or bleu: le bon modèle d`hawaï

Transcription

or bleu: le bon modèle d`hawaï
Nº 306 - mars 2016
NOUVELLE FORMULE
Océan Indien
OR BLEU:
LE BON
MODÈLE
D’HAWAÏ
Maurice
Hôtellerie :
la guerre des étoiles
Ouganda
Un cinquième mandat
pour le « roi » Museveni
Réunion
L’entrepreneuriat
au féminin
au Tecoma Business Forum
en partenariat avec
Réunion - Mayotte 5 € / Madagascar 12 500 ariary / Maurice Rs 150
E
R
I
A
M
M
O
S
L’ÉDITO D’ALAIN FOULON
9
L’avenir de l’océan Indien, c’est l’océan Indien
DÉCRYPTAGES
10
Échos, confidences et analyses
LEADER
MADAGASCAR
18
20
Salim Ismail officier de la Légion d’honneur
Voahirana Ramalanjaona et sa librarie-café
RÉUNION
22
Isabelle Ah-Sing chevalier de la Légion d’honneur
Nathalie Grenot et La Maison des Gourmets
MAURICE/SEYCHELLES
24
Ben Padayachy à la tête de Gamma-Civic
Alain St.Ange au firmament mondial
OUGANDA
26
Cinquième mandat pour le « roi » Museveni »
PERFORMANCE
RÉUNION
28
48
54
56
Dossier : L’innovation est l’avenir de l’industrie
Tatiana Hossein, Cogedal, Jipé Réunion, Mauvilac, Réunion Eco-Ex,
SILF, PetFood Run
Entretien avec Philippe Labro, président de Tereos Océan Indien
CMA CGM : un hub de transbordement pour l’océan Indien
Recapitalisation de la Sodiac
Implantation du premier réseau mondial d’affaires
MAURICE
60
62
64
66
Hôtellerie : la guerre des étoiles
Montée en gamme pour l’immobilier d’Azuri
UnionPay International distingue la MCB
Lux Resorts & Hotels en Turquie
Leal prend des parts de marché
MADAGASCAR
67
La voiture Made in Madagascar bientôt sur les routes
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 5
SOMMAIRE
ID
70
75
78
80
82
84
L’entrepreneuriat au féminin
Air Austral face à son avenir
Valoriser l’immobilier d’entreprise
France : Le gouvernement entrave le portage salarial
Arabie saoudite : quand La Mecque devient Meccahattan
Afrique du Nord : La grande désillusion
90
98
100
101
102
103
104
106
108
109
Dossier : S’inspirer d’Hawaï pour exploiter l’or bleu
Des projets de climatisation marine à Maurice et à La Réunion
avec Sotravic, Engie et EDF
Réunion : La Sodegis, un bon modèle de responsabilité sociétale
Réunion : Le Pdg d’EDF lance l’innovation dans le solaire
Madagascar : Vima s’investit dans le social
Maurice : Certification Green Globe renouvelée pour Constance
La Réunion au sommet mondial des énergies renouvelables
Comment être et ne pas seulement paraître
Comment mettre la chance de votre côté
Une minute par jour pour changer de vie
L’innovation du Dr André Gernez dans la prévention du cancer
112
118
120
122
Des entreprises sous le feu des projecteurs
Vins : les bonnes bouteilles à découvrir
Auto : le grand choc des superlatifs avec la BMW Série 7
Horlogerie : Une semaine avec la montre Hamilton Khaki Field
GREEN
HAPPY FEW
BULLETIN D’ABONNEMENT EN PAGE 15
ÉDITEUR : L'Eco austral
SARL au capital de 61 000 euros
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Technopole de La Réunion
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Nº 306 - Mars 2016
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PUBLICITÉ POUR MADAGASCAR
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Immeuble ZEPHIR III, 16 Rue Lumumba
Tsaralalana - BP 1722 101 Antananarivo
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- Vololonirina Rambinintsoa
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IMPRESSION
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Dépôt légal : Mars 2016
Directeur de la publication : Alain Foulon
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 7
L’AVENIR DE
L’OCÉAN INDIEN,
C’EST L’OCÉAN INDIEN
hers lecteurs, vous avez entre les mains un numéro de
L’Eco austral qui a bénéficié d’un sérieux lifting. Une maquette
plus aérée et plus attrayante, plus d’articles à lire et de
nouvelles rubriques comme Green qui se consacre au développement durable, mais aussi au mieux-être et à la santé.
La nouvelle signature qui accompagne notre titre en couverture
- « Les idées et les hommes de l’océan Indien » - résume bien notre
volonté d’être le magazine de référence de ceux qui réfléchissent et
agissent dans et pour notre région.
C
L’OR BLEU MIEUX QUE LA SMART CITY
Il est affligeant de voir que les projets de climatisation marine à La
Réunion se trouvent au point mort. Celui conduit par Engie dans le
nord, dont l’appel d’offres international remonte à avril 2011, pourrait
générer une multitude d’activités en exploitant l’eau de mer au lieu
de la rejeter à la mer. C’est le modèle développé par Hawaï depuis
trente-quatre ans et, dans cet État américain, il génère un chiffre
d’affaires de 3 milliards de dollars, comme le montre notre dossier
dans ce numéro. Du côté de Port-Louis, un projet de climatisation
marine est conduit par Sotravic et, bien que plus récent, il devrait
voir le jour avant celui d’Engie. Il a d’ailleurs l’avantage de faire
appel aux services de la société américaine qui opère à Hawaï. Mais
l’on parle encore peu à Maurice des activités annexes – qui sont
pourtant les plus rémunératrices – et Sotravic n’a pas prévu pour le
moment de réseau secondaire permettant d’exploiter l’eau de grande
profondeur à d’autres fins que la climatisation de certains bâtiments
de la capitale. À mon humble avis, c’est une opportunité nettement
plus porteuse et réaliste que les Smart City. Espérons que l’océan
Indien ne ratera pas le coche car son avenir passe justement par
l’océan Indien et ses énormes ressources. Une économie bleue qui
représente un véritable relais de croissance.
LA COLONISATION DE MAYOTTE EST EN MARCHE
Rien ne va plus dans le 101e département français et l’on peut se
demander sérieusement si ce statut était le mieux adapté à la
situation. Il ne fait qu’entraîner une surenchère sociale et stimule
encore davantage l’immigration clandestine en creusant l’écart avec
le reste de l’archipel qui ne reconnaît pas le statut de Mayotte.
EDITO
RECTEUR DE LA
ON - DI
PAR ALAIN FOUL
RÉDACTION
Quand on sait que l’Insee annonce officiellement un taux de 40%
d’immigrés clandestins, on peut se douter que la réalité est encore
plus critique. On peut même penser que le nombre d’immigrés clandestins, venus principalement d’Anjouan (qui ne se situe qu’à une
soixantaine de kilomètres), a dépassé la population de souche. La
délinquance explose et les Mahorais – qui ont l’avantage d’avoir la
nationalité française - sont de plus en plus tentés par l’émigration.
C’est La Réunion toute proche qui devrait en subir les conséquences.
La situation semble inextricable et l’on assiste au spectacle cauchemardesque de milliers d’adolescents livrés à eux-mêmes parce
qu’issus de parents immigrés clandestins qui ont été expulsés. Ces
enfants nés sur le territoire de Mayotte, donc en France, ne peuvent
pas être expulsés au nom du droit du sol et ils alimentent la
délinquance ou bien se font exploités.
UN COUP DE BAREIGTS ET ÇA REPART
La nouvelle secrétaire d’État à l’Égalité réelle (de l’Outre-mer), la
Réunionnaise Ericka Bareigts, pourra-t-elle faire quelque chose pour
Mayotte ? On peut en douter, à moins qu’elle n’ose s’attaquer au
sacro saint statut de département. Mais à un an de l’élection présidentielle, le Premier ministre Manuel Valls et le président François
Hollande ont d’autres chats à fouetter, d’autant que l’Outre-mer représente un beau réservoir de voix. La création de ce poste de secrétaire d’État à l’Égalité réelle, un intitulé qui a dû germer dans le
cerveau d’un énarque socialiste, a surtout le mérite de faire plaisir
aux Réunionnais. Jusqu'alors, il n'y en avait que pour les Antillais et
pour une Guyanaise qui voulait marquer l'Histoire (rien de moins).
On peut d'ailleurs peut se demander à quoi sert le ministère de l’Outre-mer si l’on éprouve le besoin de créer un tel poste rattaché au
Premier ministre. C’est une feuille qu’on ajoute au mille-feuille. Mais
pour le gouvernement, c’est une belle opération de com alors qu’il
se trouve déjà en campagne électorale.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 9
S
E
G
A
T
P
DÉCRY
RÉUNION
Lors d’un point presse, le 11 février, le Pdg d’Air Austral, MarieJoseph Malé, n’a pas voulu dévoiler le nom du groupe privé qui se
trouve en négociation avancée pour entrer dans le capital de la
compagnie réunionnaise. Il s’en est tenu à la présentation de son
programme 2016-2017, annonçant la commande de deux Boeing
787-8 livrables en mai et octobre 2016. Mais il est fort probable
que le groupe Océinde de la famille Goulamaly fasse son entrée
comme actionnaire majoritaire alors que la Commission européenne
veut que la participation publique soit ramenée à un maximum de
33% du capital. Si le groupe Océinde ne veut rien dire tant que
l’opération n’a pas été réalisée, il s’est sérieusement impliqué
dans le dossier avec l’objectif de renforcer le leadership d’Air
Austral et de faire rayonner la compagnie à l’international. « Nous
sommes réunionnais, attachés à l’emploi et à l’avenir du département,
commente Nassir Goulamaly, directeur général du groupe. Il n’y
aura pas de développement économique sans le très haut débit où nous sommes les pionniers avec Zeop -, le maritime et
l’aérien. »
Guillaume Foulon
Le groupe Océinde
a de grandes ambitions
pour Air Austral
Lors d’un point presse le 11 février, Marie-Joseph Malé, Pdg d’Air Austral, a reconnu
qu’un partenaire privé était pressenti pour entrer dans le capital.
MAURICE
RÉUNION
Proparco actionnaire
dans la branche santé
du groupe CIEL
Le groupe Optique de
Bourbon loin devant
Chevillard
En forte croissance, le bras financier de l’Agence française de développement (AFD) vient d’entrée à 15% dans CIEL Healthcare Ltd
(CHL) pour l’accompagner dans sa stratégie de développement
en Afrique. Le groupe mauricien veut développer une chaîne d’hôpitaux privés offrant des soins médicaux en cardiologie, cancérologie
et obstétrique peu disponibles dans la région. Après avoir fait l’acquisition de la clinique Fortis Darné à Maurice, CHL a mis le cap
sur l’Ouganda où elle a pris le contrôle de l’International Medical
Group (IMG) à Kampala.
En reprenant Afflelou et en développant les enseignes, l’entreprise
de Michel Deleflie (qui est majoritaire mais a fait entrer Alain
Afflelou dans son capital) a creusé l’écart avec Optique Chevillard
qui occupait à une époque la pole position dans le commerce de
détail d’optique. Un marché qui profite du vieillissement de la
population. Le groupe Optique de Bourbon, présent également à
Mayotte, a réalisé 18 millions d’euros de chiffre d’affaires en
2014 contre 10 millions d’euros pour l’enseigne de Jean-Michel
Baudin.
10 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
DÉCRYPTAGES
DAGASCAR
E
MAURICE/MA
CÔTE D’IVOIR
Apphia Minerals reprend les
filiales de Tantalus Rare
Earths AG
Le fonds de la MCB investit
dans l’agroalimentaire
La société singapourienne Apphia Minerals Sof Pet Ltd est le
nouveau propriétaire de Tantalum Holding à Maurice et de sa filiale
malgache Tantalum Rare Earth Malagasy SARL. L’allemand Tantalus
Rare Earths AG a décidé de céder ces deux entités en raison de la
situation difficile qu’il connaît depuis un certain temps. En effet,
outre la baisse mondiale des cours des matières premières, la
société n’a pas pu réaliser une souscription de 750 000 nouvelles
actions pour 6 millions d’euros. La compagnie allemande a conclu
un accord de vente en deux phases avec Apphia Minerals Sof Pet
qui est cotée au Singapore Stock Exchange. Durant la première
phase, qui doit s’achever au premier semestre, Apphia doit verser
3,7 millions d’euros pour acquérir 60% des actions de Tantalum
Holding Mauritius Ltd. Le reste du capital sera payé sous forme
d’actions dans une société inscrite à la bourse de Singapour. Ces
actions devront avoir une valeur marchande d’au moins 10 millions
d’euros. Grâce à cette acquisition, Apphia Minerals reprendra les
activités sur le site de terres rares de 300 kilomètres carrés d’Ampasindava (dans le nord-est de Madagascar). L’exploitation comporte
560 000 tonnes de ressources de terres et métaux rares associés
au tantalum, comme le niobium, le zirconium et l’uranium… Une
fois purifiés, ils peuvent être utilisés dans la fabrication d’éléments
technologiques, dans l’aéronautique militaire, la raffinerie et la fabrication de réacteurs nucléaires. Njaratiana Rakotoniaina
Le MCB Equity Fund a fait l’acquisition, en partenariat avec le
fonds international Duet Private Equity Group, de la SAPLED
(Société africaine des produits laitiers et dérivés) dont le Pdg est
l’entrepreneur sénégalais Samir Farhat. Une entreprise créée il y a
vingt-cinq ans et qui figure parmi les poids lourds ivoiriens de
l’agroalimentaire avec un effectif de plus de 300 personnes. Elle
commercialise des produits laitiers, des jus de fruit de marque et
des crèmes glacées sous la marque Popito. Selon la MCB, la
SAPLED est bien placée pour connaître une croissance rapide en
profitant de l’émergence de la « fameuse » classe moyenne africaine
qui jouit d’un pouvoir d’achat croissant.
COMORES
Des impayés à l’ONU
Prompte à dénoncer devant l’ONU la situation de Mayotte, dont
elle conteste l’appartenance à la France, l’Union des Comores
n’est même pas à jour de ses cotisations. Ce qui devrait logiquement
la priver de son droit de vote. Mais le secrétaire général de l’organisation internationale, Ban Ki-moon, fait preuve de mansuétude
en prenant en compte la situation économique difficile de l’archipel.
MAURICE
Fondée en 2004 par le Mauricien Dominique Béchard, nominé au Tecoma
Award en 2012, Consultec a été l’une des premières entreprises d’ingénierie
dans le monde à utiliser un scanner 3D pour de la rétro-conception
industrielle. Elle a collaboré avec de gros clients comme Total, Indian Oil,
Vivo Energy, Alstom Power, Renault, EDF et même Airbus Helicopters (exEurocopter). En faisant l’acquisition de cette entreprise, le groupe Ekium,
spécialisé dans la chimie et le nucléaire, poursuit ses implantations internationales et soutient sa stratégie de croissance externe. Ce rachat lui
permet de consolider sa présence non seulement à Maurice, mais surtout
en Afrique subsaharienne et au Moyen-Orient alors que Dominique Béchard
reste aux commandes de Consultec. Les clients pourront bénéficier du savoir-faire des deux entreprises. Le groupe est fort d’un capital de plus de
10 millions d’euros, son chiffre d’affaires atteint 70 millions d’euros et il
compte plus de 700 collaborateurs.
Davidsen Arnachellum
Consultec racheté par le groupe français Ekium
Dominique Béchard (à gauche), fondateur de Consultec, et Philippe
Lanoir, président du groupe Ekium. Avec cette acquisition, le chiffre
d’affaires du groupe franchit la barre des 70 millions d’euros.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 11
Menace sur les avantages
fiscaux du Grand port
maritime
Le site spécialisé www.meretmarine.com, toujours bien informé, a
été le premier à publier la nouvelle et peu de monde a encore
réagi. Dans une décision rendue le 21 janvier, la direction générale
de la concurrence de la Commission européenne a « proposé » à
la France et à la Belgique « d’aligner leur régime d’imposition des
ports sur les règles en matière d’aides d’État ». Parallèlement, la
Commission a « exigé » des Pays-Bas qu’ils suppriment l’avantage
fiscal qui s’applique à leurs six ports. Pour la France, cette « proposition » signifie, concrètement, la fin de l’exonération de l’impôt sur
les sociétés dont les 11 grands ports maritimes français, le port de
Paris et tous les ports gérés par des chambres de commerce et
d’industrie bénéficient actuellement en vertu d’une loi… de 1942.
Soit bien avant la création des traités européens qui régulent actuellement le droit de la concurrence et des aides d’État au sein de
l’Union. Cette exonération a coexisté avec le droit européen
pendant plus de 50 ans. Alors pourquoi maintenant ? L’explication
se trouve dans un autre texte : le Règlement général d’exemption
par catégorie (RGEC) entré en vigueur le 1er juillet 2014. Ce
DR
DÉCRYPTAGES
RÉUNION
La « proposition » de la Commission européenne signifie la fin de l’exonération de
l’impôt sur les sociétés dont les ports français bénéficient en vertu d’une loi… de
1942.
dernier fixe un cadre général permettant aux États membres de se
passer de l’autorisation préalable de la Commission européenne
pour octroyer certaines subventions à des organismes publics.
Avant de mettre en œuvre ce texte, qui peut s’apparenter à un
blanc-seing partiel en matière d’aides d’État, la Commission s’est
lancée dans une vérification minutieuse de la comptabilité publique
de certains des organismes visés, parmi lesquels, donc, les ports.
Et ce dans plusieurs pays, notamment ceux du « Range
Nord » : France, Pays-Bas, Belgique et Allemagne où des enquêtes
sont actuellement en cours.
MAURICE
MAURICE
Reefcube
rachetée
par Esokia
Une grosse pointure à la tête d’IBL pour
conduire la fusion avec GML Investissement
La start-up fondée par le Français
Eric Chaber et spécialisée dans
les applications mobiles a été
reprise à 100% par l’agence web
Esokia dont l’actionnaire majoritaire est Denis Lacour. Président
de la Chambre de commerce
France-Maurice (CCIFM), ce dernier déploie depuis quelques
années une activité de Business
Angel. Esokia, qui a été créée à
Maurice en 2008 par le Français
Michel Demari, emploie 60 personnes. Le rachat de Reefcube
lui permet de d’accélérer sa
croissance sur le segment des
applications mobiles.
12 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Le recrutement a pris du temps, mais, depuis janvier, c’est le Français Yann Duchesne qui occupe le
poste de CEO du groupe IBL. Et ce n’est pas le dernier venu. On lui doit même un livre, « France
S.A. », publié au Seuil en 2002, à la veille de l’élection présidentielle française. Il montrait dans cet
ouvrage comment la France avait toujours tous les atouts pour réussir mais restait à la traîne pour
avoir cru aux vertus de « l’étatisme » et à la fameuse « exception française ». Un livre en forme de programme proposé au futur président, l’invitant à dessiner une ambition et une vision claire de l’avenir
du pays. Pendant vingt ans, de 1982 à 2002, ce diplômé de Polytechnique, de Science Po Paris et
de l’école nationale supérieure des Mines a travaillé au sein du cabinet McKinsey & Company où il a
été directeur général pour la France. Il a travaillé ensuite dans le capital-investissement au sein de
Doughty Hanson pendant 12 ans et demi, un poste lui permettant de siéger au conseil d’administration
de grandes entreprises comme Laurent Perrier.
À la tête d’IBL, Yann Duchesne devrait avoir à conduire la fusion de ce groupe avec GML
Investissement qui est son principal actionnaire. Il y voit la possibilité de « développer de fortes
synergies opérationnelles, financières, organisationnelles et stratégiques, combinant ainsi les
ressources pour développer davantage les activités localement et à l’étranger ». Des consultants indépendants ont été nommés pour définir le montage juridique, les évaluations et le processus transactionnel. Si le projet est accepté par les conseils d’administration des deux entreprises, les
actionnaires auront à se prononcer en mai 2016 pour une fusion effective en juillet.
DÉCRYPTAGES
R
MADAGASCA
MAURICE
Le fonds NRF Equity
Investment toujours pas
épuisé
D’un montant de seulement 250 millions de roupies (6,25 millions
d’euros), il avait été créé en 2012 par l’État mauricien et des
banques commerciales et sa gestion confiée au cabinet d’expertscomptables BDO en vue de soutenir des PME. Mais quatre ans
plus tard, seulement 100 millions de roupies (2,5 millions d’euros)
ont été décaissés en faveur de sept entreprises évoluant dans le
recyclage, l’éducation et l’informatique. De deux choses l’une, soit
l’information est mal passée, soit les conditions d’accès sont trop
contraignantes car tout le monde s’accorde à dire que beaucoup
de PME manquent de fonds propres. Il y a de quoi se poser des
questions en tout cas, à l’heure où le gouvernement vient de
lancer en grandes pompes la Maubank qui se veut la banque des
PME et leur promet l’équivalent de 250 millions d’euros sur cinq
ans.
De gauche à droite : André Beaumont, président de la Chambre de commerce et
d’industrie France-Madagascar (CCIFM), Marius Rabibisoa, président du Groupement
professionnel des commissionnaires agréés en douanes (GPCAD), Fredy Rajaonera,
président du Syndicat des industries de Madagascar (SIM), Noro Andriamamonjiarison,
président du Groupement des entreprises de Madagascar (GEM), Charles Giblain,
président du Groupement des entreprises franches et partenaires (GEFP) et Olivier
Ribot, directeur général de Lexel.
alors que les paiements doivent être effectués auprès de l’Agence
portuaire maritime et fluviale. Le GEM et ses groupements revendiquent ainsi l’annulation de l’ACD et, dans ce cadre, vont saisir le
Conseil d’État pour attaquer l’arrêté interministériel et les textes y
afférents. Njaratiana Rakotoniaina
MAURICE
Les touristes russes
sont les plus dépensiers
Bonne nouvelle pour
l’industrie touristique,
le nombre de visiteurs
progressé de 10,9%
en 2015, atteignant
les 1 151 723 visiteurs.
Mais la bonne nouvelle, c’est surtout que
les recettes ont progressé de la même façon, et même légèrement plus, à 49,5
milliards de roupies (1,23 milliard d’euros), un montant qui
n’est pas encore officialisé. Les touristes russes se montrent
les plus dépensiers avec une dépense moyenne de 1 827
euros pour leur séjour, mais il est vrai qu’ils ne sont pas nombreux. Ils sont suivis des Suisses à 1 406 euros et des Chinois
à 1 339 euros. Première clientèle, représentant 22,1% du
marché, les Français dépensent en moyenne 1 013 euros.
Stocklib Elnur Amikishiyev
« Le GEM (Groupement des entreprises de Madagascar – Ndlr) et
ses membres vont suspendre leur participation au dialogue public-privé », a annoncé le 5 février la présidente du GEM, Noro Andriamamonjiarison. En cause le manque de concertation de la part
des autorités. Mais la goutte d’eau qui a fait déborder le vase porte
sur l’ACD (Advance Cargo Declaration) d’un montant de 77 euros
réclamés aux armateurs sur chaque conteneur plein et véhicule
débarqué ou embarqué. Une « taxe » qui vise à mettre en conformité
les ports malgaches avec les normes internationales de sécurité et
de sûreté. L’ensemble du secteur privé juge cependant qu’elle est
une source de charges supplémentaires pour les entreprises. En
effet, même si ce sont les armateurs qui sont ponctionnés, ils ne
manqueront pas de répercuter ce surcoût auprès de leurs clients.
Le secteur privé malgache considère aussi la procédure comme illégale. Selon le principe de l’Organisation mondiale du commerce
(OMC), tout paiement de redevances par les opérateurs économiques
doit avoir une contrepartie en termes de services rendus. Or, la
société béninoise ATPMS, en charge de la collecte de l’ACD, n’a à
son actif aucun projet d’investissement. Sans compter que les
textes ne sont pas clairs en parlant d’un paiement à l’international
Njaratiana Rakotoniaina
Le secteur privé suspend le
dialogue avec l’État
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 13
MADAGASCA
La Coopération
allemande renforce
sa présence
Des entreprises turques s’intéressent
à la Grande île
Trois grands projets sont financés par la GIZ (Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit),
l’agence de coopération allemande avec, tout
d’abord, un budget de 12 millions d’euros consacré
à la protection de l’environnement dans le cadre
de la mise en œuvre du Programme d’appui à la
gestion de l’environnement (PAGE) dans trois régions : Boeny et Diana (nord) et Atsimo Andrefana
(province de Tuléar). En effet, la GIZ collabore
avec le ministère malgache de l’Environnement et
de l’Écologie afin de renforcer la protection et l’utilisation des ressources naturelles, la diffusion et la
professionnalisation de la chaîne de valeur de
l’énergie biomasse et l’intégration de la durabilité
écologique dans l’exploitation minière artisanale à
petite échelle. Un programme de 4 millions d’euros
est aussi destiné au Projet de développement
communal inclusif et de décentralisation (Prodecid),
lancé officiellement le 22 janvier 2016 avec le ministère de l’Intérieur et de la Décentralisation dans
la région pilote de Diana (nord) et à Analamanga
(centre). Enfin, plus de 3,5 millions d’euros sont
attribués au Projet de la promotion de l’électrification
rurale par les énergies renouvelables (PERER) à
travers les 22 régions du pays. Pour cela, la GIZ
travaille étroitement avec le ministère de l’Énergie
et des Hydrocarbures, l’Agence de développement
de l’électrification Rurale (ADER) et l’Office de régulation de l’électricité (ORE). Au total, la GIZ a
prévu une première tranche de 20 millions d’euros
pour l’ensemble de ses interventions. Une deuxième
tranche du même montant devrait suivre.
R
DR
DÉCRYPTAGES
R
MADAGASCA
Une première rencontre entre des représentants de l’association Turkish Electro Technology (TET) et le
groupement du patronat malgache (Fivmpama) a permis de planifier des rencontres B to B pour ce mois
de mars à Tananarive.
La desserte Istanbul-Tananarive ouvre de nouvelles perspectives et des opérateurs
turcs dans l’électricité, électronique et l’électroménager sont en quête d’opportunités
d’affaires. Une première rencontre entre l’association Turkish Electro Technology
(TET) et le groupement du patronat malgache (Fivmpama) a permis de planifier
des rencontres B to B pour ce mois de mars à Tananarive. De grandes entreprises
turques, comme Aim Enerji, Sahra Kablo, Mikrosay, Simfer, Vestel et Teksan
Generator, sont attendues. La TET, dont les membres ont exporté pour 13,3
milliards d’euros dans le monde en 2014, a l’ambition de doper ses ventes. Elle a
prévu pour cela un périple qui, outre Madagascar, la conduira au Kenya, au Mozambique, en Chine, en Iran, au Pakistan, en Corée du sud, au Japon, au Sri
Lanka et à Singapour. Pour le Fivmpama, les rencontres de mars ne sont qu’un
début et l’organisation patronale malgache regarde aussi du côté du textile, de
l’agriculture et de l’agro-industrie. Elle devrait organiser une mission en Turquie en
2016.
R
MADAGASCA
10% de droit d’accises imposés aux télécoms
Le gouvernement malgache veut profiter du boom du secteur pour engranger des recettes supplémentaires. Le nombre d’usagers est
en effet passé d’un peu plus de 1,2 million en 2005 à plus de 11,6 millions en 2014. Évidemment, les opérateurs protestent car les droits
d’accises sont habituellement prélevés sur l’alcool et le tabac. Sans oublier que le téléphone portable est devenu un produit de première
nécessité pour une population qui le plus souvent n’a pas accès à la téléphonie fixe. Selon les chiffres officiels de l’Autorité de régulation
des technologies, le chiffre d’affaires du secteur a atteint 221 millions d’euros en 2014. Déjà, en 2013, l’État avait supprimé la gratuité de
la communication intra-flotte dans le secteur privé et, en 2015, un droit d’accises de 7% avait été imposé. Njaratiana Rakotoniaina
14 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
BULLETIN
D’ABONNEM
E
BULLETIN
À DÉCOUPER
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NOM : ...................................................................................
PRENOM : .............................................................................
ENTREPRISE : .....................................................................
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L’Eco aust
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Nº 305 - Février 2016
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Nº 306
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2016
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LEADER
Madagascar
18 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
SALIM ISMAIL ÉLEVÉ AU GRADE
D’OFFICIER DE LA LÉGION D’HONNEUR
Il y avait du beau monde, le 8 février dernier, à la résidence de l’ambassadeur de France à Madagascar,
Véronique Vouland-Aneini, qui remettait au Pdg du groupe Socota les insignes d’officier dans l’Ordre
national de la Légion d’honneur.
L’équipe dirigeante du groupe
Socota a fait le déplacement,
le 8 février, à la résidence de
l’ambassadeur de France,
pour la remise des insignes
d’officier de la Légion
d’honneur à leur Pdg. Sur
notre photo, ce dernier est
entouré de deux de ses fils,
qui opèrent au sein du
groupe : Mathias (à gauche)
et Gauthier.
E
n bonne place, lors de cette réception à la fois empreinte
d’émotion et conviviale, l’équipe dirigeante du groupe
textile avait fait le déplacement depuis Antsirabe où le
premier employeur de Madagascar (avec quelque 7 000
salariés) a concentré ses activité dans la production de
tissus et la confection pour des grands noms comme Zara en Europe
et Woolworth en Afrique du Sud. Salim Ismail, Français aux origines
indiennes, préside depuis 1989 l’entreprise fondée par son père en
1930. Il en a fait une multinationale qui a franchi en 2012 le cap des
300 millions d’euros de chiffre d’affaires, occupant le peloton de tête
dans le classement de L’Eco austral des 500 premières entreprises de
la région. Le fruit d’une diversification dans la confection et dans
d’autres métiers comme l’aquaculture de crevettes, dans la région de
Diego Suarez, avec OSO Farming qui a pu obtenir le label bio AB, une
grande première mondiale.
DISTRIBUTION DE PRODUITS DE LA MER EN FRANCE
En 2009, Socota fait une entrée significative dans le capital de la
Maison Reynaud (groupe Atlantys), un leader sur le marché français
de la distribution de produits de la mer qui commercialise d’ailleurs les
crevettes OSO. 2009, c’est aussi l’année d’une nouvelle crise dans la
Grande île et, à l’international, le marché du textile subit de profonds
bouleversements qui affectent Maurice. Salim Ismail repense sa
stratégie et ferme son usine mauricienne de fabrication de tissus en
veillant au reclassement de ses 500 salariés. L’activité se replie sur
Antsirabe, à Madagascar, où elle s’intègre à un vaste ensemble
industriel avec une zone résidentielle pour ses cadres dont plusieurs
Mauriciens. Chevalier de la Légion d’honneur, et aujourd’hui officier, le
patron du groupe est aussi commandeur de l’Ordre national de Madagascar même s’il n’a pas la nationalité malgache. De 2002 à 2005, il a
été vice-président de l’Association industrielle africaine (AIA) et, de
2000 à 2008, membre du conseil d’administration de la Fédération internationale de l’industrie textile (ITMF). Salim Ismail est membre du
Brains Trust de l’Evian Group à IMD et, depuis 2011, membre du
Global Agenda Council du WEF (World Economic Forum) sur le
Commerce et l’Investissement. Ingénieur formé à l’ENSISA de Mulhouse
(1962), il a obtenu un MBA de la Sorbonne Graduate Business School
de Paris (1963). Il est Alumni d’IMD Lausanne, suite à sa participation
aux programmes Orchestrating Winning Performance (2010) et The
New Age of Engagement for CEOs (2012 et 2013).
■
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 19
LEADER
Madagascar
VOAHIRANA RAMALANJAONA,
UNE LIBRAIRE AUTHENTIQUE
POUR LA GRANDE ÎLE
Alors que son entreprise TMV (Trano Mpampiely Vaovao) de distribution de presse a été rachetée au
Français NMPP (aujourd’hui Presstalis) par des opérateurs malgaches, elle diversifie ses activités en
ouvrant la première librairie-café de Madagascar.
Par Mbolahasina Maminirina - [email protected]
En étant, depuis son implantation en 1962 à Madagascar, une filiale
des NMPP (Nouvelles messageries de la presse parisienne, devenues
Presstalis en 2009), la TMV (Trano Mpampiely Vaovao) s’est concentrée
dans l’importation et la distribution de publications (livres, revues, magazines et journaux…) auprès des grandes surfaces et librairies de la
capitale et de province. En 1997, Voahirana Ramalanjaona arrive à la
TMV en tant que libraire et en devient son associée gérante en 1998.
En quête d’évolution, elle ouvre sa première boutique de détail et la
TMV devient la Librairie Maison de la presse. « On s’est constamment
attelé à ce métier de grossiste au fil des ans et ce n’est qu’en 1998
qu’on s’est lancé dans le métier de libraire de détail », confie Voahirana
Ramalanjaona. En décembre 2014, des opérateurs malgaches rachètent
l’entreprise à Presstalis et confient à Voahirana Ramalanjaona le soin
d’en faire une référence à Madagascar. La jeune femme ne tarde pas
à ouvrir la toute première librairie-café, dénommée « Mille feuilles ».
Cet espace culturel et de détente propose une large gamme de livres
de plus de 4 500 titres, de la belle papeterie et de la carterie dans son
coin boutique.
UN LIEU DE VIE CULTUREL
Le coin café est un endroit convivial, conçu pour le partage, l’échange
et les rencontres autour de différents sujets tout en dégustant une
tasse de café ou de thé et en savourant une délicieuse pâtisserie. La libraire organise différentes animations mensuelles dont le café littéraire,
le café philo, le café lecture, le café coaching, le café musique et le
café expo. Voahirana Ramalanjaona a tissé des partenariats avec des
auteurs et intellectuels de renom qui apportent leur contribution.
Michèle Rakotoson pour le café littérature, Kemba Ranavela pour le
café philo, Vololoniaina Ratrimo pour le café lecture et Bianca Manikam
20 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Zo Andriamambola
LEADER
Madagascar
Membre de l’Association des libraires malgaches (ALM), Voahirana Ramalanjaona a
reçu l’agrément « Librairie de référence » du Centre national du livre (CNL) qui se
veut le premier partenaire du livre en France depuis 1946.
pour le café coaching. « Des programmes de cuisine, de loisirs créatifs
et un atelier pour enfants sont également en phase de préparation. Ce
lieu de vie culturel permettra de créer une synergie qui favorise les
échanges et les rencontres entre des publics très différents », annonce
Voahirana Ramalanjaona.
■
La libraire organise différentes animations mensuelles
dont le café littéraire, le café philo, le café lecture,
le café coaching, le café musique et le café expo,
animés par des personnalités de renom.
