(Un steward d\222Air France interdit de vol en raison de sa coiffure

Transcription

(Un steward d\222Air France interdit de vol en raison de sa coiffure
Un steward d’Air France interdit de vol en raison de sa coiffure | La-Croix.com
05/04/2012 12:51
Actualité > France
Un steward d’Air France interdit de vol en raison de sa coiffure
Aboubakar Traoré n’est pas autorisé à exercer son métier parce qu’il porte des petites tresses africaines.
(Capture d'écran du Soir 3, dimanche 1er avril)
La direction d’Air France estime en effet que cette coiffure n’est pas assez classique et ne correspond pas aux critères
esthétiques de la compagnie.
Les tresses africaines ne seraient-elles pas compatibles avec l’uniforme masculin d’Air France ? La compagnie aérienne a en tout cas refusé à
plusieurs reprises l’embarquement à l’un de ses stewards au motif que sa coiffure n’était pas conforme au règlement intérieur.
Aboubakar Traoré, embauché par Air France en 1998, porte depuis 2002 des petites tresses serrées sur le crâne, jusqu’au bord supérieur de la
chemise, comme le stipule le manuel des règles de port de l’uniforme. Malgré tout, sa hiérarchie considère que sa coiffure n’est pas assez
« classique ».
Selon le manuel d’Air France, « les cheveux doivent être coiffés de façon extrêmement nette. Classique et limitée en volume, la coiffure doit garder un
aspect naturel. Longueur limitée dans la nuque » et « Mèche limitée à mi-front ».
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Un-steward-d-Air-France-interdit-de-vol-en-ra...
1 sur 4
Un steward d’Air France interdit de vol en raison de sa coiffure | La-Croix.com
À partir de 2004, Aboubakar Traoré fait régulièrement l’objet de remarques de la part de certains instructeurs. Dans
les premiers temps, il est « aidé » par un supérieur hiérarchique, mais très vite la situation se dégrade et il est
victime d’une dépression. En arrêt maladie pendant un an, il reprend son activité en mars 2007, dans le cadre d’un
mi-temps thérapeutique. Il décide alors de camoufler ses tresses sous une perruque aux cheveux lisses pour
pouvoir exercer son métier.
« Je trouvais cela abominable, mais c’était la seule façon de correspondre à leurs codes » confie-t-il à La Croix .
« Je me sentais ridicule, humilié, à chaque fois que je la portais, c’était une blessure ».
Un jour de septembre 2007, la perruque se déchire. Il se présente à l’embarquement avec ses cheveux tressés,
attachés en chignon au niveau de la nuque, mais sa hiérarchie refuse de le laisser monter à bord. Par la suite, le
steward proposera d’autres modèles de coiffure, mais ses tentatives de conciliation échoueront à chaque fois. La
direction d’Air France se contentera de lui suggérer un emploi au sol (sans proposition concrète) ou de se couper
les cheveux.
05/04/2012 12:51
Avec cet article
Air France va ouvrir des
négociations sociales à hauts
risques
Retour à la normale dans les
aéroports parisiens
Dernier jour de grève dans les
aéroports avant une réunion au
ministère des transports
La compagnie Air France est
dans un trou d’air
Pour Aboubakar Traoré, d’origine ivoirienne, les « locks » (tresses) ne sont pas qu’une coiffure. Elles représentent « l’histoire d’un combat identitaire,
une affirmation de soi». «C’est important de savoir d’où l’on vient », dit-il lors d'un reportage diffusé sur France O ( voir aussi le reportage le France
3). Ce père de famille de 38 ans s’accroche et veut faire valoir son droit à la différence. D’autant qu’il sait que la compagnie tolère certaines
exceptions au règlement comme les cheveux teints, gominés ou partiellement rasés en cas de calvitie.
En septembre 2009, il décide donc de saisir la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde). Dix-huit mois plus tard, en
mars 2011, l’institution souligne que sa « coiffure est extrêmement nette et soignée » et qu’elle « ne présente aucun caractère d’excentricité ».
