Entrée en matière

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Entrée en matière
Entrée en matière
Philippe Cognée - Roland Cognet - Stéphane Couturier
Daniel Dezeuze - François Dufrêne - Olafur Eliasson
Denis Laget - Eric Provenchère - Anne-Marie Rognon
Exposition des œuvres de la collection du FRAC Auvergne
AU LYCÉE RENÉ DESCARTES - COURNON
Du 1er mars au 29 avril 2016
L’enseignement d’exploration Arts Visuels est à l’origine de l’exposition Entrée en matière.
Le contenu de cet enseignement est fondé sur une situation de référence : le partenariat avec le FRAC
Auvergne.
Sur cette base, un projet collectif est proposé : la mise en œuvre d’une exposition d’art contemporain dans
l’enceinte du lycée à partir d’une thématique qui se renouvelle annuellement : la matérialité.
Cette thématique se décline en 3 questions :
De la matière première à la matérialité de l’œuvre :
- l’œuvre est une conséquence de la transformation de la matière ;
Les propriétés physiques de la matière et la technique :
- ces propriétés sont une contrainte qui conditionne la pratique.
- Le choix des outils et des techniques permet de tirer parti de ces propriétés ;
L’expérience de la matérialité :
- explorer, expérimenter la matérialité ;
- questionner les interactions entre une production et son environnement (physique, géographique, politique, social, humain, …) ;
- questionner les représentations du matériau (symboliques, poétiques, technologiques, politiques, …) ;
- questionner le face à face avec l’œuvre (échelle, mesure, volume, apparition, exposition, immersion, …).
Ce projet permet à l’élève d’identifier des catégories d’activité et de métiers propres à cette situation. Il
détermine les pratiques plastiques et culturelles centrées sur ces trois questions, dans lesquelles les élèves
trouvent un enrichissement artistique.
Philippe COGNÉE
Né en France en 1957
Vit en France
Cervelle, 1995, encaustique sur toile tendue sur bois
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Depuis plus de 10 ans, Philippe Cognée tente de
peindre les sujets les plus banals qui soient. Son
questionnement est simple : un peintre peut-il tout
peindre (un château de sable, une chaise de jardin,
un immeuble, une cabane de chantier…) et que
devient un sujet très banal lorsqu’il devient une
peinture ? Que se passe-t-il lorsqu’on transfère une
chose triviale sur une toile ? Cette chose prendt-elle une symbolique particulière ou une force
singulière, du simple fait de devenir l’objet du regard
des spectateurs ?
C’est à cette série de questions que Philippe
Cognée tente de répondre. Il utilise un procédé
identique pour toutes ses œuvres. Le point de
départ est une photographie, que Philippe Cognée
reproduit sur une toile en utilisant de l’encaustique
(cire d’abeille mélangée à des pigments de couleurs).
Cette technique nécessite de travailler à chaud, tant
que la cire est liquide. Une fois la matière refroidie,
Philippe Cognée dispose un film en plastique sur la
totalité de la surface de l’œuvre puis, à l’aide d’un fer
à repasser, il chauffe à nouveau la cire. Les couleurs
se liquéfient, se mélangent d’elles-mêmes puis
refroidissent. Philippe Cognée arrache alors le film
en plastique, ce qui crée toutes les aspérités visibles
à la surface de l’œuvre. Dès lors, le sujet, aussi banal
soit-il, se trouve mis à distance derrière la surface
poreuse de l’œuvre, derrière le pelliculage glacé
amené par l’encaustique, derrière la liquéfaction de
la géométrie des formes.
Cervelle appartient à une grande série de peintures
de petits formats dans laquelle Philippe Cognée
a choisi de représenter des parties organiques
(cœurs, cervelles, abats). Ici se pose la question de
connaître la relation entre un sujet et les qualités
esthétiques qu’il génère. Le réalisateur David Lynch,
à qui l’on doit des films comme Elephant Man, Lost
Highway ou Mulholland Drive, explique que les choses
les plus dérangeantes, les plus repoussantes peuvent
devenir, lorsqu’elles sont vues en détail rapproché,
de très belles représentations, esthétiquement
très fortes. C’est ce qui arrive ici avec Cervelle :
sa vue rapprochées et l’utilisation de la technique
de l’encaustique permettent de transformer son
aspect froid et peut-être morbide en œuvre dotée
d’une indéniable douceur et d’un fort pouvoir de
séduction.
