Picasso-Ã -Barcelone..

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Picasso-Ã -Barcelone..
 Picasso à Barcelone I
Barcelone, où s’installe la famille Picasso le 21 septembre 1895, est alors la première ville d’Espagne
et la capitale de la Catalogne, alors en pleine expansion économique et artistique. La ville est
florissante : l’industrie du coton et la sidérurgie développent les activités portuaires et enrichissent une
bourgeoisie, éclairée et libérale, qui, prenant alors conscience de sa valeur, va se tourner vers les
artistes et architectes modernistes pour améliorer son cadre de vie. Avant de voir les années
barcelonaises de Picasso, avant le premier voyage à Paris à l’automne 1900, parlons de la ville, très
brièvement de son histoire, et des changements qu’elle connaît à partir des années 1860 pour mieux
comprendre la réalité du milieu dans lequel le jeune homme va s’insérer sans difficultés et s’épanouir.
Barcelone est une très ancienne cité fondée par des Celtibères (les Celtes ayant envahi la péninsule
ibérique au 7ème siècle av. J.-C.), du nom de Laietani (Laietins) installés probablement sur la colline
actuelle de Montjuíc. Des échanges commerciaux se développent rapidement avec les Grecs et les
Phéniciens avant l’arrivée des Romains débarquant des troupes en Espagne en 218 av. J.-C. Les
Romains s’installent dans la zone se trouvant au pied de Montjuíc et fondent une ville selon un
principe bien connu : un axe nord-sud (le cardo) coupé par une voie principale est-ouest (le
decumanus) formant un angle sur lequel sont construits le temple romain et le forum. La ville
s’appelait alors Barcino.
En 415, les Wisigoths, convertis au christianisme, s’emparent de Barcelone et en font leur capitale
puis les Musulmans débarquent à Gibraltar en 711 et s’élancent à leur tour à la conquête de la
péninsule et prennent Barcelone assez rapidement. La ville est libérée par Louis le Pieux (778-840),
fils de Charlemagne, en 801. Les comtes chrétiens occupent donc le nord de l’Espagne et prennent le
nom de comtes-rois de Catalogne, c’est sous leurs très longs règnes que naît le sentiment nationaliste
catalan qui perdure aujourd’hui comme vient de le démontrer le scrutin symbolique du 9 novembre
2014 (les premiers documents parlant de Catalunya remontent au 11ème siècle). En 1137, le mariage du
comte Ramón Berenguer IV (1113-1162) avec l’héritière de la couronne d’Aragon, Pétronille, marque
un tournant décisif dans l’histoire de la Catalogne en permettant une expansion territoriale et
économique. L’expansion continuera grâce à son petit-fils Jaume 1er (1208-1276) et à ses héritiers qui
s’empare des îles Baléares, de Valence et de ses environs, du Roussillon et de Montpellier, mais
également de la Sicile et de la Sardaigne. La Catalogne est alors un véritable empire et Barcelone
bénéficie d’un réel développement économique et commercial et les comtes-rois laissent aux citoyens
le gouvernement de leur ville, la première assemblée municipale est créée en 1249, le conseil des
Cents, elle administra la ville jusqu’en 1714. En 1283, apparaissent les Corts Catalanes, parlements
régionaux composés de représentants de la noblesse, du clergé et des bourgeois, marchands pour la
plupart. Le quartier dans lequel habitait la famille Picasso était encore largement constitué de
demeures gothiques et Renaissance, en particulier autour de la carrer de Montcada où se trouve
l’actuel musée Picasso de Barcelone. Fin 15ème siècle sont édifiés les Drassanes, les chantiers navals,
dans lequel se trouve l’actuel musée de la Marine.
