William Shakespeare à travers les âges (3 mai 1616 – 3 mai 2016

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William Shakespeare à travers les âges (3 mai 1616 – 3 mai 2016
William Shakespeare à travers les âges (3 mai 1616 – 3 mai 2016)
La date exacte de sa naissance n’est pas connue avec certitude, celle de sa mort
varie selon les calendriers… Le mystère entoure l’existence entière de William
Shakespeare dont nous fêtons, cette année (aujourd’hui ?), le 400e anniversaire de
sa disparition. 400 ans et une actualité jamais démentie, des traductions sans cesse
renouvelées à la réapparition au répertoire de la Comédie-Française de Roméo et
Juliette, dans une mise en scène contrastée d’Éric Ruf, après 62 ans d’absence.
Camille Dalmas rend hommage à son œuvre théâtrale, poétique, universelle.
« Tu es un monument sans tombeau
Et es toujours vivant quand ton livre est en vie » – Ben Johnson.
William Wordsworth, dans son sublime Sonnet à la Vierge, désignait la Mère de Dieu comme
« l’orgueil solitaire de notre nature corrompue », exprimant ainsi l’idée que, parmi les
mortes, Marie était l’exception pure et immaculée qui, seule, avait pu sauver l’humanité en
lui donnant un sauveur. Le barde d’Avon, comme il est coutume d’appeler William
Shakespeare, est pour beaucoup l’orgueil solitaire de la nature corrompue de la littérature
anglaise, celui qui la sauve du commun et de l’oubli, celui qui lui aurait offert
miraculeusement son salut et la profondeur de son génie propre.
Il est assez tentant de penser ainsi, si cela ne venait pas diminuer l’importance de ces
illustres prédécesseurs et poursuivants, tels Geoffrey Chaucer, Thomas Hardy, Charles
Dickens, Gilbert Keith Chesterton ou Robert-Louis Stevenson… pour ne citer que quelquesuns qui ont ma préférence.
Néanmoins, il semble tout à fait logique que William Shakespeare s’impose parmi tous
comme le Colosse d’Albion, tant il mérite l’acclamation de Ben Johnson qui affirmait qu’il
n’était « pas d’un âge, mais pour les temps » : c’est que l’écrivain anglais par excellence ne
fait pas tant d’ombre à ses pairs qu’à toute l’Angleterre, surgissant des âges tel un des
héros universels d’Hamlet, du Roi Lear, de Roméo et Juliette ou de Macbeth, tels un de ces
humains géants qui dévorent tout ce qu’il y a de saxon, de celte ou de latin dans la culture
anglaise ; mais aussi tout ce qu’il y a de sang, de sagesse et de sentiment dans l’humanité
tout entière.
En effet, n’en déplaise aux Anglais, le génie de Shakespeare est trop important pour qu’un
seul pays ne s’en prévale, et c’est pourquoi personne ne peut se l’accaparer, et pourquoi
tout le monde a raison de l’acclamer. Car la scène de son théâtre est le monde, selon la
formule de Paul Claudel, tout comme le langage de ses Sonnets est celui des cœurs.
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William Shakespeare à travers les âges (3 mai 1616 – 3 mai 2016)
Le barde de l’Avon écrit les choses qui unissent l’humanité par
delà les âges et les cultures, usant d’une telle beauté qu’elle semble parfois presque à même
de briser les barrières du langage. Il écrit ce qui est essentiellement humain : les vertus
intemporelles, les vérités intemporelles, les vices intemporels et les vanités intemporelles.
Comment expliquer sinon l’éternel jeunesse de ses Sonnets ?.
« Mais ton éternel été ne se flétrira pas,
Ni perdra cette beauté que tu possèdes,
Et la Mort ne se vantera pas que tu erres parmi son ombre,
Quand en rimes éternelles à travers temps tu grandiras ;
Tant que les hommes respireront et tant que les yeux verront,
Aussi longtemps que vivra ceci, cela en vie te gardera. »
.
Peu de mots transcendent ainsi quatre cents années. C’est pourquoi Shakespeare fut
l’obsession de tous les grands écrivains qui le suivirent (en France : Hugo, Stendhal ou
Girard) et demeure encore aujourd’hui l’objet de tous les fantasmes. Au point que l’éternelle
dispute autour de son identité ne semble désigner au bout du compte qu’une seule et unique
vérité : que chaque œuvre de Shakespeare a le pouvoir d’ouvrir la porte à un nouveau
mouvement, à une nouvelle école.
À une époque durant laquelle les courants littéraires semblent être morts pour de bon, peutêtre est-il temps de cesser de s’interroger sur la parenté douteuse de l’œuvre du
dramaturge pour se plonger à nouveau dans cette source infinie d’inspiration qu’est son
œuvre.
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William Shakespeare à travers les âges (3 mai 1616 – 3 mai 2016)
Car comme le disait si finement Gilbert Keith Chesterton, « l’homme sain qui est
suffisamment sain pour voir que Shakespeare a écrit Shakespeare est suffisamment sain
pour ne pas soucier qu’il l’ait écrit ou non ».
Camille DALMAS
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