Comportements sexuels inappropriés en démence

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Comportements sexuels inappropriés en démence
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Texte rédigé par Martine Joncas, B. Pharm., M.Sc.,
Cité de la Santé de Laval.
Texte original soumis
le 4 mars 2014
Révision : Sarah Girard, Pharm. D,
Pharmacie Morin.
Texte final remis le 25 mai 2014
L’auteure et la réviseure scientifique ne déclarent aucun conflit d’intérêts lié à la rédaction de cet article.
Comportements sexuels inappropriés en démence
OBJECTIFS D’APPRENTISSAGE
1. Définir les comportements sexuels inappropriés (CSI) en démence et en déterminer les causes;
2. Discuter des options de traitement pharmacologiques et non pharmacologiques pour la prise en charge des CSI en démence.
La démence est une maladie neurologique évolutive caractérisée par une détérioration globale progressive et irréversible des fonctions
cérébra­les1. Elle affecte entre autres les capacités
in­tel­lectuelles, le sens de l’orientation, la
mémoire, le langage, la compréhension, l’orientation, le raisonnement, le jugement et la capacité d’apprentissage. Bien que la démence de
type Alzheimer soit la forme la plus répandue,
il existe des démences connexes, telles que la
démence vas­c ulaire, la démence à corps de
Lewy ou encore la démence fronto-temporale,
pour ne nommer que celles-là2.
Cette affection a des conséquences sur les
plans émotionnel, financier et social pour les
personnes atteintes, leurs familles et leurs amis.
Elle touche surtout les personnes âgées, bien
que l’on réalise de plus en plus qu’il y a aussi des
cas qui débutent avant 65 ans. Après cet âge, la
probabilité de développer une démence double
environ tous les cinq ans2. Toutes les personnes
atteintes de démence connaissent un certain
degré d’incapacité fonctionnelle et on estime
que 90 % d’entre elles présenteront des problèmes de comportement à un stade ou à un
autre de la maladie3.
Il existe un large éventail de symptômes comportementaux et psychologiques de la démence
(SCPD). Parmi ceux-ci figurent les comportements sexuels inappropriés (CSI), décrits dans
la littérature médicale sous les termes d’« hypersexualité » ou de « désinhibition sexuelle relative à la démence »4. Les CSI peuvent être très
troublants pour les membres de la famille ou les
aidants et représentent un défi considérable
pour le clinicien5.
Cet article vise à résumer les principales
mesures non pharmacologiques et approches
pharmacologiques lors de la prise en charge
des CSI en démence. À l’heure actuelle, il
n’existe malheureusement aucune étude randomisée et contrôlée sur les traitements de ces
troubles à caractère sexuel. Les données disponibles dans la littérature médicale proviennent essentiellement d’exposés de cas,
d’études ouvertes ou encore de séries de cas.
Les données probantes étant limitées, les algorithmes de traitement proposés reposent donc
essentiellement sur les avis des différents
auteurs selon leurs propres expériences, sur
les informations disponibles à ce jour sur le
sujet, ainsi que sur les effets indésirables
potentiels liés aux différents traitements pharmacologiques5,6,7.
Présentation du patient
M. Julien, 82 ans, réside en CHSLD depuis huit
mois. Depuis son admission, il présente certains
comportements de désinhibition d’ordre sexuel
(complimente les autres résidentes de façon exagérée et répétitive sur leurs seins), mais la problématique s’est aggravée depuis deux semaines.
En effet, il a tenté de faire des attouchements à
certaines résidentes ainsi qu’à certains membres
du personnel de sexe féminin. Il lui arrive de se
déshabiller et cherche à se masturber devant
les autres, refusant de fermer la porte de sa
chambre. La fin de semaine dernière, il est entré
dans la chambre d’une résidente et l’a forcée à
se dénuder pour lui faire des attouchements. La
famille de cette résidente a porté plainte, si bien
que le centre de soins a pris des mesures pour
changer le patient d’étage et augmenter la surveillance. Le patient est maintenant en chambre
privée, les approches non pharmacologiques ont
été maintenues (dont le port d’une grenouillère
avec glissière au dos) et le médecin du CHSLD lui
a prescrit de la quétiapine à raison de 12,5 mg
bid. Notons ici qu’une évaluation complète du
patient a été effectuée et que ce dernier ne présentait pas de signe d’altération de la conscience
ni de troubles métaboliques ou infectieux.
Parmi ses antécédents médicaux, on note :
◾ Démence mixte avancée (MMSE 10/30 en
2010)
◾ Maladie de Parkinson
◾ MPOC sévère
◾Hypothyroïdie
◾HTA
◾HLP
◾ MCAS/angine/PAC x 3
◾RGO
Sa liste de médicaments est la suivante :
◾ Exelon Patch 10 (rivastigmine) 9,5 mg,
1 timbre die
◾ Ativan (lorazépam) 0,5 mg s/l bid prn
◾ Sinemet (lévodopa/carbidopa) 100 mg/
25 mg, 2 co qid
◾ Asaphen EC (acide acétylsalicylique) 80 mg die
◾ Crestor (rosuvastatine) 10 mg die
◾ Imdur LA (mononitrate d’isosorbide) 60 mg die
◾ Nitrolingual (nitroglycérine) 0,4 mg/dose,
prn si DRS
◾ Monocor (bisoprolol) 2,5 mg die
◾ Norvasc (amlodipine) 7,5 mg die
◾ Tylenol (acétaminophène) 325 mg, 2 co qid
◾ Nexium (ésoméprazole) 40 mg die
◾ Synthroid (lévothyroxine) 0,05 mg die
◾ Spiriva (tiotropium) 18 mcg, 1 inh die
◾ Symbicort 6 mcg/200 mcg (formotérol/
budénoside) 2 inh bid
◾ Ventolin (salbutamol) 100 mcg/inh, 4 inh qid
+ bid prn
Il n’a pas d’allergie, mesure 1,72 m et pèse 70 Kg.
Son poids idéal est de 68 kg.
TA = 132/86; pouls = 72 bpm; température buccale = 37,6 °C
Un bilan sanguin est demandé et les résultats
sont les suivants :
◾ FSC (Hb, VGM, plaquettes, neutrophiles) :
dans les valeurs normales
◾ TSH = 2,36 umol/L (n : 0,34-5,60 umol/L)
◾ Électrolytes : Na+, CL-, K+ = dans les valeurs
normales
◾ Vitamine B12 = 522 pmol/L
(n : 132-857 pmol/L)
◾ Acide folique = 18,4 nmol/L
(n : 7,0-76,8 nmol/L)
◾ Créatinine = 73 umol/L
◾ Clairance à la créatinine estimée = 66 ml/min
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Définition et présentation clinique
La prévalence des CSI en démence est très variable
selon la littérature consultée. On estime que ces
comportements se manifesteraient chez 1,8 % à
25 % des patients âgés déments7. Cette variation
s’expliquerait par plusieurs facteurs, notamment
l’hétérogénéité des participants dans les études
quant aux types et à la gravité de leurs démences,
mais aussi le milieu où l’étude a été réalisée (milieu
communautaire ou centre de soins de longue
durée). De plus, les nombreuses approches
employées pour définir un comportement considéré comme inapproprié contribuent à expliquer
cet écart de prévalence. C’est tout un défi pour les
équipes soignantes que de savoir distinguer les
comportements sexuels normaux des comportements anormaux. Il faut ainsi prendre garde de ne
pas considérer certains comportements sexuels
appropriés comme pathologiques5. En effet, la
recherche d’intimité, le besoin d’affection, d’attachement, de contacts physiques et d’amour ne
doivent pas être confondus avec les CSI. Certaines
conduites peuvent être de simples témoignages
affectifs sans connotation sexuelle4,5.