En 1479, la réunion des couronnes de Castille et d’Aragon entraîne la fin de la Catalogne comme
entité indépendante, mais elle conserve une forte autonomie. Les siècles passent et survient la guerre
de Succession d’Espagne (1702-1714). Le roi Charles II mourut sans héritier en 1700, et la guerre
tourna au désavantage de la Catalogne qui avait rallié une coalition anti-française. Or, la France gagna
la guerre et mit sur le trône d’Espagne un Bourbon, le duc d’Anjou, qui devint roi sous le nom de
Philippe V. Barcelone subit un siège terrible et fut bombardée. Elle se rend le 11 septembre 1714 et le
nouveau souverain supprima l’autonomie de la Catalogne qui perdait ainsi ses privilèges, ses
possessions et l’usage de sa langue. Ce qui n’empêcha pas la ville de se développer puisque
l’interdiction de commercer directement avec les Amériques fut levée à la fin du 18ème siècle. En 1898,
la ville est toute puissante même si l’Espagne perd ses dernières colonies, Cuba, Puerto Rico et les
Philippines.
Après l’histoire, l’urbanisme. Barcelone connaît une profonde mutation urbanistique dans la seconde
moitié du 19ème siècle comme beaucoup de villes, Paris, avec les travaux du baron Haussmann, Vienne
avec la création du Ring et, début 20ème siècle, Chicago grâce aux travaux de Daniel Burnham. Il
s’agissait pour Ildefons Cerdà d’élaborer un Plan des environs de Barcelone et d’un projet pour son
amélioration et son expansion (1859). Il a l’idée d’abattre les fortifications érigées par les Wisigoths et
de relier le secteur de Gracía à la Barcelone médiévale en créant un élégant quartier conçu en damier.
On donne à ce quartier le nom d’Eixample, Ensanche en castillan, qui signifie l’expansion ou
l’élargissement.
La vue aérienne de l’Eixample, prise par Père Vivas et Jordi Puig, nous permet de découvrir
l’originalité de l’expansion urbanistique, s’y inscrivent désormais puisque la photographie est récente,
le Temple expiatoire de la Sagrada Familia, l’avenue de Gaudí menant à l’hôpital de la Santa Creu i
Sant Pau, et de l’autre côté, l’avenue Diagonal menant à la Place des Gloires catalanes. En 1888, autre
événement d’importance, Barcelone accueille l’Exposition universelle. L’emplacement choisi fut celui
de l’ancienne citadelle construite en 1714, démantelée à partir de 1869 et réaménagé à partir de 1881.
C’est un lieu (Entrée du parc de la Citadelle à la fin du 19ème siècle) où Picasso aimait se promener,
ce n’était pas très loin de l’endroit où il habitait avec sa famille : Parc de la Citadelle, avril 1896,
Barcelone, musée Picasso, parc où l’on trouvait aussi quelques « folies » comme celle-ci, Frederic
Bordas i Altarriba, Reproduction des montagnes de Montserrat dans le parc de la Citadelle,1888Barcelone, Archives photographiques de Catalogne, que Picasso peignit, Montagnes artificielles de
Montserrat au parc de la Citadelle, 1895-1896, Barcelone, musée Picasso.
L’entrée de l’exposition, Arc de triomphe dû à Josep Villaseca i Casanovas, et quelques édifices
existent encore par miracle (pourrait-on dire puisque la construction éphémère est le principe même
d’une exposition universelle) : le Château des trois dragons, ancien café-restaurant construit par Lluís
Domenèch i Montaner, devenu depuis le musée de Zoologie frappa les esprits par son allure
mauresque et médiévale. Les abords de l’Exposition universelle furent aménagés, un hôtel
international pouvant accueillir 2000 personnes fut construit par Domenèch i Montaner et détruit
immédiatement à la fermeture de l’exposition, en revanche, la promenade de bord de mer fut reprise et
reçut le nom de Promenade de Colón et un monument à la mémoire du navigateur fut donc élevé en
1888 sur la place Portal de la Pau. Pablo Picasso nous en donna une image en 1917, Avenue Colomb,
Barcelone, musée Picasso.
