas négliger les effets négatifs du
monopole, à savoir les manques de dynamisme et d’innovation.
Elle étudie alors les modèles de concentration et les applique aux activités de compensation et
de règlement-livraison.
Les cinq modèles sont présentés dans le schéma 2.1 à 2.5 .
451
Le lecteur se reportera au paragraphe relatif aux chambres de compensation et les problèmes soulevés par la
multiplicité des chambres lors du krach de 1987.
237
Schéma 2 : Modèles de concentration appliqués
aux activités de compensation et règlement-livraison
Schéma 2.1 : Modèle 1 – silos
Négociation
Négociation
Négociation
Contrepartie
centrale
Contrepartie
centrale
Contrepartie
centrale
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Schéma 2.2 : Modèle 2 – concurrence parfaite
Négociation
Négociation
Négociation
Contrepartie
centrale
Contrepartie
centrale
Contrepartie
centrale
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Schéma 2.3 : Modèle 3 – totale intégration
Négociation
Contrepartie
centrale
Système de règlement de titres
Schéma 2.4 : Modèle 4 – contrepartie centrale unique
Négociation
Négociation
Négociation
Contrepartie
centrale
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Système de
règlement
de titres
Schéma 2.5 : Modèle 5 – traitement totalement intégré après négociation
Négociation
Négociation
Négociation
Contrepartie
centrale
Système de
règlement
de titres
238
239
Reprenons, un à un, les modèles du schéma 2.
Le premier modèle (schéma 2.1) représente la situation telle qu’elle se dégage actuellement :
la concentration s’effectue autour d’un petit nombre de « silos » offrant des services intégrés
de négociation, compensation et règlement. A court terme, ces silos facilitent le traitement
automatisé (règlement de bout en bout), mais à long terme, ils sont susceptibles de pérenniser
les inconvénients liés à la solution de monopole (absence de concurrence) et à la
fragmentation (économies d’échelle réduites).
Le deuxième modèle (schéma 2.2) présente une situation dans laquelle des chambres de
compensation seraient créées dans de nombreux pays, mais où les intervenants de marché
pourraient choisir librement l’infrastructure qu’ils souhaitent utiliser pour leurs opérations de
négociation, de compensation et de règlement. En théorie, ce modèle permettrait à la
concurrence de s’exercer de manière efficace. Toutefois, sa mise en œuvre serait très
coûteuse, parce qu’elle entraînerait une multiplication du nombre des infrastructures. Les
coûts d’utilisation seraient élevés en raison du caractère limité des économies d’échelle. Ces
coûts pourraient même s’accroître encore du fait d’une normalisation insuffisante et du
nombre des interfaces requises. En tout état de cause, ce modèle risque de ne pas être stable
sur le moyen terme parce que les mécanismes du marché élimineraient sans doute rapidement
certains éléments de cette infrastructure complexe.
A l’autre extrême, le troisième modèle (schéma 2.3) correspond à une totale intégration
452
à
tous les niveaux (négociation, compensation et règlement), par le biais d’un organisme unique
desservant l’ensemble de la zone Euro. Cette solution serait la plus avantageuse en termes
d’économies d’échelles et de synergies de réseaux. Toutefois, ce modèle présenterait les
inconvénients classiques des situations de monopole. Il n’y aurait ni liberté de choix pour les
utilisateurs, ni concurrence.
Un quatrième modèle (schéma 2.4) résulterait d’une situation dans laquelle il n’y aurait
d’intégration horizontale qu’au niveau de la compensation par une contrepartie centrale, c’est452
Ledit modèle s’apparente à la technique du straight through processing, pratiquée chez certains
intermédiaires financiers, qui consiste en une intégration complète des chaînes de traitement des opérations,
depuis la salle des marchés et la négociation jusqu’au service post-marché et au dénouement des transactions.
Les raisons évoquées pour ce type d’organisation sont la réduction des coûts et des risques opérationnels, la
diminution des délais de traitement des opérations et l’amélioration du contrôle des opérations.
Source : Fouquet F., Haas F., Impact des mutations technologiques sur les marchés de gré à gré, Bulletin de la
Banque de France n°86, février 2001
240
à-dire là où les synergies de réseaux et les économies d’échelles sont supposées être les plus
importantes. La concurrence serait maintenue aux niveaux de la négociation et du règlement.
Enfin, si les possibilités d’économies en termes de coûts étaient identiques au niveau de la
compensation et du règlement, le cinquième modèle (schéma 2.5) pourrait être
l’aboutissement du processus de concentration. Il décrit une situation caractérisée par une
pleine intégration de la compensation et du règlement tout en préservant la concurrence au
niveau de la négociation.
Globalement, une consolidation des organismes de compensation et / ou des systèmes de
règlement-livraison permet de diminuer certains coûts, mais cette réduction de coût diffère
selon le mode de concentration choisi 453, et présente un coût qu’il convient de comparer face
aux bénéfices attendus
454
. Des économistes du Federal Reserve System
455
se sont penchés
sur les économies de coûts liées aux fusions, en prenant l’exemple de la zone euro.
Leur réflexion est synthétisée dans le tableau 6.
Pour un développement plus complet, le lecteur se reportera au paragraphe 3 du chapitre présent.
453
For vertical integration, since trading, clearing and settlement occur within the same organisation, this reduces
legal and operational risks. But, vertical integration may entail cross-subsidies, which disguise the effective costs
of trading, clearing and settlement. In addition, this model may also tend to rely on rents, as it is impossible for
users to switch between providers.
Horizontal integration, however, allows users to select between interlinked providers, exposing them to ongoing
competition.
Gehrig B., Economic Environment Future flows, International securities services association, The New
Securities Lanscape, 11th International Symposium, June 2002
454
En 1998, la Banque d’Angleterre s’est penchée sur l’opportunité de fusionner les systèmes de règlementlivraison CMO (obligations) et Crest (Actions). L’étude a estimé le coût de cette opération, pour les
intermédiaires, entre 0 et 100 000 £, avec un coût moyen attendu de 30 000 £. A long terme, ces intermédiaires
en tireraient des avantages significatifs, notamment en termes de coûts de développement, mais l’étude s’est
gardée de toute évaluation de ces avantages. Depuis lors, les systèmes ont fusionné et ont été intégré dans le
système Euroclear.
Bank of England, Securities Settlement Priorities Review, September 1998
455
Goldberg L., Kambhu J., Mahoney J.M., Radecki L., Sarkar A., Securities trading and settlement in Europe :
Issues and outlook, Federal Reserve Bank of New York, April 2002
241
Tableau 6 : Economies potentielles de coûts dans les opérations de consolidation dans le
clearing et le règlement
Formes de
consolidation
Contrepartie centrale
paneuropéenne
Liens bilatéraux entre
dépositaires
Fusions de dépositaire
Fusions de bourse
(*)
Economies de coûts
Directe
Indirecte
Economies de coût
(tout compris)
Basses
Moyennes
Moyennes
Basses
Moyennes
Basses
Elevées
Elevées
Elevées
Potentiellement, les
plus élevées (*)
Potentiellement, les
plus élevées (*)
Potentiellement, les
plus élevées (*)
si des fusions de bourses déclenchent des fusions de dépositaires, les coûts totaux de règlement-livraison sont
réduits et la gestion des transactions rendue plus efficiente.
Une contrepartie centrale paneuropéenne permettrait de réduire les frais de transaction. La
mise en place de liens bilatéraux entre dépositaires permettrait certes de minimiser le nombre
d’intermédiaires à rémunérer pour l’investisseurs, mais ne réduirait pas considérablement les
coûts globaux compte tenu des coûts de maintenance des infrastructures. La fusion des
dépositaires permettrait, outre de faciliter les transactions transfrontalières et de minimiser les
risques liés à la non – synchronisation des délais de règlement, de réduire l’ensemble des
coûts, directs et indirects, grâce à l’élimination de tâches multiples. Enfin, la fusion des
bourses induirait une diminution des coûts de transaction sans, pour autant, avoir un effet
positif sur les coûts post-bourse, à moins que ladite fusion ne s’accompagne d’un mouvement
identique chez les dépositaires centraux.
En conclusion, si une tendance vers la consolidation des organismes de compensation et de
règlement-livraison de titres s’avère utile pour simplifier les procédures et minimiser les
risques et les coûts
456
, il conviendrait de porter attention à une éventuelle situation de
monopole. En conséquence, lesdits systèmes devraient systématiquement être gérés par les
utilisateurs eux-mêmes ; plus encore, une réglementation particulièrement stricte devrait être
établie rapidement et respectée afin de réduire au maximum le risque d’abus de position
dominante.
456
Mais si une consolidation trop poussée engendre une recrudescence du risque systémique, un modèle de
consolidation minimum ne favorise pas une réelle diminution des coûts car les frais de structure et
communication restent élevés.
242
Enfin, selon nous, cette concentration ne devrait a priori pas être étendue au monde entier
mais davantage aux zones monétaires existantes, telle celle de l’euro ou du dollar.
1.4 Un dépositaire central doit-il gérer le système de règlementlivraison de titres?
Historiquement, la fonction première des dépositaires centraux est d’ordre notarial suscitée,
mais cette fonction de teneur de comptes de stocks de titres s’est doublée d’une activité de
règlement des flux de transactions entre intermédiaires teneurs de comptes titres (et le cas
échéant, de comptes espèces) dans les livres du dépositaire central, agissant pour leur compte
propre et celui de leurs clients 457.
Aujourd’hui, les services de règlement de titres sont proposés par les dépositaires centraux
domestiques, les dépositaires internationaux ou les conservateurs. Parfois, il existe plusieurs
dépositaires centraux sur une même place, ceux-ci se partageant alors les activités de
conservation et de règlement-livraison par type de marché (marché traditionnel ou dérivé) ou
par type de valeurs mobilières (actions, obligations d’Etat ou autres obligations). Ces
dépositaires vivent (ou vivaient) ainsi, tel que traité ci-dessus, de leur situation de monopole
sur chaque place, concourrant alors à une fragmentation des activités. Les opérateurs de
marché ont alors cherché d’autres moyens plus simples pour traiter leurs activités
transfrontalières sur titres, tels les dépositaires internationaux ou les conservateurs.
Les conservateurs sont des intermédiaires offrant aux investisseurs des services de
conservation et de règlement en liaison directe avec le dépositaire central ; ils sont qualifiés
d’internationaux s’ils étendent leurs services à plusieurs marchés pour offrir un point d’accès
unique pour lesdites prestations à leur clientèle. Les dépositaires internationaux, quant à eux,
créés au départ pour compenser les transactions sur les euromarchés, ont progressivement
atteint une taille critique, leur permettant de livrer les titres et régler les espèces directement
dans leurs propres comptes, dès lors que la transaction était internationale.
Gentner B., Valier-Brasier T., A la recherche d’une future infrastructure européenne du post-trading, Banque
Magazine, Septembre 2003
457
Duvivier A., Hervo F., La chaîne de traitement des opérations sur titres en Europe, Bulletin de la Banque de
France n°99, mars 2002
243
Désormais, bien qu’en concurrence directe, puis en stratégie d’alliance voire de fusion avec
les dépositaires domestiques
458
, il nous semble que ces établissements sont restés longtemps
complémentaires : les dépositaires nationaux compensaient les transactions domestiques, les
centrales de clearing supranationales opéraient de la sorte pour les transactions
internationales. Les conservateurs internationaux proposaient des liens entre les deux types de
dépositaires domestiques et internationaux, en tant que correspondants locaux
459
. Enfin,
notons que chaque acteur était actionnaire de l’autre, les liens capitalistiques étaient donc
multiples.
Selon nous, la gestion d’un système de règlement-livraison de titres devrait systématiquement
revenir au dépositaire de titres, à condition que celui-ci soit en mesure de gérer des comptes
espèces, à défaut il se doit de développer une interface efficiente avec le gestionnaire des
comptes espèces, à savoir la banque centrale.
L’argument en faveur de cette situation prévaut dans l’expérience des dépositaires centraux à
gérer les comptes titres. Si l’intégration horizontale est un autre sujet, l’intégration verticale
des procédures post-bourse nous semble pourtant opportune. Elle permet aux opérateurs de
simplifier les procédures en leur offrant un point d’entrée unique dès lors qu’il y a
négociation. Davantage que les interfaces, sources de coûts et de dysfonctionnements
potentiels, la gestion d’un système de règlement-livraison de titres par les dépositaires permet
d’accroître les synergies et de minimiser les coûts de fonctionnement des systèmes.
Cependant
460
, l’intégration verticale ne devrait pas être complète afin de permettre aux
opérateurs de ne pas utiliser l’intégralité du « silo » s’il désire ne bénéficier que d’une partie
seulement des prestations. Un minimum de concurrence doit donc demeurer.
458
Deutsche Börse Clearing et Cedel sont devenues Clearstream, tandis qu’Euroclear Bank a fusionné avec
Sicovam devenue Euroclear France.
459
Citons l’exemple de la Banque Paribas, affilié Sicovam pour les opérations en Bourse de Paris, participant
Cedel et plus encore, conservateur des valeurs mobilières françaises pour le compte de Cedel.
460
Arlman P., Godeffroy J.M., Harmonization needed for Europe’s next phase, Securities Industry News, Vol.
14 Issue 1, January 2002
244
1.5 De la remise en cause du monopole naturel des dépositaires
centraux : l’exemple de BPSS en France 461
BPSS – BNP Paribas Securities Services, filiale à 100 % du Groupe BNP-Paribas est
spécialisé dans le métier du titre. Son volume d’actifs en conservation s’est élevé à 1811
milliards d’euros, en 2002, tandis qu’il enregistrait, pour la même année, 25.8 millions de
transactions.
Depuis quelques années, au sein de la chaîne de traitement titres, deux nouveaux entrants sont
progressivement apparus, les dépositaires internationaux et les banques, ces dernières assurant
la gestion de l’activité titres pour compte de leur clientèle.
Longtemps lesdits acteurs ont cohabité mais les dépositaires internationaux ont acquis le
statut de banques et ont racheté certains dépositaires nationaux, relançant de facto le débat de
leur concurrence.
Rappelons que ce débat remonte déjà aux années quatre-vingt-dix
462
: A l’époque, Cedel,
Euroclear, puis Intersettle (Sega) ont développé des interconnexions. Un investisseur
institutionnel pouvait alors n’avoir qu’un seul point d’entrée dans le système de clearing
international, ses transactions se dénouant automatiquement et de façon transparente pour lui.
De facto, les banquiers et les brokers n’intervenaient plus dans le processus, hormis ceux
désignés comme dépositaires. Aussi la concurrence internationale se situait-elle davantage
entre les centrales internationales et les établissements bancaires et boursiers qu’entre ces
mêmes centrales et les organismes nationaux. Face à ce danger, les banques, et pas seulement
les global custodians, ont développé de plus en plus de services à valeur ajoutée, générateurs
de profits. L’investisseur international a eu, très tôt, besoin d’informations en temps réel et de
gestion simultanée des titres et des espèces, dans le monde entier (prestations non offertes par
les dépositaires domestiques à l’époque). L’enregistrement simultané des mouvements de
titres et d’espèces (multidevises) requérait des systèmes intégrés de conservation domestique,
internationale en titres et de gestion de liquidité. Pour satisfaire leurs besoins de prêts de titres
internationaux, de gestion, ou encore de cash management, les banques ont offert à leurs
461
462
Lachèvre C., Le règlement-livraison fait l’objet d’un lobbying intense à Bruxelles, Les Echos 21 février 2003
Karyotis C., Circulation internationale des valeurs mobilières, Banque Editeur 1994
245
clients, outre une gestion prévisionnelle et un dénouement de leurs transactions, un suivi et
des conseils en gestion de titres et d’espèces multidevises.
Aujourd’hui ces phénomènes stratégiques ont pris de l’ampleur : Euroclear, devenu Euroclear
Bank, a racheté Sicovam et Crest. Face à cette refonte capitalistique, les banques, telle BNP –
Paribas, réclament une division claire des activités du dépositaire international entre l’activité
bancaire et celle de dépositaire central, cette dernière n’étant, en aucun cas, remise en cause.
Historiquement, les contreparties centrales et les dépositaires centraux ont été créés par les
professionnels des marchés, banques et bourse, afin de faciliter le traitement post-marché des
échanges ; à titre d’exemple, rappelons que Sicovam a été créée pour la compensation des
transactions sur actions puis ses activités se sont progressivement étendues à l’ensemble des
valeurs mobilières traitées en bourse de Paris. Sont alors nés des monopoles naturels, détenus
et gérés, le plus souvent, par leurs utilisateurs. Aussi peut-on en déduire que ces institutions
bénéficient d’externalités de réseaux positives permettant de diminuer les coûts de traitement.
En effet, toutes les transactions d’un marché sont traitées, en post-marché, par les
dépositaires : une augmentation du nombre de participants permet alors d’accroître le niveau
de service à l’ensemble des participants, nouveaux et antérieurs. Comme pour un dépositaire,
il est de l’intérêt des banques d’avoir accès à une gamme de plus en plus large de valeurs
mobilières ; en parallèle, il est de l’intérêt des émetteurs d’offrir leurs valeurs émises à un
cercle de plus en plus large d’investisseurs potentiels.
En conséquence, les dépositaires centraux ont, au fil des années, atteint une masse critique de
valeurs mobilières gérées, attirant, par effet de « boule de neige », d’autres participants. De
facto, leur pouvoir s’est renforcé.
Sans vouloir nous prononcer en faveur de telle ou telle position, il nous semble cependant
clair que les fonctions de base de la conservation et du règlement-livraison de titres doivent
restées chez un dépositaire (cf. schéma 3). Enfin, le rapport Andria
463
, dans le cadre de la
Communauté
463
Andria (rapport) – Parlement Européen, Document de séance du 4.12.02 :
« Les coûts transfrontaliers doivent être supprimés. (…) Il s’agit de réduire au minimum les risques majeurs
résultant de l’inefficacité de la compensation et du règlement-livraison si l’on veut disposer d’un marché des
valeurs mobilières réellement intégré au niveau de l’Union européenne. (…) Les services principaux de
246
Européenne, prône une stricte séparation entre l’activité de règlement-livraison et l’activité
bancaire.
Le schéma 3 (page suivante) fait état de la répartition potentielle des rôles entre dépositaire et
intermédiaires financiers. Les fonctions « régaliennes » ou de base (haut du schéma) doivent,
selon nous, obligatoirement, revenir au dépositaire central. Les fonctions intermédiaires
peuvent être offerte, au gré d’un accord entre acteurs, par le dépositaire central ou les
intermédiaires financiers. Les fonctions commerciales (bas du schéma) pourraient
éventuellement n’être que du ressort des intermédiaires financiers.
règlement-livraison doivent être gérés comme un service qui soit la propriété des utilisateurs et régi par les règles
applicables à une unité sans but lucratif. »
Schéma 3 : Etat des différentes fonctions de l’activité post-bourse
Fonctions « régaliennes » ou de
base
Conservation centrale scripturale
et/ou physique
Tenue de compte-titres des acteurs
du post-marché
Compensation & netting
Contrepartie centrale &
novation
Appariement & confirmation de
négociation
Circulation domestique et
internationale des titres & espèces
Distribution de nouvelles émissions
Gestion des démembrements
Dépositaire
central
Chambre de
compensation
Dépositaire
central
Etablissements
financiers
Connaissance de l ’actionnariat (TPI,
Nominatifs)
Fonctions
intermédiaires
Gestion des données de référence
Gestion d’OST à caractère central
Fonctions commerciales
Gestion d’OST
Services aux émetteurs (AG, nominatif,
nominee, ADR, certificats globaux …)
Services à valeur ajoutée à destination des
intermédiaires du post-marché (Prêtemprunt, pensions livrées, collatéral, gages,
liquidités intraday, cash management,
change …)
Services aux investisseurs (fiscalité, …)
Karyotis C., Fonctionnement du post-marché des titres en Europe : comment organiser
une “ zone domestique ” pour le rendre efficace – Panorama général, Conférence AFTI,
Paris 27 juin 2003
247
248
2. L’apport d’une chambre de compensation
2.1 Définition et fonctions
Une chambre de compensation, comme abordé au chapitre I, est une entité ayant pour objet de
déterminer les obligations résultant des positions débitrices et créditrices émanant des
négociations d’actifs financiers ; à cette fin, elle calcule les montants à régler par ses
participants.
Si elle a pour fonction première de coordonner les échanges et les règlements entre ses
membres, elle peut, également, fournir d’autres prestations, telles la gestion de données et des
systèmes de communication pour l’enregistrement des instructions de règlement. Enfin, elle
peut parfois agir en tant qu’agent de règlement, s’interposant alors entre ses membres 464.
Le rôle d’une chambre de compensation, au côté de son entreprise de marché, est celui
d’assurer institutionnellement la liquidité du marché. Elle concourt à la minimisation des
coûts de transaction et à la standardisation 465 des produits et leurs traitements. Aussi agit-elle
tel un intermédiaire financier.
En effet, en tentant de minimiser les coûts de transaction, une chambre de compensation agit à
l’instar d’une banque car, comme cette dernière le fait pour les chèques, la chambre vérifie,
lors du matching, les transactions pour, ensuite, procéder à l’enregistrement des débits et
crédits. Elle permet ainsi des économies d’échelle et donc une diminution des coûts. Mais elle
reste confrontée à un risque opérationnel (dysfonctionnement technique) et à un risque
financier lié au transfert d’espèces ou à la mise en place de crédit.
Elle agit également telle une société d’assurance lorsqu’elle garantit la bonne fin des
opérations. Afin de « partager » les risques idiosyncrasiques de défaut, elle procède à des
appels de marge. Mais compte tenu du coût de ces derniers pour ses participants, la chambre
tente de les réduire au maximum. Pourtant ces risques de défaut peuvent alimenter un risque
systémique. Un choc général peut entraîner des problèmes pour une chambre de compensation
qu’il semble d’autant plus difficiles à assurer que le risque peut se déplacer rapidement d’un
464
Summers B.J., The development of a market-based payment system in Russia in OECD 1993, ibid.
Or la standardisation facilite l’établissements de ces systèmes de compensation et de règlement, la face
cachée certes, mais vitale, du trading. Goldfinger C., La géofinance – Pour comprendre la mutation financière,
Seuil 1986
465
249
système à un autre. Pour s’en convaincre, il suffit de se reporter à l’exemple du krach de
1987.
Ces fonctions de « banquier » et d’ « assureur », telles que décrites par Bernanke
résumées at supra, sont similaires aux fonctions présentées par Rutz
467
466
et
qui considère un
système de compensation comme disposant de deux composantes, opérationnelle et
financière. La première composante, opérationnelle, mène à bien la gestion des négociations,
leur matching et leur clearing
468
, tandis que la seconde composante, financière, opère au
règlement espèces et à la gestion des risques 469.
Lesdites fonctions ont été mises à mal lors du krach de 1987 et conduisent certains auteurs,
tels que Bernanke et Brimmer, à considérer que l’interconnexion des chambres et systèmes de
compensation peut être fatale pour un système financier dans sa globalité.
La fonction de banquier (négociation et règlement) a rencontré des problèmes lors du krach
pour des raisons opérationnelles. Le volume accru des négociations a, en effet, entravé le
fonctionnement du système et causé des dysfonctionnements de communication, renforcés en
partie par l’incapacité du système DOT 470 du Nyse à gérer l’afflux d’ordres.
La fonction d’assureur (gestion des risques) a été mise à mal par des craintes, largement
fondées, d’insolvabilité de certains négociateurs qui auraient pu, à défaut d’une intervention
de la Fed (comme présentée par Brimmer ci-dessous), engendrer des difficultés notoires et
rédhibitoires pour les chambres de compensation.
En tout état de cause, les deux fonctions des systèmes de clearing, confrontés aux problèmes
sérieux du 20 octobre 1987, ont engendré des difficultés supplémentaires : les retards dans les
processus de clearing et de règlement, et les problèmes d’insolvabilité potentielle ont renforcé
la confusion déjà présente sur les marchés et ont, sans doute, contribué à accroître la baisse
des cours.
466
Bernanke B.S., Clearing and settlement during the crash, The Review of Financial Studies vol.3, Nber 1, 1990
Rutz Roger D., Clearance, payment and settlement systems in the futures, options and stocks markets, Review
of Futures Markets 7, 1988
468
Selon Rutz, la garantie d’une négociation dès son matching dissipe toute équivoque pour un intermédiaire en
cas de défaillance de sa contrepartie.
469
Pour mener à bien cette gestion des risques, l’auteur préconise un règlement irrévocable et des appels de
marge selon la technique du mark-to-market. Le dépôt initial de garantie est fondamental pour protéger une
chambre de compensation envers un défaut de paiement d’un de ses membres, mais le risque perdure jusqu’à la
date de règlement final ; aussi faut-il requérir un capital minimal pour être membre de la chambre.
467
250
Selon Brimmer
471
, le risque le plus sérieux n’a pas été seulement dû à l’effondrement des
cours, mais à la tension constatée sur le système de règlement-livraison des marchés de
valeurs mobilières et des futures. En temps normal, les systèmes de clearing et de règlement
facilitent les échanges d’instruments financiers entre les vendeurs et les acheteurs, en étant
reliés à chaque marché et répondant aux normes en pratique sur lesdits marchés. Cependant
ces marchés sont, depuis quelques années, interconnectés, entraînant de facto une imbrication
identique pour leurs systèmes de clearing.
L’exemple le plus saisissant vécu lors du krach est celui du contrat indiciel Standard & Poor’s
500 (S&P-SIF) négocié sur le Chicago Mercantile Exchange qui s’est révélé être au cœur de
la crise des procédures de règlement-livraison le 20 octobre 1987. Le fort volume de
transactions sur les valeurs du S&P 500 cotées sur le New York Stock Exchange a été à la
source d’un tout aussi important volume de transactions d’arbitrage sur le contrat S&P-SIF
négocié à Chicago. Le volume considérable à la vente, face à une demande largement minime,
a accéléré la chute des cours sur les deux marchés, cash et futures, augmentant logiquement
les appels de marge.
Les appels de marge diffèrent selon qu’il s’agit des marchés dérivés ou des marchés cash.
Dans le cas des actions, l’appel de marge est un pourcentage de la capitalisation boursière des
titres qu’un client peut acheter à crédit, à hauteur de 50 % aux Etats-Unis (règle édictée par le
Federal Reserve Board depuis le 3 janvier 1974), la technique ayant lieu d’être pour limiter
les achats à découvert.
Dans le cas des marchés dérivés, les appels de marge sont utilisés pour s’assurer la viabilité de
la négociation de contrats entre acheteurs et vendeurs.
Le 16 octobre 1987 (jour de négociation précédant le krach), le CME requerrait un dépôt de
garantie de 10 000 $ par contrat sur le S&P-SIF. Conformément à la réglementation, une
chute devait entraîner une succession d’appels de marge telle qu’illustrée dans le schéma 4.
470
Système de routage des ordres du New York Stock Exchange.
Brimmer A.F., Distinguished lecture on economics in government : Central banking and systemic risks in
capital markets, Journal of Economic Perspectives, Vol.3, Number 2, Spring 1989
471
251
Schéma 4 : Gestion des appels sur le Chicago Mercantile Exchange
Bourse
Chambre de compensation
AM1
AM2
Banque de règlement
Négociateur
RM1
RM2
RM6
AM3
Banque du
négociateur
Banque du client
AM4
Source : Brimmer & Company, Inc
Client
RM1
RM5
RM4
252
1. La chambre de compensation, en fin de journée, précise à la banque de règlement que les
comptes irrévocables sont débiteurs et qu’un appel de marge supplémentaire sera requis le
lendemain matin (AM1) ;
2. La banque de règlement règle l’appel de marge (RM1) à la chambre de compensation pour
le compte du client du négociateur, augmentant de fait le crédit du négociateur ;
3. La banque de règlement informe le négociateur du découvert de son client et du règlement
effectué à la chambre pour son compte ; elle réclame audit négociateur un versement sur
le compte de son client (AM2) ;
4. Le négociateur règle la banque (RM2) à hauteur de l’appel de marge ; ensuite (AM3), le
négociateur demande à sa propre banque de régler (RM3) la banque de règlement ;
5. Le négociateur (AM4) informe son client du découvert et requiert de sa part un règlement
de ce découvert ;
6. Le client (RM4) débite son compte à la banque de règlement et règle (RM5) le
négociateur ;
7. Le négociateur crédite (RM6) son compte en conséquence à sa propre banque.
La fonction du système de clearing et de règlement est alors remplie ; les appels de marges
ont été matchés avec les règlements.
Mais, les 19 et 20 octobre 1987, les systèmes de compensation et de règlement n’ont pas
fonctionné ainsi. Le 19 octobre, les ventes d’actions S&P500 sur le Nyse ont explosé,
déclenchant une chute des cours. En conséquence, le CME a ouvert en baisse, nécessitant de
nouveaux appels de marge à hauteur de 290 millions de dollars pour 13 négociateurs. Dans
l’après-midi, des appels de marges supplémentaires ont été effectués pour 660.5 millions $
auprès de 21 brokers, puis, ultérieurement, 669.5 millions $ auprès de 15 brokers, entraînant
alors des emprunts supplémentaires auprès du secteur bancaire.
Le 20 au matin, à l’ouverture des marchés d’actions et de futures, les négociateurs et les
banques ont accru leurs crédits à leur clientèle pour règlement des appels de marge, sans avoir
reçu, pour autant, un arrêté de comptes des systèmes de règlement-livraison, en retard de
plusieurs heures.
Brimmer illustre l’ampleur du risque en donnant l’exemple de deux brokers (Goldman Sachs
et Kidder, Peabody) : ils ont dû faire face à un déficit de 1.5 milliard $. Compte tenu des
253
difficultés et retards des systèmes de règlement-livraison, les comptes de ces brokers n’ont été
rendus créditeurs qu’en cours d’après-midi.
Afin d’éviter un blocage du système de règlement-livraison, la Fed est intervenue pour
restaurer la solvabilité des établissements financiers
472
. A défaut, le krach de 1987 aurait pu
générer un risque systémique considérable, dont l’origine aurait été davantage un
dysfonctionnement des systèmes (notamment de règlement-livraison) que la chute brutale des
cours 473.
Historiquement, les chambres de compensation 474 ont été créées aux Etats-Unis pour faciliter
le transfert d’or entre banques d’une même ville, elles étaient alors les intermédiaires entre ces
banques et procédaient à une compensation multilatérale.
Si les obligations financières sont traitées et réglées une à une, le règlement est dit géré en
base brute ; si ces mêmes obligations sont réglées par solde, le règlement est dit géré en base
nette, seule la différence entre positions débitrices et créditrices est réglée.
2.2 Les différentes formes de compensation
La compensation est possible sur tous les marchés de capitaux, monétaire, changes, à terme,
et valeurs mobilières.
Bien que différant sur certaines notions juridiques selon les types de marché ou les pays
concernés, il est possible de dresser une typologie des compensations existantes.
472
La Fed a utilisé les trois fonctions d’un prêteur en dernier ressort :
les prêts à l’escompte à destination des grandes institutions financières afin qu’elles prêtent, à leur tour, aux
maisons de titres en difficultés ;
- les opérations d’open market pour injecter 10 milliards $ ;
- l’abaissement de ses taux d’intérêt ;
et les annonces publiques de son président pour calmer la panique.
Aglietta M., Denise C., Les dilemmes du prêteur en dernier ressort international, Revue Française d’économie,
automne 1999
473
Notons cependant que si certains ont critiqué le rôle des institutions américaines dans leur influence néfaste
sur le krach (par le biais du trading assisté par ordinateur ou de l’impact des spécialistes sur le NYSE), Roll (in
Roll, The international crash of 1987 – Financial Analysts Journal – October 1988) a montré que les indices
étaient plus corrélés qu’habituellement. Il a comparé les marchés selon qu’ils étaient informatisés ou non. Il en
ressort qu’en monnaie nationale, les cinq pays informatisés (Canada, France, Japon, Grande Bretagne et EtatsUnis) ont perdu, en moyenne, 21 %, contre 28 % pour les autres. Roll conclut donc que les places informatisées
peuvent réduire la volatilité du marché.
Source : Madura J., International Financial Market, 2000
-
254
♦ la compensation de positions
Egalement appelée compensation de paiements (ou regroupement de paiements), la
compensation de positions est une compensation d’instructions de paiement au titre
d’obligations entre deux (ou plusieurs) parties qui n’implique pas l’exécution ni l’extinction
des obligations initiales. Elle permet aux parties concernées de convenir, de façon informelle,
d’effectuer un règlement unique entre elles, lorsqu’elles ont plusieurs dettes respectives.
Lesdites parties restant tenues de s’acquitter des montants bruts, le risque de crédit n’est pas
écarté mais le nombre de règlements est réduit ainsi que le montant des fonds nécessaires au
règlement régulier des transactions.
♦ la compensation de paiements obligatoire
Les contreparties reconnaissent avoir des engagements de se verser mutuellement des
montants à une date donnée et concluent un accord officiel déterminant le montant unique à
verser ou à recevoir, mais restent tenues de régler les montants bruts en cas de litige.
♦ la compensation par novation
La novation est un processus d’amendement d’un contrat entre deux parties qui prévoit
l’intermédiation d’une tierce partie en tant que débiteur et créditeur. Le contrat amendé est
alors compensé de manière à ce que le contrat initial entre les deux parties soit exécuté et que
les obligations attenantes soient éteintes.
Lors de la compensation, les deux contrats initiaux existants sont remplacés par un contrat
unique menant à l’extinction des dettes.
La compensation par novation permet de réduire le risque de crédit, l’encours des dettes
réciproques entre les deux contreparties étant ramené à un solde net.
A cette fin, les opérations enregistrées à une date donnée font l’objet d’un calcul en positions
nettes, de façon automatique par le biais de l’échange de confirmations entre les parties
concernées. Ces confirmations font alors l’objet d’un rapprochement, et les règlements
s’effectuent pour les montants nets finals.
Cette technique permet de limiter les risques de liquidité et de crédit à hauteur des montants
nets.
474
Jaffee D.M., Money, Banking and Credit, Worth Publishers, 1989
255
La compensation par novation peut être réalisée par accord bilatéral ou multilatéral 475; dans
ce dernier cas, il convient de faire appel à un tiers, bien souvent une chambre de
compensation. La technique est alors nommée novation et substitution, car ladite chambre de
compensation prend en charge chaque obligation nette.
♦ la compensation par liquidation
La compensation par liquidation prévoit le règlement de la totalité des dettes et créances
existantes non échues envers une banque sous la forme d’un paiement unique, juste après la
survenance d’un événement tel que la nomination d’un liquidateur judiciaire. Elle est donc
prévue pour certains cas de figure.
2.3 Pour une compensation bilatérale ou multilatérale
Aufauvre
476
, reprenant l’exemple de Juncker et Summers
477
, étudie sur le marché des
changes l’impact d’une compensation sur les coûts et conclut que cette réduction dépend du
type de compensation.
Elle calcule les positions nettes multilatérales comme précisé dans le tableau 7.
475
La compensation bilatérale permet que toutes les transactions exécutées le même jour sur une même valeur
entre les mêmes contreparties soient regroupées et compensées en une seule opération ; la compensation
multilatérale permet de regrouper toutes les transactions sur une même valeur dans une position courte ou longue
unique pour chaque participant.
476
Aufauvre N., La compensation internationale, Revue d’Economie Financière n°25 1993
477
Juncker G. R., Summers B. J., Young F.M., A primer on the settlement of payments in the United States,
Federal Reserve Bulletin, November 1991
256
Tableau 7 : Calcul de positions nettes
I. Règlements bruts entre banques avant compensation
Banques
Banques recevant les paiements
Somme des
envoyant les
dettes
paiements
A
B
C
D
A
-
90
40
80
210
B
70
-
0
0
70
C
0
50
-
20
70
D
10
30
60
6
100
Total créances
80
170
100
100
450
II Position nette de chaque banque vis-à-vis de la chambre de compensation
Banque
Total
A
B
C
D
Net net
- 130
100
30
0
0
Dans cet exemple, au vu de ce tableau 7, sans compensation, on a 6 couples de contrepartie, 9
règlements, et la valeur totale des paiements effectués s’établit à 450.
Avec une compensation bilatérale, on a 6 couples de contreparties et 6 règlements mais la
valeur totale des paiements n’est plus que de 250.
Avec une compensation multilatérale
478
(c’est-à-dire avec une chambre de compensation
s’interposant entre tous les participants), il reste 4 couples de contreparties, 3 règlements, et
une valeur totale de paiements ne s’élevant plus qu’à 130.
Lors d’une procédure de compensation bilatérale, les participants calculent deux à deux, par
date de valeur et devise par devise, le solde de leurs obligations réciproques : il ne reste plus
qu’un seul règlement par devise et par couple de contreparties.
Lors d’une procédure de compensation multilatérale, la totalité des créances et des
engagements d’une banque vis-à-vis de l’ensemble des autres participants est compensée pour
établir une position nette globale, appelée « nette nette ».
478
Le lecteur se reportera au paragraphe « Vers une consolidation de la compensation » pour une description
plus développée sur la compensation multilatérale.
257
Grâce à la présence de la chambre de compensation, condition sine qua non de la
compensation multilatérale, chaque banque présentant une position nette globale débitrice
effectue un paiement unique à la chambre, tandis que celle-ci règle les banques créditrices. Au
total, il n’y a plus qu’un unique règlement par participant et par devise.
En conséquence, la valeur globale des transferts de fonds s’établit à 130, contre 250 si la
compensation est bilatérale et 450 sans compensation.
Selon le même auteur, pour des systèmes en grandeur réelle, on estime que, par rapport à une
organisation sans compensation, la réduction du nombre de paiements serait de 50 % dans une
compensation bilatérale, et de l’ordre de 80 % pour une compensation multilatérale.
Selgin 479 précise également qu’une compensation multilatérale permet, outre de diminuer les
besoins en réserve (les montants à rassembler étant moins importants), de réaliser des
économies de gestion grâce à la centralisation en un lieu unique de tous les règlements.
Selon Kodres
480
, sur le marché des changes, un netting multilatéral permettrait de réduire le
risque de règlement de 73 % pour un groupe de 20 participants, et de 95 % pour un groupe
plus large de participants.
Une étude menée par la Banque des Règlements Internationaux sur le marché des changes 481,
en 1996 et 1997, fait ressortir les résultats suivants (tableau 8).
Tableau 8 : Comparaison des flux de dénouement avec netting bilatéral et multilatéral
Netting bilatéral
Etude de 1997
Etude de 1996
Netting multilatéral
Etude de 1997
Etude de 1996
A : valeur des flux
de dénouement
soumis au netting
(% des flux bruts)
344 milliards $
227 milliards $
14 milliards $
9 milliards $
(29%)
(24%)
(1.2%)
(1.0%)
B : réduction des
flux de dénouement
grâce au netting
(%des flux bruts)
173 milliards $
123 milliards $
10 milliards $
(15%)
(13%)
(0.8%)
6. milliards $
7.
(0.7%)
50%
54%
71%
67%
Importance du
netting (B/A)
479
480
Selgin G., La théorie de la Banque Libre, Les Belles Lettres 1991
Kodres L.E., Foreign Exchange Markets : Structure and systemic risks, Finance & Development 1997
258
Cependant, les risques et conséquences ne sont pas les mêmes pour les participants et le
système, selon qu’il s’agit d’une compensation bilatérale ou multilatérale.
Afin de démontrer ceci, nous reprenons ci-dessous l’étude de Guadamilas et Keppler
482
,
illustrée ensuite par des expériences vécues.
Soit un marché composé de k brokers négociant sur une et une seule valeur.
La matrice T représente les transactions réalisées entre les brokers sur ledit marché : tij
représente la valeur des titres achetés par le broker i au broker j.
Dans un système à règlement brut, la matrice représente le nombre et la valeur des
transactions. Si les transactions sont traitées sur une base bilatérale, le nombre et la valeur
nette des transactions sont représentés par la matrice N. Dans ce cas, nij représente la position
nette du broker i envers le broker j. Si les transactions sont traitées sur une base multilatérale,
le nombre et la valeur des transactions sont représentés par la matrice M, dans laquelle mi
représente la position nette multilatérale de chaque broker.
Matrice T
0 t12
t21 0
t31 t32
. .
. .
. .
t21 0
t13 … t1k
t23 … t2k
0 … t3k
. . .
. . .
. . .
t13 … t1k
Matrice N
0
0
0
.
.
.
0
n12
0
0
.
.
.
0
n13
n23
0
.
.
.
0
Matrice M
…
…
…
.
.
.
…
nij = | tij – tji |
n1k
n2k
n3k
.
.
.
0
m1
m2
.
.
.
k
k
mij = tij - tij
j=1
i=1
Le tableau 9 montre le nombre de transactions à traiter selon le type de règlement .
481
Bank for International Settlements, Reducing foreign exchange settlement risk : A progress report, July 1998
Guadamillas M., Keppler R., Securities clearance and settlement systems, a guide to best practices,
WorldBank April 2001
482
259
Tableau 9 : Transactions à traiter selon le type de dénouement
Type de dénouement
Nombre de transactions
Brut
k(k-1)
Net bilatéral
k(k-1)/2
Net multilatéral
k
Dans un système brut, le nombre et la valeur des transactions réglées sont plus élevés que
dans les systèmes nets, les besoins de liquidité sont également potentiellement plus élevés 483.
Afin d’analyser l’impact d’une défaillance, supposons que le broker 1 soit dans l’incapacité
de régler le broker 2, la transaction t12 ne peut donc être exécutée.
Le tableau 10 représente le nombre des transactions affectées .
Tableau 10 : Transactions affectées selon le type de dénouement
Type de dénouement
Nombre de transactions
affectées
Brut
1
Net bilatéral
2
Net multilatéral
2k -3
Un système brut est moins affecté par une défaillance qu’un système net ; le système de
netting multilatéral est le plus vulnérable étant donné les changements des positions nettes
consécutifs à la défaillance.
483
Les besoins de liquidité dans un système net sont largement plus faibles que dans un système brut. Aux EtatsUnis, ils passeraient du simple au sextuple entre Chips et Fedwire.
Vanhautère J., Le système dual SNP/TBF sur les rails, Banque n°589, février 1998
260
En conséquence, un système de compensation multilatérale, certes diminue les coûts, mais
génère des risques plus forts en cas de défaillance d’un de ses participants. Il doit donc être
plus vigilant quant à ses conditions de participation au clearing.
Exemple d’application chiffrée : exemple d’un système brut contre un système net
Soient 4 brokers négociant sur une valeur.
La matrice ci-dessous représente en ligne la valeur d’achat des brokers, en colonne la valeur
de vente.
0
20
35
5
10
0
20
15
15
30
0
40
20
15
10
0
Le tableau 11 donne les résultats chiffrés selon le type de système et l’impact d’une
défaillance.
Tableau 11 : Nombre de transactions à dénouer et impact d’une défaillance
Nombre de transactions et de liquidités nécessaires par type de système
Systèmes
Nombre de transactions
Valeurs des transactions
Brut
12
215
Net bilatéral
6
85
Net multilatéral
4
60
Nombre et valeurs des transactions affectées par une défaillance
Systèmes
Nombre de transactions
Valeurs des transactions
affectées
affectées
Brut
1
10
Net bilatéral
2
30
Net multilatéral
5
90
En conclusion de cet exemple, on constate, sur le tableau 11, qu’un netting multilatéral réduit
le nombre et le montant des transactions, mais reste plus vulnérable lors d’une défaillance.
261
L’exemple d’une mauvaise gestion d’un système bilatéral lors d’une crise nous est donné par
les événements du 11 septembre 2001 484.
Au préalable, notons que, dans les années soixante-dix, l’industrie des titres américaine, alors
surchargée par un encombrement de papier, avait commencé à scripturaliser les procédures.
Aussi DTC – Depository Trust Company a-t-elle été créée pour coordonner les dénouements
des transactions boursières, et la New York Clearing House a-t-elle créé Chips comme une
alternative privée et internationale au système Fedwire. Fedwire traite les règlements selon le
principe de la compensation bilatérale, tandis que Chips repose sur un système de règlement
multilatéral. Chips n’avait néanmoins pas de garantie centrale pour préserver le système
contre un effondrement tel celui de la banque Herstatt, et ledit système, à la suite des réactions
en chaîne intervenues après la faillite de cet établissement, n’a regagné sa stabilité qu’après
l’intervention de la Fed. Consciente de ces problèmes la New York Clearing House a fait
évoluer son système afin d’imposer une discipline à ses participants. Dès les années quatrevingts, Chips fonctionnait selon le principe du « same-day settlement », et au cours des années
quatre-vingt-dix, une collatéralisation
485
a été mise au point, et tout dernièrement (en 2001),
le netting multilatéral s’opère en temps réel, éliminant de facto le risque intraday.
Lorsque les institutions financières ont rencontré des problèmes de règlement au sein du
système Fedwire, le 11 septembre 2001, la Federal Reserve Bank leur a avancé 45 milliards
de dollars. Les jours suivants, la Bank of New York, alors débitrice envers d’autres banques à
hauteur de plusieurs dizaines de milliards de dollars, a du solliciter la Fed.486
In fine, les systèmes bilatéraux ont démontré leurs limites, ils ont laissé en suspens de
nombreuses transactions, chaque participant payant à sa contrepartie sa situation nette en fin
de journée. Dans un système multilatéral, tous les participants traitent en continu, comme
484
Mayer M., Clearing and present dangers, Institutional Investor, January 2002
Effects of September 11, Monthly Labor Review, Vol. 126, February 2003
485
La collatéralisation est effectuée via des bons du Trésor, à hauteur de 1.5 % du montant de l’exposition des
banques face à la chambre de compensation. Ce montant représente ce que Chips peut couvrir si 58
établissements présentent un défaut de remboursement de leur débit.
486
Cependant, c’est là le rôle de la Fed : Fedwire, traitant les achats et ventes des fonds fédéraux et assurant la
circulation des valeurs du Trésor en compte, la banque centrale accepte alors des découverts intradays
importants, exigeant seulement que les obligations de détention de réserve soient respectées en fin de journée ;
elle fait donc crédit aux institutions dont les comptes ont été débités dans la journée, donc elle assume le risque
de crédit dans le cadre du fonctionnement du système de paiement. La Fed garantit en effet l’irréversibilité des
écritures portées, par elle, au crédit d’un intermédiaires dans ses livres, elle prend en compte les risques associés
à l’éventuelle défaillance d’un intermédiaire en découvert.
Aglietta M., Brender A., Coudert V., Globalisation financière : l’aventure obligée, Economica 1990
262
dans un système net certes, mais, en fin de journée ; toutes les transactions sont mises en
commun, chaque compte est donc réduit à un débit ou à un crédit, réglé via un dépôt.
Un clearing centralisé permet un netting total, donc une mutualisation des risques, via une
batterie de sauvegardes financières, non offerte dans un système bilatéral ; et il permet, enfin,
une réduction des règlements, diminuant alors le risque systémique et les coûts en optimisant
la gestion des capitaux. A titre d’exemple, notons que Chips enregistre des paiements pour, en
moyenne, 1 200 milliards de dollars chaque jour (soit une moyenne de 5 millions pour chaque
participant) ; grâce au netting multilatéral, le deposit des participants nécessaire au
dénouement de leur compte s’élève à 2.3 milliards (soit 0.2 % du montant des transactions,
contre 5 % pour Fedwire).
Depository Trust and Clearing Corporation
487
(maison mère de DTC et NSCC – National
securities Clearing Corp. depuis leur réorganisation en septembre 1999) avait déjà montré
l’efficacité d’un système multilatéral lors de son record du 4 avril 2000 (722 milliards de
dollars échangés pour un montant de 21.7 milliards de suspens seulement, soit 3 % de
l’activité). Après le 11 septembre 2001, aucun problème de dénouement n’a été relevé, le
délai de J+3 a été maintenu.
Par contre, sur le marché des titres d’Etat 488, sur lequel les mouvements sont dénoués en J+1
sur une base bilatérale, des problèmes sont survenus suite à la crise : la Fed a « sauvé » le
marché en accordant des crédits aux participants et en élargissant les titres exigibles aux
opérations repo à des obligations autres que celles d’Etat. En dépit de cela, le délai de
dénouement a dû être étendu à J+5 pour enrayer les problèmes de livraison entre participants.
Pourtant, une question reste posée : pourquoi les banques avaient-elles accumulé des positions
débitrices nécessitant une intervention de la Banque centrale sachant que les paiements traités
par Fedwire sont instantanés et irrévocables ? En théorie donc, les établissements ont des
487
Selon le rapport Andria – Parlement Européen, Document de séance du 4.12.02, DTCC traite jusqu’à 20
millions de transactions par jour, pour un total de 600 milliards de dollars.
488
The attacks of September 11 precipitated an extraordinary increase in settlement fails in Treasury securities
market. Daily average fails jumped from $ 1.7 billion during the week end and Wednesday, September 5, to $
190 billion during the week ending September 19, $ 105 billion for the week ending September 26, and $ 142
billion for the week ending October 3… Yet, the authors note that « Fails rose initially because of the destruction
of trade records and communication facilities. They remained high because the method typically used to avert or
remedy a fail – borrowing a security through a special collateral repurchase agreement – proved as costly as
failing to deliver the security » and requiere « alternative solutions to chronic fails include the creation of a
Treasury facility that could lend specific securities on a temporary basis and the institution of a penal fee for
fails.
Fleming M.J., Garbade K.D., When the back office moved to the front burner : Settlement fails in the Treasury
market after 9/11, Federal Reserve Bank of New York Economic Policy Review, November 2002
263
comptes suffisamment approvisionnés pour gérer leur dénouement. En pratique, elles ne
gardent cependant pas longtemps leurs dites provisions (elles peuvent, par exemple, proposer
des opérations de repo à leurs clients). Au final les comptes des plus grands établissements
font état d’un montant largement insuffisant face à leurs besoins consécutifs au dénouement
des transactions 489.
Ainsi est-il possible de conclure qu’un système de paiement ou de règlement-livraison de
titres reposant sur une technique de compensation bilatérale est plus risqué pour ses
participants qu’un système multilatéral.
In fine, nous présentons un résumé des caractéristiques des divers systèmes de compensation
en matière de risques 490 :
-
Par rapport à l’absence de compensation, la compensation bilatérale de positions réduit les
risques de liquidité vis-à-vis des contreparties, et peut-être aussi de tiers ; elle ne modifie
cependant pas le risque de crédit et peut même en accroître le niveau, si les positions
nettes sont traitées comme des positions effectives.
-
Par rapport à l’absence de compensation ou à la compensation bilatérale de positions, la
compensation bilatérale par novation réduit les risques de liquidité et de crédit à l’égard
des contreparties, et éventuellement du système financier toutes choses étant égales par
ailleurs.
-
Par rapport à l’absence de compensation ou à la compensation bilatérale, la compensation
multilatérale de positions peut, dans certaines circonstances, réduire les risques de
liquidité ; si des défaillances surviennent pour des montants importants, les risques de
liquidité peuvent être accrus ; les risques de crédit sont les mêmes, ou peuvent être plus
élevés, qu’en l’absence de compensation ; ils sont plus grands que dans le cas de
compensation bilatérale par novation.
