Les rois de la pétanque sont en ville

Transcription

Les rois de la pétanque sont en ville
Chabrey Touche-à-tout, Gerhard S. Schürch
Transports publics
Le Syndicat du personnel des transports n’apprécie guère le système des clientsmystères, ces quidams engagés par les compagnies pour vérifier incognito la
ponctualité, la propreté des véhicules ou encore la qualité des informations données
aux voyageurs. Il a mené hier une action de sensibilisation en gare de Fribourg.
fête demain les 40 ans de son atelier de
gravure sur bois et de sa maison d’édition.
p. 10
p. 14
Régions

9
LA LIBERTÉ
VENDREDI 17 JUIN 2016
Les membres des diverses amicales de pétanque de la ville se rencontrent chaque semaine. Le mercredi soir pour les boulistes de la Neuveville (photo principale), le dimanche pour ceux du Jura (en haut à gauche) et dès qu’il
fait beau pour ceux de Pérolles. Charly Rappo/Alain Wicht
La pétanque a le vent en poupe à Fribourg. Rencontres avec des passionnés de la boule et de l’amitié
Les rois de la pétanque sont en ville
K STÉPHANIE SCHROETER
Fribourg L Il pleut des cordes. Un temps
à ne pas mettre un bouliste dehors, serait-on tenté de penser. Qu’importe les
caprices de la météo, ce ne sont pas
quelques gouttes, même coriaces, qui
vont dissuader les membres du Club de
pétanque de la Neuveville de jouer.
Comme chaque mercredi soir, ils sont
là, toutes générations confondues, sous
les marronniers au bord de la Sarine
près de l’école du quartier. En hiver, ils
ont rendez-vous au boulodrome, dont
les pistes sont couvertes, dans le quartier
voisin de l’Auge.
Ils sont une quarantaine de membres
fidèles au poste, sur les 150 que compte
le club, animés par une même passion,
celle de la pétanque évidemment mais
surtout celle de la rencontre, de l’amitié.
«Nous sommes le plus grand club de
pétanque de la ville qui en compte six»,
tient à préciser son président, Arnold
Stritt. Et d’insister sur le fait qu’il ne
compte aucun licencié. «On ne participe
donc pas à des championnats. On reste
libres de jouer entre nous et d’appliquer
les règles avec souplesse. On est plus
cool!»
«Ça permet de se vider la tête»
Car la pétanque, ce sont d’abord les
copains de la Basse ou d’ailleurs, de tous
âges et de toutes nationalités. Des joyeux
drilles tour à tour morts de rire et
concentrés au bord de la piste. «Une
amicale avec un grand A et sans
contrainte», résume Arnold Stritt.
«Ça permet de se vider la tête», explique Manuela, une des seules femmes
du club. «Il y a beaucoup de gros mots,
parfois même en suisse allemand»,
plaisante-t-elle en évoquant encore la
présence de nombreux «si…» qui ponctuent les phrases de tout bouliste qui
se respecte.
Tout comme la bière, un peu de pastis
et quelques cigares qui se méritent à la
fin des rencontres ou à la pause, c’est
selon. Oui mais attention, jamais au bord
de la piste. «Ce n’est pas très conseillé si
on veut faire des résultats», lâche JeanCharles Rotzetter, vice-président du club
fondé en 1962 mais qui a regagné un
nouveau souffle il y a vingt ans.
Un peu plus haut, le paysage et le climat sont certes différents dans le quartier de Pérolles mais le plaisir du jeu et
la quête d’un moment de détente sont
identiques. Quelques sexagénaires s’activent sous un soleil de plomb en ce vendredi après-midi de juin. Bernard, Francis, André et Robert dit «le râleur» tirent
ou pointent gaiement. Et cela fait deux
ans que ça dure. «On joue dès qu’il fait
«On aimerait
aussi former des
gamins qui, l’été,
sont là» Christian Riedo
beau. Mais en fin de semaine, on laisse
la place aux gens», indique François
Buser, président du Club de pétanque de
Pérolles créé en 2014 et qui compte
aujourd’hui une trentaine de membres.
tique à moindre frais et de surcroît disponible à proximité de chez soi. «Il n’y a
jamais de perdant. Si on perd, on est
heureux car on est certain d’avoir une
revanche», se réjouit Bernard.
Une carte de visite
Deux pistes ont depuis vu le jour et
ornent le parc du Domino. «C’est un lieu
de rencontre. Beaucoup de personnes
qui se croisaient ont appris à se connaître
en jouant à la pétanque. C’est une carte
de visite pour le quartier et ça l’anime
aussi. On aimerait qu’il y ait plus de
femmes et de jeunes», explique celui qui
a longtemps tenu le kiosque du Domino.
Robert, qui se révèle être davantage
charmeur que râleur, estime que la
