Approche diagnostique des leucémies et lymphomes chez le chien

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Approche diagnostique des leucémies et lymphomes chez le chien
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Info 02/2014
Approche diagnostique des leucémies et lymphomes
chez le chien et le chat
Préambule: classification des hémopathies malignes: l’on distingue généralement les syndromes
immunoprolifératifs malins à prédominance ganglionnaire, que sont les lymphomes malins ou tumeurs des
organes lymphoïdes secondaires, par opposition aux
syndromes immunoprolifératifs à prédominance médullaire, les leucémies (lymphoïdes et myéloïdes essentiellement) ou “tumeurs du sang”.
Les leucémies se définissent donc comme des proliférations malignes primitives des cellules de la moëlle
osseuse, accompagnées ou non d’envahissement sanguin, c’est-à-dire avec présence fréquente mais inconstante de blastes sur le frottis sanguin. Dans cette famille
prédominent les leucémies lymphoïdes, réparties surtout en deux grands groupes selon leur évolution clinique: les leucémies lymphoïdes aiguës (LLA) et les
leucémies lymphoïdes chroniques (LLC). Les tumeurs
des autres lignées (leucémie myéloïde, etc.) sont beaucoup plus rares. Dans les phases aleucémiques, avec
diverses cytopénies possibles, c’est le myélogramme
qui établit un diagnostic de certitude, en mettant en évidence une moëlle hypercellulaire avec étouffement des
autres lignées sanguines.
Les lymphomes malins (LM), cancers fréquents chez
le chien et le chat, sont des proliférations néoplasiques
des cellules lymphoïdes (B, T ou NK), de localisation
ganglionnaire, cas le plus fréquent chez le chien, et/ou
extra-ganglionnaire, cas le plus fréquent chez le chat
(localisation digestive ou médiastinale).
Il sera essentiellement question dans ce document des
syndromes lymphoprolifératifs, c’est-à-dire leucémies
lymphoïdes et lymphomes malins.
La première est l’ immunophénotypage, qui concerne l’expression des marqueurs de surface, et permet de caractériser les cellules lymphoïdes normales ou tumorales en
précisant leur degré de différenciation et en distinguant les
lymphocytes de la lignée T, B et NK. Il peut se réaliser selon
deux méthodes: par immunohistochimie (sur sang EDTA,
échantillons pour cytologie, organes) ou par cytométrie en
flux (FACS), déjà largement employée chez l’homme.
Apport de la cytométrie en flux: elle permet d’abord de distinguer une prolifération myéloïde et lymphoïde; puis, au
sein des syndromes lymphoprolifératifs, de différencier les
immunophénotypes T (T-helfer, T cytotoxiques) et B et de
confirmer le mode d’évolution chronique ou aigu (ex: LLC
ou LLA).
Chez le chien, la distinction entre les sous-types de LM (B
ou T) est un facteur pronostique important, en conditionnant la réponse au traitement et la durée de rémission sous
chimiothérapie. En effet, les LM de type T sont majoritairement plus agressifs que ceux de type B. Pour le lymphome
malin du chat, le principal facteur pronostique demeure le
statut vis-à-vis des rétrovirus FIV et FeLV, l’origine virale
de certains types de LM ayant été démontrée. Chez le
chat, la corrélation entre le sous-type morphologique et la
réponse thérapeutique reste à ce jour à déterminer.
Pour ce qui est des leucémies, c’est le mode d’évolution
aigu ou chronique plus que le sous- type morphologique
qui conditionne le pronostic. En effet, dans une leucémie
aiguë resp. chronique, la mortalité sans traitement intervient dans les jours ou semaines resp. dans les mois (env.
1.5 mois, forme indolente) suivant le diagnostic. A ce titre,
l’importance de la lymphocytose influence le pronostic,
qui est meilleur pour une numération < 30 000 lymphocytes
/microlitre.
Les analyses complémentaires de première intention
en onco-hématologie, réalisables pour partie au “chevet” du patient, demeurent les examens morphologiques (hémogramme avec frottis sanguin, cytologie
et /ou histologie - myélogramme) qui fournissent dans
de nombreux cas un diagnostic de certitude morphologique précisant s’il s’agit bien d’une leucémie ou d’un
LM, son grade éventuel (bas grade/haut grade), le mode
d’évolution (aigu versus chronique), le type cellulaire en
cause et les critères immunologiques (phénotype T/B).