489
Ferguson, vice – président du Federal Reserve Bank System, rappelle les objectifs d’une banque centrale
(fourniture des liquidités suffisantes pour maintenir la stabilité d’une économie et s’assurer que les systèmes de
paiement soient toujours opérationnels) et relate les faits du 11 septembre 2001 : dans les jours qui ont suivi les
attentats, les avoirs des banques auprès de la Fed ont atteint 120 milliards de dollars, tandis que ce montant ne
s’élève en moyenne qu’à 13 milliards ; en matière de transferts de gros montants, ils ont chuté de 40 % en
nombre (moins de 250 000 par jour, contre 430 000 habituellement). Par contre l’activité de prêts de la Fed
auprès de ses banques s’est considérablement accrue (le 12 septembre, leur montant atteignait 46 milliards de
dollars, soit 200 fois la moyenne du mois précédent, et le 14 septembre, les prêts à 24 heures culminaient à 150
milliards de dollars, soit 60 % de plus qu’en activité normale).
Source : Ferguson R.W., September 11, The Federal Reserve and the financial system, Speech at Vanderbilt
University, 5 February 2003 in BIS Review 5/2003.
264
-
La compensation multilatérale par novation et substitution peut permettre, plus que toute
autre forme institutionnelle, de réduire les risques de liquidité, mais cette possibilité
dépend dans une très large mesure de la situation financière de la contrepartie centrale à la
compensation ; si cette situation est précaire, les risques de liquidité peuvent être alors
plus élevés que dans le cas de la compensation bilatérale par novation ; quant aux risques
de crédit, ils sont généralement moins grands que dans les autres exemples considérés,
sous réserve, là encore, de l’identité et de la situation financière de la contrepartie centrale.
2.4 Les avantages et inconvénients d’une chambre de compensation
Une chambre de compensation, sur les marchés à terme, mais également sur les marchés de
titres fermes, a pour rôles essentiels de 491 :
-
Réduire les délais de transmission des ordres,
-
Constituer des deposits (en espèces ou en titres), avec liquidation quotidienne des
positions débouchant sur le calcul des marges et règlement immédiat en espèces des
marges débitrices,
-
Surveiller attentivement les positions ouvertes de ses participants (pour mesurer le risque
qu’elles représentent, rapporté à la surface financière)
-
Apporter une garantie de bonne fin aux opérations traitées (la chambre intervient tel un
écran) pour éliminer le risque de contrepartie (il reste seulement le risque pur de variation
de l’instrument financier).
Garantie de bonne fin des opérations
Il nous semble opportun de souligner présentement l’avantage majeur d’une chambre de
compensation en ce qu’elle permet une garantie de bonne fin des opérations. Elle s’interpose
en effet entre l’acheteur et le vendeur ; ceux-ci sont alors certains, sauf cas rarissime de défaut
de ladite chambre, d’être livré pour le premier et réglé pour le second.
490
Banque des Règlements Internationaux, Rapport sur les systèmes de compensation, février 1989
La Martinière de, Le rôle de la chambre de compensation, Les marché à terme d’instruments financiers,
Economica 1986
491
265
Rappelons que les chambres de compensations ont marqué la naissance des marchés dérivés.
En leur présence
492
, dès que deux opérateurs A et B ont négocié l’achat ou la vente d’un ou
plusieurs contrats, cette transaction est enregistrée auprès de la chambre. L’acheteur A peut
alors annuler (ou liquider ou compenser) sa position à terme par la vente d’un contrat
effectuée par exemple avec un opérateur C. La position initiale de A est de ce fait annulée et
l’opérateur reçoit (ou lui verse) une somme représentant la différence entre le prix d’achat et
le prix de vente. A la suite de cette seconde transaction, B est vendeur vis à vis de la chambre
de compensation et C est acheteur à l’égard du même organisme. La chambre de
compensation permet donc aux opérateurs de déboucler leurs contrats quand ils le désirent,
sans être contraints de rechercher ceux avec lesquels ils avaient initialement opéré.
En s’interposant entre les contreparties, une chambre de compensation, sur tous les marchés
sur lesquels elle opère, garantit la bonne exécution des transactions à ses participants, quelles
que soient leurs contreparties.
Cette garantie de bonne fin est donc une règle qui supprime le caractère conditionnel d’une créance.
Réduction des coûts
Historiquement, toutes les études relatives aux systèmes de compensation mis en place au fil
des expériences bancaires, monétaires ou autres, sont unanimes sur l’économie de coûts
induites par les procédures de compensation.
Rolnick et al
493
., en étudiant le système Suffolk, ont conclut que les prestations de
compensation des comptes des participants au système associé aux facilités de prêts ont
permis des économies d’échelle ; Suffolk assurait les rôles de clearer et de prêteur. Kroszner,
dans ses commentaires relatifs à l’article de Rolnick, atteste que le système Suffolk, a permis,
au-delà de son rôle de dépositaire et de clearer, d’accroître la liquidité en Nouvelle Angleterre
en jouant un rôle de prêteur ; ses profits ont d’ailleurs augmenté en même temps que ses
activités de prêts.
492
Simon Y., Marchés dérivés de matières premières et gestion du risque de prix, Economica 1995
Rolnick A.J., Smith B.D., Weber W.E., Lessons from a Laissez-faire Payment system : The Suffolk system
(1825-58), Federal Reserve Bank of St. Louis n°80 May June 1998
493
266
Calomiris et Kahn
494
, et Timberlake
495
retiennent l’avantage du système Suffolk qui, selon
eux, a stabilisé le système bancaire lors de la panique de 1857, celle-ci ayant été moins forte
en Nouvelle Angleterre qu’ailleurs (seules quinze banques de l’Etat ont été touchées par la
panique). Plus encore ce système a concouru à des économies d’intermédiation financière
grâce à la standardisation des mouvements, à la suppression des problèmes de distance, mais
également à la mise en place d’un montant minimal de fonds propres pour ses participants et,
enfin, à une signalisation possible des difficultés éventuelles.
Selgin
496
affirme également que l’un des principaux objets de la création d’une chambre de
compensation réside dans la confrontation et le règlement des engagements mutuels des
banques, et ce à peu de frais.
Weinberg 497 précise qu’un réseau de compensation permet une économie des coûts d’envoi et
de transport des chèques, tandis que leurs traitements ne sont pas dématérialisés. Cet exemple
peut se transposer au traitement des titres, a fortiori dans des systèmes de règlement-livraison
dans lesquels les titres ne sont pas dématérialisés.
Il est donc possible d’appliquer un effet réseau
498
aux systèmes de compensation. Une
chambre de compensation est, avant tout, un intermédiaire entre deux établissements
494
Calomiris C.W., Kahn C.M., The efficiency of Self-regulated payment system : learning from the Suffolk
system, Journal of Money, Credit and Banking November 1996
495
Timberlake R.H., The central banking role of clearinghouse associations, Journal of Money, Credit and
Banking vol. 16, N°1, February 1984
496
Selgin G, La théorie de la banque libre, Les Belles Lettres 1991
497
Weinberg J.A., The organization of private payment networks, Federal Reserve Bank of Richmond Economic
Quaterly Spring 1997
Making transactions across locations is costly. This cost might arise from a number of frictions. If debt claims
are created in the purchase of location – specific goods, then there may be costs associated with communicating
information about these claims across locations or in making final payment. If buyers carry the generic good
with them to make purchases, there may be transportation costs or other losses incurred on the way. Finally, if
travelling for consumption takes time and buyers carry non-interest-bearing currency for transaction purposes,
then there may be a seigniorage cost associated with location-specific consumption.
Suppose that there is a technology for connecting locations in a network for the purpose of clearing and settling
payment obligations. While connection may involve a fixed cost, the variable cost of making transactions among
connected locations is lower than between locations that are not connected. If payment for location-specific
goods requires shipment of generic goods, a network that allows multilateral communication and calculation of
net obligations may on shipping costs. Alternatevely, in a monetary economy, a network that allows people to
substitute debt claims for currency may allow agents to save on seignorage costs.
498
Généralement, les effets réseaux sur les marchés financiers épousent deux formes possibles :
- Plus le nombre de négociateurs est important pour une bourse, plus la probabilité de rencontrer une
contrepartie est forte,
- Plus le nombre de négociateur est important, plus le prix de marché sera juste.
Source : Giordano F., Cross-border trading in financial securities in Europe, The role of central counterparty,
European Capital Markets Institute 2002
267
bancaires devant s’échanger un moyen de paiement ou des titres, et permettant une réduction
des coûts d’opération et de traitement par le biais de la compensation des débits et crédits 499.
Le système d’échange est, en conséquence, plus efficient, et le sera davantage encore si une
troisième banque y participe, et ainsi de suite. Les effets réseaux sont alors incontestables.
Connaissance et gestion des risques
Une chambre de compensation peut faciliter la connaissance des risques de défaut des
participants en centralisant des informations.
Fujiki et al.500, au travers d’une modélisation de transaction dans un système de paiement, ont
étudié la gestion du risque de paiement dans un système brut et net. Ils en ont conclu qu’un
système de règlement doit encourager ses participants à prendre des risques en fonction de
leur aversion aux risques. Si certains participants utilisent des informations privées, le
système doit les inciter à communiquer lesdites informations aux autres participants, à défaut
il y a dysfonctionnement du système.
Un partage inefficient des risques de défaut pourrait provoquer des transferts de ressources au
sein du réseau. Aussi une chambre de compensation (une banque centrale par exemple)
pourrait-elle alors, en cas de panique, jouer un rôle de prêteur pour fluidifier les mécanismes
et éviter en conséquence une situation de blocage du système.
Cette situation de blocage, appelée dans la littérature anglo-saxonne gridlock, est expliquée
notamment par Beau et al.501 : soient 3 participants A,B,C ayant tous 10 de liquidités et ayant
chacun émis un virement de 100, A vers B, B vers C et C vers A ; selon cette hypothèse,
aucun participant ne peut régler l’autre, pourtant chacun dispose des fonds nécessaires à
l’imputation simultanée des 3 virements.
Dans le cadre d’une optimisation multilatérale, un système peut résoudre la situation de la
manière suivante : les virements dont l’imputation pourrait conduire les soldes bilatéraux à
An efficient network is one which includes all agents whose private and external benefits of membership exceed
the cost of connection and includes no other agents. Weinberg J.A., The organization of private payment
networks, Federal Reserve Bank of Richmond Economic Quaterly, Spring 1997
499
Gilbert R.A., Summers B.J., Clearing and settlement of U.S. dollar payments : Back to the future, Federal
Reserve Bank of St. Louis, September October 1996
500
Fujiki H., Green E.J., Yamazaki A., Sharing the risk of settlement failure, Federal Reserve Bank of
Minneapolis Working Paper, February 1999
268
sortir des limites bilatérales sont retirés du champ de l’imputation ; puis, la file d’attente du
participant dont le solde virtuel (solde théorique résultant de l’imputation de toutes les
opérations entrant dans le champ de l’optimisation) est le plus débiteur est examinée pour
retirer du champ de l’imputation le virement dont le montant est immédiatement supérieur à
ce solde ; l’opération est réitérée jusqu’à ce que tous les soldes virtuels soient créditeurs et les
virements restants sont alors tous imputés simultanément.
Une chambre de compensation peut donc, outre « débloquer » un système en période de
difficultés, faciliter, hors périodes de tensions, la connaissance des risques potentiels de défaut
des participants à un système de règlement.
Afin de préserver l’intégrité financière et de réduire la survenance des risques systémiques 502,
les chambres de compensation ont instauré des systèmes de gestion des risques. Lesdits
systèmes ont pour objet de limiter les pertes et les pressions sur la liquidité résultant d’un
défaut d’un participant, d’assurer la finalité des règlements et le recouvrement des pertes
consécutives à la défaillance d’un établissement. Depuis le krach de 1987, les organismes de
clearing américains ont renforcé leurs systèmes de gestion des risques, tant sur les marchés
actions que sur les marchés dérivés. Ainsi l’ensemble de ces organismes a-t-il facilité
l’immobilisation des obligations foncières et du « commercial paper », ou développé le
netting multilatéral, en même temps qu’elles ont réduit le délai de livraison de J+5 à J+3. En
parallèle, conscients que l’absence de coordination pouvait accroître les risques de liquidité et
de crédit, ils ont adapté des mesures communes et créé des liens entre elles 503, pour fusionner
ensuite.
Mais une concentration excessive des risques auprès d’un organisme unique, alors qu’une
contrepartie centrale a été instaurée sur une place financière par exemple, peut engendrer des
difficultés pour le système financier. La contrepartie n’a pas, en général, un accès illimité à la
banque centrale, aussi les ressources sur lesquelles elle peut s’appuyer sont limitées. En effet,
si la contrepartie subit une perte qu’elle ne peut absorber, elle n’assurera, par conséquent, pas
ses engagements vis-à-vis des autres participants, requérant alors l’intervention d’une autorité
501
Beau D., Ducher J.F., Ryckebusch G., Les caractéristiques de fonctionnement des systèmes français de
règlement de montant élevé TBF et PNS : quelques enseignements tirés de travaux de modélisation, Bulletin de
la Banque de France, novembre 1999
502
Gilbert A., Gollob E., Hargraves L., Mead R., Parkinson P., Stehm J., Taylor M.A., Clearance and settlement
in U.S. securities markets, Staff Studies Federal Reserve Bulletin, Fall 1991
269
financière compétente. Ce problème a été illustré, en octobre 1987, lors du sauvetage du Hong
Kong Futures Guarantee Corporation.
De facto, une contrepartie centrale doit surveiller en permanence son niveau d’engagements,
prendre des mesures adéquates pour se prémunir, clarifier les obligations qu’elle assumera ou
n’assumera pas en cas de défaut d’un de ses participants, et enfin disposer de ressources
propres suffisamment importantes en cas de problème 504. Ceci parce que, tant sur les marchés
dérivés que sur les marchés au comptant, c’est l’organisme de compensation qui joue le rôle
crucial de couverture du risque de règlement, en tant que contrepartie de toutes les
transactions, en initiant et en exécutant pour son compte propre toutes les opérations jusqu’à
leur règlement final. L’organisme de compensation doit donc se protéger contre tout défaut de
ses participants. Il doit cependant trouver un compromis idéal entre le degré de sécurité le
plus élevé possible et des charges les moins lourdes possibles pour lesdits participants. A
défaut, ses adhérents se tourneront vers d’autres marchés, faisant alors jouer la concurrence
entre marchés 505.
L’une des couvertures requises par les organismes de compensation repose sur la technique du
dépôt de garantie, complété parfois par des appels de marge et l’évaluation régulière des actifs
au niveau courant du marché. Cette technique (appelée marked to market
503
506
) est largement
Le lecteur se réfèrera au paragraphe relatif à la contrepartie centrale.
OCDE, Risques systémiques dans les marchés de valeurs mobilières, 1991
505
Kessler J.R., Les risques inhérents aux systèmes de compensation et de règlement sur les marchés de contrats
à terme et d’options, La gestion des risques dans le services financiers, OCDE 1992
506
Beaucoup d’économistes recommandent la technique du mark to market, de même que la fermeture des
banques dès que leur capital net tombe à zéro : en effet, si les banques sont fermées avant leur totale
insolvabilité, les déposants peuvent être indemnisés à temps. Parmi ces économistes, notons : Kaufman G.,
Perspectives on safe and sound banking : Past, present and future, MIT Press 1986 & Kaufman G., The truth
about bank runs, FRB Chicago Staff Memoranda, 1987 ; Benston G.J., Eisenbeis R.A., Horvitz P.M., Kane E.J.,;
Kolb W. Robert,Rodriguez J. Ricardo, Financial Institutions and markets, Kolb publishing Company 1994
La technique du mark to market est définie ci-dessous :
On Tuesday morning, an investor takes a long position in Swiss franc futures contracty that matures on Thursday
afternoon. The agreed-on price is $0.75 for SFs 125000. To begin, the investor put $1620 into his initial margin
account. At the close of trading on Tuesday, the futures price has risen to $0.755. Because of daily settlement,
three things occur. First, the investor receives his cash profit of $625 (125000 * 0.005). Second, the existing
futures contract with a price of $0.755. Thus, the value of the futures contracts is set to zero at the end of each
trading day.
At Wednesday close, the price has declined to $0.743. The investor must pay the $1.500 loss (125000 * 0.012) to
the other side of the contract and trade in the old contract for a new one with a price of $0.743.
At Thursday close, the price drops to $0.74, and the contract matures. The investor pays his $375 loss (125000 *
(0.755 – 0.743)) loss to the other side and takes delivery of the Swiss francs, paying the prevailing price of
$0.74. The investor has had a net loss on the contract of $1.250 ($625 - $1500 - $375) before paying his
commission.
Daily settlement reduces the default risk of futures contracts relative to forward contracts. Every day, futures
investors must pay over any losses or receive any gains from the day’s price movements. These gains or losses
504
270
recommandée pour accroître la protection des acteurs – autorités, organismes, participants –
contre le risque de marché.
Un dépôt de garantie
507
a lieu d’être lorsque tout crédit accordé par un opérateur de marché,
une banque ou un organisme de compensation est garanti par des actifs de haute qualité et très
facilement réutilisables. Son objet consiste en une redistribution du risque du prêteur aux
créanciers non garantis de l’emprunteur.
Un appel de marge, le plus souvent additionnel au premier dépôt de garantie consiste en un
dépôt d’une marge lors de l’exécution d’une transaction. Il permet d’accroître la protection
contre le risque de marché pris par un organisme de compensation.
Ces mécanismes d’appel de marge et de dépôt initial de garantie, instaurés pour limiter le
risque résiduel historiquement sur le marché des changes, se sont étendus à d’autres marchés.
Ils peuvent s’avérer utiles chaque fois que deux parties sont liées par un contrat et que
l’évolution d’un prix de marché rend l’une des deux contreparties potentiellement perdante,
dans l’hypothèse où l’autre se révèlerait incapable de tenir ses engagements 508.
Les dépôts de garantie, tels que pratiqués par Euronext (par exemple) et honorés avant le
lendemain se composent de deux éléments complémentaires 509 :
-
un risque de négociation qui correspond au résultat de la valorisation quotidienne des
opérations non encore dénouées, sur la base du dernier cours connu de chaque titre
comparé aux montants espèces issus des négociations. La différence positive de
valorisation entre les positions nettes au cours de référence et les positions nettes au cours
de négociation donne lieu à un complément de dépôt de la part du compensateur. Ces
calculs sont établis pendant toute la période de règlement-livraison de J+1 à J+3 et
s’appliquent également aux mouvements en suspens ;
are generally added to or subtracted from the investor’s margin account. An insolvent investor with an
unprofitable position would be forced into default after only days trading, rather than being allowed to build up
losses that lead to one large default at the time the contract matures (as could occur with a forward contract).
For example, by deciding to keep his contract in force, rather than closing it out on Wednesday, the investor
would have had a margin call for $455 ($1620 + $625 - $1500 + $455 = $1200) at the close of Wednesday
trading in order to meet his $1200 maintenance margin ; that is, the investor would have had to add $455 to his
account to maintain his future contract.
Shapiro A.C., Multinational financial management 6th edition, John Wiley & Sons Inc. 1999
507
OCDE, Risques systémiques dans les marchés de valeurs mobilières, 1991
508
Karlin M., Back Offices et marchés financiers, Economica 1997
509
Deschanel J.P., Gizard B., A la découverte de la Bourse – manuel d’économie boursière, Collection Major,
PUF 1999
271
-
un risque de liquidation qui est représenté par la couverture du risque d’écart de cours
encouru, en cas de défaillance de l’adhérent, à partir du moment où cette défaillance est
constatée, jusqu’au moment où les positions concernées auront pu être dénouées ;
Le coût de liquidation correspondant est, par nature, incertain ; il repose sur une évaluation
quotidienne du risque lié au volume, à la structure des positions de l’intermédiaire et à la
volatilité du marché. Pour Euronext, en 1999, ce dépôt est appelé sur une base forfaitaire
égale à 0.7 % de la somme des négociations initiées par l’adhérent et non encore dénouées.
Coûts liés aux dépôts de garantie
L’intervention d’une chambre de compensation est certes source de sécurité pour les acteurs,
mais elle a un coût en matière de mobilisation des titres.
Les garanties sont souvent liées à l’estimation du risque sur le participant. En conséquence, la
collatéralisation doit être optimisée.
Ces garanties prises par la chambre de compensation s’assimilent à la collatéralisation de la
liquidité intrajournalière obtenue par les banques commerciales auprès de leur banque
centrale : Phénomène lui-même assimilable à la technique du marked to market utilisé sur les
marchés dérivés
510
. Elles ont en commun la gestion du risque de contrepartie supporté par
l’agent de règlement, et donc la minimisation des risques de règlement et du risque
systémique.
Rappelons, en effet, que les dépôts de garantie doivent couvrir les variations de cours et les
appels de marge doivent « coller » à la position de chaque intermédiaire face à l’évolution de
ces mêmes cours.
Dans un système de paiement ou de règlement-livraison de titres, le dépôt de garantie
représente les titres ou les liquidités déposés ex ante pour obtenir la liquidité intrajournalière,
dont le montant dépend des fonds propres.
Les appels de marge prennent la forme de pensions livrées intradays, obtenues en sus des
découverts sécurisés, et permettant aux intermédiaires d’ajuster les besoins de liquidités en
fonction de leurs opérations.
510
Figuet J.M., La sécurisation de la liquidité intrajournalière dans un système à règlement brut, Revue
Economique vol. 51 n°4, juillet 2000
272
Cependant, il existe un coût d’opportunité lié à l’immobilisation des titres apportés en
garantie.
Enfin, la sécurisation de ces opérations intrajournalières est une contrainte efficace si, au
moins, deux conditions sont respectées 511 :
-
les titres apportés en garantie doivent présenter une faible volatilité (en cas de forte baisse,
la banque centrale ou la chambre de compensation doivent procéder à des appels
supplémentaires, à défaut, la sécurité du système s’amenuise),
-
la chambre de compensation doit surveiller en temps réel l’évolution de ses participants
pour éviter un dépassement des limites sécurisées.
Cette contrainte sera respectée par les intermédiaires dès lors, qu’à cours de liquidités, ils
optent pour la technique des repo afin d’obtenir des liquidités supplémentaires, ou pour un
différé du traitement de leurs opérations jusqu’à reconstitution de leurs réserves 512.
Aussi les garanties, pour un conservateur, doivent-elles être calculées au plus juste quant à
leur montant et à leur durée. Dans cette optique de minimisation des coûts liés aux prises de
garantie, il est indéniable que le développement d’une contrepartie centrale demeure un
élément d’efficacité dans la gestion de la collatéralisation.
Problème du risque de défaut de la chambre de compensation
Un système de compensation permet, comme abordé ci-dessus, de réduire les risques, mais
peut être lui-même source de risques supplémentaires. Un groupe de travail international a été
constitué, au sein des banques centrales du Groupe des 10, en vue d’étudier l’impact d’un
système de compensation sur l’efficacité et la sécurité des paiements interbancaires. L’origine
de cette réflexion repose sur le fait qu’un système de compensation, permettant une réduction
des risques de crédit et de liquidité, pourrait inciter certains intervenants à avoir des
comportements moins prudents, conduisant de facto à l’apparition d’un risque systémique
potentiel.
Aussi le Groupe de travail a-t-il conclu qu’un système de compensation peut accroître la
sécurité et l’efficacité des règlements interbancaires, à condition, cependant, que des normes
511
Figuet J.M., id.
Le lecteur se réfèrera au paragraphe relatif aux conditions d’efficacité de la procédure de livraison contre
paiement pour connaître la solution la moins risquée.
512
273
minimales soient respectées. Plus particulièrement, la compensation doit faire l’objet d’un
cadre juridique strict afin d’éviter la remise en cause de la compensation (unwinding) en fin
de journée lors d’une défaillance d’un participant.
Au total, ce Groupe de travail a édicté six normes minimales à respecter par tout système de
compensation, appelées normes Lamfalussy
513
, du nom du président du Groupe :
1. Les systèmes de compensation doivent avoir une base juridique solide dans toutes les
juridictions concernées.
2. Les participants à un système de compensation doivent avoir une idée précise de
l’incidence de ce dernier sur chacun des risques financiers afférents au processus de
compensation.
3. Les systèmes de compensation multilatérale doivent être dotés, pour la gestion des risques
de crédit et de liquidité, de procédures clairement définies précisant les responsabilités
respectives de l’agent de compensation et des participants. Ces procédures doivent
également garantir que toutes les parties sont à la fois incitées et aptes à gérer et à
restreindre chacun des risques qu’elles encourent et que des limites sont fixées au niveau
maximal de risque de crédit auquel chaque participant peut être exposé.
4. Les systèmes de compensation multilatérale doivent permettre, pour le moins, d’assurer
l’exécution en temps voulu des règlements journaliers dans le cas où le participant
présentant la position débitrice nette la plus élevée serait dans l’incapacité de s’exécuter.
5. Les systèmes de compensation multilatérale doivent comporter des critères d’admission
objectifs et dûment publiés, permettant un accès sur une base non discriminatoire.
6. Tous les systèmes de compensation doivent s’assurer de la fiabilité opérationnelle des
systèmes techniques et de la disponibilité de moyens de secours permettant de mener à
bien les opérations journalières requises.
Le défaut de règlement d’une chambre de compensation fait l’objet d’un consensus universel,
les professionnels (dont le Groupe des Trente) sont unanimes sur le fait que ce problème peut
créer un risque systémique gravissime.
513
Bank for International Settlements, Minimum standards for cross-border and multicurrency netting and
settlement schemes, Lamfalussy Report, 1990
274
La compensation
514
repose effectivement sur un strict équilibre, ou plutôt une somme
d’équilibres réciproques ; or, il va de soi que si, en cas de défaillance d’un participant à la
compensation, les flux de paiement opérés par ce dernier sont résolus, une somme de
déséquilibres risque de s’avérer, les paiements réalisés par l’ensemble des contreparties de la
banque défaillante n’étant plus compensés par les paiements de cette dernière. Ce risque
systémique des mécanismes de compensation est apparu particulièrement menaçant pour les
autorités de tutelle, notamment en raison de l’accroissement exponentiel des flux financiers
objets de compensation, mais également du fait de la généralisation de la compensation en
continu accroissant le phénomène de propagation en domino en cas de défaillance d’un
participant.
En conséquence, certains auteurs préconisent que le rôle de clearer soit rempli par une banque
centrale.
Mais Green
515
étudie l’intervention d’une banque centrale et d’une chambre de
compensation : il démontre que l’équilibre de marché « laissez faire » est efficient sans
l’intervention d’une autorité, même lorsque les intermédiaires sont dans l’incapacité de régler
leurs ordres émis. Il conclut alors que ni un système de gros montant à règlement brut avec
intervention d’une banque centrale ni un système de chambre de compensation avec
substitution n’a un avantage absolu l’un sur l’autre. L’efficience de la participation d’une
banque centrale dans un système de règlement dépend essentiellement de la manière dont elle
accorde des crédits pour faciliter les règlements et de la structure légale et commerciale
couvrant les opérations d’une chambre de compensation privée (il s’agit de savoir si son
interposition est suffisante pour assurer les échanges).
Il convient cependant de noter que s’il semble opportun de comparer les activités d’une
banque centrale et d’une chambre de compensation, parce que ces organismes présentent
quelques similitudes, elles n’en sont pas moins différentes sur certains points. Gorton
516
argumente, en effet, que la création du Federal Reserve Board s’inscrit davantage dans une
logique de rationalisation des chambres de compensation américaines que d’une réelle
réforme. Comme le Fed, les chambres de compensation ont un rôle de surveillance, chaque
514
Peltier F., Du netting et de la compensation ou l’affirmation d’un droit spécial, Revue de droit bancaire et de
la Bourse n°42 mars avril 1994
515
Green E.J., Money and debt in the structure of payments, Monetary and Economic Studies, May 1997
516
Gorton G., Clearinghouses and the origin of central banking in the United States, Journal of Economic
History n°45, 1985
275
membre n’étant pas supposé surveiller l’autre. Au final, les chambres assurent la bonne fin
des opérations.
Il y a cependant quelques différences : une chambre de compensation n’intervient pas en tant
que prêteur en dernier ressort 517, telle une banque centrale, et elle se protège par le biais des
appels de marge.
Kroszner
518
, reprenant l’argumentation d’Edwards
519
, précise que les chambres de
compensation sur activités bancaires et sur marchés dérivés ont joué un rôle important en
facilitant le transfert de fonds entre les participants aux négociations. Elles diffèrent
néanmoins en ce sens que la chambre de compensation sur activités bancaires n’est jamais le
représentant légal des parties, n’intervient pas en tant que garant ou comme une « self
regulatory organisation », et enfin, ne facilite pas les livraisons contre paiement si la
contrepartie n’est pas une banque. Cependant, s’il est certain que les chambres de
compensation bancaires ne remplissent pas ces fonctions de nos jours, elles l’ont fait dans le
passé. Aussi, avant 1913, le netting était-il réalisé par les chambres existantes pour réduire les
montants réglés et détecter les problèmes ; rappelons que le système Suffolk avait un droit de
regard sur les comptes de ses participants.
2.5 Vers une consolidation de la compensation : notion de
contrepartie centrale
La notion de contrepartie centrale repose sur la compensation multilatérale qui permet de
minimiser le nombre d’obligations à régler, et sur la substitution de ladite contrepartie unique
aux contreparties initiales, donc aux participants (compensation par novation).
Si la compensation simple des règlements peut être assurée par un système de règlementlivraison de titres, la compensation par novation, quant à elle, ne peut être effectuée que par
517
C’est là aussi une différente notable entre un système de règlement-livraison de titres et un système de
paiement.
518
Kroszner R.S., Can the financial markets privately regulate risk ? The development of derivatives clearing
houses and recent over-the-counter innovations, Journal of Money, Credit and Banking, November 1999
519
Edwards F., The clearing association in Futures markets : guarantor and regulator in The industrial
organization of the futures markets, Ronald W. Anderson 1984, p : 225-254
276
une entité ad hoc, partie tierce devenant juridiquement la contrepartie unique dans une
opération donnée.
A titre d’exemple notons que, dès 1991, le rapport de la Serre
520
préconisait le
rapprochement, en bourse de Paris, des compensations des marchés cash et des marchés
dérivés, au moins dans le domaine des actions. Plus généralement, il invitait les autorités de
place à examiner des formules de multi-compensation destinées à diminuer les coûts
d’intermédiation et à augmenter la sécurité des transactions.
Sur le plan international, à la suite du krach de 1987, un groupe de travail (Brady Task force
521
) a proposé quatre recommandations pour minimiser les risques d’un nouveau
krach
boursier :
-
la mise en place d’un organisme de tutelle unique et commun aux marchés de futures,
options et valeurs mobilières,
-
la mise en place de coupe-circuit 522 permettant d’éviter une chute des cours en arrêtant les
cotations,
-
une unification des chambres de compensation,
-
des appels de marge compatibles avec tous les marchés.
La mise en place d’une chambre de compensation commune à tous les marchés a prévalu
après le krach car les problèmes de liquidité et de crédits ont été d’autant plus forts les 19 et
20 octobre 1987 qu’il existait différentes chambres de compensation et de systèmes de
règlement-livraison de titres (actions, futures et options).
Selon le groupe de travail susnommé et différents auteurs
523
, l’existence de plusieurs
chambres de compensation engendre une incertitude quant à l’origine des négociations
520
Serre (de la) B., L’avenir de l’intermédiation boursière en France, Rapport au Conseil des Bourses de Valeurs
du Groupe de travail présidé par Monsieur de la Serre.
521
Brady report, Presidential Task Force on market mecanisms, 1988
522
Le principe d’un coupe-circuit consiste en un arrêt des cotations pendant une durée donnée dès que les cours
évoluent, à la hausse ou à la baisse, de plus d’un pourcentage donné.
On notera qu’une étude relative aux liens entre dépôts de couverture et volatilité des actions, a analysé l’impact
des coupe-circuits sur les variations de cours, et a conclu à la nécessité d’un système bancaire efficace. A cette
fin, l’auteur a comparé les arrêts de cotation du New York Stock Exchange de 1893, 1907, 1914 et 1933 : celui
du 31 juillet 1914 diffère des autres, c’est de fait le plus long (la bourse n’ayant réouvert que le 12 décembre
1914) mais dû à la déclaration de guerre et indépendant du système bancaire. Aussi un marché financier doit-il
suspendre ses cotations lors d’un dysfonctionnement du système bancaire parce que le dénouement des
transactions boursières requiert un système de paiement efficace.
Schwert G.W., Margin requirements and stock volatility, Journal of Financial Services Research, décembre 1989
277
compensées dans un système : un intermédiaire a ainsi pu couvrir une position future par des
actions, créant alors un risque de solvabilité pour les deux marchés, actions et futures, pouvant
se propager d’un système de compensation à l’autre.
Les appels de marge lors du krach ont été renforcés sur tous les marchés et les règlements ont
connu des retards significatifs, augmentant de facto les besoins de crédit intradays chez les
participants, et donc leur risque de solvabilité. Une chambre de compensation unique, dans le
cas présent, aurait logiquement réduit la demande de crédit et les tensions y attenantes parce
que minimisant les appels de marge supplémentaires.
Sur le marché des changes, l’organisation d’une compensation internationale a permis de
limiter les règlements internationaux aux soldes extérieurs et d’éviter aux banques centrales
de détenir et de manipuler un stock de devises trop important 524.
Davantage encore, un système de compensation adapté joue un rôle fondamental dans le
fonctionnement de liens entre différentes places financières, il permet une comptabilisation
compensée des transactions globales, donc une diminution des coûts ; en effet, dans le cadre
d’une compensation centralisée, le dépôt de garantie est unique et les appels de marge sont
réduits, il n’y a qu’une seule commission de courtage, et, enfin, la gestion des informations
est facilitée 525.
Une contrepartie centrale substitue aux risques vis-à-vis de plusieurs contreparties une
exposition unique vis-à-vis d’une contrepartie centralisée, donc unique.
Les intervenants « multi-marchés » sont alors face à une gestion plus rationnelle des risques
de contrepartie, qu’ils utiliseront pour accroître leurs opportunités de négociation. Par
conséquent, la liquidité des marchés augmente, l’activité est stimulée, les coûts de transaction
diminuent et le fonctionnement des marchés de capitaux s’en trouve amélioré 526.
De plus, si la contrepartie centrale évalue en termes nets les risques encourus sur les membres
du système de compensation, la compensation des obligations peut également réduire le
523
Dont Greenwald B., Stein J, The task force Report : the reasoning behind the recommendations, Journal of
Economic Perspectives, Vol.2 Nber 3, Summer 1988
524
Siröen J.M., Flux financiers et système monétaire international in Finances Internationales, A. Colin 1993
525
Messin E., Nottin H., La cotation 24 heures sur 24 des marchés de contrats à terme et d’options in Les
marchés à terme d’instruments financiers, Economica 1986
526
Le processus de consolidation de la compensation avec contrepartie centrale dans la zone Euro, Bulletin
mensuel de la BCE, août 2001
278
montant du dépôt de garantie requis pour couvrir les risques de crédit actuels ou susceptibles
d’apparaître dans le futur.
Les risques d’insolvabilité d’un participant peuvent être minimisés par des exigences
financières minimales requises à l’adhésion d’une chambre de compensation, par des appels
de marge et par des ressources propres importantes de la chambre de compensation.
Dans la zone Euro notamment, une contrepartie centrale devient de plus en plus indispensable
compte tenu de l’accroissement du nombre des négociations, de l’apparition de nouvelles
plates-formes électroniques, des opérations de rapprochement transfrontalier des bourses. Les
intervenants rencontrent ainsi de plus en plus de difficultés à contrôler les risques eux-mêmes.
Une gestion centralisée desdits risques devient alors opportune, voire indispensable.
Une contrepartie centrale n’élimine pas le risque de contrepartie, mais elle redistribue au
moins ce risque à l’ensemble de ses participants, alors plus à même de le supporter qu’un
participant unique. Elle permet également d’accroître la liquidité d’un marché et réduit, enfin,
le nombre de règlements et donc les risques associés et les coûts opérationnels.
L’avantage d’une contrepartie centrale est d’autant plus fort que la taille des marchés et le
nombre d’intermédiaires concernés sont importants, mais jusqu’à un certain point. Nous
présentons, ci-dessous (tableau 12), l’étude de DTCC 527 :
527
DTCC, Central counterparties : Development, cooperation and consolidation, A white paper to the industry
on the futures of CCPs, October 2000
279
Tableau 12 : Bénéfice d’une contrepartie centrale pour les participants individuels
Eléments impactés
Bénéfice pour
les
Montant
Nombre
Nombre
Nombre
participants
des
de
de participants d’émissions
individuels
négociations
négociations
Gestion du
+
+
+/+/risque
Standardisa+
+
+
+
tion
Anonymat
+
+
+
Opérationnel
+
+
+
+
Netting
+
+/+/Liquidité
+
+/+
+
+
= positif
= négatif
+/= positif globalement mais négatif au-delà d’un certain point
[ ]
= sans effet particulier
Diversité
des valeurs
+
Réduction du
cycle de
dénouement
-
+
+
+
+/+
+
+
Les places financières ont tout intérêt à développer la notion de contrepartie centrale.
Selon Beis J.L.
528
, Clearnet est un exemple dans sa stratégie de développement international
et multi – marché. Elle apparaît, en effet, comme un clearer unique et central, interposé entre
différentes bourses et dépositaires multiples, permettant de diminuer les coûts.
Le modèle suivi par l’organisme paneuropéen est celui du Cadran – Hour Glass Model
(schéma 5) qui permet de négocier où l’on veut,
de faire conserver ses titres en local
Schéma 5 : Hour Glass Model
Bourses et systèmes de négociation
auprès du dépositaire de son choix,
mais de compenser et régler en un lieu
unique.
Contrepartie
centrale
Cette configuration (recours à une centrale de
matching et confirmation, envoi d’instructions
de règlement-livraison, notification à des tiers,
mise en œuvre d’outils de connexion et de
transmission …), apparaît comme un des moyens
Dépositaire
internatal
Dépositaire
domestique
Dépositaire
domestique
Dépositaire
domestique
d’automatisation des processus et de minimisation des coûts et des risques, parce que les flux
seront émis et reçus correctement.
528
Beis J.L., Les contraintes opérationnelles se durcissent pour les professionnels de la chaîne titres, Agefi
supplément spécial Conservation de Titres, 24 octobre 2002
280
Ceci est d’autant plus probant qu’une étude réalisée par Swift et reprise par l’auteur révèle des
coûts fixes importants selon la cause des échecs des transactions (schéma 6).
Schéma 6 : Coût des échecs de transaction
Coût fixe
élevé même
pour un
traitement
100% STP
Coût fixe
de 11 €
Préparation
et requête
pour 59%
des
instructions
Coût de
réparation
7€
10 % des
confirmations
résultent d’un
mauvais
rapprochement
Coût d’un
mauvais
rapprochement
18 €
15 % des
transactions
ne sont pas
réglées à
temps
58 € + coût lié à la
résolution des échecs de
règlement
Enfin, deux règles essentielles 529 prévalent à la mise en place d’une contrepartie centrale :
-
Elle ne sera valable que si son coût additionnel d’adhésion n’excède pas la valeur ajoutée
qu’elle peut apporter à ses participants,
-
Les règles de partage des risques doivent être étendues à l’ensemble des participants bien
sûr, mais à toutes les opérations faisant l’objet du netting surtout.
Une contrepartie centrale apporte donc, au marché et à ses participants, de nombreux
avantages, cependant son fonctionnement n’est pas sans risque, et peut impacter la stabilité
financière d’une place. Elle permet, certes, de minimiser le risque de crédit, mais, en
regroupant les opérations de règlement, elle concourt à une concentration, ou une réallocation,
529
Moser J.T., Contracting innovations and the evolution of clearing and settlement methods at futures
exchanges, Working Papers Series Research Department Federal Reserve Bank of Chicago, 1998
281
des risques, notamment opérationnels, créant, alors, une nouvelle source de risque
systémique
530
:
Comme dans tout modèle d’assurance, une contrepartie centrale transpose un risque sur un
participant vers un risque sur elle-même.
En premier lieu, il y a donc concentration des risques sur une entité unique : ces risques
opérationnels concentrés sont à prendre en compte et à gérer au plus fin, en mettant en œuvre
une supervision réglementaire adaptée.
En second lieu, la notion de « hasard moral » joue pleinement: tandis qu’une défaillance
d’une chambre de compensation aurait des conséquences trop importantes sur un système
financier, les intervenants dudit système se reposent sur une intervention de leur banque
centrale pour un renflouement de la chambre de compensation, selon le principe du « too big
to fail »,
En troisième lieu, il y a, comme mentionné ci-dessus, des asymétries d’informations : en
période de crise financière potentielle, les intervenants peuvent éviter de traiter avec certaines
contreparties susceptibles de défaillir et se fient, en conséquence, à la chambre de
compensation. Ce principe n’est cependant valable que si la solvabilité de cette chambre est
suffisamment importante pour éviter une cessation complète du fonctionnement d’un marché.
En quatrième lieu, la course aux résultats provoque une concurrence au sein des gestionnaires
de systèmes ; si elle reste saine économiquement, elle peut cependant conduire certains
d’entre eux à appliquer des normes de gestion des risques moins strictes afin d’améliorer leur
compétitivité. En conséquence le système perd en fiabilité.
Et enfin, n’oublions pas les effets de contagion : les chambres de compensation interviennent
en aval du règlement, un dysfonctionnement à leur hauteur peut alors engendrer des
problèmes dans les systèmes de règlement-livraison. Plus encore si la contrepartie centrale est
multi-marchés et multidevises, il existe un risque de contagion d’un marché à l’autre.
Bien que présentant ces risques, certes non négligeables, mais cependant gérables, les auteurs
susnommés concluent au bien fondé d’une contrepartie centrale, notamment dans le cadre
d’un marché de plus en plus globalisé et internationalisé : via un netting multilatéral, une
contrepartie centrale réduit le nombre de transactions à dénouer, donc réduit les coûts de
traitements transfrontaliers. En outre, elle permet une économie en matière de
530
Giordano F., Cross-border trading in financial securities in Europe, The role of central counterparty,
European Capital Markets Institute 2002
Le processus de consolidation de la compensation avec contrepartie centrale dans la zone Euro, Bulletin mensuel
de la BCE, Août 2001
282
collatéralisation, donc une meilleure gestion des capitaux, et donc un abaissement des coûts
d’infrastructure. Enfin, elle permet une transparence plus importante, une gestion centralisée,
un partage des risques, et offre, à ses participants, un point d’entrée unique.
Tout comme mentionnés par ailleurs, les effets réseaux et externalités s’appliquent à la notion
de contrepartie centrale 531 : dans l’hypothèse d’un groupe de participants à profils de crédits
identiques, plus le nombre de négociations passant par ladite contrepartie centrale est
important, plus le netting devient intéressant du fait de la diminution du nombre de
règlements et, de plus, la gestion du collatéral est optimisée
532
. De surcroît, une contrepartie
centrale commune à plusieurs marchés permet de minimiser les coûts de connexion pour les
utilisateurs ; elle devient alors une zone typique d’externalités. Enfin, une diminution des
risques de crédit induite par cette contrepartie est plus opportune encore sur un marché
gouverné par les ordres car, sur un tel marché, les participants sont incapables de connaître
leurs contreparties et donc le risque qu’ils encourent face à elles.
2.6 L’exemple de la compensation dans le système français ISB 533
La fonction de compensation est décisive pour la sécurité du marché organisé. Elle s’explique
par l’interface que l’adhérent à la compensation assure :
-
En aval du marché, en mettant à la disposition du négociateur toute sa logistique de
traitement des ordres. En termes de flux, l’adhérent à la compensation désigné par le
négociateur prend en charge les opérations de règlement-livraison des transactions
exécutées sur le marché.
-
Vis-à-vis de la chambre de compensation, l’adhérent assume la responsabilité technique et
financière de la bonne fin de l’exécution des transactions.
La garantie de la solvabilité du système du marché organisé est donc assurée mais il existe des
droits et des obligations strictes pour l’adhérent à la compensation. Ce dernier est, en effet,
soumis par la chambre à des exigences techniques, telle la capacité à suivre les positions
531
Giordano F., Cross-border trading in financial securities in Europe, The role of central counterparty,
European Capital Markets Institute 2002
532
Kahn C. M., McAndrews J., Roberds W., Settlement risk under gross and net settlement, Federal Reserve
Board, August 1999
283
individuelles des négociateurs en temps réel, et financières (fonds propres et appels de
marge). En contrepartie, il bénéficie des services de la chambre, à savoir : l’ajustement
automatique des négociations effectuées entre les membres, la concentration des opérations
par solde et la couverture des risques via les appels de marge, dépôts de garantie, interposition
de la chambre en cas de défaillance 534 d’une contrepartie …
On notera que ces règles applicables aux adhérents du système ISB sont également valables
pour les adhérents à la compensation globale effectuée en Euroclear France.
Le métier d’adhérent à la compensation, tel que présenté ci-dessus, apparaît comme un
concept clef pour assurer la sécurité et la compétitivité du marché français. Il constitue le
fondement du mécanisme de garantie de bonne fin des opérations sur valeurs mobilières qui
est à la base des services offerts, depuis plusieurs années, en Bourse de Paris.
Par ailleurs, en amont de cette compensation entre sociétés de bourse, il existe un système de
compensation globale sur la plupart des valeurs de la Bourse de Paris (les plus liquides)
depuis 1969 et sur certaines opérations OTC depuis 1998.
533
Serre (de la) B., L’avenir de l’intermédiation boursière en France, Rapport au Conseil des Bourses de Valeurs
du Groupe de travail présidé par Monsieur de la Serre.
534
Cf. Schéma 7 page suivante
284
Schéma 7 : Procédure de rachat par la chambre de compensation
telle qu’édictée par la loi du 22 janvier 1988
Délai et procédure de rachat sur le marché :
- Le délai de dénouement d’une transaction sur un marché au
comptant est de J+3,
- En cas de non livraison dans ce délai imparti, le négociateur, face
à un besoin en titres, dispose d’un délai de grâce de 5 jours,
- A l’expiration de ce délai, si le négociateur n’a pas obtenu les
titres sur le marché (achat ou emprunt), la chambre de
compensation initie une procédure de rachat qui prend effet 3
jours après l’expiration du délai de grâce. Et le prix de rachat est
majoré de 25 % (4 % pour les obligations),
- En cas d’absence de vendeurs, un nouveau rachat est programmé
2 jours plus tard majoré 56.25 % (8.16 % pour les obligations)
par rapport au prix du marché,
- En fin de processus, si aucun vendeur n’est trouvé, la transaction
est annulée, et l’acheteur indemnisé à hauteur du prix des titres
majoré de 71.8 % (10.32 % pour les obligations).
1ère étape du
rachat :
+25%
Délai de
grâce de
5 jours
2ème étape du
rachat :
+56.25%
Ultime
étape :
+ 71.8%
J+13
J+12
J+11
J+9
J+3
J
Paiement de
l’indemnité
consécutive à
l’annulation de la
tranction
Fin de la
seconde
période
Fin de la
première
période
Fin du délai de
grâce
Norme à
respecter
Négociation sur
le marché
Maffei A., A French perspective of the legal status of DVP, DVP : Cross-border
securities settlement Conference, Paris 5-6 October 1995
285
2.7 Une contrepartie centrale : les prestations de Clearnet pour
Euronext 535
En France, il existe un système de compensation entre intermédiaires de marché via une
chambre de compensation (Banque Centrale de Compensation créée en 1969). Au fil de leur
création, tous les marchés réglementés français ont offert des prestations de compensation et,
depuis peu, pour les marchés OTC sur taux d’intérêt (obligations et repos). En 1999, lesdites
activités ont été regroupées au sein de l’entité commune Clearnet SA.
Clearnet est la première organisation européenne à offrir une compensation commune aux
marchés comptant et dérivés depuis 1998, mais également la première chambre de
compensation permettant l’adhésion à distance.
En tant que contrepartie centrale pour l’ensemble des marchés d’Euronext, elle a engendré des
économies d’échelle ; on estime à plus de 90 % de réduction du nombre de transactions gérées
par les organismes de règlement 536.
Les principes de fonctionnement retenues par Clearnet repose sur :
-
la novation (Clearnet est contrepartie centrale),
-
le netting multilatéral,
-
la garantie des positions,
permettant, de facto, à ses membres d’optimiser leurs positions, lignes de crédit, et gestion du
collatéral, et de minimiser leurs coûts et risques de contrepartie.
Le système Clearing 21, adopté à la suite de l’échange technologique
537
entre le Chicago
Mercantile Exchange et la Bourse de Paris, offre un point d’entrée unique aux opérateurs, une
transmission et une gestion des transactions en temps réel.
535
Karyotis C., Les systèmes de règlement-livraison européens, Vers l’unification des marchés, Banque Editeur
2003, 2ème édition
Clearnet, The first pan-european Clearing House, 2002
Clearnet, Guide to Clearnet OTC, Netting and central counterparty for bonds and repos, 2002
536
Selon la SBF – Bourse de Paris (devenue Euronext Paris), en 1998, le taux de compensation était :
- en nombre d’instructions, de 40 % pour les opérations au comptant, et supérieure à 99 % pour les opérations
sur le marché à Règlement Mensuel,
- en capitaux, de 20 % pour les opérations au comptant, et supérieure à 70 % pour les opérations sur le marché
à Règlement Mensuel.
286
L’architecture du système et des services de Clearnet sont présentés dans le schéma 8, au
travers d’un exemple de transaction OTC.
Schéma 8 : exemple des transactions OTC 538
1. Trading
Membre
Clearnet
Membre
Clearnet
Négociation
2. Confirmation
1. Trading
2. Confirmation
3. Instruction à
destination de
la banque
correspondante
pour
compensation
3. Envoi des avis d’opéré à Clearnet pour
compensation
CLEARNET
Reporting
Clearnet
OTC
Reporting
Clearnet
4. Règlement en net
Membre
Clearnet
5. Règlement
des appels de
marge et dépôts
de garantie
Dépositaire
central
5. Règlement
des appels de
marge et dépôts
de garantie
Banque de
France
TBF
Solution 1 : règlement direct
Solution 2: règlement via une banque
correspondante
Chiffres repris par Deschanel J.P., Gizard B., A la découverte de la Bourse – manuel d’économie boursière,
Collection Major, PUF 1999
537
La Bourse de Paris a reçu le système Clearing 21 en échange du système NSC – Nouveau Système de
Cotation donné à la Bourse de Chicago.
538
Source : Clearnet SA
287
Explications du schéma 8
1. Trading :
Les transactions sont traitées entre les membres de Clearnet via une
plate-forme de négociation.
2. Confirmation :
Les transactions sont censées être enregistrées au plus tôt après
confirmation des 2 contreparties. Il y a alors compensation par novation
et la transaction est garantie par Clearnet.
Pour les plate-formes électroniques, les transactions sont censées être
enregistrées dès le matching.
3. Envoi des avis d’opéré à Clearnet pour compensation :
Les modalités de transaction sont envoyées à Clearnet au fil de l’eau.
4. Règlement en net :
Fin J, Clearnet calcule les soldes nets en titres et en espèces pour
chaque membre, pour règlement en J+1. Clearnet transmet alors les
instructions pour la livraison contre paiement auprès du dépositaire
central.
5. Paiement des appels de marge et dépôts de garantie :
Afin de garantir les positions nettes de ses membres et de faire
éventuellement face à un défaut de l’un d’entre eux, Clearnet a des
dépôts initiaux de garantie et des appels de marge quotidiens. Ils sont
calculés tous les jours pour les transactions d’achat et vente et les
pensions livrées. Les dépôts peuvent s’effectuer en espèces ou en titres
(prévus par Clearnet).
288
3. Livraison contre paiement
3.1 De la notion de livraison contre paiement 539
Le principe de la livraison contre paiement est celui de la simultanéité des livraisons de titres
et des règlements espèces. En d’autres termes, la livraison des titres n’intervient qui si le
paiement a lieu et inversement.