Roland COGNET
Né en France en 1957
Vit en France
Arbre strié, 2002, acacia et ciment
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Roland Cognet inscrit son œuvre dans une réflexion
dont les enjeux côtoient les réalisations d’autres
sculpteurs tout autant attachés aux qualités sensibles
des matériaux et à une poétique de la matière. Si «au
début des années 1980, l’artiste formule un enjeu,
catalyser dans un même corps sculptural les quatre
essences fondamentales : le minéral, le végétal,
l’animal et l’humain»1, cet enjeu demeure depuis
plus de vingt ans le fil conducteur de ses créations
qui, passant indifféremment du registre abstrait à
la figuration la plus directe, bâtissent une œuvre
d’une grande sensibilité. «Chaque pièce, chaque
série innove dans sa méthode de travail, associant
s’il le faut des modelages de matières indurées
: ciment, plâtre, résine. La sculpture s’affirme
alors posturale, fortifiant l’espace intérieur, se
mesurant au paysage, indexant ses valeurs ou le
glorifiant. Et si la chose est périssable comme le
bois, l’artiste s’adresse à elle par le verbe du geste
: caparaçonner, protéger, mouler, soutenir, peindre,
prolonger, creuser, soigner, et cautériser même.»2
à la juxtaposition de deux matériaux mais cettefois
en adoptant l’idée de la greffe d’une forme
contre une autre. Ici, le matériau initial est
toujours un tronc sectionné mais il est prolongé
par l’ajout d’un élément sculpté en ciment brut
ajusté à la section du bois. Le bois, préalablement,
a été travaillé par l’artiste : les scarifications et
les striures reprennent les nervures du bois, et
il s’agit ici de renforcer les propriétés visuelles et
tactiles intrinsèques au matériau initial. La forme en
ciment joue sur un registre semblable. Réalisée
avec les doigts, modelée comme on travaille une
pâte, ses bosselures rendent compte du processus
d’élaboration. L’appendice de ciment apparaît
comme un prolongement simultanément naturel et
artificiel du tronc d’arbre. Il en constitue à la fois le
bourgeon, émanation organique et saisonnière, et
la greffe pétrifiée. Simultanément, ce rajout est un
retour au sol. Sa forme incurvée fait raccord entre
le bois coupé et scarifié et le sol, évoquant ainsi
son enracinement originel.
Arbre strié est la troisième œuvre de Roland
Cognet acquise par le FRAC Auvergne. Si les
deux premières sculptures, datées de 1992,
obéissaient à un principe de recouvrement d’une
forme naturelle –un tronc d’arbre – par une
peau d’acier, l’œuvre de 2002 continue à recourir
1- Frédéric Bouglé, «Sculpture possible, et manège d’ateliers», Roland Cognet, Le Creux de l’enfer, 2011, p.7.
2- Ibid., p.8.
Stéphane COUTURIER
Né en France en 1957
Vit en France
Usine Gévelot à Issy-les-Moulineaux, 1995, cibachrome sous diasec
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Usine
Gévelot-Issy-les-Moulineaux
est
une
photographie qui cadre une fenêtre aux carreaux
cassés, trahissant par ces trouées des éléments
d’un paysage urbain. Les découpages sont autant de
tâches de couleur que de fragments de maison ou
de jardin. La construction rigide et structurée du
cadre et de son quadrillage renforce la ponctuation
chromatique et flottante de ces éléments issus de
l’extérieur de l’usine.
Les photographies de Stéphane Couturier écrasent
et juxtaposent les plans, annulent toute profondeur
de champs et de perspective. Pourtant dans cette
photographie tirée de la série Les archéologies
urbaines, l’artiste informe et documente tant par le
titre que par la précision de ses cadrages et de ses
prises de vue. Mais ce qu’il y a de fondamental dans
les photographies de Stéphane Couturier c’est
cette façon qu’il a de déhiérarchiser les éléments de
la photographie. Il n’y a plus de premier et d’arrière
plan, ni de sujet principal. Cela renforce l’idée que
les chantiers, les usines abandonnées sont en
mutation, en changement, prêts à être détruit ou
reconstruit. Mais le photographe s’attache surtout
à souligner l’idée de mutation profonde dans un
contexte social, économique et historique.
Il redéfinit ce que l’on voit et le rôle de la
photographie dans son intention de montrer, de
cadrer, de témoigner, de définir un espace et un
temps. Il interroge également les statuts de l’image
et revisite la notion de perspective.