Bien qu’il n’y ait pas de consensus, on définit
généralement les CSI en démence comme des
actions manifestes ayant une signification
sexuelle évidente pour le sujet et qui sont perçues
comme inappropriées sur le plan culturel et
social8. On les classe généralement en trois sousgroupes de syndromes5,6,9,10 :
◾ Les comportements verbaux à caractère
sexuel. Ceux-ci sont les plus fréquents et ne
reflètent aucunement la personnalité du
patient avant sa maladie (p. ex., langage obscène ou suggestif, injures, propositions
inconvenantes, délires de jalousie, etc.).
◾ Les actes sexuels implicites (p. ex., demander
des soins génitaux non nécessaires, regarder
des images pornographiques en public, etc.).
◾ Les actes sexuels explicites (p. ex., attouchements ou étreintes excessives, caresses ou
baisers sur les parties intimes ou la poitrine,
empoigner ou dévêtir les autres ou soimême, comportements exhibitionnistes,
masturbation en public, tentatives ou rapports sexuels avec un partenaire non consentant ou qui ne peut consentir, etc.).
L’échelle SASBA (St Andrew’s Sexual Behaviour
Assessment) est un outil clinique qui a été élaboré
de manière à mesurer et à consigner les CSI d’une
façon fiable et valide5,11. Cet instrument permet
l’observation directe de quatre catégories de
comportement (les commentaires verbaux, les
actes sans contact, l’exposition et les attouche20
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ments sur autrui), chacune ayant quatre degrés
de gravité. On croit que l’échelle SASBA pourrait
aider les cliniciens à standardiser leur documentation des CSI5,11,12. Le lecteur intéressé à consulter
cette échelle la trouvera en ligne (www.stah.org/
Portals/0/docs/sas bascale.pdf).
Malgré les variations méthodologiques dans
les études, certains thèmes communs se
dégagent. Premièrement, les CSI s’observent
plus fréquemment chez les hommes que chez les
femmes démentes (93 % des hommes versus 7 %
des femmes)7,13. Il est d’ailleurs intéressant de
noter que la plupart des études sur les traitements pharmacologiques dans cette indication
ont été réalisées chez des sujets masculins. Il n’est
donc pas possible de dire avec certitude comment les femmes pourraient répondre à certains
traitements proposés5.
Deuxièmement, bien qu’ils puissent survenir
dans tout milieu, ces comportements sont plus
souvent observés en centre de soins de longue
durée qu’en milieu communautaire7,13. De plus,
on ne peut établir clairement si les CSI sont plus
courants chez un type particulier de démence.
En effet, même si Alagiakrishnan et coll. ont
trouvé que les patients avec des démences vasculaires étaient à plus haut risque de développer des
CSI que les patients atteints de démence de type
Alzheimer, d’autres auteurs n’ont pu mettre en
évidence cette affirmation13,14,15.
Enfin, on n’a pas trouvé de différence significative pour les CSI lorsque l’on a comparé les
patients selon leur âge, l’âge d’apparition de leur
démence, leur niveau de scolarité ou encore leur
score au test dit mini-mental (Mini-mental state
examination, ou MMSE)14. Cependant, d’autres
études ont démontré une plus grande prévalence
de CSI chez les patients atteints de démences
sévères très avancées13.
Pathophysiologie
On ne peut définir les CSI comme étant une
simple désinhibition de la sexualité liée à la
démence. Cette interprétation ne tiendrait pas
compte du fait que seul un petit nombre de
patients présente ces comportements. De nombreux facteurs interviennent dans la sexualité et
l’origine des CSI doit donc être considérée
comme multifactorielle4.
Les facteurs neurologiques
Selon Black et coll., il est important de comprendre la neurobiologie des CSI afin de déterminer adéquatement les stratégies de traitement de
ces comportements16 . Différentes données
orientent vers la participation de quatre régions
cérébrales, soit les lobes frontaux, le système temporolimbique, le striatum et l’hypothalamus15,16.
Des dommages dans le système frontal se traduiraient par une désinhibition, tel qu‘observé dans
différents types de démence, de sclérose en
plaques ou encore dans certaines tumeurs15.
L’étude de Bardell et coll. a d’ailleurs permis de
mettre en évidence une association entre les acci-
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dents vasculaires cérébraux du lobe frontal et les
CSI17. Une perturbation du système temporolimbique favoriserait pour sa part les comportements
d’hypersexualité, tel que parfois observé dans les
accidents vasculaires cérébraux, les tumeurs ou
l’épilepsie touchant les lobes temporaux, ou
encore dans le syndrome de Klüver-Bucy (lésions
bilatérales touchant les régions temporales
internes). Quant aux mala­dies impliquant le striatum (p. ex., la maladie de Parkinson, le syndrome
de la Tourette ou encore la maladie de Huntington), elles peuvent pro­duire des comportements à
caractère ob­sessif-compulsif dans lesquels on
retrouve parfois des fixations d’ordre sexuel.
Enfin, des lésions de l’hypothalamus peuvent
provo­quer des comportements d’hypersexualité,
tel qu’observé dans le syndrome Kleine-Levin
(syndrome causé par un dysfonctionnement
hypothalamique)15,16.
Les facteurs hormonaux
Une revue neurobiologique de la fonction
sexuelle publiée en 2000 par Meston et Frohlich
explique comment de multiples hormones inter­
agissent avec les zones cérébrales en cause dans
les fonctions sexuelles. Ces hormones sont les
androgènes (par exemple, la testostérone et la
dihydrotestostérone), les œstrogènes (par
exempe, l’estradiol), la progestérone, la prolactine, l’ocytocine, le cortisol et les phéromones18.
Les facteurs biochimiques
Leur intervention a été bien étudiée dans la
genèse des comportements impulsifs et agressifs 4. Différents neurotransmetteurs et neuropeptides inf luent sur les comportements
sexuels, qu’ils soient normaux ou déviants. Mentionnons entre autres la sérotonine, l’épinéphrine, la norépinéphrine, la dopamine, l’acétylcholine, l’acide γ-aminobutyrique (GABA),
l’histamine, l’oxyde nitrique et le peptide opioïde
endogène6,18,19.
Les facteurs neuropsychologiques
La perturbation de plusieurs mécanismes cognitifs peut sous-tendre certains CSI. Ainsi, un
trouble des mécanismes de reconnaissance des
visages peut expliquer que le patient prend une
personne étrangère pour son épouse4. D’ailleurs,
les erreurs d’identification, la mésinterprétation
ou encore la perte des bonnes manières sexuelles
acquises peuvent toutes jouer un rôle dans l’apparition des CSI chez les patients déments17.