L’instauration de ce principe permet d’éliminer le risque en principal, mais, également, de
réduire l’éventualité que les intermédiaires ne remplissent pas leurs obligations en cas de
tensions sur les marchés.
Néanmoins, si le risque en principal est éliminé, le risque de liquidité est certes réduit mais
demeure ainsi que le risque de remplacement. De facto, le risque systémique n’est pas
supprimé.
Concrètement, le principe de la livraison contre paiement, principal objectif du Groupe des
Trente, ne repose pas toujours sur la réelle simultanéité stricto sensu des livraisons et des
règlements ; seules les centrales de clearing internationales peuvent se prévaloir du respect
pur et simple de ce principe, car celles-ci gèrent directement des comptes espèces pour leurs
participants. Sur les places traditionnelles, les dépositaires centraux nationaux n’ont pas en
charge cette gestion directe des comptes espèces, celle-ci restant de la responsabilité des
banques centrales.
Aussi ces dépositaires centraux bloquent-ils les titres sur les comptes des vendeurs ou de leurs
conservateurs. Ils requièrent, ensuite, le transfert de fonds des acheteurs vers les vendeurs
auprès de la banque de règlement. Et seulement après, les titres sont livrés aux acheteurs (ou
leurs conservateurs) si et seulement si lesdits dépositaires ont reçu la confirmation des
règlements par la banque.
539
Bank for International Settlements, Delivery versus payment in securities settlement systems, September
1992
Bank for International Settlements, Disclosure framework for securities settlements systems, February 1997
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for Securities Settlement Systems,
January 2001
289
Comme vu précédemment 540, les différents modèles de livraison contre paiement ne génèrent
pas les mêmes risques.
Un système de règlement-livraison propose parfois un service d’ajustement des soldes et peut
alors générer des risques similaires à ceux d’un système de paiement à règlement net différé
(RND).
Un système RND peut traiter des paiements en temps réel mais il effectue des règlements par
lots en termes nets à des moments annoncés (en cours de journée ou, le plus souvent, en fin de
journée). A l’opposé, un système à règlement brut en temps réel traite les règlements,
opération par opération, dès leur acceptation dans le système.
Un système effectuant les règlements par lot expose ses participants à un risque financier au
cours du différé de règlement. Si ce risque n’est pas maîtrisé, les incidences touchent alors les
contreparties directes, mais également les autres participants qui peuvent être affectés par les
modifications de positions induites par le défaut de règlement initial. Dans un système de
règlement brut en temps réel, ce risque de crédit est éliminé puisque les règlements sont
traités un à un ; il n’existe plus qu’un risque de liquidité.
Par contre, un système net permet de réduire considérablement les besoins en liquidités
particulièrement élevés dans un système brut.
Pour pallier ces inconvénients, il est possible de développer un système, qualifiable d’hybride,
permettant d’associer la rapidité des systèmes à règlement brut en temps réel à la gestion
efficiente des liquidités d’un système net. Ce système, que nous qualifions d’hybride, repose
alors sur une compensation fréquente des règlements en cours de journée et d’un règlement
définitif immédiat.
Techniquement, les transactions sont stockées dans une file d’attente centralisée et
compensées à intervalles rapprochés. Si les positions débitrices nettes sont totalement
couvertes, le règlement s’opère immédiatement. Dans le cas contraire, les transactions sont
conservées dans la file d’attente jusqu’à la compensation suivante 541.
540
541
Chapitre 2, § 3
Cf. paragraphe relatif au CLS
290
3.2 Du délai de J+3 à J+1, voire le principe du straight through
processing (STP) 542
La tendance au raccourcissement des cycles de règlement profite à tous les acteurs du marché.
Les changements de processus nécessaires pour parvenir au « règlement le jour même »
rendront les défaillances moins fréquentes, ce qui réduira les coûts et libérera des capitaux qui
pourront être réinvestis. La réduction des délais de règlement raccourcit aussi la durée
d’exposition aux risques de contrepartie et de marché, ce qui peut aussi contribuer à libérer
des capitaux affectés aux réserves 543.
Le straight through processing consiste en un traitement électronique d’une opération sur
titres entre toutes les parties intervenant dans ladite opération, depuis l’entrée de l’avis
d’exécution dans un système relié à une ou plusieurs contreparties, jusqu’au règlement,
conformément aux règles, règlements et normes du secteur 544.
Pour une institution financière 545, il s’agit d’automatiser la gestion des transactions boursières
et post-boursières chez elle, mais également, avec l’ensemble des partenaires. Le STP consiste
donc en une intégration intra et inter – bancaire. Le défi, en matière de titres, réside dans une
intégration du traitement dès la phase de négociation jusqu'au règlement-livraison. Pour un
établissement donné, le STP permettra de rationaliser la gestion des flux titres et espèces,
sachant que les cellules de back office titres et espèces sont de plus intégrées : les mécanismes
de repo et de prêt-emprunt de titres ont imposé cette intégration, la trésorerie titres venant
souvent secourir la trésorerie espèces lors de besoins de liquidités.
542
Le concept STP est apparu dans les années quatre-vingt-dix sur le marché des titres. Il désigne le traitement
sans rupture de charge, de l’exécution à son règlement-livraison, sans intervention manuelle. En 1998, la
démarche STP prend forme avec la création de l’association GSTPA – Global STP Association par des banques
anglo-saxonnes, visant à traiter les ordres de bourse dans la journée. La pression augmente en 2001 lorsque le
président de la SEC exhorte l’industrie financière américaine à raccourcir les délais de règlement-livraison en
faisant passer la date de dénouement de J+3 à J+1, grâce à l’automatisation de chaque étape du processus, ceci
entraînerait des économies annuelles de 2.7 milliards $ (même si, selon la Securities Industry Association, il
faudrait, au préalable, investir 8 milliards $). La date est fixée à juin 2005. Mais, à la suite des attentats du 11
septembre 2001, le délai est reporté sine die et le GSTPA disparaît.
Leblanc-Wohrer, L’automatisation des process en quête de clarification, L’Agefi, 4 décembre 2003
543
Perna T., Systèmes de règlement en Europe : les moteurs du changement, Banque Stratégie, septembre 1999
544
Fiorini, Institutional trade processing, what’s next, Canada, 19 novembre 2002
545
Franceschetti L., Le « Straight through processing » ou comment maintenir un avantage compétitif par
l’optimisation des flux et l’automatisation des transactions financières, B & F – Hors série, Genève, octobre
2002
291
Pour un dépositaire central, compte tenu de l’accroissement des volumes de négociation et de
la très forte volatilité des marchés, la transmission en temps réel des négociations boursières
devient indispensable pour trois raisons principales 546:
-
Démarrer une gestion des risques le plus rapidement possible pour assurer une plus grande
sécurité aux participants et à l’industrie des titres en général,
-
Se réserver une possibilité de gérer les suspens de fin de journée pour maximiser le
règlement-livraison des négociations,
-
Accélérer la préparation des dénouements du lendemain.
En effet 547, plus tôt est confirmée une négociation, plus grande est la possibilité de diminuer
le risque de désaccord entre les contreparties, et donc de diminuer le risque de règlement. Car
plus le cycle de règlement est long plus le risque de défaut de la contrepartie est important et
plus le risque de volatilité des cours est fort.
Afin de schématiser les enjeux de la réduction du cycle de dénouement, nous reprenons ciaprès (schéma 9) les conséquences de l’automatisation des procédures (straight through
processing) 548 :
546
Dirks D.J., A White Paper to the Industry on T+1, DTCC, July 2000
Heinrich G., Standards would lower securities settlement risk, ABA Banking Journal, March 2001
548
Kirby A., Reducing settlement risk and cost : the role of Swift, DVP : Cross-border securities settlement,
Paris 5&6 October 1995
547
292
Schéma 9 : Impact du STP
Environnement
dématérialisé
Benchmarked
straight-through
Processing
Amélioration des
services clients
Amélioration de
la compétitivité
Réduction
du cycle de
gestion des
transactions
Réduction des
risques
Amélioration des
performances
Meilleure
consolidation des
informations
boursières
Diminution des
interventions
humaines /
diminution des
inputs
Marsh et Vinner 549, étudiant l’évolution des paiements internationaux, constatent que, compte
tenu des coûts élevés de structure, seuls les grands établissements seront à même de satisfaire
les exigences des entreprises multinationales. En conséquence, les prestataires de paiements
internationaux doivent obligatoirement proposer un accès unique à l’ensemble des données.
Et c’est sur ce point précis qu’il nous semble opportun de relier leur réflexion à la notre.
Lesdits prestataires de paiements internationaux, comme les dépositaires de titres, doivent
offrir un accès unique à l’ensemble des données (comptes, devises, marchés), prenant la
responsabilité des flux de paiement de « bout en bout ».
549
Marsh N., Vinner N, La transformation des paiements internationaux, La lettre de l’EFMA n°157,
janvier/février 1999
293
Pour ces auteurs, cette notion de traitement de bout en bout reprend les différentes étapes de la
chaîne de valeur (schéma 10) qui peut être transposée facilement aux opérations de règlementlivraison de titres.
Banque
Régler
Traiter
Transmettre
Capter les
informat°
Capter
paiement
Valider
client
Initier
Schéma 10 : La chaîne de valeur appliquée aux opérations de règlement-livraison
Prestataires de services
Ce schéma 10 présente, selon nous, le principe du Straight Through Processing.
Mais si la réduction du délai de règlement-livraison a permis une diminution des risques de
NSCC à hauteur de 58 % (selon le rapport Bachmann
550
)
551
, et si une réduction du délai à
moins de J+3 permettrait de réduire le risque de crédit sur les contreparties
552
, il n’en
demeure pas moins que des problèmes persistent dans la mise en place du principe du « sameday settlement » dans certains pays.
550
Bachmann task force on clearance and settlement reform in US securities markets, 1992
- It has been estimated that a move to T+1 in the US – reducing the amount of outstanding settlement
exposure by two-thirds – could lower risk exposure by US 250 billion and allow the system to accomodate future
growth in trading volumes. The Securities Industry Association, T+1 Business Case, Final Report, July 2000 in
Giordano F., Cross-border trading in financial securities in Europe, The role of central counterparty, European
Capital Markets Institute 2002.
- The ultimate goal is to shorten the settlement cycles to one day after a trade has been executed, T+1, and to
achieve what’s called straight-through processing, the industry jargon for allowing trades to move
electronically from order through settlement while connecting all parties seamlessly. That would cut the cost
processing transactions in half. “The US securities industry could achieve growth of $ 6.2 billion to $ 11.9
billion net income between 2001 and 2004 by implementing straight-trough processing” said Capital
markets’ Anastasio. Darby R., A new global standard : Clearing and settlement execs revamp the system,
The Investment Dealers’ Digest, April 2000
552
Levitt A., Speeding up settlement : the frontier, Presentation at « Risk reduction in payments, clearance and
settlement systems symposium », 1996
551
294
-
Les investisseurs individuels ayant choisi la détention physique des titres ou
l’enregistrement en nominatif ne peuvent livrer les titres à temps 553,
-
L’intervention de plusieurs
intermédiaires,
donneurs
d’ordres, négociateurs et
conservateurs compliquent les traitements.
Aussi nous semble-il opportun de considérer le traitement en J+1 comme étant un premier pas
vers le temps réel 554. La notion de temps réel, selon Giordano 555, n’apportera pas forcément
la technique de règlement-livraison la plus efficiente pour les intermédiaires financiers: elle
requiert, en effet, une refonte générale des structures existantes afin de permettre un
règlement-livraison assis sur le principe des traitements de gros en temps réel, et remet en
cause les avantages du netting. Or, aux Etats-Unis, chez DTCC, plus de 95 % des
négociations sont compensées, ce qui permet, selon l’auteur, de réduire les livraisons
quotidiennes de plus de 5 millions.
Selon nous, nous référant à notre enquête auprès des principaux établissements financiers, une
uniformisation, sur l’ensemble des places financières, des délais de livraison contre paiement
nous semble plus opportune que la mise en place du « STP ». En effet, une diversité des délais
de règlement induit un allongement du traitement post-marché des négociations
transfrontalières.
Il a déjà été mentionné au chapitre II que le coût d’une transaction transfrontalière est de 2.5 à
4 fois plus chère en Europe qu’une transaction domestique (le surcoût incombant, à hauteur de
60 %, au manque d’harmonisation, et, à hauteur de 5 %, à la multiplicité des dépositaires
centraux).
D’autres études concluent également à un surcoût de ces transactions.
553
A titre d’exemple, en France, lorsqu’un titre est inscrit en nominatif au gré du détenteur (pour une valeur
occasionnellement nominative), une conversion de la forme nominative à la forme porteur est préalable à toute
négociation boursière.
554
« T+1 » will reduce the number of failed cross border trades, opening up connectivity among participants
involved in post-trade, pre-settlement securities processing.
Kirby A., Rising to the challenge of global STP, Global Investor, November 1999
555
Giordano F., Cross-border trading in financial securities in Europe, The role of central counterparty,
European Capital Markets Institute 2002
295
Domowitz et al.
556
estiment que les coûts et commissions (qui intègrent les coûts de
règlement-livraison) des brokers payés par les investisseurs pour leurs négociations sur la
plupart des bourses européennes sont entre 3 et 5 fois plus élevés que ceux payés sur les
places américaines.
Une étude de J.P. Morgan et Mc Kinsey
557
précise que le coût total d’une transaction
transfrontalière de gros montant est 1.3 fois le coût d’une transaction domestique. Selon ladite
étude, 54 % du surcoût sont concentrés sur les frais de courtage, 40 % sont dus aux
différences de législations et autres régimes fiscaux, et 11 % incombent à l’organisation postbourse.
Enfin, une étude de la Deutsche Börse 558 relève que les transactions transfrontalières de gros
montants enregistrent un surcoût de 30 % par rapport aux mêmes transactions domestiques,
mais l’écart est de 150 % pour les opérations de détail.
L’étude justifie la différence comme suit :
-
40 % du surcoût proviennent de la différence de réglementations, d’imposition …,
-
40 % émanent des différences de cultures et donc du faible volume de transactions
transfrontalières dû au comportement des investisseurs,
-
20 % incombent aux multiples organismes concernés par une transaction transfrontalière
(intermédiaires, bourse, contrepartie centrale, dépositaire …).
En conséquence, certains intermédiaires financiers
559
, tel BPSS
560
, préconisent une
harmonisation totale des procédures post-marché existantes, avant de faire évoluer ces mêmes
procédures.
Nous présentons, dans le schéma 11, un exemple de STP tel que conçu par un dépositaire.
556
Domowitz I., Jack Glen, Ananth Madhavan, Liquidity, volatility and equity trading costs across countries and
over time, International Finance n°2, Summer 2001
557
Mc Kinsey, JP Morgan, The future of equity trading in Europe, February 2002
558
Deutsche Börse, Cross border equity trading, clearing and settlement in Europe, April 2002
559
European Central Bank, Summary of the responses to the ESCB / CESR call for contributions on European
clearing and settlement systems, 1st August 2002
560
BPSS supports the Wise Men Committee’s assertion that, beyond minimum regulatory harmonisation, any
restructuring in the field of securities and settlement should be governed by the market.
In particular, market practices should dictate :
- choice of settlement location,
- choice of DVP settlement,
- use of standards, such as Swift formats, ISIN codes (securities) and BIC codes (counterparties),
- trade confirmation,
- settlement cycles,
- repurchase agreements, buy and sell backs, and securities lending and borrowing practices.
Sources :
- BNP Paribas Securities Services, Clearing and settlement in the European Union, Main
Policy Issues and Futures Challenge, 2003
- BNP Paribas Securities Services, Contribution to the joint CESR/ECB consultation in the
field of clearing and settlement, 06/05/2002
296
Schéma 11 : L’exemple du STP vu par DTCC (The new settlement model)
Matching des
négociations Livraisons
ionnelles
CNS
institut
Syndicats
Maturités
MMI
Clients
Input MMI,
ordres,
obligations …
Emissions
MMI
Système
MMI
INVENTORY MANAGEMENT SYSTEM (IMS)
Négociations
agrées
DROPS
Système
RAD
ATP
Système
RAD
Système de
dénouement
DTCC
ATP : Automated Transaction,
the depository’s core book-entry
processing system
RAD : Receiver authorized
delivery
MMI : Money market instrument
CNS : Continuous net settlement
Drops : automated recycled
deliveries failed system
Système
fédéral
Depository Trust and Clearing Corporation, Straight-through processing, A new model for settlement,
January 2002
Depository Trust and Clearing Corporation, Real-time matching for NSCC – eligible fixed income
securities : Business overview, August 2001
297
Pour autant que le délai de règlement soit de T+3 ou plus faible, le principe de la livraison
contre paiement n’est valable, dans l’optique de minimisation des risques, que s’il est assorti
de l’irrévocabilité. En effet, ce principe de livraison contre paiement comporte trois éléments
fondamentaux : la simultanéité des règlements espèces et des livraisons de titres, mais
également, la bonne livraison des titres et son irrévocabilité, et le règlement définitif des
espèces.
3.3 L’irrévocabilité des mouvements
Un règlement est dit irrévocable lorsqu’il est considéré final et inconditionnel.
Les autorités de tutelle adopte souvent la notion de transfert définitif. L’irrévocabilité est
l’extinction des obligations de paiement et de règlement ainsi que des obligations connexes.
Un transfert définitif est un transfert irrévocable et inconditionnel qui éteint l’obligation
d’effectuer le transfert 561.
L’irrévocabilité
562
des dénouements assure donc aux parties que leur opération, une fois
dénouée par le système de règlement-livraison, ne pourra en aucun cas être remise en cause.
Cette assurance ne peut, bien évidemment, résulter que du caractère certain des provisions
titres et espèces sur lesquelles s’appuient les contrôles. Tant que l’irrévocabilité d’un
mouvement n’est pas avérée, il existe un risque de crédit qui porte sur le montant à régler.
Les principales banques centrales
563
se soucient désormais de la sécurité juridique des
paiements et de toutes les opérations de règlement, domestiques ou internationales, réalisées
par les établissements de crédits et les maisons de titres ou entreprises d’investissement qui
561
Bank for International Settlements, Delivery versus payment in securities settlement systems, septembre 1992
L’irrévocabilité ne doit pas être confondue avec la garantie de bonne fin qui représente la certitude donnée à
chaque partie que le dénouement d’une opération se réalisera quelle que soit la situation de la contrepartie. Cette
garantie ne peut venir que d’un tiers dont le rôle est de couvrir ce type de risque ; c’est là le rôle d’une chambre
de compensation (tel que décrit dans les fonctionnalité d’une chambre de compensation), il se distingue du rôle
d’opérateur de dénouement et de celui d’agent de règlement.
563
« La Directive 98/26/EC de mai 1998 relative à l’irrévocabilité dans les systèmes de paiement et de
règlement-livraison de titres a pour objet :
- d’éliminer le risque juridique,
- prendre en compte le risque systémique inhérent aux systèmes bruts ou nets,
- assurer que le fonctionnement d’un système ne soit pas compromis par une loi étrangère relative à
l’insolvabilité,
- améliorer la gestion de la collatéralisation ».
Banque Centrale Européenne, Blue Book Payment and securities settlement systems in the European Union, 3ème
edition, June 2001.
562
298
participent, grâce à leur interconnexion, à des systèmes de règlements en bruts ou en nets,
portant sur des espèces ou des titres. A cette fin, elles requièrent, de plus en plus, le caractère
définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres
564
.
Etudiant la Directive européenne relative audit caractère définitif des règlements, Bloch
565
expose les raisons qui conduisent les autorités de tutelle à assurer la sécurité juridique des
paiements.
Ces raisons sont d’ordre politique, juridique et économique.
-
Les banques centrales doivent promouvoir le bon fonctionnement des systèmes de
paiement .
-
Depuis la déréglementation et la liberté de circulation des capitaux en Europe, les
systèmes de paiements ou de règlement-livraison de titres présentent des incertitudes
notamment en cas de procédure collective de l’un des intervenants susceptible de remettre
en cause les opérations effectuées … … Or la solidité et la fiabilité des systèmes de
paiement ne peuvent se satisfaire de la révocabilité des paiements
566
ou de
l’inopposabilité des sûretés en cas de défaillance d’un participant. Une directive
européenne vise donc à protéger les systèmes de règlement contre les effets perturbateurs
de la procédure d’insolvabilité d’un participant en reconnaissant le caractère définitif des
564
Les exemples suscités de faillites, telles celles de Drexel Burnham Lambert ou de Barings, et le krach de 1987
ont mis en lumière l’importance des systèmes de paiement dans la propagation des tensions financières. Les
banques centrales ont, pour dominer les risques liés à l’exécution transactions, élaboré une position commune
qui repose sur le principe du « règlement en temps voulu ». Ledit principe a pour but de garantir le règlement
définitif de la transaction engagée pour éliminer tout risque d’incident et est en cours d’application dans quatre
secteurs contigus : règlement des transactions sur titres, règlement des transactions sur devises, règlement des
transactions sur produits dérivés, règlement dans les systèmes de paiements bruts.
Drouin M., Le système financier international, Armand Colin 2001
565
Bloch P., La Directive 98/26/CEE concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de
paiement et de règlement des opérations sur titres in Mattout J.P., de Vauplane H. (sous la direction de), Droit
Bancaire et Financier, Banque Editeur 1999
566
Lorsque les paiements sont révocables dans un système net, si un participant est défaillant, l’ensemble de ses
transactions de la journée est automatiquement annulé. La chambre de compensation doit alors recalculer
l’ensemble des balances nettes pour les participants restants jusqu’à ce que toutes les contreparties soient en
mesure de régler leur position. Un effet domino est, en conséquence, possible si les pertes de recettes n’ont pas
été anticipées. Le phénomène est encore aggravé s’il n’y a pas de limites aux découverts intraday non sécurisés
qui peuvent atteindre un multiple des fonds propres.
L’existence d’une clause de révocabilité menace donc l’intégrité du réseau de paiement lors d’une défaillance
d’une partie: le défaut de règlement initial peut se diffuser et générer un effet domino de par les interconnexions
entre les positions des contreparties.
Pour maîtriser ce risque, il faut une irrévocabilité instantanée des ordres.
Rochet J.C.,Tirole J., Interbank lending and systemic risk, Journal of Money, Credit and Banking, November
1996
299
paiements et en maintenant les garanties remises en vue d’obtenir des découverts
intrajournaliers et des liquidités pour régler les engagements entre participants.
-
Les banques centrales se sont penchées sur les risques attachés aux paiements de gros
montant entre banques dont les volumes échangés représentant en quelques jours le
montant du produit intérieur brut des pays industrialisés
567
. Dès lors, les systèmes de
règlement interbancaire connaissent des risques de liquidités particulièrement graves en
cas de défaillance d’un participant pouvant conduire à un risque systémique.
Lorsqu’un système de règlement – livraison n’assure pas le caractère définitif des règlements,
il existe un risque de suspens
568
. En effet, si un participant vient à faire faillite entre le jour
d’une négociation boursière et le jour du dénouement de ladite négociation, il ne pourra faire
face au règlement de son achat, le mouvement ne pourra donc pas être dénoué.
De surcroît, lorsque le règlement est considéré comme définitif, il offre aux participants
vendeurs des liquidités certaines.
L’irrévocabilité des mouvements est, certes généralisée sur la plupart des grandes places
financières, mais tous les systèmes n’ont pas la même notion d’irrévocabilité. Elle peut
intervenir en fin de journée, en cours de journée ou en temps réel. Selon cette notion, les
risques ne sont pas identiques.
La révocabilité des paiements
569
, en cas de défaillance d’un compensateur, peut occasionner
des risques de liquidités pour ses contreparties, susceptibles, à leur tour, d’entraîner des
risques de crédit et de perturber le marché.
De même, une irrévocabilité des mouvements intervenant le lendemain (en J+1) peut être
source de risque systémique.
Dans un système à règlement net différé, l’irrévocabilité est prononcée en fin de journée
comptable; or, suite à un défaut d’un participant, les autres participants se trouvent confrontés
567
- En France, ils représentaient, déjà en 1997, 1.100 milliards de francs échangés par l’intermédiaire de la
Banque de France chaque jour, ce qui correspond en quelques jours au montant du PIB de la France.
Note d’information de la Banque de France n°104 .
- Aux Etats-Unis, plus de mille milliards de dollars sont échangés chaque jour pour environ 330 000
virements.
Bucaille J.F., Les systèmes de règlement interbancaire, Banque Magazine n°586, novembre 1997.
568
Crane B., Froot A., Mason P., Merton C., Bodie Z., Perold F., Sirri R., Tufano P., La finance sans frontière,
Economica 1998
569
Bank for International Settlements, Systèmes de paiement dans les pays du Groupe des dix, 1993
300
à des pressions en matière de liquidité, ou à un risque de remplacement, notamment en cas
d’illiquidité sur le marché monétaire et sur le marché de prêt-emprunt de titres.
Ipso facto, un tel système se doit de mettre en place un contrôle draconien des risques de
défaut de ses participants (capital minimal par exemple, collatéralisation)
570
, et une mise à
disposition de liquidités intradays.
Pourtant, malgré un contrôle des risques, certains utilisateurs de systèmes de règlementlivraison de titres ne peuvent se satisfaire d’une irrévocabilité en fin de journée.
C’est le cas :
-
des banques centrales depuis la mise en place des politiques monétaires dirigées par les
taux,
-
des gestionnaires des systèmes de paiement qui requièrent une collatéralisation des
prêts (le collatéral doit pouvoir être transféré dans le système avec une irrévocabilité
intraday, voire en temps réel),
-
des contreparties centrales pour une gestion efficace des appels de marge,
-
des cellules de trading des intermédiaires financiers pour leurs opérations de prêt de titres
(une irrévocabilité en fin de journée peut être source de problèmes de liquidité).
Enfin, dans le dénouement d’une opération transfrontalière, rappelons qu’un défaut d’un
participant à un système de règlement-livraison peut se propager dans un autre système. Pour
éviter cette situation, un gestionnaire de système peut ne considérer le transfert à opérer
comme irrévocable que lorsque sa contrepartie aura déclaré le transfert inverse comme tel ;
mais, dans ce cas, les utilisateurs subissent un coût éventuel d’opportunité.
Exemple d’un dénouement d’une transaction transfrontalière auprès du système Euroclear 571 :
A la moitié des années quatre-vingt-dix, lorsqu’une transaction s’effectuait entre deux
participants Euroclear, chaque transaction était finale durant le processus de nuit. Ainsi, le
matin de la date de dénouement de la transaction, les vendeurs recevaient leurs fonds et
570
Angelini P., Maresca G., Russo D., Systemic risk in the netting system, Journal of Banking and Finance, 1996
- Dinne M., The role of the international securities depositories in promoting DVP, DVP : Cross-border
Securities Settlement, Conference Insig, 5&6 October 1995
- Morgan Guaranty Trust Company of New York, Cross-boarder clearance, settlement and custody :
beyond the G30 recommandations, June 1993
571
301
pouvaient immédiatement les sortir du système pour les réinvestir avec la même date de
valeur.
En conséquence, Euroclear courait un risque, appelé risque de préavis, sur l’acheteur : lorsque
le processus de dénouement de nuit était terminé chez Euroclear, les marchés étaient pour la
plupart tous fermés. Euroclear ne pouvait donc pas avoir la certitude que son correspondant
espèce avait bien reçu les fonds des acheteurs, avant de d’attribuer la finalité aux vendeurs. Il
y avait alors risque de crédit.
Ce risque de crédit appartient à tout dépositaire central ou intermédiaire financier qui traite
une négociation transfrontalières et assure la liquidité du marché.
Contrairement au risque de contrepartie, éliminé en réduisant les décalages entre la livraison
et le paiement, le risque de préavis ne peut pas être éliminé.
Cependant, si les cycles de traitements initiaux au sein des systèmes nationaux sont achevés
très tôt à date de valeur avec irrévocabilité au terme de chaque cycle, les écarts entre livraison
et paiement sont minimisés.
Lorsqu’une transaction internationale a lieu entre un participant Euroclear et une contrepartie
dénouant sa transaction chez un dépositaire domestique, la situation est plus complexe et
risquée :
Un participant Euroclear achète en Euroclear, valeur mercredi, à un autre participant, des
titres domestiques d’une place donnée, et les revend avec la même date de valeur à une
contrepartie locale qui souhaite dénouer cette transaction auprès du dépositaire domestique.
Euroclear est prêt à envoyer l’avis de livraison au dépositaire domestique, cette transaction
sera finale en même temps que les autres transactions entre deux participants du dépositaire
domestique (supposons à 14 heures). A cette heure là seulement, le dépositaire domestique
peut confirmer la finalité de la livraison des titres, et crédite le compte espèce du participant
Euroclear du montant de la vente. Les participants Euroclear, quant à eux, n’ont pas à attendre
la réception des fonds en Euroclear pour pouvoir les utiliser pour régler l’achat de titres.
Ce décalage entre livraison et paiement doit alors être couvert par une ligne de crédit,
générant un risque éventuel.
Pourtant ce risque pourrait être réduit si chaque dépositaire central évoluait vers un système
de dénouement multiple avec irrévocabilité le plus tôt possible après chaque cycle de
302
traitement
572
, accélérant ainsi le processus de confirmation d’acceptation de la livraison
proposée, voire même si les systèmes de paiement tendaient à évoluer vers un dénouement
continu, de telle manière qu’il y ait finalité pendant les heures correspondant aux cycles de
traitement des dépositaires centraux.
Pour autant qu’il nous est possible de comparer les systèmes de règlement-livraison de titres
aux systèmes de paiement
573
, il nous semble opportun de reprendre présentement les statuts
successifs d’un paiement au sein d’un système de paiement qui peuvent être, selon nous,
appliqués aux opérations de règlement-livraison.
Car un règlement irrévocable en cours de journée peut être obtenu soit par l’utilisation de
procédures de règlement brut en temps réel pour les titres et les espèces, soit par le
déroulement de séances multiples et rapprochées de règlement-livraison en cours de
journée 574 ; il permet de sécuriser les échanges de titres et accroît les possibilités d’arbitrage
entre des titres déposés dans des systèmes différents.
Aglietta
575
fait état du risque de système dans la gestion des positions interbancaires, parce
que le réseau interbancaire est "indécomposable" : un risque de liquidité peut résulter d’un
incident dans l’exécution des paiements ou un risque de crédit peut provoquer un risque de
règlement ; lesdits risques peuvent donc être à l’origine d’une crise systémique. Il précise, en
outre, que ces risques deviennent particulièrement dangereux s’il s’agit de paiements de gros
572
Intra-day processing cycles are a good indicator of the efficiency of a settlement system. In essence, periodic
settlement is better than a single end of day settlement mechanism. The greater the number of intra-day clearing
cycles, the greater the flexibility it gives to the user. In addition, multiple processing cycles facilitate the
effective linking of settlement systems, particularly across time-zones.
Guadamillas M., Keppler R., Securities clearance and settlement systems, a guide to best practices, WorldBank
April 2001
573
This table sets out the risks faced in payments, foreign exchange and securities settlement, and the principal
ways in which they are being addressed :
Payments
Foreign exchange
Securities
Principal risk
- RTGS
- Payment
versus - Delivery
versus
- Settlement
across
payment (Continuous
payment
central bank accounts
Linked
Settlement - Settlement of the
Bank)
payment leg across
- Bilateral netting
central bank accounts
- Settlement
across
central bank accounts
Replacement cost risk
Same – day or intraday - Reducing
the - Reducing
the
real-time settlement
settlement risk
settlement cycle
- Bilateral netting
- Central counterparty
Hills B., Rule D., Counterparty credit risk in wholesale payment and settlement systems, Bank of England,
Financial Stability Review, November 1999
574
Bulletin de la Banque de France n°46, L’évolution des systèmes de règlement de titres dans le contexte de la
préparation de l’UEM, octobre1997
303
montants, les transactions élevées peuvent créer des positions débitrices intrajournalières
particulièrement importantes.
Ces problèmes soulevés sur le marché interbancaire peuvent, selon nous, se transposer aux
systèmes de règlement-livraison de titres.
Un risque individuel, de crédit ou de liquidité, dans le réseau interbancaire ou de règlementlivraison, peut se transformer en un risque de système selon les normes du protocole de
règlement.
Lesdites normes sont au nombre de deux :
-
La temporalité du règlement : brut (avec règlement au fil de l’eau) ou net (règlement
simultané du solde de l’ensemble des opérations lors d’une compensation à un instant t de
la journée),
-
La validité du règlement : irrévocable ou non.
S’il s’agit d’un règlement non définitif, les paiements concernant un participant incapable
d’effectuer le règlement final de sa position sont annulés. La compensation est, alors, refaite
sans le membre défaillant et les nouvelles positions sont recalculées.
S’il s’agit d’un règlement irrévocable, les bénéficiaires des règlements sont crédités même si
les débiteurs sont incapables de régler leurs positions nettes auprès de l’agent central de
règlement.
Aussi Aglietta conclut-il à la présence d’un risque systémique dans tout système net,
présentant les trois cas possibles de compensation et règlement brut:
-
si le règlement est net et irrévocable, et que des découverts illimités sont permis en cours
de journée, une banque participante peut être en défaut auprès de l’agent central de
règlement pour des montants importants et définitifs.
Le risque est alors systémique car il se reporte sur la contrepartie centrale ; s’il n’y a pas de
ressources suffisantes pour régler les participants, il existe des externalités négatives
576
, et
l’intervention d’un prêteur en dernier ressort devient indispensable pour sauvegarder la
liquidité.
-
si le règlement est net et révocable, le risque de système prend la forme classique d’une
réaction en chaîne.
575
576
Aglietta M., Le risque de système, Revue d’Economie financière n°18, 1991
Une externalité négative est un processus qui fait sortir l’économie de la plage des équilibre normaux.
304
-
si le règlement est brut, il est logiquement irrévocable puisqu’il n’y a pas de compensation
multilatérale en fin de journée ; les règlements successifs des opérations dépendent les uns
des autres au sein d’une même journée, il n’y a donc qu’un risque de suspens 577.
La Banque des Règlements Internationaux a synthétisé les états successifs d’un paiement
repris dans le tableau 13.
Tableau 13 : Statuts successifs d’un paiement au sein d’un système de paiement 578
PAIEMENT
PRESENTE
•
•
Les informations •
sur le paiement
ont été transmises
au système de
paiement. Cette
étape peut parfois
avoir lieu avant la
date de règlement.
•
Le système de
paiement effectue
différents
traitements,
comme la
validation
PAIEMENT
VALIDE PAR LE
SYSTEME
PAIEMENT
ACCEPTE EN VUE
DE SON
REGLEMENT
Les paiements
•
peuvent être
placés dans une
file d’attente avant
d’être acceptés en
vue de leur
règlement.
Le système de
paiement applique •
ses tests de
gestion du risque
•
Le paiement a
subi tous les tests
de gestion du
risque et autres et
le système a
décidé qu’il peut
faire l’objet d’un
règlement.
Dans un système
en temps réel, le
règlement a lieu
aussitôt après.
PAIEMENT
REGLE
DEFINITIVEMENT
•
Le compte du
règlement du
participant
bénéficiaire au
sein du système
de paiement a été
crédité et le
règlement est
inconditionnel et
irrévocable
Dans un système
net différé, le
paiement est
compensé. Le
règlement a lieu à
l’heure définie.
Pour juger de l’importance de la notion d’irrévocabilité des règlements, nous reprenons le cas
de la Banque Herstatt étudié par Kamata 579 . L’irrévocabilité est présentée dans le schéma 12.
577
Selon la Fédération internationale des Bourses de valeur (Clearing and settlement best practices report,
September 1999), le taux de dénouement des négociations boursières, sur les principales places financières,
s’élevait, en 1999, à 97.25 %, contre 97.5 % en 1996.
578
Bank for International Settlements, Core principles for systemically important payment systems, January
2001
305
Schéma 12 : Analyse de la période d’irrévocabilité
Case 1 : sans irrévocabilité
Herstatt
Bank
Case 2 : avec irrévocabilité
Delbrueck
Bank
Herstatt
Bank
contrat
Delbrueck
Bank
contrat
Instruction
de paiement
en $
(irrévocable)
Risque
Herstatt
Règlement
des marks
Règlement
des dollars
Règlement
des marks
Délai
Risque
Herstatt
Règlement
des dollars
Développement du cas
Delbrueck
Au vu de ce schéma 12, il nous semble qu’une conclusion évidente est à tirer.
Rappelons que les marks n’avaient pas été livrés avant l’enregistrement du règlement en
dollars, compte tenu du décalage horaire. Dans le cas n°2, Delbrueck aurait annulé le
règlement en dollar dès la mise en faillite d’Herstatt, et évité tout risque.
579
Kamata S., Measuring « Herstatt risk », Bank of Japan monetary and economics studies September 1990
306
3.4 Les conditions supplémentaires d’efficience : prêt-emprunt de
titres liquide, marché de repos, collatéralisation et liquidité intraday
Les conditions fondamentales d’efficience ont été traitées dans les paragraphes at supra de ce
chapitre. Mais elles doivent être, selon nous, complétées par des fonctionnalités permettant de
fluidifier davantage encore les traitements post-bourse.
Parmi ces fonctionnalités, les opérations de prêt-emprunt de titres et de repos optimisent le
taux de dénouement des transactions. Une collatéralisation, donc une prise de garanties,
sécurise le système de règlement-livraison. Enfin, la mise à disposition de liquidités intradays
induit une diminution des suspens.
Pour prendre conscience de l’utilité des prêts-emprunts de titres, d’un marché liquide de
« repos », ou encore d’une collatéralisation et des liquidités intradays, nous reprenons ici la
nécessaire connexion entre les systèmes de paiement et systèmes de règlement-livraison de
titres, en prenant l’exemple de la Zone Euro, et plus particulièrement celui de la France.
Une politique monétaire n’est efficace que si ses mécanismes de transmission sont
performants et, à cet égard, le bon fonctionnement des systèmes de règlement-livraison est un
facteur crucial de réussite
580
. A titre d’exemple dans la zone euro, les opérations de la
politique monétaire supposent que les banques puissent utiliser tous les titres éligibles, quel
que soit leur lieu d’émission, comme collatéraux en couverture des transactions. Aussi les
systèmes de règlement-livraison de titres doivent-ils répondre à des critères de fiabilité et de
sécurité performants. Le dénouement des mouvements sur valeurs mobilières doit être intégré
aux mécanismes des systèmes de paiement, à défaut il existe un risque systémique.
Pour illustrer les interconnexions entre les systèmes de règlement-livraison de titres et les
systèmes de gestion des moyens de paiement, nous reprendrons, dans le schéma 13, le schéma
de la Banque de France.
580
L’évolution des systèmes de règlement de titres dans le contexte de la préparation de l’UEM, Bulletin de la
Banque de France n°46, octobre1997
307
Schéma 13 : Système européen
Banque Centrale Européenne
Système
D’information
Banque de France
Appels d’offres réguliers
Banques
Commer
ciales
T
A
R
G
E
T
Front office
Réglage fin
Back office
Facilités permanentes
Règlement
Espèces
RTGS
Livraisons
supports
Flux
espèces
TBF
Interface
RGV titres
domestiques
Dépositaire
Interface
papier
privé
Interface
Mobilisation
transfrontière
(banques commerciales)
Dénouement titres
Circuits titres
Circuits espèces
BCNs
RGV
Sources : Bulletin de la banque de France
N°54 – juin 1998
Interface
Mobili
sation
TransFronti
ère
308
Les prêts du système européen des banques centrales doivent être traités par des systèmes de
règlement de titres qui 581:
- garantissent les banques centrales nationales contre la survenance de risques inopportuns
dans la conduite des opérations de politique monétaire et fourniture de crédit intrajournalier
aux participants Target ;
- et offrent le même niveau de sécurité pour toutes les opérations des banques centrales
nationales quelle que soit la façon dont elles sont réglées au sein de l’Union européenne.
La sophistication croissante des systèmes de paiement et leur évolution vers le temps réel
s’accompagnent d’une interdépendance entre les flux espèces et les flux de titres. Ainsi
l’irrévocabilité en temps réel des systèmes de titres nécessite le règlement en monnaie centrale
des opérations, ce qui explique la nécessité de liens étroits avec la banque centrale. De même,
l’irrévocabilité en temps réel des systèmes de paiement nécessite un apport de liquidité
intrajournalière que les banques centrales fournissent fréquemment par le biais d’avances
garanties par des titres. Les contreparties de la Banque de France ont la possibilité, dans un
cadre de règlement-livraison en temps réel :
-
d’apporter en garantie à la Banque de France des titres qui leur ont été livrés le jour même
par d’autres contreparties ;
-
de pouvoir disposer des titres restitués par la Banque de France lors du remboursement
d’une opération, dès le moment où l’opération est exécutée dans RGV ;
-
de disposer irrévocablement des fonds alloués dès que leur compte est crédité sur les
livres de la banque et ainsi de pouvoir replacer ces fonds sur le marché valeur même
jour. 582
Si l’interconnexion des systèmes et des places a pu poser des problèmes dans les crises
passées, il est cependant incontestable que celle-ci a permis de dessiner des réseaux pour les
transactions de petits montants (on line, ordres de bourse par Internet). Ces ordres de petit
montant, dématérialisés d’emblée, peuvent être agrégés automatiquement et rejoindre très
rapidement les « autoroutes de paiement de gros montants » favorisant la baisse des coûts de
transaction. Sur la place de Paris, la plate-forme unissant TBF, PNS et RGV, assure une
mobilité et une disponibilité constante de la monnaie centrale au moindre coût. 583
581
Banque Centrale Européenne, Communiqué de presse – 29 septembre 1998
Pauly E., Banques centrales et opérations sur titres, Banque Stratégie n°132, septembre 1999
583
Hannoun H., Places financières et banques centrales, Revue d’Economie Financière mars 2000
582
309
3.4.1 Le prêt de titres
3.4.1.1 De l’utilité d’un système de prêt – emprunt de titres
Globalement, un système de prêt-emprunt de titres est utilisé pour 584:
-
les systèmes de règlement-livraison de titres pour assurer la fluidité des marchés et
diminuer les risques de contrepartie,
-
la vente à découvert,
-
la couverture des produits structurés et dérivés, afin de protéger la performance,
-
l’harmonisation fiscale (certains gérants de fonds, cherchant à minimiser les dividendes,
optimisent le coût d’emprunt),
-
le refinancement des établissements financiers et des entreprises (une entreprise à court de
trésorerie peut, en échange de liquidités, offrir en garantie son portefeuille d’emprunts
d’Etat, de valeurs mobilières ou de titres d’autocontrôle).
Le prêt de titres s’entend, ici pour nous, comme étant un prêt de titres automatisé.
En aucun cas, il ne concurrence les prêts de gré à gré, et ce pour trois raisons :
-
une raison économique : les activités de marché traitées dans un système de règlementlivraison de titres couvertes par des prêts de titres de gré à gré reposent sur des concepts
purs de marché,
-
une raison technique : la mise en place d’un prêt, dans un système de règlement-livraison,
est subordonnée à l’existence préalable de titres prêtables,
-
une raison fonctionnelle : les promesses gratuites de prêts, dans un système de règlementlivraison, sont automatiquement annulées dès lors que le participant a une couverture.
3.4.1.2 Le prêt de titres automatisé tel que conçu au départ par RGV (mais non mis en place)
RGV, pour conserver au prêt de titres automatisé toutes ses spécificités et pour optimiser la
gestion des titres des participants, devait décomposer ses prêts en 3 phases :
584
Le Page S., Le marché centralisé de prêt-emprunt d’Euronext cherche un second souffle, Les Echos 1er
octobre 2002
310
-
Une promesse de prêts durant la nuit (en cas de défaut de provision titres d’un participant
livreur, remboursables, pour une quantité totale ou partielle, au cours de ces mêmes
traitements de nuit, dès lors que le participant dispose d’une provision de titres suffisante),
-
Une avance de titres pendant la journée, prêt intrajournalier (le solde des promesses est
remboursé en avance de titres intrajournaliers, remboursables, pour une quantité totale ou
partielle, dès lors que le participant dispose d’une provision suffisante),
-
Un prêt ferme automatisé à 24 heures (prêt définitif de 24 heures, basé sur le solde des
prêts intrajournaliers résiduels, non remboursés).
Une vue globale des prestations, telles qu’elles avaient été conçues au départ, est présentée
dans le schéma 14.
Schéma 14 : Prêt de titre Euroclear
20 h J-1
8h
9h30
Avances
(sur soldes des promesses non
remboursées à 8 h)
Promesses
Remboursement
Gratuité
Rembt. des
PL sur TMP
Remboursement
20 h J
Prêts fermes (24h)
(sur soldes des
promesses non
remboursées à 8 h)
Remboursement
Remboursement
Taux réduit
17 h
Plein tarif
Source : Euroclear, le prêt de titres automatisé
Tarif emprunts
311
3.4.1.3 Un exemple : De l’utilité d’un prêt de titre comme instrument d’arbitrage 585
Le cas reprend les éléments d’une opération réelle : échange de titres, sociétés concernées,
calendrier des transactions, cours des titres, montants échangés, gains réalisés.
•
Les données
Début octobre 1990, un accord intervient entre les sociétés Dumez et Lyonnaise des Eaux
pour un échange de titres sur la base de 4 actions nouvelles Lyonnaise pour 3 actions Dumez,
échange appliqué en Sicovam le 7 novembre 1990.
A la date de l’échange, le 31 octobre, jour de la liquidation d’octobre
586
, les actions
Lyonnaise devenaient automatiquement, en Sicovam, des actions nouvelles LyonnaiseDumez, mais le centralisateur ne devait appliquer l’échange des titres nouveaux contre des
titres anciens Dumez que le 7 novembre.
•
Le déroulement de l’opération
Dès l’annonce de l’opération, un intermédiaire prend une option d’emprunt pour 200 000
actions Lyonnaise qui deviendront automatiquement des actions nouvelles Lyonnaise-Dumez
le 31 octobre, jour de l’échange.
-
le 15 octobre 1990 :
Après l’intervention des arbitragistes du front office auprès du back-office pour s’assurer de la
réservation d’une option d’emprunt sur les actions Lyonnaise-Dumez 587,
ceux-ci achètent
124 740 actions Dumez
et vendent, simultanément, à découvert
166 320 actions nouvelles Lyonnaise-Dumez
(couvertes par l’option d’emprunt)
pour 86 735 800 F (cours moyen : 521.5).
Les quantités correspondent aux parités de l’échange en cours (4 contre 3).
585
Le 31 octobre 1990 :
Basle P., Global custody : la stratégie avant la logistique, Banque Stratégie n°112, janvier 1995
La valeur était cotée sur le Marché à Règlement Mensuel.
587
télex de confirmation à la contrepartie et paiement d’une commission d’option de 0.40 % sur la totalité de
l’option.
586
312
Le dénouement des positions en Sicovam et le règlement espèces en Banque de France
s’enchaînent.
Leur bonne fin dépend de la coordination entre les intervenants (arbitragistes, back office de
l’emprunteur et du prêteur, Sicovam).
Il y a donc :
-
réception en Sicovam des 124 740 actions anciennes Dumez,
-
exercice de l’option d’emprunt pour 166 320 actions nouvelles Lyonnaise-Dumez,
-
virement de la garantie espèces en Banque de France (110 % du montant des
actions empruntées : 86 735 800 F x 110 % = 95 409 380 F),
- livraison des 166 230 actions nouvelles Lyonnaise vendues à découvert et dont
l’option est exercée 588,
- présentation à l’échange, auprès du centralisateur, des 124 740 actions anciennes
Dumez.
-
Le 7 novembre 1990 :
L’échange est programmé pour le 8 novembre par le centralisateur, mais l’inscription des
titres en Sicovam intervient le 7 novembre.
Il y a donc :
-
réception des actions nouvelles Lyonnaise-Dumez (166 230)
-
remboursement, le même jour, au prêteur, des 166 320 actions nouvelles
empruntées 589.
•
Les résultats de l’opération sont les suivants:
Côté emprunteur :
-
pour le back-office : en empruntant les titres, celui-ci accélère les rentrées de fonds
valorisés au TMP (Taux moyen pondéré du marché monétaire) ; le gain de trésorerie est
alors de 186 424 F (86 735 800 x 9.672% x 8/360),
588
589
récupération, par cette opération, d’un montant de 86 735 800 F.
la durée de l’emprunt va donc du 31 octobre au 7 novembre, soit 8 jours francs.
313
De ce gain, doivent être déduits les frais d’emprunt et la commission d’option d’emprunt
prélevés par le prêteur lors de la restitution de la garantie espèce 590.
-
pour le front office : Son opération d’arbitrage entre le coût d’achat des actions Dumez et
leur revente sur le Règlement Mensuel (actions devenues Lyonnaise-Dumez) est de 11
300 000 F (86 735 800 – 75 435 800) 591.
Côté prêteur:
-
le coût de l’emprunt facturé à l’emprunteur est de: 3.5 % x 78 835 680
592
x 8/360 = 61
316 F.
-
le coût de l’option de l’emprunt de 0.40 % (pour la période allant du 15 au 31 octobre)
soit : 200 000 x 474 x 0.40 % x 15/360 = 15 800 F.
•
Les conclusions de ces opérations apparaissent ainsi :
Finalement le coût total de l’opération, pour l’emprunteur s’élève à :
77 116 F (61 316 + 15 800)
alors que ses gains s’élèvent à :
11 486 424 F (186 424 + 11 300 000).
Tous les intervenants sont donc gagnants : L’emprunteur parce qu’il peut effectuer des
opérations d’arbitrage fructueuses, le prêteur puisqu’il valorise sa conservation titres 593.
Une opération de prêt fait intervenir un risque à analyser et à prévoir :
-
risque de non-remboursement des titres pour le prêteur de titres,
-
risque de non-remboursement de la garantie en nantissement (espèce ou collatéral) pour
l’emprunteur de titres,
-
590
suivi et valorisation du risque (appel et restitution de marge).
Le coût de garantie est « nul » puisque celle-ci est restituée par le prêteur avec les intérêts moins les
commissions.
591
Le cours de l’action Dumez au 15.10.90 évoluait autour de 605 F (cours d’ouverture à 607 F).
592
le cours appliqué à l’exercice de l’option de l’emprunt, à partir du 1er novembre, est un cours moyen au
31.10.90, soit : 474 x 166 230 = 78 835 680.
593
Le 31.10.90, le taux de prêt s’est élevé à 9 %.
314
C’est pourquoi toute opération d’emprunt de titres doit s’appuyer, juridiquement, sur un
contrat – type de prêt-emprunt prévoyant les clauses de son application, de sa contestation et
de sa dénonciation.
Le gagnant final d’une telle opération est le marché des valeurs mobilières puisque son
activité en est grandement accrue grâce aux opérations d’arbitrage facilitées par la
pratique du prêt-emprunt de titres : bons contre actions, droits contre actions, options
contre actions, échanges d’actions, conversions …
Dans le cas présent, on constate que l’activité de prêt-emprunt de titres dépasse le cadre
traditionnel des opérations techniques de liquidation des positions ou de dénouement.
3.4.2 Les repos 594
3.4.2.1 La technique
La pension est une opération par laquelle une personne morale cède en pleine propriété à une
autre personne morale, moyennant un prix convenu, des valeurs, titres ou effets, et par
laquelle le cédant et le cessionnaire s’engagent, respectivement et irrévocablement, le premier
à reprendre les valeurs, le second à les rétrocéder, pour un prix et à une date convenue595.
A l’international, les opérations de pension les plus communes sont les mises et prises en
pension et les achats et ventes.