Zo Andriamambola
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 21
LEADER
Madagascar
LA LÉGION D’HONNEUR
POUR ISABELLE AH-SING
Wilfrid Daffond
L
a directrice générale déléguée de la Banque de la Réunion
a reçu le 13 février, des mains de Jean-Claude Pech, son
parrain, les insignes de chevalier dans l’Ordre de la Légion
d’honneur. Un honneur dont s’est émue cette femme
discrète qui a cité, lors de son discours, Albert Schweitzer :
« Que chacun s’efforce dans le milieu où il se trouve de témoigner à
d’autres une véritable humanité, c’est de cela que dépend l’avenir du
monde. » Une distinction qu’elle a dédiée à son père, aujourd’hui
décédé, et qui a été un modèle pour elle, deuxième d’une famille de
sept enfants. Titulaire d’une maîtrise de sciences économiques d’AixMarseille, du DECS (Diplôme d’études comptables supérieures) et
d’un DES de Banque (ITB), Isabelle Ah-Sing a effectué toute sa
carrière au sein de la BR où elle avait été recrutée comme adjointe au
directeur de la filiale de crédit-bail mobilier, Slibail Réunion. Elle
occupera ensuite le poste d’adjointe au directeur des engagements
avant de prendre, successivement, la direction de l’organisation et de
la formation, la direction financière, puis la direction des ressources
humaines. En 2005, elle devient membre du comité exécutif et occupe
De gauche à droite : Jean-Claude Pech, Grand’croix de la Légion d’honneur et parrain d’Isabelle Ah-Sing, le général Yvon Lucas, porte-drapeau de la Légion d’honneur, Isabelle Ah-Sing, Bernard Frémont, directeur général de la BR et Dominique
Sorain, préfet de La Réunion.
le poste de secrétaire générale en charge de la direction juridique et
de la direction des achats et des moyens généraux. En 2012, elle
accède au poste de directrice générale déléguée, première femme à
atteindre un tel niveau dans le secteur bancaire à La Réunion. À
signaler qu’Isabelle Ah-Sing est aussi une passionnée de golf, sport
qu’elle pratique avec dextérité.
■
AVEC LA MAISON DES GOURMETS, NATHALIE GRENOT
DÉCLINE UNE ENSEIGNE LOCALE EN FRANCHISE
I
dentifier une niche qui n’existe pas à La Réunion pour l’investir,
voilà ce qui a conduit Nathalie Grenot à monter son concept de
fromagerie charcuterie épicerie fine. Elle a ouvert une première
boutique en octobre 2010, dans la capitale de l’île, à Saint-Denis.
« L’idée était véritablement de miser sur un marché qui n’existe pas :
réunir en un seul lieu des produits de qualité pour des consommateurs
avertis ou néophytes », explique la chef d’entreprise qui a évolué
quinze années comme commerciale dans la région parisienne, de
chef des ventes à directeur grands comptes dans la grande distribution.
C’est la rencontre avec son mari, lui-même entrepreneur sur l’île
depuis de nombreuses années, qui l’a poussée à monter son commerce
d’épicerie fine. Dès le départ, l’idée était de créer trois boutiques sur
l’île, en propre ou en franchise. Finalement, c’est la deuxième option
qui sera choisie avec un premier franchisé dans le sud, à Saint-Pierre,
en octobre 2015 et bientôt à Saint-Gilles, d’ici le second semestre
2016. « J’ai trouvé des partenaires qui m’ont suivie dans cette aventure.
Cela me permet d’avoir une bonne visibilité sur l’île, de massifier les
approvisionnements auprès des producteurs et des grossistes, et de
trouver ainsi des solutions pour avoir des prix compétitifs. » Attentive
aux évolutions du marché, la fromagère, qui s’est formée à Paris à
22 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Marion Gauge-Rousselot
LEADER
Réunion
Nathalie Grenot avec sa vache, qui n’est autre que l’emblème de sa boutique, au 19,
rue Sainte-Anne, à Saint-Denis.
■
l’institut Ifopca des commerces et de l’alimentation, en spécialisation
fromagerie, n’hésite pas à sillonner les salons pour rester en alerte, à
l’écoute des tendances.
Marion Gauge-Rousselot
BEN PADAYACHY DIRECTEUR GÉNÉRAL
DU GROUPE GAMMA-CIVIC
amma-Civic est ravi d’accueillir Ben Padayachy au sein du groupe.
Bien qu’il ait passé la majeure partie de sa carrière dans le domaine
bancaire, ses compétences financières et son leadership font de lui
un très bon candidat pour le poste de Group Managing Director de
Gamma-Civic », déclare Carl Ah-Teck, le président du conseil d’administration du groupe
mauricien. La décision de nommer Ben Padayachy directeur général du groupe à
compter de janvier 2016 fait suite à la réorganisation de Gamma-Civic. En juillet 2015,
l’entreprise, au départ familiale, est devenue une société d’investissement. Avant cette
transformation, Gamma était parmi les premières sociétés dans le domaine de la
construction, ayant une intégration verticale comprenant la production et la commercialisation
des matériaux de construction, la construction des bâtiments et les travaux de génie
civile. Au fil du temps, l’entreprise a également investi dans d’autres secteurs dont le développement immobilier, l’hôtellerie et le Loto. Ben Padayachy, ancien Deputy CEO
(numéro deux) de la Banque AfrAsia, se dit honoré de cette nomination. « Je voudrais remercier le conseil d’administration de Gamma-Civic de la confiance qu’il place en moi.
Le groupe se positionne aujourd’hui comme un acteur important de l’économie
mauricienne. Je suis extrêmement heureux d’apporter ma contribution dans cette phase
cruciale entamée par l’entreprise depuis peu et je compte mener à bien cette mission,
conjointement avec les membres du comité d’investissement et l’ensemble du personnel
du Groupe ». Ben Padayachy détient une maîtrise en économie appliquée de l’université
de Paris Dauphine et un DESS banque-finance de l’université de Rennes.
■
DR
«G
Ancien numéro deux d’AfrAsia Bank, ce diplômé de Paris
Dauphine avait jusqu’alors principalement évolué dans la
finance.
ALAIN ST.ANGE DEUXIÈME PERSONNALITÉ
MONDIALE DES VOYAGES ET DU TOURISME
L
DR
LEADER
Maurice/Seychelles
Alain St.Ange, ministre seychellois du
Tourisme : « Cette distinction est une fierté pour
mon pays mais aussi pour l’océan Indien. »
24 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
e ministre seychellois du Tourisme a été choisi par les lecteurs de l’eTurboNews, un
portail web fondé il y a dix-sept ans et qui propose des articles sur l’actualité dans le
monde des voyages et du tourisme. La première place revient à Taleb Rifai, le secrétaire
général de l’Organisation mondiale du tourisme (OMT), institution onusienne chargée de
la promotion d’un tourisme responsable, durable et accessible à tous. Le podium est
complété par Hiran Cooray, le président et directeur général du World Travel & Tourism Council
(WTTC - Conseil mondial des voyages et du tourisme), également président de la chaîne hôtelière
Jetwing au Sri Lanka. eTurboNews a primé Taleb Rifai pour ses efforts pour réunir les leaders
mondiaux du tourisme, tâche qui était jusqu’ici estimée comme étant difficile. Quant à « Alain
St.Ange, il a été choisi pour ses connaissances dans l’industrie du tourisme, son amabilité et son éloquence lors des conférences où il est présent. Ce qui fait de lui le ministre du Tourisme que l’on
préfère », précise eTurboNews. Pour le ministre seychellois du Tourisme, cette distinction fait la fierté
de son pays mais aussi de l’océan Indien. Toutefois, il estime qu’il existe toujours un énorme potentiel
à exploiter dans le tourisme aux Seychelles, dans l’océan Indien et en Afrique afin de distinguer ces
destinations dans l’industrie mondiale des voyages et du tourisme.
■
LEADER
Ouganda
CINQUIÈME MANDAT POUR
LE « ROI » MUSEVENI
Le président ougandais s’est prêté pour la cinquième fois au jeu des élections, sans risquer de perdre la
victoire. Mais le mécontentement d’une jeunesse sans emplois pourrait mettre fin à cette fiction.
Par Laurence D’Hondt
ela fait cinq fois déjà que le président ougandais Yoweri
Museveni se prête au jeu dangereux des élections,
sans prendre toutefois le risque de les perdre. Si
« l’homme au chapeau », comme l’appellent les Ougandais, s’est transformé au cours de ses trente années
de règne ininterrompu en père de la nation, il n’a rien perdu de sa
vigilance de guérillero pour qui la situation n’est jamais définitivement
acquise. Habile, il a su au cours de ces trois décennies naviguer entre
développement du pays et captation des richesses, entre droits
accordés et ordre préservé, entre accès à la communication moderne
et maîtrise de son image. Et enfin, entre démocratisation et consolidation
de son pouvoir.
rassurant contre toute tentative de déstabilisation du pays, entouré
par deux pays en guerre cyclique, la RDC et le Sud Soudan.
Mais l’âge d’or de son règne semble toucher à sa fin. La démographie
de l’Ouganda, qui affiche une moyenne d’âge de 15 ans, pousse
chaque année 700 000 jeunes sur le marché du travail où seuls 2%
peuvent espérer un emploi stable. Les autres errent dans les rues,
maudissant chaque jour davantage l’homme au chapeau, qui a mis
en place un système de prébendes liées à son parti le NRM (National
Resistance Movement) qui forme le noyau de l’État et dont ils se
sentent exclus.
VERS LA FIN DE L’ÂGE D’OR
Dans ce pays en pleine mutation, l’homme au chapeau a compris que
le jeu démocratique ne pouvait être poursuivi qu’en s’assurant en profondeur la maîtrise de tous les rouages du processus électoral. Ainsi
est-il parvenu à donner les apparences d’un théâtre démocratique
qu’il répète tous les cinq ans, sans jamais risquer de perdre la victoire.
Mais cela avec subtilité : en Ouganda, il n’y a pas de victoire du
président avec 99,8% des voix. Son score varie entre 55% et 75% des
voix, laissant à son ancien compagnon de brousse et désormais opposant consacré, Kizza Besigye, entre 25% et 35% des voix. Pour
parvenir à ses fins, il fait bien sûr appel aux moyens classiques
comme le bourrage d’urnes, l’achat de voix ou encore la manipulation
des résultats tout au long du trajet qui relie le lointain village au centre
de comptage national. Mais si le théâtre se perfectionne à chaque
élection, introduisant ainsi dernièrement un système de vérification
digitale digne du plus moderne des aéroports sous chaque arbre à
palabres, il travaille le dispositif en profondeur avant même que le
théâtre ne démarre et après qu’il se termine. Ainsi a-t-il recruté,
quelques mois avant la tenue des élections, des centaines de milliers
de jeunes désœuvrés auxquels il a confié la mission de « prévenir les
crimes », les appelant des « crime preventers », tout en leur promettant
ensuite un emploi. Ces jeunes qui ne portaient ni uniforme ni signe
C
Sous la pression de la communauté internationale exigeant l’adoption
du multipartisme, Yoweri Museveni a accepté depuis 1996 de soumettre
son pouvoir aux urnes. Mais lorsqu’il a tenu ses premières élections
dans les années 90, l’homme bénéficiait d’un crédit important tant au
niveau national qu’international. En effet, il avait remis son pays sur la
voie de la paix, après des années d’atrocités et de chaos provoqués
par le règne d’Idi Amin Dada. Dans le même temps, il s’affirmait année
après année comme l’incarnation d’une nouvelle génération de leaders
africains, appliquant une politique économique libérale, développant
le réseau routier essentiel à l’économie rurale du pays et affichant des
taux de croissance aux alentours de 7%. Afin de booster l’économie, il
avait également fait revenir les Indiens, qui avaient été chassés, et largement ouvert les portes du pays aux Chinois. Aux femmes, il avait
donné des droits inédits, tels que la possibilité de porter plainte pour
violence conjugale. La femme ougandaise, qui avait l’habitude de se
faire chasser à coups de bâtons si elle osait porter plainte au
commissariat de police, était désormais reçue et entendue. Enfin,
s’adaptant aux changements de son pays, il avait laissé tomber l’habit
du guérillero pour adopter le chapeau de père de la nation, rempart
26 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
UN THÉÂTRE QUI SE PERFECTIONNE
State House Uganda
Sous la pression de la communauté internationale exigeant l’adoption du multipartisme, « l’homme au chapeau », Yoweri Museveni, a accepté depuis 1996 de soumettre son
pouvoir aux urnes. Mais il reste maître du jeu.
spécifique de reconnaissance ont été brièvement formés dans la
brousse et sont retournés dans leur zone où ils ont contribué à
diffuser la menace d’un retour de la guerre en cas de victoire de l’opposant. Auprès des anciens et dans les campagnes qui restent
hantées par la menace de la guerre, ce message a été très porteur.
LA CONTESTATION PREND DE LA VOIX
Pour rester le maître du processus, le président ougandais a également
besoin de tenir entre ses mains son issue. Ainsi, la commission
électorale est entièrement placée sous sa dépendance et inféodée à
son pouvoir. Alors même que le décompte était encore en cours, no-
Pour parvenir à ses fins, Yoweri Museveni fait appel
aux moyens classiques comme le bourrage d’urnes,
l’achat de voix ou encore la manipulation des
résultats tout au long du trajet qui relie le lointain
village au centre de comptage national.
tamment dans les bastions de l’opposition, l’homme a pris la décision
de proclamer le résultat final : pour son rival 35,37% des voix et pour
lui-même 60,75%. Afin de faire accepter ces résultats qui ont été immédiatement contestés, il a simplement placé pour la énième fois son
rival en résidence surveillée et coupé tout accès aux réseaux sociaux
dans le pays. Mais si Yoweri Museveni a gagné cette fois encore, le
jeu qu’il joue pourrait un jour se retourner contre lui. En effet, à chaque
élection se renforce le sentiment que le pouvoir peut être discuté. Les
meetings politiques rassemblent des foules denses qui apprennent à
défier leurs peurs. Dans les rangs de la jeunesse qui n’a plus souvenir
de la guerre, mais qui se lève tous les matins sans perspectives de
travail, les passages à tabac et les interpellations ne sont plus un motif
suffisant pour se taire. Même les villageois, ses meilleurs supporters,
prennent plaisir au débat contradictoire. Le soir du 18 février, jour des
élections, la campagne ougandaise bruissait de la joie de suivre le
processus de dépouillement fait en présence de tout le village. À
chaque bulletin pioché par le président de bureau dans l’urne, lecture
était faite à voix haute devant l’ensemble de la communauté villageoise
qui approuvait ou désapprouvait avec bonhomie le choix écrit sur
chaque bulletin de vote. Un authentique moment de démocratie participative pour une population qui acceptera de moins en moins de ne
pas le voir répercuté au plus haut niveau de l’État.
■
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 27
LEADER
Ouganda
PERFORMANCE
Réunion dossier
L’INNOVATION EST
L’AVENIR DE L’INDUSTRIE
L’industrie réunionnaise a assuré son développement à travers l’import-substitution en profitant d’une
belle croissance de la consommation. Mais la situation est plus difficile aujourd’hui et elle doit conforter
ses positions, prospecter de nouvelles niches et s’ouvrir des pistes à l’export en misant sur l’innovation.
Par Pierrick Pédel et Alain Foulon
« À La Réunion, l’innovation n’est pas une option mais une obligation. »
Pour Gaston Bigey, directeur général de Nexa, l’agence régionale de
développement, d’investissement et d’innovation, les entreprises réunionnaises font face à une concurrence mondiale de plus en plus
intense et elles doivent donc se différencier en jouant sur leur singularité
afin de proposer des offres uniques.
Selon le consultant Serge G. Hoarau, lui-même ancien industriel, et
qui suit le secteur depuis une trentaine d’année, on pratique quatre
types d’innovation dans l’industrie réunionnaise : la création d’un
nouveau produit ou l’offre d’une nouvelle prestation commerciale ou
de service, la mise en œuvre de nouvelles techniques pour la production
de biens ou la réalisation de prestations de services, l’innovation d’organisation et l’innovation marketing. « On pourrait y ajouter une
tendance plus récente : l’innovation financière. Ce qui en ferait cinq. »
IL FAUT DISPOSER DU MOTEUR HUMAIN NÉCESSAIRE
L’innovation dite « de rupture », que certains puristes considèrent
comme la seule véritable innovation, révolutionne une industrie, un
service ou une fonction. Mais on parle aussi d’innovation « incrémentale »,
c’est-à-dire le fait d’améliorer jour après jour des modes opératoires
ou des processus de fabrication. « C’est sous ces deux angles que
l’industrie locale est en quelque sorte condamnée à innover… donc à
travailler », souligne Serge G. Hoarau.
Pour innover, une entreprise doit déjà en avoir la volonté, se montrer
créative, savoir répondre à des contraintes de différentes natures
(technique, juridique, organisationnelle, financière, etc.), et être en
phase avec des usages naissants, anticiper en détectant des attentes
non satisfaites ou des besoins nouveaux. « Les conditions sont liées,
mais l’une des conditions incontournables, à mon avis, c’est que l’en-
28 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
treprise soit créative, ajoute le consultant qui a accompagné bon
nombre de projets. Il faut disposer du moteur humain nécessaire pour
trouver des idées nouvelles et répondre aux questionnements de
manière novatrice en sachant ouvrir les portes du possible. En ce
sens, c’est une Réunion que l’on transformera en territoire ou terre de
créativité qui pourra être le berceau d’innovations industrielles locales. »
LA FABRIQUE D’INNOVATION EST EN MARCHE
Force est de constater que, depuis quelques années, les projets
innovants pullulent dans l’île avec une floraison de TPE-PME. Agroflor
a mis au point un équipement industriel qui permet de valoriser le
potentiel d’un produit réunionnais, le rhizome du conflore, et représente
une rupture technologique en matière d’extraction de l’amidon, un
produit largement utilisé dans l’agro-industrie.
Bioalgostral Océan Indien est une société spécialisée dans la production
et la valorisation de micro-algues en zone intertropicale. Elle a
développé un savoir-faire unique couvrant l’ensemble des procédés
de la production et de la transformation de micro-algues dans l’optique
de différents débouchés dont les bio-carburants.
L’entreprise de recyclage RVE innove en se focalisant sur l’optimisation
des volumes. Elle a par exemple acquis une machine pour le traitement
des écrans qui permet une optimisation de l’espace. Sans ce traitement,
un conteneur rempli d’écrans de télévision pèse environ 6 à 7 tonnes.
Après traitement, le conteneur est optimisé en volume et atteint les 20
tonnes.
À la tête de Technifroid et de Solution Solaire Réunion, Gérard Llurens
a mis au point un système de climatisation solaire, véritable innovation
de rupture à l’échelle mondiale. De quoi faire émerger une activité industrielle susceptible de générer des emplois.
Stocklib/Pariwat Intrawut
Les voies de l’export passent inévitablement par la case innovation.
Solyval participe au développement durable en revalorisant les pneus
usagés. Dans une optique d’économie circulaire, elle donne une
seconde vie aux trois matières qui composent le pneu - le textile, la
ferraille et le caoutchouc - une fois séparées. À partir de caoutchouc,
Solyval produit des chips et des granulats. Les chips sont utilisées
dans le BTP pour les bassins d’infiltration et de rétention et comme
remblais drainants pour des murs de soutènement ou autres ouvrages
de construction comme la tranchée couverte de Saint-Paul réalisée
par Eiffage. Les chips sont aussi utilisés comme dérivés de fioul dans
les industries.
UN FONDS RÉGIONAL D’INVESTISSEMENT
DE 100 MILLIONS D’EUROS
On retrouve également de l’innovation dans les secteurs traditionnels
et parmi les entreprises établies de longue date. Dans les spiritueux, le
groupe Chatel a développé de nouveaux produits comme les rhums
arrangés banane-caramel ou caramel-beurre salé qui ont été primés
lors de récents salons agricoles internationaux. Le groupe Isautier a
lancé en première mondiale l’aRhummatik, un punch sans sucre
ajouté et faiblement alcoolisé, qui associe au rhum vieilli en fût de
chêne les meilleurs fruits de La Réunion, le tout aromatisé à l’extrait de
stévia (substitut au sucre). Ce produit a été primé à la Sélection SIAL
Innovation 2014 du Salon mondial de l’agroalimentaire qui s’est tenu à
Paris en octobre 2014. « L’innovation peut aussi aller se loger dans le
packaging », remarque Serge Hoarau. De fait, les producteurs de
punch ont opté pour le cubitainer (« bag in the box »). De son côté,
Edena réduit les emballages à la source. Pour ce faire, l’entreprise a
travaillé sur le grammage plastique de la bouteille et du bouchon qui a
été réduit. Une bouteille optimisée pour être facile à compacter. Ces
efforts innovants ont permis une baisse de 10% de matière plastique
Pour innover, une entreprise doit se montrer
créative, savoir répondre à des contraintes
de différentes natures (technique, juridique,
organisationnelle, financière, etc.), et être
e n ph a s e a v e c d e s u s a g e s n a is s a nt s ,
anticiper en détectant des attentes non
satisfaites ou des besoins nouveaux.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 29
PERFORMANCE
Réunion
Guillaume Foulon
PERFORMANCE
Réunion dossier
Gaston Bigey, directeur de
Nexa, l’agence régionale de
développement, d’investissement et d’innovation :
« Notre objectif est de mettre en place un fonds d’investissement de 100 millions d’euros. Ce qui pourrait mobiliser entre 500 et
800 millions d’euros selon
l’effet de levier bancaire
que l’on arrivera à
générer. »
pour 10% de produit en plus.
Initiée par la Région Réunion et ayant la forme d’une société d’économie
mixte, l’agence Nexa accompagne les porteurs de projets innovants,
mais peut aussi s’impliquer financièrement. Dans Bioalgostral, elle a
investi 2 millions d’euros en fonds propres. Mais au total, l’investissement
représentera 30 millions d’euros grâce à un partenariat avec la Banque
de la Réunion et à des fonds européens FEDER. Il est prévu la construction d’une unité de production de micro-algues à l’échelle industrielle
sur 2 hectares à la Technopole. La biomasse sera centrifugée sur
place et transportée sur l’unité d’extraction pour faire soit des nutriments
pour les animaux, soit des extraits destinés à l’industrie cosmétique
ou la pharmacologie.
« Le constat, c’est que nous avons une défaillance de la chaîne de
financement à La Réunion », souligne Philippe Holstein, responsable
de l’intelligence territoriale chez Nexa. Or, les entreprises sont souvent
L’INNOVATION, CE N’EST PAS FORCÉMENT
DU HIGH TECH
« On parle beaucoup en ce moment de start-up et de digital à La
Réunion. C’est une bonne chose, cela prouve que le secteur de l’économie
numérique est dynamique et porteur d’espoirs. Mais n’oublions pas que
près des trois quarts des innovations dans le monde sont plus de nature
sociale, organisationnelle, commerciale ou marketing, voire financière,
explique le consultant Serge G. Hoarau. Des entreprises industrielles
locales ont su innover en faisant appel à des organismes de Recherche
& Développement, mais aussi en Supply Chain, en packaging ou dans la
mise sur le marché de produits totalement nouveaux qui font appel à des
ingrédients locaux ou à des « concepts » tropicaux. Leur objectif a été,
dans tous ces cas, d’utiliser l’innovation comme facteur de différenciation
compétitive. »
30 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
confrontées à un manque de fonds propres. En outre, il existe encore
une méfiance vis-à-vis de l’ouverture du capital car généralement l’entreprise réunionnaise est une entreprise familiale. Nexa a donc choisi
de créer un fonds régional d’investissement. « Il s’agit de créer une
synergie entre les fonds européens FEDER et des fonds privés pour
doter La Réunion d’un fonds avec des garanties qui vont permettre de
lever la frilosité des banques et de renforcer les capitaux propres des
entreprises. Le but est de rassurer les banques et d’obtenir un effet de
levier intéressant pour des prêts à moyen et long termes pour les entreprises innovantes », souligne Philippe Holstein. Ce fonds devrait
être prêt fin 2016. « L’objectif est de mettre en place une enveloppe de
100 millions d’euros. Avec l’effet de levier, on pourra mobiliser entre
500 et 800 millions d’euros selon la part de l’effet de levier bancaire
que l’on arrivera à générer », ajoute Gaston Bigey. Le but est de
permettre aux entreprises innovantes de passer des caps difficiles et
surtout de trouver les relais qui leur permettent de changer de taille et
d’accéder à des marchés à l’exportation.
DES ACCOMPAGNEMENTS À L’INNOVATION
DEPUIS 1991
D’autres structures s’occupent de soutenir l’innovation à La Réunion
avec une répartition des rôles qui ne semble pas toujours très claire et
l’on se prend parfois à rêver d’un guichet unique. La plus ancienne est
sans doute le Centre régional d’innovation et de transfert de technologie
(CRITT) qui accompagne depuis 1991 les PME dans leur démarche
d’innovation ou d’amélioration de leurs produits et de leur organisation.
Créé à la demande des industriels, il mène ses actions en cohérence
avec les stratégies de développement du tissu économique réunionnais.
Il s’agit de développer de nouveaux produits agroalimentaires ou de
les adapter au marché local, de rationaliser l’organisation interne par
la mise en œuvre de démarches Qualité, Environnement et Sécurité,
d’apporter les services de proximité indispensables aux entreprises :
étalonnage des poids, longueurs et températures, évaluations hédoniques
et profils sensoriels, analyses nutritionnelles et agro-alimentaires, prototypage rapide, information et conseil sur la normalisation, la veille et
la propriété intellectuelle. Intégré dès l’origine à la Chambre de
commerce et d’industrie de La Réunion (CCIR), le CRITT Réunion mutualise ses ressources avec d’autres services consulaires. Il a rejoint
Entreprise Europe Réunion, labellisée en février 2008. Entreprise
Europe Network est le plus important réseau européen d’appui aux
entreprises, créé par la Commission européenne. À La Réunion, Entreprise Europe est portée depuis 2008 par la CCI Réunion et agit notamment en matière de promotion de l’innovation et de développement
durable.
UN INCUBATEUR QUI FONCTIONNE
DEPUIS QUINZE ANS
La Technopole a vu le jour en 2001 dans le but de promouvoir et de
stimuler l’innovation sur le territoire en accompagnant la création
d’entreprises innovantes grâce à l’incubateur. « L’incubateur est un
service d’accompagnement dont l’objet est de transformer un projet
innovant en une entreprise innovante viable et, pour cela, on va
Serge Hoarau, fondateur et
dirigeant d’Iridium-Développement : « N’oublions pas
que près des trois quarts des
innovations dans le monde
sont plus de nature sociale,
organisationnelle,
commerciale ou marketing,
voire financière. »
dessiner un parcours personnalisé pour chaque porteur et chaque
projet. Il s’agit d’un suivi sur mesure pendant 24 mois », précise
Elisabeth Peguillan, directrice générale de la Technopole. « Sur les
deux parcs, nous avons 111 raisons sociales, 31 laboratoires, 500
chercheurs et 1 300 étudiants. Sur le seul parc Technor nous avons
2 000 emplois hors université. Sachant que nous avons un projet de
développement de parc technologique dans l’Est. » Sans parler du
projet du Crédit Agricole de mettre en œuvre au sein du parc Technor
de Saint-Denis son concept de « Village by CA », dont un premier a
déjà ouvert ses portes à Paris en octobre 2014. Cet outil de soutien
aux start-up va prendre la forme d’un bâtiment de 3 000 à 4 000
mètres carrés dont le coût est estimé entre 15 et 20 millions d’euros et
qui devrait être livré d’ici fin 2017 (voir à ce sujet notre article dans
notre précédent numéro pages 43 et 44).
UN PÔLE DE COMPÉTITIVITÉ POUR
LA « BIO-ÉCONOMIE TROPICALE »
On compte 29 entreprises créées depuis 2003 suite à une incubation
à la Technopole et elles appartiennent à quatre secteurs : santé/biotech,
TIC, agroalimentaire et environnement/énergie. Certaines peuvent
ensuite frapper à la porte du pôle de compétitivité Qualitropic qui
soutient l’innovation dans la « bio-économie tropicale », c’est-à-dire la
valorisation des ressources, qu’elles soient alimentaires ou non alimentaires. « Nous nous adressons uniquement à des entreprises qui
existent déjà. Nous prenons souvent le relais de l’incubateur. Nous
avons 110 adhérents dont quelques organismes de recherche, mais
essentiellement des entreprises. En échange d’une cotisation, l’entreprise
sera accompagnée sur un certain volume d’heures sur le montage de
32 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Stocklib/Dusit Panyakhom
Guillaume Foulon
PERFORMANCE
Réunion dossier
« Il faut disposer du moteur humain nécessaire pour trouver des idées nouvelles et
répondre aux questionnements de manière novatrice en sachant ouvrir les portes du
possible. »
projet », explique Françoise Delabaere, directrice de Qualitropic. Le
pôle propose aussi une gamme de services payants comme l’accompagnement à la veille technologique ou la sensibilisation à la problématique de la propriété intellectuelle. « Nous avons une vingtaine de
projets accompagnés actuellement et, sur ce total, sept ont été
labellisés en 2015. La labellisation procure une garantie pour les partenaires de l’entreprise et les investisseurs éventuels », remarque
Florence Peiffer, ingénieur projet chez Qualitropic.
Parmi les projets soutenus par Qualitropic, on trouve Météor, représenté
par la société AS Bethléem qui représente une première à La Réunion
L’INNOVATION DANS LA GESTION DES STOCKS
Expert dans la gestion de la chaîne logistique (Supply Chain en anglais),
le consultant et formateur Jean Marie Bomy y voit un potentiel énorme
de progrès pour les entreprises réunionnaises. « La maîtrise des flux
passe notamment par une refonte totale des systèmes de gestion et
d’approvisionnement des stocks. Le niveau de maturité en ce domaine
est, à la base, faible dans la plupart des entreprises de ma connaissance. »
Et de citer le résultat de diagnostics effectués en septembre 2013 auprès
de cinq entreprises locales (de production et/ou de négoce) qui montrait
un niveau de stocks compris entre deux et neuf mois et demi de chiffre
d’affaires et des méthodes encore trop souvent archaïques dans la
gestion de la chaîne logistique. « Si l’on considère, qu’avec des principes
et des méthodes de gestion innovantes, la plupart des entreprises
pourraient tourner avec moins d’un mois de chiffre d’affaires en stock,
on peut se donner une idée des enjeux. »
Françoise Delabaere, directrice du
pôle de compétitivité Qualitropic :
« Nous avons une vingtaine de projets
accompagnés actuellement et, sur ce
total, sept ont été labellisés en 2015.
La labellisation procure une garantie
pour les partenaires de l’entreprise
et les investisseurs éventuels. »
DR
PERFORMANCE
Réunion dossier
avec un procédé de méthanisation à la ferme qui produira du biogaz à
partir de fientes de poules servant à produire de l’électricité et un
engrais local.
DES PROJETS EN BONNE VOIE
ET L’EXPORT EN LIGNE DE MIRE
Ce projet court sur deux ans et représente un investissement de
150 000 euros sur la phase de recherche & développement. La
première unité de production devrait être finalisée fin 2017. Autre
projet : Agriterra, en partenariat avec Akuo Energy, constitue une démarche pionnière à La Réunion en mettant en place une synergie
entre la production agricole et la production de centrales photovoltaïques.
Le but : pouvoir optimiser les sols sous les centrales en développant
une agriculture raisonnée. Ce projet en est à son émergence et devrait
courir sur trois ans. Qualitropic soutien aussi le projet d’alimentation
animale Tropifish porté par Nutrima, une filiale de l’URCOOPA (Union
régionale des coopératives agricoles) qui vise à devenir un expert en
nutrition des poissons marins en milieu tropical avec la zone océan
Indien comme marché visé. Dernier projet : la start-up Pat Zerbaz qui
est un société civile d’exploitation agricole (SCEA) et vise la valorisation
des extraits de la flore endémique et exotique de La Réunion par une
méthode d’extraction innovante. Des débouchés sont attendus dans
l’industrie pharmaceutique, cosmétique, agro-chimique et agro-alimentaire.
« Depuis quelques années des entreprises métropolitaines viennent
vers nous afin de tropicaliser leurs technologies pour aller conquérir
de nouveaux marchés. En 2016, nous allons identifier le marché de
l’Afrique du Sud, du Mozambique, de Madagascar et de la Tanzanie.
Nous avons ciblé des technologies comme la gestion des déchets, la
34 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Bioalgostral Océan Indien est une société
spécialisée dans la production et la
valorisation de m icro-algues en zone
inter tropicale. Elle a développé un savoirf air e unique co uvr ant un ens e mble de
procédés de production et de transformation.
gestion de l’eau, les cultures hors sol et les équipements agricoles et
industriels en lien avec l’industrie agro-alimentaire », indique Françoise
Delabaere. Une première mission a aussi été programmée en France
métropolitaine dans le courant de ce mois de mars 2016.
En conclusion, on peut dire que beaucoup de monde s’occupe d’innovation à La Réunion. Peut-être même que le nombre de conseillers
et d’accompagnateurs est supérieur à celui des entrepreneur engagés
dans l’innovation. Sans compter qu’il existe des start-up qui demeurent
éternellement des start-up, n’arrivant pas à lever les fonds nécessaires
à leur décollage. Dans l’industrie, en tout cas, la démarche est vitale.
Sachant que l’ADIR (Association pour le développement industriel de
La Réunion), qui rassemble les principaux industriels de l’île, se
montre assez timide sur le sujet, on ne peut que lui rappeler une vérité
admise par ceux qui connaissent le sujet : « Oui, c’est bien vrai, l’innovation est l’avenir de l’industrie »… Plus que l’octroi de mer. Mais
fort heureusement, de nombreux adhérents de l’ADIR s’activent
déjà comme le montrent nos différents articles dans les pages
suivantes.
■
COMMUNIQUÉ
Seanergy OI : une ingénierie sous-marine
de pointe en toute sécurité
Implantée dans l'océan Indien depuis vingt ans, avec un siège à La
Réunion et des antennes à Maurice, à Madagascar et au Mozambique,
la société Seanergy OI est devenue l’un des acteurs majeurs du
secteur de l'ingénierie sous-marine dans la région. Au fil du temps, la
société a développé une palette impressionnante de services, intervenant aussi bien en mer qu'en eau douce et même dans les stations
d'épuration. Pour assurer toutes ces missions, Seanergy OI dispose
d'équipes composées de scaphandriers professionnels, d’ingénieurs,
de marins et de techniciens. Après avoir obtenu son agrément national
français de formation aux interventions en milieu hyperbare, l'entreprise
a ouvert son centre de formation de scaphandriers à La Réunion. Ce
savoir-faire a permis à Seanergy OI d'intervenir sur deux chantiers emblématiques réunionnais : la pose des filets anti-requins et la Nouvelle
Route du Littoral (NRL). Pour les filets posés sur les plages de Boucan
Canot et de Roches Noires, Seanergy OI a décidé de faire un transfert
de compétences en formant des scaphandriers dans les mairies qui
assureront leur maintenance. « D'où une plus grande valeur ajoutée
pour la collectivité que d'avoir simplement acheté un dispositif »,
explique Dominique Thirel, le gérant de la société, lui-même scaphandrier.