Daniel DEZEUZE
Né en France en 1942
Vit en France
Sans titre (Objets de cueillette), 1993, technique mixte
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Les objets fabriqués par Daniel Dezeuze
s’apparentent davantage à des bricolages modestes
ou à des attributs de chaman qu’à des sculptures.
Leurs matériaux les rapprochent des assemblages
hétéroclites qui pourraient joncher le sol autour
de la cabane d’un excentrique, mi-clochard, mirebouteux. Ils sont construits à partir d’éléments
de récupération aussi banals et a priori dépourvus
d’intérêt qu’un vieux sac en cuir, un portesavon,
un arrosoir en plastique…
Les différentes parties tiennent ensemble grâce
àdes morceaux de scotch, des lanières de cuir, des
cordes. Nous sommes donc là bien loin d’une
certaine idée de la sculpture triomphante moulée
dans le bronze ou taillée dans le marbre. Plutôt
que de fonte ou de taille, il s’agit d’assemblages de
petites choses sans importance qui prennent peu de
place et tiennent plus ou moins bien ensemble.
Malgré leur apparence misérable, ils restent des
sculptures. Le bambou qui leur sert généralement
de pied tient lieu de socle. Le changement induit
est considérable : la sculpture ne se donne plus à
voir comme un objet massif lourdement posé sur
le sol mais comme une ligne verticale. De ce simple
fait, ces pièces entretiennent un rapport étroit avec
un corps debout.
Cependant, leur taille – plus de deux mètres – fait
qu’elles nous dominent. Longues silhouettes, elles
sont presque réduites à des graphismes dans l’espace.
En effet, leurs lignes sont plus proches du dessin que
du volume que suppose généralement la sculpture.
Appuyées contre un mur, elles s’apparentent à un
système de traits ou à un collage se détachant sur
une surface. Leur réalisation suppose de prendre en
considération une dimension poétique. Elles sont
en effet le résultat d’objets collectés par Daniel
Dezeuze
lors de promenades, d’où leur titre d’Objets
de cueillette. C’est par la déambulation et la
découverte hasardeuse que se crée l’œuvre
d’art. Chaque sculpture entretient donc une
étroite relation avec un moment précis vécu
par l’artiste. Chaque œuvre devient le témoin
d’un morceau de vie. C’est donc pour Daniel
Dezeuze une manière de matérialiser, de rendre
visible et durable un instant de bonheur ressenti
lors d’une promenade.
François DUFRÊNE
Né en France en 1930
Décédé en 1982
Et Goliath !,1972, dessous d’affiches lacérées, marouflées sur toile
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Comme Raymond Hains, François Dufrêne est
affichiste, c’est à dire qu’il trouve dans les affiches
arrachées aux murs de nos villes la matière première
de son travail artistique. Mais sa technique diffère
car il travaille sur le verso des affiches. Il travaille
par soustraction en enlevant, déchirant jusqu’à
trouver la composition qui allie forme, couleur et
mots… Dufrêne précise ainsi que l’assemblage peut
se définir de deux manières opposées : le support
papier assemblé à d’autres supports papiers ; et
l’assemblage par soustraction de couches qui illustre
l’acte d’assembler en retirant.
L’envers favorisant la douceur des teintes, la
moindre apparition d’une ligne ou d’un mot aura
son importance. François Dufrêne découvre ainsi le
mot David suite au grattage de la surface. L’artiste
répond par le titre « Et Goliath ! ». Il tisse, outre
la référence biblique, un nouveau rapport de force
entre deux adversaires.
Dans ce cas, l’affiche et la pauvreté de son support
(David) sont opposées à la société de consommation
de masse (Goliath) des années 70.
Olafur ELIASSON
Né au Danemark en 1969
Vit en Allemagne
Your mercury ocean,2009, matériau réfléchissant sur skateboard
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
«La relation des hommes à leur environnement m’a
toujours intéressée» explique Olafur Eliasson et
cette affirmation peut sans doute constituer l’un
des principaux fondements de ses œuvres, qu’elles
soient de vastes installations très sophistiquées, des
sculptures ou des photographies.
Généralement développées selon des processus
complexes qui nécessitent un travail pointu mené
par une équipe permanente de plusieurs dizaines de
personnes, les créations d’Olafur Eliasson s’agencent
autour d’une idée centrale : mettre le spectateur
au cœur d’une réflexion sur la place qu’il occupe
dans un contexte donné et, plus largement, dans le
monde.