Une mise en pension s’articule autour d’un transfert de titres par une partie (le cédant) à une
autre (le cessionnaire) contre un montant convenu de liquidités, et d’un accord connexe, passé
simultanément par le cédant, de racheter les titres à une date future précisée dans le contrat ou
sur demande, à un prix déterminé.
Une prise en pension est la même opération vue par le cessionnaire.
Lors d’une transaction d’achat et vente, deux intervenants concluent simultanément deux
accords séparés portant une valeur identique : une vente de titres pour un règlement normal et
594
Karyotis C., Les repos, indispensables au développement des marchés de capitaux, Banque Magazine,
septembre 2003
595
loi du 31 décembre 1993
315
une négociation à terme de rachat par le vendeur à une date donnée. Cette formule de réméré
596
ne fait pas toujours l’objet d’un contrat cadre de pension, et reste utilisée lorsqu’il existe
des restrictions sur les marchés des pensions ; aussi tombe-t-elle en désuétude.
Les échéances des pensions sont de trois types :
-
La pension au jour le jour (overnight maturity) arrive à échéance le lendemain du
règlement initial,
-
La pension ouverte (open) est sans échéance définie, chaque partie pouvant mettre fin à
l’opération sur demande, en vue de minimiser les coûts,
-
La pension à terme (term maturity) présente une échéance, précisée dans le contrat,
supérieure à un jour.
Enfin, les dispositions de conservation des titres diffèrent selon les pensions :
-
La pension livrée propose que le cédant transfère le contrôle des titres au conservateur du
cessionnaire à la date du règlement initial et l’acquéreur procède à l’identique, pour le
contrôle des titres, envers le conservateur du cédant à la date d’échéance 597.
-
La pension tripartite existe lorsque les deux parties utilisent un conservateur commun.
Celui-ci s’assure que chaque partie s’acquitte de ses obligations respectives, vérifie la
conformité des titres et procède aux appels de marge nécessaires, réduisant les coûts de
transaction. Au-delà du service d’intendance, la pension tripartite a surtout permis l’entrée
sur le marché d’un plus grand nombre d’acteurs aux profils de crédit très disparates, tout
en maintenant la sécurité du marché 598.
-
La pension conservée en dépôt consiste en ce que le cédant détient en garde les titres au
nom du cessionnaire. Si les coûts de transaction sont ici réduits, le risque est maximal
pour l’acquéreur. En conséquence, le cessionnaire requiert un rendement plus élevé que
dans les autres opérations de pension, cette méthode est alors plus onéreuse.
596
La principale différence entre une opération de réméré et une pension réside dans le fait que, pour une
pension, les contreparties s’engagent ici respectivement, l’une à rembourser les liquidités, l’autre à restituer les
titres, phénomène non obligatoire pour un réméré.
Figuet J.M., La sécurisation de la liquidité intrajournalière dans un système à règlement brut, Revue Economique
vol. 51 n°4, juillet 2000
597
Si le transfert s’effectue par une procédure de livraison contre paiement, le risque de crédit encouru par le
cessionnaire à l’égard du cédant est minimisé.
598
Aquerre M., Cohen J.D., L’introduction de l’euro sur le marché du repo, Banque Stratégie n°142, octobre
1997
316
Ces opérations sont regroupées sous la terminologie anglo-saxonne de repo – repurchase
agreement. A l’inverse, une reverse repo est un achat temporaire de titres pour revente
ultérieure.
3.4.2.2 Les acteurs
Les emprunteurs de titres ou d’espèces sont les agents ayant acheté des titres non encore
livrés, les vendeurs à découvert (pour compte propre ou compte de tiers), les intervenants sur
les marchés dérivés, les agents face à un besoin de collatéralisation supplémentaire ou les
intermédiaires confrontés à un dysfonctionnement d’un système de règlement-livraison de
titres.
Les prêteurs de titres sont essentiellement des institutionnels recherchant une source de
revenus complémentaires (rentabilisation des avoirs en titres ou minimisation des droits de
garde). Les prêteurs d’espèces sont ceux qui recherchent une alternative à l’achat
d’instruments du marché monétaire 599.
Enfin les banques centrales sont des acteurs privilégiés des marchés de pension : outre leur
besoin de pensions au titre de leur politique monétaire, elles sont parfois acteurs contraints
afin de fournir la liquidité nécessaire au bon fonctionnement des marchés.
Les intermédiaires (brokers-dealers ou market-makers) rapprochent les prêteurs des
emprunteurs et offrent parfois matching et confirmation, si les bourses ne le font pas ellesmêmes.
La compensation et le règlement sont assurés par les chambres de compensation et les
dépositaires centraux de titres qui ont saisi l’importance d’une centralisation des activités de
matching et de compensation en vue d’une minimisation des coûts 600.
Les dépositaires centraux gèrent, dans leurs livres, les opérations de prêt-emprunt tel qu’ils le
font, depuis de nombreuses années, pour les transactions boursières. Ils vont, pour certains,
599
Les reverses repo peuvent leur apporter une plus grande flexibilité que les titres du marché monétaire qui ne
proposent pas forcément la maturité correspondant à leur délai de placement potentiel à un instant t.
600
le montant des règlements peut être réduit par un netting multilatéral et l’anonymat peut être préservé si une
contrepartie (telle Clearnet) s’interpose entre le prêteur et l’emprunteur.
317
jusqu’à rembourser automatiquement les titres au terme des opérations, ou gérer un pool de
titres prêtables pour une automatisation complète des prêts de titres 601.
Les plus avancés, les dépositaires internationaux notamment, proposent des procédures de
prêts de titres internationaux
602
indispensables pour faciliter les règlements transfrontaliers
qui imposent aux agents financiers d’immobiliser des titres ou d’accepter des délais de
livraisons plus importants compte tenu de la non-synchronisation des cycles de traitement des
systèmes de règlement-livraison.
3.4.2.3 Les procédures 603
Avant la négociation, deux contreparties décident d’un prêt conformément à un cadre légal,
décision le plus souvent prise par téléphone à quelques exceptions près de certaines bourses
ayant mis en place des systèmes électroniques de gestion des pensions ; en l’absence d’une
contrepartie centrale, elles doivent s’assurer de la qualité financière mutuelle.
Elles déterminent ensuite les valeurs éligibles à l’opération, le collatéral requis, le terme, le
prix et les appels de marge éventuels.
Il existe trois types principaux de collatéraux :
-
espèces : lorsque des titres spécifiques sont prêtés, les espèces sont utilisées comme
collatéral sur certains marchés (Etats-Unis, Europe, Japon) ou lors de prêts internationaux.
Les espèces sont alors réinvesties dans des titres courts et l’intérêt perçu sur lesdits titres
est partagé entre les deux parties, prêteur et emprunteur.
-
titres : lorsque les repo sont utilisées pour financer une transaction, des titres servent de
collatéral.
-
lettre de crédit : lorsque les contreparties se sont mises d’accord sur une lettre de crédit,
l’emprunteur réclame à sa banque une lettre de crédit d’un certain montant et le prêteur lui
fournit les titres en équivalant à hauteur d’un certain pourcentage de la valeur de marché
601
Un prêt est automatiquement déclenché lors d’un suspens causé par un solde débiteur d’un participant dans un
système de règlement-livraison.
602
Un prêt de titres est qualifiable d’international lorsque l’une ou l’autre des parties, ou les titres, est, ou sont,
de nationalité différente. Dans la pratique, un global custodian ou un conservateur international est sollicité en
tant qu’intermédiaire, dans un but, de la part des opérateurs, de réduction des contraintes administratives.
Un exemple de prêt de titres international a été traité § 3.4.1.3
603
Pour une vue générale d’un montage de repo, le lecteur se reportera au schéma 15 à la fin de ce paragraphe.
318
desdits titres. Le prêteur sera alors habilité à tirer sur la lettre de crédit dès le premier
incident survenu chez l’emprunteur.
Un appel de marge est souvent réclamé par le prêteur à l’emprunteur, en sus du collatéral
(appel de marge initial), dépendant de la qualité, de la liquidité ou de la volatilité des valeurs.
Cette marge est généralement comprise entre 102 % et 110 %.
Après l’accord relatif à la transaction, celle-ci est confirmée ainsi que ses termes (collatéral,
marge, prix, type de collatéral …), sur une base bilatérale entre les deux contreparties, par
téléphone, fax ou message Swift.
Ensuite, l’instruction de transfert des titres et fonds est transmise au système de prêt de titres,
selon le principe d’un transfert irrévocable, et d’une livraison contre paiement sur les places
les plus avancées en la matière. En fin de période, l’opération inverse est pratiquée de manière
identique.
3.4.2.4 Le marché et ses tendances
•
La difficile croissance des pensions jusqu’aux années quatre-vingts
Le sujet relatif aux opérations de pension n’est pas nouveau, il a un siècle. Selon J.Normand
(1966), les banquiers normands ont importé une pratique anglaise leur permettant d’obtenir
d’un confrère une avance de fonds à court terme, moyennant remise d’effets publics ou
privés : les pensions permettent ainsi de réaliser une opération de crédit assortie d’une
garantie 604. Dans les années soixante, seules quelques places ont légiféré sur l’activité de prêt
de titres, tels les Etats-Unis face à une montée des incidents de paiement sur les marchés de
capitaux : la Federal Reserve Bank utilise les repo depuis les années vingt et, dans les années
soixante-dix, des banques conservatrices américaines ont prêté progressivement des titres aux
négociateurs. Mais il faudra attendre les années quatre-vingts pour voir évoluer les marchés
604
Perrot A., Pension de titres et transfert de propriété, Revue de droit Bancaire et de la Bourse n°46 novembre
décembre 1994
319
des repo. Les contrats ont, en effet, fait l’objet d’une standardisation suite à la faillite de
Drysdale Securities aux Etats-Unis 605.
Depuis les années quatre-vingts, les opérations de pension et prêts de titres connaissent une
croissance exponentielle enregistrée sur les euromarchés d’abord, puis sur certains marchés
domestiques ensuite.
Dans une étude relative au marché européen, Giddy et al.
606
affirment qu’au-delà de
l’efficience du processus de règlement-livraison de base, les limites et faiblesses des services
de conservation, de crédit et de prêt de titres sont des freins à l’intégration d’un marché
financier européen, spécialement pour les investisseurs institutionnels qui requièrent des
services de transactions et de règlement sans coûts excessifs ou complications. Et parmi ses
recommandations, la Banques des Règlements Internationaux 607 stipule que les prêts de titres,
pensions livrées ou autres, doivent être encouragés pour améliorer le règlement des
transactions. Un système de prêt-emprunt de titres mature et liquide améliore, en effet, le
fonctionnement d’un marché financier en permettant aux vendeurs d’obtenir rapidement les
titres dont ils ont besoin, et donc en réduisant le nombre des transactions en suspens.
•
L’explosion des années quatre-vingt-dix
Depuis l’utilisation croissante des pensions par les banques centrales pour fournir des
liquidités sur les marchés monétaires par des techniques sécurisées, les organismes de
règlement-livraison ont développé des systèmes ad hoc. Aussi les opérateurs ont-ils utilisé
davantage les opérations de pensions pour couvrir des positions courtes ou spéculer sur la
605
« The 1982 failure of Drysdale Securities, a US securities firm, had a profound impact on the securities
lending industry. This one event led to, among other things, the standardisation of contracts, collateral margin
requirement being specified, coupon accrual being established, and more careful scrutiny of counterparties and
their balance sheets.
Prior to the failure, it had been common practice in the US repo market not to factor accrued interest on couponbearing securities in the marking-to-market process. Drysdale was therefore able to generate working capital by
reversing in US government securities to make short sales to a third party, for an amount that included the
accrued interest. Drysdale used the surplus cash to take large positions on the future direction of interest rates.
This strategy was successful until, in the wake of higher interest rates, cumulative losses on Drysdale’s
investment caused to be unable to meet coupon interest payments on the securities it had borrowed. On 17 May
1982, Drysdale filed for bankruptcy and Drysdale’s securities lending counterparties realised that the missing
accrual was in actuality an under-collateralised credit exposure ».
Bank for International Settlements, Securities lending transactions : market development and implications, July
1999
606
Giddy I., Saunders A., Walter I., Alternative models for clearance and settlement : the case of the single
European capital market, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
320
volatilité des taux d’intérêt. Aux Etats-Unis, des dealers et autres investisseurs vendent à
découvert les titres pour les racheter via le marché des repo (en 1999, 1.2 milliards de dollars
de prêt-emprunt sur le marché des repo américain émanait des primary dealers 608) 609.
Cette tendance s’est ensuite accrue dans les années quatre-vingt-dix avec une généralisation
des marchés de prêts de titres sur l’ensemble des places financières, y compris sur les bourses
émergentes. Un nombre croissant d’opérateurs a profité d’un fort effet de levier potentiel par
la prise de position spéculative sur les marchés de taux. Parallèlement, les activités sur
marchés dérivés ont progressé, aidées de la généralisation de la diffusion d’informations en
temps réel : les marchés de pension leur ont de facto servi de lien entre marchés dérivés et
marchés de sous-jacents, en leur fournissant les liquidités nécessaires. Enfin, le marché des
repo a permis à des entreprises non bancaires, structurellement prêteuses en liquidités,
d’accéder directement au marché monétaire.
Tandis que les repos se développaient sur tous les marchés de titres d’Etats, dès 1993 la place
de Paris légiférait sur les pensions. En 1996, le Royaume-Uni développait un marché de repo
sur les gilts avec une juridiction appropriée. En 1997, le Trésor italien proposait un marché
gouverné par les prix sur les pensions sur titres d’Etat. En 1998, la Suisse modifiait sa
législation en matière d’adéquation de capital et sa fiscalité pour favoriser les opérations de
pensions 610. En France, depuis la loi NRE – nouvelles régulations économiques – du 15 mai
2001, les prêts de titres ne sont plus limités à un an, et les titres de capital, titres de créance et
parts d’Opcvm, cotés ou non, et les effets privés et publics sont éligibles aux opérations de
pension et prêt de titres.
De nouveaux acteurs sont donc apparus sur les marchés de prêts de titres (25 marchés environ
au monde), requérant de nouveaux produits, tels des prêts multi-monnaies ou une
collatéralisation assise sur les actions, et un meilleur reporting sur ces activités. Les marchés
607
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for Securities Settlement Systems,
January 2001
608
Les primary dealers sont market makers sur les valeurs du Trésor américain, équivalents aux spécialistes en
valeurs du Trésor sur la place financière parisienne.
609
Dupont D., Sack B., The treasury securities market : overview and recent development, Federal Reserve
Bulletin, December 1999
610
Bank for International Settlements, Securities lending transactions : market development and implications,
July 1999
321
se sont libéralisés. Parallèlement, les global custodians ont fusionné pour rechercher une taille
critique au niveau mondial et une efficience indispensable.
•
Les pensions dans le monde
Quelques chiffres sur les activités de repos : En 1994, certains dépositaires centraux étaient
capables de fournir quelques statistiques en matière d’opérations assorties de sûretés :
Euroclear et Cedel chiffraient à 30% la part des pensions dans leurs transferts contre
paiement, Sicovam à 20 / 25%, VPC (système suédois) à plus de 40% 611.
Quatre années plus tard, la taille relative des marchés de repo dans les pays composant le
Groupe des 10 était la suivante (tableau 14) 612.
Tableau 14 : Encours des pensions pour le Groupe des dix
Encours (en % de)
Pays
Année PNB domestique
M3
Dette d’Etat
Belgique
1995
18.4
22.5
23.5
1997
25.0
28.9
31.0
1995
14.5
20.4
34.7
1997
21.7
32.8
47.3
1995
8.1
9.0
6.5
1997
9.9
11.1
7.3
1995
N.A.
N.A.
N.A.
1997
5.7
2.8
9.0
1995
0.0
0.0
0.0
1997
9.5
10.0
17.4
1995
12.0
18.3
17.8
1997
14.9
22.9
22.4
France
Italie
Japon
Royaume-Uni
Etats-Unis
Notes :
- pour la Belgique, seules les opérations en franc belge sur titres d’Etat sont prises en compte,
- pour l’Italie, les chiffres communiqués sont ceux de l’ensemble des repo comptabilisées par les banques
(repo interbancaires et émanant de la clientèle)
- pour le Japon, il s’agit des prêts de titres contre espèces.
611
612
Bank for International Settlements, Cross-boarder securities settlements, March 1995
Bank for International Settlements, Implications of repos markets for Central Banks, juin 1999
322
Au vu de ce tableau 14, on constate une très forte augmentation des opérations de pension sur
les grandes places financières internationales.
Celle-ci s’explique, en premier lieu, par les améliorations techniques offertes aux opérateurs,
et, en second lieu, par les liens entre le marché des repo et les autres marchés de capitaux.
•
Les pensions dans la zone euro
La taille du marché des pensions de la zone euro s’est accrue considérablement depuis
quelques années. Une étude de la BCE
613
, auprès de 66 banques ayant été interrogées sur la
valeur de l’encours de leurs contrats de pensions, relève que le marché aurait progressé de 20
% entre 1998 et 1999, de 24 % entre 1999 et 2000 et de près de 45 % entre 2000 et 2001. La
part totale du marché des pensions est estimée entre 35 et 40 % de l’ensemble de l’activité sur
le marché monétaire.
Fin 2001, les encours relatifs aux mises et prises en pensions déclarés ressortaient à 2300
milliards d’euros, contre 3500 milliards de dollars aux Etats-Unis.
La plupart des opérations porte sur des échéances à court terme : les durées comprises entre
24 heures et 3 mois représentent plus de 95 % des opérations et les transactions au jour le jour
atteignent environ 20 % du total.
Enfin, le volume standard des transactions est compris entre 50 et 100 millions d’euros.
Au 11 juin 2002, la valeur totale des opérations de repo et reverse repo est de 3305 milliards
€ pour 86 participants 614.
Au 11 juin 2003, la valeur totale des opérations de repo et reverse repo est de 4.050 milliards
€, dont les trois quarts sont libellées en euro 615.
613
Bulletin mensuel de la BCE, Les principales caractéristiques du marché des pensions dans la zone Euro,
Octobre 2002
614
International Securities Market Association, European Repo market survey, Number 3, conducted June 2002
323
3.4.2.5 L’utilité d’un marché efficient des repo
Sur le plan juridique, les opérations de repo attirent les intermédiaires parce qu’elles
proposent un transfert légal de titres pour la durée du contrat et leur permettent ainsi de se
protéger contre un risque de crédit. Selon le besoin des intervenants, en titres ou en espèces,
les repo leur offrent une collatéralisation pour une transaction précise.
Les repo utilisées pour obtenir des fonds sont comparables à un prêt ; dans cette optique, la
pension présente un coût moins élevé pour l’emprunteur et une garantie pour l’acheteur. Par
ailleurs, les repo peuvent être utilisées à des fins de consolidations de positions longues sur
les marchés financiers des intervenants tandis que les prêteurs maintiennent leurs positions sur
les titres qu’ils ont prêtés (repo out), le ratio d’endettement est alors accru, et le maximum
possible est déterminé par la marge de sécurité (haircut 616).
Les repo utilisées pour emprunter des titres permettent de les obtenir en les garantissant par
un transfert d’espèces ; une utilisation particulière permet d’obtenir des titres spécifiques pour
honorer une livraison sur les marchés à terme ou couvrir une position courte en portefeuille.
Grâce à ces pensions, les intervenants peuvent vendre des titres à découvert, à défaut ils
courent un risque. En conséquence, un marché de repo structuré et actif apparaît comme un
instrument de couverture sur les marchés de taux d’intérêt et demeure un instrument
fondamental pour la gestion des risques des intermédiaires financiers.
L’impact d’un marché de pension sur les marchés financiers est incontestable : il en accroît la
liquidité en ouvrant la possibilité de prises de position et permet de développer l’activité
stricto sensu des marchés financiers en stimulant la demande de titres utilisés ensuite comme
instruments de collatéralisation.
Aussi les types de valeurs admises au titre de collatéral augmentent-ils progressivement. Audelà des titres souverains, sont également admis comme collatéral, les obligations des secteurs
public et privé, le papier commercial, les obligations foncières et, de plus en plus, les actions.
615
International Securities Market Association, European Repo market survey, Number 5, conducted June 2003
La marge de sécurité (haircut) est la différence entre la valeur de marché d’un titre et sa valeur en tant que
gage. Elle vise à protéger un prêteur de fonds ou de titres à l’encontre de pertes engendrées par la baisse de la
valeur du gage.
616
324
Admettre des valeurs au titre des opérations de collatéralisation est alors source de publicité
incontestable pour lesdites valeurs 617.
En tout état de cause, les marchés des repo sont indispensables à tout marché de capitaux :
Sur les marchés de titres, les pensions apportent une collatéralisation devenue nécessaire pour
minimiser les risques ; sur les marchés dérivés, elles permettent la livraison au terme des
contrats ; sur les marchés monétaire et de change, elles proposent, outre des arbitrages, une
collatéralisation indispensable pour les banques centrales et leurs opérations de politique
monétaire.
617
« Efforts by non-government debt issuers to stimulate the development of repo markets for their securities are
rare as issue size needs to be quite large. In a number of cases, issuers have created their own repo market
infrastructure in order to stimulate the repo and cash market in their securities. The United States saw the
establishment in 1998 of benchmark issuance programmes for two government-sponsored entities – Federal
National Mortgage Association (Fannie Mae) and Federal Home Loan Mortgage Corporation (Freddie Mae).
These two entities began to issue large bullet issues across the yield curve coincident with the United States
Treasury lessening its issuance in the benchmark issues ».
Bank for International Settlements, Implications of repo markets for Central Banks, June 1999
325
Schéma 15: Exemple de montage d’un Repurchase agreement 618
CHF 149,062,075
09.02
Dealer
Banque
CHF 125m SGB 4.25% 26 January 2008
CHF 125m SGB 4.25% 26 January 2008
Banque
08.03
Dealer
CHF 149,255,856
Un dealer présente un besoin de liquidités sur 30 jours, du 9 février au 8 mars ; il peut
apporter 125 millions CHF en obligation d’Etat suisse (4.25% - 26 janvier 2008) comme
collatéral et fixe un taux de repo à 1.56%. Le prix de l’opération s’établit à 149 255 856 CHF
; ainsi la banque touche un intérêt de 193 780 CHF.
Calcul
Prix du marché
2% (marge de sécurité)
Intérêt couru au 9 février
Total prix
115.12373
(2.30247)
6.42840
119.24966
Montant des liquidités fournies par la banque = valeur nominale du collatéral
× (total prix / 100)
125 000 000 × (119.24966/100) = 149 062 075 CHF
Intérêts dus à la banque = 149 062 075 × (30 / 360 ) × 1.56% = 193 780 CHF
618
Bank for International Settlements, Securities lending transactions : market development and implications,
July 1999
326
3.4.3 Collatéralisation
3.4..3.1 L’utilité générale de la collatéralisation
La collatéralisation est un des instruments les plus importants de gestion du risque de crédit.
Pour l’agent qui reçoit le collatéral, l’opération permet une diminution du risque de crédit 619 :
-
elle réduit la perte éventuelle lors d’un défaut de la contrepartie grâce à la liquidation des
actifs du collatéral,
-
elle réduit l’éventualité du défaut de contrepartie, en ce sens qu’elle stimule la contrepartie
à gérer correctement ses engagements (« incentive effect »),
-
elle permet de surmonter les problèmes d’asymétrie d’informations sur les qualité de
signature des débiteurs (« signalling effect »).
On a vu, ci-dessus, qu’un système de règlement-livraison de titres efficace repose sur le
principe de l’irrévocabilité instantanée des dénouements, consacrant de facto, sur le plan
juridique, la simultanéité des livraisons de titres et des règlements espèces.
Pour autant, on constate une dissymétrie de traitement dans certains systèmes qui procèdent à
un contrôle a priori des titres mais à un contrôle a posteriori des espèces.
Aussi les dépositaires centraux non gestionnaires directs de comptes espèces doivent-ils gérer
une position espèces pour chacun de leurs participants (à défaut l’irrévocabilité au fil de l’eau
n’est pas respectée). C’est le cas d’Euroclear France qui gère, en conséquence, un « pouvoir
d’achat » 620 pour chaque affilié, en s’appuyant sur le principe de la collatéralisation 621.
Cette technique permet, outre de sécuriser le système contre le risque de défaillance d’un
participant, d’alimenter le pouvoir d’achat des compensateurs, par apport de titres.
Euroclear France parle de : collatéralisation sur stocks (les titres apportés sont conservés en
stocks et dédiés à un financement) et de collatéralisation sur flux (les titres apportés font
l’objet de transactions à l’origine de débits espèces).
619
Bank for International Settlements, Collateral in wholesale financial markets : recent trends, risk management
and market dynamics, March 2001
620
Le pouvoir d’achat est géré en Euroclear France par le biais de la PONA – Position Nette Acheteuse
Autorisée. C’est le montant maximal de la position débitrice espèces autorisé pour un participant aux systèmes
RGV et Relit.
327
La collatéralisation dans le système RGV *
♦ Afin de minimiser le coût de l’irrévocabilité et de fluidifier les dénouements, RGV propose la
collatéralisation pour alimenter le pouvoir d’achat par un apport de titres conservés en stock et
dédié en partie à tel financement (collatéralisation sur stock) ou faisant l’objet de la transaction à
l’origine de débits espèces (collatéralisation sur flux).
♦ Pour prémunir la banque centrale contre une défaillance d’un participant, lorsque sa position
espèces insuffisante dans RGV nécessite de faire appel à des titres collatéralisables au cours d’un
traitement de dénouement, le système procède à la mise en place automatique et instantanée
d’une pension livrée (pension livrée conservatoire) entre le participant et la Banque de France.
♦ La Banque de France peut accorder l’irrévocabilité à un paiement non approvisionné dans RGV
dès lors qu’elle reçoit en pension les titres formant la contrepartie des facilités qu’elle a
accordées à l’intermédiaire (flux collatéralisé). En outre, les intermédiaires peuvent mettre en
pension des titres autres que ceux négociés pour accroître leur pouvoir d’achat et optimiser les
dénouements (stock collatéralisé).
♦ Pour les titres de stocks, les participants disposent de titres collatéralisables non livrables (ils
isolent, dans un compte spécifique, des titres dédiés uniquement à la collatéralisation ; ces titres
ne permettent pas de dénouer des livraisons de titres) et de titres collatéralisables livrables
(destinés à la collatéralisation, les prêts de titres automatisés et la garantie d’emprunts
automatisés), utilisables pour réaliser des livraisons dans RGV.
♦ Pour les titres de flux, les participants peuvent préciser, lorsqu’ils reçoivent des titres de la part
d’une contrepartie, que ces titres représentent des titres collatéralisables ; RGV préserve la
confidentialité de cette information vis-à-vis de la contrepartie. S’ils ne font l’objet d’une mise
en pension au profit de la Banque de France dans le cadre de cette opération, ces titres vont
alimenter un des deux stocks de titres collatéralisables des participants et donc leur pouvoir
d’achat.
♦ Le stock de titres collatéralisables livrables est mouvementé principalement :
• au crédit :
- par des flux de titres reçus dans RGV d’une contrepartie,
- par un virement réalisé à partir d’un autre compte du participant (franco de gestion interne),
- par des restitutions de pensions livrées conservatoires, de titre prêtés dans le cadre du
système de prêts automatisés, ou de titres affectés en garantie d’emprunts automatisés ayant
fait l’objet d’un remboursement,
• au débit :
- par des flux de titres livrés dans RGV, puisque ce stock permet également de couvrir des
livraisons RGV,
- par la mise en place de pensions livrées conservatoires afin de couvrir des achats de titres,
- par la mise en place de prêts de titres automatisés (titres prêtables),
- par la mise en place des garanties achetées à des emprunts automatisés.
♦ Le stock de titres collatéralisables non livrables est mouvementé principalement :
• au crédit :
- par des flux de titres reçus dans RGV d’une contrepartie,
- par un virement réalisé à partir d’un autre compte du participant (franco de gestion interne),
- par des restitutions de pensions livrées conservatoires
• au débit :
- par la mise en place de pensions livrées conservatoires afin de couvrir des achats de titres,
- par un virement réalisés en faveur d’un autre compte du participant.
*
621
La collatéralisation, Euroclear France
Un collatéral est un actif donné en garantie pour assurer un paiement auprès d’une banque.
328
Pour se prémunir contre un risque de défaillance, la Banque de France fait appel à des titres
collatéralisables au cours d’un traitement de dénouement. L’instrument utilisé est une pension
livrée conservatoire entre le participant et la Banque de France dont le traitement, en
Euroclear France, est présenté sur le schéma 16 622.
Schéma 16 : Pension livrée conservatoire en Euroclear France
Prestataire en services
d’investissement
4
Mise en place d’une PLC
1. mise en place automatique pour
couvrir la position espèce
automatique
2. information de mise en place de
la PLC
Remboursement d’une PLC
3. remboursement automatique de
la PLC si position espèce
suffisante
4. information de remboursement
de la PLC
622
2
1
RGV
3
CRI
TBF
Source : Euroclear France, février 2001
La pension livrée conservatoire est automatique, gérée par RGV, à taux zéro, et remboursée le soir même.
329
Quel que soit le marché, comme mentionné plus haut, les flux de paiement sont typiquement
asymétriques.
Globalement, les institutions financières, banques et négociateurs, utilisent la collatéralisation
dans trois domaines principaux d’activités de gros :
-
sur les marchés comptant pour financer leurs positions et minimiser les risques de crédit y
attenant, et gérer leurs avoirs en titres ou en espèces,
-
sur les marchés à terme pour minimiser le risque de contrepartie ou honorer une livraison
(lors d’une assignation 623 par exemple),
-
sur leurs activités de règlement-livraison pour gérer le risque de crédit et améliorer la
liquidité des marchés, ceci étant particulièrement important lorsque les systèmes de
paiement à règlement brut requièrent une forte disponibilité de la liquidité en cours de
journée (lesdits systèmes proposent, dans ce cas, des crédits intrajournaliers uniquement
collatéralisés624 à leurs opérateurs). L’utilisation de la collatéralisation dans les opérations
de politique monétaire permet, en effet, d’absorber la liquidité et le taux de
collatéralisation devient même, de plus en plus, un indicateur de politique monétaire 625.
La collatéralisation permet, en effet, de réduire le risque de non – remboursement car elle
permet de diminuer les asymétries d’information existantes entre prêteurs et emprunteurs : le
prêteur de liquidités est effectivement sûr de recouvrer une partie de son prêt en cas de défaut
de sa contrepartie. Cependant, cette sécurisation des crédits intradays n’est efficace que si
deux conditions sont respectées : les titres mis en gage doivent être sûrs et peu volatiles (car
en cas de baisse, le prêteur devra procéder à des appels supplémentaires) et la chambre de
compensation doit surveiller en temps réel l’évolution des positions de ses participants afin
que ceux-ci ne dépassent pas leur limite sécurisée 626.
623
L’assignation est l’opération qui oblige le vendeur d’options tiré au sort à répondre à l’exercice de son option.
Tous les systèmes de paiement en continu à règlement brut n’imposent pas une collatéralisation pour les
crédits intrajournaliers, tels la Federal Reserve Bank, mais cette tendance tendrait pourtant à se généraliser, à
l’instar des pratiques de la Banque Centrale Européenne ou de la Banque du Japon depuis 2001.
625
Bank for International Settlements, Collateral in wholesale financial markets : recent trends, risk management
and market dynamics, March 2001
626
Figuet J.M., La sécurisation de la liquidité intrajournalière dans un système à règlement brut, Revue
Economique vol. 51 n°4, juillet 2000
624
330
3.4.3.2 La collatéralisation internationale
Une étude de la BCE
627
, en 2000, portant sur un échantillon de 100 établissements avec un
taux de réponse de 75 % révèle que les banques séparent leur portefeuille en deux parties : la
première, la plus liquide, est destinée au trading ; la seconde est réservée aux opérations de
crédit auprès de leur banque centrale donc à la collatéralisation.
Les titres collatéralisés sont ainsi essentiellement utilisés aux fins d’obtention de crédits
intradays, et les actifs éligibles aux opérations de collatéralisation leur semblent suffisants.
Dans l’Eurosystème, selon la Banque de France, l’utilisation du collatéral en décembre 2001
s’est présenté de la manière suivante :
Tableau 15 : utilisation du collatéral en décembre 2001
Avec la Banque de France
Dans la Zone Euro
Domestique 23 %
Domestique 21 %
Etranger 77 %
Etrangers 79 %
Mais la collatéralisation a un coût. En Grande Bretagne, on estime que le coût d’opportunité
de la collatéralisation utilisée par un système bancaire pour garantir, auprès de la banque
centrale, un règlement à bonne date, peut s’élever, en taux annuel, à 25 points de base 628.
Enfin, elle peut aggraver certaines crises financières, en accentuant la propagation des chocs
629
.
Les conditions d’efficience d’un système de repos et de gestion de la collatéralisation sont
semblables à celle de l’efficience d’un système de règlement-livraison de titres 630.
627
European Central Bank, Cross-border use of collateral, A user’s survey, February 2001
Folkerts-Landau D., Garber P., Schoenmaker D., The Reform of wholesale payment systems, Finance &
Development, June 1997
629
Three market shortcoming that contributed to the severity of the 1998 crisis (the effective default by Russia
and the devaluation of the rouble in August 1998) are particularly relevant. First, collateralisation facilitated
excessive leveraging of positions in the runup to the crisis. Second, market participants relied too heavily on the
ability of collateral and daily margining to all but eliminate credit risk and overlooked the potential for swift
moves in exposures when large prices changes occured ; belated recognition of this oversight triggered a
tightening of collateral standards which contributed substantially to liquidity pressures. Third, a high
concentration of market activity, including in some markets for instruments used as collateral, accentuated the
propagation of shocks accross the markets.
Bank for International Settlements, Collateral in wholesale financial markets : recent trends, risk management
and market dynamics, March 2001
628
331
En effet, l’utilisation de la technique mark-to-market et des appels de marge permet de
préserver les contreparties contre une trop forte volatilité des cours des actifs impliqués. Et le
montant de l’appel de marge devrait être fixé en fonction de la volatilité et de liquidité des
actifs.
La technique de la livraison contre paiement permet de minimiser le risque de règlement.
Une contrepartie centrale apparaît comme un passage obligé pour toute transaction afin de
réduire les risques mais également les coûts des intermédiaires.
3.4.4 Des liquidités intradays pour les intervenants
La fourniture de liquidités intradays concourt à un bon fonctionnement d’un système de
règlement, et ce pour les créanciers qui désirent être payés en fonds immédiatement utilisables
et pour les débiteurs qui peuvent supporter des frais pour obtenir des ressources leur
permettant de s’acquitter de leurs paiements tôt dans la journée. En l’absence de liquidités
intrajournalières disponibles, les rotations de capitaux sont longues voire peuvent provoquer
des situations de blocage. En outre, lesdites liquidités doivent être correctement gérées via une
file d’attente permettant de débloquer les transferts de gros montants.
Le règlement définitif en temps réel en cours de journée est indispensable sur tout marché
financier développé. A défaut, entre l’acceptation du règlement et le règlement définitif, il
existe des risques de liquidité et de crédit. En conséquence, un mécanisme efficace de mise à
disposition de liquidités intradays s’avère nécessaire pour garantir que le règlement définitif
rapide est non seulement possible mais effectif 631.
S’il existe, comme vu plus haut, une analogie entre les systèmes des changes et les systèmes
de règlement-livraison, les conditions d’efficience des premiers sont a fortiori requises pour
les seconds. Les délais de dénouement des transactions boursières sont mécaniquement plus
longs que ceux des transactions de change, compte tenu des nécessaires phases de matching et
de confirmation. De facto, des liquidités intradays sont indispensables pour éviter les
630
Giovannini Group, The EU Repo markets : opportunities for change, Euro Papers number 35, October 1999
Bank for International Settlements, Core principles for systemically important payment systems, January
2001
631
332
situations de blocage 632. En effet, en cas de non-provision d’un émetteur de paiement, l’ordre
en question est annulé. Mais cette annulation peut coûter cher aux contreparties ; afin d’éviter
ce surcoût éventuel, la mise à disposition de liquidités est indispensables pour minimiser ces
situations de blocage et ce surcoût 633.
Le système de paiement suisse – Swiss Interbank Clearing System est un exemple prouvant la
nécessaire gestion des apports de liquidités. Les participants du système SIC sont obligés de
maintenir un stock particulièrement important de liquidités parce que le système ne leur en
fournit pas. Tant que leur compte n’est pas suffisamment approvisionné pour régler leurs
instructions de paiement, celles-ci restent en attente. Pour minimiser ces paiements en attente,
SIC invite ses participants à procéder au règlement le plus tôt possible dans la journée. En
conséquence, la moitié des paiements sont envoyés au système avant son ouverture. Malgré
cela, on estime qu’au moins 45 % en moyenne des règlements sont retardés par manque de
liquidités
634
. De facto, le système SIC n’est pas exactement un système de règlement en
temps réel.
Néanmoins, si la mise à disposition de liquidités intradays est une condition d’efficience des
systèmes, il convient de savoir si ces liquidités doivent être proposées aux intermédiaires
gratuitement ou non, et de façon illimitée ou non.
En 1994, la Fed a rendu payante la mise à disposition de liquidités intradays. Sur une base de
18 mois, elle a enregistré une baisse de 40 % de ce type de crédit 635.
Nous reprenons ci-dessous l’expérience de la Fed
632
636
.
A titre d’exemple, Fedwire a fourni, sur un mois d’activité (en décembre 1989), 60 milliards de dollars de
crédits intradays par jour pour gérer les transferts sur les valeurs du Trésor dématérialisées.
Borio C.E.V., Van den Bergh P., The nature and management of payment system risks : an international
perspective, Bank for International Settlements Economic papers n°36, February 1993
633
Rochet J.C.,Tirole J., Controlling risk in payment systems, Journal of Money, Credit and Banking,
November 1996
Emmons W.R., Recent developments in wholesale payments systems, Federal Reserve Bank of St Louis Review,
November – December 1997
634
Shen Pu, Settlement risk in large-value payment systems, Economic Review – Federal Reserve Bank of
Kansas City, 1997
Freixas X., Parigi B.M., Contagion and efficiency in gross and net interbank payment systems, Journal of
Financial Intermediation July 1998
635
Greenspan A., Remarks on payment system issues, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
636
- Richards H.W., Daylight overdraft fees and the Federal Reserve’s payment system risk policy, Federal
Reserve Bulletin, December 1995
- Hancock D., Wilcox J.A., Intraday management of bank reserves : the effect of caps and fees on daylight
overdrafts, Journal of Money, Credit and Banking, novembre 1986
333
Historiquement, aux Etats-Unis, l’extension des crédits intrajournaliers n’était pas surveillée,
et ces mêmes crédits étaient accordés gratuitement par la Fed.
En 1994, le total des transferts de fonds et de titres atteignait 1.5 milliards $ / jour.
Si les crédits intradays ne sont pas remboursés en fin de journée, ils se transforment en prêts
overnight non sécurisés : la Fed, afin de décourager ces pratiques, impose dorénavant des
pénalités.
Cependant, au cours des années quatre-vingts, un accroissement considérable de ces “daylight
overdraft” a été enregistré et, pour certains intermédiaires, leur montant dépassait celui de
leurs fonds propres.
Conscientes des risques qu’elles encourraient, les autorités monétaires américaines ont décidé
de rendre payants ces crédits intradays, de développer la collatéralisation et d’augmenter les
normes bilantielles de sécurité.
Entre 1986 et 1993, la taille des “securities-related overdrafts” a plus que doublé et leur
proportion dans le total des “daylight overdraft” est passé de 1/2 à 2/3 : la Fed a limité à 50
millions $ les transferts de titres afin de décourager les “position building” des dealers
637
.
Puis elle a requis une collatéralisation et, en 1994, les a facturé à hauteur de 10 points de
base).
Les crédits intradays ont aussitôt diminué de 40 % (passant de 125 milliards $ / jour en
moyenne à 70 milliards pendant les 6 mois qui ont suivi la mesure).
L’effet de la facturation est donc incontestable : les dealers en valeurs du Trésor ont géré
leurs transactions plus tôt dans la journée, ont livré leurs titres utilisés comme collatéral plus
vite à leur contrepartie pour couvrir les crédits dûs au remboursement des repos venues à
échéances; ils ont également opéré aux règlements des transactions sur les marchés
secondaires plus tôt dans la journée.
En outre, la condition d’existence d’un marché intrajournalier de liquidités repose sur une
tarification significative des prêts de la banque centrale. A défaut, les banques commerciales
637
Securities dealers would hold securities until near the close of the Fedwire securities transfer system (2:30
p.m. or later) to make sure that they could complete large deliveries first and avoid costly failures to deliver. This
practice delayed the receipt of funds into the dealers’ accounts and exacerbated daylight overdrafts at major
securities clearing banks.
334
à court de liquidités n’empruntent pas aux autres banques prêteuses si elles ont la possibilité
d’emprunter à un taux d’intérêt nul auprès de leur banque centrale 638.
Enfin, remarquons qu’en temps normal (lorsque les prêteurs sont aptes à juger de la
solvabilité des éventuels emprunteurs), un système de paiement assis sur des mécanismes de
prêts « privés » est efficient. Mais, dès lors qu’il existe un risque systémique, une banque
centrale devient contrainte de fournir la liquidité nécessaire aux règlements interbancaires
émanant soit d’un système de paiement soit d’un système de règlement-livraison de titres ; en
période de trouble, un problème de liquidité doit être résolu en quelques heures seulement.
Seule une banque centrale peut donc pallier ce problème 639.
Cependant, si le coût de la liquidité intraday est élevé (par le fait que la Banque centrale le
fasse payer ou parce qu’il existe un coût d’opportunité
640
), les banques différeront leurs
paiements.
Nous reprenons les conclusions d’Angelini 641.
Pour la gestion des paiements en temps réel, les banques ont besoin de liquidités, mais dès
que les réserves occasionnent des coûts d’opportunité, chaque participant tend à réduire ses
propres avoirs, espérant pouvoir utiliser les réserves des autres participants. En conséquence,
chaque banque retarde ses règlements jusqu’à ce que le coût du délai égalise le coût marginal
des réserves. Cette décision de retarder le paiement par le débiteur provoque le même coût
chez le créditeur, générant ainsi des pertes importantes au niveau du système.
Les délais diminuent la qualité des informations disponibles pour les banques quant à
l’optimisation de la gestion du cash. Ce qui incite les banques à demander un niveau supérieur
638
Figuet J.M., La sécurisation de la liquidité intrajournalière dans un système à règlement brut, Revue
Economique vol. 51 n°4, juillet 2000
Emmons W.R., Recent developments in wholesale payments systems, Federal Reserve Bank of St Louis Review,
November – December 1997
639
Flannery M.J., Financial crises, payment system problems, and discount window lending, Journal of Money,
Credit and Banking, November 1996
640
Lorsque les banques centrales imposent aux opérateurs de maintenir des réserves sur leur compte, le système
est certes plus sûr (car il évite les risques d’illiquidité et les situations de gridlock), mais les opérateurs se
retrouvent face à un manque à gagner donc à un coût d’opportunité.
Plihon D., Les banques nouveaux enjeux nouvelles stratégies, La Documentation Française 1998
641
Angelini P., An analysis of competitive externalities in gross settlement systems, Journal of Banking and
Finance, 1998
335
de réserves journalières, donc réduit les profits attendus ; la création d’un marché de fonds
intraday n’élimine donc pas les externalités.
En conclusion, pour un système dans lequel les liquidités intraday sont payantes, les banques
ont tendance à retarder leur input de paiement et/ou leur délai de règlement, par rapport à une
situation optimale. Depuis qu’il existe des systèmes en temps réel avec gestion des réserves
payantes, chaque banque a tendance à attendre d’autres paiements avant d’envoyer les siens,
utilisant ainsi les réserves des autres. Ce système s’avère alors néfaste pour les clients en
termes de coûts, et le report d’envoi des règlements génère des externalités négatives en
réduisant la qualité des informations relatives aux soldes intradays disponibles pour les
créditeurs. En l’absence de mesures correctives, ces pratiques tendent à réduire l’efficacité.
L’adoption d’un RTGS introduit le nouveau concept de liquidité intraday, opposée à la
traditionnelle notion de liquidité mesurée en terme de soldes détenus sur les comptes de
règlement en fin de journée, et ajoute de nouveaux droits aux opérations quotidiennes de
politique monétaire.
L’adoption de nouveaux instruments (pension ou crédit intraday) peut rendre la gestion des
liquidités journalières complètement indépendante des mécanismes traditionnellement
employés pour le contrôle des taux courts. Cependant le prix de la liquidité peut impacter le
niveau des taux courts interbancaires. En principe, une offre de liquidité intraday à bas prix
peut résoudre le problème des délais excessifs. De plus, une réglementation peut être adoptée
pour exiger qu’un pourcentage donné des règlements soit transmis à un moment donné, en
cas contraire des pénalités de retard doivent être prévues.
336
4. Choix de la monnaie de dénouement
4.1 Nécessité d’un règlement en monnaie banque centrale
4.1.1 Une définition
La monnaie centrale, appelée aussi monnaie à haute puissance, est émise par la banque
centrale, ou institut d’émission, sous deux formes 642 :
-
des billets de banque, que la banque centrale remet aux banques qui, à leur tour, les
délivrent à leurs clients,
-
des avoirs en compte auprès des banques centrales déposés par les banques commerciales
et par le Trésor. Ces avoirs constituent une monnaie particulière qui n’est détenue que par
les intermédiaires financiers.
La monnaie centrale ne sert qu’à des opérations de transformation entre les différentes
catégories de monnaie : monnaie scripturale bancaire et monnaie Trésor. Elle assure les
relations entre les différents circuits monétaires internes : celui du circuit intégré des
établissements de crédit, celui du Trésor ainsi que la communication avec l’ensemble des
monnaies étrangères.
Les demandes et les offres de liquidités des établissements de crédit s’expriment donc en
monnaie centrale.
Cette monnaie de base ne représente en fait qu’une partie de l’offre totale de monnaie car il
existe des banques commerciales, appelées banque de second rang, qui produisent de la
monnaie scripturale, ou monnaie de banque, ou encore monnaie commerciale.
Dans le cas de notre étude, le règlement en monnaie centrale s’entend comme étant un
règlement s’opérant par un établissement disposant d’un compte espèce directement auprès de
la banque centrale.
A contrario, un règlement en monnaie commerciale est celui qui se réalise auprès d’une
banque ne disposant pas d’un compte en banque centrale et qui, en conséquence, délègue sa
gestion espèces en banque centrale à un autre établissement.
642
Flouzat D., Le concept de banque centrale, Revue d’Economie Financière n°55, 1999
337
4.1.2 De l’importance des règlements en monnaie centrale
Les banques centrales se sont développées sur le principe du développement de la monnaie
fiduciaire. Or le paiement en monnaie fiduciaire repose sur un transfert d’actifs d’une tierce
partie. En conséquence la valeur de ces actifs et le coût des paiements dépendent de la qualité
de cette tierce partie, de son efficience organisationnelle et de la structure du marché
monétaire. Une banque centrale apparaît naturellement comme étant la banque de règlement
la plus efficiente. Et l’augmentation des transactions sur titres et du besoin de collatéralisation
confirme cet argument 643.
Outre les risques de défaut des intermédiaires, il est un risque particulièrement important pour
la stabilité d’un système de règlement-livraison de titres, c’est celui de l’insolvabilité de la
banque de règlement.
En effet, lorsque naît un risque de paiement qui doit le gérer ? 644
-
le marché, mais il est difficile de fournir des informations sur la solvabilité des banques
(les rumeurs peuvent en effet empêcher les banques de traiter avec une autre, ce qui
entraînera des conflits d’intérêts, et une paralysie potentielle du système en période de
panique financière),
-
un système d’assurance privé, mais l’histoire démontre que ce type de système n’est
valable que s’il y a défaillance d’une petite institution seulement,
-
un système de marché, mais il s’avère souvent insuffisant.
En conséquence, il faut une institution indépendante dont les actifs sont universellement
reconnus, c’est-à-dire une banque capable d’obtenir des informations permettant de juger de
la santé financière des opérateurs.
Aussi un moyen de diminuer, voire de supprimer ce risque, réside dans le fait que la banque
centrale soit la banque de règlement.
Rappelons que la Banque Centrale Européenne
645
a considéré le règlement en monnaie
centrale comme étant l’un des standards de base à respecter par les systèmes de règlement643
Padoa-Schioppa T., Clearing and settlement of securities : an European perspective, Speech at the
Symposium of the Deutsche Bundesbank, 5 September 2001
644
Padoa-Schioppa T., Credit risks in payment systems : the role of central banks, Banca d’Italia Economic
Bulletin March 1988
338
livraison 646. Cette prestation permet, en effet, de protéger le système bancaire d’un risque de
défaillance d’une banque de règlement pouvant intervenir dans le laps de temps nécessaire au
dénouement des transactions. La Banque centrale est effectivement apte à débloquer un
collatéral apporté en garantie ou à livrer les titres ou ledit collatéral à la contrepartie.
Les banques centrales
647
ont une fonction de régulation monétaire qui est la conséquence
même de la nature de la monnaie dans une économie décentralisée. Alors que la monnaie
fiduciaire
648
est émise par la banque centrale, le développement de la monnaie scripturale
exige la mise en place d’un système de compensation, privé ou public, d’un marché
monétaire, d’une procédure de réescompte dont la manifestation première est le rôle de
prêteur en dernier ressort ; la banque centrale peut être amenée à jouer ce rôle de prêteur en
dernier ressort pour sauver le système (et non le défaillant) 649.
Mais
650
si un prêteur en dernier ressort a lieu d’être pour régler un problème de liquidité, et
non une question d’insolvabilité, il est difficile de différencier les deux problèmes. Le
diagnostic n’est opéré qu’ex-post, alors que les turbulences du court terme sont aplanies ou,
au contraire, transformées en faillite avérée.
Pour démontrer ce rôle, reprenons l’histoire de la création des banques centrales. Elles sont
nées pour combattre le risque de système. En effet, selon Goodhart
645
651
, les banques vont
European Central Bank, Assessment of EU securities settlement systems against the standards for their use in
ESCB credit operations, September 1998
European Central Bank, Standards for the use of EU securities settlement systems in ESCB credit operations,
January 1998
646
La Banque d’Angleterre a compris également l’intérêt d’un règlement en monnaie centrale. A cette, elle a
repris les arguments suivants :
- efficient generation of liquidity : the design of the system needs to facilitate the ready avaibility of sufficient
liquidity to ensure no appreciable degradation in settlement rates at an acceptable cost,
- efficient management of liquidity : a transfer mechanism should allow ready transfer of funds between
securities settlement and payment accounts, thereby creating a « virtual » single pot of liquidity,
- efficient management of credit : SSS debit cap arrangements should be maintained, with the banks
performing any aggregation of customer information in-house…
Bank of England, Report of the DVP steering group, February 2000
647
Thoris G., Analyse économique des systèmes, A. Colin 1997
648
La notion de monnaie fiduciaire a été imaginée par Palmstruck en Suède en 1661, et reprise en 1694 par la
Banque d’Angleterre, elle consiste en une émission de billets supérieure au stock d’or détenu, mais dans une
proportion variable pour faire face aux retraits. Ce fut le début de la dématérialisation de la monnaie.
649
Un prêteur en dernier ressort doit s’adresser à des agents privés illiquides et non pas insolvables : l’assistance
temporaire ne doit pas avoir de limites quand il s’agit d’étouffer des paniques, mais les institutions insolvables
ne doivent pas être secourues, mais vendues à des nouveaux propriétaires ou recapitalisées, sous peine de mettre
en péril l’ordre monétaire.