Sur ces deux sites, Seanergy OI a aussi proposé une bouée météorologique qui enregistre les paramètres de houle et de vent. Les services
municipaux disposent de ces informations tous les jours, ce qui permet
d'établir des prévisions dédiées.
Sur le chantier de la Nouvelle Route du Littoral (NRL), Seanergy OI intervient comme sous-traitant des différents groupements en réalisant
notamment des opérations de minage sous-marin de blocs de roche
basaltique nécessaires à la préparation de fond de fouille. Ses équipes
participent aussi à la pose d’accropodes, qui assurent la protection
de la digue, et mettent en place des bouées pour mesurer la turbidité
de l'eau, des barrages anti-pollution et des barrages d'atténuation
DR
La parfaite maîtrise d'une large palette de travaux sous-marins a permis à Seanergy OI
d'intervenir sur deux chantiers réunionnais emblématiques : la pose de filets anti-requins et la
Nouvelle Route du Littoral.
Seanergy est certifiée ISO 9001 pour la qualité et OHSAS 18001 pour la santé-sécurité au travail. L’entreprise enregistre zéro accident sur des dizaines de milliers
d'heures de plongée.
acoustique. L’entreprise dispose depuis peu d'un dispositif de positionnement centimétrique du plongeur sous l'eau complètement novateur
au niveau national. Grâce à une tablette, il est possible de voir les
images que le plongeur filme avec une caméra posée sur son casque.
Par ailleurs, sur un fond du plan de chantier, il est possible de voir le
plongeur se déplacer. Le client peut savoir de manière très précise où
se trouve le plongeur et où se situe son ouvrage. L'implantation d'une
structure sous-marine se fait donc avec beaucoup plus de précision.
Trois grands domaines d’intervention
DR
- Les travaux sous-marins de génie civil,
- L'inspection de structures immergées,
- La réalisation de mesures océanographiques.
Sur le chantier de Nouvelle route du littoral (NRL), les équipes de Seanergy
participent à la pose d’accropodes qui assurent la protection de la digue.
[email protected] Tél. : + (262) 262 57 28 33
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 35
Guillaume Foulon
PERFORMANCE
Réunion dossier
TATIANA HOSSEIN,
DESIGNER INDUSTRIEL :
« IL FAUT DE NOUVELLES
MÉTHODOLOGIES DE
TRAVAIL »
Opérant en « freelance », elle explique l’importance de son métier dans une démarche d’innovation qui
passe par une meilleure compréhension du consommateur. Mais pour innover, une entreprise doit aussi
remettre en cause son mode de fonctionnement.
Propos recueillis par Alain Foulon
Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre métier de designer industriel ?
Le design, au même titre que le marketing ou la recherche & développement, est une fonction de l’entreprise qui contribue à l’enrichissement
d’une offre en réponse (ou par anticipation) aux besoins et attentes
des consommateurs, des usagers et des citoyens. Il a pour conséquence
de générer un impact positif sur quatre leviers des organisations qui
sont l’offre, la marque, la relation client et les processus. Mon métier
consiste à accompagner les entreprises dans leur démarche d’innovation.
Ainsi, j’imagine de nouveaux concepts allant de l’analyse sociale, culturelle, économique, environnementale, technologique et industrielle
jusqu’à la réalisation et la production des objets ou des services. Le
design est basé sur la compréhension du comportement de l’usager.
C’est seulement par le contact, l’observation et l’empathie avec les utilisateurs finaux que nous pouvons concevoir des réponses adaptés à
leur environnement tout en apportant une identité formelle et esthétique
au projet final afin de distinguer l’entreprise de la concurrence.
Vous avez quitté le groupe Airbus pour vous installer à votre propre
compte à La Réunion. Qu’est-ce qui explique cette prise de risque et ce
choix de La Réunion ?
Travailler pour un groupe industriel a été une expérience très riche et
formatrice sur différents aspects. Néanmoins, j’ai toujours eu le désir
de m’installer à mon propre compte. Étant originaire de la Réunion, je
36 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
suis venue en mai 2015 afin d’identifier si mes compétences pouvaient
y être accueillies. Aujourd’hui, je suis revenue vivre dans l’île car je
suis pleinement convaincue de l’intérêt que peut offrir le design aux
entreprises réunionnaises. Il est vrai que ce métier est méconnu sur
l’île, mais j’y vois plus une opportunité qu’une prise de risque. J’ai pu
identifier que les entreprises locales se trouvent soit dans la création
de nouveaux produits technologiques, soit dans l’attente d’une nouvelle
stratégie afin d’intégrer de nouveaux marchés.
Comment voyez-vous l’industrie réunionnaise et comment peut-elle gérer
le défi de l’innovation pour mieux couvrir le marché local et s’exporter ?
L’industrie Réunionnaise est restée sur un mode de fonctionnement
qui ne correspond plus à l’économie actuelle. Afin de mieux gérer le
défi de l’innovation, il est nécessaire de mettre en place de nouvelles
méthodologies de travail et d’y intégrer une nouvelle forme de stratégie
d’innovation. Or, ce processus est long et nécessite à la fois une prise
de risque et une remise en question du mode de fonctionnement
existant. En revanche, lorsque les entreprises prennent ces risques,
les impacts positifs sont nombreux : satisfaction des clients, hausse
de la notoriété, satisfaction du personnel, croissance de la marge et
du chiffre d’affaires, augmentation de nouveaux clients aussi bien sur
le marché local qu’à l’export, augmentation du nombre de nouvelles
innovations et diminution du temps de mise sur le marché d’un produit
ou d’un service…
■
LA COGEDAL DIVERSIFIE SES
FARINES ET MISE SUR LE BIO
Après avoir rénové son outil de production, le leader du marché de la farine à La Réunion investit
maintenant 300 000 euros dans une meule de pierre afin de produire de la farine bio.
Par Pierrick Pédel
E
n 2014, la Cogedal a totalement rénové son outil de production avec un nouveau moulin qui intègre toute la
technologie moderne en termes d’automatisation, de
contrôle de la chaîne de production et de qualité du
produit fini. « Nous avons réhabilité l’ensemble de l’outil
de production à hauteur de 90%, ce qui nous permet d’avoir un
produit de meilleure qualité car notre moulin était un peu vieillissant.
Désormais, nous avons la capacité de produire des farines de plus en
plus diverses. Nous arrivons à tirer notre épingle du jeu sur le marché
réunionnais en créant des niches et en aidant nos clients, que ce soit
des boulangeries artisanales ou des boulangeries industrielles, à créer
des produits très spécifiques ou des produits très locaux comme des
pains pays. Nous sortons par exemple un pain de seigle combavagingembre », explique Julien Quéré, le directeur général délégué de la
Cogedal. L’entreprise a également retravaillé le macatia avec le macatia
bounty (coco-chocolat) et le macatia chocolat blanc-cranberries. Pour
rénover son moulin, l’entreprise a investi 6 millions d’euros dont 1,5
million de subventions européennes (FEDER). Le nouveau moulin a
une capacité d’écrasement de 40 000 tonnes par an et une capacité
de production de farine de 32 000 tonnes.
quinze jours. Ce qui est plutôt rare dans notre métier puisqu’en
général les grands moulins du secteur sont des multinationales qui
ont des procédures internes de validation de nouveaux produits qui
sont assez longues. »
Avec 25 000 tonnes de blé, la Cogedal produit 20 000 tonnes de farine
et 5 000 tonnes de son vendu principalement à l’URCOOPA pour l’alimentation du bétail.
Dernière innovation en date : la Cogedal est en train de développer
une gamme de farines bio. L’entreprise a donc investi quelque
300 000 euros pour acheter une meule de pierre qui sera opérationnelle
au premier semestre 2016. « Nous allons démarrer par du blé, puis
nous ferons du seigle et du sarrasin. L’idée, c’est d’accompagner des
clients qui font déjà du bio en boulangerie. L’écrasement par meule
de pierre apporte une spécificité au produit. Nous avons fait déjà
quelques test, il y a une vraie différence dans le goût. L’idée, c’est
aussi de travailler des farines avec un apport nutritionnel plus important
en y intégrant notamment un peu plus de son. C’est une innovation
LES COMMERCIAUX SONT DES BOULANGERS
DE MÉTIER
Actuellement la Cogedal importe 25 000 tonnes de blé de France métropolitaine. Deux types de blé sont utilisés : un blé qui vient du centre
de la France et du blé améliorant avec un taux de protéine un peu plus
important. « Ce qui nous permet justement d’innover dans nos farines,
précise Julien Quéré. Nous faisons des mélanges de blé avec d’autres
matières premières pour arriver à des produits répondant exactement
aux attentes de nos clients. L’ensemble de nos commerciaux sont des
boulangers de métier. Ce sont des boulangers que nous avons transformés en commerciaux. Ce qui nous permet de rapidement identifier
les besoins et les développements techniques de nos clients. Nous
pouvons créer des produis très rapidement, c’est-à-dire en moins de
38 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Thomas Lebon/Cogedal
PERFORMANCE
Réunion dossier
Le nouveau moulin intègre toute la technologie moderne en termes d’automatisation,
de contrôle de la chaîne de production et de qualité du produit fini.
Thomas Lebon/Cogedal
Avec 25 000 tonnes de blé, la Cogedal produit 20 000 tonnes de farine et 5 000 tonnes de son vendu principalement à l’URCOOPA pour l’alimentation du bétail.
qui est très contraignante pour un micro marché, mais nous y croyons
tous. »
UN BÉNÉFICE DE 800 000 EUROS EN 2014
La Cogedal a également un projet labellisé « Qualitropic » en cours
pour produire une farine sans gluten mais permettant une panification
la plus comparable possible à la panification classique. Le marché
réunionnais de la farine blanche représente environ 30 000 tonnes et
la Cogedal en détient 60%. L’entreprise a réalisé un chiffre d’affaires
de 12 millions d’euros en 2014 et a dégagé un bénéfice de 800 000
euros. Dans le chiffre d’affaires, 40% sont assurés par les boulangeries
industrielles, 30% par le secteur artisanal, 20% par les farines au kilo
présentes dans les enseignes et 10% par les autres industriels comme
les producteurs de bouchons ou de samoussas. « L’évolution sur le
marché réunionnais est très importante, nous sommes à 10% de
hausse tous les ans depuis deux ou trois ans, explique Julien Quéré. Il
y a donc un véritable engouement pour ce type de produits. Dans les
boulangeries, on voit de plus en plus de pains spéciaux. Nous avons
un réseau de 60 boulangeries sous notre marque « Meunier de
Bourbon ». Au total, nous avons 150 clients sur les 216 boulangeries
recensées dans l’île. Et depuis un an, nous faisons l’effort de financer
des ouvertures, ce qui est déjà une pratique courante chez nos
concurrents. »
La Cogedal commence aussi à développer une activité d’exportation
vers Madagascar et Mayotte qui représente actuellement 1 000 tonnes
de farine, soit 5% de sa production. À l’export, l’entreprise essaie de
développer des partenariats avec un aspect commercial mais aussi la
fourniture d’un support technique. Sur la farine blanche, elle propose
une vingtaine de références et une trentaine sur les farines spéciales.
De quoi satisfaire les clients les plus exigeants.
■
UNE FILIALE DU GROUPE SOMDIAA
Seul moulin de La Réunion, la Cogedal est une filiale de la Société d’organisation, de management et de développement des industries alimentaires
et agricoles (SOMDIAA), un acteur majeur de l’industrie agro-alimentaire
en Afrique. Le groupe SOMDIAA produit et commercialise, en Afrique et
pour l’Afrique, essentiellement du sucre et de la farine, mais aussi des
œufs et de l’alimentation animale. Si le siège social de la société se situe
à Paris, l’ensemble de ses activités (culture, élevage, production,
distribution et commercialisation) sont localisées en Afrique centrale, en
Afrique de l’Ouest et dans l’océan Indien. Le groupe a réalisé 388
millions d’euros de chiffre d’affaires consolidé en 2013.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 39
PERFORMANCE
Réunion
JIPÉ RÉUNION FAIT ÉVOLUER LES
OFFRES ET LES MARCHÉS DE LA
CONSTRUCTION MODULAIRE
Leader de la construction modulaire, l’entreprise du groupe CILAM dispose d’une offre exclusive
en longueur de modules et développe des solutions innovantes pour l’habitat individuel.
Par Philippe Stéphant
C
e sont les grands chantiers, dont celui de la route des Tamarins, qui ont motivé en 1997 la création de Jipé
Réunion. Acteur français de la construction modulaire,
spécialisé dans l’équipement de bases vie et d’installations
pour le BTP, Jipé propose alors son savoir-faire aux professionnels de l’île et s’impose en leader sur ce marché. La fin des
grands travaux, en 2010, ouvre une nouvelle ère pour l’entreprise qui
rejoint le groupe Sodico, filiale de la CILAM (Compagnie laitière des
Mascareignes), spécialisé dans la fabrication d’emballages et de panneaux isolants. « Sodico était un partenaire commercial de Jipé
Réunion et a saisi l’opportunité d’une diversification liée à l’une de ses
productions », retrace Guillaume Lamy, directeur opérationnel de Jipé
Réunion. Dans un contexte de crise du bâtiment, l’entreprise met en
œuvre une stratégie de repositionnement en plus qualitatif. « Nous
n’étions plus leader sur ce marché car d’autres offres avaient évolué
vers de nouveaux produits ayant moins l’apparence de constructions
modulaires, commente Guillaume Lamy. En développant de nouvelles
offres, avec des solutions diversifiées de sur-toiture, de bardages et
d’isolation thermique, nous avons reconquis ce leadership. » Le chiffre
d’affaires de Jipé Réunion, qui était de 3 millions d’euros en 2010, a
progressé de 50% dès 2013, pour atteindre 9 millions d’euros en
2014. Avec un effectif d’une trentaine de collaborateurs qui se renforce
lors des opérations de terrain.
DES AVANTAGES COMPÉTITIFS
Implantée à La Possession, Jipé Réunion dispose d’un site industriel
de 5 000 mètres carrés, dont 2 000 mètres carrés couverts, et produit
près de 6 000 mètres carrés de préfabriqués à l’année. « L’offre de
location est gérée par notre structure LBM, précise Guillaume Lamy,
qui dispose d’un parc locatif de 250 modules dont 80% sont loués en
permanence. » En 2015, Jipé Réunion détenait 44% du marché de la
construction modulaire devant deux entreprises concurrentes. « Notre
40 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Jipé Réunion
PERFORMANCE
Réunion dossier
L’objectif actuel de Jipé Réunion est de développer des solutions innovantes d’habitat pour les particuliers.
clientèle s’équilibre entre les secteurs public et privé, dont 30% de
prestations liées aux activités de BTP et 30% aux établissements scolaires, détaille Guillaume Lamy. Nous intervenons depuis 2014 à
Mayotte pour la construction d’un collège sur 1 700 mètres carrés et
nous y avons livré en 2015 un centre de dialyse avec sur-toiture, une
nouvelle facette de notre activité. » Jipé Réunion a aussi livré en 2014
les locaux temporaires de l’école d’infirmières, au CHU Nord, et un
total de 3 000 mètres carrés de locaux scolaires. « Nous sommes les
seuls à La Réunion à pouvoir proposer des cellules de 9 mètres de
longueur, ce qui réduit le nombre de poteaux à l’intérieur des grandes
salles », indique Guillaume Lamy. Jipé utilise des profils d’acier européens qui sont préparés, spécifiquement, pour ses techniques propres
d’assemblage et subissent uniquement des opérations de soudure à
La Réunion. Les menuiseries et l’isolation sont achetées en local.
Cette technologie modulaire satisfait aux préoccupations du développement durable puisque les modules sont entièrement recyclables,
composés à 80% d’acier. La fabrication en usine est une garantie de
qualité et permet une livraison clé en main avec les aménagements
prévus à la commande. « Nous avons livré aux Avirons une école de
650 mètres carrés sur deux niveaux pour moins de 750 000 euros,
avec sur-toitures, bardages et coursives, clé en main, en quatre mois
et demi après l’ordre de service. »
Les locaux modulaires sont facturés de 600 euros le mètre carré, pour
des bureaux avec faux plafonds et sols souples, à 1 200 euros le
mètre carré pour les options les plus sophistiquées. On se rapproche
alors du coût d’une construction traditionnelle, mais les avantages de
rapidité, de finition clé en main et d’une possibilité de relocalisation
restent déterminants. « L’aspect provisoire reste prépondérant, mais
nous réalisons aussi des bâtiments définitifs avec du modulaire », remarque Guillaume Lamy. L’objectif actuel de Jipé Réunion est de développer des solutions innovantes d’habitat pour les particuliers, dont
une offre de studio avec toiture végétalisée. Des solutions environnementales avancées sont déjà maîtrisées en restant dans le cadre de la
préfabrication. Depuis plusieurs années, Jipé Réunion avait anticipé
sur les démarches nécessaires pour l’obtention du marquage CE
pour les constructions modulaires étagées, qui garantit la solidité, la
durabilité jusqu’à 50 ans et la sismicité de ses réalisations.
■
Philippe Stéphant
DES SOLUTIONS INNOVANTES D’HABITAT
Guillaume Lamy, directeur opérationnel de Jipé Réunion : « Nous sommes les seuls
à La Réunion à pouvoir proposer des cellules de 9 mètres de longueur, ce qui réduit
le nombre de poteaux à l’intérieur des grandes salles. »
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 41
PERFORMANCE
Réunion
MAUVILAC DÉVELOPPE DES FONCTIONS
INNOVANTES POUR SES PEINTURES
Fort d’une expérience d’un demi-siècle et leader du marché, l’entreprise du groupe Océinde conçoit et
produit des peintures adaptées aux spécificités de La Réunion. Avec une équipe en Recherche &
Développement qui comprend ingénieurs et techniciens.
Par Philippe Stéphant
« Notre maître mot est l’adaptation des différents produits aux problématiques climatiques locales, touchant à la durabilité, à la résistance
aux moisissures et à l’imperméabilité. Ce sont des éléments qui sont
toujours pris en compte, explique Jean-Louis Guilloux, directeur commercial de Mauvilac. Notre grande fierté, c’est que tout ce que nous
commercialisons est conçu, formulé et marketé ici, à La Réunion. »
Mauvilac, qui emploie 140 collaborateurs sur deux hectares de site industriel, dont 50% de bâti, a lancé, en 2014, sa peinture innovante
Acrysan avec un franc succès. Une peinture acrylique à l’eau avec
des constituants particuliers, des ions argent, aux propriétés fongicides
et bactéricides qui détruisent 99,99% des bactéries par contact. « C’est
une décontamination progressive par contact, testée sur le staphylocoque
doré et sur l’Escherichia coli. Attentifs à la protection en milieu tropical
et humide, nous avons constaté qu’elle détruit les moisissures, qui
sont des allergènes, les champignons et les lichens, qui ne se développent pas », précise Franck Cathelin, responsable de l’activité bâtiment.
COMMENT MAINTENIR SON LEADERSHIP
FACE À DE GROS CONCURRENTS INTERNATIONAUX
« Nos grands concurrents ne développent pas de produits très spécifiques à notre climatologie. Notre avantage compétitif est l’un de nos
atouts pour défendre, vigoureusement, notre position de leader »,
appuie Jean-Louis Guilloux. Mauvilac est aussi la seule unité, dans sa
spécialité, à être certifiée ISO 9001, NF Environnement et, depuis peu,
Eco Label européen. « Avec une volonté forte de réduire les impacts
négatifs sur la santé humaine et sur l’environnement, nous sommes
pratiquement les seuls, en Europe, à nous être soumis au protocole
Afsset 2009, issu du Grenelle de l’environnement 2 », révèle Franck
Cathelin. Au sein du Groupe Océinde, qui s’est développé en France
métropolitaine et dans l’océan Indien, Mauvilac bénéficie d’une synergie
avec deux entreprises du même domaine d’activité. Comus, en région
parisienne, qui a rejoint le groupe en 1993, développe des peintures
techniques de spécialité, comme les produits intumescents. À Rochefort,
42 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Philippe Stéphant
PERFORMANCE
Réunion dossier
Jean-Louis Guilloux,
directeur commercial de
Mauvilac : « Notre grande
fierté, c’est que tout ce que
nous commercialisons est
conçu, formulé et marketé
ici, à La Réunion. »
Initiative Décoration est dédiée aux peintures décoratives pour le
grand public et la grande distribution. « Cette société a permis à notre
groupe d’accompagner l’enseigne de bricolage Leroy-Merlin en
Russie », confie Jean-Louis Guilloux. En Roumanie, l’acquisition d’une
structure a permis de décrocher, en partenariat, de beaux chantiers de
rénovation industrielle.
UNE PEINTURE ANTI-ACARIENS ET ANTI-MOUSTIQUES
En faisant évoluer le produit Acrysan, Mauvilac l’a doté de nouvelles
propriétés innovantes, que l’on découvrira sur le marché en 2016. « Il
s’agit d’une innovation mondiale car nous sommes en train de créer
Acrysan + en y greffant des propriétés qui détruisent les formaldéhydes
dans l’air ambiant, dévoile Franck Cathelin. Elles sont maintenant
connues pour être cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, et l’on
en trouve beaucoup dans les colles et dans les boiseries qui en
contiennent. » La peinture reprend les molécules et les transforme.
Philippe Stéphant
Franck Cathelin, responsable de
l’activité bâtiment de Mauvilac :
« Nous sommes en train de créer
Acrysan + en y greffant des
propriétés qui détruisent les
formaldéhydes dans l’air
ambiant. Elles sont maintenant
connues pour être cancérogènes,
mutagènes et reprotoxiques, et
l’on en trouve beaucoup dans les
colles et dans les boiseries qui
en contiennent. »
Une autre peinture, qui sera commercialisée en 2016, est anti-acariens
et anti-moustiques. « Sans produit chimique de synthèse, avec uniquement des molécules naturelles. L’innovation a commencé a être
testée pendant la crise du chikungunya, intéressant des laboratoires
internationaux », informe Franck Cathelin. C’est une approche radicalement innovante, qui fait partie de ces technologies des matières intelligentes qui peuvent libérer des agents actifs en quantité suffisante
et constante. » Mauvilac va aussi commercialiser un revêtement pour
tôles de toiture qui a la capacité d’absorber une partie des rayons UV,
réduisant de 20°C la chaleur sur la plaque. Enfin, Mauvilac est la
première entreprise de peinture à La Réunion, et peut-être même en
France, à proposer un service de commande en ligne et de Drive pour
le retrait des marchandises dans ses quatre agences de l’île.
■
UN GROUPE DIVERSIFIÉ
Français de Madagascar, où il a commencé dans le textile au sein du
groupe Socota, Abdéali Goulamaly s’installe à La Réunion où il fonde
Mauvilac en 1969. Cette production de peinture deviendra très vite
leader du marché malgré la concurrence des grandes marques internationales. Un leadership qui s’est maintenu, quarante-sept ans plus tard,
grâce des investissements continus dans la Recherche & Développement.
En se diversifiant, l’activité a donné le groupe Océinde qui annonce un
chiffre d’affaires de 225 millions dans le Top 500 de « L’Eco austral ». Un
chiffre qui ne prend sans doute pas en compte l’ensemble de ses
activités. Il s’est développé dans l’aquaculture de crevettes au Mozambique,
dans la transformation des produits de la mer sur le port de Lorient, en
France, et dans les TIC avec l’opérateur internet Zeop, pionnier de la
fibre optique à La Réunion et candidat à une licence 4G en téléphonie
mobile.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 43
RÉUNION ECO-EX SE POSITIONNE
SUR LE MARCHÉ MONDIAL
DES INGRÉDIENTS NATURELS
Cette startup se prépare à lancer en janvier 2017, lors du salon national de la formulation cosmétique,
une marque réunionnaise d’extraits et de produits obtenus par des procédés d’éco-extraction. Un marché
en forte croissance.
Par Philippe Stéphant
A
près un an et demi d’activité au sein de la pépinière d’entreprises biotech au Cyroi (Cyclotron Réunion Océan Indien), Réunion Eco-Ex a obtenu un premier panel de molécules purifiées, d’oléorésines, de formes sèches et
d’huiles essentielles pouvant alimenter le marché, en
pleine expansion, de l’alimentation naturelle et du bien-être. « Nous
avons commencé par étudier les ressources que peut apporter la
filière des fruits et légumes, révèle Jean-Pierre Avril, président d’EcoEx et président de la coopérative de producteurs Vivéa. Et nous
voulons démontrer que La Réunion est capable de fédérer des acteurs
pour une conquête de nouveaux marchés. Nous voulons fabriquer de
l’envie sur le territoire en étant, pour le moment, notre premier client. »
Car Eco-Ex a été conçue pour être le premier outil mutualisé de valorisation des ressources naturelles tropicales. Un projet défendu par le
pôle de compétitivité Qualitropic qui est parvenu à le faire admettre
par l’État au bénéfice des Investissements d’Avenir pour un financement
de 2 millions d’euros. Un groupe d’industriels, dont Tereos Océan
Indien, la Sapmer et la CILAM (Compagnie laitière des Mascareignes),
accompagnés par Vivéa, l’université de La Réunion et la Chambre de
commerce et d’industrie, ont apporté 1 million d’euros en tant qu’actionnaires fondateurs d’Eco-Ex, se positionnant pour la valorisation de
leurs co-produits.
UN OUTIL AU SERVICE DE TOUS LES ACTEURS
L’éventail des technologies d’éco-extraction de ce premier projet
structurant inter-filières se veut au service de tous les acteurs, entreprises
et laboratoires, pour élaborer des produits et développer des process
clé en main au stade préindustriel. « Les industries partenaires n’ont
pas passé de commandes à ce jour, observe Jean-Pierre Avril, mais
les premiers produits présentés doivent leur donner envie de poursuivre.
Nous nous concentrons sur la production d’ingrédients et nous allons
armer Eco-Ex pour augmenter sa capacité de production. » Réunion
Eco-Ex a investi 600 000 euros en un an dans des équipements de la-
44 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Philippe Stéphant
PERFORMANCE
Réunion dossier
Jean-Pierre Avril, président d’Eco-Ex : « Nous voulons démontrer que La Réunion est
capable de fédérer des acteurs pour une conquête de nouveaux marchés. »
boratoire et d’éco-extraction. Des procédés utilisant les ultrasons et le
CO2 « super critique » pour préserver les qualités naturelles des
molécules extraites. La startup recherche désormais un nouveau site
pour y développer de nouveaux équipements. « Au-delà d’un premier
catalogue, nous devons atteindre une production capable de générer
des flux d’affaires. Nous devons aussi développer une mutualisation
d’approche de marchés », commente Jean-Pierre Avril. C’est une des
missions de Fabrice Thibier, directeur général, qui compose l’équipe
d’Eco-Ex avec le docteur Claire Desvignes qui avait porté le projet au
sein de Qualitropic. Deux recrutements sont en cours dont un dans le
domaine de la chimie analytique. « Nous envisageons de lancer notre
marque à l’occasion du salon national de la formulation cosmétique
en janvier 2017, à Paris », confie Fabrice Thibier.
■
LA SILF FAIT EVOLUER SA MARQUE DOUPÉI
ET POURSUIT SA MODERNISATION
À partir d’une production de produits en ouate de cellulose dédiée à ses clients professionnels, l’entreprise
du groupe Locate a conquis d’importantes parts de marché en développant des marques de distributeur.
Par Philippe Stéphant
D
epuis 1995, la SILF (Société industrielle Locate et fils) développe une stratégie de positionnement sur le marché
des produits d’hygiène en ouate de cellulose. Son activité
a pris naissance en 1987, sous l’impulsion d’Assim
Locate, pour approvisionner les collectivités. La famille
Locate, qui opère aujourd’hui dans la distribution de produits d’hygiène,
d’équipements de cuisines professionnelles, de matériel de santé et
d’équipement de la personne, pouvait ainsi s’ouvrir un marché en approvisionnant des clients professionnels. L’arrivée à la direction de
l’entreprise de Michel Berne, avec son expertise des productions industrielles dans le domaine du papier, a permis d’élaborer un premier
plan de développement d’envergure. « Notre confrère historique était
alors le seul producteur local. Pour ne pas nous opposer à lui frontalement, nous avons décidé de lancer la production de marques de distributeur pour pénétrer le marché de la grande distribution, ce qui est
encore aujourd’hui notre spécialité », commente Michel Berne. Grâce
à cette stratégie, la SILF est aujourd’hui leader de la production de
papier hygiénique. « Sur un marché de l’ordre de 8 000 tonnes, dont
deux tiers de papier hygiénique, l’ensemble de notre gamme représente
3 000 tonnes, précise Michel Berne, et se complète de papier essuietout et d’essuie-tout multi usages, en différentes qualités et présentations. »
Fin 2015, l’entreprise a innové en remodelant sa propre marque,
Doupéi, dont la gamme Black Line est la meilleure déclinaison qualitative.
UNE MODERNISATION POUR L’INNOVATION
Dès 2009, la SILF a initié un programme de modernisation, pour développer sa compétitivité, qui s’est traduit ces dernières années par 10
millions d’euros d’investissements. « La production pour des marques
de distributeur, à destination de la grande distribution locale, nous
apporte des volumes importants, explique Michel Berne, mais nous
devons veiller à continuer à accroître notre compétitivité en réduisant
nos coûts de production grâce à des investissements dans l’outil industriel. » Fin 2014, la SILF a mis en service une nouvelle emballeuse,
plus rapide, qui permet d’emballer des paquets de 1 à 72 rouleaux. En
2015, la SILF a également installé une troisième ligne de production
automatisée en remplacement d’une ligne ancienne. S’y ajoutent un
46 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Philippe Stéphant
PERFORMANCE
Réunion dossier
Une nouvelle emballeuse permet de produire des paquets gros volumes jusqu’à
72 rouleaux. Et en 2015, la SILF a installé une troisième ligne de production
automatisée en remplacement d’une ligne ancienne. S’y ajoutent un système
centralisé d’aspiration automatique des poussières et un équipement innovant
d’aspiration des rognes de papier.
système centralisé d’aspiration automatique des poussières et un
équipement innovant d’aspiration des rognes de papier. « Les chutes
de fabrication sont aspirées vers un compacteur qui prépare des
balles de 300 à 500 kg. C’est une économie de main-d’œuvre car ces
balles vont remplir un conteneur pour une valorisation directe à
l’export, informe Michel Berne. Cela va dans le sens du respect de
l’environnement et du confort de travail du personnel. »
La nouvelle gamme Black Line décline, entre autres, des spécialités
de niche qui s’ouvrent un marché dans l’île. Du papier toilette et de
l’essuie-tout en différentes présentations, parfums, et en triple ou quadruple épaisseur. « Nous avons aussi innové en production locale
avec de gros rouleaux multi usages ou rouleaux bricolage. Et nous
allons continuer à moderniser notre production dans les années qui
viennent », confie Michel Berne. Il y a encore 52%, en volume d’importation, sur ce marché, à La Réunion. La SILF emploie une trentaine de
collaborateurs sur un site de 4 500 mètres carrés couverts. En 2013,
elle a initié à Maurice un partenariat avec une structure comparable à
celle de Saint-Pierre.
■
PETFOOD RUN DÉVELOPPE SA MARQUE
DE CROQUETTES POUR CHIENS KANEO
Philippe Stéphant
C
réée par l’URCOOPA (Union réunionnaise des coopératives
agricoles), la première usine de petfood de La Réunion est
entrée en production à Saint-Paul en avril 2014. Pour un investissement de 9,5 millions d’euros, cet outil industriel dispose d’une capacité de production de 6 000 tonnes de croquettes pour chiens, et ultérieurement pour chats, en valorisant les coproduits de la filière
volaille. « Après une année d’activité, nos produits sont déjà distribués
dans 120 points de vente dont 50 magasins de la grande distribution,
annonce Guillaume Defromont, directeur opérationnel de PetFood
Run. Avec 20% de parts de marché, nous avons atteint notre objectif
cette année et les ventes continuent de progresser. » Petfood Run, qui
emploie 12 collaborateurs, produit 50 tonnes de sa propre marque
Kanéo sur 200 tonnes commercialisées par mois. Ce sont les marques
Gamm’Vert et Yock qui ont été les premières fabriquées, à l’appui d’un
partenariat avec Néodis, spécialiste de la nutrition canine et féline en
France et filiale du premier groupe coopératif français, In Vivo. Sur un
marché de 12 000 tonnes d’aliments secs et humides, PetFood Run a
De gauche à droite : Jean-Yves Maurice, responsable communication de PetFood
Run, Guillaume Defromont, directeur d’exploitation et Vincent Cadet, commercial :
« Après une année d’activité, nos produits sont déjà distribués dans 120 points de
vente dont 50 magasins de la grande distribution. »
■
atteint son objectif de 2 000 tonnes produites en 2015 et vise la
rentabilité, au seuil de 3 000 tonnes, pour 2017. Le développement de
l’activité est soutenu par un changement de taux d’octroi de mer qui
est passé de 6,5% à 18%.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 47
PERFORMANCE
Réunion
Guillaume Foulon
PERFORMANCE
Réunion
48 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
PHILIPPE LABRO : « LA SUPPRESSION
DES QUOTAS POURRAIT ÊTRE MORTELLE
POUR LA FILIÈRE CANNE-SUCRE »
Le président de Tereos Océan Indien souligne le caractère crucial de la dotation de 38 millions d’euros
promise aux DOM pour compenser la baisse des prix liée à la suppression des quotas sucriers en Europe.
Il souhaite également l’exclusion des sucres spéciaux dans les accords de libre-échange signés par
l’Union européenne.
Propos recueillis par Pierrick Pédel
Quel bilan dressez-vous de la campagne sucrière 2015 ?
Avec près de 1,9 million de tonnes, c’est plutôt une bonne campagne,
meilleure que les dernières qui avaient été marquées par des sécheresses. Pour la première fois depuis cinq ans, on a retrouvé des
conditions de pluviométrie à peu près normales, d’où la remontée du
tonnage de canne. En revanche, la richesse en sucre n’est pas très
bonne puisqu’on a fini avec un chiffre inférieur à la moyenne. Globalement, c’est plutôt une bonne année pour les planteurs, mais, en terme
de sucre, on est à 201 000 tonnes. Ce niveau est relativement moyen,
mais cela reste satisfaisant car on se situe au dessus de 200 000
tonnes. C’est donc une campagne plutôt bonne sans être exceptionnelle.
Que se passera-t-il pour la filière canne à partir d’octobre 2017 ?
Le 1er octobre 2017 va marquer la fin des quotas sucriers qui régissent
la profession depuis 1969. Ce système limite les droits à produire un
peu partout en Europe à un niveau inférieur à la consommation européenne. Il y a 13,5 millions de tonnes de quotas en Europe alors que
la consommation européenne est de l’ordre de 18 millions de tonnes.