Les facteurs psychologiques
Si la personnalité ne semble pas intervenir dans la
genèse des anomalies de comportement des
patients porteurs de lésions frontales, il reste à
expliquer pourquoi seule une faible portion de
ceux-ci présente des CSI4. Selon Desrouesné, il est
permis de supposer que ces comportements
reposent sur des schémas d’action acquis au cours
de l’histoire propre à chaque patient. Ainsi, des
antécédents d’abus sexuel dans l’enfance ont été
signalés chez certains, mais l’étude des antécédents concernant la personnalité des patients, leur
sexualité et leurs influences sur les CSI reste à
faire17. D’autres auteurs affirment que les comportements sexuels d’une personne avant l’apparition
de sa maladie exercent une forte influence sur ce
qui s’ensuivra après le développement de la
démence20. Aussi, des changements de l’humeur
sont souvent notés chez les patients déments.
Autant la manie que la dépression pourront affecter l’intérêt sexuel de ces derniers20.
Les facteurs sociaux
L’absence du partenaire sexuel habituel, le
manque d’intimité, les signaux mal interprétés
(comme la vue de certaines scènes télévisées ou
le soin reçu par un membre du personnel de sexe
opposé), ou encore un environnement non
familier ou sous-stimulé peuvent tous contribuer aux CSI chez la personne âgée démente20.
Médicaments
Certains médicaments peuvent aggraver la désinhibition. C’est le cas notamment de la lévodopa ou
des agonistes dopaminergiques qui peuvent causer des comportements sexualisés chez les patients
atteints de la maladie de Parkinson6,16. Bien que le
mécanisme d’induction des comportements
d’hypersexualité avec les molécules antiparkinsoniennes ne soit pas connu de façon exacte, on croit
qu’il serait en lien avec une réduction des concentrations plasmatiques de la prolactine6. Ajoutons
enfin que l’alcool, les anticholinergiques et les
benzodiazépines peuvent altérer la fonction
cognitive et causer eux aussi de la désinhibition6,16.
Principes de prise en charge
La prise en charge des CSI pose de sérieux problèmes, particulièrement en institution, du fait
des questions éthiques qui en émergent et des
conflits d’intérêts qui peuvent opposer le bienêtre du patient ainsi que celui des autres résidents
et du personnel soignant4. Les patients atteints de
démence ont le même droit que les autres d’exprimer leur sexualité10,20. Bien que certains résidants
acceptent d’avoir des activités sexuel­les, d’autres
n’ont pas la capacité de donner leur consentement;
ils sont vulnérables à des comportements abusifs
de la part des patients désinhibés5. Il est donc primordial pour le clinicien et le personnel soignant
d’évaluer la compétence du patient à s’engager
dans une relation sexuelle.
Évaluation
Il est essentiel, lorsque l’on évalue un CSI chez un
résidant avec une démence, d’obtenir une histoire complète et rigoureuse de son passé
sexuel16. Si ce dernier est atteint d’une forme
avancée de démence, cette évaluation sera faite
auprès de sa famille ou des aidants naturels16. Il
faut avant tout s’assurer que le ou les comportements observés sont réellement de nature
sexuelle et inappropriés et qu’ils ne sont pas le
reflet d’un désir d’intimité ou d’un besoin de
réconfort16. L’évaluation devra aussi inclure une
anamnèse médicale de la condition physique et
mentale ainsi que des analyses de laboratoire16.
Une analyse d’urine pourra aussi aider à détecter
la présence éventuelle d’une infection urinaire,
laquelle pourrait amener un patient à se focaliser
sur ses organes génitaux21.
Diagnostics différentiels
Certaines pathologies du SNC peuvent favoriser
l’apparition de CSI. C’est le cas lorsqu’il y a eu des
lésions au cerveau (p. ex., lésion secondaire à un
accident vasculaire cérébral ou encore à une
tumeur), lors de chirurgies ou à la suite de traumatismes importants16. D’autres problèmes de santé
peuvent expliquer des comportements d’hypersexualité et ils devront être éliminés. Mentionnons entre autres les événements cardiaques ou
vasculaires, ou encore les problèmes d’ordre psychiatrique comme les troubles de l’humeur (p. ex.,
la bipolarité, spécialement la manie ou l’hypomanie), la psychose (p. ex., les hallucinations et les
délires), les désordres schizo-affectifs ou le trouble
obsessif-compulsif5,6,7,9,16. Enfin, parmi les autres
diagnostics différentiels, nommons la consommation abusive d’alcool ou encore les traits de personnalité hypersexuelle de longue date, puisque
ces problèmes peuvent nécessiter une approche
différente5.
Delirium
Le delirium est défini comme une perturbation
aiguë de la conscience qui s’installe rapidement
et qui tend à fluctuer au cours de la journée10.
L’émergence soudaine d’un CSI peut être le prélude d’un delirium et il faut une approche
exhaustive pour exclure les causes sous-jacentes5.
Naguib et Levy ont examiné le rôle du delirium
dans la précipitation des CSI. Dans certains cas,
des patients qui avaient réussi à contenir leur
impulsivité sexuelle régressaient à la suite d’un
déclin cognitif associé au delirium9. Il importe
donc d’intervenir sur tous les facteurs étio­
logiques modifiables ayant pu provoquer un
delirium lorsque l’on prend en charge les CSI
(p. ex., une infection, l’impaction fécale, la déshydratation, le sevrage d’alcool ou de certains
médicaments, les troubles métaboliques, dont
les déséquilibres acido-basiques ou électrolytiques, la désafférentation visuelle ou auditive, la
douleur, etc.)5,22. Enfin, une révision des médicaments nuisibles et potentiellement contributifs
s’imposera lors de la suspicion d’un delirium
(p. ex., benzodiazépines, narcotiques, anticholinergiques, corticostéroïdes, digoxine, etc.)22.
Options de traitement
Lorsque les contributions médicales ou médicamenteuses aux CSI ont été éliminées, le clinicien
utilisera une approche séquentielle commençant
par une stratégie de prise en charge non pharmacologique, comme il convient de le faire pour l’ensemble des SCPD5,10. Les thérapies médicamenteuses seront réservées aux CSI qui ne répondent
M. Julien (suite)
Parmi les médicaments administrés, certains peuvent-ils aggraver la désinhibition
sexuelle ? La lévodopa pourrait favoriser les
comportements sexualisés chez les patients
atteints de la maladie de Parkinson. Dans la
mesure du possible, un ajustement de cette
médication à la baisse doit être tenté afin
d’évaluer l’effet sur le CSI. Le patient reçoit
actuellement du Sinemet 100/25 mg, 2 co
qid. La dose pourrait être réduite par paliers
de un demi-comprimé chaque semaine en
visant la dose minimale efficace lui permettant de conserver une mobilité suffisante,
sans nuire à sa qualité de vie.