Aglietta M., Moutot P., Le risque de système et sa prévention, Cahiers économiques et monétaires n°41, 1993
650
Boissieu (de) C., Mutations et fragilité des systèmes financiers : les conséquences des transformations en
cours, Revue Française d’Economie, hiver 1987
651
Goodhart, Why do banks need a central bank ?, Oxford Economic Papers 1987
339
chercher d’elles-mêmes à supprimer le marché libre. Elles ont conscience qu’il est difficile de
diffuser une information complète sur leurs activités et que ce phénomène peut concourir au
développement d’une panique bancaire. A titre d’exemple, l’auteur cite les chambres de
compensation monétaire ; celles-ci vont être dotées, sur l’initiative des banques, de pouvoirs
de régulation importants. Un système de régulation incluant un prêteur en dernier ressort
émerge ainsi spontanément. Opter pour un tel système revient à choisir une banque centrale
servant de prêteur en dernier ressort 652.
Parce ce que les dépôts bancaires sont utilisés comme moyens de paiement, la fragilité
présumée des banques peut contribuer à la fragilité du système de paiement.
Or le processus de paiement des banques s’internationalise, la vulnérabilité d’un système de
paiement domestique peut donc s’étendre à d’autres systèmes dans le monde (citons le cas de
la banque Herstatt) ; ce risque peut alors s’étendre à une chambre de compensation.
Dans une journée, une banque peut régler des créances importantes sur elle-même (achat de
valeurs mobilières par ses clients) avant d’avoir reçu les fonds de la part du client ; si de tels
crédits sont théoriquement réglés en fin de journée, il existe cependant un risque tant que le
paiement attendu n’est pas matérialisé et assis sur le principe du temps réel.
Ainsi, sans garantie d’une autorité, lesdits crédits sont exposés à un risque. De plus, le
développement des marchés dérivés (sur lesquels sont négociés des montants considérables et
des instruments particulièrement complexes) a fait naître des risques de règlement, des risques
opérationnels, des problèmes d’évaluation (pricing), et des risques légaux (notamment liés au
netting et à la faillite) : ces risques peuvent être minimisés si les capitaux propres des
établissements sont importants et si la banque centrale est susceptible d’intervenir en tant que
prêteur en dernier ressort 653.
En outre, si les risques de dérive des systèmes financiers restaient limités à l’époque des
politiques monétaires quantitatives et de l’encadrement des crédits, la nécessité d’un prêteur
en dernier ressort est redevenue cruciale dès lors que les systèmes financiers ont été
déréglementés 654.
652
Augey D., Bramoullé G., Economie monétaire, Dalloz 1998
Benston G.J., Kaufman G.G., Is the banking and payments system fragile ?, Journal of Financial Research 9,
1995
654
Patat J.P., Les autorités monétaires face à l’instabilité et aux nouveaux risques du système financiers, Revue
d’Economie Politique n°5, septembre octobre 1988
653
340
La notion de prêteur en dernier ressort a été abordé au chapitre I, § 1.1.2. Nous nous attardons
présentement sur le fait que le précepte de Thornton (1802) se composait de deux éléments. Il
faut tout d’abord, lorsque la crise a éclaté, que le centre du système assure sa propre sécurité :
pour ce faire, il doit conserver des taux d’intérêt élevés pour attirer vers lui des capitaux et
reconstituer ses réserves. Mais quand cela est accompli, il doit virer de bord délibérément
pour faire partager au reste du système bancaire, sa sécurité retrouvée. Les deux mouvements
sont indissociables.655
En tout état de cause, l’activité de prêteur en dernier ressort relève des banques centrales 656.
Cependant, Patat
657
souligne que si la nécessité d’un prêteur en dernier ressort redevient
cruciale dans le système financier actuel, donc déréglementé, le rôle de la Banque Centrale
dans ce domaine ne s’apprécie plus dans les mêmes termes du classique réescompte en
économie d’endettement.
Les interventions de la Banque centrale, destinées à fournir au marché et à l’économie la
liquidité nécessaire pour éviter la poursuite d’une situation de crise marquée par un
effondrement des cours, doivent rester ponctuelles. A défaut, ces pratiques s’assimileraient à
celles dont on dénonçait auparavant les méfaits, car elles peuvent avoir des effets pervers sur
la régulation des agrégats monétaires. Notons cependant la réussite des interventions de la
Federal Reserve Bank lors du krach boursier de 1987, et, plus récemment encore, lors des
attentats du 11 septembre 2001. Patat précise que les actions des banques centrales ne sont pas
destinées à inonder le marché de liquidités mais à éviter les problèmes de trésorerie des
établissements de crédit. A ceci, il ajoute que les limites des interventions ne sont pas toujours
clarifiées : un prêteur en dernier ressort réserve, en principe, ses interventions aux besoins de
liquidités, mais peut-il les étendre aux risques de solvabilité ; plus encore, doit-il les étendre
aux agents autres que ceux de son périmètre, les maisons de titres ou les organismes de
placements collectifs ?
En effet, faut-il intervenir dans un cadre préétabli de refinancement systématique (mais à un
taux pénalisant) ou de manière discrétionnaire ? Il semblerait que la seconde solution soit plus
adaptée à la conception d’une autorité supérieure. Enfin, l’intervention auprès des agents non
bancaires pourrait sembler bénéfique compte tenu de l’importance de l’impact psychologique
655
Hicks J., Monnaie et Marché, Economica 1991
Cf. Bagehot tel qu’abordé au chapitre I.
657
Patat J.P., Les autorités monétaires face à l’instabilité et aux nouveaux risques du système financiers, Revue
d’Economie Politique n°5, septembre octobre 1988
656
341
dans le domaine des activités de marché, mais, dans ce cas, il convient que lesdits agents
soient soumis aux mêmes règles prudentielles, eu égard à leurs prises de risques, que les
établissements de crédit.
Dans l’histoire de la compensation, notons l’intervention de la New York Clearing House
Association, créée en 1853, ayant joué un rôle considérable de garant et de prêteur en dernier
ressort. Elle a, en effet, émis des titres propres acceptables en tant que paiement auprès de ses
membres. Les actions des chambres de compensation bancaire, en période de panique, ont
permis une mutualisation des risques ; cependant, une différence est notable, dans le cadre des
activités bancaires, le risque est à court terme, tandis que, sur les marchés financiers, il est, le
plus souvent, à long terme 658. Et les actifs bancaires sont rarement négociables (et évalués, en
général, au coût d’entrée), alors que les actifs des maisons de titres sont négociables (et
évalués selon la méthode « mark-to-market » 659).
Les exemples relatifs aux activités de prêteur en dernier ressort des banques centrales, tant sur
les marchés interbancaires, monétaires ou financiers, sont nombreux .
•
La crise boursière de 1882 en France
L’intervention directe de la Banque de France en tant que prêteur en dernier ressort au profit
des places boursières françaises fut la première. Goodhart
660
cite à ce sujet Liesse
661
qui
précise que « lorsque la tempête de janvier 1882 a fait rage, les agents de change de Paris et
Lyon, qui n’avaient pas suffisamment évalué les conséquences de la spéculation frénétique,
n’ont pas pu honorer leurs engagements. La Banque de France est alors intervenue en
avançant 80 000 000 F au parquet de Paris et 100 000 000 F à Lyon, en s’assurant par le biais
d’une collatéralisation ». En effet, la chute des cours de janvier 1882 fut particulièrement
importante, au point de parler d’un krach. Les actions des banques ont chuté de plus de 25% ,
tandis qu’elles se situaient au cœur de la spéculation (leurs actions figuraient parmi les titres
ayant augmenté le plus entre 1877 et 1881 ; elles achetaient beaucoup d’actions en vue de
remplacer dans leurs portefeuilles les obligations dont le rendement baissait ; elles
encourageaient la prise de risque puisqu’on estime que les crédits pour les reports ont été
658
Kroszner R.S., Can the financial markets privately regulate risk ? The development of derivatives clearing
houses and recent over-the-counter innovations, Journal of Money, Credit and Banking, March1999
659
Steinherr A., The new European Financial Market Place, Longman Group UK Limited 1992
660
Goodhart C., The evolution of Central Banks, The MIT Press 1988
342
multipliés par 10 entre 1856 et 1881 sans que les provisions nécessaires existent) 662. La chute
des cours des actions de certains établissements financiers a déclenché la réduction générale
des cours des autres valeurs. Enfin cette crise a frappé nombre de valeurs car la capitalisation
boursière avait considérablement augmenté ainsi que le nombre de petits épargnants (entre 4
et 5 millions).
•
Penn Central Railroad 663
En 1989, la Penn Central Railroad avait émis des billets de trésorerie qu’elle n’a pas honorés,
pour cause de faillite. La banqueroute aurait pu dégénérer en un risque de système si les
prêteurs s’étaient désengagés brusquement du marché. En conséquence tous les émetteurs
pouvaient être menacés d’une défiance contagieuse vis-à-vis du marché du commercial paper.
La Fed a finalement refusé son secours tout en tentant de prévenir les effets systémiques de
ladite défaillance : elle a ainsi demandé aux banques d’offrir les liquidités nécessaires en
remplacement du marché et d’ouvrir les lignes de crédit nécessaires à ces prêts bancaires. Le
prêteur en dernier ressort a, de facto, joué la carte de la crédibilité, via un sauvetage
discrétionnaire.
•
Drexel Burnham Lambert
En 1990, le groupe Drexel a fait faillite en partie pour un manque de liquidité. La Banque
d’Angleterre est alors intervenue pour minimiser l’impact de cette faillite sur les filiales du
groupe, dont Drexel Burnham Lambert Trading (DBLT). Au cours du mois de février, les
participants au marché ont pris conscience de l’ampleur des problèmes du groupe financier et
certains se sont montrés de moins en moins enclins à prendre des positions intrajournalières
envers DBLT dans le règlement des opérations de change. En parallèle DBLT n’était pas
disposé à payer les montants échus, craignant que ses contreparties, au lieu de lui régler la
contre-valeur, ne déduisent ces montants des sommes dues par d’autres sociétés du groupe.
La Banque d’Angleterre a alors mis en place, pendant une semaine, un mécanisme de
règlement spécial, avec d’éviter une situation de blocage. Les contreparties de DBLT ont été
tenues de verser les sommes dues sur des comptes ouverts au nom de la Bank of England
auprès de ses correspondants étrangers. Dès réception de la confirmation du crédit de ces
661
Liesse A., Evolution of credit and banks in France, Senate document n°522, in Banking in France and the
French Bourse, National Monetary Commission, volume XV
662
Lehmann P.J., Histoire de la Bourse de Paris, PUF Que sais-je 1997
663
Lespès J.L., Le risque de système in Finances Internationales, A. Colin 1993
343
fonds, la Banque d’Angleterre en informait DBLT qui versait alors irrévocablement la contrevaleur directement à chaque contrepartie.
Mais DBLT était solvable !
•
BCCI 664
Le 5 juillet 1991, la mise en liquidation de BCCI SA, a entraîné une perte en principal pour un
établissement britannique et un établissement japonais qui avaient conclu des opérations de
change avec celle-ci.
Un établissement londonien devait régler, le 5 juillet 1991, une opération dollar/livre sterling
conclue deux jours auparavant avec BCCI Londres. Il s’acquitta dûment du paiement en livres
sterling à Londres le 5 juillet. BCCI avait envoyé le 4 juillet (jour férié aux Etats-Unis) à son
correspondant à New York un message lui demandant de verser l’équivalent en dollars, valeur
5 juillet. Cette instruction ne fut pas remise par le correspondant de BCCI avec son premier
lot de paiement (7 heures), car elle se trouva différée en raison d’une limite de crédit bilatérale
appliquée à ce correspondant par le destinataire CHIPS. Le paiement resta donc en file
d’attente jusqu’à près de 16 heures (heure de New York), moment auquel il fut annulé par le
correspondant. Ce dernier venait, en effet, d’être informé de la situation par l’administrateur
provisoire de BCCI à Londres. En conséquence, la contrepartie de BCCI perdit un montant
égal au principal du contrat.
Une grande banque japonaise subit également une perte en principal pour une opération
dollar/yen venue à échéance le 5 juillet, car elle avait versé les yens à BCCI SA Tokyo le
même jour, par l’intermédiaire du Foreign Yen Clearing System, alors que les avoirs de BCCI
dans l’Etat de New York avaient été gelés avant que la contre-valeur en dollars ne fût réglée.
La perte de l’établissement britannique illustre une des difficultés particulières que
rencontrent les intervenants du secteur privé, dans la situation actuelle, lorsqu’ils cherchent à
synchroniser les paiements, puisque, selon toute vraisemblance, cette perte ne se serait pas
produite en l’absence des dispositifs internes mis en place dans Chips pour réduire les risques.
Cet exemple montre, de surcroît, qu’il n’est guère possible de fermer une banque active sur le
marché des changes au moment où toutes ses opérations échues ce jour ont été réglées par
tous les systèmes de paiement concernés.
•
664
Barings
Bank for International Settlements, Risque de règlement dans les opérations de changes, mars 1996
344
Plus récemment, en 1995, la faillite de Barings Brothers
665
a provoqué des problèmes en
matière de clearing sur l’Ecu. Après avoir émis un ordre de paiement en faveur d’un
correspondant de Barings, le 24 février 1995, la banque émettrice a voulu l’annuler, suite à la
mise en règlement judiciaire de la Barings. Le système de clearing de l’Ecu ne permettait pas
ce type d’opération, le bénéficiaire était légalement incapable de contre-passer l’écriture
permettant d’annuler ledit ordre. La banque émettrice, alors débiteur dans le système de
compensation, couvrit sa position en empruntant, permettant, de facto, de dénouer les
règlements des 45 banques participantes à bonne échéance.
Notons l’importance de la connaissance des réglementations des systèmes : dans l’exemple
suscité, si la banque émettrice n’avait pas emprunté pour se couvrir, la compensation eut été
impossible ; le système de compensation aurait, en conséquence, été bloqué totalement, tandis
que le règlement initial ne portait que sur 1% des paiements totaux.
Le règlement en monnaie banque centrale
666
est universellement acceptable car la créance
scripturale est exempte de risque de défaut et de liquidité 667. Smith écrivait déjà, en 1776, que
la Banque d’Angleterre était aussi solide que le gouvernement lui-même !
Plus précisément, si l’émetteur de l’actif financier est susceptible de défaillir, il existe un
risque de crédit, ou si ledit actif n’est pas échangeable facilement et immédiatement, il existe
un risque de liquidité, donc un risque de confiance susceptible de déboucher sur un risque
systémique. En revanche, un actif libellé en monnaie centrale est, quant à lui, exempt de
risques de crédit et de liquidité.
665
Comme évoqué plusieurs fois, un trader avait engagé son établissement dans une position spéculative à la
hausse en achetant des contrats sur indice Nikkei, opération non couplée avec une opération en sens inverse qui
aurait limité le risque. Ce type de stratégie, acceptable sur une faible part de portefeuille, s’est révélé dramatique
par l’ampleur des positions et la chute continue de l’indice japonais depuis la tragédie de Kobe. Le désastre a été
amplifié par le fait que les appels de marge successifs ont été financés par la vente de puts sur indices.
Cet événement a le mérite de souligner l’importance des procédures de contrôle, tant au niveau de l’organisation
même du marché, qu’en interne où des limites doivent absolument être posées (et respectées …) en fonction des
positions engagées. Dans le cas de l’affaire Barings, ces procédures de contrôle, notamment back-office, ont
manifestement fait défaut pour des raisons obscures. Pistre N., La gestion des risques financiers, Regard sur les
marchés financiers n°2, Groupe Viel mars 1995
666
Payments made by the irrevocable transfer of balances between accounts that commercial banks hold with the
central bank are said to be made in central bank money. Because balances held with the central bank are free of
credit risk (because the central bank by definition cannot fail), use of balances held with the central bank is
surest form of payment
Summers B.J., The development of a market-based payment system in Russia in OECD, Transformation of the
banking system : Portfolio restructuring, privatisation and the payment system, 1993
667
Juncker G. R., Summers B. J., Young F.M., A primer on the settlement of payments in the United States,
Federal Reserve Bulletin, November 1991
345
S’il existe plusieurs banques de règlement, le paiement devrait s’effectuer en monnaie
centrale. Notons d’ailleurs que tous les systèmes de règlement gros montant sont basés sur des
règlements en monnaie centrale.
En tout état de cause, un système de paiement est sous contrainte d’un manque de liquidité ou
d’un accès trop cher à la liquidité
668
. Partant de ce principe, Freeman 669 propose un modèle
en se basant sur l’hypothèse que les achats sont réglés par des dettes elles-mêmes réglées par
un paiement irrévocable en monnaie fiduciaire, et qu’il existe un marché actif de
refinancement des dettes bilatérales. Les agents économiques étant géographiquement
dispersés, un agent central de compensation devient nécessaire, celui-ci se trouve alors parfois
face à une insuffisance de monnaie pour compenser les mouvements et, de facto, agit sous
contrainte de liquidités. Le cas échéant, la banque centrale doit intervenir sous forme
d’injection de liquidités gratuites 670.
La politique monétaire optimale doit, en conséquence, fournir une provision suffisamment
élastique de monnaie. Les prêts banque centrale, à des fins d’accroissement du stock de
monnaie centrale, permettent la compensation des dettes et, de ce fait, le retour à l’efficience.
Aussi une banque centrale doit-elle pouvoir pallier le manque de liquidités pendant la durée
des processus de paiement afin d’optimiser la compensation des règlements.
En conclusion, les arguments en faveur des règlements en monnaie centrale peuvent être
classés en cinq catégories 671 :
Gestion des risques : l’utilisation de la banque centrale en tant que banque de règlement
permet de minimiser le risque systémique,
668
L’irrévocabilité en temps réel requiert un apport de liquidités intradays fournies par la banque centrale, elle
nécessite donc le règlement en monnaie centrale.
Pauly E., Banques centrales et opérations sur titres, Banque Stratégie, septembre 1999
669
Freeman S., The payments system, liquidity and rediscounting, American Economic Review, December 1996
670
Comme vu at supra, les flux de paiements sont typiquement asymétriques tout au long de la journée, même
s’ils ont tendance à être « lissés » sur plus longue période. Aussi les participants peuvent-ils être amenés à
emprunter des fonds pour payer leurs titres achetés avoir d’avoir reçu le produits des titres vendus. Ils peuvent
alors être tentés de retarder le paiement si les liquidités ne sont pas disponibles gratuitement. Sauf si les fonds en
provenance des systèmes de règlement-livraison peuvent être compensés par les fonds des systèmes de paiement,
la demande globale ne peut qu’augmenter. A l’extrême, les banques éventuellement ne règlent pas leurs débits
pour minimiser cet effet. Mais un système assis sur des prêts banque centrale collatéralisés réclame pour les
banques un surplus de collatéral. Un arbitrage est donc indispensable.
671
Bank for International Settlements, CPSS, The role of central bank money in payment systems, August 2003
346
Pérennité des services : une banque centrale est moins exposée au risque de cessation
d’activité qu’une banque commerciale,
Liquidité : une banque centrale est capable de fournir, presque sans limite, les liquidités
nécessaires au bon fonctionnement d’un système de paiement,
Neutralité : une banque centrale n’est concurrente d’aucune autre institution dans sa zone
monétaire,
Efficience : l’usage d’un unique agent de règlement permet, à ses participants,
d’économiser des liquidités.
Toutes les autorités internationales requièrent le règlement en monnaie centrale afin de
minimiser les risques systémiques 672.
4.2 Choix entre monnaie commerciale et monnaie centrale
Outre le fait que les règlements en monnaie centrale suppriment le risque de règlement (car
les transferts se font directement sur les livres de la Banque centrale), ils facilitent également
les transferts grâce à une parfaite liquidité des avoirs.
Pourtant, tous les intermédiaires financiers participant aux systèmes de règlement-livraison de
titres ne disposent pas de compte espèces directement ouvert auprès de leur banque centrale,
soit de par leur statut, soit par manque de moyen.
672
- Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for securities settlement systems,
Janvier 2001 : Assets used to settle the cash leg of securities transactions between CSD members should carry
little or no credit or liquidity risk. If central bank money is not used, steps must be taken to protect CSD
members from potential losses and liquidity pressures arising from the failure of a settlement bank.
- Bank for International Settlements, Core principles for systemically important payment systems, janvier
2001 : Les actifs utilisés pour le règlement devraient, de préférence, prendre la forme d’une créance sur la
banque centrale ; s’il s’agit d’autres actifs, le risque de crédit et le risque de liquidité associés devraient être
faibles ou nuls.
- European Monetary Institute, Standards for the use of EU securities settlements in ECSB credit operations,
January 1998 and Assessment of EU securities settlement systems against the standards for their use in
ESCB credit operations, September 1998 : SSSs must use central bank money for the delivery versus
payment settlement of the ESCB credit operations.
- European Central Securities Depositories Association, ECSDA cross border settlement, February 2002 :
Each Ecsda member should be able to settle in central bank money the cash leg of delivery versus payment
transactions for those participants eligible to participate in the payment system managed by its national
central bank.
347
En conséquence, certains systèmes doivent continuer à offrir des règlements en monnaie
commerciale. Si tel est le cas, le risque de crédit sur l’agent de règlement doit être largement
minimisé : pour ce faire, le dispositif de contrôle des risques peut être mis en place sous la
forme d’un établissement spécifique dont la fonction exclusive serait d’assurer le règlement
des opérations de règlement-livraison, sans aucune autre activité bancaire. C’est le concept du
limited ou single purpose bank
673
. Si ledit agent doit consentir des crédits espèces ou des
prêts de titres pour assurer le dénouement des opérations de sa clientèle, un dispositif de
maîtrise des risques s’impose pour limiter les crédits et requérir des garanties.
Comme on l’a noté précédemment, un risque de liquidité naît lorsqu’un participant ne peut
effectuer ses paiements au moment attendu. Mais, même lorsque le paiement est effectif, le
créditeur encourt une autre forme de risque de liquidité lorsque les actifs de règlement ne sont
pas transformables en d’autres créances banque centrale ou autres actifs liquides. Par ailleurs,
le détenteur des actifs de règlement est également confronté à un risque de crédit si la banque
de règlement ne peut honorer ses engagements ; ledit risque s’étend souvent au système tout
entier car concerne plusieurs participants.
Aussi, en cas de règlement en monnaie commerciale, s’agit-il de vérifier la solvabilité de
l’établissement teneur de compte, et de faciliter la substitution des actifs à des actifs ultra –
liquides.
Pourtant l’option de règlement en monnaie commerciale prévaut parfois afin d’éviter des
investissements trop lourds pour certaines banques ou pour faire profiter les plus grands
intermédiaires de recettes non négligeables lorsqu’ils offrent des prestations aux plus petits
établissements.
En outre, un règlement indirect (via la monnaie commerciale) peut réduire les coûts de gestion
des liquidités : les participants directs, consolidant leurs flux et ceux de leurs clients, peuvent
absorber une partie des besoins de liquidités.
673
Hervo F., Ros T., Infrastructures post-marché et stabilité financière, Revue de Stabilité Financière, Banque de
France, Novembre 2002
348
4.3 Règlement multi-devise
4.3.1 Présentation de CLS 674
Afin de démontrer le bien fondé d’un règlement multi-devise, nous reprenons ci-dessous le
système CLS mis en place sur le marché des changes.
Le système CLS – Continuous Linked Settlement a démarré ses activités le 9 septembre 2002 ;
détenu par 66 banques parmi les plus actives sur le marché des changes, il est actuellement
utilisable pour sept devises (euro, dollar américain, livre sterling, yen, franc suisse, dollar
canadien et australien) et deviendra, sans doute une « infrastructure de marché ». Il répond à
la nécessité d’éliminer le risque de règlement par la mise en place du principe du « paiement
contre paiement », et de réduire le risque de liquidité par le plafonnement des positions
débitrices des participants.
A cette fin, chaque participant possède un compte multidevises ouvert sur les livres de CLS
Bank comportant une position par devise. Le principe de « paiement contre paiement »
requiert que chaque opération ne puisse être imputée que si chacune des deux contreparties
possède une position suffisante dans la devise à livrer. Dans le cas présent, l’opération est
imputée immédiatement et irrévocablement, comme indiqué dans le schéma 17 suivant.
Schéma 17 : Débits et crédits sur les comptes ouverts sur les livres de CLS Bank lors de
l’imputation des opérations
Schéma 17.1 : Opération 1
Banque
A
USD 100
EUR 102
Banque
B
Si cette opération satisfait les critères d’imputation, les débits et crédits suivants ont lieu
simultanément sur les livres de CLS Bank.
674
Bronner M., Le système CLS : Une réponse au risque de règlement dans les opérations de change, Revue de
la Stabilité Financière, Banque de France, Novembre 2002
Stewart J.B., Developments in the US payment and settlement system and the Federal Reserve’s interest in the
securities settlement system, Securities Industry Association T+1 Foundation Conference, 24 October 2000
349
Compte multidevises Banque A :
- débit : USD 100
- crédit : EUR 102
Compte multidevises Banque B :
- débit : EUR 102
- crédit : USD 100
Schéma 17.2 : Opération 2
EUR 100
Banque
A
GBP 63
Banque
C
Si cette opération satisfait les critères d’imputation, les débits et crédits suivants ont lieu
simultanément sur les livres de CLS Bank.
Compte multidevises Banque A :
-
débit : EUR 100
-
crédit : GBP 63
Compte multidevises Banque C :
-
débit : GBP 63
crédit : EUR 100
Le bilan de l’imputation ressort sur le tableau 16.
Tableau 16 : Bilan de l’imputation des opérations 1 et 2 sur les comptes
Banque A
EUR
GBP
USD
Banque B Banque C
2
- 102
100
63
- 63
- 100
100
-
La position de chaque banque résulte du solde net multilatéral dans les devises concernées par
les opérations.
Chaque solde net débiteur doit alors être réglé en monnaie centrale (pay-ins), tandis que CLS
Bank règle les soldes créditeurs (pay-outs), via des systèmes de paiement offrant
350
l’irrévocabilité, donc les RTGS. CLS intervient en tant qu’agent de règlement, mais pas en
tant que contrepartie centrale.
Plus généralement les imputations se font de la manière suivante :
Soient 3 devises, l’Euro, le Dollar et la Livre, et 3 banques, A, B, C, dont la somme des
positions débitrices s’élève respectivement à 200, 150 et 200 (leur position débitrice par
devise étant de 100 pour chaque devise) 675.
A l’issue des premiers soldes nets (pays-in), les positions sur le compte multidevises
sont telles qu’exposées dans le tableau 17.
Tableau 17 : Soldes nets
A
B
C
SPL
EUR
GBP
USD
Total
Somme des positions débitrices
ASPL
100
500
100
700
100
100
200
400
100
800
300
900
-
-
200
150
200
-
Et les opérations suivantes sont en file d’attente telles que présentées dans le tableau 18.
Tableau 18 : Etat des opérations en file d’attente
N°opération Banque
1
2
3
A
B
C
Achète
Vend
Montant
Equivalent Montant
Equivalent
initial
USD
initial
USD
USD 100
100
EUR 102
100
EUR 205
201
USD 200
200
EUR 318
312
GBP 200
312
à
B
C
C
En imputant l’opération 1, les positions deviendraient telles que sur le tableau 19.
675
Trois contrôles de risques sont appliqués en permanence par CLS :
le solde, toutes devises confondues, du compte multidevises d’un participant doit être créditeur ou nul,
la position débitrice d’un participant dans une devise donnée ne doit pas dépasser un seuil appelé SPL –
Short Position Limit,
- la somme des positions débitrices d’un participant, toutes devises confondues, ne doit pas dépasser un seuil
appelé ASPL – Aggregate Short Position Limit.
-
351
Tableau 19 : Résultat après imputation de l’opération n°1
EUR
A
B
C
SPL
-100
200
500
100
GBP
700
100
USD
200
100
400
100
Total
800
300
900
-
Somme des positions débitrices
ASPL
- 100
200
150
200
-
-
La seule position débitrice est sur le compte de A en euros, mais elle est à la fois dans la limite
de l’ASPL de A et de celle de la SPL pour l’euro. De plus, le solde total de A reste positif.
L’opération 1 ne conduit donc pas le solde du compte multidevises de A à dépasser les limites
fixées par les dispositifs de contrôle des risques et peut, en conséquence, être imputée.
En imputant l’opération 2, les positions deviendraient telles que sur le tableau 20.
Tableau 20 : Résultat après imputation de l’opération n°2
A
B
C
SPL
EUR
GBP
USD
Total
Somme des positions débitrices
ASPL
-100
401
299
100
700
100
200
- 100
600
100
800
301
899
-
- 100
- 100
-
200
150
200
-
Une position débitrice apparaît sur le compte de B en dollars, mais elle est, à la fois, dans la
limite de l’ASPL de B et dans celle de la SPL pour le dollar. De plus, le solde total de B reste
positif. L’opération 2 peut donc être imputée.
En réglant l’opération 3, les soldes deviendraient tels que sur le tableau 21.
Tableau 21 : Résultat après imputation de l’opération n°3
EUR
A
B
C
SPL
-100
713
- 13
100
GBP
700
- 312
312
100
USD
200
- 100
600
100
Total
800
301
899
-
Somme des positions débitrices
- 100
- 412
-
ASPL
200
150
200
-
352
La somme des positions débitrices de B en devises serait à présent au-delà de l’ASPL de B.
De plus, la position débitrice de B en livres serait au-delà de la SPL dans cette devise.
L’opération 3 ne répond donc pas aux critères d’imputation et est replacée en file d’attente
pour une tentative d’imputation ultérieure.
La gestion des risques dans le système CLS 676.
La CLS Bank est une entreprise du secteur privé, elle présente donc un risque de défaillance.
Or le règlement des opérations acceptées par elle est irrévocable, elle est donc parfois
conduite à verser des sommes à certains détenteurs de positions longues avant d’avoir reçu les
fonds correspondants qui lui sont dus.
En conséquence, chaque opération est soumise à trois règles de contrôle des risques de crédit
et de liquidités 677 :
-
Le solde global de tous les sous-comptes d’un participant direct doit être positif. A cette
fin, les soldes sont calculés à l’aide d’une monnaie de référence aux taux de change
courants, avec une marge de sécurité permettant une protection contre la volatilité.
-
Une limite est imposée au solde négatif global qu’un participant direct peut maintenir dans
ses différents sous-comptes. Ce plafond est fixé pour chaque participant en fonction de
son crédit, de sa liquidité et de considérations d’ordre opérationnel.
-
Le solde négatif qu’un participant peut maintenir dans le sous-compte relatif à chaque
devise est également plafonné, en fonction de la valeur des engagements des pourvoyeurs
de liquidités.
En matière de risque de crédit, la CLS Bank est dotée de mécanismes de protection contre
ledit risque qui garantissent, dans pratiquement toutes les circonstances (y compris les cas de
défaillance), le versement aux participants directs des devises liées aux opérations réglées.
676
Miller P., Northcott C.A., La CLS Bank : gérer le risque de non – règlement des opérations de change, Revue
de la Banque du Canada, Automne 2002
677
Banks using the system need only their net short positions as they wait for linked payments to be reconcilied
and completed. In a simulation with 40-bank group, there were $ 415 billion of gross settlement in a day, for the
us dollar element. The net short position was about $ 16 billion. And because of the periodic sweeping of the
continuous linked settlement mechanism, the drain on bank liquidity was never more than $ 500 million.
Shirref D., Plotting the death of settlement risks, Euromoney, mai 1998
353
Le cas échéant, la CLS Bank s’efforcera de régler le plus grand nombre d’opérations possible
entre les banques non défaillantes, en recalculant les positions des participants et en leur
requérant des montants additionnels s’il y a lieu. Et les pourvoyeurs de liquidités soutiendront
la capacité de la CLS d’effectuer des paiements dans les devises exigées.
En outre, le paiement peut être effectué dans une troisième monnaie lors de défaillances
multiples ou manque de liquidités de la part des pourvoyeurs. Ceci permet alors de limiter le
risque de crédit, mais un risque de liquidité et un risque de remplacement persistent.
Enfin, les pertes peuvent être réparties parmi les membres.
4.3.2 De l’utilité d’un système de règlement-livraison multi-devise
Un modèle de règlement multi-devise a été étudié par un groupe de travail au niveau de la
Banque des Règlements internationaux 678.
Il pourrait s’agir de mécanismes et comptes multidevises offerts par les banques centrales au
travers d’un agent commun. Pour cela, l’agent commun recevrait les dépôts des agents privés
en plusieurs monnaies pour permettre des transferts irrévocables entre ces comptes. A défaut
d’un agent commun, la prestation pourrait être offerte par une ou plusieurs banques centrales,
qui géreraient des comptes dans chaque devise.
Dans les deux options, les fonds en devises étrangères déposés sur ces comptes
représenteraient des avoirs auprès de la banque centrale émettrice.
L’objectif d’un règlement multi-devise est d’apporter aux agents économiques la capacité
technique d’établir une procédure de livraison contre paiement en plusieurs monnaies pour
règlement même jour.
Ladite procédure repose sur une livraison contre paiement en plusieurs devises et signifie
qu’un transfert irrévocable dans une monnaie n’est opéré que si le transfert irrévocable dans la
ou les autres devises est exécuté simultanément, éliminant de facto le risque de règlement.
Un exemple de la complexité des traitements multidevises nous est donné par la Place
financière suisse. Le système interbancaire suisse est basé sur trois étages de traitement :
-
la bourse électronique (gérée par SWX – Swiss Exchange),
354
-
la livraison des titres (gérée par Secom, système de règlement-livraison)
-
le paiement (géré par Telekurss – SIC via la Banque Nationale Suisse pour le franc suisse,
et la Swiss European Bank pour l’euro).
Lorsqu’il y a des transactions en monnaies différentes du franc suisse et de l’euro, le
traitement par simple jeu d’écriture n’est plus possible. Si la connexion à Secom est simple et
bon marché, la connexion à SWX est plus onéreuse (1 million francs suisses environ). Les
intermédiaires non connectés doivent alors faire sous-traiter leurs opérations auprès d’un
membre, remettant en cause le traitement « bout en bout », et multipliant de facto les
intermédiaires et donc les risques.
Pour l’essentiel, seules les centrales de clearing internationales proposent des règlements
multidevises 679. Ainsi, les intermédiaires financiers sont-ils tenus d’opérer avec un réseau de
banques correspondantes, multipliant de facto les intermédiaires et les facteurs de risques.
Conclusion
Le présent chapitre a fait état de la littérature relative aux systèmes de paiement et de
règlement-livraison de titres.
Il nous a semblé opportun de le présenter selon la même architecture que notre réflexion
relative à nos hypothèses d’efficience présentées dans le chapitre suivant.
678
Banque des Règlements Internationaux, Services de paiement et de règlement de banque centrale pour les
opérations transfrontières multidevises, septembre 1993
679
A cette fin, ces centrales disposent de correspondants espèces qui tiennent les comptes dans leur système,
reçoivent les revenus, et font les transferts espèces. Lesdits correspondants sont des grandes banques choisies
pour leur haute qualité de services et sont souvent les mêmes que les dépositaires ; ils fournissent les liens
nécessaires entre les centrales et les systèmes de paiement locaux.
Euroclear, Quick Guide to the Euroclear System, février 2000
355
Parmi cette littérature, nombreux sont les articles ayant trait à l’efficience des systèmes de
paiement. Comme mentionné tout au long de nos travaux, les systèmes de règlement-livraison
de titres ont, dans le passé, peu intéressé la recherche académique.
Mais sous l’impulsion des organismes de tutelles internationaux ou des groupes de travail
réfléchissant à l’amélioration des procédures post-bourse, le sujet est dorénavant abordé dans
quelques travaux universitaires. Nous y avons fait référence dès que possible. De même qu’à
chaque fois que cela nous est apparu opportun, nous avons justifié le lien de nos réflexions
avec celles établies par des économistes sur les marchés des capitaux en général, et les
marchés des changes ou le fonctionnement des systèmes de paiement en particulier.
Aujourd’hui, les instances internationales considèrent les systèmes de règlement-livraison de
titres comme efficients. En effet, depuis près de vingt ans, lesdits systèmes se sont adaptés à
leurs normes pour éviter, notamment, une propagation éventuelle d’un système à un autre.
Pour leurs développements à venir, ces mêmes instances internationales se penchent
dorénavant sur l’efficience des procédures transfrontalières. A maintes reprises, nous avons
fait état des surcoûts et des risques attenant à ces opérations transfrontières.
L’efficience globale des techniques post-boursières doit se focaliser, dans un avenir très
proche, sur le traitement transfrontaliers, d’autant plus que nous sommes dans un univers
complètement mondialisé.
Si les enjeux sont cruciaux pour l’ensemble des places financières, il nous semble cependant
que cette facette internationale est un autre sujet.
En conséquence, dans notre étude empirique, nous nous sommes limités à l’étude des
systèmes domestiques. Les gestionnaires des systèmes de règlement-livraison de titres arguent
de l’efficience technique de leur système.
La place financière de Paris est intimement persuadée de l’efficacité de ses systèmes RGV et
Relit. Certes les procédures sont automatisées, les risques minimisés et les coûts diminués,
mais peut-on tendre vers un taux de suspens nul, vers des files d’attente perpétuellement
vides, ou encore vers un traitement totalement automatisé, du réseau de collecte des ordres
jusqu’à la livraison des titres et règlement des espèces ?
356
Tableau 22 :Commissions de règlement-livraison en Europe
Tableau 22.1 : Commissions de dénouement avec des dépositaires domestiques (en €)
Action
0.11 – 2.28
0.25 – 0.40
0.30 – 1.13
0.72
0.32 – 0.90
0.26
Danemark
Allemagne
France
Italie
Royaume-Uni
Suisse
Obligation
0.125 – 5.00
0.30 – 1.13
Tableau 22.2 : Commission de dénouement de Clearstream par marché (en €)
Dépositaire
Clearstream
Luxembourg
Euroclear
Bank
SIS
Dénouement interne
Dénouement externe
Valeurs internationales Valeurs domestiques
Valeurs internationales Valeurs domestiques
Action
Obligation Action
Obligation Action
Obligation Action
Obligation
2.00
1.35
2.00
1.35
..
..
..
..
Clearstream
Francfort
Euroclear
France
Euroclear /
Crest
DTCC
2.71
1.35
2.71
1.35
27.6048.70
21.65
21.6527.06
21.65
13.5327.06
10.82
10.82
..
..
32.47
32.47
2.16
2.16
32.47
32.47
..
..
32.47
32.47
..
..
32.47
32.47
13.5327.06
10.82
32.47
32.47
5.41
Tableau 22.3 : Commission de dénouement d’Euroclear par marché (en €)
Dépositaire
Clearstream
Luxembourg
Euroclear
Bank
SIS
Clearstream
Francfort
Euroclear
France
Euroclear /
Crest
DTCC
Dénouement interne
Dénouement externe
Valeurs internationales Valeurs domestiques
Valeurs internationales Valeurs domestiques
Action
Obligation Action
Obligation Action
Obligation Action
Obligation
..
..
1.03-2.71 1.03-2.71 ..
..
0.49-2.16
0.49-2.16
..
..
-
-
-
..
..
0.60-2.71
0.32-1.73
0.60-2.71
0.32-1.73
..
..
9.74-16.23 5.94-10.80
4.33-8.66 1.52-6.49
..
..
0.60-2.71
0.60-2.71
..
..
..
..
0.54-2.16
0.54-2.16
..
..
..
..
0.542.16
0.542.16
..
..
Source : Giovannini Report, 2001
-
23.817.58-21.65
32.47
6.49-10.82 9.74-16.23
4.338.66
6.4910.82
357
Chapitre V : Etude de l’efficience des systèmes
In a world in which the structures of financial service industries are
changing rapidly, it is important to determine the cost and revenue efficiency
of evolving financial institutions. If these institutions are becoming more
efficient, then we might expect improved profitability, greater amounts of
funds, better prices and service quality for consumers, and greater safety and
soundness if some of the efficiency savings are applied towards improving
capital buffers that absorb risk.
Berger A.N., Hunter W.C., Timme S.G., The efficiency of financial
institutions : A review and preview of research past, present and future.
Journal of Banking and Finance, 1993
Tester nos hypothèses sur le système de règlement-livraison de titres français a représenté un
exercice difficile. Notre étude a suivi le fil directeur de nos hypothèses d’efficience que nous
exposons ci-dessous.
Si Euroclear nous a fourni toutes les statistiques dont elles disposait, ces chiffres n’ont pas
toujours fait l’objet d’un suivi permanent ; c’est notre première limite.
Certaines prestations ne sont pas proposées sur la place financière de Paris ; il eut été, en
conséquence, intéressant d’étudier l’impact de ces prestations chez les dépositaires qui les
offrent. Mais ces derniers n’ont pas jugé utile de nous transmettre des indicateurs ; c’est notre
seconde limite.
Enfin, rares sont les intermédiaires qui ont satisfait notre requête d’informations, et pour ceux
qui ont répondu, certains chiffres étaient inconnus ou non publiables ; c’est notre troisième
limite.
Fort de ces constats, nous avons néanmoins continué notre recherche qui semble conclure à
une efficience relative du système de règlement-livraison de titres parisien.
L’objectif de ce chapitre est d’étudier dans quelles mesures les systèmes français sont
efficients. Après avoir exposé nos conditions d’efficience et leurs indicateurs, nous présentons
l’intérêt de la mise en place d’un dépositaire central de titres et d’une contrepartie centrale.
Puis nous abordons les prestations de base d’un système de règlement-livraison, à savoir la
technique de la livraison contre paiement avec irrévocabilité en cours de journée et règlement
en monnaie centrale, accompagnée d’aides au dénouement (prêts de titres et pensions livrées).
Enfin, nous approchons la notion d’efficience – X au travers de l’expérience d’un
établissement financier et des coûts globaux.
358
1. Problématique et conditions d’efficience
L’énoncé de notre thèse est celui de l’efficience technique d’un système de règlementlivraison de titres.
Cette efficience technique a été exposée lors dans le chapitre I, tel que nous l’entendions dans
le cadre de cette recherche. Et nous avons tenté d’expliquer combien un tel système se devait
d’être efficient dans l’évolution actuelle des places financières et des systèmes de place
interconnectés.
Notre étude de la théorie a été effectuée selon notre démarche globale de réflexion appuyée
sur une problématique qui pourrait sans doute s’assimiler à une méta – proposition.
Aussi nous semble-t-il opportun d’énoncer cette problématique avant de présenter notre
démarche de recherche empirique et les difficultés nombreuses rencontrées.
Un système de règlement-livraison efficient permet de dénouer les transactions selon
le principe de la livraison contre paiement dans un délai rapide et imposé.
Par ce biais, il permet de minimiser les risques de suspens, temporaires ou définitifs,
chez ses participants et d’optimiser la gestion de leurs avoirs en titres et en espèces.
De facto, il réduit considérablement le risque systémique, à condition cependant que
son gestionnaire élimine le risque de conservation et que la banque de règlement soit
exempte de risque de défaillance.
Ipso facto, nos hypothèses d’efficience peuvent être formulées de la manière suivante :
Hypothèse 1 : L’efficience d’un système de règlement-livraison repose
sur la mise en place d’un dépositaire central de titres et sur la technique
du netting.
♦ H1.1 : Un dépositaire central avec, au mieux, une dématérialisation des
titres ou, à défaut, au minimum une inscription en comptes (book-
359
entry system) apparaît comme un pré-requis indispensable à la mise en
place d’un système de règlement-livraison.
La mise en place d’un dépositaire central assurant la conservation des titres et
donc la fonction notariale de teneur de comptes titres pour une place financière
donnée est une condition, nécessaire mais non suffisante, de mise en place d’un
système de règlement-livraison de titres. Son rôle est d’autant probant que les
titres ont perdu toute existence physique, consacrant de facto un rôle comptable
de conservation scripturale des valeurs mobilières et d’enregistrement des
débits et crédits des comptes consécutifs aux négociations boursières.
Pour autant, peu nombreuses sont les places ayant dématérialisé leurs titres. Or,
pour minimiser les risques de pertes et de conservation, le temps et les coûts de
traitement des opérations post-bourse, il convient, au minimum de mettre en
place un système scripturalisé de comptabilisation des échanges. Cet argument
prévaut d’autant plus que la plupart des bourses sont informatisées. Le postbourse doit donc être automatisé et rationalisé au même titre que les activités
de front – office et négociation l’ont été depuis une vingtaine d’années.
♦ H1.2 : Un netting multilatéral permet de réduire le nombre de
mouvements à dénouer, mais également le montant des prises de
garantie.
Le netting est source d’effets réseaux incontestables. Au-delà de la diminution
du nombre de mouvements à dénouer dans un système de règlement-livraison
de titres, il autorise les autorités à requérir des prises de garantie plus faibles et
donc permet une diminution des coûts d’immobilisation desdites garanties pour
les participants.
Si un netting bilatéral est une première avancée, un netting multilatéral semble
encore plus adéquat pour les économies de coûts.
Toutefois, le netting multilatéral n’est possible que lorsqu’il existe une
contrepartie centrale.
360
♦ H1.3 Une contrepartie centrale, condition sine qua none du netting par
novation, induit une baisse des coûts et des besoins de collatéralisation.
Hypothèse 2 : Un système de règlement-livraison efficient doit être régi
par le principe de la livraison contre paiement avec un délai de Place.
♦ H2.1 Un délai de place est obligatoire pour tous les participants à un
système.
A défaut d’un délai déterminé et imposé par une autorité, les participants
s’autorisent à traiter leurs opérations post-bourse à leur gré. Il s’ensuit
éventuellement des difficultés de gestion des titres et des espèces pour leurs
contreparties, créant alors, parfois, des situations gravissimes pour l’ensemble
du système. Quid, en effet, d’un participant qui, en attente d’une livraison de
titres, ne peut procéder à l’enregistrement de ses ventes ? Outre que ses
mouvements tombent en suspens de dénouement, ses autres contreparties sont
alors confrontées aux mêmes difficultés, provoquant, de facto, une situation de
blocage, qui à l’extrême peut s’étendre au système tout entier.
♦ H2.2 La technique de livraison contre paiement avec pré-appariement
permet de minimiser les risques de règlement et diminue les suspens.
La communauté financière internationale se souvient du problème de la
Banque Herstatt, rencontré il y a trente ans, sur le marché des changes. De la
même manière que les autorités bancaires requièrent la technique du paiement
contre paiement pour les transactions de change, celle de livraison contre
paiement pour les transactions boursières s’est avérée être un principe de base
pour tous les systèmes de règlement-livraison de titres. La simultanéité des
règlements espèces et des livraisons de titres permet, en effet, de réduire le
risque en principal et minimise le taux de suspens.
361
♦ H2.3 Le Recyclage, en cours de journée, des mouvements non dénoués
maximise la fonction de dénouement d’un système de règlementlivraison.
En d’autres termes, plus les mouvements non dénoués à un instant t sont
retraités en t+1 au cours d’une même journée comptable, plus le taux de
suspens est minimisé.
Hypothèse 3 : Le principe de la livraison contre paiement doit être basé
sur l’irrévocabilité des mouvements, et accompagné de mécanismes de
fluidification des dénouements
♦ H3.1 L’irrévocabilité permet une optimisation de la trésorerie titres et
espèces.
L’irrévocabilité des mouvements autorise les participants à disposer
immédiatement des fonds en titres et en espèces. La plupart des systèmes de
règlement-livraison de titres offrent une irrévocabilité en fin de journée, mais
celle-ci est insuffisante.
Compte tenu des interconnexions entre les systèmes de titres et les systèmes de
paiement, une irrévocabilité en temps réel doit être proposée aux intervenants
afin qu’ils puissent optimiser leur gestion de trésorerie titres et espèces.
L’objectif d’une cellule titres devient la rentabilisation des avoirs. Lorsque
l’irrévocabilité est obtenue en cours de journée, les intermédiaires financiers
peuvent bénéficier des opportunités offertes par un système de prêt-emprunt de
titres et donc gérer leur trésorerie titres, à l’instar de ce qu’ils font depuis des
décennies sur les espèces.
Les back – offices sont condamnés à devenir des centres de profit, à défaut ils
disparaissent.
♦ H3.2 L’irrévocabilité repose sur un système de prêt-emprunt de titres
liquide et automatisé, des pensions livrées et des crédits intradays.
362
Pour mener à bien la gestion de trésorerie titres, les opérations de prêt-emprunt
de titres et de pensions livrées sont devenues des instruments obligatoires.
Plus encore, un système de règlement-livraison de titres optimise la gestion de
ses dénouements dès lors qu’il existe un pool de titres prêtables de telle
manière que le système lui-même puisse déclencher des opérations de prêts de
titres sans l’intervention des participants.
De la même façon qu’un système de prêt-emprunt de titres permet de
maximiser le nombre de dénouements et d’éviter les situations de blocage, une
mise à disposition de crédits intradays est nécessaire pour la partie espèces.
Un vendeur en défaut de provision devrait pouvoir bénéficier de titres
automatiquement prêtables ; un acheteur devrait pouvoir alimenter son compte
espèce sur 24 heures pour minimiser les suspens.
♦ H3.4 L’irrévocabilité est conditionnée par le principe de la
collatéralisation
La collatéralisation devient le mécanisme le plus courant en matière de prise de
garantie. Un gestionnaire de système de règlement-livraison ne peut encourir le
risque de l’insolvabilité d’un de ses participants. A cette fin, il requiert des
normes de gestion qui vont jusqu’à une collatéralisation de certains
mouvements.
De surcroît, depuis que les politiques monétaires sont menées par les taux, les
banques centrales n’accordent des liquidités à leurs banques qu’au travers de
mouvements collatéralisés.
Hypothèse 4 : Les règlements doivent être effectués au maximum en
monnaie banque centrale
♦ H 4.1 La banque de règlement doit être la Banque centrale.
363
La banque de règlement peut être soumise à un risque d’insolvabilité. Si la
situation s’avère, que deviennent les mouvements consécutifs aux transactions
quant à leur dénouement espèces.
Compte tenu des montants négociés quotidiennement, il convient de considérer
une banque de règlement présentant un minimum de risque d’insolvabilité.
Ipso facto, la banque centrale semble la plus opportune, parce que quasiment
exempte de risque d’insolvabilité, au moins dans les économies développées.
♦ H4.2 Le choix entre monnaie centrale et monnaie commerciale doit
être possible pour les plus petits établissements.
Toutefois, le règlement en monnaie centrale se fait par des comptes espèces en
banque centrale. Certains participants ne disposent pas forcément de
l’infrastructure nécessaire aux exigences du cahier des charges édicté par leur
banque centrale. Aussi, ceux-ci sont-ils tenus de faire sous-traiter leur gestion
de monnaie centrale auprès d’un autre établissement financier.
Leurs règlements s’opèrent alors en monnaie commerciale.
En conséquence, afin de rendre l’accès le plus large possible au système de
règlement-livraison de titres, son gestionnaire doit pouvoir offrir une dualité de
règlement, en monnaie centrale et monnaie commerciale.
♦ H4.3 Les règlements multidevises doivent être proposés par un système
de règlement-livraison de titres.
Si un système de règlement-livraison de titres offrant le dénouement des
transactions en diverses monnaies permet à ses participants de réduire le
nombre d’intervenants dans leur traitement post-bourse, il convient, cependant,
de s’interroger sur l’opportunité pour un gestionnaire de système d’être
confronté aux risques de change.