Son œuvre la plus marquante demeure sans doute
The weather project, le soleil monumental créé en
2003 à la Tate Moderne de Londres, transformant
la gigantesque halle des turbines en un espace
contemplatif absolument sidérant pour ses deux
millions de visiteurs.
L’œuvre intitulée Your mercury ocean est une
commande réalisée pour Mekanism, une marque
de skateboards qui depuis plusieurs années s’est
engagée dans la production en série limitée de
planches de skate dont la conception est déléguée
à des artistes sous forme de cartes blanches. Ce qui
a débuté avec de simples sérigraphies sur planches
s’est rapidement orienté vers des projets proposés à
des artistes d’envergure internationale (ainsi Albert
Oehlen et Katharina Grosse par exemple, tous deux
exposés au FRAC Auvergne en 2005 et 2008) et des
éditions limitées dont chaque exemplaire n’en est
pas moins unique.
Olafur Eliasson est le premier artiste à avoir décidé
de retravailler la structure même de la planche
de skateboard. Normalement constituée de sept
couches de bois, les planches d’Olafur Eliasson
ont été spécialement conçues avec treize couches
de manière à pouvoir être gravées au laser en
profondeur pour obtenir un effet de vague. Chaque
planche a ensuite été recouverte de chrome sur
les deux faces. Surface réfléchissante irrégulière, le
skateboard en devient immatériel, distord tout ce
qui s’y reflète, posant non seulement la question de
ce que nous voyons mais aussi de comment nous
voyons.
Denis LAGET
Né en France en 1958
Vit en France
Sans titre, 1987, huile sur toile, cadre zinc sur bois
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Portraits, vanités, natures mortes, paysages... Denis
Laget maintient sa peinture dans les sujets les plus
classiques mais peu héroïques de l’histoire de la
peinture - à moins qu’il faille considérer que peindre
ces sujets-là après Chardin, Morandi, Manet... serait
une tâche héroïque. La mort traverse ces sujets
parce que, sans doute, la peinture parle, en grande
partie ou en général, du corps et de la meurtrissure
des chairs. On se souviendra des autoportraits de
Rembrandt comme de la Raiede Chardin, certes,
mais aussi que la peinture occidentale s’est penchée
longuement sur la question de la représentation de
la carnation et que la transparence de sa surface
renvoie à celle de la peau, à ce que contient le corps
- et du coup pas seulement dans les peintures qui
concernent cette thématique mais dans toutes ou
presque qui ont affaire à la figure. Cette peinture
renvoie donc au corps et pas uniquement dans sa
thématique mais, également dans sa matière : une
matière épaisse, organique, croûteuse ou onctueuse,
malaxée, triturée, étalée...
La cuisine apparaît comme l’autopsie du cadavre
et révèle un corps de peinture. La jouissance
s’impose par l’excès de la surface surimposé à la
représentation et, justement, produit que la peinture
peut échapper à la représentation.
Eric PROVENCHÈRE
Né en France en 1970
Vit en France
Fragile Wind-Même le plus abimé-Pondering Tree-A Woman’s Day, 2012 - 2013
Bâtons d’huile, pastels gras, acrylique sur balsa collé sur carton bois
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
Avec la série Massif, dont sont extraites les œuvres
acquises par le FRAC Auvergne, Eric Provenchère
s’est sans doute éloigné du cœur d’un propos
résolument tourné, depuis des années, vers la couleur
et vers la poursuite d’une réflexion historiquement
importante qui prend ses sources dans l’abstraction
américaine - Colorfield et Hard Edge notamment.
Mais cet éloignement s’est incontestablement
effectué au profit d’une sensibilité accordée à
la matière et au matériau que l’artiste se refusait
peut-être d’aborder ou d’assumer, ayant consacré
jusqu’alors l’énergie de sa pratique à l’exploration
de processus divers.
Avec Massif et les titres généralement poétiques
donnés à chacune des peintures qui en constitue le
corpus, Eric Provenchère ouvre la voie au versant
le plus sensible de son œuvre, renouant avec les
affinités électives qui sont les siennes et qui, depuis
longtemps, l’ont conduit à admirer d’autres artistes,
sans doute plus inclassables, comme Richard Tuttle
ou Raoul de Keyser. Peintures miniatures réalisées
en empâtements délicats sur de simples morceaux
de cagette en bois, les œuvres de la série Massif
se livrent dans une fragilité assumée qui en appelle
inévitablement à un assentiment du spectateur visà-vis d’une abstraction acceptant d’être doucement
contaminée par une forme de romantisme et de
fascination pour la beauté des matériaux.