Quelle aurait dû être la première intention
de traitement pharmacologique pour réduire
les CSI chez ce patient ? En raison de leurs
effets antiobsessifs et antilibidinaux ainsi que
de leur profil d’innocuité favorable, les antidépresseurs appartenant à la classe des ISRS
devraient être tentés en premier lieu chez un
patient présentant des troubles de comportements sexuels. Ainsi, la quétiapine sera remplacée par la sertraline à raison de 25 mg die,
que l’on augmentera chaque semaine par
paliers de 25 mg jusqu’à atteindre la dose
maximale de 200 mg/jour, selon la réponse
et la tolérance du patient.
pas aux mesures plus traditionnelles5,10,13.
Mesures non pharmacologiques
Peu d’études ont été faites sur l’emploi des
méthodes non pharmacologiques pour le
traitement des CSI en démence. L’approche
psycho-comportementale repose sur l’analyse
du comportement du patient et des différentes
dimensions en cause, plus particulièrement la
part qui revient à une augmentation de la
libido, à un comportement désinhibé, impulsif,
et à un trouble des conduites sociales4. Lorsque
le degré de la gravité de la démence le permet,
on peut établir un contrat thérapeutique avec le
patient au sujet de son comportement, contrat
précisant ce qui est acceptable et ce qui ne l’est
pas4. Des stratégies comportementales et environnementales ont été suggérées pour aider le
personnel soignant. Tout en évitant la confrontation, on peut rediriger le résidant, utiliser la
distraction, la stimulation sensorielle ou la
récréothérapie, ou encore l’occuper manuellement (par exemple, lui faire plier des serviettes)7,13,16 . Dans certains cas, il peut être
approprié de favoriser son intimité en lui réservant du temps avec son partenaire sexuel7,13,16.
Il est nécessaire de limiter l’exposition à des stimulations sexuelles (magazines, télévision,
etc.)4,16,23. Parmi les tactiques permettant de
réduire l’exhibitionnisme ou la masturbation
en public, mentionnons la modification de la
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tenue vestimentai­re (p. ex., le port d’une salopette ou d’un pantalon qui s’ouvre par l’arrière
ou qui n’a pas de fermeture à glissière)13,16. À
l’occasion, il peut être nécessaire de confier les
soins à un inter­venant du même sexe4,10. L’emploi de barricades, d’alarmes ou de demi-portes
peut aussi prévenir l’errance23. Dans un exposé
de cas décrit dans la littérature médicale, on
explique une démarche consistant à fournir
une poupée de chiffon de presque un mètre à
un homme atteint de démence et sexuellement
agressif envers les femmes de son centre d’hébergement. Ses CSI ont cessé après qu’il eut
reçu la poupée, car elle lui fournissait les
moyens de libérer ses pulsions sexuelles5,24. La
créativité produit souvent de bons résultats
sans avoir à recourir aux médicaments5.
Mesures pharmacologiques
La facilité, le manque de personnel ou son
manque de formation font que souvent le traitement pharmacologique est le premier à être
envisagé en dépit des risques et de sa faible efficacité à traiter beaucoup de comportements
inappropriés25. L’ensemble des auteurs s’accordent aujourd’hui pour dire que les traitements pharmacologiques ne devraient être
envisagés qu’en cas d’échec de l’approche comportementale15,16,25.
De nombreuses pharmacothérapies ont été
proposées dans le traitement des CSI en
démence, mais, tel que mentionné en début
d’article, aucune étude randomisée et contrôlée
n’a été publiée pour en établir l’efficacité et la
sécurité, et pour définir la séquence selon
laquelle on doit recourir aux divers traitements
lorsque les patients ne réagissent pas aux thérapies initiales5. Les différentes classes de médicaments qui ont été utilisées pour les CSI en
démence sont décrites plus bas. Les cliniciens
doivent rigoureusement évaluer les bienfaits
par rapport aux préjudices potentiels de chacun5. Les comorbidités pourraient servir à guider leurs décisions.
Comme tous les traitements pharmacologiques des CSI en démence représentent des
indications non officielles, il importe d’avoir une
communication claire avec les patients ou les
membres de leur famille au sujet des avantages et
des risques potentiels que constituent ces traitements5. Il faut demeurer à l’affût de l’apparition
des effets indésirables lorsque l’on décide d’instaurer l’une de ces thérapies, éviter l’emploi
d’agents pouvant empirer les CSI (p. ex., les benzodiazépines) et se rappeler le principe de base
en gériatrie selon lequel on commence à administrer le médicament à la plus faible dose pos22
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sible et on ajuste graduellement16.
Les antidépresseurs
Les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS) réduiraient les CSI par leurs effets
antiobsessionnels et antilibidinaux 16 . Des
études ont aussi démontré leur efficacité à
diminuer les comportements agressifs liés aux
hormones sexuelles15,16. Ils ont d’ailleurs été
employés avec succès dans certains cas de paraphilie non reliée à la démence ou de désinhibition sexuelle19,20. Cette classe de médicaments,
en plus d’être sécuritaire et généralement bien
tolérée, a l’avantage de traiter aussi la dépression et l’anxiété9,15,16. Dans un exposé de cas, la
paroxétine 20 mg/jour a été efficace pour diminuer la désinhibition d’un homme dément de
69 ans. L’effet bénéfique sur le CSI fut observé
dès la première semaine et il était toujours présent après trois mois de traitement26.
Quatre exposés de cas décrivent avec succès
l’emploi du citalopram dans les CSI en
démence. Le premier, publié en 2000, rapporte
le cas d’une patiente démente de 90 ans qui déshabillait des résidants de sexe masculin et
démontrait de l’agressivité physique depuis
deux ans. Les CSI de cette patiente ne répondaient pas à la paroxétine à raison de 20 mg/
jour, mais le citalopram 20 mg/jour a été très
efficace dès la première semaine, et la rémission
des symptômes persistait après neuf mois27.
Pour expliquer cette efficacité du citalopram
par rapport à la paroxétine, les auteurs ont émis
l’hypothèse d’une plus grande sélectivité du
citalopram sur le recaptage de la sérotonine27.
En 2006, un second cas d’amélioration des CSI
avec cette molécule a été publié. Il s’agissait d’un
homme bipolaire de 54 ans atteint d’un déficit
cognitif secondaire à la maladie de Parkinson.
Ce dernier passait des commentaires sexuels
inappropriés et faisait des attouchements aux
membres du personnel féminins. L’ajout du citalopram 20 mg/jour a permis d’améliorer les CSI
en cinq jours et cet effet était toujours présent
après deux semaines de traitement28.
En 2008, Tosto et coll. ont publié le cas d’un
homme de 55 ans avec une démence de type
Alzheimer et présentant des symptômes d’hypersexualité. Le citalopram 40 mg/jour a réussi à
réduire les CSI de manière importante et l’effet
bénéfique s’est maintenu pendant un an29.
Plus récemment, un auteur a publié le cas d’un
homme dément de 85 ans obsédé par du matériel pornographique. Il a lui aussi bien répondu
au citalopram 20 mg/jour30. Cependant, bien
que ces exposés aient démontré un effet positif
du citalopram au regard des CSI, l’étude de Bardell a découvert que ce dernier avait une efficacité limitée17.