364
2. Eléments de méthodologie
2.1 Une démarche adaptée
Notre conceptualisation consiste en une approche des prestations post-bourse, à savoir les
prestations qui permettent de livrer les titres et de régler les espèces lorsque les négociations
boursières sont opérées sur un marché réglementé.
Nos concepts sont déterminés par notre problématique, décomposée elle-même en
hypothèses. Certaines de ces hypothèses s’avèrent facilement testables au travers
d’indicateurs précis dans une dimension chronologique. Il en va ainsi du nombre de suspens
par exemple. Mais nombreuses sont les hypothèses pour lesquelles nous sommes face à un
manque d’indicateurs, quantifiables certes, mais non quantifiés sur de nombreuses places
financières.
Nous avons toutefois essayé de déterminer des indicateurs pour chaque hypothèse et soushypothèse. Charge à nous, ensuite, d’avoir relevé ceux qui nous étaient donnés directement
par des bases de données à exploiter, et de tenter d’évaluer les autres par un biais nous
permettant de conclure à l’infirmation ou la confirmation de ces hypothèses.
Nous reprenons, ci-dessous dans le tableau 1, notre démarche d’élaboration des indicateurs :
365
Tableau 1 : Hypothèses et indicateurs
Hypothèses
•
Principaux indicateurs
H1 Dépositaire central de titres
H1.1 Dépositaire central & dématérialisation
des titres
H1.2 Netting multilatéral
H1.3 Contrepartie centrale
• H2 Livraison contre paiement avec délai
de place
H2.1 Délai de place
H2.2 Livraison contre paiement et préappariement
H2.3 Recyclage des mouvements non dénoués
• H3 Irrévocabilité des mouvements &
mécanismes
de
fluidification
des
dénouements
H3.1 Optimisation des trésoreries titres et
espèces
H3.2 Système de prêt-emprunt de titres
liquide, pensions livrées et crédits intradays
H3.3 Collatéralisation
Délai de livraison
Nombre de mouvements avant et après netting
Montant de la collatéralisation
Evolution des délais de place
Taux de suspens
Nombre d’avis d’opéré répondus et acceptés
Taux de suspens
Rentabilité des avoirs en titres
Nombre de prêt-emprunt de titres sur
demande et automatiques,
Nombre de pensions livrées et crédits
intradays,
Nombre de pensions livrées intradays,
conservatoire et overnight
Coût de la collatéralisation
Montant de la collatéralisation
H4 Règlements en monnaie centrale et
multidevises
H4.1 Banque de règlement = banque centrale Nombre de participants disposant d’un
compte espèces en banque centrale
Contre valeur espèces des mouvements
enregistrés en Euroclear France
H4.2 Monnaie centrale et monnaie Nombre de sous-affiliés (c’est-à-dire sans
commerciale
compte espèces en banque centrale)
H4.3 Règlement multi-devise
Pourcentage des règlements en devises hors
euro dans total des règlements
Nombre de virements internationaux
Coût de traitement d’une opération
transfrontalière
•
Notre réflexion de départ est celle de l’efficience technique d’un système de règlementlivraison de titres, donc un système qui minimise les risques et les coûts, capable de s’adapter
à un environnement boursier en pleine croissance.
366
Nous sommes partis de ce postulat lié au paradigme du système financier dans sa globalité.
Et la construction de notre système efficient s’est établie par déduction.
Notre démarche est donc hypothético-déductive.
Nous nous sommes effectivement basés sur des hypothèses construites au travers de concepts
utilisés auparavant pour évaluer l’efficience d’un système de paiement. Ces hypothèses, pour
être testées, ont fait l’objet d’une recherche d’indicateurs permettant de trouver des
correspondants dans les systèmes existants.
Enfin, nous terminerons cette réflexion méthodologique selon un point de vue atemporel sur
lequel nous nous sommes appuyés dès l’amorce de notre recherche. Nous sommes partis d’un
système hors du temps, à savoir, nos hypothèses d’efficience ont été déterminées hors de
l’état d’avancement d’un système de règlement-livraison donné.
A titre d’exemple, citons notre première hypothèse qui stipule qu’un pré-requis à l’efficience
d’un système de règlement-livraison est la mise en place d’un dépositaire central : il va de soi
que le système sur lequel se base principalement notre étude empirique, le système français,
repose sur un dépositaire qui existe depuis plus de soixante ans.
Si notre étude s’était focalisée sur les évolutions structurelles des systèmes de règlementlivraison de titres, telles qu’historiquement mises en places, notre réflexion serait devenue
rapidement obsolète, avant même d’en avoir tiré toute conclusion.
2.2 Les difficultés rencontrées et les limites de notre recherche
2.2.1 Un marché de la conservation concentré
Comme mentionné dès le chapitre I, le marché de la conservation de titres est concentré.
Sur le plan mondial, il ne nous est pas possible de calculer un indice de concentration tel
que l’indice Herfindhal, faute d’avoir obtenu le montant total de la conservation mondiale.
367
Cependant, nous présentons, dans le tableau 2, les vingt premiers global custodians
mondiaux.
Tableau 2 : Les vingt premiers global custodians mondiaux
Rang
Etablissement
1
2
3
4
5
6
7
8
9
State street
Bank of New York
JP Morgan
Citibank N.A.
Mellon Group
UBS AG
Northern Trust
BPSS
Global Investor
Services
Société Générale
SIS Segaintersettle
RBC Global
Services
Investors Bank &
Trust
Brown Brothers
Harriman
Wachovia
Crédit Agricole
Group
CDC Ixis
Banca Intesa
Nordea Bank
Fortis Bank
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
Total actifs
(en milliards $)
9 400
8 300
7 098
6 381
3 500
2 355
2 200
2 167
1 483
Date de
référence
31.12.2003
31.12.2003
01.12.2003
31.12.2003
30.06.2003
31.12.2003
31.12.2003
30.09.2003
29.02.2003
1 165
1 135
1 128
31.12.2003
31.05.2003
31.10.2003
1 056
31.12.2003
900
31.01.2003
854
691
31.07.2003
30.06.2003
623
510
466
450
01.01.2003
30.09.2003
30.09.2003
31.01.2003
Le total des 20 premiers global custodians mondiaux s’élève à 51 862 milliards de dollars,
tandis que les quarante premiers totalisent 54 782 milliards de dollars de conservation. Sur cet
échantillon de quarante, les dix premiers représentent 80,41 %.
Cette concentration s’explique par des recherches d’économies d’échelle dans le métier de la
conservation. Il y a fort à penser que certains établissements continueront de fusionner leurs
activités, sachant qu’on estime la taille critique à 2 000 milliards de dollars.
368
Sur le plan de la conservation française, si l’on retient le montant de la conservation de
chaque participant dans la conservation totale d’Euroclear France, nous nous situons dans
la règle des « 20 – 80 ».
Les vingt plus gros participants totalisent 80,753 % du montant total de la conservation
d’Euroclear France. Et selon l’Afti, 57 établissements sur Euronext seraient actifs sur le
règlement-livraison de titres.
L’indice de Herfindahl – Hirschman s’établit à 1 225,44 ; il confirme donc la concentration,
certes modérée, mais non négligeable, du métier des titres en France.
Par ailleurs, s’il nous était possible de prendre en compte les liens capitalistiques des
différents établissements bancaires, le degré de concentration serait encore plus important.
Citons à titre d’exemple, le cas du Crédit du Nord, filiale de la Société Générale : Chez
Euroclear France, le premier établissement dispose de comptes titres différents du second, or
en consolidant les montants des conservations des établissements, il y a fort à parier que
l’indice HHI serait augmenté en conséquence ; il démontrerait alors que le domaine de la
conservation est hyper concentré, corroborant les études faites en matière d’économie
d’échelle dans ce domaine.
Enfin, au-delà de cette consolidation liée aux opérations de restructuration dans le domaine
bancaire, il s’agit de prendre également en compte les alliances, partenariats et fusions des
conservations qui n’apparaissent pas dans les états statistiques d’Euroclear France.
Parmi les plus grosses opérations, on recense la fusion des activités titres de Natexis –
Banques Populaires et Crédit Commercial de France, de GesTitres (Caisses d’Epargne) et
Crédit Lyonnais, et bientôt, sans doute, de CDC Ixis et Crédit Agricole.
Au total, les actifs conservés par le plus grand acteur français dans le domaine, BNP – Paribas
via sa filiale BPSS, atteignent 2 090 milliards €, tandis que ceux gérés par le second, la
Société Générale, atteignent 1 200 milliards $. Ceux du Crédit Agricole et de CDC Ixis avant
rapprochement atteignent respectivement, 550 et 584 milliards €.
369
2.2.2 Une absence de comptabilité analytique chez les intermédiaires financiers
En plus de la forte concentration des activités, il est un problème inhérent à la culture bancaire
française et plus encore aux activités post-boursières, l’absence longtemps décriée de
comptabilité analytique.
Il a fallu attendre les années quatre-vingts pour voir des cellules de comptabilité analytique et
de contrôle de gestion se créer chez les établissements de crédit. Si les métiers traditionnels de
la banque ont comblé leur retard, par rapport aux entreprises industrielles et commerciales, au
milieu des années quatre-vingts, certains intermédiaires financiers sont, encore aujourd’hui,
incapables d’évaluer le coût de traitement de certaines opérations boursières et postboursières. Et parmi ces établissements, les sociétés de bourse sont les plus en retard.
Fort de ce constat, notre enquête terrain, pour notre analyse empirique, s’est trouvée très vite
limitée. Et au-delà du manque de chiffres, certains éléments, même connus des établissements
n’ont pu nous être communiqués pour cause de confidentialité.
Il nous semblait, en effet, opportun de pouvoir étudier l’évolution du coût de traitement d’un
ordre de bourse, mais les difficultés se sont avérées nombreuses. Certains intermédiaires ne
connaissent que le coût total d’un traitement, cumulé bourse et post-bourse. D’autres
établissements, plus avancés dans leur étude de coût analytique, n’ont pas jugé bon de nous
communiquer ces chiffres hautement stratégiques eu égard à leur politique de tarification.
Enfin, rares sont les établissements de crédit qui ont bien voulu répondre à nos investigations.
Afin de pallier ces difficultés, nous nous sommes appuyés sur les chiffres publiables transmis
par ceux qui nous ont répondu et sur des chiffres issus d’études de banques centrales et autres
autorités de tutelles nationales ou supranationales qui disposent incontestablement d’un
pouvoir d’investigation plus fort que le nôtre auprès des banques.
C’est là précisément que se situe la limite de notre recherche. Si nous en avons pris
conscience dès le démarrage de notre étude, il nous a semblé essentiel néanmoins de mener à
370
bien ladite recherche, par ailleurs jamais conduite à ce jour, dans le cadre d’une recherche
universitaire.
2.2.3 Un périmètre d’activité évolutif chez les dépositaires centraux depuis la
mise en place d’un système de règlement-livraison de titres
Si les intermédiaires ont été très peu nombreux à répondre à nos investigations terrains,
Euroclear France nous a, cependant, mis à disposition sa base de données statistiques
complètes.
Mais le comportement de rétention d’informations ou de non-contribution à nos travaux de
recherche de certaines banques vaut également pour les dépositaires centraux. Rares sont ceux
qui ont bien voulu participer à notre étude. Parmi les contributeurs, on recensera plus
particulièrement les dépositaires des places de Hong Kong, Lituanie, Pologne, Italie,
Danemark, et le dépositaire international Clearstream.
Euroclear France a, certes, bien voulu nous transmettre l’intégralité de ses statistiques, mais il
n’en demeure pas moins que le périmètre de ses activités a considérablement évolué depuis la
création de la Sicovam.
Nous aurions voulu mesurer quantitativement l’impact de la dématérialisation des titres en
France, mais il n’existe pas ou prou de statistiques avant 1984, hormis celles mentionnées
plus bas.
Et l’impact de la mise en place d’un système de règlement-livraison de titres est difficilement
mesurable en ce sens qu’il est difficile de comparer des virements de titres à des instructions
de livraisons contre paiement.
En conséquence, les statistiques les plus homogènes ne sont utilisables qu’à partir de 1995, ce
qui réduit notre série chronologique.
Pourtant, dès que possible, nous avons tenté de comparer certaines activités au fil des
innovations des systèmes pour en mesurer l’impact. Enfin, parfois, afin de nous conforter
dans la confirmation ou l’infirmation d’une hypothèse ou sous-hypothèse, nous avons pris
l’exemple d’autres dépositaires dont nous disposions.
371
3. Un dépositaire central de titres et une contrepartie centrale
facilitent la mise en place d’un système de règlementlivraison efficient
3.1 La dématérialisation est un pré-requis à la rationalisation des
procédures de règlement-livraison
3.1.1 L’impact de la dématérialisation en France
Pour argumenter les avantages nombreux de la dématérialisation des titres, nous reprenons le
cas de la France 680.
La dématérialisation a permis de substituer un système unique (l’inscription en compte –
courant de titres) à de multiples modes de détention des valeurs mobilières. L’utilisation du
compte – courant avait fait ses preuves mais, appliqué tel qu’il l’était avant l’intervention du
législateur, restait de portée limitée.
Aussi avait-on, sur la place financière de Paris, deux systèmes de détention :
-
un système scriptural,
-
un système de type matériel, se subdivisant lui-même en deux modes de détention : Le
titre porteur hors Sicovam et le certificat nominatif.
Et à ces modes de détention correspondaient autant de procédures de circulation des titres et
de gestion des opérations sur titres, requérant de facto des organisations différenciées chez les
intermédiaires financiers.
La dématérialisation, en instaurant un système unique, a concouru à la simplification et la
rationalisation des procédures ; en atteste l’exemple d’une émission de titres nouveaux :
Celle-ci se gère, dans un système dématérialisé, par un simple jeu d’écritures.
-
680
L’émetteur communique au dépositaire central le montant de titres nouvellement émis,
Guerber A., Les conséquences de la réforme sur le fonctionnement du marché financier et sur le système de
compensation, Sicovam 11.12.1984, Document interne non publié
372
-
Le dépositaire ouvre un compte émission (structurellement débiteur) dans ladite valeur au
nom de l’établissement chef de file de l’émission ; sa contrepartie est un crédit sur un
compte de provision.
-
Le moment venu, le chef de file débite ce compte de provision par crédits successifs des
intermédiaires bénéficiaires, jusqu’à apurement.
Les titres sont pris en compte par Sicovam dès le jour de leur création juridique, alors
qu’auparavant six mois étaient nécessaires à l’impression des formules physiques.
Une analyse statistique d’avant dématérialisation
A ce jour, les statistiques d’avant dématérialisation n’existent plus. Il nous est, en
conséquence, difficile d’étudier l’impact quantitatif de cette dématérialisation.
Cependant, une étude statistique avait été élaborée en 1987
681
, faisant état de l’évolution
historique de certains paramètres d’activité de Sicovam. Nous la reprenons en partie.
Les huit années représentent les années « charnières » de l’évolution de Sicovam avant la
dématérialisation. L’année 1950 est celle du premier exercice ; 1966 montre l’impact de
l’admission des obligations
682
; 1972 marque l’admission des Sicav (décret du 18 mars
1971) ; 1978 enregistre l’admission des obligations du secteur RPTA 683 ; 1983 est l’année de
rupture avant la dématérialisation.
-
Le nombre d’affiliés (graphique 1) :
Entre 1960 et 1966, la courbe des affiliés enregistre une diminution notoire. Celle-ci est due à
la réforme du marché financier de 1962 qui met fin à l’existence des courtiers en valeurs
mobilières, alors qu’ils étaient adhérents, en leur nom propre, de la Sicovam. Ensuite leur
nombre se stabilise mais passe à 405 en 1984 ; c’est l’impact de la dématérialisation qui
autorise les émetteurs à être affiliés de droit (152 émetteurs en 1984).
681
Karyotis C., Evolution de certains paramètres de la Sicovam (Document interne non publié), juin 1987
Le décret du 14 septembre 1964 autorise l’admission des obligations convertibles en actions et, après
approbation du Ministère des Finances, toutes autres valeurs mobilières, notamment les obligations
représentatives d’emprunts amortissables par séries.
683
RPTA : Répartition proportionnelle des titres amortis (décret du 22 août 1977 qui permet l’admission en
Sicovam des obligations amortissables par tirage au sort de numéros de titres).
682
373
Graphique 1 : Nombre d’affiliés
450
400
350
300
250
200
150
100
50
0
1950
-
1954
1960
1966
1972
1978
1983
1984
Le nombre de valeurs admises en Sicovam (graphiques 2 et 3) :
Son évolution suit les décrets. La légère hausse entre 1966 et 1972 est due à l’admission des
Sicav dès 1971. Le doublement du nombre de valeurs entre 1972 et 1978 reflète l’admission
des obligations du secteur RPTA. La forte augmentation de 1984 est évidemment due à la
dématérialisation des titres et donc l’admission obligatoire de toutes les valeurs cotées en
Bourse de Paris (hormis certaines valeurs du Hors – Cote).
Globalement, le nombre de titres en comptes suit l’évolution des valeurs, comme en atteste le
graphique 3.
374
Graphique 2 : Nombre de valeurs admises en Sicovam
5 000
4 500
4 000
3 500
3 000
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
1950
1954
1960
1966
valeurs françaises
1972
1978
1983
1984
1983
1984
valeurs étrangères
Graphique 3 : Titres en compte (millions de titres)
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
1950
-
1954
1960
1966
1972
1978
Le nombre de dépôts et retraits :
En nombre de mouvements (graphique 4), l’évolution est normale ; les dépôts augmentent 684
et les retraits diminuent régulièrement. En nombre de titres (graphique 5), un élément pourrait
684
Au total, 1,17 milliards de titres ont été déposés en 1984 (et 500 millions l’année suivante).
375
sembler anormal, l’augmentation considérable du nombre de titres retirés en 1984. Il
semblerait qu’il y ait eu, dans les dix premiers mois de 1984, des retraits de titres destinés à
l’étranger 685.
Graphique 4 : Nombre de dépôts et retraits en Sicovam
900 000
800 000
700 000
600 000
500 000
400 000
300 000
200 000
100 000
0
1950
1954
1960
1966
nombre de dépôts
1972
1978
1983
1984
nombre de retraits
Graphique 5 : Nombre de titres déposés et retirés
1 400 000 000
1 200 000 000
1 000 000 000
800 000 000
600 000 000
400 000 000
200 000 000
0
1950
1954
1960
1966
1972
N o m b r e d e t itr e s d é p o s é s
-
685
1978
1983
1984
N o m b r e d e t it re s re tir é s
Le nombre de virements de titres (graphiques 6 et 7) :
Dans les mois qui ont suivi la dématérialisation des titres français, les émetteurs du récréer des formules
papier pour circulation de leurs valeurs à l’étranger ; ce furent les certificats représentatifs.
376
L’évolution des virements (graphique 6) apparaît favorable, l’année 1966 enregistre
néanmoins une réduction de leur nombre. Cette évolution est sans doute à rapprocher de
l’ambiance médiocre du marché boursier de l’époque.
Par ailleurs, on constate que le nombre de titres virés augmente fortement (graphique 7). Il
passe de 1.5 milliards en 1983 à 3.5 milliards en 1984. Cette progression est imputable à des
dépôts de grosses coupures globales sur des comptes transitoires. Ces dépôts ont ensuite
donné lieu à des répartitions sur des comptes d’affectation définitive, provoquant d’importants
virements de répartition.
Graphique 6 : Nombre de virements de titres
5 000 000
4 500 000
4 000 000
3 500 000
3 000 000
2 500 000
2 000 000
1 500 000
1 000 000
500 000
0
1950
1954
1960
1966
1972
1978
1983
1984
Graphique 7 : Nombre de titres virés
4 000 000 000
3 500 000 000
3 000 000 000
2 500 000 000
2 000 000 000
1 500 000 000
1 000 000 000
500 000 000
0
1 95 0
195 4
19 60
19 66
1 972
1 97 8
1 98 3
1 98 4
377
Au regard de cette approche statistique générale de l’évolution d’avant dématérialisation, il
nous possible d’affirmer que Sicovam a réussi son pari de la dématérialisation, elle était
devenue, avant la réforme des procédures de règlement- livraison de titres, une véritable
centrale de virements.
3.1.2 Une approche générale des activités d’Euroclear France et d’Euronext
Paris
Le nombre de négociations en bourse de Paris n’est connu qu’à partir de 1996. Il ne nous a
donc pas été possible d’étudier plus tôt une corrélation entre le nombre de mouvements
enregistrés en Euroclear France (graphique 8) et le nombre de négociations traitées sur
Euronext Paris (graphique 9) sur le long terme.
Pourtant, sur la période étudiée 1996 – 2003, cette corrélation est forte ; son coefficient
s’élève à 0.93774.
Graphique 8 : Nombre de virements ou livraisons contre paiement
35 000 000
30 000 000
25 000 000
20 000 000
15 000 000
10 000 000
5 000 000
0
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
378
Graphique 9 : Nombre de négociations enregistrées en Bourse de Paris
120 000 000
100 000 000
80 000 000
60 000 000
40 000 000
20 000 000
0
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
En matière de capitalisation boursière, la corrélation pour les actions (graphique 10) est
parfaite (0.998) ; le phénomène est normal car Euroclear France admet l’ensemble des actions
cotées en Bourse de Paris, et ce depuis son origine. Pour les titres de taux (graphique 11), la
corrélation est plus faible depuis 1995, date d’admission des titres de créances négociables en
Euroclear France. Sur l’ensemble des années étudiées, le taux de corrélation ressort à 0.9014,
taux cependant élevé.
Graphique 10 : Corrélation des capitalisations boursières des actions
Euronext Paris / Euroclear France (milliards €)
1800
1600
1400
1200
1000
800
600
400
200
0
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Capitalisation boursière Actions Euronext Paris
Capitalisation boursière Actions Euroclear France
2003
379
Graphique 11 : Capitalisation boursière des obligations (milliards €)
1000
900
800
700
600
500
400
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
C a p ita lis a tio n b o u r s iè r e O b lig a tio n E u r o n e x t P a r is
C a p ita lis a tio n b o u s iè re E u r o c le a r F ra n c e
En conclusion, pour les indicateurs comparables, les activités d’Euroclear France sont
corrélées à celle d’Euronext Paris.
Et cette corrélation doit être plus forte encore depuis la dématérialisation des titres, et donc la
généralisation des comptes courants de titres. L’ensemble des valeurs cotées en Bourse de
Paris est admis en Euroclear France et toutes les négociations boursières sont traitées par le
dépositaire national. Mais l’absence de chiffres sur l’ensemble de la période étudiée ne nous
permet pas de confirmer complètement ladite corrélation.
Si cette corrélation était a priori évidente, il fallait cependant la démontrer a posteriori dès lors
que les indicateurs existent.
3.1.3 Vers une dématérialisation généralisée des valeurs américaines
380
En 2003, la SEC – Securities and Exchange Commission et la SIA – Securities Industry
Association ont réfléchi à l’opportunité d’une dématérialisation des titres aux Etats-Unis 686.
Nous reprenons présentement leur étude de coûts afin d’insister sur l’intérêt, comme l’avait
compris la place financière de Paris il y a vingt ans, de la disparition des titres papier.
Certaines valeurs mobilières sont dématérialisées aux Etats-Unis : les parts d’organismes de
placements collectifs depuis les années soixante-dix, les titres du Trésor 687 et les obligations
municipales depuis les années quatre-vingts, les options et les futures depuis les années
quatre-vingt-dix et enfin les obligations hypothécaires depuis 2000.
Mais la forme juridique des titres papier pour les émissions du secteur privé persiste. De facto,
les risques, les coûts et les retards de traitement s’avèrent substantiels 688.
Ces coûts de traitement ont été évalués et ressortent, sur une base annuelle, comme indiqué
dans le tableau 3.
Tableau 3 : Coûts de traitement des titres aux Etats-Unis
Coûts des Brokers / Dealers et des conservateurs
Coûts DTC
Coûts SIC (securities information center)
$ 48 548 000
86 290 000
5 400 000
686
Securities Industry Association, SIA STP physical securities subcommittee, Physical securities cost analysis,
March 2003
Securities Industry Association, Meeting with the SIA on the SIA’s letter to the SEC regarding the
immobilization and dematerialization of physical securities, 2003
687
In 1968, the Treasury first offered investors the option of holding their Treasury securities in book-entry
form. In lieu of paper certificates, investors could have their securities entered in accounts on the books of the
Reserve Banks. Originally offered in 1965 for securities that Federal Reserve member banks pledged as
collateral, the book-entry option attracted greater support when unprecedented dollar amounts of Treasury
securities were lost or stolen in 1969 and 1970. In 1971, insurance companies threatened to withdraw coverage
for institutions handling definitive Treasury securities. Legal and regulatory concerns were addressed, and the
book-entry system was expanded in 1973 to include Treasury securities owned by depository institutions’
customers, dealers, non-menber banks, and, to a limited extent, individual investors. By early 1974, more than
half of the marketable public debt was in book-entry form. By August 1986, all new Treasury securities were
issued in book-entry form.
Federal Reserve Bulletin, The Federal Reserve Banks as fiscal agents and depositories of the United States, April
2000
688
Three important considerations remain :
- Retail volume will most likely increase when the current economic cycle improves. However, it is likely that
the percentage of retail customers taking physical certificates on trades will continue to decline.
- The $ 325 million cost of handling physical certificates is still a significant cost borne by investors, and is
one that is totally avoidable and should not be tolerated.
- The inherent risks to the financial services industry of maintening physical certificates was highlighted on
September 11, 2001, and should be deemed unacceptable by industry participants, regulators, and investors.
381
Coûts de remplacement des titres perdus
Coûts des agents de transfert
Coûts totaux annuels
49 400 000
45 000 000
$ 234 638 000
A titre de comparaison, notons que ce chiffre équivaut à la conservation d’un établissement tel
que ING.
•
Les coûts des intermédiaires se décomposent comme présentés dans le tableau 4.
Tableau 4 : Coût des intermédiaires
Coût global de gestion des titres physiques
Nombre total de dépôts de titres physiques chez DTC
Coût par dépôt : $ 39 126 182 / 2 376 184
Nombre total de dépôts DTC (pour l’ensemble des
participants)
Coût extrapolé pour les brokers / dealers et les
conservateurs : $ 16.47 X 2 948 400
•
$ 39 126 182
2 376 184
$ 16.47 par dépôt
2 948 400
$ 48 548 274
Les coûts de DTC reprennent les coûts directs (main d’œuvre, gestion de la conservation
physique …) et les coûts indirects (coûts technologiques et informatiques) de chaque
service impliqué dans la gestion des titres physiques.
•
Les coûts de SIC représentent l’économie liée à la suppression de toute conservation
physique des titres.
•
Le coût d’indemnisation des agents de transfert (lors des remplacement, annulation ou
perte d’un titre papier) est de facto éliminé dans un régime de valeurs dématérialisées. Or
le nombre de titres perdus ou remplacés a été évalué à 190 000 titres pour 2002. Il en
ressort, pour une valeur moyenne de 13 000 $ et un coût de cautionnement de 2 %, une
évaluation annuelle à $ 49 400 000 689.
•
Le coût des agents de transfert est celui de la gestion des entrées et sorties des titres
papiers ; il est estimé entre 45 et 50 millions de dollars.
689
Entre 1996 et 2000, on estime à 1.7 millions de titres volés ou perdus ; en 2001, ce chiffre a dépassé 2.5
millions ! Or, tant que le titre dérobé n’est pas remplacé, l’investisseur doit avoir un titre de cautionnement dont
le coût est d’environ 2 % du cours du titre coté ; ce qui représente un montant annuel de plus de 49 millions de
dollars.
382
Au total, l’élimination du papier permettrait, à tous les acteurs de la filière titres, une
économie annuelle de plus de 200 millions de dollars.
Ipso facto, la dématérialisation est nécessaire aux Etats-Unis car, au-delà des économies
qu’elle induira, elle concourra également à accroître l’efficience des marchés américains, dans
un univers fortement impacté par les changements technologiques.
On a, en effet, longuement insisté sur les apports de l’informatique sur l’ensemble des
marchés financiers. Selon nous, un pays qui dispose de marchés financiers développés au plus
haut point et qui a initié, il y a trente ans, toutes les vagues de dérégulation et d’innovations
financières qu’ont connu les places depuis lors, se doit de généraliser l’inscription des valeurs
mobilières en compte courant. Des titres qui se perdent sur la place financière disposant des
plus grosses capitalisations boursières au monde est un fait irrecevable au vingt-et-unième
siècle !
383
3.2 L’inefficacité d’un marché boursier sans dépositaire central : le
cas de la bourse de Hong Kong 690
Dans les années quatre-vingts, le système utilisé par la bourse de Hong Kong reposait sur un
règlement physique des différentes transactions, sans automatisation et centralisation.
Chaque courtier devait déclarer toute transaction dans les 15 minutes suivant sa conclusion.
Toute anomalie devait être signalée à la bourse au plus tard avant la fin de la journée suivant
la transaction. Chaque opération devait être réglée au plus tard à 15h45 le lendemain de
l’opération au moyen de la remise d’un certificat et d’un formulaire timbré de transfert, contre
remise d’un chèque qui, bien souvent, ne pouvait être encaissé que quelques jours plus tard.
Conformément à la réglementation en vigueur, les émetteurs avaient un délai de 21 jours pour
enregistrer les transferts et émettre de nouveaux certificats d’actions. Les actions ne pouvaient
être vendues tant qu’elles n’étaient pas enregistrées, en raison de la règle qui exigeait un
règlement dans les 24 heures, de l’interdiction des ventes à découvert et de l’absence de
mécanisme organisé de prêt d’actions 691.
Le dépositaire national, The Hong Kong Securities Clearing Company - HKSCC (appelé
communément Hong Kong Clearing), est une société anonyme, créée en mai 1989.
Son capital est détenu à hauteur de 50 % par la Bourse de Hong Kong, le reste étant aux
mains des cinq plus grands établissements financiers, à savoir Hong Kong & Shanghai
Banking Corp., Standard Chartered Bank, Hang Seng Bank, Bank of East Asia et Bank of
China.
La HKSCC est l’intermédiaire entre les négociateurs, les banques conservatrices et les autres
institutions financières. Son rôle principal consiste à procéder au dénouement des transactions
boursières, par le biais d’un système de clearing appelé CCASS - Central Clearing and
Settlement System (ouvert en juin 1992).
690
Les premières négociations de valeurs mobilières remontent à 1866, le marché boursier ayant une existence
juridique depuis 1891, sous le nom de « The Association of Stock Brokers in Hong Kong ».
Ce marché est dénommé Bourse de Hong Kong depuis 1914, très précisément « The Hong Kong Stock Exchange
Ltd » depuis 1947.
Au fil des années, différentes bourses s’ouvriront (Far East Exchange, Kam Ngan Stock Exchange, Kowloon
Stock Exchange), elles unifieront leurs séances boursières en 1973, et en 1974 la « Hong Kong Federation of
Stock Exchange » sera créée.
La Bourse de Hong Kong devient une société anonyme en 1980, et les différentes bourses sont désormais toutes
unifiées par une ordonnance du Conseil Législatif.
691
OCDE, Marchés boursiers et risques dans les économies dynamiques d’Asie, 1992
384
Elle admet à ses opérations l’ensemble des valeurs cotées en Bourse de Hong Kong ; ses
participants sont les membres négociateurs de la bourse, les «custodians», les prêteurs et
emprunteurs de titres, les dépositaires ou organismes de clearing et les émetteurs.
La HKSCC assure le dénouement et compensation des valeurs, le règlement espèces, la tenue
de comptes titres avec fongibilité des titres, l’immatriculation au nom d’un « nominee 692 »,
l’enregistrement des actions, et les dépôts et retraits de titres.
Ses procédures de règlement – livraison sont présentées dans le schéma 1.
692
Le nominee, prête – nom, est un mandataire, sans qualité de propriétaire. Il intervient pour le compte du
propriétaire.
Sefkali Z., Valuet J.P., La société émettrice et l’intermédiaire financier français face au trustee et au nominee,
Revue de Droit Bancaire et de la Bourse n°38, juillet – août 1993
385
Schéma 1 : Procédures de dénouement dans le système CCASS
Remarques
Activités
Broker acheteur
Broker vendeur
SEHK
(1) Les ordres sont exécutés et confirmés en
bourse.
(1)
(1)
Condition de la transaction
(2)
(2)
(2) La majorité des négociations boursières
sont compensées et dénouées via le
continuous net settlement avec Hongkong
clearing intervenant comme contrepartie
centrale.
(3)
(3)
(3) Les brokers peuvent dénouer entre eux,
sur une base brute, via CCASS.
Broker vendeur
CCASS
(4)
Broker acheteur
(4)
(4) Le vendeur requiert à son conservateur la
livraison des titres et l’encaissement du
paiement du broker vendeur, et
inversement pour l’acheteur. Après
confirmation, les conservateurs dénouent
les instructions via CCASS.
conservateur
(5)
Client vendeur
-
(4)
(4)
(5)
Client acheteur
(5) Un vendeur sans conservateur transmet
directement les titres au broker acheteur.
Le broker remet les titres à CCASS pour
dénouement.
Un
acheteur
sans
conservateur règle le montant de son
achat directement au broker vendeur. Le
broker transmet les titres à l’acheteur ou
les inscrit auprès de CCASS au nom de
cet acheteur.
386
-
Le dénouement intervient au plus tard 2 jours après la négociation boursière.
-
Le système CCASS est un système de compensation informatisé, reposant sur un
enregistrement comptable des titres.
-
Les négociations, une fois enregistrées par le système électronique de la Bourse, sont
transmises en temps réel au système de dénouement CCASS.
-
Les participants au système reçoivent, chaque jour, leurs positions prévisionnelles en titres
et espèces.
-
Les règlements espèces s’opèrent par débit et crédit du compte de la banque mandatée par
le négociateur, sur instruction du dépositaire central Hong Kong Clearing.
Enfin, remarquons que la Bourse de Hong Kong propose un service de prêt-emprunt de titres,
mis en place en 1994.
Le système de règlement en continu est entré en vigueur le 7 novembre 1992. Il fonctionne de
la manière suivante comme présenté dans le schéma 2.
387
Schéma 2 : Procédures de dénouement en continu
Jour J
Système de négociation
SEHK
Modalités des négociations
CCASS
Système de négociations
isolées
Système CNS
J+2
Règlement – livraison
Titres à recevoir
Livraison de titres
Les titres de taux sont garantis par
une banque ou un pré – règlement
Règlement espèces
J + 3 am
Confirmation du règlement
Oui
Réception des titres
Oui
Réception des
titres
Non
Suspens
Provision titres
Source : Settlement of CNS trades, Hong Kong Exchange and clearing limited, 2000
388
Depuis dix ans, le nombre de sociétés (graphique 12) s’accroît régulièrement en Bourse de
Hong Kong.
Graphique 12 : Nombre de sociétés cotées à la bourse de Hong Kong
1000
800
600
400
200
477
529
542
583
658
680
701
736
756
812
0
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
La capitalisation boursière (graphique 13) est globalement conforme à l’évolution des
marchés financiers sur le plan international, avec une baisse importante en 1998, directement
liée à la crise boursière des places de l’Asie du Sud-Est. Et les volumes de transactions
(graphique 14) connaissent quelques variations erratiques.
389
Graphique 13 : Capitalisation boursière de la place de Hong Kong
(milliards HK$)
6000
5000
4728
4795
4000
3885
3476
3000
2975
3559
3203
2662
2085
2000
2348
1000
0
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Graphique 14 : Volume annuel de transactions
(milliards HK$)
4000
3789
3500
3048
3000
2500
1950
1916
2000
1701
1599
1412
1500 1223 1137
827
1000
500
0
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
390
Dans le tableau 5, nous reportons les chiffres transmis par la bourse de Hong Kong pour les
activités 2001 et 2002.
Tableau 5 : Statistiques des années 2001 et 2002
2001
2002
Moyenne quotidienne des transactions boursières traitées par CCASS
Nombre de transactions
99 272
83 144
8,2 milliards 6,7 milliards
HK$
HK$
6,3 milliards 6,5 milliards
Quantité de titres
HK$
HK$
Moyenne quotidienne des instructions (SIs) dénouées par CCASS
Volume de transactions
Nombre de SIs
Volume SIs
Quantité de titres
21 259,00
15 889
23,2 milliards 18,6 milliards
HK$
HK$
8,5 milliards 7,4 milliards
Moyenne quotidienne des instructions de dénouement des investisseurs (ISIs)
Nombre de ISIs
Volume ISIs
Quantité de titres
Moyenne quotidienne des taux de dénouement par
302
360
341,3 millions 267,6 millions
HK$
HK$
8,5 milliards 7,4 milliards
99,59 %
99,65 %
99,96%
99,96%
897,3
milliards
55,84%
953,0
milliards
54,58%
CNS en J+2
Idem en J+3
Titres en dépôt CCASS
Nombre d’actions
% du total des émissions
Capitalisation des actions
% du total des capitalisations
1 220,3
1 116,7
milliards HK$ milliards HK$
28,61%
29,62%
La lecture de ce tableau 5 démontre que la mise en place d’un dépositaire central de titres et
d’un système de règlement-livraison de titres en bourse de Hong Kong répond à l’objectif
principal de minimisation des suspens. On relève en effet un taux de dénouement
systématiquement supérieur à 99,50 %.
391
Les statistiques de l’année 2003 (tableau 6) confortent la généralisation du système de
règlement-livraison de titres : 100 % des négociations boursières sont dénouées par ce
système.
Tableau 6 : Les statistiques de l’année 2003
Moyenne quotidienne des transactions boursières
gérées dans CCASS
Nombre de
Valeur
% des
transactions négociations (en milliards
CCASS
boursières
HK$)
Nombre
de titres
(milliards)
janv-03
72 719
100,00
5,94
5,81
févr-03
68 698
99,99
5,74
5,83
mars-03
74 080
99,99
6,47
6,21
avr-03
74 440
100,00
7,27
6,25
mai-03
95 646
99,99
8,13
8,24
juin-03
105 303
100,00
8,81
9,50
juil-03
117 818
100,00
9,86
10,65
août-03
148 763
100,00
12,20
13,02
sept-03
157 651
100,00
13,98
14,09
oct-03
173 508
nd
17,10
13,68
nov-03
133 916
100,00
12,78
11,79
déc-03
161 196
100,00
15,77
10,78
124,05
115,85
total année
1 383 738
Plus encore, la bourse de Hong Kong a rapidement adopté la technique du netting (graphique
15 & tableau 7) qu’elle étend au fil des mois, le taux de netting étant passé de 84,79 % à 88,50
% entre janvier et décembre 2003.
392
Graphique 15: Taux de netting
8 9 ,0 0 %
8 8 ,0 0 %
8 7 ,0 0 %
8 6 ,0 0 %
8 5 ,0 0 %
8 4 ,0 0 %
8 3 ,0 0 %
3
dé
v0
no
c0
3
3
t-0
oc
-0
3
pt
se
ao
ût
-0
3
3
il0
ju
n03
3
ai
-0
ju
i
3
m
av
r-0
s0
3
3
m
ar
vr
-0
fé
ja
nv
-0
3
8 2 ,0 0 %
Tableau 7 : Moyenne quotidienne du taux de netting dans CNS (en titres)
janv-03
Nombre de
positions titres
CNS
21 413
févr-03
20 694
84,55%
mars-03
20 155
85,95%
avr-03
19 163
86,69%
mai-03
25 676
86,20%
juin-03
28 697
85,93%
juil-03
31 041
86,46%
août-03
36 238
87,43%
sept-03
38 293
87,39%
oct-03
40 139
88,14%
nov-03
33 395
87,02%
déc-03
35 283
88,50%
Taux de netting
84,79%
393
Par ailleurs, nous relèverons un indicateur supplémentaire : Dans le système CNS, le taux de
dénouement atteint, en 2003, 99,69 % en J, et 99,97 en J+2. Ces chiffres confirment ceux
mentionnés dans le tableau 4 et démontrent que le taux de suspens diminue encore en Bourse
de Hong Kong.
Au final, on constate une croissance régulière de l’activité de la Bourse de Hong Kong,
valable pour tous les indicateurs.
En matière de règlement-livraison de titres, tous systèmes confondus, force est de constater
que les suspens sont peu importants. En effet, le dénouement des transactions en J+2 atteint le
pourcentage (très correct) de 99.65 %, alors qu’en J+3, celui-ci avoisine les 100 % (99.96%).
Et le taux moyen de netting, en 2003, est de 86.56%.
Enfin, il nous semble important de considérer les tarifs de règlement et de livraison (Tableau
8) pratiqués par le dépositaire central.
394
Tableau 8 : Tarifs
Type de commissions
Type de transactions
Commissions
Commission de
Transaction boursière
Néant
Transaction SI
clearing
Input / rectification /
$1 par input
révocation SI
Commission de
input/rectification ISI
$1 par input
Input TI
$1 par input
Transaction boursière
dénouement
Transaction SI
Transaction Broker-dealer
0.002% valeur brute de la
Exercice d’options (entre un
transaction, minimum 1$ /
agent de clearing et un broker)
maximum $50 par transaction
Transaction croisée (lorsque les
0.001% valeur brute de la
deux contreparties sont clientes
transaction, minimum 1$ /
du même broker)
maximum $50 par transaction
Entre un Broker-conservateur
0.002% valeur brute de la
et un compensateur
transaction, minimum 2$ /
maximum $100 par transaction
0.002% valeur brute de la
Autres transactions SI (ex:
prêt-emprunt de titres )
transaction (assise sur la valeur
nominale de la veille),
minimum 2$ / maximum $100
par transaction
Transaction ISI
Entre in investisseur –broker et
Néant
un compensateur
Commission de
Mouvement de compte à compte pour un même
mouvement
participant (effectué par ATI)
Mouvement sur instruments spécifiques entre
Néant
0.002% valeur brute de la
transaction, minimum 2$ /
un participant et un dealer du Central
maximum $100 par transaction
Moneymarkets Unit
Mouvement transfrontalier de dépôt / retrait en
valeurs étrangères
Notes : SI Settlement
ATI Account Transfer
$200 par dépôt ou retrait plus
frais Hongkong Clearing
ISI Investor Settlement
La place financière de Hong Kong propose donc à ses intermédiaires financiers des
procédures post-bourse relativement efficientes, démontrant qu’un dépositaire central et une
dématérialisation des titres sont des pré – requis indispensables à la mise en place d’un
système de règlement-livraison de titres opérationnel.
395
3.3 Un netting multilatéral optimise l’activité de règlement-livraison
Ne pouvant disposer de chiffres émanant de Clearnet, nous reprenons certains éléments de la
Banque des Règlements Internationaux 693.
3.3.1 Le cas de la France
Les chiffres données par les études citées sont les suivants (tableaux 9 et 10).
Tableau 9 : Volume de transactions traitées (en millions de transactions)
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Plate-forme de trading
Euronext Paris
26
37
45
59
98
88
94
Chambre de compensation
Clearnet SA*
26
37
45
55
89
81
91
15
18
22
28
41
31
29
Système de règlement-livraison
Euroclear France
* lancement de la contrepartie centrale sur le marché OTC (dettes en euro) fin 1998
Les chiffres repris par l’étude sont, tout simplement, le nombre de transactions boursières en
Bourse de Paris et le nombre total de mouvements traités en Euroclear France.
693
Bank for International Settlements, Statistics on payment systems in the Group of Ten Countries, February
2000
Bank for International Settlements, Statistics on payment and settlement systems in the selected countries,
Figures for 2002, March 2004
396
Tableau 10 : Valeurs des transactions (en milliards €)
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Plate-forme de trading
Euronext Paris
221
370
513
723
1 165
1 193
1 160
Chambre de compensation
Clearnet SA*
221
370
513
1 049
1 205
1 299
1 176
Système de règlementlivraison
Euroclear France
19 521 22 843 32 250 32 250 36 835 43 635 52 996
* lancement de la contrepartie centrale sur le marché OTC (dettes en euro) fin 1998
A partir de 1999, le nombre d’instructions traitées par Clearnet (tableau 9) est inférieur au
nombre de négociations enregistrées en Bourse de Paris ; ceci s’explique par la perte du
monopole de négociation des sociétés de bourse, conformément aux attentes de la
Communauté Européenne ; or les activités de Clearnet ne s’étendent pas aux établissements
de crédits qui sont pourtant habilités désormais à passer des ordres en bourse.
Par contre, en capitaux (tableau 10), le phénomène est inverse ; il s’explique par l’ouverture
des prestations de Clearnet aux activités OTC.
De ces chiffres, il nous est possible d’en tirer le rapport entre le nombre de mouvements
enregistrés en Euroclear France et le nombre de négociations boursières (tableau 11).
Tableau 11 : Rapport mouvements
Euroclear / négociations Euronext
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
57.69 %
48.15 %
44.88 %
47.46 %
41.84 %
35.22 %
30.85 %
Au fur et à mesure que le netting s’étend, le nombre de mouvements dénoués diminue.
397
Le netting accroît donc l’efficience d’un système de règlement-livraison de titres, confirmant
de facto notre hypothèse H1.2 qui requiert un netting multilatéral pour réduire le nombre de
mouvements à dénouer.
Cependant, ces chiffres pourraient être encore minimisés si le netting s’étendait à l’ensemble
des membres d’Euronext Paris et à tous les mouvements. En effet, en 2002, Clearnet compte
102 participants, contre 325 participants directs pour Euroclear France et 391 membres pour
Euronext.
Très précisément, entre 2000 et 2001, le nombre de participants Clearnet est passé de 59 à 93,
tandis que le rapport Mouvements Euroclear / Négociations boursières est passé de 41.84 à
35.22 % ; entre 2001 et 2002, le nombre de participants Clearnet est passé de 93 à 102, et le
même rapport est passé de 35.22 à 30.85 %.
Il y a fort à penser que si Clearnet admettait au moins l’ensemble des participants Euroclear,
ledit rapport diminuerait davantage encore.
Par ailleurs, comme stipulé dans le chapitre IV, le netting permet une diminution des prises de
garantie.
Les chiffres dont nous disposons permettent de rapporter les francos de collatéralisation au
nombre total de mouvements Euroclear France, à partir de 1998. Il en ressort les évolutions
présentées dans les graphiques 16 et 17.
Graphique 16 : Nombre de francos de collatéralisation rapporté au total des mouvements
dénoués en Euroclear France
9,00%
8,00%
7,00%
6,00%
5,00%
4,00%
3,00%
2,00%
1,00%
0,00%
1998
1999
2000
2001
2002
2003
398
Graphique 17 : Rapport identique en capitaux
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Nul doute que le besoin de collatéralisation diminue en bourse de Paris, tant en nombre de
mouvements (graphique 16) qu’en capitaux (graphique 17). Cette diminution aurait pu être
attribuée à la diminution de l’activité des marchés de capitaux, aussi nous est-t-il apparu
opportun de rapporter le nombre de franco de capitalisation à l’activité globale de dénouement
d’Euroclear France.
3.3.2 Une comparaison internationale des ratios de netting
Pour autant qu’il nous soit possible de le faire, nous reprenons les ratios de netting présentés
dans les statistiques de la Banque des Règlements Internationaux.
Ce ratio (Tableau 12) est déterminé par le total des transactions compensées rapporté au total
des transactions avant netting.
399
Tableau 12 : Ratio de netting (%)
1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002
France : Clearnet SA
- Ratio de netting en espèces sur
l’année
Ratio de netting en titres sur
67.0
l’année
99.2
Pays-Bas : Clearnet Amsterdam
- Ratio de netting en espèces sur
l’année
nd
Ratio de netting en titres sur
l’année
Suède : VPC AB
- Ratio de netting en espèces sur
l’année
3
- Ratio de netting en titres sur
l’année
7
Royaume-Uni : London Clearing
House
- Ratio de netting en espèces sur
l’année
nd
- Ratio de netting en titres sur
l’année
nd
71.0
74.0
77.0
65.0
65.4
65.6
99.5
99.6
99.7
95.0
96.7
97.0
nd
nd
10
11
10
11
nd
nd
nd
nd
2
2
3
3
3
3.2
6
5
5
4
3
3.2
nd
nd
nd
65
64
65
nd
nd
nd
50
50
98*
* Non comparable avec les années précédentes de par l’introduction du
netting sur les transactions du London Stock Exchange en juillet 2002.
Ce tableau ne reprend que les ratios communiqués par l’étude. Il démontre là l’une de nos
difficultés rencontrées : l’absence de chiffres sur certaines activités des places financières. Sur
13 places étudiées, 4 seulement sont en mesure de communiquer des statistiques sur leur
activité de netting.
Afin de mesurer l’impact du netting sur les places pour lesquelles nous disposons de
statistiques, nous reprenons le même rapport Nombre de mouvements enregistrés par le(s)
dépositaire(s) central(aux) sur le nombre de transactions boursières.
Une comparaison avec les places d’Amsterdam et de Stockholm est impossible car les
statistiques prennent en compte, globalement et sans les différencier, les activités des marchés
400
boursier et dérivé. En conséquence, seule une comparaison entre les bourses de Paris et de
Londres sont plausibles.
Pour autant, nous ne prenons que le volume de transactions relevé sur le London Stock
Exchange et Tradepoint – Virt-x et le volume d’instructions du système Crest. L’année 1996
ne peut pas être prise en référence car le système Crest n’a démarré ses activités que le 15
juillet 1996. Et, en 1997, le volume d’instructions agrège les chiffres de Crest et Talisman 694.
Il en ressort les rapports exposés dans le tableau 13.
Tableau 13 : Rapport nombre d’instructions Crest / nombre
de transactions boursières
1997
154.23 %
1998
152.80 %
1999
150.82 %
2000
144.89 %
2001
131.57 %
2002
122.10 %
In fine, le nombre d’instructions gérées par Crest est supérieur au nombre de transactions
boursières ; il ne s’agit pas d’une anomalie, mais il aurait fallu disposer des chiffres relatifs au
dénouement des transactions boursières exclusivement pour affiner le ratio calculé
présentement. Ceci étant, le ratio diminue régulièrement depuis la mise en place de Crest, ce
qui nous conduit à confirmer que le netting permet de diminuer le nombre d’instructions à
dénouer dans les systèmes de règlement-livraison de titres.
Le 1er juillet 2002, la Bourse de Londres a adopté le principe de la contrepartie centrale,
offerte depuis lors par la London Clearing House – LCH 695, et le netting a permis de réduire
considérablement le risque de règlement 696.
Enfin, notons quelques éléments transmis par le Groupe Euroclear (Tableau 14) pour
argumenter notre hypothèse de réduction du nombre de transactions à dénouer lorsqu’il y a
compensation.
694
Talisman est l’ancien système de dénouement utilisé en bourse de Londres, progressivement abandonné, lors
des mois qui ont suivi la montée en charge du système Crest.
695
Devenu Lch.Clearnet depuis le rachat du Loch par Clearnet en 2003.
696
In October 2002, LCH reported that the number of cleared trades on the London Stock Exchange that still
required settlement had fallen by around 97%.
401
Tableau 14 : Impact du netting chez Euroclear Bank
1996
1997
1998
1999
2000
A. Nombre de transactions
avant netting
40
54
63
84
134
B. Nombre de transactions
après netting
15
18
22
28
41
37.5 %
33.33 %
34.92 %
33.33 %
30.60 %
Ratio de netting
(B/A)
Si l’impact du netting sur le nombre d’opérations à traiter dans le système Euroclear Bank est
indéniable, le dépositaire international n’a pas, à ce jour, publié d’autres informations en la
matière.