S’agissant de son volume, la Halde relève que celui-ci « ne peut être reproché dès lors que la compagnie accepte (…) que M. Traoré effectue ses
vols avec une perruque (…) dont le volume est de fait équivalent voire plus important que celui de son chignon. »
LE MANUEL D’AIR FRANCE NE « SEMBLE PAS PRENDRE EN COMPTE LA DIVERSITÉ » DU PERSONNEL
En réalité, ajoute la Haute Autorité, « il apparaît que le véritable motif de la différence de traitement dont fait l’objet M. Traoré découle de
l’interprétation faite par la compagnie de l’adjectif « classique » pour définir une coiffure autorisée. Or, cette condition est susceptible d’interprétations
diverses et reste une notion imprécise et subjective. »
La Halde rappelle en outre qu’il « n’y a jamais eu de réactions défavorables de la part des clients » et qu’« aucun élément ne démontre que la coiffure
(nattes ou chignon) » [d’Aboubakar Traoré] serait susceptible de nuire à l’image de marque de l’entreprise. »
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Un-steward-d-Air-France-interdit-de-vol-en-ra...
2 sur 4
Un steward d’Air France interdit de vol en raison de sa coiffure | La-Croix.com
05/04/2012 12:51
S’appuyant sur les photos du manuel d’Air France, la Halde va même plus loin et constate qu’il ne « semble pas prendre en compte la diversité » des
salariés. Elle recommande à la compagnie de « réexaminer les normes de présentation imposées aux personnels ». Et demande à la direction de « se
rapprocher de M. Traoré afin de trouver une solution conforme au principe de non-discrimination à raison de l’apparence physique. »
« Les codes vestimentaires et esthétiques d’Air France paraissaient très datés, reconnaît Richard Senghor, secrétaire général du Défenseur des
droits, l’institution qui a remplacé la Halde en mars 2011. Ils renvoyaient à l’image type du personnel de la Pan American des années 1960. Et ne
correspondaient pas à l’image de la compagnie aujourd’hui où le personnel est de différentes origines. »
Six mois après les recommandations de la Halde, Air France a quelque peu assoupli ses critères de présentation « afin de tenir compte des codes
esthétiques actuels ». Mais, cela ne permet toujours pas à Aboubakar Traoré de porter ses tresses. « Ils ont simplement remplacé 'coiffure classique'
par 'homogène' et ajouté une photo d’une personne à la peau noire et une autre d’une personne asiatique, indique le steward. »
« LA COMPAGNIE AUTORISE LES PERSONNES AUX CHEVEUX CRÉPUS À SE LES DÉFRISER ! »
Mardi 3 avril, Aboubakar Traoré a passé un entretien préalable à une sanction disciplinaire. Un entretien qui, une fois de plus, n’a pas abouti à une
solution. « C’était un dialogue de sourds, ils sont restés figés sur leurs positions considérant que ma coiffure ne correspondait toujours pas à leurs
normes, bien que je me sois à nouveau coupé les cheveux», raconte-t-il.
Aujourd’hui la direction d’Air France estime même qu’elle ne présente pas un aspect naturel ! Une observation qui stupéfie le steward : « Je ne
comprends pas ce que cela veut dire, il n’y a rien de plus naturel, explique-t-il en faisant remarquer que la compagnie autorise les personnes aux
cheveux crépus à se les défriser ! »
Dépité par tant d’incompréhension, Aboubakar Traoré attend désormais la notification quant à une éventuelle sanction. Il se sent aujourd’hui un peu
seul après un changement de ton de la part du Défenseur des droits qui lui demande à présent de se « rapprocher de sa hiérarchie afin de se
conformer au nouveau règlement. »
Son avocat a déposé une requête auprès du tribunal des prud’hommes de Bobigny pour atteinte à la dignité et discrimination. Une conciliation avec
Air France est prévue le 7 mai. Mais après l’entretien de mardi, Aboubakar Traoré a « très peu d’espoirs. »
Paula Pinto Gomes
Air France va ouvrir des négociations sociales à hauts risques
Retour à la normale dans les aéroports parisiens
Dernier jour de grève dans les aéroports avant une réunion au ministère des transports
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/France/Un-steward-d-Air-France-interdit-de-vol-en-ra...
3 sur 4