En ce qui concerne les autres antidépresseurs,
la mirtazapine a été décrite comme partiellement
efficace dans un cas17. Pour ce qui est de la trazodone, elle a amélioré les CSI chez quatre hommes
de 62 à 72 ans atteints de démence. Les doses
quotidiennes employées variaient entre
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100 et 500 mg (doses divisées). La réponse a pro­
bablement été attribuable à l’effet calmant et sédatif, et non à l’effet antidépresseur en tant que tel31.
Enfin, l’antidépresseur tricyclique clomipramine s’est révélé efficace pour réduire les CSI
dans deux rapports de cas (doses variant entre
150 et 200 mg/jour)32. Cependant, l’utilisation
de cette classe de médicaments est habituellement découragée chez les patients âgés atteints
de démence en raison de ses effets indésirables5.
Les antipsychotiques
L’efficacité des antipsychotiques pour contrer
les CSI viendrait de leur capacité à bloquer la
dopamine et à élever les concentrations de la
prolactine15,16. Deux exposés de cas ont décrit
l’emploi avec succès de l’halopéridol pour des
comportements d’hypersexualité (doses de 1,5
et 4 mg/jour)33,34.
En ce qui concerne les antipsychotiques atypiques, la quétiapine 25 mg, administrée une fois
par jour, s’est révélée efficace en moins de deux
jours pour diminuer les CSI (masturbation
jusqu’au trauma des organes génitaux) d’un
homme de 85 ans atteint de démence et de parkinsonisme35. Cet effet s’est maintenu après deux
mois de traitement35. Un autre rapport de cas
décrit l’emploi de la quétiapine à une dose pouvant atteindre 75 mg/jour chez une femme de
61 ans avec démence à corps de Lewy qui tenait
des propos sexuels et se livrait à des attouchements sur sa belle-fille36. Les CSI ont cessé après
une semaine de traitement et ne sont pas revenus
au suivi après un mois36. Un seul rapport de cas
décrit l’emploi de l’olanzapine dans les CSI en
démence. Il s’agit d’un homme de 70 ans atteint
de démence de type Alzheimer à qui l’on a
donné de l’olanzapine à raison de 5 mg die. Cette
molécule a été efficace pour réduire le langage
explicite, les attouchements inappropriés à l’endroit de sa femme en public ainsi que les nombreuses tentatives pour avoir des rapports
sexuels avec elle durant la nuit37. Enfin, l’aripiprazole à raison de 30 mg/jour a réussi à réduire
de façon remarquable les commentaires sexuels
répétés (dont une demande pour une activité
sexuelle spécifique) d’un homme de 61 ans
atteint d’une démence fronto-temporale. Cela
faisait suite à de nombreux essais thérapeutiques
infructueux, notamment avec la sertraline
200 mg/jour, la paroxétine 40 mg/jour ainsi que
la rispéridone 3 mg/jour et la quétiapine 200 mg/
jour38. Aucun rapport de cas ne mentionne l’emploi de la rispéridone dans les CSI en démence
dans la littérature consultée.
Malgré le fait que tous les antipsychotiques
auraient une efficacité similaire pour réduire
les CSI en démence, les antipsychotiques atypiques sont généralement mieux tolérés en
gériatrie que les neuroleptiques conventionnels15,16. Cependant, dans l’ensemble, les bienfaits des antipsychotiques pour cette indication
sont modestes et souvent neutralisés par les
effets indésirables sérieux, dont la sédation, les
chutes, l’augmentation des effets indésirables
vasculaires cérébraux (AVC et ICT) ainsi
qu’une mortalité accrue globalement chez les
patients déments5,39.
Les inhibiteurs de la cholinestérase
Bien que cette classe de médicaments soit efficace
pour ralentir le déclin cognitif et qu’elle puisse
s’avérer utile pour améliorer certains SCPD, son
utilité dans le traitement des CSI a fait l’objet
de résultats contradictoires. Dans un exposé de
cas, la rivastigmine à raison de 3 mg per os bid a
permis de réduire les CSI (demandes incessantes pour avoir des relations sexuelles avec son
mari) d’une patiente de 72 ans avec démence
mixte40. Tout récemment, un rapport de cas a
décrit l’emploi avec succès d’un timbre de rivastigmine, ajusté jusqu’à la dose de 9,5 mg/jour
après un mois chez un homme de 81 ans atteint
de démence Alzheimer. Ce dernier avait une
augmentation de sa libido, émettait des commentaires sexuels inappropriés et voulait
constamment embrasser sa conjointe. Les
bénéfices du traitement étaient intacts après
trois ans41.
Par contre, l’usage de donépézil a conduit, au
contraire, à une augmentation des comportements d’hypersexualité, dans divers rapports
de cas42,43.
Selon la littérature consultée, aucun cas n’a été
publié sur l’emploi de la galantamine ou de la
mémantine pour cette indication.
Les anticonvulsivants
La gabapentine peut causer une réduction de la
libido, l’absence d’orgasme et un dysfonctionnement érectile5. Dans quelques exposés de cas,
on décrit l’efficacité de cette molécule pour
atténuer les CSI à des doses variant entre 900 et
2700 mg par jour44,45,46. L’usage de la carbamazépine aurait, quant à lui, été associé à des
niveaux de testostérone plus faibles chez les
jeunes femmes épileptiques et, dans des exposés de cas, on décrit son utilisation comme une
option pour les CSI en démence5. Dans l’un de
ces cas, on rapporte une efficacité de la carbamazépine chez un homme dément de 78 ans
qui se masturbait et touchait sans cesse sa
femme. Avec une dose de 200 mg/jour, les comportements se sont atténués d’environ 90 %
après trois semaines de traitement, selon son
épouse47. Un autre exposé de cas publié récemment décrit l’emploi de la carbamazépine à raison de 800 mg/jour chez un homme de 78 ans
atteint de démence fronto-temporale. Ce dernier avait des comportements hypersexuels et
faisait des avances au personnel et aux autres
résidants. Quelque temps après avoir atteint
une concentration plasmatique thérapeutique
de 25 μmol/L (n : 17-51 μmol/L), les CSI avaient
complètement cessé et ils n’étaient toujours pas
revenus après six mois48.
En ce qui concerne l’acide valproïque, la prégabaline et la lamotrigine, aucun cas ne semble
avoir été publié à ce jour pour des comportements d’hypersexualité en démence15,19. Les
effets indésirables de ces médicaments ou encore
leurs nombreuses interactions limitent souvent
leur utilisation en gériatrie. Pour cette raison, ils
ne sont utilisés que lorsque les CSI ne répondent
pas aux autres thérapies.
Traitements hormonaux
L’emploi des traitements hormonaux pour réduire
les CSI en démence demeure controversé
puisqu’ils induisent une castration chimique5,10.
Les antiandrogènes
L’acétate de cyprotérone (CPA) et l’acétate de
médroxyprogestérone (MPA) sont les deux
a nt ia nd rogènes les plus coura m ment
employés15,20. Le finastéride a aussi été utilisé
pour diminuer les CSI en démence. La logique
derrière l’utilisation de ces molécules dans les
CSI est sous-tendue par l’altération de la fonction sexuelle, provoquée par la diminution des
taux de testostérone16.