3.4 Une contrepartie centrale est indispensable pour réduire le nombre
de mouvements à dénouer
3.4.1 L’absence d’une contrepartie centrale conduit à élaborer un système de
protection spécifique
Une compensation multilatérale, en l’absence d’une contrepartie centrale, amène le
gestionnaire du système à n’offrir à ses participants qu’une fonction basique de calcul sans
garantie de bonne fin.
En bourse de Paris, la fonctionnalité de contrepartie centrale est, certes, assurée par Clearnet
pour les transactions sur les marchés réglementés et OTC mais le solde des espèces des
participants d’Euroclear reste global.
Aussi, en cas de défaillance, le système Relit est-il incapable d’isoler la part des instructions
bénéficiant de la garantie de bonne fin des autres opérations.
Bank of England, Strengthening financial infrastructure, Financial Stability Review, December 2002
402
En outre, l’irrévocabilité est différée : il existe un décalage temporel entre le traitement des
ordres de paiement unitaires et le calcul des soldes espèces nets d’une part, et le règlement 697
desdits soldes par la Banque de France d’autre part.
Enfin, le traitement des instructions ne s’effectue pas en temps réel (la journée comptable en
Banque de France démarre à 20 heures pour un règlement le lendemain à 11 heures, à laquelle
deux vacations de règlement – déversements – sont rajoutées pour permettre le recyclage des
suspens et le dénouement des opérations « valeurs jours » 698).
Face à ces contraintes de traitement, les risques sont connus, ils ont été évoqués dès la fin des
années quatre-vingts dans les rapports Angell et Lamfalussy 699.
Si un risque de défaillance dans Relit s’avérait, deux solutions s’envisageraient :
-
La révocation des échanges du défaillant,
-
Le report des règlements à une date ultérieure.
La révocation des échanges (ou rétrogradation, réfection ou « détricotage ») repose sur un
nouveau calcul de la compensation après exclusion des opérations du défaillant.
Mais cette solution s’avère difficile à gérer sur le plan technique et est source de risque de
liquidité. Sur le plan technique, une révocation, de facto non automatisée, n’est guère
compatible, en termes de délais, avec les impératifs chronologiques de traitement des
opérations dans TBF 700. Sur le plan de la liquidité, la révocation des opérations du défaillant
peut engendrer des positions délicates pour ses contreparties et générer des soldes débiteurs
chez ces dernières (a fortiori si le défaillant est un intervenant important
701
), et donc des
difficultés en matière de liquidités.
Le report du règlement à une date ultérieure.
Force est de constater que cette solution, dans le cadre d’une défaillance définitive, déplace le
problème sans le résoudre. Si tel est le cas, la révocation s’avère la seule possible. Mais elle
697
Seul ce dernier confère d’ailleurs le caractère définitif des instructions, appelé « finality » dans la
terminologie anglo-saxonne.
698
Celles-ci représentent 10 % du total des opérations traitées.
699
Bank for International Settlements, February 1989, Report on netting schemes, Angell Report
Bank for International Settlements, 1990, Minimum standards for cross-border and multicurrency netting and
settlement schemes, Lamfalussy Report
700
TBF – Transfert Banque de France, système de paiement à règlement brut de gros montant français.
701
Pour éviter une succession de problème de liquidité chez ses participants, Euroclear, en septembre 2003, a
proposé à ceux-ci de fixer un solde débiteur maximal qu’ils s’engageraient à honorer lors d’un nouveau calcul de
la compensation. Au-delà de cette limite, les opérations seraient mises en suspens et reportées à la journée
comptable suivante.
403
n’est pas conforme aux normes minimales internationales qui requièrent, pour les systèmes
d’importance systémique, un règlement au moins en fin de journée, à bonne date de valeur.
Le rapport Lamfalussy
702
(mais également les rapports de la BRI sur les principes
fondamentaux pour les systèmes de paiement d’importance systémique et du CPSS-IOSCO
703
) requiert, en effet, que les systèmes de compensation multilatérale puissent permettre, pour
le moins, d’assurer l’exécution en temps voulu des règlements journaliers dans le cas où un
participant présentant la position débitrice nette la plus élevée serait dans l’incapacité de
s’exécuter.
Globalement, toutes les instances de tutelles internationales s’accordent sur l’objectif de
sécurisation des systèmes, et exigent, pour ce faire, un règlement en temps requis, en cours de
journée ou, au moins, en fin de journée, de tous les soldes issus d’une compensation
multilatérale.
Aussi ces systèmes de compensation doivent-ils se doter d’un système d’autoprotection, afin
de couvrir la défaillance du participant présentant la plus forte obligation débitrice nette.
A cette fin, un système se doit, au minimum, de :
-
constituer des garanties, au travers d’actifs liquides,
-
assurer un partage des risques si le système est mutualisé prévoyant ex ante les modalités
et la séquence d’utilisation des garanties, et les règles d’allocation des pertes dans
l’hypothèse de l’incapacité du défaillant à rembourser la part utilisée du fonds de garantie,
-
déterminer des limites au traitement de chaque participant.
Consciente des risques inhérents à la compensation multilatérale sans contrepartie centrale, la
Place de Paris, a décidé, en 2003, d’auto – protéger ses systèmes nets.
Le nouveau dispositif de sécurisation repose sur la protection contre la défaillance du
participant présentant le solde débiteur le plus élevé, la constitution d’un fonds commun
702
Bank for International Settlements, 1990, Minimum standards for cross-border and multicurrency netting and
settlement schemes, Lamfalussy Report
Multilateral netting systems should, at a minimum, be capable of ensuring the timely completion of daily
settlements in the event of an inability to settle by the participant with the largest single net debit position.
703
- Bank for International Settlements, December 1999, Core principles for systematically important payment
systems : Un système comportant une compensation multilatérale devrait permettre, pour le moins, l’exécution
en temps requis des règlements journaliers dans le cas où le participant présentant l’obligation de règlement la
plus élevée serait dans l’incapacité de s’exécuter.
- Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for Securities Settlement Systems,
January 2001 : Deferred net settlement systems should institute risk controls that, at a minimum, ensure timely
settlement in the event that the participant with the largest payment obligation is unable to settle. In any system
in which a CSD extends credit or arranges securities loans to facilitate settlement, best practice is for the
resulting credit exposures to be fully collateralised.
404
permanent 704 complété par des garanties individuelles et la mise en place de limites pour les
échanges.
Les nouvelles règles sont précisées dans le schéma 3.
704
L’encours du fonds est fixé à 426 millions €, couvrant 95 % des besoins du système.
Le fonds mutuel est alimenté en espèces par les 57 établissements actifs dans le règlement de titres sur Euronext
et sera utilisé au moindre défaut de paiement d’un intermédiaire. Si ledit défaut est ponctuel, lié à un retard de
trésorerie d’un intervenant, à charge pour ce dernier d’immédiatement rembourser le fonds ; s’il s’agit d’une
faillite majeure, tous les autres membres seront mis à contribution pour le reconstituer, ce qui permettra d’éviter
une crise systémique. Source : Goy G., Création d’un fonds mutuel en espèces pour sécuriser le règlementlivraison sur Euronext, Les Echos 16 octobre 2003.
405
Schéma 3 : Modalité de fonctionnement pour Relit
Source : Hervo F., Sampic C., La protection des systèmes nets de paiement et de titres à
règlement différé : les exemples du SIT et de Relit, Revue de la Stabilité Financière – Banque de
France, Novembre 2003
Fonds commun
400
Contribution
Gestionnaire du GC
A (PR 1)
400
PR 1
200
PR 2
120
Contribution
Gestionnaire du GC
(PR 4)
400
PR 3
80
PR 4
400
Participation à
Relit
PR 1
180
PDSE 1
20
PDSE 2
80
PR 3
80
PDSE 3
40
Contrôle de cohérence :
180 + 20 + 80 + 40 + 80 = 400
< 400
PR 4
380
PDSE 4
5
PDSE 5
5
Contrôle de cohérence :
380 + 5 + 5 = 390 < 400
GC : Groupe de comptes
PR : Participant de règlement (agent de règlement dans TBF pour compte propre ou compte de tiers)
PDSE : Participant direct au système exogène (participant Relit compensateur espèces, titulaire d’une
Pona en propre, mais dépourvu de compte dans TBF et utilisant les services d’un PR pour le règlement de
ses soldes).
La position débitrice dans Relit d’un participant ne peut dépasser sa Pona globale, calculée comme la
somme de sa limite d’achats nette fondée sur le fonds mutuel et de son éventuelle garantie individuelle.
Euroclear introduit un système de limites afin de mettre en suspens le dénouement des opérations qui
pourraient conduire à dépasser ces Pona globales. Les garanties individuelles sont constituées par les
gestionnaires de GC en fonction des besoins des participants Relit qui leur sont rattachés. Ainsi, une
garantie individuelle de 100 constituée par le gestionnaire de GC A au bénéfice du PDSE 2 permet de
porter la Pona globale de ce dernier de 80 à 180.
La sécurisation du système Relit repose sur un fonds commun obligatoire, complété de garanties
individuelles constituées sur base volontaire. La structure de TBF permet à plusieurs participants d’un
même groupe bancaire de partager un « groupe de comptes » (GC), au niveau duquel s’apprécie la
liquidité disponible pour le règlement de toute opération. En conséquence, il revient à chacun des
gestionnaires de groupe de comptes dans TBF de définir les positions nettes acheteuses (PONA) dans
Relit des participants qui lui sont rattachés, c’est-à-dire les limites obligatoires aux soldes espèces
débiteurs qu’ils sont susceptibles de générer de par leur activité Relit. La somme des Pona du
gestionnaire du groupe de comptes et de celles des participants qui lui sont rattachés ne peuvent
dépasser le montant du fonds commun.
406
3.4.2 Clearnet a permis de diminuer le nombre de transactions à compenser
A défaut de chiffres, nous reprenons l’évolution du rapport entre le nombre de mouvements
enregistrés en Euroclear France et le nombre de négociations boursières (graphique 18).
Graphique 18 : Nombre de mouvements sur nombre de négociations boursières
y = -3 ,9 0 7 9 x + 5 9 ,3 5 9
R 2 = 0 ,9 0 6 8
60
55
50
%
45
40
35
30
25
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Le graphique 18 démontre l’efficacité d’une contrepartie centrale quant à la réduction du
nombre de mouvements à dénouer chez un dépositaire. La courbe de tendance linéaire affiche,
en effet, une pente largement négative.
Nos hypothèses H1.2 et H1.3, selon lesquelles un netting multilatéral reposant de facto sur
une contrepartie centrale, sont confirmées par ces chiffres.
407
4. La technique de la livraison contre paiement minimise les
suspens
4.1 Etude des comptes débiteurs avant Relit
Avant la mise en place de Relit nous ne disposons de statistiques sur les comptes débiteurs
que de janvier 1987 à mars 1989.
Graphique 19 : Défauts de provision en pourcentage du nombre de virements
0,650%
0,600%
0,550%
0,500%
0,450%
ja
nv
m -87
ar
sm 87
ai
-8
ju 7
ilse 87
pt
no 87
vja 87
nv
m -88
ar
sm 88
ai
-8
ju 8
ilse 88
pt
no 88
vja 88
nv
m -89
ar
s89
0,400%
Le graphique 19 montre l’évolution du nombre de défauts de provision rapporté au nombre
total de virements.
Si ce rapport était relativement faible, quelques remarques s’imposent :
-
En premier lieu, les chiffres donnés par le graphique 19 ne sont pas directement
comparables au taux de suspens actuel ; ils sont exprimés en nombre de mouvements,
tandis que le taux de suspens actuel est donné en capitaux.
408
-
En second lieu, le traitement des comptes débiteurs, avant la mise en place de Relit,
s’opérait a posteriori : le lendemain de la comptabilisation des mouvements, Sicovam
annulaient les mouvements ayant rendu les comptes débiteurs (en contre-passant les
écritures concernées), générant parfois des soldes débiteurs en chaîne.
4.2 Etude du taux de suspens depuis 1995
Historiquement, depuis la mise en place de Relit, le taux de suspens s’élève à moins de 1 %,
et parmi ceux-ci, plus de 90 % sont dénouées le lendemain 705.
Globalement, sur nos huit années de référence, le taux moyen de suspens ressort à 0,1675 % ;
il est donc très faible et illustre déjà l’efficience des systèmes de règlement-livraison de titres
de la Bourse de Paris.
Nul doute que notre hypothèse relative à la livraison contre paiement assortie d’un délai de
place est une condition nécessaire, mais non suffisante certes, à l’efficience technique d’un
système de règlement-livraison.
En données brutes (tableau 15) , telles que fournies par Euroclear France, les taux sont les
suivants.
Tableau 15 : Taux moyen de suspens dans le mois en capitaux
Moyenne
année Jan. Fév. Mars Avril Mai Juin Juil. Août Sept. Oct. Nov. Déc.
705
1995 0,25 0,19 0,10 0,10 0,20 0,15 0,15 0,09 0,07 0,11 0,30 0,18
0,158
1996 0,17 0,18 0,22 0,22 0,29 0,31 0,25 0,22 0,21 0,11 0,15 0,58
0,243
1997 0,19 0,22 0,21 0,14 0,19 0,18 0,23 0,19 0,19 0,11 0,21 0,26
0,193
1998 0,16 0,20 0,13 0,20 0,15 0,56 0,20 0,02 0,03 0,02 0,03 0,12
0,152
1999 0,14 0,12 0,07 0,09 0,22 0,14 0,14 0,02 0,06 0,07 0,06 0,04
0,098
2000 0,06 0,08 0,08 0,10 0,25 0,30 0,22 0,12 0,12 0,20 0,10 0,27
0,158
2001 0,12 0,14 0,18 0,22 0,21 0,21 0,14 0,07 0,76 0,12 0,12 0,23
0,210
2002 0,08 0,13 0,12 0,09 0,13 0,14 0,07 0,10 0,06 0,16 0,13 0,31
0,127
2003 0,12 0,19 0,22 0,34 0,15 0,20 0,21 0,10 0,19 0,10 0,11 0,13
0,172
Desclerc A., DVP in France : a status report, DVP : Cross Border Securities Settlement, Conférence Insig,
5&6 October 1995
409
L’évolution chronologique du taux moyen de suspens est présentée dans le graphique 20.
Graphique 20 : Taux moyen de suspens en capitaux dans le mois
0,8
0,7
0,6
0,5
0,4
0,3
0,2
0,1
-9
5
A96
S96
F97
J97
D
-9
7
M
-9
8
O
-9
8
M
-9
9
A99
J00
J00
N
-0
0
A01
S01
F02
J02
D
-0
2
M
-0
3
O
-0
3
95
N
J-
J-
95
0
Et sa moyenne, année par année, est présentée dans le graphique 21.
Graphique 21 : Taux moyen de suspens en capitaux dans le mois
(en moyenne annuelle)
410
0,25
0,23
0,21
0,19
0,17
0,15
0,13
0,11
0,09
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Au regard de ces chiffres et graphiques, force est de constater que le taux de suspens est
faible. Et sa tendance à la baisse est relativement sensible.
Cependant, il existe quelques pointes historiques, et on constate une certaine saisonnalité.
Les pointes historiques (juin 1998, décembre 1996 et septembre 2001) s’expliquent par des
incidents informatiques ; nous y avons fait référence (pour la panne du système informatique
d’Euroclear de septembre 2001) dans nos développements précédents.
La saisonnalité, illustrée par le graphique 22 ci-dessous, s’explique par des phénomènes
économiques et fiscaux récurrents.
Graphique 22 : Moyennes mensuelles sur la période 1995 – 2003
411
0,25
0,20
0,15
0,10
dec
nov
oct
sept
aout
juillet
juin
mai
avril
mars
fev
0,00
janv
0,05
Les détachements de coupons et les assemblées générales provoquent une hausse des suspens
de dénouement. En effet, les détachements de coupons génèrent des mouvements
supplémentaires en Euroclear France
706
, et les assemblées générales peuvent éventuellement
induire des augmentations de capital sources d’instructions sur le marché primaire à dénouer
en Euroclear France.
En conséquence, nous avons décidé de désaisonnaliser l’indicateur. A cette fin, nous avons
rectifié les données, qualifiables d’anormales, des mois de décembre 1996, juin 1998 et
septembre 2001. Pour chaque mois concerné, nous avons pris la moyenne des mêmes mois
des autres années de références. Parce que la dispersion des points sur ces mois en question
est faible, comme le confirment les graphiques 23.
706
Il existe, en France, deux modes de paiement des coupons :
- Le paiement par compte coupons : les intermédiaires teneurs de compte titres au nom de leurs clients
opèrent à des mouvements sur des comptes coupons, créés pour ces opérations, à destination du
centralisateur (établissement bancaire choisi par l’émetteur), pour percevoir le montant espèces du
coupon et le reverser ensuite aux détenteurs finals. Il y a donc des mouvements supplémentaires, lors de
ces opérations, chez le dépositaire central.
- Le paiement direct des coupons : Euroclear France ouvre, le matin du détachement, un compte espèces
en Banque de France. Ledit est crédité des fonds totaux à verser au titre des coupons, et débité
successivement, en cours de journée, au profit des intermédiaires détenteurs des titres pour le compte de
leur clientèle.
412
Graphiques 23 : Etats de la dispersion des taux de suspens
Graphique 23.1 : Taux de suspens des mois de septembre
0 ,8 0
0 ,7 0
0 ,6 0
0 ,5 0
0 ,4 0
0 ,3 0
0 ,2 0
0 ,1 0
0 ,0 0
0
5
10
Graphique 23.2 : Taux de suspens des mois de juin
0 ,6 0
0 ,5 0
0 ,4 0
0 ,3 0
0 ,2 0
0 ,1 0
0 ,0 0
0
5
10
Graphique 23.3 : Taux de suspens des mois de décembre
0 ,7 0
0 ,6 0
0 ,5 0
0 ,4 0
0 ,3 0
0 ,2 0
0 ,1 0
0 ,0 0
0
5
10
413
Il ressort de cette désaisonnalisation 707 les courbes des graphiques 24 et 25.
Graphique 24 : Coefficients corrigés des variations saisonnières
y = -0,0004x + 0,1771
2
R = 0,0307
0,4
0,35
0,3
0,25
0,2
0,15
0,1
0,05
31
.0
30 1.9
.0 5
30 6.9
. 5
30 11.9
.0 5
30 4.9
.0 6
28 9.9
.0 6
31 2.9
.0 7
31 7.9
. 7
31 12.9
.0 7
31 5.9
.1 8
31 0.9
.0 8
31 3.9
.0 9
31 8.9
. 9
30 01.0
.0 0
30 6.0
.1 0
30 1.0
. 0
30 04.0
.0 1
28 9.0
. 1
31 02.0
.0 2
31 7.0
.1 2
31 2.0
. 2
31 05.0
.1 3
0.
03
0
Coefficients corrigés des variations saisonnières
taux bruts de suspens corrigés de 3 anomalies
courbe de tendance linéaire
707
Le modèle de calcul des données corrigées des variations saisonnières retenu est multiplicatif.
414
Graphique 25 : Estimation de la composante Tendance – Cycle lissée
y = -0,0004x + 0,1787
R2 = 0,0642
0,4
0,35
0,3
0,25
0,2
0,15
0,1
0,05
ComposanteTendance - Cycle lissée
taux de suspens bruts après correction de 3 anomalies
courbe de tendance linéaire
On constate des courbes de tendance dont la pente est très faible, mais négative tout de même.
Il y a donc une tendance à la baisse du taux de suspens en Bourse de Paris.
La première courbe (graphique 24), Coefficients corrigés des variations saisonnières, permet
d’obtenir les coefficients saisonniers en divisant les valeurs initiales par les valeurs lissées.
La seconde courbe (graphique 25), Estimation de la composante Tendance – Cycle lissée, est
une estimation de la composante Tendance – Cycle lissée en appliquant une moyenne mobile,
d’ordre 3, centrée à la série désaisonnalisée Coefficients corrigés des variations saisonnières.
Cette courbe n’est pas habituellement présentée dans les études de désaisonnalisation
françaises, mais, selon nous, elle lisse davantage les variations saisonnières.
31.10.03
31.05.03
31.12.02
31.07.02
28.02.02
30.09.01
30.04.01
30.11.00
30.06.00
31.01.00
31.08.99
31.03.99
31.10.98
31.05.98
31.12.97
31.07.97
28.02.97
30.09.96
30.04.96
30.11.95
30.06.95
31.01.95
0
415
Les systèmes de règlement-livraison de titres français sont donc, de ce point de vue, et selon
nous, considérés comme efficients.
Enfin, le graphique 26 présente le pourcentage des capitaux en suspens le dernier jour du
mois, sur lequel on retrouve les pourcentages les plus élevés qui correspondent aux anomalies
suscitées liées aux incidents techniques.
Graphique 26 : Pourcentage des capitaux en suspens le dernier jour du mois
(moyenne annuelle)
0,55
0,50
0,45
0,40
0,35
0,30
0,25
0,20
0,15
0,10
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
En conclusion de cette étude relative au taux de suspens, il nous est possible d’affirmer, d’une
part, que ce taux est particulièrement bas, et que, d’autre part, les suspens ne sont plus,
mutatis mutandis, de la même ampleur que ceux relevés lors des deux années qui ont suivi la
dématérialisation des titres en France.
Enfin rappelons, même si les chiffres d’Euroclear ne permettent une évaluation quantifiée
précisément de cet indicateur, que les suspens sont pour l’essentiel levés le lendemain.
416
La mise en place de la technique de livraison contre paiement avec délai de place a donc, bel
et bien, permis de minimiser le taux de suspens.
Et cette affirmation est corroborée par certains intermédiaires financiers et autres dépositaires
centraux qui, lorsqu’ils se sont créés, ont développé immédiatement des systèmes de
règlement-livraison de titres assis sur ce principe de simultanéité des règlements espèces et
des livraisons de titres en J+3 au maximum.
Eléments transmis par les intermédiaires et dépositaires centraux étrangers:
•
Selon notre enquête terrain, le taux de suspens des intermédiaires ressortirait
approximativement entre 1 et 5 %, hormis l’un d’entre eux qui évalue ce même taux à
moins de 1 %. Enfin, ils sont unanimes à préciser que le taux de suspens a diminué
considérablement après la mise en place de Relit.
En matière de recyclage en cours de journée des mouvements non dénoués, il apparaît
indéniable qu’une telle prestation doit être offerte par un système de règlement-livraison de
titres qualifiable d’efficient. Un seul intermédiaire a été en mesure de quantifier le
pourcentage de mouvements non dénoués et recyclés ; ledit pourcentage s’élevait
respectivement à 0.5, 0.3 et 0.1 pour mille en 2000, 2001 et 2002.
•
Les dépositaires étrangers ayant répondu à nos questions en matière de suspens
confirment également une baisse régulière de leur taux de suspens.
Le dépositaire lituanien relève les chiffres présentés dans le tableau 16.
Tableau 16 : Taux et montants de suspens du dépositaire lituanien
Années
2000
2001
2002
Taux de suspens (nb de mouvements en
suspens / nb total de mouvements)
0.61 %
0.10 %
0.11 %
Taux de suspens
(en capitaux)
EUR 0.51 m
EUR 0.66 m
EUR 0.16 m
Le dépositaire danois, quant à lui, fait état d’un taux de suspens de 2 % en 2000 et 2001, et de
1 % en 2002.
Ces dépositaires centraux nommés ci-dessus présentent des taux de suspens qui diminuent
certes, mais qui sont plus élevés que ceux d’Euroclear France.
417
4.3 Un pré-appariement et un recyclage des mouvements non
dénoués permettent de rationaliser les systèmes
L’appariement des instructions d’achat et de vente conduit les intermédiaires à s’engager sur
le règlement des espèces et la livraison des titres. Plus la transmission desdites instructions est
tardive, plus le temps est restreint.
Le pré-appariement s’entend comme étant un accord préalable sur les termes de la
négociation. Il permet, de facto, de minimiser le retard de traitement dans les opérations de
dénouement.
Il est d’autant plus important qu’il permet de minimiser le nombre refus des avis d’opéré. Plus
encore, il est une condition préalable à la mise au point d’un dénouement en J, car il permettra
alors de gérer plus finement les accords et refus d’avis d’opéré.
Le pré-appariement offert dans RGV de façon facultative permet de minimiser les risques liés
aux instructions transmises tardivement. L’appariement en temps réel (Slab), disponible 22
heures sur 24, permet aux opérateurs de back-office de suivre au fil de l’eau les opérations et
de relancer automatiquement les contreparties qui n’ont pas répondu.
Or, au vu du graphique 27, le nombre d’avis d’opéré refusés rapporté au chiffre total d’avis
d’opéré répondus diminue, mais, en capitaux, le même rapport est encore trop important.
Il conviendrait donc de généraliser la fonctionnalité du pré-appariement à l’ensemble des
systèmes de préparation.
418
Graphique 27 : Avis d’opéré refusés / avis d’opéré répondus
G r a p h iq u e 2 7 : a v is d 'o p é r é r é f u s é s / a v is d 'o p é r é r é p o n d u s
2 0 ,0 0 %
1 8 ,0 0 %
1 6 ,0 0 %
1 4 ,0 0 %
1 2 ,0 0 %
1 0 ,0 0 %
8 ,0 0 %
6 ,0 0 %
4 ,0 0 %
2 ,0 0 %
0 ,0 0 %
1997
1998
1999
2000
2001
e n n b r e d 'A O
2002
2003
e n c a p ita u x
En matière de délai d’ajustement des avis d’opéré, comme l’indique le tableau 17, la
proportion des avis répondus en J+1 et J+2 est encore trop importante.
Tableau 17 : délai d’ajustement des avis d’opéré (en pourcentage)
Pré-accepté
Emis en J
Emis en J+1
Emis en J+2
Emis en J+3
1997
4,881
60,825
30,704
2,929
0,005
1998
4,753
60,141
30,730
3,110
0,006
1999
3,938
69,234
30,730
2,255
0,003
2000
3,496
66,965
22,702
2,075
0,003
2001
2,518
67,131
26,723
1,808
0
2002
1,857
67,570
28,084
1,539
0
2003
1,200
68,080
28,849
1,870
0
419
De plus, les délais d’émission des avis d’opéré par les sociétés de bourse (tableau 18) ont
tendance à diminuer, mais ledit délai devrait être généralisé en J. Notons tout de même que le
délai de J s’améliore de façon certaine, atteignant 97,77 % en 2003.
Tableau 18 : délai d’émission des avis d’opéré par les sociétés de bourse
(en pourcentage)
Emis en J
Emis en J+1
Emis en J+2
Emis en J+3
Emis plus de J+3
1997
94,903
2,891
1,388
0,521
0,297
1998
94,465
2,495
1,364
0,966
0,710
1999
95,212
1,633
1,172
0,904
1,080
2000
95,401
2,154
1,106
0,664
0,675
2001
96,033
3,123
0,405
0,257
0,182
2002
97,516
2,028
0,226
0,112
0,118
2003
97,770
1,950
0,200
0,050
0,040
Enfin, en amont du pré-appariement, il convient également de généraliser sur toutes les places
la confirmation en J.
La procédure qui va de l’avis d’opéré au matching (donc juste avant la phase de règlementlivraison) s’appelle la phase « post-trade / pre-settlement ».
Il conviendrait de la généraliser en date de valeur J. C’est la phase de confirmation ou SDA –
Same day affirmation.
La confirmation en J permet d’identifier les erreurs rapidement pour mettre au point les
réajustements nécessaires le plus tôt possible et, in fine, réduire le risque de suspens.
Malheureusement, toutes les places n'ont pas le même taux de SDA.
A fin 2002, les taux de SDA, pour les principales places étaient tels que précisés dans le
tableau 19.
420
Tableau 19 : Taux de SDA
Italie
Suisse
France
Pays-Bas
USA
Grande Bretagne
Japon
16
22
45
48.5
56.5
62.5
88
Source : Omgeo Benchmarks DTCC Data 2002
C’est pourtant un point crucial pour la réduction du délai de dénouement. Et, dès 1989, le
Groupe des Trente s’attardait sur le mécanisme de confirmation, tandis que la Banque des
Règlements Internationaux requerrait, en 2001, une confirmation en J 708.
5. Une irrévocabilité en cours de journée et des mécanismes de
fluidification des dénouements
Nous avons longuement insisté, dans nos développements précédents, sur le besoin d’une
irrévocabilité en cours de journée. Mais cette fonctionnalité doit s’accompagner de
mécanismes de fluidification des dénouements : prêts de titres, pensions livrées et mise à
disposition de liquidités intradays.
708
Confirmation / validation des transactions : Avant 1992, les participants indirects du marché devraient être
membres d’un système de compensation des transactions qui les informe de la confirmation des caractéristiques
des transactions.
Group of Thirty, Clearance and settlement systems in the world’s securities markets – mars 1989
- Confirmation of trades between direct market participants should occur as soon as possible after trade
execution, but no later than trade date (T+0). Where confirmation of trades by indirect market participants (such
as institutional investors) is required, it should occur as soon as possible after trade execution, preferably on T+0,
but no later than T+1.
Bank for International Settlements, Report of the Committee on Payment and Settlement Systems and the
International Organization of Securities Commissions, Recommendations for securities settlement systems,
January 2001
421
5.1 L’insuffisance d’une irrévocabilité en fin de journée
Avant la mise en place d’une irrévocabilité en cours de journée, la Banque de France n’avait
certes jamais demandé de réfection de chaining dans les systèmes Relit et Saturne. Mais
l’accroissement des volumes traités (75 000 milliards de francs étaient traités en 1994 dans les
systèmes Relit et Saturne) nécessitait une couverture supplémentaire des risques au travers
d’une irrévocabilité intraday.
Dans le système RGV, le contrôle de provisions titres et espèces autorise une irrévocabilité
immédiate dès son exécution.
Cette prestation est d’autant plus nécessaire que les conservateurs de titres, pour compte
propre et compte de tiers, ont deux besoins :
-
ils souhaitent faire bénéficier leurs clients de la collatéralisation pour le dénouement des
opérations qui nécessitent l’irrévocabilité,
-
si les stocks de garanties mobilisables (pour les besoins des systèmes de place RGV, TBF,
PNS …) dont ils ont la pleine propriété sont limités, ils doivent trouver une solution de
remplacement pour faciliter le dénouement des opérations.
Ils peuvent donc souhaiter disposer des titres de leurs clients qu’ils gèrent en conservation,
ceci afin de les apporter en garantie de leurs transactions dans le cadre des mécanismes de
sécurisation.
Aussi le système RGV a-t-il proposé l’utilisation des titres de la clientèle déclarés
collatéralisables de façon automatique et plusieurs fois par jour par des mises en pension de
ces titres au profit de la banque centrale.
L’irrévocabilité s’obtient notamment au moyen de la collatéralisation des titres. Or les besoins
en titres pour assurer la sécurisation de systèmes de paiement ont été estimés, en 1995, à 6
milliards €, comparés aux 450 milliards € de titres d’Etat acceptés en garantie par la Banque
de France. L’irrévocabilité intraday était donc devenue primordiale eu égard aux besoins de la
Place.
422
Malheureusement, lors de notre enquête terrain, il ne nous a pas été possible de mesurer la
rentabilisation des avoirs en titres des intermédiaires financiers. Ces derniers nous ont
répondu qu’ils n’avaient aucune notion à nous communiquer en la matière.
Il ne nous est donc pas permis de confirmer cette hypothèse par une analyse quantitative.
Au mieux, nous préciserons que nos interlocuteurs sont unanimes à considérer l’irrévocabilité
des mouvements en cours de journée comme une condition d’efficience d’un système de
règlement-livraison de titres.
Les raisons évoquées sont :
-
la réutilisation des titres à une même date et même valeur,
-
l’optimisation des limites de risques,
-
la connaissance, au fil de l’eau, de l’évolution des avoirs en titres et en espèces,
-
l’anticipation possible des opérations de prêts et emprunts de titres pour maximiser le
nombre d’opérations à dénouer,
-
l’identification rapide, c’est-à-dire en cours de journée, d’un problème éventuel avec une
contrepartie,
-
l’impossibilité de retour en arrière des opérations, retour qui peut, le cas échéant,
provoquer une situation de blocage des systèmes.
5.2 Des systèmes de prêt-emprunt de titres efficients
La place de Paris n’a pas souhaité mettre au point un système de prêt-emprunt de titres
automatique dans RGV. Pourtant elle en avait les moyens techniques puisqu’elle avait testé
un tel système quelques années auparavant pour le dénouement des transactions sur les
obligations du Trésor.
Aussi nous a-t-il semblé important de mesurer l’impact des prêts – emprunts de titres
automatiques tels qu’ils existaient dans le système inter – SVT.
Enfin nous présentons le modèle de Clearstream sachant que les centrales de clearing
internationales se sont, dès le début de leur activité, basées sur cette prestation.
423
5.2.1 Le système Inter – SVT en Bourse de Paris
L’historique du système Inter – SVT
En 1982 l’Etat français a décidé de réformer son système d’appel public à l’épargne en
proposant des obligations assimilables du Trésor.
La technique de l’assimilation consiste à assimiler des titres nouvellement émis à des titres
antérieurement émis présentant les mêmes caractéristiques (même taux, même valeur
nominale, même date de remboursement …). Ce principe permet de réduire les lignes de
cotation et d’accroître la capitalisation de chaque ligne, permettant ipso facto d’augmenter la
liquidité du marché secondaire.
Parallèlement à la refonte du marché primaire, l’Etat a introduit la technique du market
making : Des spécialistes en valeurs du Trésors – SVT ont été créés à cette fin. Leur mission
principale est d’assurer la liquidité du marché en proposant en permanence des cours
acheteurs et vendeurs sur les obligations et bons du Trésor.
Le 25 novembre 1987, la Sicovam proposait aux SVT un service de dénouement des
transactions sur OAT, selon le principe de la livraison contre paiement. Ce système était
accompagné d’un système de prêt-emprunt de titres.
Les principes de ce système étaient les suivants :
-
Les SVT et Sicovam communiquaient au travers d’un réseau téléinformatique : les SVT
transmettaient leurs instructions à Sicovam, et celle-ci retournait les informations relatives
à la comptabilisation en titres et en espèces,
-
Les instructions d’achat et de vente envoyées par les SVT étaient appariées trois fois par
jour,
-
La livraison des titres et le règlement des espèces étaient simultanés, dans un délai de J+2,
sauf accord contraire entre les deux parties,
-
Un système de prêt-emprunt de titres permettait à un SVT d’obtenir un prêt automatique
ou sur demande, en cas de défaut de provision éventuel.
424
Le système inter-SVT a été intégré au système Relit, mais il nous semble intéressant de
l’étudier en tant que tel pour deux raisons essentielles : il a représenté une première
expérience d’un système de règlement-livraison basé sur le principe de la livraison contre
paiement en Bourse de Paris, et il reposait sur un système de prêt-emprunt de titres
automatique.
L’analyse statistique de 1988 à 1993
Les chiffres dont nous disposons sont des moyennes quotidiennes, nous les avons multipliées
par vingt pour obtenir des moyennes mensuelles. Le 3 mai 1993, la comptabilisation des
mouvements SVT a été intégrée dans Relit ; les opérations apparaissent alors dans le système
SLAB.
Enfin, à partir de 1994, nous ne disposons plus de chiffres en matière de prêt de titres, notre
étude s’arrête donc à fin 1993.
Graphique 28 : Nombre d’opérations SVT en suspens / total des opérations SVT
0 ,6 0 0
0 ,5 0 0
0 ,4 0 0
0 ,3 0 0
0 ,2 0 0
0 ,1 0 0
3
il9
ju
93
nv
-
2
ja
il9
ju
92
1
nv
-
ja
il9
ju
91
0
nv
-
ja
il9
ju
90
9
nv
-
ja
il8
ju
89
nv
-
8
ja
il8
ju
ja
nv
-
88
0 ,0 0 0
nv
-8
8
m
ai
-8
se 8
pt
-8
8
ja
nv
-8
9
m
ai
-8
se 9
pt
-8
9
ja
nv
-9
0
m
ai
-9
se 0
pt
-9
0
ja
nv
-9
1
m
ai
-9
se 1
pt
-9
1
ja
nv
-9
2
m
ai
-9
se 2
pt
-9
2
ja
nv
-9
3
m
ai
-9
3
ja
-9
0
-9
1
m
ar
s92
ao
ût
-9
2
ja
nv
-9
3
oc
t
ju
il90
dé
c90
m
ai
-9
1
fe
v
av
r-8
9
se
pt
-8
9
ja
nv
-8
8
ju
in
-8
8
no
v88
425
Graphique 29 : Nombre de prêts de titres automatiques dans le système inter-SVT
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
Graphique 30 : Nombre de prêts de titres de gré à gré
300
250
200
150
100
50
0
426
La lecture des graphiques 28, 29 et 30 nous conduit à une conclusion manifeste : le taux de
suspens augmente dès lors que le nombre de prêts de titres diminue. La relation causale est
évidente : Dès qu’il existait un pool suffisamment important de titres prêtables, les opérations
de prêt-emprunt de titres se déclenchaient automatiquement, générant une provision suffisante
aux participants vendeurs pour dénouer leurs mouvements.
Tableau 20 : Etat des suspens et des prêts-emprunts
dans le système inter-SVT
années Nombre de Nombre de prêts – emprunts
suspens automatiques & de gré à gré
1988
0
186
1989
0
1865
1990
0
774
1991
166
72
1992
5812
1
Nul n’est besoin de calculer un coefficient de corrélation pour les chiffres donnés dans le
tableau 20. Entre 1988 et 1990, années d’activité du système de prêt-emprunt de titres, les
suspens sont inexistants.
Notre hypothèse selon laquelle un système de prêt-emprunt de titres liquide et automatisé
concourt à l’efficience d’un système de règlement-livraison est confirmée dans le système
inter – SVT.
Dès lors, il convient de connaître la raison de la suppression d’un tel système de prêts.
Selon nous, la principale difficulté du maintien d’un système de prêt-emprunt de titres résulte
en une difficulté de la gestion d’un pool de titres prêtables.
Il nous semble qu’un système de prêt-emprunt de titres, pour assurer sa viabilité et sa
pérennité, doit être basé sur une tarification précise. Les prêteurs doivent être rémunérés en
conséquence. Si tel est le cas, ils chercheront à rentabiliser leurs avoirs en titres, et seront, de
facto, motivés pour alimenter un pool de titres prêtables. A contrario, ledit pool est insuffisant
eu égard aux besoins des emprunteurs ; ces derniers sont alors contraints à rechercher, à la
demande, des titres pour faire face à leur suspens.
427
5.2.2 Le prêt de titres dans le système français actuel
Depuis 1998, l’évolution des prêts de titres, dans les systèmes RGV et Relit, est telle que
présentée dans le graphique 31.
Graphique 31 : Nombre de prêts de titres
250
y = -1,6789x + 2128,4
R2 = 0,2621
200
150
100
50
août-03
févr-03
août-02
févr-02
août-01
févr-01
août-00
févr-00
août-99
févr-99
août-98
févr-98
0
On constate donc une diminution sensible de l’activité, la pente de la courbe de tendance
linéaire est négative.
Selon notre enquête, les intermédiaires français ne souffrent pas de l’absence d’un système de
prêt-emprunt de titres en bourse de Paris. Pour autant, ils stipulent cependant qu’un tel
système permet de fluidifier le système de dénouement et de rentabiliser les avoirs en titres
des sociétés de bourse.
Enfin, remarquons que si le netting était étendu à l’ensemble des intermédiaires le besoin d’un
système de prêt-emprunt serait davantage réduit encore.
428
5.2.3 Le prêt de titres automatique chez Clearstream 709
Depuis plus de vingt ans, Cedel – Clearstream, offre un service de prêt-emprunt automatique,
dont le système fonctionne comme présenté dans le schéma 4 .
Schéma 4 : Système de prêt – emprunt de titres chez Clearstream
1. Détection automatique
d’un besoin de prêt de
couverture
2. Identification automatique
d’un prêt auprès des prêteurs
ASL
Clearstream
Emprunteur ASL
3. blocage du collatéral et
nantissement direct en
faveur du garant
-
Agent prêteur
Gestionnaire de collatéral
garant
4. transfert anonyme des
titres prêtés vers ASL
Prêteur(s) ASL
5. valorisation quotidienne
des titres et du collatéral
ASL = Automatic securities lending
709
Clearstream, Securities and borrowing, Automated securities lending programme product guide, January 2004
429
Avantages
•
•
•
-
Pour les emprunteurs :
Le système ASL permet l’anonymat des clients, grâce à son interposition entre le prêteur et l’emprunteur.
Il évite les suspens en optimisant la gestion des liquidités. Les emprunteurs peuvent dénouer leurs transactions
pour éviter les suspens, en fournissant les liquidités nécessaires à la date attendue de dénouement.
Il offre un accès à pool étendu et diversifié de titres prêtables, grâce à des contrats signé avec l’ensemble des
prêteurs.
Il propose une gestion automatique des collatéraux.
Des prêts automatiques ou de gré à gré sont possibles, permettant une grande flexibilité.
Pour les prêteurs :
Le système permet une réduction des risques en se portant garant lors d’une défaillance d’une contrepartie et
en offrant une couverture supplémentaire via la collatéralisation.
Il permet d’optimiser le rendement d’un portefeuille, et de réduire les commisions de conservation dont sont
exonérés les titres prêtés.
Il gère automatiquement les substitutions de prêteurs.
Les procédures de rappel sont automatiques.
Des prêts automatiques ou de gré à gré sont possibles, permettant une grande flexibilité..
Pour les deux parties :
La gestion automatique des titres réduit les coûts généraux pour les prêteurs et les emprunteurs. Le système
ASL est entièrement automatisé et Clearstream Banking gère toutes les tâches, adminitratives et
opérationnelles, y compris la collatéralisation.
Le système offre des prêts-emprunts intradays ou overnight.
Il propose des reportings quotidiens ou mensuels.
Les participants choisissent les formules de prêts automatiques ou de gré à gré.
Selon nous, la raison pour laquelle un système de prêt-emprunt de titres automatique est
efficace réside dans une tarification établie.
Citons, à cette fin, le calcul des commissions tel qu’effectué chez le dépositaire international
(cf. encadré page suivante).
430
Calcul de la commission pour les emprunteurs :
Nominal emprunté X valeur du marché (USD) X commission d’emprunt X nombre jours ouvrés d’emprunt
360
Calcul de la commission pour les prêteurs :
Nominal prêté X valeur du marché (USD) X commission de prêt X nombre jours ouvrés de prêt
360
Exemple : Un prêteur propose des obligations à zéro coupon (200.000 USD de nominal),
de J à J+2, cotant 101 (taux consolidé en USD : 0.75 %)
J0
J1
J2
Commission :
Commission :
200.000 X 101/100 X 0.20%
360
200.000 X 101/100 X 0.20%
360
= 1.12 USD
= 1.12 USD
Commission
Commission
200.000 X 101/100 X 0.55%
360
200.000 X 101/100 X 0.55%
360
= 3.09 USD
= 3.09 USD
Totaux :
3.09 USD
4.21 USD
1.12 USD
Revenu total du prêt de titres (USD) = 3.09 + 4.21 + 1.12 = 8.42
Dans le tableau 21, nous donnons quelques exemples de taux proposés par Clearstream (en
date du 01.04.04).
Tableau 21 : Taux de prêts et emprunts chez Clearstream
Monnaie
CHF
EUR
GBP
USD
JPY
Prêt
1.00 %
0.90 %
2.20 %
0.75 %
1.000
Emprunt
2.00 %
1.90 %
3.20 %
1.75 %
2.00 %
Pour démontrer l’efficacité d’un système automatique de prêts, nous aurions voulu obtenir des
chiffres relatifs au nombre de prêts et nombre de suspens pour les mettre en rapport.
431
Malheureusement, malgré notre insistance, la direction de Clearstream n’a pas répondu à nos
attentes.
Selon nous, ce refus proviendrait d’une volonté stratégique de ne pas divulguer des
informations relatives à une activité très lucrative pour le dépositaire international.
5.3 La technique des pensions livrées comme source de sécurité des
systèmes et de l’utilité d’une mise à disposition de liquidités
intradays
Rappelons que le système RGV propose à ses participants trois formes de pensions : la
pension livrée intraday, la pension livrée conservatoire et la pension livrée overnight.
La pension livrée intraday ou intra-journalière est une pension mise en place sur
l’initiative du participant, à taux zéro. Elle apporte de la souplesse au système de
règlement et à ses participants.
L’évolution de ces pensions intradays est donnée en nombre d’opérations dans le graphique
32 et en capitaux dans le graphique 33.
432
Graphique 32 : Nombre de pensions livrées intradays Banque de France
août-03
févr-03
août-02
févr-02
août-01
févr-01
août-00
févr-00
août-99
févr-99
août-98
févr-98
5 000
4 500
4 000
3 500
3 000
2 500
2 000
1 500
1 000
500
0
Graphique 33 : Pension livrées intradays en capitaux (milliards €)
août-03
févr-03
août-02
févr-02
août-01
févr-01
août-00
févr-00
août-99
févr-99
août-98
févr-98
400,00
350,00
300,00
250,00
200,00
150,00
100,00
50,00
0,00
433
La pension livrée conservatoire (graphiques 34 et 35) est automatique, gérée par RGV, à
taux zéro, et remboursée le soir même. Elle permet de démarrer la gestion du système de
règlement en début de journée comptable, sachant que les participants ne disposent pas, à
ce moment là, d’espèces. La condition que lesdits participants aient isolé préalablement
les titres à mettre en pension est nécessaire.
Graphique 34 : Nombre de pensions livrées conservatoires Banque de France
160 000
140 000
120 000
100 000
80 000
60 000
40 000
20 000
août-03
févr-03
août-02
févr-02
août-01
févr-01
août-00
févr-00
août-99
févr-99
août-98
févr-98
0
Graphique 35 : Evolution des pensions livrées conservatoires en capitaux (milliards €)
3 5 0 0 ,0 0
3 0 0 0 ,0 0
2 5 0 0 ,0 0
2 0 0 0 ,0 0
1 5 0 0 ,0 0
1 0 0 0 ,0 0
5 0 0 ,0 0
août-03
févr-03
août-02
févr-02
août-01
févr-01
août-00
févr-00
août-99
févr-99
août-98
févr-98
0 ,0 0
434
La pension livrée overnight (graphique 36) est une opération proposée aux participants qui
n’ont pas fait le nécessaire pour rembourser les deux précédentes en fin de journée, sa
durée est de 24 heures et son taux est dissuasif (le double du taux du marché monétaire).
Graphique 36 : Nombre de pensions overnight Banque de France
140
120
100
80
60
40
20
sept-03
mai-03
janv-03
sept-02
mai-02
janv-02
sept-01
mai-01
janv-01
sept-00
mai-00
janv-00
sept-99
mai-99
janv-99
sept-98
mai-98
janv-98
0
Globalement, la répartition des pensions sur valeurs mobilières et sur titres de créances
négociables est présentée dans les graphiques 37 et 38.
Graphique 37 : Nombre de pensions mises en place
325 000
275 000
225 000
175 000
125 000
75 000
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
nombre de pensions livrées sur titres de créances négociables
nombre de pensions livrées sur valeurs mobilières
2003
435
Graphique 38 : Evolution des pensions livrées en capitaux (milliards €)
12 000,00
10 000,00
8 000,00
6 000,00
4 000,00
2 000,00
0,00
1996
1997
1998
Pensions livrées sur valeurs mobilières
1999
2000
2001
2002
2003
Pensions livrées sur titres de créances négociables
Incontestablement, l’activité de pensions progresse depuis sa mise en place dans RGV.
On peut donc en conclure qu’il existe un besoin en la matière.
Cette activité de pensions livrées s’assimile à celle des prêts de titres. Globalement, la
technique des pensions est utilisée pour satisfaire des besoins de liquidités intradays
710
,
tandis que celle des prêts de titres satisfait des besoins en titres.
Enfin, notons que les pensions overnight diminuent très sensiblement au fil des années. Ceci
s’explique par une meilleure gestion de la part des intermédiaires. Ceux-ci réussissent
davantage à gérer leurs besoins de liquidités en cours de journée, permettant de facto une
restitution des pensions en fin de journée.
En appliquant un taux dissuasif sur les pensions overnight, les gestionnaires de systèmes
optimisent la gestion de leurs participants.
710
La Banque de France offre des liquidités aux intermédiaires en requerrant une garantie en titres pour sécuriser
le système.
436
5.4 Une sécurisation indispensable au travers de la collatéralisation
Les besoins de collatéralisation augmentent au fil des années.
Au regard des statistiques d’Euroclear France, le nombre de francos de collatéralisation baisse
régulièrement (graphique 39) ; ceci peut s’expliquer par des besoins moindres depuis
l’extension des activités de Clearnet en bourse de Paris. Cependant, le montant en capitaux de
la collatéralisation (graphique 41) s’accroît tout au long des années de référence.
Graphique 39 : Nombre de francos de collatéralisation
100 000
90 000
80 000
70 000
60 000
50 000
40 000
30 000
fé
vr
-9
8
ao
ût
-9
8
fé
vr
-9
9
ao
ût
-9
9
fé
vr
-0
0
ao
ût
-0
0
fé
vr
-0
1
ao
ût
-0
1
fé
vr
-0
2
ao
ût
-0
2
fé
vr
-0
3
ao
ût
-0
3
20 000
Graphique 40 : Montant des francos de collatéralisation (milliard €)
2 500,00
2 000,00
1 500,00
1 000,00
500,00
3
3
ût
-0
-0
ao
fé
vr
2
2
ût
-0
-0
ao
fé
vr
1
1
ût
-0
-0
ao
fé
vr
0
0
ût
-0
-0
ao
fé
vr
9
9
ût
-9
-9
ao
8
vr
fé
ût
-9
ao
fé
vr
-9
8
0,00
437
Selon la Banque centrale Européenne, le total des collatéraux transfrontaliers détenus en
conservation dans l’Eurosystème était de 231,854 milliards d’euros, contre 188, 67 un an
auparavant.
Aussi, ces chiffres et graphiques démontrent-ils le besoin de collatéralisation eu égard à la
nécessité de sécuriser au maximum l’ensemble des systèmes de paiement et de règlementlivraison de titres.
6. Une minimisation des risques au travers des règlements en
monnaie centrale
6.1 L’ampleur des comptes en banque centrale
6.1.1 Etat statistique des comptes ouverts en Banque Centrale en France et
utilisation de la monnaie centrale 711
Nous reprenons l’état des comptes ouverts en banque centrale dans le tableau 22, et
l’utilisation de la monnaie centrale selon les systèmes dans le tableau 23.
Tableau 22 : Comptes ouverts en banque centrale pour la France à fin 2000
Nombre de comptes
(milliers)
Total
75
Banques
locale
2
Montants des soldes à 24 h
(milliards USD)
Banques Autres
à distance
#
neg
73
Total
Banques
locale
35 (e)
26.0
dont :
(a)
réserves
obligatoires
19.1 (1)
dont :
(b)
réserves
libres
Banques
à distance
#
0.2 (1)
nd
neg : négligeable
nd : non disponible
e : estimation
# : incluant les “remote access” intra-Européen hors banques centrales et institutions financières internationales.
(1) : période de réserve de décembre 2000 à janvier 2001
711
Bank for International Settlements, CPSS, The role of central bank money in payment systems, August 2003
438
En matière d’utilisation de la monnaie centrale, on l’estime, sur l’année 2000, à 35 milliards $
en overnight et à 26 milliards $ en intraday.