L’Europe est donc obligée d’importer. Les quotas ont pour avantage
d’assurer un débouché garanti au sucre des DOM (Départements
d’Outre-mer – Ndlr). Mais à partir du 1er octobre 2017, les opérateurs
sucriers en Europe pourront produire la quantité qu’ils voudront. Et
comme il existe des milliers d’hectares disponibles contrairement à
l’Outre-mer et comme, d’autre part, les sucreries européennes peuvent
augmenter la durée de la campagne sucrière, la production de sucre
en Europe va augmenter fortement et les coûts de production vont
baisser car les usines vont tourner plus longtemps. Cela va poser un
problème aux DOM qui produisent de 250 000 tonnes à 262 000
tonnes de sucre chaque année. En fait, les entreprises sucrières de
l’Outre-mer produisent du sucre de canne roux pour deux types de
marchés complètement différents. Une partie de notre production
concerne les sucres spéciaux, des sucres à haute valeur ajoutée,
prêts à être directement consommés sans aucune étape de traitement.
Ils sont consommés en tant que sucre de bouche ou par des industriels
qui veulent valoriser leurs produits. C’est notre segment de marché
préféré parce qu’il valorise le mieux nos produits et ne nous met pas
en concurrence avec le sucre de betterave européen. Mais il ne représente que 250 000 tonnes, soit 1,5% du marché européen. C’est trop
peu pour nous permettre d’écouler toute notre production même si
nous sommes leaders sur ce segment de marché européen face à
des concurrents de plus en plus nombreux. On peut citer Maurice, la
Guadeloupe et tous les pays qui entrent grâce aux accords commerciaux
que conclut l’Europe… Le Swaziland le Malawi, les pays du pacte
andin comme la Colombie et tous les pays qui produisent du sucre de
canne dont la plupart sont des pays à faible coût de main d’œuvre.
Quel tonnage de sucres spéciaux, La Réunion arrive-t-elle à écouler et
comment ça se passe pour le reste de la production ?
Nous écoulons 88 000 tonnes de sucres spéciaux sur un marché européen de plus en plus concurrentiel. Pour le reste, soit quelque
115 000 tonnes transformées en sucre blanc, la fin des quotas nous
place en concurrence frontale avec les 17 millions de tonnes de sucre
de betterave européen qui bénéficient de coûts de production nettement
plus faibles. Notre problématique pour le futur est de mettre en place
l’engagement qu’avait pris le président de la République en août 2014
à La Réunion, à savoir un mécanisme de compensation nous permettant
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 49
PERFORMANCE
Réunion
« Les cannes à sucre, à La Réunion, couvrent
24 000 hectares et captent chaque année,
du fait de la photosynthèse, l’équivalent de
l’ensemble des émissions de CO2 du parc
de véhicules. »
TEREOS : UN POIDS
LOURD MONDIAL
Stocklib/Sattapapan Tratong
PERFORMANCE
Réunion
de nous situer au niveau des coûts de production européens. Cette
compensation représente 38 millions d’euros pour les industriels
sucriers de l’ensemble des DOM.
Les gains de productivité enregistrés en Europe n’étaient-ils pas possibles
à La Réunion ?
En forçant le secteur sucrier européen à se restructurer et à se
concentrer, la politique européenne a fait diminuer les coûts de
production en Europe. Cette concentration n’a pas pu intervenir dans
les DOM car elle avait déjà été achevée depuis des années. À La
Réunion, on est ainsi passé de 180 sucreries en 1860 à deux depuis
1996.
La dernière réforme de l’Organisation commune du marché (OCM) du
sucre, qui date de 2006, a conduit à la fermeture de 45% des sucreries
européennes entre 2006 et 2012. Quelque 45% du personnel a été licencié. Chaque sucrerie a augmenté fortement sa production. En
2006, la production moyenne par sucrerie en Europe était de 110 000
tonnes et, à La Réunion, on se situait aux alentours de 100 000 tonne.
On était donc à peu près de la même taille par unité de production.
Mais du fait de la politique de Bruxelles, la production est arrivée à
170 000 tonnes par sucrerie en Europe et, pour les pays les plus performants comme l’Allemagne ou la France, on se situe au dessus de
200 000 tonnes. Tant qu’il y avait des quotas, ce handicap n’était pas
trop grave car les DOM vendaient toujours leur sucre. Mais, avec la fin
des quotas, il va y avoir une nouvelle phase de baisse des coûts de
production en Europe parce que les usines vont encore augmenter
leur taille en allongeant la durée des campagnes.
La compensation de 38 millions d’euros est-elle actée ?
Il y a un engagement du président de la République et il y a également
la convention canne qui a été signée par les planteurs, les industriels
et le préfet en juin 2015. Dans cette convention canne, il y a des enga-
50 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Présent à l’origine dans le seul sucre
de betterave avec ses 12 000 associés
coopérateurs, Tereos est devenu
l’unique acteur réunionnais dans la
production de sucre de canne après
le rachat du groupe Quartier Français.
Premier groupe sucrier français, Tereos
est aussi le deuxième groupe sucrier
brésilien et le troisième mondial. Audelà de la canne, il s’intéresse à de
nouveaux produits comme la stévia.
gements pour chacun des signataires. Dans les engagements pris par
l’État, il est stipulé qu’il faut « compenser les surcoût de l’industrie réunionnaise liés à la fin des quotas » et augmenter le plafond d’aides de
38 millions d’euros supplémentaires. Il s’agit d’un engagement du
président de la République signé par le Premier ministre Manuel Valls.
Dans la convention canne, il est également prévu l’exclusion des
sucres spéciaux des futurs accords de libre-échange avec des pays
producteurs de sucre de canne. La balle est maintenant dans le camp
de Bruxelles. La notification a été envoyée à la Commission et une décision devrait être prise à la fin de cette année pour que la compensation
soit inscrite dans la loi de Finances 2017 qui sera discutée en novembre
2016.
Quels sont les enjeux pour la Réunion ?
La filière canne-sucre concerne 11 800 emplois directs dont 10 500
pour les agriculteurs et les salariés agricoles, 2 000 emplois indirects
et 4 500 emplois induits. Elle représente 13,3% des emplois du secteur
privé. À l’échelle nationale, cela représenterait 2,3 millions d’emplois,
soit le premier pourvoyeur du pays. La filière sucre représente aussi la
moitié des exportations de La Réunion. Si l’on ajoute le rhum, on
arrive aux deux tiers des exportations. Par ailleurs, les cannes à sucre,
qui couvrent 24 000 hectares, captent chaque année, du fait de la
photosynthèse, l’équivalent de l’ensemble des émissions de CO2 du
parc des véhicules qui roulent à La Réunion. Quant à la bagasse, elle
permet d’éviter d’importer 140 000 tonnes de charbon par an. L’impact
sur l’environnement et la balance commerciale est donc loin d’être négligeable.
Maurice a choisi la voie de la valeur ajoutée en ne produisant que du sucre
blanc et des sucres spéciaux. Ce modèle est-il transposable à La Réunion ?
Dans l’esprit, ce ne serait pas impossible, mais il existe un problème
de coûts. Maurice produit deux fois plus de sucre que La Réunion, il y
PERFORMANCE
Réunion
« Plus de 80% des sucreries dans le monde
ont un coût de production supérieur au
prix du marché mondial. Elles ne peuvent
s ur vivr e qu’e n ve ndant s ur un mar ché
intérieur protégé. »
a donc des volumes de sucre importants à raffiner. En outre, les coûts
de main d’œuvre sont moins importants. Une raffinerie coûte environ
60 millions d’euros, il faut donc pouvoir l’amortir. Cela n’aurait de sens
que si l’on raffinait moins cher que les raffineries européennes. En fait,
ce ne serait pas impossible à La Réunion mais cela demanderait un
niveau important de soutien public à l’investissement. La raffinerie ne
pourrait fonctionner que pendant la campagne car on aurait une
source d’énergie à un coût raisonnable. Si l’on devait construire une
raffinerie, il faudrait le faire au Port, mais on ne peut acheter l’électricité
à taux plein. De plus, le foncier se fait rare. Le seul moyen, c’est de
s’installer à proximité d’une sucrerie et d’utiliser la vapeur pendant la
campagne. Il faudrait qu’elle raffine 120 000 tonnes en cinq mois, ce
qui suppose une unité de production importante et un investissement
de départ très lourd. Nous avons une petite raffinerie de 10 000 tonnes
de capacité à Bois Rouge afin de fournir nos clients locaux fabricants
de sodas, de yaourts et d’autres produits agro-alimentaires. Mais
contrairement à nos clients qui sont protégés par un octroi de mer de
25%, le taux pour l’importation de sucre n’est que de 6,5%, ce qui
nous pose des problèmes de compétitivité avec les sucres blancs européens. Nous souhaitons donc un octroi de mer à 25%, comme c’est
le cas en Martinique et en Guadeloupe. La Région admet d’ailleurs
qu’il y a un problème en la matière.
Les autres activités héritées du rachat de Quartier Français par Tereos,
comme l’immobilier et la production de café, sont elles destinées à rester
dans le périmètre du groupe ?
Dans les activités achetées, il y en a beaucoup qui ont déjà été
revendues, comme les spiritueux et les activités liées au photovoltaïque.
Le reste ne se trouve pas dans Tereos Océan Indien mais dans une
autre structure, Océan Indien Participations. Pour le café Le Lion, nous
sommes en train de relooker la gamme avec de nouveaux packagings
et de lancer des marques dédiées pour la grande distribution. Sur le
foncier, il y a des opérations d’aménagement qui sont en cours de réalisation. Nous allons céder le patrimoine qui avait été réalisé en défiscalisation. Quartier Français Aménagement va céder des appartements
au fur et à mesure que les périodes de défiscalisation s’achèveront.
Cela concerne en moyenne 40 logements par an.
Vous êtes présents en Tanzanie. Quel est le bilan de cette implantation ?
Nous y obtenons des résultats excellents. Nous sommes en partenariat
avec le groupe mauricien Alteo. Une sucrerie avait été reprise en 2000
dans le cadre d’une privatisation et ne produisait que 30 000 tonnes
de sucre. Elle a dépassé aujourd’hui les 100 000 tonnes. Les rendements
en canne y sont parmi les meilleurs au monde. On a produit 140
52 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
tonnes de canne par hectare en moyenne sur la plantation. À noter
que la totalité du sucre produit est vendu en Tanzanie.
Nous venons de refaire le même type d’opération avec Alteo au
Kenya, en prenant une participation majoritaire de 51% dans Transmara,
une sucrerie privée, avec une option pour monter à 60%. Cette sucrerie produit un peu plus de 50 000 tonnes de sucre et notre objectif est
de monter à plus de 100 000 tonnes dans quelques années. La
différence avec la Tanzanie, c’est qu’au Kenya nous achetons les
cannes aux planteurs. Mais là aussi, le sucre est entièrement vendu
sur le marché local.
Qu’en est-il de vos activités au Mozambique ?
Tereos est présent au Mozambique depuis le rachat d’une sucrerie en
2005, mais pas dans le cadre de Tereos Océan Indien. Comme on
parle portugais dans ce pays, il y avait plus de proximité avec les Brésiliens. La présence dans ce pays se fait donc via Tereos International
qui fabrique 60 000 tonnes de sucre avec ses propres cannes grâce à
une plantation de 8 000 hectares.
Quels sont les autres pays susceptibles de vous intéresser en Afrique ?
Il y a des pays performants comme la Zambie, le Swaziland et le
Malawi. En revanche, l’Afrique du Sud est moins intéressante car elle
a des coûts de production trop élevés même s’ils restent inférieurs à
ceux de La Réunion.
Quelle est la tendance actuelle du marché mondial du sucre ?
Nous sommes à des niveaux de prix historiquement bas. Le prix du
sucre est déterminé par le prix du pétrole et par les cours du blé et du
maïs. En Europe, quand le cours des céréales est élevé, on plante du
maïs et du blé, mais quand le prix des céréales est bas, on plante de
la betterave. Actuellement, les cours du blé et du maïs sont peu
élevés, il y a donc plus de betterave et, de fait, plus de sucre, ce qui
pousse les prix à la baisse. Les cours du sucre sont également dépendants du cours de la monnaie brésilienne, le real, puisque le Brésil est
le premier producteur de la planète et représente aussi la moitié des
exportations mondiales. Or, le real s’est effondré de 30% en un peu
plus d’un an. La production de sucre dans le monde représente 180
millions de tonnes, mais il ne s’échange que 40 millions de tonnes sur
le marché mondial dont 20 millions de tonnes en provenance du
Brésil. À noter que le prix du sucre sur les marchés intérieurs chinois,
indien et américain est beaucoup plus élevé que le cours mondial. Le
seul endroit où le prix intérieur correspond au cours mondial, c’est le
Brésil. En Europe, la politique de Bruxelles est en train de ramener les
prix vers le niveau du marché mondial. Plus de 80% des sucreries
dans le monde ont un coût de production supérieur au prix du marché
mondial. Elles ne peuvent survivre qu’en vendant sur un marché
intérieur protégé. En Europe, la Commission ouvre ses marchés, les
sucreries européennes vont donc devoir améliorer leurs performances
et se mettre au niveau du Brésil pour pouvoir survivre.
■
CMA CGM INAUGURE SON NOUVEAU
HUB DE TRANSBORDEMENT
POUR L’OCÉAN INDIEN
La compagnie française, troisième acteur mondial du transport maritime conteneurisé, et le Grand port
maritime de La Réunion (GPMDLR) ont officialisé leur partenariat le 27 janvier avec, en ligne de mire, la
croissance de l’Afrique et de l’Inde.
Par Philippe Stéphant
« La concrétisation de ce projet est l’illustration de la parole tenue
entre les différents partenaires qui ont su naviguer étroitement de
concert », déclare Jean-François Tallec, conseiller institutionnel pour
la politique maritime de CMA CGM. Ayant investi plus de 80 millions
d’euros, Port-Réunion, à l’issue de vingt mois de travaux, a dévoilé les
nouvelles installations du Port-Est : 640 mètres de quai opérationnel et
la capacité d’accueillir simultanément deux porte-conteneurs jusqu’à
une longueur cumulée de 560 mètres. « Avec deux portiques neufs en
opération et un troisième livré en milieu d’année, nous pouvons opérer
deux navires avec cinq portiques simultanément et jusqu’à 21 rangées
de conteneurs au lieu de 15, précise Jean-Frédéric Laurent, président
du directoire de Port-Réunion. Le tirant d’eau maximum est désormais
de 14,5 mètres au lieu de 12,30 mètres. Loin d’être interrompue,
pendant ces travaux, l’activité du port a progressé de 6% en 2014 et
de 3% en 2015, et nous avons franchi une étape symbolique en
traitant 250 000 EVP (équivalent vingt pieds - Ndlr). » Pour CMA-CGM,
les opérations de transbordement, par l’interconnexion de quatre
services maritimes, doivent atteindre rapidement 100 000 EVP par an.
UN GAIN DE CINQ JOURS DE MER
La compagnie marseillaise a inauguré son nouveau hub maritime
avec l’escale, le 4 janvier, d’un premier navire de son service Midas
reliant le Moyen-Orient et l’Inde à l’Afrique de l’Est, du Sud et de
l’Ouest, desservant l’île deux fois par semaine, à l’aller et au retour.
« CMA CGM fait aujourd’hui de La Réunion son hub pour l’océan
Indien et lui redonne sa position de carrefour des routes maritimes
entre l’Europe, l’Asie et l’Afrique, grâce notamment à une desserte
renforcée », déclare Rodolphe Saadé, vice-président du groupe CMACGM. Depuis le 6 janvier, le service Nemo, reliant l’Europe à l’Australie,
dessert directement la Réunion en 16 jours depuis Fos-sur-Mer. Un
gain de cinq jours qui ouvre aux entreprises réunionnaises des opportunités de trafic direct avec l’Australie. Avec le service Mozex, reliant le
hub asiatique de Port-Kelang, en Malaisie, à l’océan Indien, et la ligne
54 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Philippe Stéphant
PERFORMANCE
Réunion
Avec l’acquisition de nouveaux portiques, Port-Réunion peut opérer jusqu’à 21
rangées de conteneurs et deux navires simultanément.
Mascareignes qui relie en boucle Port-Réunion à Port-Louis et à
Tamatave, ce sont désormais cinq escales hebdomadaires pour l’opérateur maritime à La Réunion. L’agrandissement du Port-Est fourni de
nouveaux espaces pour la manutention et le stockage de conteneurs
et les nouveaux aménagements permettent de traiter des navires de
9 000 EVP que CMA-CGM annonce en escale à Port-Réunion dès la
fin du premier semestre 2016.
CMA-CGM DEVIENT MANUTENTIONNAIRE
« La mise en place d’un hub est avant tout liée à notre organisation
plutôt qu’au marché. Mais notre développement étant désormais
centré sur l’Afrique, toute montée en puissance sera un fort élément
de progression pour La Réunion », analyse Jean-François Tallec.
L’intérêt de la compagnie pour La Réunion s’est concrétisé par des in-
Philippe Stéphant
De gauche à droite : Olivier Hoareau, maire du Port, Dominique Sorain, préfet de La Réunion, Bernard Elie, directeur général de CMA-CGM Réunion, Jean-Frédéric Laurent,
président du directoire du Grand Port Maritime et Jean-François Tallec, conseiller constitutionnel du groupe CMA-CGM.
vestissements dans une nouvelle agence, près du Port-Est, et
dans une activité de manutention. « Depuis janvier 2016, nous
occupons 450 mètres carrés de nouveaux locaux et notre effectif
est passé de 19 à 32 collaborateurs », annonce Bernard Elie, directeur général de CMA-CGM Réunion et chef de projet Hub
Océan Indien. Une des conditions pour la mise en place de ce
hub étant la prise de contrôle de ses opérations de manutention,
CMA-CGM devient actionnaire à 70% de la SAMR, son partenaire
manutentionnaire depuis dix ans. « Un accord avec le groupe
Bolloré, qui reste actionnaire à 30% de la SAMR, a permis cette
opération, explique Bernard Elie. Nous avons investi 3,5 millions
d’euros pour l’acquisition de cinq nouveaux chariots cavaliers qui
s’ajoutent aux six en opération. » L’entreprise a pérennisé le
statut de 26 dockers et accueillera 32 jeunes dockers occasionnels,
actuellement en formation. « Nous sommes déterminés à faire
monter en puissance notre plateforme et nous devons apprendre
à mieux utiliser encore les équipements de Port-Réunion, appuie
Jean-François Tallec. Nous devons mieux rationnaliser l’utilisation
des aires de stockage des conteneurs et prévoir, dès maintenant,
de les étendre pour accompagner le développement du trafic. »
La mobilisation d’espace supplémentaire, pour Port-Réunion, est
liée à l’affectation de 25 hectares de l’arrière-port, dont CMACGM espère voir une partie disponible avant 2020. « Nous étudions avec l’ensemble de la communauté portuaire une remise à
niveau de l’organisation de notre terminal, visant la réhabilitation
des surfaces et l’efficacité des services à la marchandise »,
souligne Jean-Frédéric Laurent. Des études de détail seront lancées cette année et les premiers investissements interviendront
dès 2017.
■
RÉORGANISATION DU GIE SERMAT
En prenant le contrôle de son partenaire manutentionnaire SAMR (Société
d’aconage et manutention Réunion), CMA CGM obtient aussi la présidence du
GIE (Groupement d’intérêt économique) Sermat, traditionnellement assurée
par la SAMR. Créé en 1972, le GIE est composé de trois des quatre sociétés de
manutention portuaire : la Société Georges Michel (SGM), la SOMACOM et la
SAMR. Il s’agissait de mutualiser l’acquisition et la maintenance d’engins de
manutention portuaire. Les chariots cavaliers, servant au déplacement des
conteneurs sur le port, étaient loués aux sociétés de manutention par
l’intermédiaire d’une seconde structure, Manumat. Pour mettre fin à cette
complexité, la restructuration du GIE Sermat a pour effet de restituer la
propriété des chariots cavaliers à chacun des trois aconiers. Le GIE devrait se
consacrer désormais à leur maintenance. CMA CGM se préoccupe également
d’une équitable répartition de la croissance des activités portuaires entre les
quatre sociétés de manutention.
DEUX ESCALES SUPPLÉMENTAIRES
À NOSY BE ET DIEGO SUAREZ
CMA CGM renforce son activité de cabotage dans la zone avec son navire HH
South, d’une capacité nominale de 738 EVP. Il s’agit de desservir Nacala au
Mozambique, Nosy Be, Majunga et Diego Suarez à Madagascar, Moroni en
Grande Comore et Mutsamudu à Anjouan. À cet effet, ce service Indian Ocean
Feeder Nord se connecte avec un autre service de CMA CGM, le Swahili
express, au hub de Longoni, pour permettre une réduction du délai de transit
et une connectivité maritime plus rapide. Présent à Madagascar depuis 2003,
CMA CGM est la seule compagnie maritime qui offre des escales régulières
dans les ports malgaches. Mbolahasina Maminirina
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 55
PERFORMANCE
Réunion
LA SODIAC SE RECAPITALISE À HAUTEUR
DE 25 MILLIONS D’EUROS
Guillaume Foulon
L
a Société dionysienne d’aménagement et de construction
(SODIAC), aménageur, bailleur social et promoteur en immobilier d’entreprise, est une société d’économie mixte qui
a vu le jour en 1990. Elle aborde aujourd’hui une nouvelle
étape de son développement avec un ambitieux plan stratégique qui passe par une recapitalisation et la signature d’un nouveau
pacte d’actionnaires entre la ville de Saint-Denis, la CINOR (Communauté
intercommunale du nord de La Réunion) et la Caisse des dépôts.
Cette augmentation de capital viendra renforcer les actions de
l’entreprise dans ses principaux cœurs de métiers. Il est prévu de
doubler sur dix ans le parc de logements pour répondre aux besoins
et d’atteindre les 5 000 logements.
En immobilier d’entreprise, les projets phares sont le Quadrilatère
Océan, le Centre Indoor Prima, la Cour Kerveguen et une infrastructure
de déchets. La SODIAC veut accompagner les entreprises en leur
proposant une offre adaptée à leurs besoins et sur mesure (location
ou accession). Pour ses 25 ans, fêtés en 2015, la Sodiac a retrouvé
un niveau de chiffre d’affaires qu’elle n’avait pas connu depuis 2006,
avant la crise économique qui a lourdement impacté le BTP à La
Réunion. Son patrimoine locatif atteint désormais 2 500 logements sociaux. L’entreprise a généré plus de 267 millions d’euros d’investisse-
De gauche à droite : Gérald Maillot, président de la CINOR (Communauté
intercommunale du nord de La Réunion), Gilbert Annette, maire de Saint-Denis,
Philippe Naillet, Pdg de la Sodiac et Nathalie Infante, directrice régionale de la
Caisse des Dépôts.
ments en 2014, est devenue attributaire en 2012 de la concession
Espace Océan, le nouveau quartier du centre de Saint-Denis, avec
son partenaire Icade Promotion. Un investissement de 360 millions
d’euros, pour 17 000 mètres carrés de commerces, 730 logements et
un immeuble de bureaux.
■
IMPLANTATION DU PREMIER RÉSEAU
MONDIAL D’AFFAIRES
B
usiness Network International (BNI) est une organisation
de recommandations d’affaires qui revendique 170 000
membres dans 60 pays différents. Et depuis novembre
2015, BNI s’est implanté à La Réunion où des groupes
se constituent. Ils pourront bénéficier d’une méthode qui
repose sur l’accompagnement continu, les partenariats, la formation
aux techniques de gestion des réseaux, de communication et de marketing de bouche à oreille. En 2014, les membres du réseau ont
échangé plus de 5,4 millions de recommandations à travers le monde
pour une valeur estimée à 7,6 milliards d’euros. Les entrepreneurs de
tous les secteurs d’activité peuvent trouver leur place au sein du
réseau en vue de développer leur clientèle. Et BNI leur propose de
participer à l’une de ses réunions pour les convaincre de son efficacité
et de sa volonté de « changer la manière dont le monde fait des
affaires ». Un lancement officiel est d’ailleurs prévu. Contact par mail
([email protected]) et suivi sur Facebook/BNIReunion.
56 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
■
DR
PERFORMANCE
Réunion
HÔTELLERIE : LA GUERRE
DES ÉTOILES
Après trente années de discussions parfois rageuses, une classification officielle des hôtels mauriciens
vient enfin de voir le jour. Ils ne sont que six à accéder au firmament, c’est-à-dire aux 5 étoiles luxe. Mais
certains contestent leur classement.
Par Youvraj Mangar - [email protected]
P
as moins de 600 critères différents ont été retenus par la
Mauritius Tourism Authority (MTA) pour évaluer 62 hôtels.
Des critères qui s’inspirent du modèle français conçu par
Atout France, mais aussi de la Chine, Maurice se trouvant
en pleine phase de conquête de ce nouveau marché
émetteur. La notion de qualité via les normes ISO se trouve au centre
de cette évaluation. Les établissements qui visent 4 ou 5 étoiles
doivent ainsi être certifiés à la norme ISO 9001. Ils ont également
l’obligation de respecter les normes HACCP (Hazard Analysis Critical
Control Point) concernant la sécurité alimentaire et BS OHSAS 18001
pour les questions de santé et de sécurité au travail.
« Cette nouvelle pratique rendra l’industrie touristique mauricienne pérenne, responsable et durable », souligne Robert Desveaux, président
de la MTA. Chetraj Jhurry, président de l’Association of Tour Operators
(ATO) et membre de l’association des petits hôtels à Maurice accueille
lui aussi favorablement cette évolution. « C’est bon pour l’image de la
destination et cela évitera aux consommateurs d’être trompés sur la
qualité des services. Mais il est impératif que des fourchettes de prix
soient établies et règlementées pour les différents niveaux d’hôtels
afin que les grands établissements ne pratiquent pas les mêmes prix
que nous. »
Parmi les 62 premiers hôtels à être classés, on ne trouve pas d’établissements 1 ou 2 étoiles parce que l’objectif est de tirer la destination
vers le haut et d’accompagner les hôteliers vers le seuil des 3 étoiles.
La classification ne fait pas que des heureux, en particulier parmi certains 5 étoiles qui visaient le firmament, c’est-à-dire les 5 étoiles luxe
auxquels ont accédé seulement six établissements (voir notre liste en
encadré). Le 5 étoiles Angsana Balaclava, par exemple, a fait appel
pour que sa note soit revue. « Un litige qui est géré par le ministère du
Tourisme », précise Sen Ramsamy, directeur de la MTA.
La classification, qui existe déjà à La Réunion et à Mayotte, devrait être
mise en place à moyen terme dans les autres « Îles Vanille » (Madagascar, Comores, Seychelles et Maldives) en se basant sur des critères
de services plutôt que de prix. Une classification qui prendra également
en considération les spécificités de chaque île, ses ambitions, sa cul-
60 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
DR
PERFORMANCE
Maurice
Assez étonnamment, le St Regis Mauritius Resort, fruit d’un investissement de 150
millions d’euros, n’accède pas aux 5 étoiles luxe.
ture et ses valeurs. La MTA devrait participer à cette harmonisation régionale. Sen Ramsamy s’est d’ailleurs chargé en 2012, en tant que
consultant auprès de la Banque mondiale, d’un projet de classification
des hôtels malgaches.
DR
Fort logiquement, le Prince Maurice, hôtel du groupe Constance, atteint la plus haute marche du podium.
5 ÉTOILES LUXE
4 ÉTOILES
Constance Le Prince Maurice - Four Seasons Resort Mauritius at Anahita
- Maradiva Villas Resort & Spa - Royal Palm Hotel - Shangri-La’s Le
Touessrok Resort & Spa - The Oberoi.
Ambre Resort & Spa - Club Med La Pointe aux Canonniers - Hennessy
Park Hotel - Holiday Inn Mauritius Airport - La Palmeraie Boutique Hotel La Pirogue Resort & Spa - Le Canonnier - Le Mauricia Hotel - Le Méridien
- Le Suffren Hotel & Marina - Maritim Crystals Beach Hotel - Preskil
Beach Resort - Radisson Blu Poste Lafayette Resort & Spa - Riu Creole
Club Hotel and Resort - Riu Le Morne Club Hotel and Resort - Solana
Beach - Tamassa - The Address Boutique Hotel - The Ravenala Attitude Zilwa Attitude Hotel.
5 ÉTOILES
Angsana Balaclava - Club Med La Plantation D’Albion - Constance Belle
Mare Plage - Dinarobin Hotel Golf & Spa - Heritage Awali Golf & Spa
Resort - Heritage Le Telfair Golf & Spa Resort - Hilton Mauritius Resort &
Spa - Labourdonnais Waterfront Hotel - Long Beach Golf & Spa Resort Lux Grand Gaube - Lux Le Morne - Maritim Resort & Spa Outrigger Mauritius Beach Resort - Paradis Hotel & Golf Club - Shandrani
Resort & Spa - Sofitel L’Imperial Resort & Spa - Sofitel So Mauritius Sugar Beach Resort & Spa - The St Regis Resort - The Westin Turtle Bay
Resort & Spa - Trou aux Biches Resort & Spa.
4 ÉTOILES SUPÉRIEUR
Le Victoria Hotel - Radisson Blu Azuri Resort & Spa.
3 ÉTOILES SUPÉRIEUR
Veranda Grand Baie Hotel & Spa - Veranda Paul & Virginie Hotel & Spa Villas Caroline.
3 ÉTOILES
■
Aanari Hotel & Spa - Coin de Mire Attitude Hotel - Emeraude Beach
Attitude Hotel - Gold Beach Resort - Gold Crest Business Hotel - Manisa
Hotel - Merville Beach - Ocean Villas - Tarisa Resort & Spa - Veranda
Palmar Beach Hotel.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 61
PERFORMANCE
Maurice
MONTÉE EN GAMME POUR
LE PROGRAMME AZURI
Lancé il y a trois ans, ce projet de village intégré entre dans sa quatrième phase de développement
et repositionne son offre immobilière et de loisirs avec 16 villas vendues de 1,2 à 1,5 million de dollars.
DR
PERFORMANCE
Maurice
Le site d’Azuri représente au total 200 hectares dont seulement 15% ont été aménagés. Ce qui laisse de la place à de nouveaux développements dont un projet de Smart City.
« Il s’agit de donner une nouvelle image à notre projet, en lien avec
l’arrivée du nouvel hôtel Radisson sur notre site. Une stratégie illustrée
dans notre brochure appelée « Allure » qui est un peu le journal de
bord d’Azuri. » Hugues Lagesse est le Senior Project Executive de
BlueLife, filiale du groupe GML, premier acteur économique mauricien.
Outre Azuri, BlueLife possède dans son portefeuille les programmes
Azuri, Les Hauts Champs, Riverside Shopping Centre et Circle Square
Retail Park.
DES MARQUE PRESTIGIEUSES
POUR UNE NOUVELLE IMAGE
Bâti autour d’un marché central (pour ressembler vraiment à un
village), le projet immobilier Azuri est un gros chantier dont la première
phase comprend 240 résidences, sans compter l’hôtel et les infrastructures. « Il s’agit d’un cadre de vie unique conjugué à des activités
sportives et de loisirs. » C’est la marque Radisson Blue, enseigne très
haut de gamme de la chaîne hôtelière américaine Radisson (groupe
Rezidor), qui remplace l’enseigne du groupe thaïlandais Centara. Un
contrat de gestion a été signé en 2015 avec BlueLife qui reste le propriétaire de l’hôtel de 100 chambres.
La quatrième phase de développement du projet de BlueLife comprend
62 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
les villas Riviera. Il s’agit de 16 villas d’une superficie moyenne de
240 mètres carrés et dont six surplombent l’océan. Disséminées sur
1,5 hectare de terrain, elles sont commercialisées entre 1,2 et
1,5 million de dollars. Une nette montée en gamme alors que pour la
première phase du programme, la fourchette se situait entre 600 000
et 900 000 dollars. « Nous avons passé le barre psychologique du
million de dollar », commente Hugues Lagesse. Sur les 16 villas, 12
sont déjà réservées et payées. Le projet devrait démarrer au 1er
semestre 2016. Ces habitations sont pourvues d’un kiosque-salon, de
trois à quatre chambres, d’un double parking, d’une piscine privée et
d’espaces à vivre généreux. Pour apporter une touche de prestige
supplémentaire, Azuri a noué un partenariat avec la marque française
d’aménagement d’intérieur Cinna et Ligne Roset, spécialisée dans la
fabrication de meubles personnalisés. « Le choix de nous associer
avec cette marque d’ameublement française nous a semblé stratégique
car 40% de nos clients viennent de l’Hexagone. »
Le site d’Azuri représente au total 200 hectares dont seulement 15%
ont été aménagés. Ce qui laisse de la place à de nouveaux développements. Et justement, en constatant la réussite du projet, les autorités
ont désigné Azuri pour devenir l’une des futures « smart city » de
Maurice. « C’est un bel hommage, mais c’est vrai que dès le début,
nous avons fait le choix d’être un village intégré. »
■
UNIONPAY INTERNATIONAL
DISTINGUE LA MCB
U
nionPay International (UPI), l’un des plus importants
émetteurs de cartes bancaires au monde (5,3 milliards
de cartes en circulation), a décerné le titre de « Best
Bank in Mauritius 2015 » à la Mauritius Commercial Bank
(MCB). La première banque de l’océan Indien a été plébiscitée en raison de son excellente prestation dans la commercialisation
et la promotion des services d’UPI. Le partenariat entre les deux institutions financières a démarré en 2009 quand la MCB est devenue la
première banque mauricienne à accepter les cartes UnionPay à ses
guichets automatiques et TPE. Cet accord a été un élément catalyseur
pour le développement de la destination mauricienne en Chine, au
moment où l’île cherchait à diversifier ses marchés touristiques. Les
cartes UnionPay étant les plus utilisées en Chine, leur acceptation à
Maurice a offert de nouvelles possibilités aux touristes chinois. Les
arrivées de voyageurs en provenance de Chine ont augmenté de
manière significative au cours des six dernières années, passant de 6
900 en 2009 à environ 84 000 en 2015. « Le partenariat entre la MCB
et UPI a été bénéfique aux deux parties, mais aussi et surtout à nos
clients et aux deux pays, souligne Binesh Mangar, responsable de
MCB Cards. Le titre de Best Bank 2015 reflète notre engagement à
promouvoir UnionPay et à renforcer notre partenariat en introduisant
de nouveaux services de UPI qui simplifieront encore plus la vie de
DR
PERFORMANCE
Maurice
Le trophée a été remis à Shanghai par David Lee (à droite sur la photo),
Chief Cooperation Officer de UPI, à Binesh Mangar responsable de MCB Cards.