Comme le note la critique d’art Karen Tanguy, «cette
appréhension du matériau prédomine dans les Massifs
où touches de pastel gras et de bâton d’huile y sont
apposées tout en souplesse… [...] D’un processus plus
spontané, cet ensemble est l’un des seuls où chaque
occurrence dispose d’un titre propre encourageant ainsi
certaines analogies. [...] La relation textuelle et picturale
des pièces de l’artiste suscite chez l’observateur des
images mentales où il y perçoit une atmosphère de
paysage, parfois métaphorique, parfois plus accidenté et
tumultueux.» (Extrait du texte de Karen Tanguy pour
l’exposition Tout ce que la main peut atteindre, La
Tôlerie, Clermont-Ferrand, 2014)
Anne-Marie ROGNON
Né en France en 1969
Vit en France
Le Petit Prince, 2002
Acrylique sur papier, fil, fusain
Collection FRAC Auvergne
Notice de l’œuvre
A quelqu’un lui demandant ce qu’il aurait créé s’il
avait été en prison, Picasso aurait répondu «Peu
importe, j’aurais peint avec ma salive». De même que
pour George Brecht, l’art d’Anne-Marie Rognon
requiert si peu d’espace, et bien peu de moyen.
L’artiste est originaire de Clermont-Ferrand et
a été formée par l’école supérieure d’art de
Clermont-Communauté d’où elle est sortie avec les
félicitations du jury. Elle réalise des peintures sur
des formats variables, des installations qui seront
parfois miniatures comme celles en question ici,
des vidéos la mettant en scène dans une attitude
décalée. De même que ce Funambule réalisé en
2004 (une petite figurine se tenant sur un
fil tendu entre les deux surfaces d’un réduit
de mur), l’artiste ne connaît ni l’échelle ni
le vertige. Elle tend son filin fragile pour un Petit
Prince aérien, entre un support d’art majeur et un
autre dit mineur, entre une temporalité (celle d’un
temps pluvieux) et une autre (celle où le parapluie
sèche).Utilisant les petits recoins de l’espace
qu’ordinairement chacun ignore, coin de mur,
angle d’escalier, renfoncement de porte, cueillie de
plafond, écoinçon, jambage de fenêtre,Anne-Marie
Rognon les repeint ou non, mais s’y installe pour
une modeste intervention. Petit
carottage du réel, prélèvement du quotidien,
décor de théâtre à l’échelle de nos doigts,
pop-up pour spectateur à genoux, cet espace local
construit dans un espace global se fait alors
monumental. Armée de son métalangage puissant
tel un dessin d’enfant, elle s’installe dans un
univers qui lui appartient.
Il est possible, comme l’insinue Jean-Paul Fargier
dans le texte accompagnant son exposition au
Centre d’Art de Saint-Fons en 2001, que l’artiste
porte un regard critique sur notre monde actuel.
Je devine pour ma part une construction mentale
singulière. L’artiste tisse dans l’espace, pour le
visiteur, une sorte de piège d’araignée sans venin
pour petits enchantements virevoltants. “ Avec l’âge,
je me sens de plus en plus responsable de mon propre
bonheur. […] J’aime m’asseoir à une table, goûter
un bon vin, serrer mes amis dans mes bras ”, confesse
le réalisateur italien Ermanno Olmi. De même que
Charles Trenet voyait le monde dans le cœur d’une
noix, de même que ces pères du “ paysagisme chinois ”,
de même que maître Gu Yiang, l’art en question ici
tient moins à conquérir qu’à capter et activer
un temps de félicité.
L’œuvre en kit se doit d’être reformulée, et
à chaque fois déplié et installée pour être
présentée. En rangeant ces délicates créations dans
des encoignures méprisées, l’auteur creuse une
petite niche de curiosité dans l’espace commun.
Ces simples scènes qui ramènent au plus pauvre
du quotidien agissent pourtant tel un drap parfumé
de lavande dans l’armoire de la mémoire. Une
fois posé, ce tableau à trois dimensions pour
spectateur lilliputien ouvre, véritable judas, un
paysage de tendresse dans l’imaginaire de chacun.
Les Fonds Régionaux d’Art Contemporain (FRAC), créés au début des années 80, sont des institutions
dotées de trois missions essentielles.