Le CPA est un stéroïde indiqué pour le traitement du cancer de la prostate. Il a pour effet de
bloquer la fixation de la dihydrotestostérone
(métabolite actif de la testostérone) aux récepteurs de la cellule prostatique cancéreuse.
Également, son effet progestatif/antigo­
nadotrope s’exerce par rétroaction sur l’axe
hypothalamo-hypophysaire en inhibant la
sécrétion de l’hormone lutéinisante (LH), ce
qui entraîne une diminution de la production
de testostérone testiculaire49.
Deux rapports de cas décrivent son emploi
pour la diminution des CSI en démence. Le premier est celui d’une femme de 49 ans avec
démence fronto-temporale, qui se masturbait
constamment dans des lieux publics. L’utilisation préalable d’antidépresseurs et d’antipsychotiques avait été vaine. Le CPA a été introduit à
raison de 50 mg/jour et ajusté graduellement
jusqu’à 100 mg/jour après trois semaines. Un
mois plus tard, les CSI avaient disparu et le médicament a été cessé après cinq mois sans qu’il y ait
réapparition des troubles de comportement50.
Dans le deuxième rapport de cas, le CPA a été
utilisé avec succès à faible dose (soit 10 mg/jour)
chez deux hommes (74 et 79 ans) atteints de
démence, qui présentaient des CSI et n’avaient
pas répondu à des sédatifs ou à des antipsychotiques. Les comportements sont réapparus lors
de tentatives pour réduire la dose51.
Le MPA, quant à lui, est un stéroïde progestatif
qui diminue les taux circulants de testostérone
grâce à différents mécanismes d’action, notamment par l’inhibition de la sécrétion des gonadotrophines, soit la LH (hormone lutéinisante)
et la FSH (hormone folliculostimulante)6,9. Ce
médicament est indiqué chez la femme comme
contraceptif, hormonothérapie substitutive,
pour les troubles menstruels ou encore pour le
traitement du cancer de l’endomètre ou du
sein52. Dans les CSI en démence, la réussite obte-
M. Julien (suite)
Après plus de six mois marqués par une
réduction notable de ses CSI sous sertraline
200 mg die, M. Julien a de nouveau des propos et des gestes à caractère sexuel envers
les intervenants, entre autres lors des soins
d’hygiène. Quelle serait alors l’option thérapeutique ? Bien qu’il n’y ait pas de consensus
sur le choix d’un médicament en particulier
après l’emploi d’un ISRS en première intention, il est décidé d’administrer un antiandrogène après discussion avec la famille
concernant les risques et les bénéfices. L’Androcur (CPA) est donc instauré à raison de
25 mg bid x 1 semaine, puis augmenté à
50 mg bid par la suite. Les CSI s’améliorent
grandement en une semaine, le patient
tolère bien le médicament et l’effet se maintient au suivi à trois mois.
nue avec l’utilisation de cet agent par voie parentérale a été décrite dans divers exposés de cas
et une petite série de cas con­trôlés5. Le MPA fut
utilisé avec succès chez 11 hommes déments
(entre 68 et 86 ans). Les doses variaient entre
100 mg par voie intramusculaire administrés
une fois par mois et 500 mg par voie intramusculaire administrés chaque semaine. Une
réponse positive a été observée en deux semaines
chez neuf patients et aucun n’a dû cesser le traitement en raison d’effets indésirables53-56.
Tout récemment a été publiée une autre série
de cas sur l’utilisation de hautes doses de MPA
pour diminuer les CSI, mais cette fois-ci par voie
orale. Ainsi, 10 hommes déments entre 65 et
93 ans ont reçu le MPA per os à des doses variant
entre 100 et 400 mg/jour. Un pourcentage de
70 % de ces patients n’avait pas répondu à un
essai antérieur avec un antidépresseur de type
ISRS; 60 % d’entre eux n’avaient pas répondu
à l’essai d’un antipsychotique et 40 %, à l’essai
d’un antipsychotique et d’un antidépresseur
ISRS. On a observé chez 7 patients sur 10 une
amélioration significative de leur comportement hypersexuel, sans apparition d’effets indésirables majeurs57.
Le finastéride, un inhibiteur de la 5 alpharéductase, empêche la production de dihydrotestostérone à partir de la testostérone. Les principaux effets indésirables de cette molécule sont
la diminution de la libido et le dysfonctionnement érectile. Ce médicament est indiqué chez
l’homme pour l’hypertrophie bénigne de la
prostate ainsi que pour le traitement de la calvitie
commune58. Dans une série de cas, on décrit son
utilisation pour traiter les CSI de 11 hommes
entre 73 et 87 ans, atteints de démence vasculaire. Tous les participants ont reçu le finastéride
à raison de 5 mg une fois par jour pendant
12 semaines. Les CSI ont disparu chez six
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I Pharmacothérapies proposées pour les CSI
(inspiré et adapté de l’article de Joller et coll5.)
patients après huit semaines de traitement59.
Les estrogènes
Les estrogènes (estrone, estradiol, diéthylstilbestrol) agissent de façon similaire au MPA,
c’est-à-dire en provoquant une baisse de la production de testostérone par la réduction de la
sécrétion pituitaire de la LH et de la FSH9. Un
rapport de cas décrit l’emploi du diéthylstilbestrol (DES) chez un homme de 94 ans avec
démence de type Alzheimer et antécédent de
néoplasie de la prostate, qui présentait des CSI.
Le DES fut instauré à raison de 1 mg die pendant deux semaines, puis augmenté à 1 mg bid
par la suite. Les comportements inappropriés
ont cessé après trois semaines de traitement60.
Une autre étude rapporte une amélioration
marquée des CSI chez 38 hommes âgés qui,
n’ayant pas répondu à un traitement par les
ISRS, ont reçu des estrogènes par voie orale
(0,625 mg/jour) ou par voie transdermique61.
Les analogues de l’hormone de libération
de la gonadotrophine (LH-RH)
Cette classe de médicaments provoque, pour
ainsi dire, une « castration chimique » complète6. Elle stimule d’abord la sécrétion de la LH
et de la FSH, conduisant à une augmentation
initiale des concentrations sanguines des hormones sexuelles. L’utilisation prolongée entraînera cependant une inhibition de la sécrétion
des gonadotrophines et, donc, une réduction
de la testostérone6. L’emploi de l’acétate de leuprolide à raison de 7,5 mg IM une fois par mois
est décrit dans un exposé de cas. Il s’agit d’un
patient de 43 ans atteint d’une démence frontale et d’un syndrome de Klüver-Bucy, et présentant une désinhibition sexuelle ne répondant pas à de hautes doses de pindolol. Les CSI
ont cessé après trois mois d’utilisation de cet
agent62. Rappelons que cette classe de médicaments coûte cher, soit quelques centaines de
dollars par injection, et que, pour maintenir
leur efficacité, ils doivent être utilisés de façon
continue5,15.
Autres médicaments
Divers autres médicaments, la plupart ayant des
effets antiandrogènes, ont été proposés pour le
traitement des CSI en démence. Mentionnons
entre autres la cimétidine, le kétoconazole et la
spironolactone, utilisés seuls ou en association.