Barcelone est aussi, malgré ce que l’on pourrait croire en admirant ces exemples d’urbanisme et
d’architecture, une ville ou sévit la misère. Pedro García Faría dénonce, dans son ouvrage intitulé
L’Insalubrité des habitations de Barcelone publié en 1890, les conditions de vie de la classe ouvrière
affirmant qu’il avait été choqué de voir que la vie humaine pouvait encore se développer dans de si
détestables conditions. D’où les épidémies de tuberculose, les anémies persistantes, les maladies de
peau qui touchaient particulièrement les enfants qui travaillaient dans les usines, parce qu’ils étaient
les plus faibles. La carrer Filateras dans le quartier médiéval de Barcelone est un exemple de ces rues
aux logements insalubres sans parler du barrío Gotíco, le quartier gothique, ou le barrío Chino, le
quartier chinois, qui allait au-delà de la Rambla, vers ce qui est maintenant le quartier du Raval. La
carrer Filateras fut détruite en 1908 pour permettre la construction de la vía Laietana.
Le mouvement de renouveau que l’on nomme Renaixança (la Renaissance) est avant tout un
mouvement culturel suscité par des intellectuels qui s’intéressent à la langue et à la littérature
catalanes, mais qui s’élargit à la philosophie au théâtre, aux arts et à l’architecture. La naissance du
mouvement coïncide avec la parution de la publication de Bonaventura Carles Aribau, La Patrie, en
1883. Le mouvement avait été précédé de festivités à la gloire de la langue catalane, Les Jeux Floraux
en 1859, les poèmes de Jacint Verdaguer et de Victor Balaguer, la création de la revue La Renaixança
en 1871 et l’apparition en 1879 du premier journal publié en catalan, le Diarí Català.
Le renouveau de l’architecture s’incarne en la personne d’Antoní Gaudí i Cornet, et Picasso a au
moins vu, à défaut des premiers travaux de la crypte en 1882, les premiers développements de son
édifice le plus célèbre : le Temple expiatoire de la Sagrada Familia, dont voici quelques images au
cours des années : la Sagrada Familia en 1898, 1899, 1908, 1926 et de nos jours. Gaudí a suivi les
cours de l’Ecole supérieure d’architecture de Barcelone dont il est diplômé en 1878 et lit en parallèle
les œuvres de John Ruskin. Il commence sa carrière en travaillant, auprès d’architectes confirmés, aux
bâtiments construits dans le parc de la Citadelle. Sa carrière démarre grâce à la confiance que lui
manifeste l’industriel Eusebí Güell qui lui commande son hôtel particulier près de la Rambla et le parc
Güell, au même moment débutent les travaux de la Sagrada Familia, puisqu’il en reçoit la commande
en 1882. Construite par souscription publique, ce qui est encore le cas actuellement, et par les revenus
de la billetterie, le vrai démarrage des travaux a lieu dans les années 1890 grâce au don d’une
bienfaitrice anonyme, Gaudí peut avancer sur l’abside gothique. Il aura le temps d’achever la façade
de la Nativité avant sa mort et de donner non seulement l’accent symboliste qu’il souhaitait mais le
cadre général qui permet à ses suiveurs d’être fidèles à ses intentions.
Parallèlement dans le quartier de Gracía, se dresse des immeubles qui provoquent de vives
polémiques et cet ensemble va être surnommé, la Manzana de la Discordia, la Pomme de discorde ou
l’îlot de la discorde, Manzana signifie aussi pâté de maisons. De quoi s’agit-il ? De trois maisons
particulières construites entre 1898 et 1906. Regardons-les dans l’ordre chronologique.