Tableau 23 : Systèmes de paiements interbancaires, Méthodes de paiement,
dispersion et concentration à fin 2002
Type de
transactions
traitées
Degré de dispersion Concentration
Par
Par
Volume Valeur La banque Méthode Nombre nombre
valeur
centrale
de
en 2000 en 2000 doit-elle
d’
de
Par
de
Par
partici(milliers) (milliards
institu- transac- volume
paiement
valeur
gérer le
USD)
pants
tions
tions
systèmes ?
directs
(1)
(2)
TBF
Gros
montant
3.000
63.420
Oui
C1
170
Moyen Moyen
46 %
56 %
PNS
Gros
montant
5.500
20.327
Non
C1
21
Elevé
Moyen
60 %
56 %
SIT
Détail
2.228
Non
C1
17
Elevé
Moyen
nd
nd
1.758
Partiellement
C1
200
Moyen Moyen
nd
nd
C1
335
Moyen Moyen
nd
nd
Clearing chèques
house
RGV /
Relit
Titres
6.485.300
3.453.900
41.000 33.856
(*)
Non
Clearnet
Titres 89.000 1.127
Non
C1
59
Fort
nd
nd
nd
(*) : la chambre de compensation de Paris est détenue et gérée par un consortium de banques ; les autres chambres de
compensation le sont par la Banque de France.
C1 : règlement en monnaie centrale auprès de la banque centrale, selon le principe de simultanéité des débits et crédits
dans les comptes des débiteurs et créditeurs (en brut et temps réel via le système de gros montant ou en net et par
période dans les autres systèmes.
(1) :
moyen - entre 25% et 75% sont des participants directs
élevé - entre 5% et 25% sont des participants directs
fort – moins de 5% sont des participants directs.
nd : non disponible
A la lecture du tableau 23, notons l’importance des volumes pour les systèmes RGV et Relit,
et Clearnet. La place financière a donc bien pris conscience de l’importance des règlements en
monnaie centrale qui permet de minimiser le risque de la banque de règlement.
6.1.2 Euroclear France et les comptes espèces
Comme évoqué ci-dessus, la banque de règlement doit minimiser le risque d’insolvabilité.
En conséquence, une banque centrale en tant que banque de règlement est une condition,
sinon d’efficience, au moins de sécurisation supplémentaire. Cet argument est d’autant plus
439
valable que les montants qui transitent dans les comptes espèces en provenance des systèmes
de règlement-livraison sont de plus en plus importants.
Pour s’en rendre compte, nous avons repris, dans le graphique 41, les montants espèces traités
dans les systèmes Relit et RGV.
Graphique 41 : Montant des mouvements dénoués en Euroclear France (milliards €)
In t é g r a t i o n d e s m o u v e m e n t s
sur T C N dans R G V
8 0 0 0 0 ,0 0
7 0 0 0 0 ,0 0
6 0 0 0 0 ,0 0
5 0 0 0 0 ,0 0
4 0 0 0 0 ,0 0
3 0 0 0 0 ,0 0
2 0 0 0 0 ,0 0
1 0 0 0 0 ,0 0
0 ,0 0
1995
1996
1997
1998
D énouem ent
1999
SLAB
2000
2001
IS B /S B I
2002
2003
S a tu rn e
Nous reprenons deux éléments de ce graphique 41 pour confirmer l’importance croissante des
montants espèces en provenance des systèmes de règlement-livraison :
La contre-valeur espèces des mouvements traités dans le système SLAB est passée de 5 404 à
43 836 milliards € entre 1995 et 2003, celle des mouvements traités dans le système
Dénouement a été multipliée par 10. Les montants qui transitent dans les comptes espèces en
provenance des systèmes de règlement-livraison sont donc colossaux et s’accroissent au des
années (suivant les volumes échangés en bourse).
440
6.2 De la nécessité d’une dualité des règlements en monnaies
centrale et commerciale
Sur toutes les places financières proposant les règlements en monnaies centrale et
commerciale, il est indéniable que le cahier des charges des gestionnaires de système de
règlement-livraison de titres est lourd à gérer pour certains participants eu égard à leur taille
ou capacité de traitement back-office.
En conséquence, ceux-ci préfèrent sous-traiter leur activité de gestion des dénouements en
titres et en espèces auprès d’autres établissements plus importants. Dans ce cas, ils optent
pour le statut de participant indirect chez Euroclear France.
Rappelons enfin, que pour traiter en monnaie centrale il s’agit de disposer d’un compte espèce
en banque centrale et du statut de participant direct au système de règlement-livraison de
titres.
Pour évaluer le bien fondé de la dualité des règlements nous reprenons, dans le graphique 42,
l’évolution des participants directs et indirects d’Euroclear France.
Graphique 42 : Nombre de participants Euroclear
800
700
600
500
287
281
259
338
324
327
312
381
357
371
341
335
331
325
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
400
300
200
100
0
participants directs
participants indirects
441
La tendance à la stagnation, voire la légère diminution, du nombre de participants s’explique
par les restructurations capitalistiques intervenues ces dernières chez les intermédiaires
financiers. Aussi nous est-il paru opportun d’étudier la part relative des participants indirects
(graphique 43).
Graphique 43 : Part des participants indirects dans le total des participants
52,00%
50,00%
48,00%
46,00%
44,00%
42,00%
40,00%
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
Comme en atteste le graphique 43, la part des participants indirects augmente au fil des
années. Certains établissements, cherchant à réduire leurs coûts, préfèrent sous-traiter leur
activité Euroclear auprès d’établissements plus importants.
Cette constatation confirme notre hypothèse selon laquelle l’alternative monnaie centrale –
monnaie commerciale doit être maintenue sur une place financière. Dans la pratique, à Paris,
il existe un système en monnaie commerciale, Relit, et un système exclusivement en monnaie
centrale, RGV. Car si des règlements en monnaie centrale sont sources de sécurisation des
systèmes, une dualité des règlements apporte de la souplesse pour les plus petits
établissements.
442
6.3 Un règlement multi - devise chez les dépositaires centraux
domestiques
Lorsqu’un mouvement transfrontalier sur titres en conservation physique avait lieu dans les
années quatre-vingts encore, des procédures longues et coûteuses étaient nécessaires. La
préparation des mouvements comptables chez l’établissement perdant s’accompagnait de
l’édition d’instructions de sortie des titres détenus (pour envoi à destination de la conservation
du teneur de compte du bénéficiaire). Les titres étaient expédiés en plis recommandés (scellés
à la cire pour être acceptés !) et accompagnés de bordereaux précisant les quantités par valeur,
la nature des titres et la jouissance 712.
Si aucun chiffre n’est connu, on imagine que le délai de livraison des titres atteignait plusieurs
semaines, voire plusieurs mois.
Le nombre des mouvements internationaux progressant régulièrement, il conviendrait peutêtre de s’interroger sur l’opportunité pour un dépositaire national de gérer des règlements
multi – devises. Depuis très longtemps Sicovam – Euroclear France a noué des liens avec ses
homologues étrangers. Il y a donc une « culture virements internationaux » ancienne. En
attestent le nombre de mouvements (graphique 44) et leur contre – valeur espèces (graphique
44), cette dernière n’étant évaluée en Euroclear que depuis 1995.
Graphique 44 : Nombre de virements internationaux 713 enregistrés en Euroclear France
50 000
45 000
40 000
35 000
30 000
25 000
20 000
15 000
10 000
5 000
712
0
Hélie 1987
G., Post-marché
et
valeurs
Editeur
1988
1989
1990
1991 mobilières,
1992
1993 Banque
1994
1995
1996 1993
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
Les ordres de livraison internationale
sont
les
mouvements
de
la
France
vers
l’étranger,
les
virements
ordres de livraison internationale
virements internationaux d'entrée
internationaux d’entrée sont les mouvements de l’étranger vers la France.
713
443
Graphique 45 : Contre valeur espèces des virements internationaux
(milliards €)
140
120
100
80
60
40
20
0
1995
1996
1997
1998
1999
ordres de livrais on internationale
2000
2001
2002
2003
virem ents internationaux d'entrée
Le nombre de mouvements internationaux s’accroît donc d’années en années, et le montant
espèces de ces mouvements encore davantage.
On peut penser que si Euroclear traitait les dénouements en d’autres devises que l’Euro, cette
tendance sera accrue plus encore.
Selon notre enquête terrain, en matière de transactions sur valeurs européennes non
dématérialisées, les délais entre la date de négociation et l’inscription au compte de l’acheteur
varient, allant de J+3 à un délai parfois supérieur à J+15 !
La proportion de règlements en devises hors euro, chez les intermédiaires qui ont bien voulu
répondre à notre enquête, va de 6 % à 40 %, dépendant essentiellement de la part
d’institutionnels dans leur clientèle totale.
Pour ces règlements, les banques françaises font appel à un dépositaire international ou à leur
réseau de correspondants. Ces derniers sont choisis pour leur qualité de service et contrôlés
régulièrement par l’établissement français. Ils répondent donc à des standards de qualité et la
444
collaboration est établie sous forme d’un contrat résiliable à tout moment en cas de prestations
non conformes aux engagements pris au départ.
Ipso facto, un réseau de correspondants (autant de correspondants locaux que de marchés
ouverts) augmente forcément les coûts de traitement. Aussi nous semblerait-il opportun qu’un
dépositaire central national offre le règlement multi – devise à l’instar de ce que font les
dépositaires internationaux 714.
Ce point de vue n’est, néanmoins, pas partagé par l’ensemble de la communauté financière.
Certains établissements s’interrogent sur le bien-fondé de cette prestation : un dépositaire
central doit-il gérer le risque de change ?
Cette notion de gestion multi – devise entre dans le champ de réflexion relatif au partage des
fonctions notariales telles dévolues historiquement aux dépositaires centraux et non remises
en cause, et les fonctions à valeur ajoutée revendiquées par les banques au détriment desdits
dépositaires.
A notre sens, sans revenir sur ce débat auquel nous avons fait allusion dans les chapitres
précédents, les règlements multi – devises pourraient être gérés par un dépositaire central de
titres sous certaines conditions.
Chaque participant au système de règlement-livraison de titres devraient disposer d’un compte
espèces en banque centrale. La gestion des devises pourrait alors s’effectuer directement
auprès de la banque centrale, le risque de change restant gérer par les participants eux-mêmes.
Bien évidemment, ce mécanisme nécessiterait de multiples comptes en banque centrale, mais
ne pourrait avoir lieu d’être que pour les devises les plus importantes (dollar, yen, livre
sterling …) ; les règlements sur devises secondaires resteraient gérés par le biais des
correspondants locaux.
In fine, cette hypothèse de règlement multi – devise telle qu’énoncée dans nos hypothèses de
départ ne semblent pas, après enquête, être réellement source d’efficience technique d’un
système de règlement-livraison de titres.
714
Clearstream ou Euroclear propose des règlements dans 25 devises environ.
445
Elle apparaîtrait davantage comme une fonctionnalité supplémentaire offerte par un
dépositaire pour faciliter les règlements transfrontaliers de ses participants que comme une
condition nécessaire d’efficience technique.
7. La notion d’efficience – X dans les activités post-marché
Nous tentons d’aborder la notion d’efficience – X qui repose, comme vu au chapitre I (§ 5.2),
sur le fait que les entreprises n’exploitent pas leurs ressources de façon optimale. A cette fin,
nous reprenons une étude réalisée dans le secteur bancaire que nous appliquons aux activités
de back office titres en prenant l’exemple d’une activité chez un intermédiaire financier.
7.1 L’amélioration de la productivité dans les back offices
7.1.1 Etude globale
Globalement, la productivité s’entend comme étant le ratio d’output sur input annuel.
Nous reprenons une étude réalisée par Blanco et Négiar
715
dans le domaine de la banque de
détail.
Ils mesurent l’output par : le nombre de transactions de paiement, le volume de dépôts de
particuliers en francs constants 1994, le volume des prêts aux particuliers en francs constants
1994, le nombre de transactions de particuliers sur valeurs mobilières et le nombre de requêtes
d’information de particuliers.
L’agrégation est effectuée comme la somme des quantités produites pondérées par les
effectifs correspondants à ces différentes catégories d’activité au sein de la banque. Les
méthodes d’indexation et d’agrégation de Fisher permettent la cohérence des comparaisons
historiques et internationales. Les effets de qualité n’ont pas été explicitement quantifiés.
715
Blanco T., Négiar D., Rôle des technologies de l’information et d’Internet dans la productivité bancaire en
France, Revue d’Economie Financière n°69, mars 2003
446
L’input est mesuré par le nombre d’heures travaillées dans le secteur bancaire des activités
exclues du périmètre et du niveau d’externalisation variable au cours du temps et entre pays.
Le périmètre considéré dans la mesure de productivité est celui des services bancaires et
financiers aux particuliers. Il englobe les transactions de paiements (retraits d’argent,
paiements par cartes de crédit et débit, par prélèvements, par virements et par chèque), les
dépôts (comptes et livrets à terme), les prêts (immobilier, consommation, découvert…), la
distribution des valeurs mobilières (actions, obligations, sicav … excluant les produits
d’assurance – vie) et les requêtes d’informations (centres d’appels, sites informatiques …).
L’automatisation des back office a contribué à 1.4 % du taux de croissance de la productivité,
soit les trois-quarts de la croissance directement liée aux technologies de l’information.
De 1994 à 2000, l’input de travail nécessaire par unité d’output a été réduit de 15 à 25 %.
Le plus large impact s’est fait ressentir dans les transactions de paiements (25 à 35 %) et les
produits d’investissement (10 à 30 %). La mise en place de scanners et des systèmes de
gestion des images pour le traitement des chèques et des transferts papier a principalement
débuté au début des années quatre-vingt-dix, conduisant à de larges réductions des effectifs
pour la saisie des données. Les banques ont adopté le straight-through processing et de
nombreuses interfaces ont été remplacées par des connexions électroniques directes, en
particulier les interfaces entre agences et back office. Cela a été renforcé par les système de
trading électroniques et de règlement-livraison.
Au total l’impact des technologies de l’information et de la communication – TIC sur les back
office et les tâches d’administration ressort comme indiqué dans le schéma 5.
447
Schéma 5 : Impact des technologies de l’information et de la communication – TIC sur les
back office
Exemples
d’amélioration
en
efficacité liées aux TIC dans les
back offices
• automatisation de la
saisie de données
Paiements
avec les scanners et la
gestion d’image des
formulaires
de
paiements
• changement pour
Dépôts
des paiements par
carte, plus efficace
que les chèques et la
manipulation d’argent
liquide
Prêts
• beaucoup de tâches
sont encore effectuées
manuellement
• amélioration des
systèmes de scoring
crédit, souscription
automatisée
Produits
• la standardisation
d’investissement
informatique a
diminué les niveaux
d’effectifs nécessaires
• amélioration de
l’intégration entre les
agences et les back
offices
• Introduction des
systèmes de trading
et règlementlivraison
Réduction d’effectifs liées aux TIC
dans les back offices (augmentation
d’output exclue)
Fonction
dans
la banque *
Part des
effectifs**
%
back offices
(middle-office
inclus)
Réduction
d’effectifs
%
•
- paiements 48
- prêts
24
- dépôts
- produits
d’investissement
35
15 – 25
17
25 – 35
8 – 15
+0
11
10 – 30
• Administration
(TIC inclus) 10
* le front-office représente 55 % des effectifs totaux (le back-office 35 %, l’administration 10 %)
** Part moyenne des effectifs à travers les pays étudiés
7.1.2 Cas d’un établissement particulier : Le Crédit Commercial de France
Nous prenons présentement le cas du Crédit Commercial de France qui a bien voulu répondre
à nos attentes, en la personne de G. Huger, quant à notre enquête terrain.
+0
448
Les investissements et le coût dédié aux activités de règlement-livraison de titres
Avant d’étudier la productivité de cet établissement en matière de gestion d’organisme de
placements collectifs, il nous a semblé opportun de considérer le coût du développement des
projets successifs de place chez un intermédiaire financier.
A cette fin, nous exposons des éléments parus dans la presse en 1991 que nous avons
actualisé à ce jour.
Dans un article de fin 1991, Lencquesaing
716
abordait l’activité titres du CCF en termes
industriels. Au 30 septembre 1991, le portefeuille en conservation au CCF, d’un total de 220
milliards de francs (33.5 milliards €), se répartissait entre les banques et institutions à hauteur
de 50 %, les Opcvm à 20 % et les particuliers à 30 %.
Les investissements se présentaient ainsi :
•
informatique :
-
3 millions € entre 1989 et 1991,
-
l’énergie informatique dédiée à l’activité titres reposait sur un IBM 3084 (25 MIPS)
avec 300 terminaux de production et accès direct dans 250 agences et banques soustraitées,
-
le coût de l’énergie avoisinait 2.44 millions €
•
effectifs : 400 personnes,
•
organisation : 0.6 millions €.
et ils se répartissaient sur 230 000 comptes (dont 1 000 comptes d’institutions).
Comme mentionné plus haut, nous avons cherché à réactualiser ces chiffres. Cependant le
périmètre d’activité a changé et c’est là, la difficulté et l’une des limites de notre recherche. A
la mi-1999, le CCF a cédé son activité à Natexis – Banques Populaires (NBP), avec 75 % de
ses effectifs.
716
Lencquesaing (de) E., Le back-office titres à l’heure de la concentration – L’offre des prestataires,
Technologies Bancaires Magazine n°29, novembre – décembre 1991
449
A ce jour, la conservation du CCF stricto sensu atteint 36 milliards € pour sa clientèle détail
(contre 10 milliards € en 1991), à laquelle il convient de rajouter les activités des sociétés de
gestion et filiales du groupe pour obtenir au total 70 milliards € de conservation.
Les investissements informatiques se sont stabilisés à 3 millions € par an jusqu’en 1999.
L’ordinateur IBM a été revendu à NBP lors du transfert d’activité. Le service titres du CCF
utilise désormais une soixantaine de terminaux, mais l’accès direct en agences est toujours
possible grâce à un système de relais sur l’ordinateur central de NBP 717.
Le coût de l’énergie informatique s’est établi à 1,086 millions € en 2003 (contre 2,44
auparavant).
Les charges sont toujours réparties sur l’ensemble des comptes (300 000 comptes), une
facturation étant définie sur les flux et sur les stocks (via le système ABC 718).
Enfin la facturation de l’outil informatique est en moyenne comprise entre 3 et 4 millions €
par an.
Une ébauche de mesure de productivité
Afin de reprendre en partie l’étude de productivité abordée ci-dessus nous prenons l’activité
« investisseurs institutionnels » du service titres du CCF, sachant que c’est à ce jour la seule
activité pérenne dans le temps. Les autres activités de conservation ont été transférées chez
Natexis.
L’activité « investisseurs institutionnels » du CCF existe depuis les années soixante-dix.
Au démarrage, 3 à 4 personnes y travaillaient pour une trentaine de comptes.
717
Il existe une ligne informatique entre les deux services de NBP et CCF. Les terminaux du réseau CCF et de
ses filiales viennent se connecter sur le système du CCF et non directement sur celui de NBP. Ceci implique
nécessairement un maillon supplémentaire dans la gestion des pannes ou incidents informatiques.
718
ABC – Analysis Basic Cost est un logiciel permettant de définir, plus ou moins finement selon les besoins, les
coûts unitaires de production selon différents paramètres. On y entre les charges et les unités d’œuvre pour
définir les coûts unitaires qui serviront à définir la politique commerciale de l’entreprise.
A titre d’exemple, le CCF nous précise que, pour les opérations bourse France, il intègre les frais pris pas le
sous-traitant, les redevances des systèmes de place, les divers coûts humains, informatiques, immeubles …, et
divise le tout par le nombre d’opérations.
Ainsi, un ordre de bourse oscille entre :
- 4 € pour un ordre simple (entièrement automatique) et
- 7 € pour un ordre complexe (gestion du nominatif, intervention manuelle, etc. …).
450
Dans les années quatre-vingts, ce nombre est monté à 6 personnes (dont 5 personnes à temps
plein) pour une centaine de comptes.
Mais le 16 octobre 1986, l’informatisation des traitements a démarré avec Oméga
719
,
permettant de facto de réduire le nombre de personnes de moitié à la fin de la décennie (entre
2 et 3 personnes à partir de 1989).
A ce jour, le CCF gère 1 200 comptes d’institutionnels (dont 200 comptes actifs), représentant
une capitalisation totale d’un peu plus de 18 milliards €. Deux personnes traitent les
opérations dans la journée, auxquelles il convient de rajouter une demie – personne (très
précisément une personne en fin de matinée) pour satisfaire la demande de la clientèle.
Cette dernière réalise essentiellement des opérations de bourse (réponses des brokers),
quelques mouvements en bourses étrangères et des opérations de trésorerie d’organismes de
placements collectifs.
Pour le traitement de ces opérations, le CCF opère à des virements de titres de comptes à
comptes internes (car les institutionnels sont pour la plupart des assureurs et des réassureurs)
et des virements interbancaires. Le carnet d’ordres OPCVM clôturant à 12 heures, la gestion
de trésorerie de ces institutionnels requiert une activité forte en fin de matinée (justifiant la
demie – personne supplémentaire).
Les outputs se présentent tels que dans le tableau 24.
Tableau 24 : Etat des outputs
Nombre d’opération par jour
1993
2003
Evolution
Saisie d’ordres Opcvm
30
100
+ 233 %
Tickets sur bourses
10
20
+ 100 %
5
30
+ 500 %
750 / 800
1 200
(France ou Etranger)
LCP ou franco Euroclear / Clearstream
Nombre de comptes suivis
719
Système d’informatisation de la chaîne titre : Organisation et MEthode pour la Gestion Automatisée des
valeurs mobilières.
451
En matière d’inputs, le nombre de personnes dédiées à cette activité est identique entre les
deux années de référence. La productivité s’est donc considérablement accrue. Mais, un
résultat chiffré serait illusoire.
Au-delà d’une amélioration de la productivité, le temps de travail par personne s’est réduit
(pour des raisons légales), et les fonctions ont été modifiées.
A l’origine, les personnes concernées par cette activité étaient, il y a 10 ans, proches du
middle - office. Elles géraient certes les titres au sein de la cellule back - office, mais étaient
davantage des chargés de comptes, allant rendre visite à leurs clients. Aujourd’hui, les 2.5
personnes sont cantonnées dans un rôle strictement de back - office.
Nonobstant ces remarques, la productivité a évolué favorablement. Il ne nous est néanmoins
pas possible d’étendre cette étude à l’ensemble des activités de conservation et de règlementlivraison de titres, compte tenu des changements de périmètre intervenus dans tous les
établissements financiers.
Toutefois, cela nous apporte quelques éléments qui nous permettent de conclure que les
activités de back - office sont, parmi les activités financières, celles qui apportent le plus
d’économies d’échelle potentielles dont il a été question dans les développements des
chapitres précédents.
7.2 Les coûts globaux
Comme mentionné tout au long de notre réflexion, le coût d’une transaction diminue
régulièrement depuis quelques années. Nous reprenons ci-dessous (graphique 46) un
graphique élaboré par BPSS 720.
452
Graphique 46 : Coût et volume de transactions
40
25
35
22,4
35
20
30
25
25
20
20
10,3
15
10
15
14,9
15
10
13
5,1
5
5
3
0
0
1997
1998
coût / transaction (€)
1999
2000
2001
Nb de transactions (millions de transactions)
Les coûts de transaction comprennent des coûts directs et indirects. Les coûts direct incluent
les commissions de conservation et de mouvements payés aux dépositaires et / ou à la
contrepartie centrale. Ceux-ci peuvent atteindre 30 % des coûts post-négociation. Les coûts
indirects sont ceux payés par les négociateurs et investisseurs lors de l’utilisation des
systèmes. Ils sont d’autant plus élevés qu’il existe des redondances, et donc des inefficiences
inhérentes à la fragmentation des différents systèmes.
Nous reprenons, dans le graphique 47, des chiffres communiqués par une étude de
Clearstream 721 .
720
BNP Paribas Securities Services, 2003, Clearing and settlement in the European Union, Main Policy Issues
and Futures Challenge
721
Clearstream, September 2001
453
Graphique 47 : Coûts post-négociation
coûts dénouement non
synchronisé
10%
10%
coûts de transaction et
dépositaires
14%
coûts de back-office
30%
frais financiers
frais extra - conservation
15%
coûts opérationnels
21%
Pour un système de paiement, le coût global inclut les coûts d’opération, les coûts financiers
de détention des portefeuilles tels que le système soit optimal (frictionless), et les coûts
financiers liés au délai de dénouement. Selon Humphrey et al.
722
, les coûts d’opération se
situent entre 1 et 1.5 % du PNB annuel. Mais le coût social total d’un système de paiement
(compris en 2 et 3 % du PNB) peut être réduit par l’introduction des procédures électroniques.
Selon les auteurs, la réduction peut atteindre entre un tiers et la moitié des coûts de
fonctionnement d’un système basé sur le papier.
N’ayant pas pu obtenir des informations relatives aux coûts de traitement chez les
intermédiaires et les dépositaires, nous reprenons les rapports Giovannini.
Deux rapports ont effectivement été édictés afin de réfléchir à la mise en place d’un postmarché efficient en Europe.
Le premier rapport 723, en 2001, a identifié les obstacles à lever que nous exposons.
722
Humphrey D.B., Pulley L.B., Vesala J.M., Cash, paper and electronic payments : a cross-country analysis,
Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
723
European Commission, 2001, Cross-Border clearing and settlement Arrangements in the European Union,
Giovannini Report
454
-
la multiplicité des systèmes (qui équivaut à des restrictions nationales pour le clearing et
le règlement-livraison),
-
la différence de législations de droits des actionnaires et de conservation,
-
l’absence d’irrévocabilité intraday,
-
les obstacles à l’accession à distance des systèmes de clearing et règlement,
-
les différences de délais de dénouement,
-
les différences d’horaires de traitement,
-
les différences de modalités d’émission de valeurs mobilières,
-
les restrictions relatives à l’activité des teneurs de marché,
-
les différences fiscales,
-
les différentes méthodes de netting,
-
l’absence d’un cadre commun juridique.
Le second rapport
724
propose un plan d’action en vue de décloisonner les activités post-
marché, reposant sur la consolidation des activités da base. Ces actions sont les suivantes :
-
Unifier les interfaces et les procédures des gestionnaires de systèmes (un protocole devrait
être défini par Swift et appliqué immédiatement par les pays de la zone Euro),
-
Harmoniser les conditions d’accès aux systèmes (via une Directive sur les services
d’investissement),
-
Harmoniser les législations en matière d’appel public à l’épargne et de droits des
actionnaires (via l’ECSDA),
-
Généraliser la notion d’irrévocabilité intraday,
-
Admettre des membres à distance (remote access) chez les gestionnaires de systèmes,
-
Harmoniser les délais de dénouement et les horaires de traitement,
-
Harmoniser les cahiers des charges des teneurs de marché,
-
Harmoniser la fiscalité,
-
Instaurer un cadre commun pour la gestion des produits des opérations sur titres (à l’instar
de la directive sur la collatéralisation),
-
Harmoniser les techniques de netting.
Le premier rapport a révélé une inefficience liée à la multitude de systèmes de règlementlivraison de titres, et est parti du postulat que l’inefficience des systèmes transfrontaliers
incombe à trois types de coûts additionnels :
455
-
les coûts directs résultant des commissions pratiquées sur les opérations transfrontalières,
-
les coûts indirects liés au maintien nécessaire de différentes structures de back-office
commandé par la multiplicité des systèmes,
-
les coûts d’opportunité dus à l’absence d’une gestion globale de la collatéralisation, à
l’incidence des suspens…
Compte tenu de la difficulté d’évaluation des coûts indirects et d’opportunité, le groupe de
travail s’est focalisé sur les coûts directs.
Il en est ressorti les chiffres que nous reprenons dans le tableau 25.
724
Giovannini Group, Second report on EU clearing and settlement arrangements, Brussels April 2003
456
Tableau 25 : Evaluation des coûts directs
Organisation
Déposit.
Internal.
Déposit.
Internal.
Danemark
Allemagne
Espagne
Grèce
France
France
Italie
Portugal
Suède
GrandeBretagne
Union
europ.
Déposit.
Internal.
EtatsUnis
Euroclear
Bank
Clearstream
Luxembourg
VP
Clearstream
Frankfurt
SCLV
CSD
Euroclear
France
Clearnet
Monte Titoli
Interbolsa
VPC ***
Crest **
Union europ.
(hors déposit.
Internat.)
SIS
DTCC++
Revenu
Transactions
revenu par
d’exploitation (avant netting) transaction
(€)
(€)
Transactions
revenu par
(après netting) transaction
(€)
360.590.000
11.000.000
32.78
11.000.000
32.78
401.175.00
27.122.013
12.000.000
6.800.000
33.43
3.99
12.000.000
6.800.000
33.43
3.99
268.746.00
45.758.000
47.805.161
125.000.000
11.000.000
21.973.933
2.15
4.16
2.18
125.000.000
11.000.000
21.973.933
2.15
4.16
2.18
144.968.647
125.448.000
22.175.332
14.205.395
43.125.089
143.446.634
135.000.000
1.07
41.000.000
6.60
126.395.972
8.654.761
14.633.242
58.816.750
0.18
1.64
2.95
2.44
8.783.635
8.654.761
14.633.242
58.816.750
2.52
1.64
2.95
2.44
1.644.656.272
531.874.658
2.86+
319.662.321
5.14
882.800.272
508.874.658
1.49+
296.662.321
2.98
103.231.065
17.745.900
5.82
17.745.900
5.82
638.261.727 1.387.500.000
0.46
230.271.931
2.77
Notes explicatives
Nombre de transactions : Les données “Avant netting” émanent des dépositaires. Les autres informations
proviennent du « Blue book 2000 » de la Banque Centrale Européenne. Les transactions sont comptabilisées une
fois. Pour Clearstream Frankfurt, les chiffres proviennent de la bourse.
Revenu d’exploitation : ils sont relevés dans les comptes des rapports annuels 2000 des dépositaires.
+ : revenu d’exploitation par transaction (hors Clearnet)
++DTCC : si les revenus d’intérêt sont soustraits, la politique de prix de DTCC est telle que les dépenses
excèdent les revenus. La part des intérêts est 11% du total du revenu d’exploitation), menant à un revenu
d’exploitation de 638millions €.
Dépositaires internationaux : le revenu d’activité banque est leur principal revenu, leurs services étant différents
de ceux des dépositairres domestiques.
** : moyenne quotidienne multipliée par 250 jours.
*** : VPC son revenu d’exploitation est de 15.2 millions € en 2000. Deux tiers de ce revenu sont dus à des
recettes d’émission.
457
Le groupe de travail a conclu, de ces données, que le dénouement des transactions
domestiques en Europe semble efficient, comparé à celui de DTCC, mais que celui des
transactions transfrontalières reste inefficient. Ceci est a priori du aux coûts de traitement des
transactions chez les dépositaires supranationaux.
On remarquera que cette étude corrobore les résultats des autres études menées par ailleurs, et
qui ont été exposés dans le chapitre I.
Etudiant plus particulièrement les systèmes de paiement, Humphrey et al.
725
abordent la
tarification d’un système de paiement sous la forme de quatre composantes principales :
-
un coût d’entrée initiale,
-
un coût annuel,
-
une tarification à l’utilisation (par mouvement),
-
un tarif spécifique (ad hoc) pour telle ou telle prestation.
Berger et al.
726
décomposent également le coût d’un système de paiement en trois
dimensions :
•
un coût réel de réalisation, réception et intermédiation d’un paiement qui comprend :
-
les coûts de comptabilisation, d’envoi et de traitement du paiement, et autres « shoe
leather costs » liés à la réception du paiement émanant de l’acheteur,
-
les coûts de traitement et de communication payés aux banques, chambre de
compensation, banque centrale et autres intermédiaires,
-
les coûts des dépôts, conservation et comptabilisation par le vendeur
-
les coûts de gestion des risques de crédits et de liquidité et autres coûts de
collatéralisation et garantie externes, de gestion des systèmes de back-up et de gestion
des files d’attente.
•
un coût financier des frictions causées par la détention d’un portefeuille d’actifs, actions et
autres instruments qui maximisent les « utilities » : Ce coût est lié au choix d’un
portefeuille différent de celui que l’intermédiaire aurait choisi hors friction.
725
Humphrey D.B., Keppler R., Montes-Negret F., Cost recovery and pricing of payment services : theory,
methods and experience, World Bank August 1997
726
Berger A.N., Hancock D., Marquardt J. C., A framework for analysing efficiency, risks, costs, and
innovations in the payment system, Journal of Money, Credit and Banking, November 1996
458
A titre d’exemple, il peut s’agir de la détention d’un portefeuille plus liquide avec retour sur
investissement plus faible, choisi parce qu’il est plus facilement transformable en actifs
liquides.
•
un coût réel et financier lié au délai du mécanisme de règlement. Ce coût s’assimile à un
coût d’opportunité tant que le règlement n’est pas effectué.
En France, la tarification à l’utilisation a lieu d’être au travers d’une commission de
mouvement.
Il y a dix ans, cette commission de mouvement en Sicovam s’établissait à 1,11 € (contre 1,39
€ deux ans auparavant).
Euroclear réservant l’information relative aux tarifs exclusivement à ses participants, nous ne
sommes pas en mesure de comparer ces chiffres avec les tarifs pratiqués aujourd’hui.
Cependant certains dépositaires publient leurs tarifs et nous les reprenons pour la commission
due lors d’un traitement d’une livraison contre paiement.
•
Clearstream Francfort :
-
0,125 € par transaction domestique pour une livraison contre paiement traditionnelle,
-
0,50 € par transaction traitée en Real-Time Settlement,
-
5,00 € par transaction transfrontalière,
•
Clearstream Luxembourg :
-
entre 2,20 € par transaction, pour un nombre de transactions compris entre 1 et 500,
jusqu’à 0,35 € pour plus de 35 000 transactions dans le cadre d’une transaction interne
(c’est-à-dire entre deux participants de Clearstream ou avec un participant d’Euroclear
Bank),
-
au cas par cas selon les pays pour une transaction transfrontalière (à titre d’exemple, le
coût pour une transaction transfrontalière avec les Etats-Unis ou les pays européen est
identique à celui d’une transaction interne),
•
DTCC : 0,75 $ par transaction (gérée dans le système CNS – Continuous Net Settlement),
459
•
HKCSS 727 :
1 $ minimum par transaction,
•
Euroclear Nederland :
1,35 € par transaction.
Il est difficile de comparer les tarifs, mais quelques constatations s’imposent :
-
Le dépositaire néerlandais propose des tarifs stables par rapport à ceux pratiqués par
Euroclear France en 1994,
-
Le tarif de Clearstream
Francfort est particulièrement bas et, semble-t-il, le plus
compétitif,
-
DTCC a diminué l’an dernier ses tarifs de 10 %.
Enfin comme abordé plus haut, dès qu’il s’agit de tarifer le dénouement d’une transaction
transfrontalière, la commission augmente considérablement.
Si les tarifs semblent se stabiliser depuis quelques années, cela s’explique par le coût de
développement des nouvelles infrastructures. A titre d’exemple, citons Euroclear France qui a
supporté seule le coût de développement et d’installation de son système RGV.
Pour illustrer ce phénomène, nous citerons le développement de la puissance informatique
d’Euroclear France. Celle-ci était de 1 Mips (Millions d’instructions par seconde) en 1981,
elle est passée à 80 et 182 Mips respectivement en 1989 et 1994 ! Tandis que le premier
ordinateur (IBM 1401) remplaçait la mécanographie en 1962 …
8. Une ébauche de conclusion de l’enquête
Afin de conclure sur l’efficience ou la non – efficience des systèmes de règlement-livraison
de titres français, nous reprenons ici nos hypothèses et nos indicateurs.
727
Cf. § 3.2
460
8.1 Dépositaire central de titres et contrepartie centrale
Notre première hypothèse d’efficience est la mise en place d’un dépositaire central de titres et
d’une contrepartie centrale, comme rappelé dans le tableau 26.
Tableau 26 : Hypothèse 1
H1 Dépositaire central de titres
Indicateurs
H1.1 Dépositaire central & dématérialisation
Délai de livraison
des titres
H1.2 Netting multilatéral
Nombre de mouvements avant et après netting
H1.3 Contrepartie centrale
Montant de la collatéralisation
-
Le délai de dénouement est obligatoirement réduit lorsque les livraisons sont scripturales
ou, mieux encore, lorsque les titres sont dématérialisés.
La comparaison des délais de livraison avant et après la dématérialisation des titres en France
est impossible. Mais nous soulignerons que les suspens sur les valeurs non encore
dématérialisées à ce jour sur la place parisienne, et non admises en Euroclear France ont été
évalués entre 1 et 6 mois 728.
-
Un netting multilatéral avec une contrepartie centrale (condition sine qua none) réduit le
nombre de mouvements à dénouer et le besoin de collatéralisation.
Le rapport Nombre de mouvements Euroclear France / Nombre de négociations boursières est
passé de 57,69 à 30,85 % entre 1996 et 2000. Le netting permet donc de minimiser les
dénouements.
La part des mouvements de collatéralisation dans le total des mouvements Euroclear, en
capitaux, est passé de 2,3 à 1,5 % entre 1998 et 2003, démontrant qu’une contrepartie centrale
apporte une économie de collatéral 729.
Par ailleurs, cette économie est d’autant plus importante désormais chez Euronext que
Clearnet offre, depuis 2002, à ses participants la possibilité de concentrer tous leurs appels de
marge et dépôts de garantie en un seul lieu (la banque centrale pour leurs dépôts espèces ou le
dépositaire central de titres pour leurs collatéraux actions ou obligations).
728
729
Cf. Chapitre IV, § 1.2
Cf. § 3 du chapitre présent
461
Enfin, les coûts opérationnels de Clearnet ont crû modérément, + 1,8 % entre 2001 et 2002, et
ont même diminué quant à leur proportion dans le revenu total (70 % du revenu net contre 76
% en 2001). La diminution de cette part relative incombe à une baisse significative des coûts
informatiques de 11 % 730.
8.2 Livraison contre paiement et délai de place
Notre seconde hypothèse requiert la technique de livraison contre paiement dans un délai
imposé par les autorités et respecté par tous (tableau 27).
Tableau 27 : Hypothèse 2
H2 Livraison contre paiement avec délai de
Indicateurs
place
H2.1 Délai de place
Evolution des délais de place
H2.2 Livraison contre paiement et préTaux de suspens
appariement
Nombre d’avis d’opéré répondus et acceptés
H2.3 Recyclage des mouvements non dénoués
Taux de suspens
-
Un délai de place rendu obligatoire par les autorités permet de réduire le temps de
traitement post-bourse.
Une réduction du délai de dénouement à J+1, aux Etats-Unis permettrait de réduire
l’exposition aux risques des participants à hauteur de 250 milliards $, et induirait une
économie de 2,7 milliards § par an 731.
-
La livraison contre paiement permet de réduire les suspens et le pré-appariement optimise
la gestion des avis d’opéré et donc le dénouement.
Le taux moyen de suspens, en Euronext Paris, s’établit à 0,1675 %, et ces suspens sont levés,
pour plus de 90 %, le lendemain 732.
La part des avis d’opéré refusés dans le total des avis répondus s’établit, en moyenne sur la
période 1997 – 2003, à 0,99 %. Ce chiffre nous semble correct mais le même rapport en
capitaux reste trop élevé, à 15,27 %.
730
Clearnet, Facts and Figures 2002
Cf. Chapitre IV, § 3.2
732
Cf. § 4.2 du chapitre présent
731
462
Par ailleurs, deux indicateurs nous semblent encore trop faibles 733 : le délai d’ajustement des
avis d’opéré par les intermédiaires, en J, n’est que de 65,71 % en moyenne sur sept années de
référence, et le délai d’émission en J des avis d’opéré par les sociétés de bourse n’atteint que
97,77 % en 2003. Ces indicateurs évoluent favorablement certes, mais insuffisamment pour
démontrer une parfaite efficience du système.
En conséquence, les systèmes français sont efficients eu égard aux taux de suspens mais
demeurent largement perfectibles en matière de gestion des avis d’opéré.
8.3 Irrévocabilité et mise à disposition de titres et d’espèces
Notre troisième hypothèse stipule qu’une irrévocabilité en cours de journée permet aux
intermédiaires d’optimiser leur gestion de titres et d’espèces (tableau 28). Mais au-delà de
cette rentabilisation des avoirs, il convient également que les gestionnaires de systèmes
offrent des prestations en matière de prêt de titres et d’espèces afin d’éviter les situations de
blocage.
Tableau 28 : Hypothèse 3
H3 Irrévocabilité des mouvements &
mécanismes de fluidification des
dénouements
H3.1 Optimisation des trésoreries titres et
espèces
H3.2 Système de prêt-emprunt de titres
liquide, pensions livrées et crédits intradays
H3.3 Collatéralisation
Indicateurs
Rentabilité des avoirs en titres
Nombre de prêt-emprunt de titres sur
demande et automatiques,
Nombre de pensions livrées et crédits
intradays,
Nombre de pensions livrées intradays,
conservatoire et overnight
Coût de la collatéralisation
Montant de la collatéralisation
Cette hypothèse a été la plus difficile à tester lors de nos enquêtes terrain et statistique.
Comme évoqué plus haut, les intermédiaires financiers sont incapables de fournir des
éléments quant à la rentabilisation de leurs avoirs en titres.
733
Cf. § 4.3 du chapitre présent
463
En outre, Clearstream n’a pas jugé bon de nous fournir des chiffres sur son activité de prêts de
titres automatique.
Tout au plus, il ne nous est permis que de constater qu’un système de prêts automatiques
permettait de minimiser, voire de supprimer, les suspens dans le système inter – SVT, et que
l’activité pensions livrées s’accroît au fil du temps.
Enfin, comme précisé ci-dessus, on peut éventuellement conclure à une meilleure gestion des
besoins de titres et d’espèces chez les participants d’Euroclear France. En effet, le nombre de
prêts de titres de gré à gré diminue, ainsi que le nombre de pensions overnight.
Aussi cette hypothèse n’est-elle confirmée que partiellement et sur des supputations et
suppositions de notre part.
8.4 Monnaie centrale et dénouements multidevises
Selon nous, au même titre que la gestion des comptes titres et l’enregistrement post-bourse
des transactions doivent appartenir au dépositaire central, au titre de sa fonction notariale, la
gestion des comptes espèces et l’enregistrement des transferts d’espèces consécutifs aux
négociations boursières restent du ressort de la banque centrale. Aussi notre quatrième
hypothèse requiert-elle un règlement en monnaie centrale (tableau 29).
464
Tableau 29 : Hypothèse 4
H4 Règlements en monnaie centrale et
multidevises
H4.1 Banque de règlement = banque centrale
H4.2 Monnaie centrale et monnaie
commerciale
H4.3 Règlement multidevise
Indicateurs
Nombre de participants disposant d’un
compte espèces en banque centrale
Contre valeur espèces des mouvements
enregistrés en Euroclear France
Nombre de sous-affiliés (c’est-à-dire sans
compte espèces en banque centrale)
Pourcentage des règlements en devises hors
euro dans total des règlements
Nombre de virements internationaux
Coût de traitement d’une opération
transfrontalière
Les risques d’insolvabilité sont de facto réduits lorsque la banque de règlement est la banque
centrale. Cependant, disposer d’un compte titres en Euroclear France et d’un compte espèces
en Banque de France est source de contraintes pour certains établissements ; et ce d’autant
plus qu’on évalue le seuil de rentabilité dans les activités post-bourse à 2 000 milliards € de
conservation.
Aussi la tendance à opter pour un sous-traitement des fonctions de conservation augmentera-telle dans les années à venir.
Il est donc important pour un dépositaire de maintenir l’option de règlement en monnaie
commerciale, pour continuer à attirer vers lui un maximum de participants.
Cette option de dualité des règlements chez Euroclear concourre à préserver une efficacité
commerciale assise sur les attentes de ses participants.
En matière de règlement multidevise, le débat reste ouvert. Pour nous, un dépositaire doit
pouvoir l’offrir sans être confronté au risque de change, dont la gestion ne relève pas de ses
fonctions notariales.
Là se situe un point crucial de discorde entre dépositaires nationaux et internationaux au
même titre que l’activité de prêts.
Clearstream et Euroclear ont, depuis quelques années, le statut de banques. Elles sont donc
certes soumises à des contraintes réglementaires fortes, mais elles peuvent accumuler des
bénéfices conséquents dans les activités connexes, tels les prêts de titres et les règlements
multidevises. Selon nous, cette politique va à l’encontre des fonctions historiquement
465
dévolues aux dépositaires. C’est peut-être la raison pour laquelle elles ne diffusent pas de
chiffres en la matière !
Les systèmes français apparaissent efficients au regard de la gestion de RGV en monnaie
centrale et de Relit en monnaie commerciale, mais il leur resterait à accroître leur efficacité
pour les dénouements des transactions transfrontalières.
Conclusion
Les systèmes français Relit et RGV peuvent être considérés, selon nous, comme efficients,
même si certaines fonctionnalité pourraient être davantage efficaces.
En effet, il conviendrait peut-être :
-
D’étendre la technique du netting à l’ensemble des participants,
-
D’améliorer la gestion des avis d’opéré chez les participants,
et éventuellement :
-
De développer un système de prêt-emprunt automatique et
-
De proposer des règlements multidevises.
Le risque « zéro » n’existe pas, mais le système français s’en approche eu égard aux suspens,
et proposera sans doute rapidement un délai de dénouement de J+1, pour finir par une gestion
post-bourse en temps réel, dans un avenir plus lointain.
466
Conclusion Générale
Notre travail de recherche a traité un sujet longtemps écarté des réflexions relatives à la
finance de marché.
Les années quatre-vingts se sont, en effet, focalisées sur les activités marché stricto sensu, tant
sur le plan opérationnel dans les établissements financiers, que sur le plan de la recherche
universitaire.
Pourtant, les professionnels ont compris les enjeux techniques, commerciaux voire
stratégiques des activités de back-office. Certains théoriciens ont commencé à s’interroger, il
y a une dizaine d’années, sur le fonctionnement des systèmes de paiement. Ces derniers sont
sources de risques, et également, toutes les économies par ricochet. Des règles ont été édictées
face à la montée des risques. Et progressivement, les réflexions se sont étendues aux systèmes
de règlement-livraison de titres.
Mais les travaux universitaires, dans ce domaine, sont rares. Aussi avons-nous essayé
d’étudier les enjeux de l’industrie du titre et des procédures de règlement-livraison de titres
pour compléter les études réalisées jusqu’alors sur les marchés financiers.
Il n’a jamais été question, pour nous, de refondre l’activité post-bourse. Nous sommes
simplement partis des systèmes existants, élaborés par les autorités de marchés conscientes,
de plus en plus, du besoin de stabilité des économies de marché.
Une approche globale est désormais requise pour réfléchir à l’efficacité d’un marché :
Créer de nouveaux produits pour attirer les émetteurs sur le marché primaire, améliorer les
techniques de négociation pour capter les investisseurs, accroître la liquidité des titres et la
transparence des marchés pour ne perdre ni les investisseurs ni les émetteurs, ne suffisent plus
aujourd’hui dans un univers concurrentiel.
Il faut désormais maîtriser les procédures post-bourse.
A défaut, les investisseurs régleront et livreront leurs opérations auprès d’un autre dépositaire
central plus performant. Et au-delà des conséquences commerciales que peuvent engendrer
des systèmes non performants, la pérennité du système économique tout entier peut être
remise en question.
467
Pour autant, les gestionnaires de systèmes de règlement-livraison de titres l’ont compris.
Chaque système se conforme, sinon à des obligations, au moins à des normes édictées par les
instances supranationales. Les places dotées de dépositaires centraux depuis plusieurs
décennies se sont adaptées aux exigences de fonctionnalité et de minimisation des risques ; les
autres places, qualifiées d’émergentes, se sont construites sur le modèle des premières, ou
avec elles. Elles ont donc été rapidement efficientes.
Notre étude empirique s’est essentiellement basée sur le système français nonobstant
l’indisponibilité ou la non-divulgation de certains éléments. Des fonctionnalités proposées,
selon nous, comme des éléments d’efficience ne sont pas offertes en Bourse de Paris. Aussi
avons-nous, dans la mesure du possible, cherché des indicateurs sur d’autres places guère plus
faciles à obtenir que sur la place parisienne.
Or, on sait combien il a été difficile d’obtenir certains éléments sur notre place financière, on
imagine donc quelles ont été nos difficultés d’obtenir des renseignements sur d’autres places !
Au regard de notre étude empirique, il n’est pas fortuit de constater que le système de
règlement-livraison de titres français est efficient. Certains argumenteront qu’il le sera
davantage encore lorsque le temps de traitement post-bourse sera réduit de J+3 à J.
Si une réduction du délai de dénouement de J+3 à J est à l’ordre du jour sur les grandes places
financières internationales, nous avons volontairement éludé cet élément de nos travaux
empiriques. Car, pour tester de l’efficience d’un système de règlement-livraison, il convenait,
à notre sens, de se figer sur des indicateurs palpables.
Si l’idée nous était venue de traiter, en début de recherche, un élément prospectif, il y a fort à
penser que nos travaux auraient été vite dépassés par le temps.
A titre d’exemple, il est une prestation non efficiente à ce jour, au moins en Europe, le
dénouement des transactions transfrontalières. Il nous a semblé opportun de souligner ce
phénomène tout au long de nos travaux et de conclure à l’inefficience en la matière dans notre
hypothèse de règlement multi - devise.
468
Aussi est-ce sur ce point crucial que se situent les enjeux des dépositaires centraux et autres
établissements financiers dans un avenir très proche.
Rueff avait précisé, en son époque, que l’Europe se fera par la monnaie ou ne se fera pas ;
aujourd’hui nous confirmons que l’unification totale des marchés de capitaux européens se
fera par la standardisation des procédures de marché et post – marché ou ne se fera pas.
Mais les règlements-livraisons transfrontaliers sont, à eux tous seuls, un vaste sujet de
réflexion.
En conclusion, nous rapporterons présentement, les conditions d’efficience retenues par les
professionnels, premiers utilisateurs des systèmes.
Si certains professionnels requièrent la gestion des dénouements en temps réel, d’autres
estiment qu’il s’agit d’abord d’uniformiser les délais sur toutes les places avant de les réduire.
Par contre, tous les professionnels s’accordent à qualifier un système de règlement-livraison
d’efficient comme celui qui offre un taux de dénouement élevé, un règlement en monnaie
centrale et une irrévocabilité en temps réel.
En conséquence, un système efficient est celui qui minimise les défaillances, réduit le taux de
suspens au maximum, et interdit la remise en cause des flux engagés qu’elle qu’en soit la
cause.
Si le risque « zéro » n’existe pas, un système de règlement-livraison de titres doit tendre vers
le « 0 » suspens et le « 0 » défaut.
Enfin, tout système doit être sécurisé, disponible et réactif face aux évolutions du marché.
Le système RGV est donc, selon les indicateurs fondamentaux retenus et selon nos
interlocuteurs, efficient.
Il n’en demeure pas moins, à notre avis et comme abordé en conclusion du chapitre V, que
des améliorations devraient cependant être apportées en Bourse de Paris.
Lorsque la Bourse de Paris aura satisfait complètement les exigences des professionnels, elle
aura réussi son pari de rationalisation optimale de la gestion des titres, engagé il y a plus de
469
cinquante ans. Elle a été la première place à avoir dématérialisé l’intégralité de ses valeurs,
qu’elle soit la première désormais à faire tendre son taux de suspens vers zéro !
Si elle ne le fait pas seule, qu’elle le fasse, mieux encore, au niveau de la zone euro, via le
Groupe Euroclear. Ipso facto, l’industrialisation des titres sera à son apogée, attirant les
intermédiaires financiers, les émetteurs et les investisseurs du monde entier.
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