Certains bêtabloquants ont aussi déjà été
employés (notamment le pindolol) pour cette
indication. Dans ce cas-ci, la réduction des CSI
serait secondaire à la diminution de l’effet adrénergique, réduisant ainsi l’agitation, l’agressivité
et les comportements inappropriés16. Toutefois,
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Classe de médicaments
Médicament à l’étude (formulation et dosage)
Antidépresseurs
ISRS
Paroxétine (PaxilMD, Paxil CRMD) 20 mg die
Citalopram (CelexaMD) 20 mg die*
Mirtazapine (RemeronMD, Remeron RDMD) 15-30 mg hs
Clomipramine (AnafranilMD) 150-200 mg hs
Trazodone (DesyrelMD, Desyrel DividoseMD) 100-500 mg die
Antipsychotiques
Halopéridol (HaldolMD) 1,5-4 mg po die
Quétiapine (SeroquelMD, Seroquel XRMD) 25-75 mg die
Olanzapine (ZyprexaMD, Zyprexa ZydisMD) 5 mg die
Aripiprazole (AbilifyMD) 30 mg die
Inhibiteurs de
la cholinestérase
Rivastigmine (ExelonMD) 1,5-6 mg po bid
Rivastigmine timbre (Exelon PatchMD) 9,5 mg/j
Donépézil (AriceptMD, Aricept RDTMD) 5-10 mg die
Anticonvulsivants
Gabapentine (NeurontinMD) 300-900 mg tid
Carbamazépine (TegretolMD) 200-800 mg/j
Antiandrogènes
CPA (AndrocurMD) 10-100 mg/j
MPA (Depo-ProveraMD) 100 IM 1x/mois à 500 mg IM 1x/semaine
MPA (ProveraMD) 100-400 mg po die
Finastéride (ProscarMD, PropeciaMD) 5 mg die
Estrogènes
Estrogènes conjugués (p. ex., PremarinMD) 0,625 mg die
Timbre transdermique (p. ex., EstradotMD) 0,05-01 mg/j
DES (Diéthylstilbestrol) 1 mg die à bid
Analogues de la LH-RH
Leuprolide (p. ex., EligardMD Lupron DepotMD) 7,5 mg IM/SC 1x/mois
Antagonistes
du récepteur H2
Cimétidine (TagametMD) 400-1600 mg/j (au coucher ou en doses divisées)
Antifongiques
Kétoconazole (NizoralMD) 100-200 mg po die
Diurétiques préservant
le potassium
Spironolactone (AldactoneMD) 12,5 mg die
Bêtabloquants
Pindolol (ViskenMD) 5-20 mg bid
Propranolol (InderalMD, Inderal LAMD) 40-80 mg bid
Légende : ISRS = inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine; AVC = accident vasculaire cérébral; ICT = ischémie cérébrale transitoire;
CPA = acétate de cyprotérone; MPA = acétate de médroxyprogestérone; IM = intramusculaire; DES = diéthylstilbestrol.
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les effets indésirables de ces médicaments ou
encore leur potentiel d’interactions limitent souvent leur utilisation en gériatrie5,15.
Effets indésirables potentiels
Nausées, insomnie, céphalées, effets gastro-intestinaux, transpiration, tremblements,
étourdissements, anxiété, hyponatrémie5,9,15
Sédation, augmentation de l’appétit, sécheresse de la bouche, gain de poids5
Hypotension orthostatique, tachycardie, prolongation de l’intervalle QT, sédation, tremblements, transpiration,
rétention urinaire, constipation, aggravation de la cognition, effets anticholinergiques5,9,15,19
Algorithme de traitement
À l’heure actuelle, il n’existe pas de consensus sur
l’ordre dans lequel il faut utiliser les diverses thérapies proposées pour réduire les CSI en
démence. Les données probantes appuyant des
traitements par des médicaments sont limitées
et les effets indésirables demeurent un aspect
important à prendre en considération. Le
tableau I résume les principaux médicaments
dont il est mention dans les études, ainsi que les
doses employées et les effets indésirables les plus
fréquemment rapportés.
Sédation, céphalées, bouche sèche, hypotension orthostatique, étourdissements, gain de poids, priapisme5,9,15
 risque AVC/ICT et décès en démence, sédation ou insomnie, symptômes extrapyramidaux, chutes,
effets anticholinergiques, étourdissements, hypotension orthostatique, tachycardie, syncope, gain de poids5,10
 risque AVC/ICT et décès en démence, somnolence, fatigue, céphalées, anxiété, symptômes extrapyramidaux38,64
Nausées, vomissements, diarrhées, douleur abdominale, étourdissements, incontinence urinaire, céphalées,
syncope, potentiel d’émergence d’une hypersexualité avec le donépézil5,10
Sédation, fatigue, confusion, dépression, ataxie, bouche sèche, étourdissements, tremblements, vision trouble, ataxie, œdème périphérique, gain de poids5,9,15,19
Sédation, effet anticholinergique, étourdissements, dépression, ataxie motrice, nausées, hyponatrémie,
syndrome de Stevens-Johnson, agranulocytose, chutes, gain de poids, hépatotoxicité5,9,15,48
Hépatotoxicité, fatigue, bouffées de chaleur, étourdissements, gain de poids, gynécomastie, galactorrhée, dépression, thromboembolie veineuse, moins bonne maîtrise du diabète5,6,9
Sédation, gain de poids, œdème, fatigue, bouffées de chaleur ou frissons, malaises, dépression,
étourdissements, glycémies élevées, insomnie, céphalées, thromboembolie veineuse, crampes musculaires,
dyspepsie, calculs biliaires5,6,9,57
Gynécomastie, étourdissements, éjaculation anormale5
Rétention liquidienne, dépression, gain de poids, féminisation, nausées, vomissements, changements d’humeur,
gynécomastie, effet thromboembolique (AVC, infarctus du myocarde, thromboembolie veineuse),
 risque de décès cardiovasculaire5,9,21,57
Hypogonadisme, douleurs dans les os, gynécomastie, ostéoporose, malaises, fatigue, gain de poids,
bouffées de chaleur, douleur au site d’injection5,6,9
Détérioration de la cognition, étourdissements, dyscrasies sanguines, céphalées, nausées, rash,
arthralgies, gynécomastie5,9,15
Sédation, étourdissements, céphalées, photosensibilité, troubles gastro-intestinaux, prurit, rash, hépatotoxicité5,19
Hyperkaliémie, gynécomastie, troubles gastro-intestinaux5,19
Fatigue, hypotension, bradycardie, bronchospasme5,9
* Un avis de Santé Canada, émis le 25 janvier 2012, stipule que l’antidépresseur Celexa (citalopram) ne devrait plus être prescrit à une dose supérieure
à 40 mg/jour à la suite des résultats d’une étude ayant démontré un risque d’allongement de l’intervalle QT relié à la dose.
