soin de soi - Femme Majuscule

Transcription

soin de soi - Femme Majuscule
Prendre
soin de soi
Psycho
Une affaire
de famille
Ce qui se joue autour du choix
de la robe de mariée implique souvent bien plus
de monde que la fiancée elle-même…
PAR Véronique Guichard Photo Sophie Brändström / Picturetank pour Femme majuscule
T
am, tam, tatam tatam tatam… la marche nuptiale résonne, les colombes s’envolent, l’assistance frémit d’émotion… Vive les mariés ! Mais avant le grand jour et la fête, il a fallu dénicher la robe.
Point de mire de tous les regards, faite sur mesure ou achetée en
magasin spécialisé, elle a fait l’objet de repérages, essayages et retouches, qui ont mobilisé, outre la principale concernée, bien souvent aussi son entourage, mère, belle-mère, sœur ou meilleure amie… La choisir
n’est jamais un acte anodin car, si elle symbolise à elle seule le mariage, elle est
surtout et avant tout le reflet de celle qui la porte. « Il faut d’abord que la robe corresponde à sa propre identité », conseille Sandrine Dury, psychanalyste et psychothérapeute (1), ce que confirme l’ethnologue et sociologue M
­ artine Segalen (2) : « Elle
doit ressembler à celle qui la porte. »
La future mariée vient généralement choisir sa robe accompagnée. Et, le plus souvent, de sa mère. Même s’il y a conflit, cette dernière reste le repère qui « autorise »
à franchir ce cap, explique la psychanalyste : « La fille veut voir l’émotion dans les
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yeux de sa mère, quelles que soient les tensions qui ont pu
exister. Elle est toujours l’enfant qui a besoin du regard
maternel. » Néanmoins, d’une génération à l’autre,
on observe des différences. Les quarantenaires
viennent fréquemment seules, a constaté la styliste
Fanny Liautard (3), avec la volonté de « ne surtout
pas paraître déguisée, car à 40 ans on a dépassé les
conventions ». Les trentenaires, elles, sont accompagnées de leurs mères dans 90 % des cas : « Si cette
dernière n’est pas là au premier essayage, elle est présente au d­ euxième, fière de participer
au bonheur de sa fille », remarque Édith Bréhat, créatrice de robes de mariées (4).
Même si, parfois, les points de vue divergent : « Il n’est pas évident de concilier les
projets qu’ont faits la fille et la mère », constate Sandrine Dury. Quand Édith détecte
une mère « je-sais-tu-dois-car-c’est-moi-qui-t’ai-faite », elle s’interpose : « Je ne
fais que ce que veut la mariée. » D’ailleurs, preuve que les rapports ont évolué, quand
la mère a imposé son choix, souvent la fiancée revient dessus après réflexion s’il ne
lui convient pas. Si, « par peur de la mainmise de leur mère, certaines préfèrent ne la
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Prendre
soin de soi
faire venir qu’au dernier essayage », Édith observe toutefois que la plupart des
femmes portent un regard bienveillant sur le choix de leur fille. Ce que confirment nos témoins femmes majuscules : « Nous étions sur la même longueur d’onde.
C’était une évidence que nous soyons là, mère et fille », déclare Isabelle. « L’important
était que la robe corresponde au tempérament de ma fille, la mette en valeur et qu’elle soit
à l’aise toute la journée, confirme Marie-Béatrice, qui ajoute : Elle a souhaité porter un
voile qui vient de ma grand-mère, mais je ne le lui aurais pas imposé. » Car si les jeunes
femmes désirent une robe à leur image, elles peuvent être attachées à l’idée de la
continuité, et l’agrémenter d’un perlage ou de dentelle de famille. Édith en témoigne, elle a une fois transformé en sur-robe un voile brodé par une maman
pour le berceau de sa fille. « Ma création la plus émouvante, ajoute-t‑elle, a été de recouper une robe dans celle de la maman. »
Pour l’accompagner, Aude, elle, a choisi sa sœur. « Après vingt ans de vie commune et
un enfant de 10 ans, je ne désirais pas, à 47 ans, me marier en blanc. Surtout, je ne voulais pas
choisir avec ma mère ! J’avais peur de me laisser influencer, d’accepter quelque chose qui ne
m’aurait pas forcément convenu. Je n’avais pas envie de m’opposer, de m’imposer. » Mère,
L’enjeu
financier
Si, en 2015, les plus ou moins
jeunes mariés assument en
tout ou partie les frais de la
fête, Sandrine Dury voit le
paiement de la robe par les
parents comme le symbole de
leur acceptation : « Si l’aide
financière n’est pas proposée,
cela peut laisser un goût amer. »
Édith Bréhat constate que si
certaines clientes préfèrent
financer elles-mêmes la
création de leur robe pour
rester libres de leurs choix,
la mère offre souvent des
accessoires. « Nos clientes ont
en moyenne 32 ans et s’assument
financièrement. Mais la maman
offre toujours quelque chose »,
confirment Mary Kruger
et Marie Viloteau, créatrices
à Bordeaux (1), qui observent
que ces questions d’argent sont
le plus souvent réglées avec
délicatesse.