■
nos clients. »
La MCB a aussi introduit la marque UnionPay aux Seychelles et aux
Maldives à travers ses filiales.
LUX RESORTS & HOTELS VA GÉRER
UN 5 ÉTOILES EN TURQUIE
L
a chaîne hôtelière du groupe GML poursuit son expansion internationale. Après l’océan
Indien, la Chine et les Emirats arabes unis, elle met le cap sur l’Europe pour proposer
ses compétences en gestion hôtelière. En partenariat avec le conglomérat turc MYC
Partners, Lux va gérer un projet immobilier à usage mixte situé dans le centre touristique
de la Turquie. L’accord concerne la gestion d’un hôtel 5 étoiles comprenant 60 chambres
et 75 résidences haut de gamme, dont 25 seront exploitées sous la marque du groupe hôtelier.
L’hôtel a déjà décroché une médaille d’argent lors du prestigieux prix d’architecture A’design
Awards, en Europe, et il devrait ouvrir ses portes en mai 2017. MYC Partners opère dans les
secteurs de la santé, de la finance, de l’assurance, de la construction, de l’immobilier et de
l’hôtellerie. Il est implanté dans la péninsule de Bodrum, une destination haut de gamme qui attire
un million de visiteurs chaque année et où la demande en biens immobiliers est en hausse. De
nouveaux parcours de golf y sont en cours d’élaboration.
Paul Jones, CEO de LUX, ne cache pas sa satisfaction. « C’est une étape très importante de notre
expansion internationale, nous sommes vraiment fiers d’implanter la marque Lux en Europe. C’est
un véritable exploit pour tous nos collaborateurs ».
64 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
■
Dr. Akdogan, Chairman du conglomérat turc MYC
Partners et Paul Jones, CEO de Lux Resorts &
Hotels. Le partenariat entre les deux entreprises
va permettre au groupe mauricien Lux de s’implanter en Turquie.
COMMUNIQUÉ
Benares est une résidence de
26 maisons : chacune d’entre
elles possède trois chambres,
un parking privé, une piscine
et un jardin paysager.
DR
« Royal Park est le premier projet immobilier intégré
où Mauriciens et étrangers pourront se côtoyer »
DR
Artur Simes, COO Sales and
Marketing de Royal Park
Situé au cœur du plus grand parc marin de l'île - La Baie aux Tortues - et bénéficiant d'un
micro-climat idéal, sur la côte nord-ouest de Maurice, le projet Royal Park est un concept
particulièrement original. Véritable lieu de vie avec services de loisirs et de détente, c'est aussi
un produit d’investissement à long terme.
Vous avez lancé il y a deux ans votre projet, le Royal Park. Pourriezvous nous le présenter ? Situé au nord-ouest de l’île Maurice, longeant la baie aux Tortues,
Royal Park est un développement immobilier ambitieux et de grande
envergure.
Ambitieux d’une part, parce qu’il a été le premier à avoir pour
vocation un développement intégré où Mauriciens et étrangers
pourront se côtoyer et échanger des expériences de vie et de
culture. Ce domaine exclusif conçu par un paysagiste de renommée
internationale est une invitation à découvrir les différentes facettes de
l’île grâce à un ensemble d’infrastructures et d’activités mis à la
disposition des résidents.
De grande envergure, d’autre part, non seulement par la taille du
projet : 90 hectares, dont un parc de plus de 9 hectares, mais aussi,
par la vision des promoteurs qui ont, dès le départ, vu Royal Park
comme un développement où des services de Resort seront proposés
aux résidents. La conception du développement immobilier ; avec
des terrains résidentiels vendus aux Mauriciens accompagnés d’un
cahier des charges pour assurer une homogénéité avec les résidences
commercialisées à l’international, offre un choix de résidences pouvant
satisfaire les demandes et les besoins des plus exigeants.
Quels sont ses avantages concurrentiels ?
En sus d’un éventail de produits proposé par Royal Park, le domaine
prévoit pour ses résidents, des services de haute qualité à travers le
Club House, le Sunset Beach – Banyan Village : une plage privée permettant d’apprécier un magnifique couché du soleil, le R-Club à Mon
Choisy et l’accès à une réserve naturelle de 500 hectares à Salazie
De plus, stratégiquement situé entre la capitale Port-Louis et Grand
Baie, Royal Park offre une vue imprenable sur la montagne de Moka
et la baie aux Tortues. Inspiré du jardin historique Pamplemousses, le
parc de 9 hectares, unique à Maurice, signé Colin Okashimo, paysagiste
de renommée internationale, offre un espace exceptionnel et un luxe
de verdure. Lieu de rencontre et d’échange, le cadre de Royal Park
est propice aux partages de cultures entre les Mauriciens et les étrangers.
Quelle clientèle visez-vous ? Comptez-vous explorer également le
marché de la région ?
Les premiers produits de Royal Park ont été très bien reçus tant au
niveau local qu’à l’international. Tous les terrains résidentiels Pamplemousses ont été vendus ainsi que les appartements Mascarene, les
villas Sandpiper et 70% des villas Savannah. Nos clients à l’international
sont des Européens, mais aussi des ressortissants des pays d’Asie et
d’Afrique tels que l’Afrique du Sud. Nous préconisons de renforcer
notre présence à la fois sur le marché régional et international. L’océan
Indien est une vaste région qu’il ne faudrait, en aucun cas, négliger.
Le Property Development Scheme (PDS) remplace l'Integrated Resort
Scheme (IRS) et le Real Estate Scheme (RES). Cela a-t-il fait évoluer
votre stratégie commerciale ? Quelles sont les garanties que vous
proposez aux éventuels investisseurs, en particulier étrangers ?
Dès le départ, Royal Park a été créé pour intégrer les Mauriciens et les
étrangers. Le nouveau régime PDS est venu confirmer notre choix et
notre position commerciaux. Toutefois, notre équipe s’assure de
garder une homogénéité des développements, garant de notre
succès.
Les garanties que nous proposons sont définies par le régime PDS. En
sus, de la qualité, tout promoteur doit prendre une assurance de
garantie décennale ainsi, qu’une garantie de deux ans au niveau
des petits ouvrages. Chez nous, c’est chose faite !
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 65
LEAL PREND DES PARTS D’UN MARCHÉ
AUTOMOBILE QUI DÉPRIME
DR
S
i le marché des véhicules neufs a connu à Maurice une
forte récession en 2015, à - 17% par rapport à 2014, le
groupe Leal a tiré son épingle du jeu. En reprenant la
concession Mitsubishi, il a étoffé son offre avec notamment
un pick-up, type de véhicule dont il ne disposait pas auparavant. Il a pu également lancer deux nouveaux modèles de BMW
hybrides, cette marque allemande restant leader du segment premium,
d’autant plus que le changement de main de la carte Mercedes a
ralenti les ventes de ce concurrent direct. Le groupe, qui détient
également les marques Renault et Kia, couvre désormais tous les
segments du marché. Au total, toutes marques confondues, il a pu
vendre 1 817 véhicules neufs, ce qui représente quand même 90 de
moins qu’en 2014. Mais ses parts de marché ont progressé de 21,2%
à 21,7%. « 2015 n’a pas été une très bonne année pour le marché de
l’automobile, reconnaît Eric Leal, CEO du groupe, mais chez Leal,
nous sommes tout de même très satisfaits. Le groupe s’est agrandi
avec une nouvelle marque et de nouveaux véhicules. »
Du côté de La Réunion, où le Mauricien détient les cartes BMW et Mini
depuis 2013, la tendance est différente. Leal y a vu ses ventes
progresser de 6% avec un total de 694 véhicules vendus.
Leal a lancé à Maurice deux nouveaux modèles de BMW hybrides, cette marque
allemande restant leader du segment premium.
■
LE FRENCH HUB EN PARTENARIAT
AVEC L’IAE DE MONTPELLIER
S
DR
PERFORMANCE
Maurice
Emmanuel Houzé, directeur adjoint de l’IAE de Montpellier et Coralie
Barra, directrice du French Hub.
66 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
itué à Grand Baie, le French Hub propose à la location des bureaux
entièrement équipés (mobilier, Internet par fibre, ligne téléphonique
dédiée), un accueil téléphonique personnalisé, un espace détente
de 200 mètres carrés et un accès à un réseau de partenaires experts.
Mais la structure veut aller plus loin en initiant un partenariat avec
l’IAE de Montpellier (école universitaire de management) lui permettant de
proposer aussi des formations. Créé en 1956, cet IAE fait partie des dix premières
écoles de gestion en France. Il propose une offre de formation diversifiée
couvrant l’ensemble des métiers du management et de la gestion. Autre atout de
cet établissement, la mise en place en son sein des MOOC (Massive Open
Online Courses), des formations en ligne, accessibles gratuitement et par Internet
à toute personne désireuse de se former. Une vingtaine de Mauriciens se sont
déjà inscrits et ont bénéficié de ces formations. La rentrée au sein du French Hub
se fera au cours du second semestre 2016 et proposera des formations en management de la force de vente et en management de projets innovants.
■
LA MAZANA 2 DE KARENJY BIENTÔT
SUR LES ROUTES MALGACHES
Après quatre ans d’études et de recherche avec Peugeot Citroën et Dangel, le fabricant malgache Karenjy
a entamé les derniers tests avec les prototypes définitifs de sa nouvelle voiture.
Par Mbolahasina Maminirina - [email protected]
L
UN 4x4 TOUT CHEMIN AVEC UN MOTEUR PEUGEOT
« Mazana 2 est un véhicule 4X4 entièrement conçu pour le marché
local, à la fois simple, robuste et solide, et surtout une voiture tout
chemin tout à fait adaptable aux contraintes des routes à Madagascar »,
précise Luc Ronssin, le gérant du « Relais de Madagascar », actuel
propriétaire de la marque au zébu. Unique en Afrique avec une
fabrication locale faite littéralement « à la main », la Mazana 2 est avant
tout une voiture conceptuelle et fonctionnelle avec une très bonne
maniabilité et se montre compétitive face à ses concurrents. La
carrosserie fabriquée à partir de fibre de verre en kevlar (servant dans
la fabrication de voitures blindées), les châssis ainsi que le capitonnage
sont montés localement. Seuls les éléments mécaniques sont importés.
Doté d’un moteur DV6 CM 1,6 L HDI de chez Peugeot, la Mazana 2
dégage une puissance de 112 Chevaux avec 4 cylindres et peut
La carrosserie fabriquée à partir de fibre de
verre en kevlar (servant dans la fabrication
de voitures blindées), les châssis ainsi que le
capitonnage sont montés localement. Seuls
les éléments mécaniques sont importés.
Mbolahasina Maminirina
’unique constructeur automobile malgache, Karenjy,
basé à Fianarantsoa, a dévoilé le design définitif de sa
nouvelle voiture Mazana deuxième génération, baptisée
« Mazana 2 ». un projet pharaonique mené depuis quatre
ans par 65 employés composés essentiellement d’ingénieurs
malgaches au sein de son atelier Soatao. L’association « Le Relais de
Madagascar », qui a repris la marque Karenjy (littéralement « vadrouille »)
en 2009, a fait appel à des experts étrangers et surtout à Peugeot
Citroën et à Dangel pour finaliser ce nouveau modèle. « Avec les
premiers prototypes qui sont des préséries, nous avons pu parcourir
jusqu’à présent 100 000 kilomètres à travers le pays sans aucun souci
majeur. Nous attendons la validation de Peugeot Citroën pour commercialiser la Mazana 2 dès cette année », explique Clément Varnier
chef de projet. Karenjy passe ainsi à la vitesse supérieure en prévoyant
de produire 20 véhicules en 2016, puis 100 à l’horizon 2017.
Les deux prototypes de la Mazana 2 ont déjà parcouru 100 000 kilomètres à travers
l’île. Le prix de vente n’a pas encore été arrêté, mais il devrait se situer
un peu au-dessus de 5 000 euros.
atteindre une vitesse de 150 km/h. La boite de vitesse bénéficie du
mode 4X4 de Dangel et d’un système de freinage à disque AV et AR.
La voiture consomme de 6 à 9 litres/100 km au stade du prototype
présérie. En ce qui concerne le prix, Karenjy est en cours de négociation
tout en prospectant ses clients. « La Mazana 2 est plus performante
que le précédent modèle, elle coutera donc plus cher, un prix dépassant
certainement les 5 000 euros », annonce Clément Varnier. Dans un
premier temps, l’entreprise cible le marché intérieur, mais elle s’intéresse
aux marchés de la SADC (Southern Africa Development Community)
et de la région océan Indien. Présent au 10e salon de l’automobile
2015 à Ivato, le véhicule Made in Madagascar est prêt à rivaliser avec
les 4X4 asiatiques et occidentaux qui inondent le marché.
La renaissance de la marque au zébu est passée par la reprise de
l’atelier Soatao par l’association « Le Relais de Madagascar » en 2009.
Karenjy avait déjà produit des modèles de voitures il y a 25 ans avec
Iraka, le Faoka, le Lanja et la Mazana D2000. La démarche d’autofinancement entreprise par « Le Relais » à travers ses six projets conditionne le financement du projet.
■
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 67
PERFORMANCE
Madagascar
ID
FORUM
LA RÉUNION
L’ENTREPRENEURIAT AU FÉMININ :
Stocklib/ ergey Nivens
UN MOTEUR POUR
L’INNOVATION
L’entrepreneuriat féminin affiche son dynamisme et progresse dans la performance. La capacité
d’innovation apportée par les femmes dans les nouveaux modes de management, privilégiant l’humain
et le collaboratif, représente une source de valeur ajoutée…
Par Philippe Stéphant
À
La Réunion, les femmes sont aujourd’hui à l’origine d’un
tiers des créations d’entreprise, au même niveau que
dans l’Hexagone. Mais les Réunionnaises entrepreneurs
se distinguent par une plus grande capacité d’innovation.
« Cette dynamique de l’entrepreneuriat au féminin incite à échanger
sur le potentiel d’innovation des créatrices d’entreprise, déclare
70 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Jenny Seibert, responsable marketing territorial et communication
au sein de l’Agence de développement Nexa. Les femmes ont-elles
des atouts particuliers en terme d’innovation ? On observe que de
nouveaux modèles économiques, en train d’émerger, sont plus
centrés sur l’humain. Peut-être les femmes ont-elles davantage cette
sensibilité pour être créatives et efficaces dans ces nouvelles formes
ID
d’entrepreneuriat. » Un Plan d’action de l’entrepreneuriat au féminin,
présidé par la « Délégation régionale aux droits des femmes et à
l’égalité », a fait l’objet d’une convention en décembre 2014 entre
l’État, la Région Réunion et la Caisse des Dépôts. C’est dans ce
cadre que Nexa a mis en place un Observatoire de l’entrepreneuriat
au féminin. « Les femmes réunionnaises innovent mieux que la
moyenne nationale, et mieux que les hommes réunionnais, dans
toutes les catégories : produits, services, modes d’organisation et
marketing », témoigne Rekha Grimoire, chargée d’études au sein de
l’Observatoire de Nexa.
Nathalie Bourcier, gérante de 21° Sud :
« Les femmes ont de fortes capacités
d’innovation dans le management et
nous devons faire nos preuves, encore
plus que les hommes, en tant que
dirigeantes. »
LES FEMMES PROGRESSENT DANS LES TIC
Jenny Seibert, responsable marketing
territorial et communication au sein
de l’agence de développement Nexa :
« L’innovation féminine rayonne
actuellement dans une vraie dimension
territoriale, qui n’exclut pas les
hommes. »
Séva Caroupapoullé, gérante de
Nemrod Technology : « Être
entrepreneur indépendante peut être
mal perçu à La Réunion car certains
s’imaginent qu’on fait ce choix quand
on ne réussit pas comme salariée. »
LE « TRAVAILLER-ENSEMBLE » EST IMPORTANT
Photos Guillaume Foulon
Les domaines d’activité des femmes sont avant tout ceux du
commerce et des services. « 29% des créations, pour les femmes,
interviennent lorsqu’elles ont moins de 30 ans, contre 19% seulement
chez les hommes », indique Rekha Grimoire. Ces derniers bénéficient
plus facilement d’un soutien familial pour créer, plus tardivement,
une activité.
« 30% des femmes créatrices d’entreprise opèrent désormais dans
le numérique, révèle Réjane Panechou, chargée de mission pour
Nexa, 30% des projets concernent les services et 15% le secteur
agroalimentaire. » Les créations féminines dans le secteur du
numérique progressent chaque année. « Sitôt que l’on élargit les
critères d’innovation, on voit apparaître davantage de projets féminins,
commente Anne-Marie Grenier, responsable du Pôle projets innovants
à la Technopole de La Réunion. Cette mutation de l’innovation
d’usage et, plus largement, l’évolution du marché des projets
confirment la progression de l’implication féminine dans le secteur
des TIC. » En témoigne la startup Immersive Ways qui a développé
au sein de l’Incubateur ses solutions en immersion visuelle et sonore
et s’apprête à les commercialiser. « Nous lançons un mode de production transmédia, immersif et interactif, et un logiciel pour produire
ces contenus innovants immersifs, explique Moea Latrille, présidente
d’Immersive Ways. Nous recherchons un investisseur pour accélérer
notre arrivée, parmi les précurseurs, sur le marché international qui
va vivre une très forte croissance dès 2016. »
En créant le site Beamjobs.com, Anne-Laure Payet utilise les codes
des sites de rencontre pour mettre en relation les recruteurs et les
demandeurs d’emploi. Illustrant la capacité d’innovation féminine en
matière de management centré sur l’humain et le bien-être au travail.
« L’objectif est de dire au revoir au CV traditionnel pour valoriser
toutes les compétences d’un candidat. On demande de plus en
en partenariat
avec
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 71
ID
FORUM
LA RÉUNION
plus au collaborateur de travailler au développement de l’entreprise,
au-delà d’une tâche isolée. On recherchera davantage à recruter
des « cœurs » et à s’assurer que l’on pourra travailler ensemble »,
expose Anne-Laure Payet, présidente de Beam dont l’univers émarge
sur la notion de bonheur.
Pour aider les jeunes femmes qui se lancent dans le digital, Isabelle
Albert entreprend de fonder le site « Girls In Tech » à La Réunion.
« Girls In Tech est une marque internationale, créée en Californie,
qui prend une énorme ampleur, y compris en Afrique. Nous créons
une branche française et régionale pour donner une tribune internationale à La Réunion et participer à l’ambition d’un French Tech Hub
dans l’océan Indien », annonce Isabelle Albert.
En tant que designer industriel, Tatiana Hossein réalise des études
centrées sur l’humain. « J’accompagne les entreprises dans leurs
nouveaux concepts, en analysant l’usage que l’on fera d’un produit
ou d’un service, à travers le prisme de l’innovation sociale et technologique, entre l’ingénierie et l’esthétique. » La startup Oscadi en a
bénéficié pour le design de sondes pour l’échographie.
Tatiana Hossein, designer industriel :
« Un designer industriel doit étudier
beaucoup de disciplines et tout ce qui
gravite autour des besoins et des
usages, entre l’ingénierie et
l’esthétique. »
Anne-Marie Grenier, responsable du
Pôle projets de la Technopole de La
Réunion : « En matière de recherche,
les femmes sont omniprésentes et
essentielles dans tout le process
d’innovation. Mais le projet final est
plutôt porté par un homme. »
FAVORISER L'INTELLIGENCE ÉMOTIONNELLE
Rekha Grimoire, chargée d’études pour
l’Observatoire régional de Nexa :
« Globalement, les entreprises dirigées
par une femme affichent un meilleur
taux de croissance et un meilleur taux
de survie que celles qui sont dirigées
par un homme. »
72 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Photos Guillaume Foulon
Moea Latrille, présidente d’Immersive
Ways : « Nous lançons un mode de
production transmédia pour le marché
de l’océan Indien et un logiciel sur le
marché international pour produire des
contenus innovants immersifs. »
Le premier centre de coworking de La Réunion a été créé en 2013
par une femme. « J’étais pionnière dans cette innovation, souligne
Massi Rivière, gérante de Starter +. Il y a désormais d’autres centres
de coworking et ma structure a évolué en petit centre d’affaires pour
la location de bureaux, de salles de formation et la domiciliation
d’entreprises. »
La Banque de La Réunion soutient l’entrepreneuriat au féminin et
décerne chaque année le Prix Julie Mas qui récompense une femme
entrepreneur. « En 2015, nous avons signé une convention avec le
Département de La Réunion, qui réserve une enveloppe de financement
spécifique pour les porteurs de projets féminins, annonce Dominique
Leung-Pin, responsable des offres et animations commerciales de
la Banque de La Réunion. L’empreinte masculine est toujours dominante en 2016 dans le monde économique, mais la prise en compte
de l’intelligence émotionnelle avantage désormais les femmes. »
Séva Caroupapoullé, gérante de Nemrod Technology, témoigne des
particularités du management féminin : « Nous passons beaucoup
de temps à échanger pour comprendre nos salariés. C’est une
forme de dualité qui n’est pas toujours simple. J’exerce sur un
marché essentiellement masculin, celui du contrôle d’accès, de la
sécurité et de la gestion du temps dans les entreprises. On cherche
souvent le point faible chez une femme et nous devons en permanence
cultiver l’excellence. » Elle observe également que ces moyens de
contrôle apportent aussi de l’apaisement dans les entreprises et
contribuent à y « mettre du bonheur ».
Les femmes sont mieux préparées, remarquent les professionnels
de l’accompagnement à la création d’entreprise. « Elles ne veulent
pas se tromper et gèrent le risque plus soigneusement que les
hommes, ajoute Anne-Marie Grenier. Elles démontrent un grand
courage lors des premiers écueils. »
ID
FORUM
LA RÉUNION
Stocklib Sergey Nivens
Réjane Panechou, chargée de mission
chez Nexa : « Nous accompagnons les
porteuses de projet dans leur démarche
de création et nous pouvons nous
charger de leur mise en relation avec
des financeurs potentiels. »
La femme entrepreneur n’est pas « Super Woman ». Mais pour être reconnue,
elle doit souvent faire plus et mieux que l’homme entrepreneur.
Isabelle Albert, fondatrice de
l’application Lovely Family : « On passe
du management pyramidal au
management collaboratif et l’on est
obligé de travailler ensemble, ce que
les femmes savent souvent bien faire. »
Créée il y a plus de dix-huit ans, l’agence 21° Sud a été la première
agence de communication à La Réunion spécialisée dans le développement durable, bien avant que ce terme ne soit à la mode.
Selon sa fondatrice et dirigeante, Nathalie Bourcier, « les femmes
ont de fortes capacités d’innovation dans le management et nous
devons faire nos preuves, encore plus que les hommes, en tant que
dirigeantes. C’est une autre façon d’envisager l’entrepreneuriat, qui
donne la priorité au bien-être relationnel plutôt qu’à une profitabilité
maximale. »
ACCROÎTRE LA CRÉATION DE VALEUR
PAR LES FEMMES
Comment La Réunion pourrait-elle mieux bénéficier de la création
de valeur par les femmes ? L’attachement des familles réunionnaises
au salariat et au secteur public, comme perspective pour leurs
enfants, est-il un frein à l’entrepreneuriat au féminin ? « Il faut
développer l’information des jeunes filles dès la sortie du collège »,
pense Dominique Leung-Pin.
« Que l’on sache ce qu’est l’entrepreneuriat », ajoute Moea Latrille.
Parfois, les technologies font peur car c’est un monde de garçons.
« Nous pouvons développer la formation et l’information en direction
des jeunes femmes avec du coaching approprié, sur de petits
formats. Pour tester des outils et déculpabiliser le fait que l’on peut
se tromper », propose Isabelle Albert. C’est d’ailleurs l’un des
objectifs de « Girls In Tech ».
Massi Rivière a créé en 2013 Starter +,
un centre de coworking : « J’étais
pionnière dans cette innovation. Mais il
y a désormais d’autres centres et ma
structure a évolué en petit centre
d’affaires… »
74 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Photos Guillaume Foulon
Anne-Laure Payet, présidente de Beam :
« Le recrutement s’oriente vers deux
tendances, le multi casquettes et le
recrutement de « cœurs » qui peuvent
apporter une richesse au
travailler-ensemble. »
en partenariat
avec
ID
ANALYSE
LA RÉUNION
AIR AUSTRAL FACE À SON AVENIR
AFRICAIN ET ASIATIQUE
Le président du directoire de la compagnie aérienne réunionnaise, Marie-Joseph Malé, se trouve
avec ses actionnaires publics, les collectivités réunionnaises, à la croisée des chemins de son
développement…
Par Christophe Rocheland (*)
Dans moins de trois mois, Air Austral devra retenir le partenaire
capable de lui assurer l’essor auquel elle est promise, dotée de capacités financières suffisantes (ou espérées) pour y contribuer. Autrement dit, elle sera sous peu dotée d’un actionnaire majoritaire. Un
choix fondamental pour la compagnie, ses employés, le développement
de La Réunion et son désenclavement. Un choix qui doit être fait en
fonction de la situation géo-économique de notre île dans l’océan
Indien, à la lumière des récentes évolutions des compagnies
aériennes dans la zone et dans le monde.
UNE LONGUE HISTOIRE ET DES ENJEUX
Air Austral a commencé ses opérations commerciales en
mars 1975 sous le nom de Réunion Air Service, elle a fêté en 2015
ses 40 ans d’existence. Renommée Air Réunion en 1986, la compagnie
prend son nom actuel en 1990 à l’occasion d’une entrée au capital
d’Air France. Avec la prise de contrôle des collectivités publiques
réunionnaises, Air Austral devient l’outil stratégique et de service
public du désenclavement aérien de La Réunion.
À l’heure des choix imminents que devront réaliser ces collectivités
et surtout la présidence régionale suite aux injonctions de la Chambre
régionale des comptes et de la Commission européenne de ramener
la participation publique à 33% du capital, il est nécessaire de
rappeler les enjeux fondamentaux et géopolitiques d’une entreprise
qui assure la projection d’un territoire comme La Réunion sur
plusieurs continents. Un état des lieux qui doit éclairer les décideurs
politiques sur la qualité de l’offre qui sera retenue et les relais de
croissance espérés.
« L’ a vi a ti o n es t a s s u r é men t u n o u ti l d e
projection de force civile et économique d’un
territoire qui permet de déplacer hommes
d’affaires et populations, et d’étendre aussi
son aire d’influence. »
76 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
L’aviation est assurément un outil de projection de force civile et
économique d’un territoire qui permet de déplacer hommes d’affaires
et populations, et d’étendre aussi son aire d’influence. C’est le cas
pour les compagnies nationales portées à bout de bras par les États
et largement subventionnées malgré leurs difficultés structurelles
pour la plupart (Air France, South African Airways, Air Madagascar,
Air Mauritius).
Certes, à la suite de British Airways, la plupart des compagnies européennes ont été privatisées et Air France aussi, lors de sa fusion
avec KLM. Mais ces privatisations ne conduisent pas à une « dénationalisation ». On constate en effet que les États se battent becs et
ongles pour « leurs » compagnies pourtant privatisées et qu’ils
mettent en place des règles notamment pour les droits de trafic.
Air Austral se trouve dans la même situation pour La Réunion. La
commande politique est d’assurer le désenclavement aérien de La
Réunion et son développement économique. Malgré l’application
des recommandations européennes faites aux collectivités de libérer
le capital de la compagnie à des privés, celle-ci sera toujours la
compagnie publique réunionnaise.
ÉTAT DES LIEUX DANS L’OCÉAN INDIEN
Dans la zone océan Indien, les compagnies aériennes des îles
voisines partagent ces mêmes objectifs avec, comme enjeu national
et vital pour leurs économies insulaires, le développement touristique.
Trois axes de développement ont été observés au sein des compagnies
a travers le monde : la négociation d’alliances entre elles, le développement de la logique des réseaux en fonction des aires d’influences
du pays (économique et flux de population) et le positionnement via
un « hub » (Plaisance, Dubaï, Paris...).
Face à la concurrence du « hub » de Plaisance à Maurice, qui
accueille plus de 15 compagnies étrangères alors que Roland
Garros n’en accueille que deux (!), Air Austral n’a d’autre choix que
de se tourner vers un autre ou plusieurs « hub » en fonction de sa
clientèle. Il sera difficile de concurrencer Plaisance mais plus aisé
d’être complémentaire sur des segments délaissés par Port Louis :
l’Afrique et les concurrents arabes.
ID
Bernard Lugan
Le Boeing 787-8 dont va se doter Air Austral. Deux appareils de ce type feront leur entrée dans la flotte de la compagnie réunionnaise en mai et en octobre 2016.
Le marché d’importance pour la compagnie réunionnaise est et
restera l’axe Paris-Réunion en raison des flux quasi exclusifs des
liens économiques. Cet axe doit continuer à lui assurer sa croissance
économique et des capacités financières lui permettant de se projeter
en Asie et en Afrique. Un segment de marché qui se renforcera de
plus en plus avec le désengagement progressif d’Air France.
QUELS SONT LES RELAIS DE CROISSANCE ?
Il est cependant illusoire de continuer à croire que les relais de croissance se situeront sur ce segment ou sur celui des Antilles ou de
l’Australie (monumentale erreur stratégique de l’ancienne présidence).
La réalité géo-économique oblige Air Austral à créer davantage de
liens de proximité et des partenariats régionaux (Air Madagascar).
Avec un marché de plus de 850 000 habitants, il est l’heure pour
cette compagnie de diversifier ses risques liés au seul marché
émetteur réunionnais.
Alors que les compagnies de Maurice et des Seychelles ont noué
des alliances capitalistiques ou commerciales avec les compagnies
du Golfe et leurs gigantesques « hub » (Abu Dhabi, Dubaï), des
pistes existent et sont à explorer (Maurice ne pourra pas accueillir
toutes les compagnies du Golfe (comme Qatar Airways ou Etihad).
Cependant, la concurrence est rude... Et les pétromonarchies du
Golfe doivent être approchées par une vraie diplomatie économique
réunionnaise, ce qui n’est pas pour l’heure la grande spécialité de
nos décideurs politiques. Cette spécialité est à rechercher dans leur
grande expérience et connaissance de la liaison Paris-Réunion... Ce
qui se reflète dans l’avantage comparatif majeur d’Air Austral dans
les liaisons long courrier entre l’île et la France métropolitaine. Un
service de qualité, performant et sécurisé, avec toutes les compétences
requises pour pouvoir exporter ce savoir-faire.
Service, qualité et sécurité : des avantages que recherchent de plus
en plus les pays de la zone dont les compagnies sont blacklistées
en Europe. Une piste de développement très sérieuse à fort potentiel
que devra assurer le nouveau pilote actionnaire : l’axe AfriqueEurope. Cette demande a déjà été formulée par les compagnies
malgache et mozambicaine récemment. Une flotte, un service de
qualité, un personnel formé et compétent, une localisation de choix
à mi-chemin entre ces deux continents peuvent faire la différence
face à des compagnies mauricienne et seychelloise orientées exclusivement vers l’alimentation des flux touristiques de leur pays.
Enfin, les acteurs publics régionaux devront aussi poser dans le
cahier des charges de ce nouvel associé stratégique et majoritaire
la nécessité du développement touristique qui seul assurera le volet
manquant de flux récepteur vers La Réunion. Des alliances régionales
seront à négocier ainsi que des partenariats avec des compagnies
plus puissantes qui pourront s’appuyer sur l’expérience d’Air Austral
dans l’océan Indien. A l’image du partenariat entre Air Seychelles et
Etihad ou encore la création de Ewa à Mayotte.
Autant dire qu’au-delà des aspects financiers (dont les sommes
sont relatives), le nouveau partenaire stratégique d’Air Austral devrait
avoir une identité ancrée à La Réunion, une vision régionale et une
expérience confirmée de ces marchés régionaux. Il y va de la survie
de cette compagnie et du désenclavement de La Réunion. Air
Austral est l’un des derniers outils restant entre les mains des Réunionnais et pouvant assurer des missions de service public.
■
(*) Le Réunionnais Christophe Rocheland est doctorant en géopolitique
(IFG, Paris 8).
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 77
ID
TRIBUNE PRO
LA RÉUNION
VALORISER L’IMMOBILIER
D’ENTREPRISE POUR ACCROÎTRE
L’ATTRACTIVITÉ DU TERRITOIRE
La financiarisation des métiers et de la pratique de l’immobilier d’investissement engagée au milieu
des années 1990 a redistribué les standards de la mesure de la performance immobilière en les pliant
aux exigences de la gestion de portefeuille.
Par Philippe Monjole (*) - [email protected]
S
i l’ère post-2007 a semblé au premier abord clouer définitivement
au pilori la finance immobilière et sa titrisation excessive outre-Atlantique, depuis lors, dans un environnement de taux
d’intérêt et d’inflation faibles, l’investissement en immobilier d’entreprise
a maintenu son rôle de diversification dans les portefeuilles d’actifs
des investisseurs institutionnels.
Qu’il s’agisse de donner une valeur à un moment déterminé ou
d’appliquer une stratégie créatrice de valeur, la valorisation revêt
pleinement ces deux aspects complémentaires pour qui veut placer
ses capitaux. De cette polysémie naissent deux visions connexes
des composantes de la valeur immobilière, de façon statique, « dire
la valeur », ou bien de façon dynamique, « créer de la valeur ».
LE MARCHÉ SECONDAIRE RESTE EMBRYONNAIRE
Sur le territoire réunionnais, la valeur immobilière a notablement
augmenté dans les typologies majeures de l’immobilier d’entreprise
(bureaux, commerces, locaux d’activité et entrepôts et par extension
le foncier économique), portée essentiellement par le développement
démographique. Ainsi, le développement de l’offre d’immobilier
d’entreprise a considérablement enrichi le marché de produits
diversifiés tant en terme de typologie que de taille d’actifs. Fort de
cette création de valeur, notre marché peine, à quelques exceptions
notables, à démontrer ses qualités fondamentales aux investisseurs
institutionnels ultramarins, autrement dit à affirmer sa valeur. En
effet, connu pour ses avantages fiscaux attachés aux investissements
dans le domaine résidentiel classique ou du logement social, le
marché local est moins lisible lorsqu’on aborde l’immobilier d’entreprise
où coexistent au côté du marché libre différents régimes fiscaux dérogatoires ou de subventions, qu’ils soient européens, nationaux ou
locaux ou, encore les règles d’éligibilité spécifiques à des zones
d’activité (FEDER, ZFU, ZA…).
Si ces particularités influent de façon concrète à l’échelle du territoire
sur le développement primaire de l’immobilier d’entreprise à destination
78 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
des utilisateurs locaux, le marché secondaire reste embryonnaire
pour au moins trois raisons :
- La cherté du foncier économique et, par ricochet, du niveau de
prix moyen de production des actifs d’immobilier d’entreprise ;
- L’hétérogénéité de la pratique des baux commerciaux, souvent
incompatible avec les attentes des investisseurs professionnels
européens ou français, et notamment des baux à durée ferme ;
- Des niveaux de loyer élevés au vu des conditions macro-économiques locales défavorables en comparaison du marché métropolitain de référence (PIB moyen/habitant, niveau de chômage).