La première consiste à constituer des collections d’œuvres d’art représentatives de la création contemporaine
de ces 50 dernières années. La seconde est une mission de diffusion de ces collections sous forme d’expositions,
tant dans les régions d’implantation des FRAC respectifs qu’ailleurs en France et à l’étranger. Enfin, la troisième
raison d’être de ces institutions est d’œuvrer pour une meilleure sensibilisation des publics à l’art de notre
époque.
Le FRAC Auvergne a choisi dès le départ d’orienter sa collection vers le domaine pictural, se dotant ainsi
d’une identité tout à fait spécifique dans le paysage culturel français.
Aujourd’hui composée de plus de 700 œuvres, cette collection circule chaque année en région Auvergne et
ailleurs, à raison de 20 expositions annuelles.
Le FRAC Auvergne bénéficie du soutien du Conseil Régional d’Auvergne-Rhône-Alpes et du Ministère de la
Culture – Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Auvergne - Rhône-Alpes.
Il est également soutenu, pour l’Art dans les Lycées, par le Rectorat.
Programmation du FRAC
FRAC AUVERGNE
6 rue du Terrail - 63000 Clermont-Ferrand
A quoi tient la beauté des étreintes
Exposition des œuvres de la collection du FRAC Auvergne
Du 30 janvier au 26 mars 2016
Pius Fox
Du 9 avril au 19 juin 2016
Retour au meilleur des mondes
Exposition des œuvres de la collection du FRAC Auvergne
Du 2 juillet au 25 septembre 2016
AUTRES EXPOSITIONS PÉDAGOGIQUES
Anatomies
Frédéric Castaldi, Philippe Cognée, Richard Fauguet, Gérard Fromanger, Pierre Gonnord, Fabian Marcaccio
> Lycée agricole de Rochefort-Montagne. Du 1er mars au 11 avril 2016
Les échos de la mémoire
Darren Almond, Johannes Kahrs, Horst Haack, Fabrice Lauterjung, Al Martin, Jean-Luc Mylayne.
> Lycée agricole de St-Gervais d’Auvergne. Du 8 mars au 11 avril 2016
Dans le cadre des EROA (Espaces de Rencontre avec l’Œuvre d’Art)
La fabrique de l’image
Darren Almond, Anne-Sophie-Emard, Agnès Geoffray, Emmanuel Lagarrigue, Marc Le Mené, Platino
> Lycée Jean Monnet - Yzeure. Du 1er décembre 2015 au 25 mars 2016
Absence - Carte blanche aux élèves du lycée
Marc Bauer - Bruno Bellec - Philippe Cognée - Jean-Charles Eustache - Gilgian Gelzer - Edi Hila - Jonathan
Pornin
> Lycée Blaise Pascal - Ambert. Du 3 mars au 28 avril 2016
PROJET FÉDÉRATEUR WORKSHOP EN LYCÉES PROFESSIONNELS
> CFA Haute-Loire - Bains
Section menuiserie et charpente
> Lycée Godefroy de Bouillon - Clermont-Ferrand
Section graphisme et décor
> Lycée Charles et Adrien Dupuy - Le Puy
Section usinage
> Lycée François Rabelais - Brassac-les-Mines
Section chocolat
> Lycée Pierre-Joël Bonté - Riom
Section énergie
> Lycée Saint-Géraud - Aurillac
Section communication graphique
> Lycée Lafayette - Clermont-Ferrand
Section électrotechnique
> EPL Saint-Flour.
Filière environnement nature
FRAC Administration
1 rue Barbançon
63000 Clermont-Ferrand
Tél. : 04.73.90.5000
[email protected]
Site internet : www.fracauvergne.com
FRAC Salle d’exposition
Ouverture :
- de 14 h à 18 h du mardi au samedi
- de 15 h à 18 h le dimanche
- fermeture les jours fériés
Entrée libre
Contact pour les scolaires
Laure Forlay, chargée des publics au FRAC Auvergne
04.73.74.66.20 ou par mail à : [email protected]
Patrice Leray, Professeur correspondant culturel
[email protected]
Ce document est disponible en téléchargement sur le site du FRAC Auvergne :
www.fracauvergne.com
et sur le site du rectorat de l’académie à l’adresse suivante :
http://www3.ac-clermont.fr/pedago/arts/ressources.htm
En couverture : François Dufrêne, Et Goliath !, 1972. Collection FRAC Auvergne
6 rue du Terrail
63000 Clermont-Ferrand
Tél. : 04 73.90.5000

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