Droit commercial
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Droit commercial
Introduction P. 21 à 32 14/01/08 13:32 Page 21 Introduction Le droit commercial évoque simultanément les notions de droit économique, de droit relatif à l’entreprise voire de droit des affaires. Il n’existe pas de définition juridique de l’entreprise, et le monde des affaires est indiscutablement organisé par différentes branches du droit, qu’on songe à l’importance des marchés publics administrés par le droit public, ou encore à l’encadrement des pratiques commerciales par le droit pénal mais aussi par le droit de la consommation et de la concurrence. On peut déjà noter que le droit commercial intéresse essentiellement le professionnel dans son activité de commerce. Il est un droit d’exception par rapport au droit civil et se distingue du droit de la consommation. La délimitation du domaine du droit commercial suppose de mener une réflexion plus approfondie sur ses fondements (1). Ses sources n’ont pas la même physionomie qu’en droit civil (2) et les structures matérielles de l’organisation du commerce lui sont spécifiques (3). 1 • LA DÉFINITION DU DROIT COMMERCIAL La définition du domaine du droit commercial dépend de la question de savoir si les notions de commerçant et d’acte de commerce sont les critères de la commercialité (A). L’impossibilité d’établir un critère unique donne son originalité au droit commercial (B). A - Le domaine du droit commercial La définition du domaine du droit commercial appelle à rechercher ses critères et à le distinguer du droit civil. 1) La double conception de la commercialité La délimitation du domaine du droit commercial présente une grande importance. Par exemple, entre commerçants la preuve est libre. L’existence du contrat peut ainsi être établie par de simples témoignages, ce qui n’est pas admis en droit civil puisqu’un écrit est presque toujours nécessaire. Introduction P. 21 à 32 •G 22 14/01/08 13:32 Page 22 MÉMENTO – DROIT COMMERCIAL Deux conceptions du droit commercial sont envisageables, une conception objective et une conception subjective : – la conception subjective repose sur la qualité des acteurs. Le droit commercial serait celui des commerçants. Toute personne à qui serait reconnue cette qualité se verrait appliquer des règles spécifiques. Cette conception renvoie à l’idée qu’il s’agirait d’un droit professionnel et corporatiste. Cette approche puise dans la tradition et l’histoire du droit commercial ; – la conception objective envisage uniquement l’acte. Le droit commercial serait le droit des actes de commerce, indépendamment de la qualité de celui qui les conclut et les exécute. Il est exact que la loi consacre parfois cette vision. On applique toujours, par exemple, le droit commercial aux lettres de change. L’énoncé de l’article L. 121-1 du Code de commerce suffit à montrer que le droit commercial accueille les deux points de vue. Cet article révèle que « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle ». On comprend dès lors que le fondement du droit commercial est mixte. Certains actes se verront systématiquement appliquer le droit commercial, comme la lettre de change, et ce, indépendamment de la qualité de celui qui en est le porteur. Réciproquement, certains actes civils par nature seront soumis au droit commercial parce qu’ils ont été passés par des commerçants, le cas le plus typique étant celui de la vente. 2) Les rapports entre le droit civil et le droit commercial Le droit commercial constitue une branche du droit qui fait exception au droit civil. Le droit commercial, censé régir le monde des affaires, se distingue par une plus grande souplesse qui permet de faciliter les échanges. Ainsi l’écrit n’est pas exigé en ce qui concerne la preuve des actes de commerce, de même la solidarité entre commerçants est présumée. De plus, les règles résultent parfois de la pratique, il s’agit des usages commerciaux. Toutefois la délimitation entre le droit commun, le droit civil donc, et le droit commercial n’est pas si nette. D’abord le droit commercial n’est pas un droit autonome, il se définit par rapport au droit civil, soit pour y déroger, soit pour établir des règles spécifiques et complémentaires. Le droit des sociétés repose ainsi sur quelques articles du Code civil, mais l’essentiel de son corpus est organisé par le Code de commerce. Il faut dire que le droit commercial est construit autour des notions civilistes de patrimoine, de personne morale, de propriété, d’obligation… de sorte que la frontière entre le droit commercial et le droit civil est impossible à tracer de manière franche. De plus, en sens inverse, certaines techniques originellement commercialistes ont été introduites en droit civil. C’est le cas des procédures collectives, qui sont aujourd’hui applicables aux personnes civiles, aux artisans et aux agriculteurs. De même les règles qui concernent les sociétés commerciales ont été en partie transposées aux sociétés civiles. Ainsi s’achemine-t-on progressivement vers une certaine unité entre le droit civil et le droit commercial, tout au moins en ce qui concerne les activités professionnelles. Introduction P. 21 à 32 14/01/08 13:32 Page 23 Introduction •G 23 B - Les fondements du droit commercial Trois critères permettent de saisir l’essence du droit commercial et de la commercialité : la circulation des richesses, la spéculation et l’entreprise. Aucun de ces critères n’est pourtant totalement satisfaisant, c’est pourquoi l’approche purement positiviste semble la seule adéquate. 1) La circulation des richesses Le critère de la circulation des richesses a été mis en lumière par Thaller au début du XXe siècle. Grand nom du droit commercial, cet auteur proposait d’appréhender le droit commercial comme le droit des intermédiaires dans le monde de l’activité économique. Le droit commercial serait ainsi essentiellement le droit des fournisseurs et des distributeurs. Son approche permet certainement d’expliquer pourquoi les producteurs ne sont pas considérés comme des commerçants. Elle permet aussi d’expliquer pourquoi les consommateurs ne se voient pas appliquer le droit commercial. Toutefois, il existe différentes activités qui sont intermédiaires, qui participent au marché en tant qu’activité et qui relèvent du droit civil. En matière agricole ou artisanale, comme on le verra, l’achat de biens pour la revente ne constitue pas systématiquement une activité commerciale. Le critère de la circulation des richesses est donc insuffisant à tout expliquer de la commercialité. 2) La recherche du profit Le critère de la spéculation suppose que la commercialité ait pour but la recherche du profit. Ce critère est opérationnel à la marge. Ainsi, certains actes normalement considérés comme civils seront commerciaux lorsque la spéculation en est le moteur central. L’association qui procède principalement à l’achat de biens pour la revente et qui en tire un bénéfice est commerciale, il en va de même pour l’artisan dont l’activité manuelle est secondaire par rapport au profit qu’il tire de la revente de matériel. À l’inverse, l’acte purement gratuit, qui ne s’inscrit dans aucun contexte commercial, est nécessairement civil. Une œuvre de charité ne peut pas en principe être considérée comme étant une activité commerciale. Cependant, l’absence de spéculation ne fournit pas à coup sûr la certitude de l’absence de commercialité, pas plus que la recherche du profit n’exclût le droit civil. Ainsi, les promoteurs immobiliers relèvent du droit civil, alors même que la spéculation est évidente. De plus, certaines activités n’ont pas pour objet principal la recherche du profit et sont pourtant commerciales, certaines pratiques, comme le crédit gratuit, entrent dans cette catégorie. On peut surtout reprocher, selon le cadre d’analyse marxiste, que le critère de la spéculation n’est pas spécifique au droit commercial mais plus généralement celui du droit dans les sociétés capitalistes. En effet, on voit mal pourquoi l’intérêt personnel financier serait l’apanage des commerçants ou le fondement exclusif des actes de commerce. Une personne civile, lorsqu’elle passe un acte, recherche aussi un profit de sorte que ce critère est trop flou pour permettre de comprendre le droit commercial.