Sur ce dernier aspect, il est intéressant de noter le virage historique
qu’opèrent les investisseurs institutionnels locaux d’un modèle de
développement porté par la croissance du parc global d’actifs immobiliers à un marché de l’immobilier d’entreprise où l’heure semble
désormais au renforcement de sa gestion active. Cette étape précède
dans le cycle ordinaire de détention immobilier celle des cessions
d’actifs et nous anticipons l’avènement d’une offre de produits plus
importante dans un futur proche.
■
(*) PHILIPPE MONJOLE
Consultant senior en « Real Estate Asset
Management », titulaire d’un DESS en droit
de l’urbanisme, construction et immobilier
(Bordeaux IV), d’un Master en management
du patrimoine et de l’immobilier (IMPI-ESC
Bordeaux) et fort de quinze ans d’expérience,
il a créé AQUARII Asset Management en
2012. Cette entreprise de conseils et services
propose à ses clients d’organiser et de piloter
leur performance immobilière.
ID
COUP DE GUEULE
FRANCE
LE GOUVERNEMENT ENTRAVE
LE PORTAGE SALARIAL
ET EN FAIT DE L’INTÉRIM BIS
Alors que cette nouvelle forme d’emploi atypique, qui évite toute distorsion sur le marché du travail,
commençait à séduire des chômeurs qui créaient ainsi leur emploi, voilà qu’un décret vient limiter
considérablement ce potentiel.
Par Gilles Gambier
L
propre qui toutes les deux entraînent la tenue d’une comptabilité et
des cotisations au Régime social des indépendants (RSI). Dans le
cas du portage, le professionnel est salarié par la société de portage
qui, d’un côté, règle ses charges salariales et patronales de Sécurité
sociale et, de l’autre côté, facture aux sociétés clientes les prestations
réalisées par cet « indépendant porté ». La société de portage
Stocklib/Brian Jones
e portage salarial est une relation contractuelle tripartite dans
laquelle un salarié porté, ayant un contrat de travail avec une
entreprise de portage salarial, effectue une prestation pour le
compte d’entreprises clientes. En clair, c’est une alternative au statut
de travailleur indépendant qui implique la création d’une société
comme gérant majoritaire ou le lancement d’un activité en nom
Le portage salarial est une formule originale qui permet de s’insérer dans le monde du travail. Une formule trop pratique sans doute pour qu’on la garde en l’état.
80 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
ID
rémunère au passage, de façon légère, ses prestations qui consistent
à assurer toute la gestion et la comptabilité relatives aux activités de
ses indépendants portés. Cette formule originale évite toute distorsion
de concurrence comme l’ont reproché à un certain moment les travailleurs indépendants au statut d’auto-entrepreneur. Dans une
période où sévit le chômage, elle permet à des personnes de créer
leur emploi alors qu’elles ont identifié plusieurs entreprises susceptibles
de faire appel à leurs services mais aucune n’ayant des besoins suffisants ou permanents pour les recruter comme salarié.
Mais c’était sans doute trop simple et trop pratique pour perdurer
dans le cadre d’un système français particulièrement rigide où tout
semble fait pour dissuader de créer des emplois. Voilà que le Décret
n° 2015-1886 du 30 décembre 2015 a définitivement instauré, à
compter du 1er janvier 2016, que les entreprises ne pourront avoir
recours au portage salarial que pour une tâche occasionnelle et non
durable et ne relevant pas de son activité normale.
DE QUOI DOPER LE CHÔMAGE
ET LE TRAVAIL AU NOIR
L’Uneps (Union nationale des entreprises de portage spécialisées)
dénonce cette entrave au portage salarial, le limitant à de l’intérim
bis et à une certaine catégorie d’actifs. Il s’agit du plus ancien
syndicat du portage salarial. Il regroupe 15 entreprises de portage.
Créée en 2005 par Josette Londé, l’Uneps milite pour une reconnaissance du statut d’indépendant porté, ainsi que pour une accessibilité de ce statut au plus grand nombre de métiers possibles. Afin
de simplifier la gestion d’une activité indépendante et d’apporter
une solution à une situation de chômage en impasse.
« Plus que jamais, le portage entrepreneurial apporte aux victimes
d’un marché de l’emploi en berne une solution simple, rapide et pérenne, en tant qu’alternative possible aux statuts juridiques et fiscaux
traditionnels de travailleur indépendant », souligne Josette Londé.
Selon la nouvelle définition officielle, le salarié porté peut être toute
personne justifiant d’un niveau d’expertise, de qualification et d’autonomie suffisant pour rechercher ses clients. Dans les faits, le
portage salarial ne s’adresse cependant pas à tout le monde. En
plus d’être expert, il faut aussi savoir se vendre et faire un chiffre
d’affaires suffisant pour pouvoir avoir droit au salaire minimum prévu
par l’ordonnance d’avril 2015, c’est-à-dire 2 380 euros mensuels,
versés par l’entreprise de portage salarial. Cela oblige un grand
nombre de portés à trouver d’autres solutions pour deux raisons :
1) Parce que les 2 380 euros de salaire minimum à verser par les
sociétés de portage correspondent à quelques 4 800 euros de
chiffre d’affaires HT que le porté doit avoir facturé à ses clients
car il faut rajouter 10% de prime de précarité et l’indemnité de
clientèle. Plusieurs personnes n’atteignent pas ces niveaux de
chiffre d’affaires, surtout au démarrage de leur activité.
2) Les entreprises clientes ne peuvent avoir recours à des portés
que pour une tâche occasionnelle et non durable et si cela ne
correspond pas à l’activité permanente de l’entreprise. De plus,
le contrat de prestation est limité à trois ans… »
« À l’occasion de ses vœux aux acteurs de
l’entreprise et de l’emploi, François Hollande
avait pourtant confirmé que le portage salarial
fa i sa it pa r tie d es gra n de s me su res q u’i l
souhaitait favoriser pour inverser la courbe
du chômage en France. Cherchez l’erreur ! »
faisait partie des grandes mesures qu’il souhaitait favoriser pour
inverser la courbe du chômage en France. Cherchez l’erreur !
Avec ces restrictions, le portage salarial ne se distingue plus de
l’intérim. Selon Josette Londé, « l’incidence pour les sociétés qui
pratiquent le portage salarial est qu’elles vont perdre une partie importante de chiffre d’affaires. Quant aux personnes qui avaient
recours au portage salarial et qui n’atteignent pas ce niveau de
chiffre d’affaires imposé par les textes, elles vont être exclues. Sans
compter les entreprises clientes qui ne pourront plus faire appel à
des portés du fait des motifs de recours restrictifs. Donc du chiffre
d’affaires en moins pour les portés ! »
■
À l’occasion de ses vœux aux acteurs de l’entreprise et de l’emploi,
François Hollande avait pourtant confirmé que le portage salarial
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 81
ID
TÉMOIGNAGE
ARABIE SAOUDITE
QUAND LA MECQUE DEVIENT
MECCAHATTAN
La doctrine wahhabite prône la destruction du patrimoine islamique par haine de l’idolâtrie.
Visant désormais le tombeau du prophète, elle poursuit la transformation des lieux saints en un
vaste parc immobilier tandis que la communauté musulmane n’ose protester.
Par Laurence D’Hondt
C
’est un chantier titanesque, à l’avancée aussi rapide qu’inexorable, qui transforme la Mecque depuis quelques années. À
coups de pelles géantes et de pioches, la ville sainte voit ses
dernières ruelles étroites et ses maisons chargées d’histoire religieuse
partir en poussière et en fumée. Le chantier lancé par le Roi Abdallah
pour augmenter les capacités d’accueil de la Mecque, qui doit se
terminer en 2017, avance à une vitesse si impressionnante que
lorsque les musulmans auront enfin pris la mesure des destructions
en cours, il sera trop tard. La spiritualité qui s’élève depuis quatorze
siècles de ce lieu unique dans le monde aura disparu sous les
hôtels 7 étoiles, les tours orgueilleuses et clinquantes et les enseignes
banalisées du commerce international. « À ce stade, nous pensons
que près de 95% du patrimoine historique, culturel et religieux de la
Mecque a été détruit », assure Irfan El Alawi, le directeur de la
Fondation pour la recherche du patrimoine islamique, Mecquois de
naissance, profondément attaché à la terre de ses ancêtres et à
l’Islam qui y a pris naissance.
UNE FORÊT DE BÉTON
Ce massacre à la pelleteuse se fait dans une indifférence invraisemblable. Pourtant, en dehors des dénonciations portées sur la place
publique par la Fondation, les musulmans dans leur grande majorité
ne sont pas heureux de ces destructions. Beaucoup de Marocains,
de Tunisiens, de Turcs et de Palestiniens s’indignent de la disparition
d’une maison aussi chargée d’histoire que celle de la première
femme du prophète, Khadidja. Le Dr Irfan El Alawi se souvient de cet
épisode : « Lorsque nous avons appris qu’elle était menacée, nous
nous sommes rendus d’urgence à la Mecque. Nous sommes venus
avec des architectes, des ingénieurs, des historiens », raconte le Dr
Irfan, « les autorités saoudiennes nous avaient donné trois semaines
pour creuser à l’endroit de la maison et découvrir ce qui subsistait.
Nous avons alors découvert la chambre qui avait vu la naissance de
Fatima, la chambre du prophète. Cela était très émouvant ». Mais la
proposition de placer une vitre au dessus de cette maison afin de
82 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
donner aux pèlerins l’occasion de la découvrir a été écartée par les
Saoudiens. « Les autorités ont expliqué que cela allait devenir un
lieu d’idolâtrie ou ce qu’on appelle ‘Shirq’. » Dépités, les scientifiques
ont donc rempli la maison de sable pour la conserver pour des jours
futurs, tandis que les autorités ont construit au-dessus les hammams
de la grande mosquée. Alors que les regards sont tournés vers la
Syrie et l’Irak où les destructions marquent la présence de l’Etat Islamique, les autorités saoudiennes poursuivent à grands pas ce qui
ressemble à une destruction systématique de toutes les traces de la
vie du prophète. Ainsi, le professeur Dr Ali Ben Abdulaziz al Shabal
de l’Université Imam Muhammed Ibn Saud à Riyadh aurait-il programmé, dans un document d’une soixantaine de pages, la destruction
à Médine du fameux dôme vert qui abrite le tombeau du prophète,
annonçant même que sa dépouille serait déposée dans une fosse
commune.
LE MÈTRE CARRÉ À 100 000 EUROS
Si les autorités saoudiennes sont les gardiennes des lieux saints,
elles prônent la doctrine wahhabite qui est minoritaire et loin de faire
l’unanimité au sein des musulmans. « C’est au XVIIIe siècle que Mohammed Ibn Abd al Wahhab a développé cette doctrine qui se base
sur quatre mots clés, rappelle Rafiq Haras, directeur de la Fondation
de recherche Quilliam, ces mots sont Haram (interdit), Bida (des innovations répréhensibles), Shirq (l’idolâtrie) et Kafir (l’infidèle). Pour
le wahhabisme, toute intercession entre Dieu et l’homme et toute innovation est interdite car cela éloigne le croyant de Dieu. Dans cette
optique, la maison du prophète, son tombeau et ses femmes ne
peuvent être le lieu d’une adoration ». Si la raison religieuse est fondamentale, il y aussi derrière ces destructions une ambition économique. À la place de la maison d’un compagnon du prophète se
dresse désormais le Hilton. À la place de la maison de Hamza, un
oncle du prophète, s’érige un hôtel de luxe. Certains immeubles
prestigieux comme la Clock Tower sont devenus l’occasion d’investissements pour des locations ou dans le cadre d’un partage de
ID
Stocklib/Jasmin Merdan
Dans la perspective d’une sortie du pétrole, l’Arabie Saoudite tente d’augmenter les rentrées issues du pèlerinage qui rapporterait déjà près de 40 milliards de dollars
par an.
propriété. Selon différentes sources, le mètre carré se vendrait aujourd’hui jusqu’à 100 000 euros, parfois plus, à la Mecque. Dans la
perspective d’une sortie du pétrole, l’Arabie Saoudite tente d’augmenter
les rentrées issues du pèlerinage qui rapporterait déjà près de 40
milliards de dollars par an. « Depuis deux ans environ sont apparues
des offres pour un pèlerinage de luxe en hélicoptère dans le Golfe »,
assure Irfan El-Alawi, « ces offres de trois jours coûtent environ 20
000 dollars et s’adressent aux Emiratis, aux Sud-africains, à ceux qui
ont les moyens de se faire déposer en hélicoptère sur les trois sites
principaux du pèlerinage ». Il faut savoir qu’un pèlerinage simple
coûte en moyenne plusieurs milliers d’euros par personne et qu’il
devient chaque année plus cher.
Cette transformation de la Mecque en un vaste parc immobilier et
spéculatif porte désormais une ombre physique sur le site principal
de la Kaaba. Les pèlerins ne peuvent plus tourner autour du premier
sanctuaire musulman sans avoir, en toile de fond, la forêt de béton
et de verre des nouveaux buildings de la Clock Tower mecquoise.
De nombreux musulmans dénoncent sur Internet ce qui leur apparaît
de plus en plus comme une sorte de Meccahattan et choque
l’humilité requise par leur foi et leur attachement naturel aux lieux de
vie du prophète. Mais le sujet reste extrêmement sensible et se
trouve rarement dénoncé dans les milieux musulmans. Le professeur
Irfan El Alawi a quelques explications à ce tonitruant silence : il y a la
De nombreux musulmans dénoncent sur Internet
ce qui leur apparaît de plus en plus comme une
sorte de Meccahattan et choque l’humilité requise
par leur foi et leur attachement naturel aux lieux
de vie du prophète.
peur de tous les musulmans de se voir privés de pèlerinage par les
autorités saoudiennes en rétorsion à leurs critiques. Il y a également
la peur des médias et des professeurs arabes qui sont souvent
achetés par les autorités saoudiennes. Enfin, il y a la discrétion avec
laquelle les autorités saoudiennes opèrent dans des villes où les
musulmans se rendent dans un élan spirituel et non conflictuel.
En dehors de la Fondation pour la recherche du patrimoine islamique,
il n’y a que deux milieux qui osent élever la voix contre cette transformation marchande de la Mecque faite au nom d’une pureté
religieuse : les soufis et les chiites. Mais en un sens, ils n’ont rien à
perdre : les uns et les autres sont considérés par les autorités
religieuses saoudiennes comme déviants et font l’objet de nombreuses
persécutions dans les régions soumises à l’influence wahhabite, du
Pakistan au Nigéria.
■
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 83
ID
ANALYSE
AFRIQUE DU NORD
LA GRANDE DÉSILLUSION
DES « PRINTEMPS ARABES »
En Tunisie, on commence à regretter le bon temps de Ben Ali alors qu’en Libye, plusieurs puissances
s’immiscent dans le chaos ambiant en ne faisant que l’aggraver. Quant à l’Algérie, qui n’a pas connu
de « Printemps arabe », elle doit gérer une situation à haut risque.
Par Bernard Lugan (*) - http://bernardlugan.blogspot.com
Les troubles sociaux qui agitent leur pays commencent à faire
regretter à de nombreux Tunisiens l’époque « heureuse » du président
Ben Ali. Les barbus ne tenaient alors ni la rue ni le maquis, le pays
était gouverné, plus de sept millions de touristes irriguaient l’économie,
les poubelles étaient ramassées, il n’y avait pas de coupures d’électricité… Aujourd’hui, les Tunisiens ont le ventre et les poches vides ;
quant au jasmin de leur révolution, il ressemble de plus en plus à un
chrysanthème… Politiquement, les Tunisiens qui, en 2014, avaient
voté pour un président et un parti anti-islamistes se retrouvent gouvernés par une coalition composée des islamistes qu’ils rejetèrent
par les urnes et qui ont été remis en selle par les anti-islamistes qui
prétendaient les combattre… Le résultat de ce mariage de la carpe
et du lapin est une incapacité gouvernementale à faire face à une
crise socio-économique qui prend peu à peu une forme insurrectionnelle. Le vendredi 22 janvier, dans certaines régions de la Tunisie,
le couvre-feu fut même décrété. Comme sous Ben Ali...
EN ALGÉRIE, LE SPECTRE DE L’EXPLOSION SOCIALE
En Algérie, un processus est engagé qui semble ne pas pouvoir
connaître d’autre issue que la violence. Le pays dispose cependant
Stocklib/Catalin
EN TUNISIE, DU JASMIN AUX CHRYSANTHÈMES
Politiquement, les Tunisiens qui, en 2014, avaient voté pour un président et un
parti anti-islamistes, se retrouvent gouvernés par une coalition composée des
islamistes…
d’un atout : les pays européens qui n’ont aucun intérêt à ce qu’il
explose feront tout ce qui est en leur pouvoir afin qu’il échappe au
pire. De plus, comme l’Algérie paye en partie ses importations en
euros et ses exportations en dollars, la hausse de la monnaie américaine a servi d’amortisseur à sa balance des paiements. Plus encore,
l’Algérie, qui ne produit rien et qui achète à l’étranger de quoi nourrir,
soigner, habiller et équiper sa population, bénéficie actuellement de
la baisse des cours des produits qu’elle importe. Nous sommes cependant dans le trompe-l’œil comme nous l’apprend le dernier
(*) Bernard Lugan
Historien français spécialiste de l’Afrique où il a enseigné de nombreuses années, Bernard Lugan est l’auteur d’une
multitude d’ouvrages. On peut citer, parmi les plus récents : « Histoire de l’Afrique des origines à nos jours» (Ellipses,
2009), « Histoire de l’Afrique du sud des origines à nos jours » (Ellipes, 2010), « Histoire du Maroc des origines à nos
jours » (Ellipses, 2012), «Décolonisez l’Afrique ! » (Ellipses, 2012), « Histoire des Berbères – Un combat identitaire
plurimillénaire » (Bernard Lugan Éditeur, 2012), « Mythes et manipulations de l’histoire africaine – Mensonges et
repentance » (Bernard Lugan Éditeur, 2012), « Les guerres d’Afrique des origines à nos jours » (Éditions du Rocher,
2013), « Printemps arabe – Histoire d’une tragique illusion » (Bernard Lugan Éditeur, 2013), « Afrique – La guerre en
cartes » (Bernard Lugan Éditeur, 2014), « Osons dire la vérité à l’Afrique » (Éditions du Rocher, 2015). Bernard Lugan a
été professeur à l’École de guerre à Paris et a enseigné aux Écoles de Saint-Cyr-Coëtquidan. Il a été conférencier à
l’IHEDN (Institut des hautes études de défense nationale) et expert auprès du TPIR (Tribunal pénal international pour le
Rwanda-ONU). Il édite par Internet la revue mensuelle « L’Afrique Réelle ».
84 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Stocklib/Rafael Ben-Ari
Les « Printemps arabes » sont loin d'avoir amélioré le sort des populations et
n'ont fait qu'accentuer les conflits au sein du monde musulman.
rapport des Douanes algériennes (janvier 2016) qui met en évidence
ce miracle conjoncturel. Trois exemples peuvent ainsi être cités :
- Durant l’année 2015, les importations de matériaux de construction
ont augmenté en volume de près de 10%, mais elles ont baissé
de 12% en valeur ;
- Les importations de bois ont connu une hausse en volume de
plus de 100% (846 millions de dollars), mais leur baisse en valeur
fut de près de 25% ;
- Alors qu’en 2015, les volumes d’importation de céréales ont augmenté d’environ 10%, la facture payée par l’Algérie fut de 3,43 milliards de dollars contre 3,54 en 2014.
Si les cours repartaient à la hausse, si un accident climatique se produisait chez les producteurs mondiaux de céréales et si, parallèlement,
les cours du baril de pétrole ne remontaient pas d’une manière significative, qu’adviendrait-il alors en Algérie ?
TOUJOURS LE CHAOS EN LIBYE
À l’heure où ces lignes étaient écrites, dans le sud de la Libye,
Touareg, Toubous et Arabes s’affrontaient, cependant que le pays
n’avait pas de gouvernement d’union nationale. Or, sans un tel gouvernement, aucune intervention militaire internationale contre l’État
islamique n’est envisageable. La difficulté à laquelle se heurtent les
responsables onusiens œuvrant à la constitution d’un tel gouvernement
est que lorsqu’ils contentent les uns, ils mécontentent les autres. À
cet égard, l’erreur de la communauté internationale est d’avoir voulu
favoriser la ville de Misrata. Détestée par la plupart des autres composantes libyennes, elle est soutenue par la Turquie, le Qatar, les
Frères musulmans et les États-Unis… Donc par la France.
■
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 85
ID
LIVRE
LE THÉORICIEN DE « L’HÉGÉMONIE
CULTURELLE » N’EST PAS MORT
Redécouvert par la droite et une partie de la gauche après le printemps 2013, Gramsci est de nouveau
à la mode. Gaël Brustier se sert des concepts du théoricien de « l’hégémonie culturelle » pour analyser
la défaite de la gauche, au moins « dans ses têtes ».
I
ls se piquent d’être de gauche, mais peu de nos gouvernants on véritablement lu ou du moins compris Gramsci. « Si François Hollande avait lu
Gramsci, il serait ébahi de voir que oui, le latin et le grec sont les socles indispensables d’une éducation nationale dans un pays du Vieux continent ;
que oui, il y a des moyens de rendre l’école véritablement égalitaire, non pas
en simplifiant à outrance les apprentissages, mais en généralisant l’enseignement des humanités aux classes sociales les plus défavorisées. »
Pour Brustier, le combat culturel de la gauche a été perdu parce qu’il a été
remplacé par celui, plus hasardeux, des « valeurs » : « Un anti-intellectualisme
a envahi la vie politique française. La gauche ne fait pas exception. Ses
dirigeants parlent de « bataille des valeurs » comme si, sur le marché de ces
fameuses « valeurs », entre une offre et une demande, un simple effort
marketing suffisait à convaincre les électeurs d’acheter leurs produits. Le
combat des valeurs est en soi une négation de l’idée d’hégémonie culturelle. »
« La gauche est en état de mort cérébrale et une grande
partie de la droite ne vaut guère mieux. Le champ de
bataille culturel reste à investir, c’est là où se joueront
les victoires durables de demain. »
Les « valeurs », qui se vendent, s’échangent, perdent ou gagnent en
importance ne sont qu’une façade pour masquer la vacuité des pensées et
des discours de nos dirigeants. On se réfugie derrière le « tout économique » :
ça ira mieux quand la croissance reviendra. On prétend gouverner, on « fait
France », on communique, mais il n’y a rien de fondamental derrière. On
agite l’écume et l’on se contente de suivre la vague.
La gauche est en état de mort cérébrale, constate l’auteur : « Soumission à
l’idéologie de la crise ou rappel de l’idéologie d’hier, la gauche n’invente
plus rien. » Une grande partie de la droite ne vaut guère mieux. Le champ de
bataille culturel reste à investir, c’est là où se joueront les victoires durables
de demain. D’où une obligation : relire Gramsci.
Source : http://www.libertepolitique.com.
■
86 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
« À demain Gramsci »
par Gaël Brustier – Éditeur : Cerf (Le poing sur la table, 2015), 68 pages
5€
ID
ET SI L’ON DEVAIT VIVRE
SANS CROISSANCE ?
L
a croissance économique est devenue intermittente, fugitive. À l’image du climat,
elle alterne le chaud et le froid, les booms et les krachs. La crise du monde
occidental doit beaucoup plus qu’on n’est généralement prêt à l’admettre à sa disparition. Que font les hommes politiques ? Comme les sorciers qui veulent faire tomber la
pluie, ils lèvent les mains vers le ciel pour la faire venir, aiguisant le ressentiment des
peuples quand elle n’est pas au rendez-vous. Mais que deviendrait la société moderne si
la promesse d’une croissance perpétuelle s’avérait vaine ? Saurait-elle trouver d’autres
satisfactions ou tomberait-elle dans le désespoir et la violence ? Préfèrera-t-elle vivre audessus de ses moyens, tant écologiques que psychiques, plutôt que d’y renoncer ?
Telles sont les questions brûlantes posées par cet essai, qui nous entraine dans un
surprenant voyage au cœur des mécanismes qui ont fait advenir la société moderne, de
l’invention de la richesse à la révolution numérique.
Directeur du département d’économie de l’École normale supérieure, membre fondateur
de l’École d’économie de Paris, Daniel Cohen a publié de nombreux livres à succès dont
« Richesse du monde, pauvreté des nations » (Flammarion, 1997), « Nos temps modernes »
(Flammarion, 2001), « La Prospérité du vice » (Albin Michel, 2009) et « Homo economicus,
prophète (égaré) des temps nouveaux » (Albin Michel, 2012) qui lui a valu la même année
le Prix du livre d’économie.
« Le monde est clos et le désir infini »
■
par Daniel Cohen – Éditeur : Albin Michel
(Collection Essais Doc, août 2015), 220 pages
17,90 €
UN GÉNÉRAL S’ENGAGE DANS
L’ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
C
’est une nouvelle édition du livre de cet officier supérieur à la
retraite, ancien membre des forces spéciales, engagé désormais dans la politique. La France va très mal et elle désespère, constate le général Didier Tauzin. Mais quand s’expriment
ceux qui voudraient sortir de l’ornière et redonner un véritable avenir
à notre pays, c’est une misérable cacophonie. Ni cap, ni chef, ni
volonté ! Incapables de redresser la barre de la France en perdition,
les « professionnels de la politique » se chamaillent et nous conduisent
au gouffre. Enfermés dans leur logique partisane et carriériste, ils ne
comprennent pas et parfois combattent le réveil de la nation, de
plus en plus désireuse d’une réhabilitation des valeurs fondamentales
sur lesquelles elle s’est construite. Il s’en suit un divorce chaque jour
plus patent entre la nation et ses élus, et un climat social chaque
jour plus explosif.
« Rebâtir la France »
par le général Didier Tauzin – Mareuil Éditions (janvier 2015), 110 pages
■
10 €
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 87
Green
OCÉAN INDIEN
S’INSPIRER D’HAWAÏ POUR
DOPER L’ÉCONOMIE BLEUE
Dans cet État américain d’Océanie, archipel aux 137 îles, l’exploitation des fonds marins génère un chiffre d’affaires de
2,6 milliards d’euros dont seulement 57 millions pour la climatisation marine ou SWAC (Sea-Water Air Conditioning).
Un bon modèle pour l’océan Indien…
Par Youvraj Mangar - [email protected]
UNE MULTITUDE D’ACTIVITÉS
À FORTE VALEUR AJOUTÉE
En clair, le modèle économique consiste à profiter des lourds investissements nécessaires pour capter l’eau à 1 000 mètres et l’acheminer,
et d’en tirer de la valeur ajoutée à travers de multiples activités possibles : aquaculture, parapharmacie, aquarium, conditionnement de
l’eau en bouteille après osmose inverse, thalassothérapie, pisciculture… Sans parler du captage de gaz rares. Comme le montre le
modèle développé par Hawaï depuis trente-quatre ans, le « Downs-
90 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Stocklib/Stephen Goodwin
D
ans les activités liées à l’exploitation de l’eau de mer, il
y a l’« Upstream » et le « Downstream ». Le premier
consiste à puiser l’eau froide au fond de l’océan afin de
climatiser des bâtiments et de se passer ainsi des
énergies fossiles. Cette activité est connue comme le
Sea-Water Air Conditioning (SWAC), la climatisation marine, que
l’entreprise mauricienne Sotravic doit implanter à Port-Louis d’ici
2017 (voir notre article page 94). On parle aussi de la venue du
Japonais Hitachi Plant Technologies pour climatiser l’aéroport avec
le SWAC, mais le Board of Investment (BOI) se montre encore très
discret sur ce projet. Dans le nord de La Réunion, plus exactement
à Saint-Denis et Sainte-Marie, le Français Engie (ex-GDF Suez)
devait mettre en œuvre un projet ambitieux, évalué à plus de 150
millions euros, mais rien ne s’est encore passé (lire à ce sujet notre
article page 96). Dans le sud de La Réunion, un projet plus modeste,
conduit par EDF et visant à climatiser l’hôpital de Saint-Pierre, se
trouve au point mort lui aussi. Des développements qui pourraient
pourtant conduire au « Downstream » en permettant d’exploiter
l’eau puisée en grande profondeur plutôt que de la rejeter à la mer
après qu’elle a servi à climatiser.
Seul État américain situé en dehors du continent nord-américain, Hawaï est un
archipel constitué de 137 îles au milieu du Pacifique, en Océanie. Il ne compte
que 1,4 million d’habitants, ce qui lui permet de figurer en bonne place dans le
classement des 50 États américains relativement à leur PIB (Produit intérieur
brut) par habitant.
tream » peut générer un chiffre d’affaires impressionnant, sans commune mesure avec celui du SWAC. Dans cet État américain situé en
Océanie, en zone tropicale, et constitué de 137 îles, le NELHA
(Natural Energy Laboratory of Hawaii Authority), organisme parapublic, a vu le jour dès 1974 et a lancé en 1982 un réseau secondaire
de distribution afin d’optimiser l’exploitation de l’eau de mer. Grâce
aux installations de Makai Ocean Engineering, une entreprise américaine de référence dans le SWAC, le NELHA distribue en moyenne
113,6 millions de litres d’eau chaque jour pour la climatisation
marine et d’autres activités. L’organisme a jusqu’à présent octroyé
Green
Green
EXPERTS
UNANIMITÉ DES
IEL ÉNORME
de la
SUR UN POTENT ard (EMB), organisation européenne de la
le contrat de franchise de « Hawai Deep sea Water » à cinq
entreprises, dont la pionnière demeure Koyo USA Corporation. Cette
entreprise dessale l’eau puisée des grands fonds marins et la commercialise sous la marque « Mahalo ». Cette eau est vendue à 4,5
dollars la bouteille de 1,5 litre et à 2 dollars la bouteille de 50 cl.
Environ 800 000 bouteilles de cette eau, chargée de nutriments,
sont exportées quotidiennement vers les Etats-Unis, le Japon, la
Corée du Sud et la Chine.
L’OCÉAN INDIEN NE DOIT PAS RATER LE COCHE
Au total, une trentaine d’entreprises sont clientes du NELHA dans
différentes activités liées à l’exploitation de l’eau de grande profondeur
(voir la liste pages suivantes). Un chiffre d’affaires estimé à 3 milliards
de dollars (2,6 milliards d’euros) et dans lequel le SWAC ne pèse
que 65 millions de dollars (57 millions d’euros). Pour en arriver à ce
résultat, Greg Barbour, Executive Director du NELHA, explique que
la collaboration entre les secteurs public et privé est indispensable.
Afin d’encourager la recherche et l’innovation avec le développement
de nouvelles technologies, le NELHA opère en étroite collaboration
avec les laboratoires nationaux et les instituts de recherche comme
l’université d’Hawaï à Manoa, l’université d’Hawaï à Hilo et l’Hawaii
Community College. « Cela permet aussi d’éviter le phénomène
mondial de « mismatch », soit l’écart entre l’offre et la demande des
entreprises », souligne Greg Barbour.
Le modèle hawaïen est d’autant plus intéressant que l’archipel du
Pacifique présente des caractéristiques communes avec La Réunion,
Maurice, les Seychelles et même Rodrigues : un climat tropical, une
faible population et un vaste domaine maritime à exploiter. Greg
Barbour précise d’ailleurs que « le modèle développé par le NELHA
peut être dupliqué dans d’autres territoires tropicaux » et qu’il a été
approché par La Réunion, aussi bien que par le Japon, la Corée et
la Chine.
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Greg Barbour, Executive Director du NELHA (Natural Energy Laboratory of
Hawaii Authority) : « Notre modèle peut être dupliqué dans d’autres territoires
tropicaux et nous avons d’ailleurs été approchés par La Réunion. »
Il faut juste espérer que l’océan Indien ne rate pas cette opportunité
qui représente un véritable relais de croissance. Pour le moment,
alors que plusieurs projets de SWAC semblent en bonne voie, on
parle peu des activités annexes, ce fameux « Downstream » qui est
pourtant le plus rémunérateur. L’erreur serait d’attendre que les
projets de SWAC soient réalisés car un réseau secondaire de distribution de l’eau de mer doit se concevoir dès le départ.
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L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 91
Green
LES ENTREPRISES PRÉSENTES
À HAWAÏ DANS L’EXPLOITATION
DE L’EAU DE MER PROFONDE
Voici une présentation des clients du NELHA (Natural Energy Laboratory of Hawaii Authority). Autant de pistes pour l'océan
Indien où des projets de SWAC (Sea-Water Air Conditioning) - ou climatisation marine - doivent se réaliser dans les
prochaines années…
- Big Island Abalone Corporation : Ferme aquacole de 4 hectares en
utilisant l’eau de mer profonde pour produire un ormeau (coquillage)
qui est exporté au Japon.
- Blue Ocean Mariculture : Production d’alevins de Kampachi, poisson
réputé notamment pour les sushimis.
- Cellana : Développement de bioproduits à base d’algues. Exploitation
sur 2,4 hectares avec des photobioréacteurs couplés avec des
étangs ouverts.
- Kona Coast Shellfish LLC : Écloserie/nurserie. Production de
semences pour les huîtres du Pacifique, les palourdes japonaises
et les moules Gallo.
- Royal Hawaiian Sea Farms : Production de légumes de la mer
(plus de deux tonnes par semaine).
NELHA
- Pacific planktonics : Spécialisée dans la technologie de l’écloserie.
Production d’alevins.
Le « Hawaii Ocean Science and Technology Park » (HOST Park) représente un
investissement de 100 millions de dollars. Il accueille des activités innovantes et
à forte valeur ajoutée.
- Koyo USA Corporation : Franchisé par le NELHA depuis 2003,
dispose d’un espace de 12 hectares et produit de l’eau en bouteille
sous la marque Mahalo, exportée principalement au Japon.
- Cyanotech : Leader mondial dans la technologie de micro-algues.
Production d’astaxanthine naturelle et de spiruline. Cyanotech est
locataire du NEHA depuis plus de 25 ans.
- Toolcom Technology LLC : Conception de systèmes électroniques
sur mesure, de capteurs, de machines informatiques personnalisées
et dorsales des réseaux utilisés pour les communications spécialisées.
- Kona Cold Lobsters Ltd : Importation de homards et de crabes de
pêche de l’Atlantique, rajeunissement grâce à l’eau de grande
profondeur, puis commercialisation locale et à l’export en Asie.
- Hawaii Deep Marine Inc. : Développement de produits à base
d’eau de mer profonde, destinés à l’exportation. Eau de mer dessalée, sel, saumure, nigari…
- Shrimp Improvement Systems LLC : Production d’agents pathogènes
spécifiques (SPF) géniteurs de crevettes.