La première construite sur le Passeig de Gracía est la casa Amatller, conçue en 1898 et qui sera
terminée en 1900. Son architecte est Josep Puig i Cadafalch (1867-1956). Diplômé en 1881,
commençant à travailler au début des années 1890, Puig i Cadafalch produit ici son œuvre la plus
exubérante en mêlant les influences médiévales aux influences mauresques, l’architecture civile à
l’architecture religieuse, prouvant ainsi que la caractéristique principale du Modernisme en
architecture est l’éclectisme. On y remarque aussi un décor gothique avec Saint Georges et le dragon
sur un fond de céramique à reflet métallique, un pignon à redans rappelant les maisons néerlandaises,
une double entrée, la plus petite réservée aux piétons. Il ne s’agit pas en réalité d’une nouvelle
construction mais de la réhabilitation d’une demeure existante, comme ce fut le cas pour Gaudí pour
une maison voisine. La maison, à quatre étages, fut construite en 1875 et était la propriété de María
Martorell i Peña et conçue par le maître d’œuvre Antoní Robert Morera. Chaque étage divisé en deux
appartements et une façade plutôt classique. A la fin des années 1898, la maison fut rachetée par le
chocolatier Antoní Amatller i Costa, qui confia à Puig i Cadafalch la tâche de remodeler la maison.
L’architecte ajoute un étage et un attique, dissimulé par le pignon à redans, qui servait d’atelier
photographique.
De 1904 à 1906, Gaudí (1852-1926) édifie la casa Battló, pour l’industriel du textile Josep Battló i
Casanovas, en conservant aussi la structure originale. La façade est remarquable par la présence des
mosaïques colorées, les trencadis, les ouvertures des fenêtres ressemblent à des grottes ou à des
masques, la maison paraît vivante, c’est une architecture organique qui fascina Salvador Dalí et qui
doit beaucoup aux travaux de la Sagrada Familia et du parc Güell. Au sommet de l’édifice, une
tourelle surmontée d’une croix et sur le toit, un Saint Georges et le dragon.
De 1903 à 1905, Lluís Domenèch i Montaner (1849-1923) construit la casa Lleó i Morera, pour
Francesca Morera i Ortiz qui meurt en 1904, son fils Albert Lleó i Morera poursuit les travaux.
Domenech i Montaner est l’un des architectes les plus importants de cette période, il est aussi
l’architecte de l’extravagant Palau de la Musica Catalana, 1905-1908, construit pour l’Orfeó Català,
fer de lance de la musique chorale catalane, fondé en avril 1892 par Félix Millet et Amadeus Vives,
deux jeunes musiciens :
- Palau de la Musica Catalana-1905-1908-Détail de la façade avec le groupe de La Chanson populaire
de Miquel Blay et Intérieur avec sculptures de Pablo Gargallo, Dídac Masana Majó, et Eusebí Arnau
(bustes des musiciennes) et des mosaïques de Lluís Bru. Groupes sculptés de La Chevauchée des
Walkyries, et les Fleurs de Mai, d’après une composition de Josep Anselm Clavé.
Élève de l’Ecole supérieure d’architecture de Madrid en 1873, il deviendra le directeur de celle de
Barcelone. Il débute sa carrière avec les travaux réalisés pour l’Exposition universelle de 1888. Il est
également l’architecte de l’hôpital de la Santa Creu i Sant Pau, construit entre 1902 et 1930, après sa
mort en 1923, les travaux furent poursuivis par son fils, Père Domenèch Roura. La casa Lleó i Morera
est révélatrice, elle aussi, du goût néo-gothique qui est alors à la mode en Catalogne avec un décor
exubérant de fleurs, rinceaux, lierre, des arabesques.
Du coup, les deux autres maisons placées entre les maisons modernistes paraissent extrêmement
sages : la première, la Casa Josefina Bonet, a été construite en 1887 par Jaume Brossa et reprise en
1915 par Marcel.li Coquillat, et la seconde, la Casa Ramon Mulleras, par Enric SAGNIER, en 19101911.
