MALADIE DE BASEDOW. A PROPOS D`UNE NOUVELLE

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MALADIE DE BASEDOW. A PROPOS D`UNE NOUVELLE
MALADIE DE BASEDOW
A PROPOS D’UNE NOUVELLE OBSERVATION
H. AITOUAMAR, B. BOUCHRA, F. JABOURIK, A. ROUICHI, A. BENTAHILA, A.M BELHADJ
RESUME
La maladie de Basedow se caractérise par l’association
des signes d’une hyperthyroïdie et d’une exophtalmie.
C’est une affection rare en pédiatrie et elle touche surtout le grand enfant.
Son diagnostic est facile, mais son traitement est astreignant et il nécessite une contribution du patient, de la
famille et du médecin traitant et parfois même du pédopsychiatre
Nous rap p o rtons un cas clinique de la maladie de
Basedow chez un adolescent de 14 ans diagnostiqué un
an après le début des signes cliniques qui a bien répondu
au traitement médical.
Mots-clés : Basedow, enfant, diagnostic, traitement
OBSERVATION
Il s’agit de A.I Lakbir âgé de 14 ans bien vacciné, scolarisé, 6ème de sa fratrie.
L’interrogatoire retrouve une notion de goitre chez son
père et chez son frère.
Le début de la symptomatologie remonte à un an avant son
hospitalisation par l’apparition d’une tuméfaction basi-cervicale antérieure augmentant progressivement de volume,
une thermophobie, une alternance de diarrhée et de transit
normal, une moiteur des mains et une nervosité rapportée
par la famille
L’ examen clinique re t ro u ve un patient en état généra l
conservé : T= 156 cm, TA = 130/60 mm Hg (normale), un
P = 31 kg (- 2 D.S) et FC= 100 Bt/ mn (élevée).
On note un goitre prenant toute la glande thyroïde, ferme et
vasculaire avec un PC = 33 cm et une exophtalmie bilatérale très frappante et symétrique.
Le bilan biologique a mis en évidence une hyperthyroïdie
avec :
* Une élévation de :
T3 à 19,8 pg/ml (N = 2,8 - 6,3 pg/ml),
T4 à 20 pg/ml (N = 7 - 20 pg/ml ).
* Une baisse de TSH à 0,09 U/ml (N= 0,26-3,5 U/ml)
La scintigraphie thyroïdienne a montré un goitre de fixation très intense et homogène.
L’ECG n’ a pas objectivé d’ anomalies cardiaques en
dehors d’ une tachycardie à 100 Bat/ min. La radiographie
de la selle turcique est normale.
L’ensemble de ces données cliniques et paracliniques nous
ont permis de retenir le diagnostic de la maladie de
Basedow. Le patient est mis sous le traitement suivant
carbimazole (cp 5 mg) 8 cp en deux prises, propanolol (cp
de 40 mg) 1/4 du cp x 2/jour (J) et du diazépam 15 gouttes
x 2/J.
Après 2 mois de traitement, son état s’est légère m e n t
amélioré ce qui a motivé une augmentation des doses de
carbimazole à 10 cp/J en 2 prises, du propanolol à 1 cp x
2/J et du diazépam à 15 gouttes x 3/J. Il quitte l’ hôpital
après une nette amélioration des signes d’ hyperthyroïdie et
un gain de 2 kg de poids
DISCUSSION
La maladie de Basedow est une affection rare chez l’enfant,
elle touche l’enfant seulement dans 1 à 5 % de l’ ensemble
des cas publiés dans la littérature [1].
La prédominance de l’atteinte féminine est très nette : 5 à
7 filles/1 garçon et elle est rapportée par plusieurs auteurs
[1, 2].
Elle peut survenir à n’importe quel âge chez l’enfa n t ,
cependant elle s’observe surtout au-delà de 10 ans [2] et
l’âge de notre patient répond bien à ce critère.
L’analyse des différentes séries montre que plusieurs facteurs contribuent à la genèse de la maladie de Basedow.
Pa rmi d’autres, l’existence d’une thy ro ï d o p athie dans
36 % chez les familles des malades (maladie de Basedow,
goitre, thyroïdite) et dans l’ entourage de notre malade on a
retrouvé ce facteur, l’existence est à une fréquence élevée
d’affection auto-immune chez les proches des patients [2,
3] et enfin le risque est multiplié par 2,4 et par 5,2 successivement chez les sujets HLA-B8 et HLA-DR3 [1, 3].