- Makai Ocean Engineering Inc. : Génie océanique, ingénierie pour
les énergies renouvelables, grands pipelines de l’océan, logiciels
pour la planification, la simulation, l’installation et la récupération
des câbles sous-marins. Makai travaille pour le NELHA depuis
1979. On lui doit la mise en place du SWAC à Hawaï.
- Destiny Deep Sea Water LLC : Production d’eau minérale potable à
partir de l’eau de mer de grande profondeur.
92 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Green
- Taylor Shellfish Farms Inc. : L’un des plus gros producteurs
américains de palourdes et d’huîtres a choisi Hawaï et l’eau de
grande profondeur fournie par le NELHA pour les premières
étapes d’élevage avant grossissement final à Washington.
- Hawai’i Natural Energy Institute : Développement au sein du HOST
(Hawaii Ocean Science and Technology Park) du NELHA d’une
machine à glace destinée aux missions d’aide humanitaire.
- Indo-Pacific Sea Farms Inc. : Développement de technologies innovantes pour la production commerciale durable des organismes
récifaux et le renforcement des coraux.
- Mera Pharmaceuticals Inc. : Développe la technologie de photobioréacteur de bord pour la culture industrielle des micro-algues
pour de nouveaux produits à base d’astaxanthine ou encore un
pigment naturel pour les crevettes et des aliments pour le saumon.
- The Marine Mammal Center : Développe un centre de soins et de
réadaptation pour le phoque moine d’Hawaï en collaboration
avec le Service national des pêches maritimes.
- University of Hawaii – Infrasound Laboratory : Réseau de capteurs
acoustiques pour surveiller la région du Pacifique et soutenir le
Traité international d’interdiction complète des essais nucléaires.
Amélioration des systèmes d’alerte anticipée existants pour Hawaï
et les régions avoisinantes.
- Moana Technologies LLC : Recherche & Développement pour le
compte de producteurs aquacoles de crevettes. Mise au point de
géniteurs de race supérieure et de nouvelles solutions nutritionnelles
et de santé.
- Troutlodge Marine Farms Kona LLC : Entreprise de Washington
qui exploite à Hawaï une ferme aquacole spécialisée dans la
morue noire.
- Forever Oceans Corporation : Propose la technologie, la biologie et
des services de soutien à destination de l’aquaculture en pleine
mer.
- Aquion Energy : Propose des batteries et systèmes de batteries
pour stockage de longue durée d’énergie stationnaire.
■
- Hawaii Kai Technologies : Production de sel, d’eau dessalée, de
saumure, de nigari et d’ingrédient destinés à la cosmétique et aux
soins personnels.
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supérieure.
- Ocean Rider Inc. : Première ferme hippocampe commerciale
dans le monde, a démarré en 1998 pour l’aquariophilie.
- West Hawaii Explorations Academy : École secondaire innovante.
- Kona Deep Corporation : Embouteillage d’eau de mer de
grande profondeur (près de 1 000 mètres).
NELHA
- Kampachi Farms LLC : Activité de mariculture visant la
production durable de meilleurs poissons.
- Dewpoint Systems : Développement de la prochaine génération
de Thermal Energy Agriculture (TEA), systèmes de production
pour l’alimentation et la sécurité de l’eau potable.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 93
Green
MAURICE
PORT-LOUIS CLIMATISÉ
À L’EAU DE MER
Après quatre années d’études, l’entreprise mauricienne Sotravic a signé un contrat de concession avec l’État mauricien
pour implanter, d’ici à fin 2017, le Sea Water Air Conditioning (SWAC) ou climatisation marine.
« Le climat difficile des affaires de ces dernières années, où les
contrats se gagnent avec de faibles marges, nous a poussés à
explorer de nouvelles pistes et c’est ainsi qu’a germé le projet
SWAC. » Emmanuel André, CEO de Sotravic, explique ainsi cette
nouvelle diversification d’un groupe qui, à partir de son cœur de
métier du génie civil, s’est également développé dans la chaîne de
l’eau - de l’extraction à la distribution -, puis dans l’assainissement
avec la collecte, le traitement et l’évacuation des déchets liquides et
solides, avant de surfer sur la vague des énergies renouvelables en
produisant de l’électricité à partir du biogaz. De quoi afficher une impressionnante croissance durant la dernière décennie. Aujourd’hui,
ce projet de climatisation marine à Port-Louis représente une nouvelle
étape importante pour le groupe de Pierre Ah-Sue qui a été élu Entrepreneur de l’année par L’Eco austral en 2011.
Avant de se lancer dans ce secteur, qui comprend peu d’acteurs à
l’échelle mondiale, Sotravic s’est d’ailleurs documenté auprès de
certains d’entre eux, se rendant sur le terrain. À Genève, par exemple,
où le site des Nations Unies est climatisé à partir de l’eau pompée à
308 mètres de profondeur dans le lac Léman, le plus grand lac alpin
d’Europe, où l’eau atteint jusqu’à 5°C.
LE MÊME ACTEUR QU’À HAWAÏ
Pour son projet de Port-Louis, le groupe mauricien a choisi l’Américain
Makai Ocean Engineering à qui l’on doit le développement de la climatisation marine à Hawaï (lire à ce sujet nos articles pages 90 à
93). Il a fallu élaborer un modèle économique convaincant avant
d’aboutir, en décembre 2015, à la signature d’une concession de
trente ans (renouvelable pour dix ans) avec l’État mauricien, le secrétariat du Commonwealth apportant son soutien. Le projet, baptisé
DOWA (Deep Ocean Water Applications), est porté par Urban
Cooling Ltd, une filiale créée par Sotravic. Il s’agit, dans un premier
temps, de réaliser un réseau de 5,5 kilomètres de long, au large de
Bain des Dames (près du port), pour capter l’eau de mer à 1 100
mètres de profondeur. L’objectif de cette partie « Upstream » du
projet demeure la production de 23 mégawatts froid et, à long
94 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
DR
Par Youvraj Mangar - [email protected]
Le projet prévoit, dans un premier temps, la construction d’un réseau de distribution de 5,5 kilomètres de long, au large de Bain des Dames (près du port), pour
capter l’eau de mer à 1 100 mètres de profondeur.
terme, de 44 mégawatts froid pour climatiser 65 bâtiments du centre-ville de Port-Louis dont le Caudan, situé sur le front de mer, des
banques et l’hôtel du gouvernement, entre autres. Dès cette année
suivra un réseau terrestre de distribution de l’eau froide, long de 4 kilomètres, en sus des raccordements des sites des abonnés. Il est
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Emmanuel André, CEO de Sotravic : « Le climat difficile des affaires de ces
dernières années, où les contrats se gagnent avec de faibles marges, nous a
poussés à explorer de nouvelles pistes et c’est ainsi qu’a germé le projet SWAC. »
DE GRANDS ESPOIRS AVEC LE « DOWNSTREAM »
Alors que l’étape « Upstream » consiste à pomper l’eau pour refroidir
les bâtiments, le « Downstream », comprend toutes les activités que
pourraient générer l’exploitation de l’eau de mer avant qu’elle ne soit
rejetée. « C’est un potentiel sur lequel devraient se pencher de
jeunes entrepreneurs créatifs, à la recherche de nouveaux relais de
croissance. »
À Genève, la conduite de retour (« Downstream ») est davantage exploitée pour l’arrosage des parcs et des jardins. Quant à la formule
hawaïenne, plus proche de celle de Maurice, elle comprend un
réseau secondaire de distribution, permettant d’optimiser l’exploitation
de l’eau de mer. Le Board of Investment est déjà en contact avec
des opérateurs dans les secteurs de la thalassothérapie, de l’aquaculture et de l’embouteillage. Mais pour l’heure, on s’en tient à
l’« Upstream », pour lequel Emmanuel André prévoit un retour sur investissement de dix à vingt ans. Une fourchette très large qui
pourrait se réduire avec l’exploitation du « Downstream ».
■
DR
prévu que le SWAC, en ligne avec les objectifs de la COP21, réduise
jusqu’à 90% le recours à l’énergie fossile pour la climatisation des
bâtiment concernés. Selon le Premier ministre mauricien, Anerood
Jugnauth, le projet devrait générer des économies annuelles de 175
millions de roupies (4,4 millions d’euros). Les travaux de réalisation
de cette première phase en offshore ainsi que les installations de
distribution terrestre devraient durer une année. L’objectif est de
terminer les études en 2016 et de réaliser les travaux en 2017 pour
une mise en service en fin d’année.
La première phase du projet représente un investissement de l’ordre
de 3 milliards de roupies (75 millions d’euros), financé par des investisseurs privés. Selon les estimations de Sotravic, les prêts auprès
des banques locales devraient eux-mêmes suffire à répondre aux
exigences financières du projet. Les banques et institutions de développement régionaux et internationaux, notamment la Banque
africaine de développement (BAD), l’Agence française de développement (AFD) et son bras financier la Proparco, la Société financière
internationale (SFI) de la Banque mondiale et la Banque européenne
d’investissement (BEI) de l’Union européenne ont également manifesté
leur intérêt.
Selon le CEO de Sotravic, le premier défi de ce projet n’est ni
technique ni financier. Mais il s’agit de combiner un cadre législatif et
une volonté politique permettant de favoriser le recours à une
énergie propre et la mise en œuvre d’un important chantier de génie
civil dans la capitale. Emmanuel André y voit aussi une dimension
culturelle et historique car les travaux devraient permettre d’exhumer
et de réhabiliter les pavés historiques de Port-Louis, situés au
dessous les rues asphaltées. « On a vu l’engouement de Porlwi by
Light. Il n’y a aucun doute que les Mauriciens ont envie de découvrir
et de vivre l’histoire de leur capitale. »
Paul Ah Sue, président fondateur du groupe Sotravic et Emmanuel André, CEO, entourés de l’équipe impliquée dans le projet.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 95
Green
RÉUNION
LES DEUX PROJETS DE SWAC
EN PANNE
Le gros projet conduit par Engie (ex-GDF Suez) dans le nord et le projet plus modeste initié par EDF pour l’hôpital de
Saint-Pierre se trouvent au point mort. En cause, leur manque de rentabilité dans une île où l’électricité est vendue à un
prix très inférieur à son coût de production.
« GDF Suez climatisera Saint-Denis à l'eau de mer. » C’était le titre
d’un article paru dans le quotidien économique « Les Echos » le 21
avril 2011. D’autres médias nationaux relayaient l’information à
l’époque et faisaient de La Réunion un modèle. Mais cinq ans plus
tard, le projet, estimé à plus de 150 millions d'euros, est toujours en
attente et l’on ne sait même pas si GDF Suez (devenu Engie) le
réalisera un jour. Le SIDEO (Syndicat intercommunal d’exploitation
des eaux océaniques), créé en 2010 par les communes de SaintDenis et de Sainte-Marie (aujourd’hui rejointes par la Région), avait
attribué en avril 2011 à la société ClymAbyss le marché de concession
de ce réseau d’eau glacée couplé à un système de production de
40 mégawatts froid. Les principaux actionnaires de ClymAbyss sont
Engie – qui conduit le projet – et la Caisse des Dépôts. Beaucoup
d’énergie et de temps ont été dépensés par Engie à convaincre
l’Union européenne de financer le projet à une hauteur inhabituelle
et à rechercher des clients (comme l’aéroport et des centres commerciaux). Le lancement des travaux a été plusieurs fois reporté,
mais, en 2015, on semblait enfin sur la bonne voie avec l’annonce
du premier coup de pioche pour septembre. Que s’est-il passé entretemps ? Il semble qu’Engie (qui ne veut pas s’exprimer sur le
sujet) n’ait pas trouvé suffisamment de clients pour rentabiliser, sans
parler d’autres contraintes. Le groupe français a adressé au SIDEO
un courrier où il fait état de difficultés d’ordre technique, juridique et
économique. « Nos services techniques sont en train d’étudier tout
cela, souligne Jacques Lowinsky, le président du SIDEO. Ce dernier
reconnaît que l’attributaire du marché semble être « devenu frileux »
et il n’écarte pas l’éventualité de d’un nouvel appel d’offres.
FRILOSITÉ AMBIANTE
Du côté de Saint-Pierre, le projet de climatisation marine proposé
par EDF pour l’hôpital ne semble pas mieux parti. Dans un courrier
adressé à la direction du CHU, l’électricien se montre lui aussi
frileux. Il faut dire que le modèle actuel, supervisé par la Commission
de régulation de l’énergie (CRE) permet à EDF de vendre son
électricité à un prix considéré comme inférieur de moitié à son coût
96 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Cette belle affiche remonte à 2012, mais le premier coup de pioche n’a toujours
pas été donné.
réel de production. Un système de péréquation nationale vise à
vendre l’électricité au même prix que dans l’Hexagone où elle coûte
beaucoup moins cher à produire grâce au nucléaire. En clair, chaque
Français contribue, à travers sa facture d’électricité, à cette égalité
de traitement de l’Outre-mer. À première vue, les Réunionnais ne
pourraient que s’en réjouir, sauf que le système empêche toute
forme de transition énergétique à l’échelle de La Réunion. Son effet
pervers est de favoriser le fioul et le charbon.
De plus, comme le projet conduit par Engie bénéficie d’importants
financements européens, il ne doit pas perturber le marché local de
la climatisation. Il était même prévu de le faire fonctionner à ISO coût
pendant cinq ans, les économies pour ses clients n’intervenant que
sur le long terme. Pas très réjouissant alors que le projet pouvait
conduire à des projets en parallèle d’exploitation de l’eau de mer
selon le modèle hawaïen (voir notre article pages 90 et 91). La
Réunion avait même pris contact avec le NELHA (Natural Energy Laboratory of Hawaii Authority) pour s’en inspirer.
■
Green
RÉUNION
LA SODEGIS FONDE SA RESTRUCTURATION
STRATÉGIQUE AUTOUR DES PROGRÈS
SOCIÉTAUX
Le plus modeste des bailleurs sociaux de La Réunion a fêté ses 25 ans avec la seule certification RSE (Responsabilité
sociétale de l’entreprise) dans son domaine d’activité et en inaugurant au Tampon un nouveau siège social de Haute
qualité environnementale (HQE).
Par Philippe Stéphant
Philippe Stéphant
« La Sodegis (Société de développement et de gestion immobilière
du sud - Ndlr) produit actuellement 450 logements par an et son
parc doublera d’importance, d’ici 2020, pour atteindre 6 000 logements sociaux en gestion », annonce son directeur général, Philippe
Aservadompoulé. À sa prise de fonction en 2010, l’organisme de
l’Étang-Salé produisait 100 logements à l’année et son administration
était dispersée entre plusieurs sites, comme autant de chapelles.
« Nous n’avions pas de procédure unifiée, mais nous avons entrepris
une démarche de certification ISO 9001, puis ISO 26000 », précise
Philippe Aservadompoulé. Pour un investissement de 6 millions
d’euros, accompagné par la Caisse des Dépôts, un de ses actionnaires
aux côtés de la Région Réunion et des collectivités du sud (Civis et
Casud), le nouveau siège social jouxte un ensemble de 75 logements
très sociaux qui ont été livrés le 25 novembre 2015 pour un coût de
12 millions d’euros. Une centrale photovoltaïque en toiture permettra
d’alimenter deux véhicules électriques de service et un parc de
vélos électriques pour certains trajets domicile-travail.
UN SAVOIR-FAIRE DANS LES HAUTS
Le nouveau siège de la Sodegis, au Tampon, de Haute qualité environnementale
(HQE), compte 2 800 mètres carrés de plancher.
La Sodegis a aussi créé la première université d’entreprise de La
Réunion, nommée « Plus », qui a vocation à assembler les intelligences
pour alimenter le projet de développement de la société. « Nous
avons appris à mieux produire et à repenser le logement social en
termes de relations humaines, explique Philippe Aservadompoulé.
« Plus » permet d’associer les cadres, les salariés, les administrateurs
et les locataires dans des sessions de travail avec des entreprises
partenaires, les collectivités et d’autres acteurs du champ de l’aménagement et du logement. » La certification ISO 26000 (en phase
avec la RSE) est aussi un atout stratégique pour le recrutement de
compétences. La Sodegis investit désormais de nouveaux territoires
en répondant à des appels d’offres des communes de l’ouest,
comme Saint-Leu, Trois-Bassins et Saint-Paul. « Nous avons développé
des savoir-faire propres à la construction dans les Hauts où l’on
procède par de petites opérations, en terrain difficile, commente
Philippe Aservadompoulé. Ces savoir-faire s’appliqueront aussi dans
les hauts de l’Ouest. » Avec l’université de La Réunion et grâce à
l’usage de la défiscalisation, la Sodegis produit des logements
dotés d’une isolation thermique particulière et équipés d’une cheminée
et d’inserts de chauffage au bois. Dans le sud, où les habitants
vivent statistiquement plus longtemps, la vision du logement social
des années 2030 incite à réfléchir à la re-cohabitation des familles et
au logement social des seniors en centre-ville.
98 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Green
En repositionnant son siège social au Tampon, où demeurent plus
de la moitié de ses 112 collaborateurs, la Sodegis contribue à réduire de 20% les kilomètres parcourus pour l’entreprise et pour les
trajets domicile-travail. La démarche RSE développe la communication
en interne et en externe, et les clients se rendant au siège bénéficient
d’une connexion wifi dans l’espace d’accueil. « La loi ALUR de fin
2015 impose la mise en place d’un guichet unique de demande de
logement social qui sera transmise en réseau à tous les bailleurs.
Cela va fluidifier la demande et c’est également un challenge car le
demandeur peut y faire figurer une commune et un bailleur de préférence. » La Sodegis a déjà effectué un changement de paradigme
afin d’accompagner ses clients dans le projet de vie auquel ils ont
droit. Ne considérant plus que le bailleur social a pour vocation
d’aider les personnes dans le besoin. « 70% des Réunionnais sont
éligibles au logement social mais seulement 30% à 40% en font la
demande, révèle Philippe Aservadompoulé. Nous devrons capter
une nouvelle clientèle en améliorant notre image, en répondant aux
attentes de personnes qui travaillent et qui souhaitent des moyens
de paiement et de demande en ligne. » En livrant son 3 000e
logement, la Sodegis a offert dans l’immeuble une trentaine de
pilons, symbole d’assemblage de tous les ingrédients d’une culture
société.
■
Philippe Stéphant
UNE NOUVELLE FRANGE DE CLIENTÈLE
Philippe Aservadompoulé, directeur général de la Sodegis : « Le pilon
symbolise l’assemblage des cultures métiers et de la culture société avec
tous ses ingrédients. »
SÉMINAIRE RÉGIONAL SUR LA GESTION
DES DÉCHETS EN MILIEU INSULAIRE
■
DR
L
es élus locaux de plusieurs villes de l’océan Indien se sont
réunis à Saint-Denis le 5 février pour partager leurs expériences
et faire des propositions. Étaient représentés Saint-Denis et La
Possession (pour La Réunion), Tananarive et Tamatave (pour Madagascar), Port-Louis et Beau Bassin-Rose Hill (pour Maurice) et Mutsamudu (pour l’Union des Comores). Il ressort des débats que
même si les processus de décentralisation ont officiellement confié
aux autorités locales les compétences liées à l’accès des populations
aux services de base, notamment la collecte et le traitement des déchets, les moyens juridiques, humains et financiers n’ont pas suivi.
Mais les villes sont actuellement en position d’innover pour mettre
en place des systèmes de gestion adaptés à leur réalité et qui vont
dans le sens de la croissance verte, plus rentable économiquement,
mais également plus durable du point de vue environnemental. La
gestion des déchets est un secteur clé pour l’économie urbaine
puisque le système de traitement des déchets peut fournir jusqu’à
5% des emplois urbains, voire devenir une source de revenus par
leur valorisation (en fertilisant, en énergie et en recyclage notamment).
Sept villes de La Réunion, Madagascar, Maurice et les Comores ont participé
à ces échanges et mis en avant leur capacité d’innovation tout en réclamant
davantage de moyens.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 99
Green
RÉUNION
LE PDG D’EDF VIENT INAUGURER
UNE INSTALLATION PHOTOVOLTAÏQUE
INNOVANTE
Jean-Bernard Lévy, a inauguré le 2 février ce dispositif qui associe production et stockage d’électricité pour alimenter
en continu « La Nouvelle », principal hameau du cirque de Mafate. Une première mondiale…
L
e dispositif a été installé sur le toit de la cantine scolaire
de « La Nouvelle » dans ce cirque de La Réunion qui est
inaccessible en voiture. En associant des équipements
photovoltaïques et une technologie de batteries à hydrogène, il permettra aux habitants d’être alimentés en permanence en électricité en évitant l’usage du groupe électrogène et
de l’essence. Selon EDF, seuls deux bâtiments possèdent un système
de stockage à Hydrogène : une installation isolée dans les Alpes et
désormais l’école de « La Nouvelle ». « Mais c’est la première fois
que ce système bénéficiera à toute une communauté », a souligné
le Pdg d’EDF lors de l’inauguration. Lorsque le soleil rayonnera, les
panneaux photovoltaïques produiront l’énergie électrique et le
système de stockage conservera les éventuels surplus qui seront
utilisés pour alimenter les villageois la nuit et en cas de mauvais
temps. « C’est une solution pérenne, durable et de très bonne
qualité », s’est réjoui Jean-Bernard Lévy. Ce dernier a également fait
valoir que « La Réunion est désormais en mesure d’intégrer davantage
d’énergies renouvelables ». L’électricien a indiqué dans un communiqué
que le réseau électrique de l’île pouvait désormais supporter un pic
de 32% d’électricité d’origine éolienne et solaire, un taux sans
équivalent en France.
Guillaume Foulon
LA RÉUNION « TERRITOIRE D’EXCELLENCE
ET D’INNOVATION »
Jean-Bernard Lévy, Pdg d’EDF : « C’est la première fois qu’un tel système
bénéficie à toute une communauté. »
100 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Le développement des énergies renouvelables au fonctionnement
intermittent nécessite d’adapter les réseaux pour qu’ils puissent absorber des fortes fluctuations de la production de courant. « Cette
avancée est permise par les performances de la batterie EDF de
Saint-André », dans le nord-est de l’île, a assuré le groupe. Avec une
puissance d’un mégawatt (MW), elle est « l’un des plus gros
stockages d’énergie existant en Europe », a précisé EDF, ajoutant
préparer « l’implantation, avec des partenaires », d’un parc de
batteries d’une capacité totale de 5 MW.
Considérée par EDF comme « un territoire d’excellence et d’innovation », La Réunion est engagée dans une transition énergétique
depuis une dizaine d’années pour réduire sa dépendance aux
énergies fossiles. Les énergies renouvelables y représentent aujourd’hui
36% de la production électrique. Par ailleurs, Jean-Bernard Lévy a
indiqué que La Réunion ne serait pas concernée par les suppressions
de postes prévues par le groupe en France métropolitaine. « Ici, s’il
y a des départs à la retraite, ils seront remplacés », a-t-il dit.
■
Green
MADAGASCAR
VIMA S’INVESTIT DANS LE SOCIAL AVEC
LA FONDATION AMÉRICAINE ZARA AINA
DR
V
ision Madagascar (Vima), qui s’est toujours engagée
socialement en soutenant des événements et des associations comme l’Akamasoa du père Pedro et Mozarteum,
a décidé cette fois de lancer une véritable structure. Le
« Vima Center for kids » vise la réinsertion scolaire des
enfants démunis âgés de 10 à 14 ans en leur apportant une
assistance médicale et éducative. Dirigé par des personnels malgaches, le centre est doté de trois salles de classe pouvant accueillir
jusqu’à 45 enfants pendant trois ans, d’une salle de spectacle et
d’un service sanitaire. Des cours de théâtre avec l’équipe de la fondation américaine Zara Aina, dont ses cofondateurs Bryce Pinkham
et Lucas Caleb Rooney, deux acteurs du théâtre professionnel de
Broadway, sont aussi dispensés aux enfants ainsi que des cours
d’anglais et des séances d’art thérapeutique.
« Le partenariat avec Vima marque un jalon important dans la
mission de Zara Aina pour créer un centre autonome pour les
enfants de Tananarive. Le soutien de Vima est le reflet de son engagement dans l’amélioration du quotidien des enfants démunis de la
capitale », déclare Bryce Pinkham. La fondation Zara Aina (littéralement
« partager la vie ») est une ONG fondée en 2012 avec un siège
Entièrement financé par la société Vision Madagascar, le « Vima Center for kids »
ouvre ses portes aux enfants défavorisés de la capitale pour leur permettre d’exploiter leur potentiel.
■
social à New York. Elle propose un modèle d’apprentissage centré
sur l’utilisation de la narration et la représentation théâtrale pour permettre aux enfants à risque de reconnaître leur potentiel.
DEUXIÈME ÉDITION DU FESTIVAL
DES BALEINES DU 2 AU 10 JUILLET
Cetamada
A
près son lancement officiel lors du salon Top Résa à Paris en
septembre 2015, cette édition 2016 se déroulera durant la
période où les baleines à bosse viennent se reproduire au
large de l’île Sainte-Marie. Une initiative de l’association Cetamada,
partenaire scientifique et environnemental dans la préservation des
mammifères marins et de l’Office du Tourisme de Sainte-Marie
(OTSM). Ce festival unique en son genre renforce ainsi sa dimension
environnementale, culturelle et sociale qui se conjugue avec la sensibilisation aux enjeux de la protection de la biodiversité locale.
Concerts, foire-exposition, animations diverses (soirées, excursions
touristiques, carnaval…) et compétitions sportives viendront ponctuer
les dix jours de liesse. Séduit par l’ambiance qui règne à SainteMarie et par l’engagement de tous les acteurs dans la protection de
ces cétacés, Julien Lepers viendra en tant que parrain de cette
deuxième édition. Plusieurs partenaires européens, des organismes
internationaux et des entreprises privées se sont déjà rapprochés
Outre l’implication de la population de l’île de Sainte-Marie et la
promotion touristique, les baleines à bosses seront au cœur de toute les préoccupations durant le festival.
■
de Cetamada et de l’Office du tourisme de Sainte-Marie pour
s’impliquer dans l’événement. Au début des années 20, on dénombrait
225 000 baleines à bosses dans le monde. Aujourd’hui, il n’en reste
plus que 25 000.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 101
Green
MAURICE
DR
CERTIFICATION GREEN GLOBE
RENOUVELÉE POUR CONSTANCE HOTELS
Le Constance Ephelia Resort, dans l’île de Mahé, aux Seychelles, domine le parc national marin de Port Launay et jouit d’une situation unique, au cœur de 120 hectares
d’une végétation rare.
P
our la deuxième année consécutive, les hôtels du groupe
mauricien à Maurice, aux Seychelles et aux Maldives
confirment leur engagement dans la préservation de
l’environnement. Certifiés pour la première fois en 2014,
ils respectaient déjà 80% des critères applicables dépassant largement le minimum de 50% requis. Le groupe Constance
Hotels and Resorts est le premier groupe hôtelier mauricien à avoir
reçu la certification Green Globe. « Que nos hôtels aient reçu pour la
deuxième fois la certification Green Globe est une grande fierté,
souligne Jean Jacques Vallet, CEO du groupe. Chaque établissement
a apporté sa contribution à la gestion durable dans des écosystèmes
délicats. Cet accomplissement reflète l’apport et les actions collectives
de nos équipes, clients, fournisseurs et des communautés au sein
desquelles nous opérons. Nous nous efforçons constamment d’améliorer le niveau de nos opérations afin de justifier cette certification et
d’être en ligne avec la stratégie du groupe à l’égard de la gestion
durable. »
Tout en respectant les lois des pays où il opère, le groupe Constance
Hotels and Resorts vise également à accroître la durabilité de ses
opérations et à minimiser son impact sur l’environnement. Ainsi, les
établissements du groupe ont tous entrepris des actions en faveur
de la conservation de la biodiversité, de la préservation du patrimoine
culturel et du développement communautaire. Quelques exemples
102 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
notables sont les mesures de protection de nids de tortues de mer
aux Seychelles, les économies d’énergie remarquables réalisées à
Maurice et la politique d’achat responsable aux Maldives.
Le groupe Constance Hotels and Resorts possède et gère sept
hôtels de luxe, à Maurice, aux Seychelles, aux Maldives et à Madagascar. Du glamour luxueux à l’escapade à la Robinson Crusoé, il
tient à cultiver la personnalité de chaque établissement à travers une
architecture unique lui permettant de se fondre dans son environnement. À noter que le groupe gère également deux parcours de golf
18 trous à Maurice et l’unique golf 18 trous des Seychelles.
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Green
RÉUNION
NEXA ACCOMPAGNE TROIS ENTREPRISES
AU SOMMET MONDIAL DES ÉNERGIES
RENOUVELABLES
Philippe Stéphant
David Amiel a participé au sommet avec son entreprise DAK Industries qui produit
des chauffe-eau solaires sur mesure.
DR
L
e secteur des énergies renouvelables à La Réunion représente un potentiel attractif et en pleine croissance. En vue
de promouvoir les atouts et les facteurs clés de succès du
territoire sur les secteurs de l’environnement et de l’énergie,
l’agence régionale de développement, d’investissement
et d‘innovation, Nexa, a participé pour la troisième année consécutive
à l’événement annuel de référence au niveau international, le World
Future Energy Summit (WFES). Cet événement d’envergure s’est
tenu du 18 au 21 janvier à Abu Dhabi, abordant les thématiques des
énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et des technologies
vertes. Il faut savoir que le besoin de consommation énergétique
des pays du Golfe ne fait que croître et devrait doubler d’ici à 2020.
Ainsi, ces pays ont décidé de produire et d’intégrer 7% d’électricité
renouvelable dans leur mix énergétique.
Les entreprises réunionnaises ont été mises à l’honneur sur un
stand collectif sous la bannière Invest In Reunion afin de présenter
leur savoir-faire :
DAK INDUSTRIES : Avec près de vingt ans d’expérience au service
d’une clientèle de particuliers et d’entreprises, cette entreprise
produit des chauffe-eaux solaires sur mesure.
DAXIUM OI : Depuis 2005, elle fournit aux entreprises et aux organisations publiques une solution mobile paramétrable qui s’adapte
à leurs métiers.
GROUPE FAGES : Leader dans l’aménagement des espaces de vie
à La Réunion, il poursuit sa croissance en développant son cœur
de métier avec des partenaires internationaux, leaders dans leur
Le World Future Energy Summit (WFES) d’Abu Dhabi est un événement annuel de
référence au niveau international.
domaine. Le groupe Fages a présenté ses solutions écologiques
de toitures végétalisées.
Grâce au soutien financier de la Région Réunion et de l’Union européenne, Nexa s’est chargée d’organiser des rendez-vous B2B, de
fournir un stand aménagé collectif « Invest in Reunion » au cœur du
Pavillon France et de réaliser des outils de promotion.
ACCOMPAGNEM
■
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Nexa propose
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clés. Du 16 au
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20 octobre 2016
abes Unis).
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le dans le domaine
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des équipements
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l’environnement.
2 décembre 2016
Du 29 novembre
à Lyon (France)
au
.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 103
Green
MIEUX-ÊTRE
COMMENT ÊTRE ET NE PAS
SEULEMENT PARAÎTRE
Spécialiste du management vocationnel et ayant à son actif une longue expérience dans l’accompagnement des
managers et des équipes, Bernard Alvin livre une profonde réflexion sur une démarche encore trop négligée.
Par Bernard Alvin (*) - [email protected]
D
e temps à autre, je reçois des invitations pour participer
à des clubs d’entrepreneurs ou à des événements. La
proposition est souvent très ou trop ambitieuse. Par
exemple, au cours d’un dîner-débat, nous allons discuter,
entre la poire et le fromage, avec un intervenant extérieur
pour connaître les tendances lourdes du monde à venir ou encore
pour appréhender le type d’entreprise qui existera dans les générations
à venir. Précisons que les intervenants ne sont pas des mages ni
des futurologues mais bien souvent des personnes correspondant
aux standards en vogue dans les entreprises. Ils sont souvent des
consultants bien diplômés et ont écrit un ou plusieurs livres exprimant
leur conception du monde ou des entreprises. Dans ces réunions, la
technologie actuelle est souvent utilisée comme support pour ajouter
de la crédibilité à cette quête de modernité. Ainsi, au lieu de prendre
des notes sur un cahier, chaque participant est invité à écrire sur des
tablettes et à utiliser quelques applications intelligentes nouvellement
sorties.
Je me souviens d’avoir été convié à une soirée de réflexion d’un
certain club d’entrepreneurs où nous avions refait le monde en reprenant les titres du quotidien « Le Monde » de la veille pour en tirer
une lecture à travers laquelle chacun prenait une posture de
politologue ou d’intellectuel éclairé. Je me souviens aussi d’autres
clubs où les entrepreneurs étaient « blasés » d’avoir assisté à des
débats et des conférences sur tous les sujets à la mode. La plupart
du temps, les participants sont des managers qui sont plus confrontés
aux problématiques de vente à court terme, de négociations salariales
ou d’achats de fournitures pour leurs usines que de projection dans
un monde futuriste, de toute façon très difficile à appréhender vu la
vitesse de l’évolution de notre environnement. D’ailleurs, nous ne
quittons pas ces réunions avec l’impression d’avoir effectué de
grandes découvertes. Ces montagnes philosophiques accouchent
plutôt de souris réflexives !
104 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Stocklib/Georgios Kollidas
POURQUOI S’EN REMETTRE À DES GOUROUS ?
« Il y a 400 ans, William Shakespeare a théâtralisé et sans doute immortalisé
cette problématique dans sa célèbre tirade d’Hamlet : TO BE OR NOT TO BE, THAT
IS THE QUESTION. Force est de constater que 400 ans plus tard, nous n’avons pas
avancé d’un pas sur cette question !!! »
Green
LA QUÊTE DE RECONNAISSANCE
Je me suis souvent demandé pourquoi tant de personnes avaient
besoin de participer à ce type de réunion et quelles pouvaient être
leurs motivations premières. Il y en a une qui me vient facilement à
l’esprit, c’est le besoin de reconnaissance qui se manifeste plus
souvent par le PARAÎTRE (PAR-ÊTRE) que par l’ÊTRE. Toute personne
a besoin de reconnaissance, c’est un besoin vital et les personnes
les plus exposées sur le plan social ou sociétal en ont sans doute un
besoin encore plus élevé que la moyenne. Le besoin de reconnaissance signifie que nous sommes reconnus pour ce que nous
sommes, mais, in fine, s’il y a bien quelque chose de difficile à appréhender, c’est notre propre ÊTRE !!!