L’envers du décor, nous l’avons vu, était la misère des classes populaires et la misère engendre le
désordre. A Barcelone, se développa, plus que dans toute autre ville européenne, le mouvement
anarchiste. Les idées de François Claudius Ravachol, diffusées par des écrivains comme Paul Adam,
touchèrent l’Espagne et l’attentat à la bombe commis en 1892 par Ravachol et visant le système
judiciaire français en la personne de deux juges, qui avaient présidé le procès de deux autres terroristes
anarchistes l’année précédente, fut imité. Condamné à la guillotine, Ravachol devient le martyr de la
cause anarchiste. En 1904, l’ouvrage du critique Raimon Casellas intitulé Petit Ravachol, rappelait la
décennie anarchiste espagnole qui peut s’expliquer par les soubresauts politiques de la seconde moitié
du 19ème siècle. La 1ère république espagnole avait été proclamée en 1868, et les espoirs soulevés par
cet événement étaient retombés avec le retour de la monarchie, en 18974, qui fut suivi de répressions
politiques importantes sur l’ensemble du territoire mais particulièrement dans cette Catalogne rebelle à
l’ordre établi madrilène.
Il y avait donc dans la Barcelone fin-de-siècle des points communs entre les revendications
nationalistes et celles des anarchistes. Mais un rapprochement possible est stoppé par le fait que les
revendications nationalistes sont le fait de la bourgeoisie éclairée, des artistes et même du clergé
catalan. Quant au parti socialiste ouvrier espagnol, il quitte Barcelone pour Madrid en 1899, échouant
à s’implanter dans la capitale catalane.
L’illustration du supplément illustré du Petit Journal, La Dynamite en Espagne, 25 novembre 1893,
révèle le climat qui règne à Barcelone. Elle évoque l’attentat perpétré par l’anarchiste aragonais
Santiago Salvador Franch, le 7 novembre 1893, au grand théâtre de Barcelone, le Liceu. Il lança une
bombe sur le public de l’orchestre depuis le 5ème étage pendant le deuxième acte de Guillaume Tell,
tuant ainsi 22 personnes et faisant 35 blessés. L’anarchiste sera exécuté le 21 novembre 1893 dans la
cour de l'ancienne prison, Carrer d'Amalia à Barcelone.
Ce n’est pas de cette exécution dont s’inspira Ramón Casas pour Le Supplice du garrot, 1894, Madrid,
Centro de Arte moderna Reína Sofía. Il s’inspira d’une exécution à laquelle il avait assisté, celle d’un
jeune homme de 19 ans, condamné pour le meurtre de deux personnes, Aniceto Peinador, le 12 juillet
1893, à la vieille prison près de la Ronda de Sant Pau. Le tableau témoigne moins de l’exécution ellemême que de l’expérience collective de la peine de mort. En mars 1894, l’œuvre fut exposée à la Sala
Parès, la plus prestigieuse galerie de Barcelone, située carrer Petrixol, dans le quartier médiéval. Des
femmes s’évanouirent, les réactions furent diverses, mais Casas voulait évidemment relier le cas de ce
jeune homme au climat anarchiste ambiant. D’autres artistes témoignèrent de cette période troublée :
Santiago Rusiñol, Têtes d'anarchistes jugés en relation avec l'attentat à la bombe du Liceu, 1894,
Sitges, musée Cau Ferrat, portraits des accusés du procès anarchiste de 1894, et Picasso, il dessina
Portrait de jeune homme, Alfons Sola i Gene ?, 1899-1900, Paris, musée Picasso. Il est assez difficile
d’identifier le personnage représenté mais les auteurs du catalogue de l’exposition consacrée aux
Quatre Gats en 1995 ont proposé d’y voir un portrait d’Alfons Sola i Gene, jeune activiste catalan, qui
s’illustra ensuite dans la journée de troubles du 11 septembre 1901, l’identification prenant appui sur
une photographie de groupe d’anarchistes parue dans le journal La Illustració Llevantina.

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