1. www.maryviloteau.com
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sœur, meilleure amie, belle-mère… L’important,
souligne Sandrine Dury, est « d’avoir à ses côtés
quelqu’un qui a une signification dans sa vie ».
Si les parents de la mariée sont séparés et de nouveau en couple peut se poser la question de la place
des nouveaux conjoints. Il arrive souvent que le remariage du père sonne pour les enfants le glas des
espoirs que leurs parents se remettent ensemble,
« d’où l’image de briseuse de ménage que porte la nouvelle épouse, remarque Marie-Luce
­Iovane-Chesneau, fondatrice du Club des marâtres, même si elle n’est pour rien dans
la rupture des parents ». Si les relations peuvent ainsi être compliquées entre la future mariée et la femme de son père, elles peuvent aussi être très affectueuses, ce
dont témoigne Julie, 33 ans : « Je trouvais normal et juste de convier ma mère et ma
belle-mère aux essayages. J’avais envie d’avoir autour de moi des femmes qui comptent dans
ma vie, et Ghislaine en fait partie. » Pas évident cependant pour les deux concernées
de participer ensemble. Si Ghislaine a été « très émue et touchée » que sa belle-fille la
fasse participer et trouve que « pour Julie et sa sœur, que leur ­maman et moi ayons des
relations normales est le plus beau cadeau qu’on pouvait leur faire » les choses ont été
moins évidentes pour Christiane, la mère, pas prête à rencontrer sa remplaçante
dans ces conditions. « J’ai participé à distance en suivant la robe dans son évo­lution par
téléphone et internet. J’ai fait le choix de participer à l’enterrement de vie de jeune fille et à
l’habillage le matin. Julie y tenait beaucoup. » Marie-Luce ­Iovane-Chesneau souligne
l’importance de la présence du père et invite ex et nouvelle femme au dialogue :
« Il faut admettre que son fils ou sa fille qui se marie a besoin de la présence de son père. »
Car, tout autant que la mère, le père « accompagne dans l’émotion, il donne la main
symboliquement et permet ce passage-là », explique Sandrine Dury. ✦
1. Auteure de Coaching jeune maman, éd. Mango. 2. Auteure d’Éloge du mariage, éd. Gallimard
Découvertes. 3. www.fannyliautard.com 4. www.edithbrehat.fr
« J’avais envie
d’avoir autour
de moi des
femmes qui
comptent
dans ma vie »
Julie, 33 ans
Après avoir rêvé devant Peau d’âne,
Les Demoiselles de Rochefort ou
Le Guépard, Édith Bréhat (ci-contre,
à genoux), intègre la forma­tion
de costumes de scène à l’École
de la Rue Blanche à Paris. Elle se
consacre aujourd’hui à l’univers
du mariage et conçoit des robes
sur mesure, qu’elle personnalise
en portant aux souhaits des
mariées la même attention qu’aux
désirs qu’exprimaient réalisateurs,
acteurs et danseurs dans son
activité passée.
Tous nos vœux de bonheur
à ­Sophie, venue essayer sa robe le
jour du reportage avec sa mère et
une amie, et qui nous a gentiment
autorisés à la photographier.
Flavie Flament
consacrera
son émission
On est fait pour
s’entendre au
choix de la robe
de mariée
le mercredi
3 juin
de 15 h à 16 h