C’est bien souvent grâce à l’expérience de la vie et au développement
de notre personnalité que nous pouvons lever le voile sur notre
ÊTRE profond. Très souvent, on entend dire « je ferai telle ou telle
activité plus en phase avec moi-même lorsque je serai en retraite »
ou encore « j’accomplirai mon rêve lorsque mes enfants auront fini
leurs études et lorsque je n’aurai plus besoin de beaucoup travailler
pour faire face à mes charges ». Ainsi, on renvoie à demain notre
responsabilité de gérer notre être au quotidien. Alors, à défaut
d’ÊTRE et parce qu’on a tous besoin de reconnaissance, on puise
allègrement dans le réservoir du PAR-ÊTRE. L’ennui est que le fait
de se nourrir de PAR-ÊTRE crée des relations qui manquent singulièrement d’authenticité. Si nous sommes réunis dans un groupe de
travail ou de réflexion pour s’abreuver de PAR-ÊTRE, et ainsi faire
semblant d’ÊTRE, il est illusoire d’imaginer créer des relations
sincères, profondes et inspirées. Dans ces réunions où l’on refait
ainsi le monde le temps d’un repas, les « participants » sont particulièrement passifs. Il y a un acteur central qui est le consultant
visionnaire, pour ne pas dire le gourou de service ! Bien entendu, il
est fondamental que le gourou soit une sommité nationale, voire
mondiale, cela ajoute à la reconnaissance qu’on vient chercher.
LA CULTURE DE LA DÉFIANCE
Chacun sait que le mode pédagogique magistral ne permet pas de
retenir grand chose, on évoque souvent le chiffre de 5%. Et la
passivité est sans doute la pire des situations pour acquérir des
connaissances, ce n’est pas pour rien qu’on met souvent en avant
les méthodes pédagogiques dites actives pour réaliser des formations
plus efficaces !
Quand j’accompagne des managers, il n’est pas rare qu’ils me
disent que les seuls moments où ils peuvent vraiment être euxmêmes et dire ce qu’ils pensent ou exprimer ce qu’ils vivent, ce sont
précisément les moments d’entretien passés ensemble. Ce que les
personnes osent dire dans ces entretiens serait-il subversif ou dangereux ? Très souvent, je constate que les entreprises auraient
beaucoup à gagner à permettre à leurs managers et à l’ensemble
de leurs salariés de s’exprimer. Les écouter permettrait de remettre
en question des modes de fonctionnement qui peuvent être inutiles
et onéreux.
Récemment, je constatais lors d’un entretien avec un manager de
haut niveau qu’il y avait une boulimie de réunions dans son entreprise
et ce manager, bien que conscient de cela, continuait à jouer le jeu
en sautant de réunion en réunion. En invitant ce manager au
dialogue, il a fini par me dire qu’en fait, cette réunionnite masquait
une culture de la défiance assez généralisée dans les hautes sphères
de son entreprise.
Quand notre véhicule a une panne, nous acceptons facilement
l’idée de l’envoyer au garage pour le réparer. Pourquoi n’accepterions-nous pas tout aussi facilement de consulter des mécaniciens
de l’âme ou de l’esprit lorsqu’un individu ou un groupe d’individus
dysfonctionne ?
SOMMES-NOUS CONDAMNÉS À NE PAS ÊTRE ?
Cette problématique de l’ÊTRE est-elle une caractéristique de nos
sociétés modernes et postmodernes ou a-t-elle toujours été d’actualité
à travers les différents âges de l’homme sur terre ? En feuilletant les
manuels d’histoire, nous obtenons vite la réponse à la question : les
sociétés médiévale, romaine ou grecque ou bien d’autres encore ne
permettaient pas plus que les nôtres l’expression libre de chaque
ÊTRE ! Il y a 400 ans, William Shakespeare a théâtralisé et sans
doute immortalisé cette problématique dans sa célèbre tirade
d’Hamlet : TO BE OR NOT TO BE, THAT IS THE QUESTION. Force
est de constater que 400 ans plus tard, nous n’avons pas avancé
d’un pas sur cette question !!!
Quand il s’agissait de construire l’Europe, Jean MONNET prônait
la politique des petits pas, sans doute cette politique peut-elle
s’appliquer à tout ce qui est compliqué à atteindre et celle de l’ÊTRE
arrive en tête du palmarès de ces Himalaya difficiles à gravir ! C’est
donc en travaillant chaque jour sur ce sujet qu’on peut espérer
petit à petit gagner des PARTS D’ÊTRE pour abandonner celles du
PAR-ÊTRE.
■
(*) Bernard Alvin
Il est à la tête
de son propre
cabinet,
Bernard Alvin Co
nseil, fondé en 19
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spécialisé dans
l’accompagnem
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loppement des pote
ntiels. Bernard
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« coaché » ses
premiers cadres
et dirigeants dès 1991,
faisant figure de
pionnier
avant que n’arriv
e la mode du co
aching.
Cherchant à aller
plus loin, il fera ém
erger
le concept de « m
anagement vocatio
nnel »
à partir de 2005
. Il a pratiqué so
n métier
en France métro
politaine, dans le
s DOM-TOM et da
dans le monde,
ns plusieurs pays
dont le Brésil. Il
intervient en effe
anglais et en po
t en français, en
rtugais.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 105
Green
MIEUX-ÊTRE
COMMENT METTRE LA CHANCE
DE VOTRE CÔTÉ
Et si une grande partie de la solution était en nous ? Franziska Lombard répond à cette question en faisant appel à la
science de la « psychologie positive » qui permet de comprendre certains mécanismes.
Par Franziska Lombard (*) - [email protected]
L
a question revient régulièrement lors de mes séances de
coaching individuel avec des décideurs de l’océan Indien :
« Comment je peux faire, comment je peux être pour
avancer vers mes objectifs, pour pouvoir changer ce qu’il
faudrait changer ? » Mes clients savent la plupart du
temps ce qu’il faudrait faire, c’est étonnamment clair dans leur
esprit. Ce qui l’est beaucoup moins, c’est la façon de répondre à :
« COMMENT le faire ? » Comment faire pour mettre toutes les
chances de mon côté pour réussir, pour mettre toutes mes équipes
en mouvement, pour convaincre mes clients, mes fournisseurs,
mon banquier, mon actionnaire et surtout MOI-MÊME ?
« IL FAUT Y CROIRE » : PAS SI SIMPLE
Ça a l’air banal et pourtant ça ne l’est pas. Vous devez savoir ce que
vous voulez (et ce que vous ne voulez pas), avoir un objectif clair (à
court, moyen et long termes) pour pouvoir y mettre toute votre
énergie, vos moyens et vos croyances.
Ce qui nous inspire, nous allons l’aspirer. Ça n’a rien d’ésotérique.
Nous l’avons tous expérimenté lors d’un rendez-vous bien préparé,
cadré et dans lequel nous avons cru. Et de la même façon, à
l’inverse, quand nous croyons savoir d’avance que ça ne marchera
pas, nous nous sommes ramassés, scratchés (sans surprise)...
Il suffirait donc d’y croire, du style « think pink » et de pratiquer la
pensée positive des années 1970 pour réussir ? Non, la Psychologie
Positive n’est pas de « l’eau de rose » et y croire seulement ne suffit
pas. L’optimiste irréaliste dit : « De belles choses vont arriver ! »
(peut-être, peut-être pas…). L’optimiste réaliste dit : « Je vais faire en
sorte que de belles choses arrivent ! » Il s’agit d’actions, d’efforts,
d’implication, car les choses ne se font pas toutes seules, mais vous
avez le choix.
À VOUS D’APPRENDRE À ÊTRE CHANCEUX
La psychologie positive est « l’étude des conditions et processus qui
106 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
contribuent à l’épanouissement ou au fonctionnement optimal des
individus, des groupes et des institutions ». Cette science récente
suggère qu’en matière de « chance », nous pouvons apprendre à
être chanceux. Richard Wiseman dans son livre « The Luck Factor »
a mis, en étudiant plus de 400 personnes, la chance sous le
microscope scientifique et constate que les personnes chanceuses
créent des opportunités (ils sont confiants, courageux et osent), ils
se pensent chanceux (sont des optimistes réalistes), se sentent
chanceux (ils y croient) et ne s’en remettent pas au destin (qu’ils
prennent eux-mêmes en main). Et voilà une recette simple pour
mettre la chance aussi de votre côté.
Si vous voulez vous rapprocher un peu plus de vos rêves réalistes et
passer du subir vers l’agir, voilà un premier exercice à réaliser :
écrivez sur un défi particulier auquel vous avez été confronté et où
vous vous êtes senti coincé ou piégé. Après avoir décrit la situation,
identifiez et élaborez les choix que vous avez faits. Quels changements
vous pourriez apporter si vous choisissiez de penser ou d’agir différemment la prochaine fois ?
■
(*) FRANZISKA
LOMBARD
Cette exécutive
coach, certifiée
HEC
Paris, travaille
depuis vingt an
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MIEUX-ÊTRE
UNE MINUTE PAR JOUR
POUR CHANGER DE VIE
P
eut-on, en une minute, se sentir plus apaisé, plus joyeux, plus en forme,
renforcer notre système immunitaire, rajeunir nos cellules, voir plus clair
dans notre existence ? Oui, affirment des chercheurs en neurosciences :
méditer chaque jour contribue à un meilleur équilibre psychique et physique. À partir de leurs découvertes, Michel Pascal a développé une
nouvelle méthode fondée sur une pratique de 60 secondes chaque jour.
Il ne s’agit plus de suivre de fastidieux exercices, mais de mieux gérer nos
émotions dans nos situations les plus concrètes. En une seule minute, nous
pouvons voir plus clair dans notre vie professionnelle et sentimentale, puiser de
l’énergie entre deux rendez-vous, redécouvrir nos êtres chers et les joies les plus
simples, recycler le stress de nos collègues, perdre du poids...
UN BEAU SUCCÈS AUX ÉTATS-UNIS
Préfacé par le grand neuroscientifique américain, le Dr Mario Beauregard, ce
livre est un guide pratique, une invitation à vivre la plus grande aventure de notre
existence : retrouver en nous la paix et la joie. Après avoir publié plusieurs
ouvrages en spiritualité, et vécu dans un monastère en Himalaya, Michel Pascal
a créé cette méthode méditative qu’il enseigne à Hollywood et New York. Le
prestigieux Club Mercedes de New York lui a confié sa « Meditation Week ».
Google l’a choisi pour ses séminaires à destination des cadres de haut niveau
aux États-Unis. La Fondation Amity de Los Angeles, soutenue notamment par
Richard Branson, l’a choisi pour créer la première méthode méditative pour
les sans-abri de Los Angeles, adaptée à partir du livre. La fondation anglaise
Soberistas l’a sollicité pour une intervention auprès des personnes sujettes
aux addictions (drogue, alcool…). Et près de vingt mille « followers » se sont
inscrits pour suivre ses messages et s’initier à cette nouvelle
méthode : https://twitter.com/MichelMeditates.
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108 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Ouvrez ce livre et essayez la méthode ! Chaque entraînement ne vous prendra
réellement qu’une minute pour un bénéfice incontestable. Balland Editions
(octobre 2015), 168 pages, 15 euros.
Green
SANTÉ
L’INNOVATION DU DR ANDRÉ GERNEZ
DANS LA PRÉVENTION DU CANCER
DR
M
édecin de terrain tout autant que chercheur invétéré,
le Dr André Gernez, qui est décédé en janvier 2014,
n’a jamais été pleinement reconnu par l’establishment
scientifique, ni par les médias. Il est pourtant le père
de la théorie des cellules souches. Durant vingt ans
consacrés à un travail acharné, il vérifie que la révision du dogme,
admis à l’époque par tous, du double « cycle cellulaire » et la
construction du concept de cellules génératrices permet de résoudre
le problème du mécanisme de la cancérogenèse et de la cancérisation.
La différence entre les cellules souches et les cellules fonctionnelles
est aujourd’hui universellement admise et vérifiée. Depuis le début
du XXIe siècle, les cellules souches sont même devenues l’Eldorado
de la médecine. Grâce à elles, on va tout résoudre, mais en ignorant
la voie ouverte par le Docteur Gernez en matière de prévention
active des cancers. Ce dernier montre que la première cellule cancéreuse se divise dans l’année qui suit sa naissance, quatre fois
pour la majorité des cas. Cela veut dire que, à la fin de la première
année de son évolution, la masse est de 16 cellules, 256 à la fin de
la deuxième année et ainsi de suite.
Le Dr André Gernez propose de s’attaquer au cancer plus en amont. On devrait
dire plutôt à un « éventuel cancer » puisqu’il n’est pas encore décelable à ce
moment-là. Mais s’il existe, il est alors particulièrement vulnérable.
LA PRÉVENTION ARRIVE TROP TARD
Le cancer atteint une masse de 1 milliard de cellules (c’est-à-dire 1
gramme ou 1 cm de diamètre) vers la huitième année de son
évolution. Cette taille de 1 cm est la taille à partir de laquelle un
cancer est décelable. En dessous de cette taille, le diagnostic est
très difficile – même avec les moyens d’imagerie médicale actuels –
voire impossible. Pendant toutes ces années de début d’évolution, il
est ignoré et ne se traduit par aucun trouble ou par quelques signes
peu évocateurs. Les examens biologiques et d’imagerie médicale
classiques ne révèlent rien. Le porteur n’en est pas conscient et le
médecin ne peut le déceler.
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Quand il est décelé, donc décelable, le cancer a évolué, sans qu’on
n’ait rien fait pour le détruire, pendant une très longue période (huit
ans pour le cancer du sein, onze ans pour le cancer du poumon,
quinze ans pour les sarcomes, etc.). Beaucoup de temps perdu
quand on considère que plus le cancer est attaqué précocement,
plus grandes sont les chances de le détruire et plus cette destruction
est facile. Le Dr André Gernez propose donc de s’attaquer au
cancer plus en amont. On devrait dire plutôt à un « éventuel cancer »
puisqu’il n’est pas encore décelable à ce moment-là. Mais s’il existe,
il est alors particulièrement vulnérable. Le médecin a mis en place
un véritable protocole qui consiste en une cure annuelle de 20 à 30
jours où l’on revoit son alimentation tout en consommant certains
compléments – des vitamines en particulier – et certains médicaments,
naturels pour la plupart. S’il n’y a pas de cancer, le « curiste » ne
subira aucun dommage, bien au contraire puisqu’il revitalisera son
organisme et effacera son excès de poids.
■
Les résultats des recherches du Dr Gernez et ses protocoles anticancer sont disponibles sur le site de l’APAG (Association pour
André Gernez) : http://www.gernez.asso.fr.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 109
FEW
HAPPY
ÉVÉNEMENTS
MAURICE
L’Association des
Industriels fête
ses 20 ans
JMD
« Achetez Made in Moris ! » C’est l’appel
solennel lancé au Premier ministre Anerood Jugnauth par le président de l’AMM, Sylvan Oxenham
(au centre sur la photo en compagnie de Azim
Currimjee et Catherine Gris, Executive Development Officer) à l’occasion de cet anniversaire.
Pour ce faire, il a appelé au soutien des autorités
afin que les produits locaux aient plus de visibilité
tant à Maurice que sur les marchés émergents
ou traditionnels. Il a rappelé que l’industrie mauricienne pèse 16,6% du PIB (Produit intérieur
brut) de Maurice et se place ainsi devant le
secteur financier, le commerce et l’immobilier.
Birger édite un beau livre
sur son histoire
À l’occasion de ses 60 ans, Birger retrace son parcours
à travers un beau livre. On y découvre son ADN, entre
tradition et modernité, à travers ses grandes dates et ses personnalités majeures. Les auteurs ont choisi de mettre en
avant la mémoire écrite et archivistique, mais également les
mémoires individuelles et collectives au sein d’une entreprise
pionnière dans les prestations informatiques. L’ouvrage de
200 pages, en français, est illustré de nombreux clichés tant
anciens que récents. Il nous conte l’incroyable parcours de
l’entreprise familiale Blanche Birger depuis sa création en
1953 jusqu’à son expansion dans l’océan Indien et en Afrique
sous l’égide de son actuel CEO Jacques Harel. Cet ouvrage
est conçu en deux parties. La première retrace l’histoire de la
société depuis ses débuts jusqu’au tournant du XXIe siècle.
Quant à la seconde, elle se concentre sur le repositionnement
de Blanche Birger comme prestataire de solutions technologiques fiables, jusqu’à sa toute récente métamorphose qui
l’a conduite à adopter l’enseigne Birger.
112 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
FEW
HAPPY
HAPPY
FEW
Lancement du
Rugby World Club 10s
JMD
Maurice accueillera, les 18 et 19 juin, le Rugby
World Club 10s. Ce tournoi de rugby, qui se joue à 10,
mais avec les règles du jeu à 15, rassemblera huit
clubs de l’ovalie dont quelques unes des meilleures
formations du monde puisque les Sharks d’Afrique du
Sud et le RC Toulon ont déjà confirmé leur venue. Ce
tournoi, qui bénéficie du soutien de la MTPA (Mauritius
Tourism Promotion Authority), des sponsors Carinat
Sports Marketing, Air Mauritius et Beachcomber, devrait
bénéficier d’une importante couverture internationale
puisqu’il sera diffusé dans plus de 150 pays couvrant
300 millions de foyers.
De gauche à droite sur la photo : Jon Phelps de
Carinat Sports Marketing, Raj Deenanath d’Air Mauritius,
Jean Deysel du club sud-africain des Sharks, Arnaud
Martin, président de la MTPA, Carl Hayman, ancien
joueur du RC Toulon, Nicolas Staub, responsable des
ventes de Beachcomber et Kevin Venkiah, président
de la fédération mauricienne de rugby (RUM).
DR
L’Université
célèbre son
demi-siècle
d’existence
Pour marquer ces cinquante années,
un film et une exposition de photographies
retraçant son histoire ont été dévoilés lors
de la cérémonie officielle. C’était également
l’occasion du lancement de la deuxième
édition du livre de feu le professeur Hansraj
Mathur intitulé « Parliament in Mauritius ».
L’invité d’honneur de cet événement, le
professeur Geoffrey Boulton, ancien vicerecteur de l’université d’Edimbourg, en
Écosse, a retenu l’attention lors de sa présentation axée sur « Les défis modernes
pour les universités ». Les célébrations ont
également mis en avant les anciens étudiants de l’université devenus des personnalités importantes du pays comme la
« speaker » (présidente) de l’Assemblée
nationale Maya Hanoomanjee, l’ancien président de la République Cassam Uteem et
l’entrepreneur du secteur textile François
Woo.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 113
FEW
HAPPY
ÉVÉNEMENTS
LA RÉUNION
La Réunion au
salon de la
gastronomie
des Outre-mer
DR
Le département français a été représenté par l’IRT (Île de La Réunion tourisme) à
cette deuxième édition d’un salon créé par
Babette de Rozières, chef cuisinier et animatrice
de la télévision française, et qui s’est déroulé
du 12 au 15 février 2016 à Paris. De grands
noms de la cuisine créole ont pu intervenir
durant ces quatre jours d’exposition et la
cuisine réunionnaise a été mise en exergue
au cœur de ce salon qui accueille quelque
15 000 visiteurs. Conscient de l’importance
culturelle de la gastronomie réunionnaise, l’organisme de promotion touristique la considère
comme un atout majeur. Un stand dédié à La
Réunion a permis aux visiteurs de découvrir
des démonstrations de chefs réunionnais suivies de dégustations et de ventes de produits
« péi ».
DR
La cinquième
Barman Cup couronne
Anthony Henry
114 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Organisé par le CHR Journal, ce concours
de barmans s’est tenu du 25 au 29 janvier à l’Arena,
à Saint Gilles Les Bains, accueillant 35 participant
et offrant une formation aux débutants. C’est Anthony
Henry, bartender du PM Boucan qui s’envolera
pour Cognac afin d’y participer à la finale Europe
de la Sidecar by Merlet Cocktail Competition où il
défendra les couleurs et le savoir-faire réunionnais.
Pour cette 5e édition, le CHR Journal avait invité
trois pointures de la profession en la personne de
Germain Canto et Gregory Lecrocq, spécialistes
de la mixologie et de Marek Posluszny, quintuple
champion du monde de flair.
FEW
HAPPY
ÉVÉNEMENTS
MADAGASCAR
Le Lemur
Trophy pour
les 4x4,
Buggys, motos
et quads
APO
Le Lemur Trophy aura lieu du 29 octobre au 12 novembre 2016. Une compétition d’envergure qui mettra en scène
l’authenticité malgache avec un parcours
unique qui partira de Tananarive pour
rejoindre Tuléar en passant par Morondava et pour finir en apothéose sur l’Isalo,
considéré comme le plus beau site du
sud-ouest du pays. Pour Festiv, l’organisateur habitué à organiser des évènements d’envergure, l’idée première est
de réunir de 30 à 40 participants motivés
et de leur permettre de découvrir en
deux ou quatre roues une partie de Madagascar. Le Lemur Trophy permettra
aussi de distribuer des dons, vivres et
équipements à la population.
Un léger lifting
pour le Tana Hôtel
Eliana Ratsimandresy, directrice
de l’hôtel, explique que les rénovations
concernent la peinture et la moquette
des 31 chambres et suites. Ces transformations viennent à point nommé car
Madagascar accueillera cette année le
sommet de la Francophonie et celui du
marché commun de l’Afrique orientale
et australe (COMESA). Pour ces deux
évènements, près de 3 000 et 1 200
participants sont respectivement attendus
dans la capitale. Le 3 étoiles a également
mis en place un package business en
partenariat avec le loueur Budget. Cette
offre de 126 à 147 euros inclut la nuitée,
le petit-déjeuner et la mise à disposition
d’un véhicule pour une demi-journée
ou une journée entière.
116 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
FEW
HAPPY
ÉVÉNEMENTS
MONDE
BlueLife et
Cinna-Ligne
Roset ensemble
à Paris et à Genève
Joey Niclès Modeste
Dans le cadre du lancement des Riviera Oceanfront Villas de l’opération Azuri,
le promoteur mauricien BlueLife (groupe
GML) s’est associé à l’enseigne Cinna-Ligne
Roset qui collabore avec 70 créateurs du
monde entier. Pour l’occasion, deux soirées
ont eu lieu, la première le 24 novembre
dans la boutique parisienne Cinna et la seconde à La Nautique, l’incontournable club
nautique de Genève. Les villas Riviera, cosignées par Cinna-Ligne Roset, représentent
la volonté de BlueLife de travailler avec des
partenaires de choix aux marques réputées
et à l’essor international.
Notre photo, de gauche à droite : Arnaud
Lagesse, Chairman de BlueLife Ltd,
Christine Marot, CEO de BlueLife Ltd et
Joël Rault, ambassadeur de Maurice
à Paris.
Air France
La Première d’Air
France meilleure
première entre la
Chine et l’Europe
Cette distinction a été remise le 14 janvier
dans cadre des « Hurun Best of the Best Awards ».
Une cérémonie organisée à Shanghai par le
« Hurun Report », magazine mensuel dédié à l’industrie du luxe. Chaque année, l’événement récompense les marques proposant des services
de luxe. Ces prix sont décernés en fonction d’enquêtes de satisfaction menées par le « Hurun Report » auprès de centaines de chinois fortunés
invités à désigner leurs marques préférées. À
bord de la nouvelle cabine La Première, les
clients disposent d’une véritable suite « haute
couture », promettant une intimité totalement préservée.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 117
FEW
HAPPY
VINS
NOTRE SÉLECTION DU MOIS
Sauvignon blanc de Nouvelle-Zélande
Un blanc millésimé 2014, issu de cette région de Marlborough, en Nouvelle-Zélande, réputée pour son climat et ses sols favorables à la viniculture.
Mais le savoir-faire est là également. Ce vin, constitué à 100% à partir de
sauvignon, se présente dans une belle robe or pâle et dégage au nez des
arômes tropicaux. En bouche, on savoure du pamplemousse, de la goyave,
du fruit de la passion et même de la citronnelle. Avec une acidité vive et rafraîchissante.
Shiraz Rosé Bergsig
Assez répandu en Afrique du Sud, le cépage shiraz (la syrah en France)
donne en général du rouge. Mais on ne sera pas déçu par ce rosé
séduisant avec sa couleur de corail vif et ses arômes et saveurs de fraise
écrasée. Une texture toute ronde pour ce rosé sec sans excès qui, bien
frais, fera un excellent apéritif. Il sera aussi un complément idéal des
grillades au barbecue, sans oublier les pizzas et la volaille.
Sauvignon blanc ancient earth Bellingham
L’année 2012 est un grand millésime pour ce blanc de la célèbre maison
sud-africaine Bellingham, avec une longue période de maturation. Il se
présente dans une robe or pâle avec une pointe de vert vif, puis délivre des
arômes d’ananas, de poire et de fruits de la passion. L’entrée en bouche
est généreuse avec des saveurs de groseille et de figues mûres. Ce vin se
révèle très rafraîchissant et se boit assez jeune, à moins de 6 ans d’âge.
Idéal en apéritif, il pourra aussi accompagner des fruits mer, des rizottos et
certains plats de pâtes.
118 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
FEW
HAPPY
VINS
Chardonnay ancient earth Bellingham
Dans la même gamme « ancient earth » de la maison sudafricaine Bellingham, ce chardonnay se montre plus ample en
bouche que le sauvignon. Médaille de bronze en 2012 au
Veritas Wine Awards, ce millésime 2011 se présente dans une
robe en or scintillant. Il délivre des arômes d’orange et de
citron. Au palais s’ajoutent la mandarine, la pêche jaune et le
chêne vanillé. On peut l’apprécier tout de suite ou le laisser
encore mûrir trois ans, mais pas plus. Il s’appréciera avec des
plats à base de fruits de mer et de poisson ou encore avec des
volailles ou avec une tarte aux poireaux.
Saxenburg Private Collection Shiraz
Cette maison sud-africaine, dont l’origine remonte à 1693,
ne pratique pas la culture intensive et affiche un rendement
de 4 tonnes de raisins à l’hectare, avec des vignes âgées
en moyenne de 16 ans. Le vin vieillit en fût de chênes
pendant un an et, après mise en bouteille, il peut se
conserver avec bonheur encore dix ans. Ce vin de cépage,
100% shiraz (la syra en France) ne manque pas d’élégance
et délivre des saveurs et des notes de café et d’épices,
avec un bel équilibre entre les fruits rouges et les tanins.
Un grand vin qui a bien mûri et accompagnera idéalement
des plats de viande.
VINS DISPONIBLES À MAURICE DANS LES
BOUTIQUES LE CONNOISSEUR
- Mont Choisy Shopping
Promenade, Grand-Baie,
Tél. : 269 7362
- Palm Square Complex
Coastal Road, Black River,
Tél. : 483 6628
- La Maison du Gourmet
Moka business Centre, Mount Ory,
Moka, Tél. : 433 5652
- E.C Oxenham & CY. Ltd Head-Quarter
Autoroute St-Jean, Phoenix,
Tél. : 696 7950
- Garden Village Shopping Centre
21, Sir Winston Churchill St, Curepipe Tél. : 679 3240
Gran Lurton : un cabernet
sauvignon d’Argentine
François Lurton incarne la cinquième génération
de cette famille de viticulteurs qui produit ses
vins dans le Bordelais depuis 1897. En 1988, il
crée sa propre société avec son frère Jacques,
avant de reprendre seul la tête de l’entreprise.
Il est aujourd’hui propriétaire et producteur de
plusieurs vignobles uniques aux quatre coins
du monde : en Argentine, au Chili, en Espagne
et en France. Ce cabernet sauvignon d’Argentine
se présente dans une robe cerise avec des reflets violets. L’élevage en fûts de chêne lui
donne des arômes de tabac et de vanille qui
se mêlent subtilement aux notes fruitées.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 119
FEW
HAPPY
AUTOMOBILE
BMW SÉRIE 7 : SUPERLATIVE
« La voiture parfaite qui redéfinit les standards du luxe sur le marché ». Voici la définition que donne BMW de la
6ème génération de sa Série 7. Si le constructeur bavarois n’a pas peur des superlatifs, c’est qu’il a concentré dans
son vaisseau amiral l’ensemble de ses savoir-faire, avec l’objectif avoué d’en faire la nouvelle référence du marché
automobile.
À
première vue, pas de grande révolution esthétique pour
cette nouvelle Série 7. Elle reprend les codes stylistiques
inaugurés avec la Série 3, avec notamment les museaux
abaissés et les optiques étirés jusqu’à la calandre. Par
rapport à la précédente génération, aucune évolution
en termes de dimensions : 5,10 mètres de long pour la version
« courte », 5,24 mètres pour la limousine. Pourtant, elle s’est allégée
de 130 kg. Cela s’explique par le fait que la Série 7 soit le premier
véhicule de grande série à posséder une carrosserie renforcée de
carbone. En plus de ce gain de poids, l’utilisation de ce matériau sur
les éléments hauts permet d’abaisser le centre de gravité ainsi que
d’améliorer la rigidité du véhicule.
VOYAGE EN CLASSE AFFAIRES
Grâce notamment à des volets de calandre pilotés, ce mastodonte
des routes réussit également le tour de force de présenter un
coefficient de pénétration dans l’air plus faible que celui d’une
Toyota Prius. Ces éléments permettent à la Série 7 d’annoncer des
rejets de CO2 de 119 g/km pour sa version 730 d de 265 cv, du
jamais vu sur un véhicule de ce gabarit !
À bord, l’ambiance BMW est bien là, avec la planche de bord
tournée vers le conducteur. Si l’ensemble de l’instrumentation est
numérique et les commandes tactiles, la plus grosse innovation
reste le contrôle de l’interface multimédia par la gestuelle. Tourner
l’index pour le volume, balayer devant l’écran pour changer de
station, pointer un appel pour l’accepter : de quoi se prendre pour
Tom Cruise dans Minority Report !
PILOTAGE AUTOMATIQUE
Quant à la clé intelligente, elle affiche sur son écran tactile l’autonomie
du véhicule, l’état du verrouillage et permet de contrôler à distance
l’air conditionné. Mais plus impressionnant encore, elle permet de
faire avancer ou reculer le véhicule depuis l’extérieur : très pratique
pour se garer dans une place étroite sans avoir à se contorsionner
pour sortir de la voiture !
La nouvelle Série 7 est équipée d’un pilote automatique « prenant
120 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
Des matériaux haut de gamme issus de la Collection BMW Individual permettent
d’augmenter encore le côté luxueux de la BMW Série 7.
en charge les principales actions de conduite jusqu’à 210 km/h ».
Sur le papier, c’est une voiture quasi autonome. En pratique, on n’en
est pas loin. Plusieurs systèmes (régulateur de vitesse adaptatif
associé à un assistant de maintien dans la voie) fonctionnent de
concert pour contrôler les gaz, les freins, la direction et gérer les
aléas routiers comme le trafic, les piétons, etc. Outre le fait de
s’arrêter devant un obstacle ou de ralentir avec le trafic, la voiture
peut prendre une courbe toute seule pendant 20 secondes et peut
rouler seule dans un embouteillage ! BMW propose en option un
système de conduite prédictif qui analyse la route (signalisation,
relief, etc.) pour adapter les réglages des suspension et du moteur,
afin d’optimiser le confort et l’efficacité du véhicule.
Véritable concentré de technologies, la nouvelle BMW Série 7
propose en série des équipements que l’on pensait encore réservés
aux concept cars ou aux films de science-fiction. Des technologies
qui mettront plusieurs années à être proposées sur des véhicules
« grand public ». Pour être à l’avant-garde, rendez-vous chez Leal
Réunion, qui commercialise la BMW Série 7 à partir de 135 900 €.
Se prendre pour Tom Cruise, cela a un prix !
■
FEW
HAPPY
De la partie avant jusqu’à la poupe expressive, les lignes précises de la double nervure mettent en valeur la carrosserie élancée. Pour la première fois, le pan coupé dit de
Hofmeister est entièrement intégré au design des vitrages.
La Nouvelle BMW Série 7 offre une nouvelle innovation visionnaire : les projecteurs Laser BMW. Reconnaissables à leurs bandes horizontales bleues, ils offrent
au conducteur plus d’intensité lumineuse.
Imposantes et typées, les jantes en alliage léger 20” (51 cm) style 628 à rayons
en V séduisent par leur design. Les diffuseurs aérodynamiques latéraux « Air
Breather » chromés ajoutent une touche de raffinement supplémentaire.
L’Eco austral Nº306 - Mars 2016 - 121
FEW
HAPPY
HORLOGERIE
DR
UNE SEMAINE AVEC LA MONTRE
HAMILTON KHAKI FIELD AU POIGNET
À la fois élégant, original et très agréable à porter, ce modèle est disponible en boutique à 595 euros dans sa version bracelet canevas et à 645 euros dans sa version en
acier.
Par Pierre-François Duyck (*) - MagMontres.fr
F
ondée en 1892 à Lancaster, en Pennsylvanie (ÉtatsUnis), Hamilton est une marque de montres bien connue
des amateurs d’horlogerie, de belles montres automatiques
à prix abordables bénéficiant désormais du label Swiss
Made avec son arrivée à Bienne, capitale mondiale de
l’horlogerie. Nous vous proposons aujourd’hui de découvrir l’une
des plus belles nouveautés 2015 de la marque présentée à l’occasion
du salon Baselworld, une montre d’inspiration militaire, la Hamilton
Khaki Field Auto !
La Khaki Field reprend les codes des montres présentées par la
marque dans les années 1940, à l’époque où celle-ci fournissait
l’armée américaine. Durant cette période (Seconde guerre mondiale),
l’entreprise stoppe même sa production de montres pour les civils
pour se consacrer pleinement à l’approvisionnement des « Marines ».
Ce sont ainsi près d’un million de chronographes au total qui seront
distribués à des fins militaires.
Avec ce modèle Khaki Field Auto, Hamilton présente donc un
modèle rétro d’inspiration militaire que l’on retrouve dans les couleurs,
bien entendu, mais également dans le style avec ce bracelet canevas
gris vert (qui existe aussi en version acier). Robuste et élégant, ce
122 L’Eco austral Nº306 - Mars 2016
modèle de 40 mm de diamètre présente un cadran khaki avec
guichet de date à 3 heures et aiguilles avec revêtement blanc Superluminova.
Coté mouvement, la Hamilton Khaki Field Auto est équipée d’un
mouvement H-10 calibre automatique proposant une réserve de
marche de 80 heures avec mouvement visible via le fond saphir au
dos de la montre. Le bracelet en canevas gris vert est terminé par
une boucle ardillon particulièrement originale avec une reprise du
fameux « H » de Hamilton.
À la fois élégant, original et très agréable à porter, ce modèle est disponible en boutique à 595 euros dans sa version bracelet canevas
et à 645 euros dans sa version en acier.
(*) Pierre-François Duyck
Passionné par la belle horlogerie, Pierre-François Duyck est le co-fondateur du blog horloger MagMontres.fr. Un blog francophone entièrement
dédié à l’univers des montres de luxe où l’on peut trouver des tests de
montres, des interviews de personnalités, les dernières nouveautés
des marques suisses les plus prestigieuses...

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