pétanque c’est avant tout de la gymnas-
Le dimanche aussi
Même enthousiasme dans le quartier du
Jura où le dimanche, c’est jour de pétanque. Les Amis de la boule ont rendezvous derrière le minigolf. Fidèles au
poste, ils sont une bonne dizaine,
membres du club fondé il y a quatre ans.
«On fait des grillades quand il fait beau,
on a vraiment une bonne ambiance»,
résume Christian Riedo, président du
club.
Le septuagénaire n’est pourtant pas
un bouliste du dimanche. Il a été, il y
a quelques dizaines d’années, champion fribourgeois et cela à trois reprises. «J’ai aussi créé le club du campi ng de la pisci ne de Payer ne»,
indique-t-il non sans fierté. Et aujourd’hui le voilà au Jura, bien décidé
à se battre pour obtenir une troisième
piste. «On en a besoin car beaucoup
de gens veulent jouer. On aimerait
aussi former des gamins qui, l’été, sont
là. La ville nous a donné son accord
mais on verra si le projet ne va pas être
enfoui sous une pile de dossiers…»
Ici, comme ailleurs, une seule règle prévaut: pas de bière sur le bord de la piste,
ça peut faire du chenit. Une deuxième
aussi: la rigolade avant tout loin des tracas
des licenciés (voir ci-après). «On est un
groupe sympa, on ne se prend pas la tête!
Ça me permet de décompresser de ma
semaine de travail», assure Stéphane qui,
lui aussi, attend la troisième piste avec
impatience. Tout comme Lucienne, la
mascotte du club. Cette coquette octogénaire habitant le quartier a toujours un
truc à grignoter ou à boire dans son caddie même si elle avoue ne rien connaître
à la pétanque. Un rendez-vous entre
amis… L
Conviviales, les amicales ont le vent en poupe
Agissant comme sport d’intégration, la pétanque populaire
compte toujours plus d’adeptes depuis une dizaine d’années. L’intérêt pour les clubs de licenciés est, lui, en baisse.
Pas un week-end sans qu’il y ait un tournoi en ville ou ailleurs
organisé par des clubs ou même des entreprises. La pétanque
est à la mode, prisée principalement pour son côté convivial.
Même la Chambre fribourgeoise du commerce s’y est mise en
organisant récemment un tournoi de boules afin de «réseauter»
dans un cadre informel.
Mais ce sont surtout les amicales, des clubs qui ne comptent
pas de licenciés, qui ont du succès. «Elles ont le vent en poupe
car elles ont moins de contraintes», remarque Pierre Gisler, chef
du Service des sports de la ville qui recense environ 250 membres,
toutes catégories confondues, en ville. Quasiment chaque quartier dispose de pistes. «Ce sport subit un engouement mesuré
mais constant qui réunit plusieurs générations. Il agit comme
sport d’intégration. Nous avons une demande occasionnelle
d’installations de pistes souvent par des associations de quartier.
Une analyse est effectuée en fonction du lieu, des accès et des
passages. Selon les conclusions, il nous arrive de les soutenir
financièrement», ajoute le responsable.
Ancien président de l’Association cantonale de pétanque
et actuel responsable de l’Union des clubs de pétanque de la
ville de Fribourg, Gabriel Daguet constate également une
diminution d’intérêt pour les clubs affiliés. «La pétanque
populaire fonctionne de mieux en mieux depuis environ dix
ans, contrairement à celle de compétition. Il n’y a pas besoin
de grandes infrastructures. Même le club de foot d’Ependes
et celui de hockey du Mouret ont organisé des tournois, c’est
dire! Les licenciés sont plus rigides dans l’application du
règlement alors que les membres des amicales sont plus
souples», explique-t-il en précisant qu’il existe en Suisse sept
associations régionales de pétanque dans les cantons de
Genève, Vaud, Neuchâtel, Valais, Fribourg, Jura et Suisse
alémanique.
Selon Gabriel Daguet, si la pétanque «urbaine» a tant de
succès, c’est avant tout à cause des infrastructures disponibles en ville. Comme le boulodrome dans le quartier de
l’Auge qui réunit plusieurs clubs de la ville de Fribourg. «Il
compte trente terrains qui pourraient potentiellement accueillir soixante équipes. De nombreuses équipes et même
des entreprises et sociétés viennent y jouer», note-t-il en
relevant encore que si la pétanque de compétition perd du
terrain c’est aussi pour des questions financières. «On gagne
très peu. Ce n’est pas un sport intéressant pour ceux qui
jouent pour de l’argent. Et en plus, il y aussi la tradition de
payer la tournée aux perdants…» L SSC