D’autres techniques plus sophistiquées désormais disponibles en routine viennent confirmer le diagnostic immunophénotypique et le caractère monoclonal d’une
prolifération.
La deuxième analyse utilisable est un test de clonalité génique utilisant la PARR –PCR (PCR for Antigen Receptor
Rearrangement) qui marque l’apport de la cytogénétique
dans la classification des hémopathies malignes, encore à
ses balbutiements en médecine vétérinaire.
De quoi s’agit-il? Dans le processus de formation des cellules B et T immunocompéten-tes, les cellules lymphoïdes
sont caractérisées par des réarrangements clonaux des
gènes codant pour les immunoglobulines (IgH) et pour les
récepteurs des cellules T (TCR). Au cours de la cancérisation, des anomalies chromosomiques entraînent un arrêt de
la différenciation des cellules lymphoïdes souches, une prolifération anormale et une expansion clonale. Cela se traduit au niveau génétique par une perte de la variabilité au
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niveau de ces deux gènes de synthèse des IgH et TCR,
et c’est ce phénomène que ce test moléculaire met en évidence chez les patients à lymphoproliférations suspectes,
à des fins de diagnostic et de suivi. Cette analyse est particulièrement indiquée lorsque l’analyse morphologique et/
ou phénotypique ne permet pas de conclure. Exemples:
distinction entre une réaction leucémoïde (neutrophilie extrême) et une leucémie myéloïde chronique, ou une LLC
et une lymphocytose réactionnelle.
Depuis 2012 que nous utilisons la PCR- PARR dans nos
locaux de LABOKLIN, nous avons fait les constatations
suivantes:
• chez le chien: mise en évidence d’un clone dans 8 cas
sur 10, répartition: env. 2/3 de lymphomes B et 1/3 de
lymphomes T.
• chez le chat: prolifération clonale dans 50% des cas,
répartition égale entre lymphomes B et lymphomes
T. Beaucoup de cas douteux au vu des arguments
cytologiques et/ou histologiques se sont avérés non
cancéreux, ce qui met en lumière la difficulté du diagnostic morphologique des lymphomes chez le chat.
•
dans notre expérience, toutes les proliférations de
type monoclonal ont été confirmées comme des tumeurs malignes.
En résumé: examens disponibles pour l’exploration
d’une maladie immunopro-liférative chez le chien et
le chat:
• Pour le chien: hémogramme complet, examens morphologiques (frottis sanguin, cytologie ganglionnaire,
...), test de clonalité génique (PARR-PCR), cytométrie
en flux. Matériel: sang EDTA (2 ml), étalements. Tarifs: sur demande.
• Pour le chat: hémogramme complet, examens morphologiques (frottis sanguin, cytologie ganglionnaire,
...), test de dépistage FeLV/ FIV. Matériel: sang EDTA
(2 ml), étalements. Tarifs sur demande.
La combinaison raisonnée de plusieurs de ces examens
d’hématologie permet de confirmer une suspicion de maladie immunoproliférative, d’affiner son pronostic et de
mieux choisir parmi les options thérapeutiques.
Démarche pratique vis-à-vis d’une hyperleucocytose chez le chien
numération
leucocytaire
normale/leucopénie
hyperleucocytose
examen d’ un frottis sanguin
neutrophilie
lymphocytose
> 50 G/l
Inflammation
ou leucémie?
examen d’un frottis
sanguin
> 30 G/l
< 30 G/l
présence de
lymphocytes
atypiques
population homogène
ou lymphocytes atypiques
population
hétérogène
séjour à l‘étranger?
stimulation
antigénique
infection virale
hypoadrénocorticisme
négatif
contrôle
Oui
Non
PARR-PCR
(test de
clonalité
génique)
Négatif
Recherche
d‘une
infection:
sérologies
(ehrlichiose,
leishmaniose)
positif
immunophénotypage par cytométrie en flux
(FACS) – évolution aiguë-chronique
En cas de suspicion de
lymphome ou leucémie
PARR-PCR
(test de
clonalité
génique)