Unité de Pédiatrie IV Hôpital d’enfants C.H.U Ibn Sina Rabat
Médecine du Maghreb 2000 n°81
H. AITOUAMAR, B. BOUCHRA, F. JABOURIK,
A. ROUICHI, A. BENTAHILA, A.M BELHADJ
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Le diagnostic positif de la maladie de Basedow est facile
devant l’association des éléments suivants :
Les signes cliniques classiques de l’hyperthyroïdie et en
particulier la tachycardie, la nervosité et le goitre vasculaire, ceux-ci se voient dans 90-95 % des cas [1, 2, 3, 4].
Notre patient avait présenté cette triade à son admission.
Alors que la thermophobie, les tremblements, diarrhée ou
selles fréquentes et enfin une accélération de la vitesse de
croissance ne se voient que rarement [1, 3, 5].
Les signes spécifiques de la maladie sont dominés par
l’exophtalmie qui en général est symétrique, bilatérale et
modérée [1]. Cette exophtalmie était l’un des signes qui
ont ramené notre malade a consulté.
Les signes paracliniques marqués par l’élévation de T3 et
de T4 avec une TSH basse et par un goitre hyperfixant à la
scintigraphie thyroïdienne.
Le traitement de la maladie de Basedow peut faire appel à
3 volets thérapeutiques qui dépendent du terrain, du coût
des médicaments et de ce fait de la compliance au traitement et enfin l’efficacité du traitement médical.
Le traitement médical se base sur les antithyroïdiens de
synthèse (ATS) qui ont pour mécanisme d’action un blocage de l’organification de l’iode capté par la thyroïde. Parmi
les molécules utilisées en pratique le carbimazole 5 mg cp
à la dose 15 à 20 mg/J en 2 prises. Un traitement adjuvant
est souvent associé aux ATS et à base de sédatifs, phénobarbital 2-8 cg/J et un bêtabloquant (propanolol) à la dose
de 1-3 mg/kg/J pour supprimer les symptômes adrénergiques (tachycardie, sueurs, tremblements) [1, 4, 5].
La durée totale moyenne du traitement par les ATS est de
3 à 4 ans. Notre malade a bénéficié de cette recette thérapeutique mais avec du diazépam à la place du phénobarbital et de fortes doses de carbimazole ce qui a permis son
amélioration mais à cause du coût thérapeutiques le patient
est perdu de vue.
Le traitement chirurgical consiste en une thyroïdectomie ou
en une goitrectomie. Il n’est indiqué que s’il y a un échappement au traitement médical soit par résistance avec risque de thyrotoxicose, soit par non compliance au traitement du fait de coût soit par l’existence d’un énorme goitre
avec signes de compression. Ce traitement chirurgical a
l’avantage de faire guérir rapidement l’hyperthyroïdie par
rapport au traitement médical et à l’irathérapie ; cependant
il n’est pas épargné de complications immédiates et en particulier une lésion de nerf récurrent et l’abl ation des
glandes parathyroïdes et à long terme une athyriose qu’il
faut dépister et supplémenter [1, 6, 7] par l’ap p o rt
d’hormones thyroïdiennes.
Enfin l’irathérapie ne trouve sa place dans le traitement de
cette maladie que s’il y a un échec du traitement médical et
une contre-indication de la chirurgie [1, 5, 8]. Elle fait appel
à l’ iode radioactif qui permet de bloquer l’hormonogénèse
en entravant le métabolisme des cellules thyroïdiennes. Ce
traitement expose à un risque de cancer important et de ce
fait il est proscrit par la majorité des auteurs [1, 5, 8 , 9].
CONCLUSION
La maladie de Basedow est une affection rare chez l’enfant
mais elle reste la première cause de l’ hyperthyroïdie chez
lui. Elle touche surtout le grand enfant. Les facteurs qui
contribuent à son apparition sont multiples et surtout l’existence d’une thy ro ï d o p athie et de maladies systémiques
dans la famille. Son diagnostic positif est facile devant
l’association d’un tableau clinique et biologique d’hyperthyroïdie avec une hyperfixation à la scintigraphie thyroïdienne. La prise en charge thérapeutique peut poser d’
énormes problèmes du fait du coût des médicaments et de
leur toxicité, des risques per et postopératoires et enfin du
risque de survenue de cancer après l’irathérapie.
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