Pour les patients de 65 ans ou plus, la dose maximale recommandée est de 20 mg/jour63. Recommandations de traitement
Tel que déjà mentionné, il n’existe pas, à l’heure
actuelle, de lignes directrices pour le traitement
pharmacologique des CSI chez les patients âgés
déments. Les recommandations sont basées sur
les avis des différents experts reposant sur leurs
expériences cliniques, sur les informations disponibles à ce jour ainsi que sur les différents
effets indésirables liés aux molécules5,6,7. Plusieurs auteurs semblent toutefois appuyer l’emploi d’un antidépresseur de type ISRS en première intention de traitement des CSI en
démence6,57. Cette classe de médicaments est
généralement bien tolérée et sécuritaire en gériatrie. De plus, ces agents s’administrent une fois
par jour et comportent peu d’interactions médicamenteuses57. Lorsqu’il y a échec avec cette
mesure, différentes options sont envisagées.
Dans un article paru en 2008 dans la revue The
American Journal of Geriatric Pharmacotherapy,
Guay propose d’ajouter à l’ISRS une thérapie
antiandrogène (CPA en premier, sinon MPA par
voie orale) ou de le remplacer par cette thérapie. Cet
auteur recommande des doses un peu plus élevées
que ce qui est mentionné dans les rapports de cas,
soit 50-200 mg/jour en deux doses divisées pour le
CPA et 100-500 mg/jour pour le MPA par voie
orale. L’option du MPA par voie intramusculaire
administré une fois par semaine peut aussi être
considérée. En cas d’intolérance ou d’échec avec ce
traitement, il suggère un essai avec les estrogènes
par voie orale (éthinylestradiol 0,05-0,10 mg die ou
estrogènes conjugués 0,625-1,25 mg die) ou sous
forme de timbre transdermique (éthinylestradiol
0,05-0,10 mg/jour). Ainsi, les analogues de la
LH-RH (premier choix) et les estrogènes (deuxième choix) seront réservés à la toute dernière
ligne de traitement. Chez les patients inobservants,
il recommande d’utiliser le MPA par voie intramusculaire en premier lieu, sinon d’ajouter un
timbre transdermique d’estrogènes appliqué sur
une région de la peau non accessible au patient, ou
de le remplacer par ce timbre. En phase aiguë, c’està-dire quand le patient présente un comportement
agressif physiquement ou menaçant, le MPA intramusculaire sera préféré6.
D’autres auteurs suggèrent plutôt d’utiliser un
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antipsychotique atypique comme deuxième
ligne de traitement des CSI en démence lorsqu’il
y a eu échec avec un ISRS, particulièrement si le
patient présente des symptômes psychotiques
concomitants, tels que des hallucinations ou du
délire57. En troisième ligne de traitement, on
trouve les estrogènes, les analogues de la LH-RH
et les antiandrogènes. Toutefois, puisque les
estrogènes présenteraient un risque thromboembolique et de rétention liquidienne non négligeable, en plus d’entraîner la féminisation des
patients masculins (ce que ne font pas les progestatifs, tels que le MPA), et que les analogues de la
LH-RH ne sont disponibles qu’en injections coûteuses, ces auteurs ont priorisé l’emploi de MPA
par voie orale comme troisième ligne de traite-
ment chez les 10 patients de leur étude57.
Enfin, un autre auteur a pour sa part suggéré
une approche de traitement basée sur la symptomatologie du patient pour orienter les choix de
traitement des CSI en démence. Selon lui, si le
patient présente des symptômes d’ordre psychotique, un antipsychotique sera tenté en premier.
Si des comportements obsessifs sont observés, un
ISRS sera utilisé. En cas de manie, on choisira un
anticonvulsivant et, si le patient est confus, on
tentera en premier lieu un inhibiteur de la cholinestérase. En cas d’échec à ces essais pharmacologiques, il propose un antiandrogène. En fin de
compte, les autres thérapies (p. ex., les bêtabloquants ou les antiandrogènes non hormonaux)
constitueront la dernière ligne de traitement19.
Conclusion
Les CSI demeurent l’un des SCPD les moins bien
compris et les plus difficiles à traiter chez les
patients âgés déments. La distinction entre un
mode d’expression normal du désir sexuel et une
désinhibition sexuelle franche peut être difficile
FC
à faire par le clinicien et demande une évaluation
rigoureuse de la part de toute l’équipe multidisciplinaire. Lorsque l’approche non pharmacologique ne donne pas les résultats escomptés, les
traitements médicamenteux peuvent être
employés, mais le manque de données probantes
quant à leur efficacité et à leur innocuité pour
cette indication rend ardues les prises de décision pour l’ensemble de l’équipe traitante.
Des études de plus grande envergure, prospectives, menées chez un plus grand nombre de
patients (incluant des femmes), randomisées et
contrôlées par placebo, seront nécessaires afin
de déterminer avec plus de précision la place des
divers traitements pharmacologiques dans le
traitement des CSI chez les patients âgés
déments. Les recherches futures devraient aussi
inclure des moyens de détecter plus rapidement
les CSI, également de les prévenir, afin d’améliorer la qualité de vie des patients et de réduire le
fardeau pour les soignants.■
Les références sont disponibles dans la version
en ligne de cet article.
QUESTIONS DE
Répondez en ligne sur www.professionsante.ca,
section eCortex; rechercher Québec Pharmacie, juillet-août 2014.
Date limite : 9 août 2015. Donne 4 UFC.
5. Vrai ou faux ? Différentes causes peuvent expliquer l’apparition
des CSI chez les patients âgés déments, notamment les facteurs
neurologiques, hormonaux, biochimiques, psycho et neuropsychologiques, sociaux, ainsi que certains médicaments.
AVrai
BFaux
6. Parmi les énoncés suivants concernant les principes de prise en
charge d’un patient dément avec CSI, lequel est vrai ?
A Une histoire complète et rigoureuse du passé sexuel du patient n’est pas
un élément à considérer dans l’évaluation initiale.
B Il est primordial d’évaluer la compétence d’un patient dément à s’engager
dans une relation sexuelle.
C L’abus d’alcool ou les traits de personnalité hypersexuelle ne font pas
partie des diagnostics différentiels lorsqu’on examine l’histoire antérieure
d’un patient avec sa famille.
D Le delirium n’a souvent pas de lien avec les CSI.
E Aucun examen de laboratoire n’est requis lorsqu’on évalue un patient
pour un CSI.
7. Parmi les énoncés suivants concernant le traitement des CSI,
lequel est vrai ?
A Peu d’études ont été menées sur l’emploi des méthodes non pharmacologiques pour le traitement des CSI en démence. En revanche, la créativité
donne souvent de bons résultats.
B Plusieurs thérapies se sont révélées efficaces et sécuritaires dans le
traitement des CSI.
C Les antidépresseurs de la classe des ISRS devraient être réservés aux
problèmes de comportements verbaux à caractère sexuel, alors que
l’hormonothérapie serait plus efficace en cas de CSI avec agressivité.
D Les antipsychotiques peuvent être employés chez certains patients
déments avec CSI puisque leur efficacité et leur innocuité ont été
démontrées dans cette population.
E Tous les patients présentant un CSI devraient recevoir un inhibiteur
de l’acétylcholinestérase.
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QUÉBEC PHARMACIE
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8. Parmi les énoncés suivants concernant les solutions de rechange
pharmacologiques pour les traitements des CSI, lequel est vrai ?
A La prégabaline a démontré son efficacité pour réduire les CSI dans
plusieurs études de petite envergure.
B L’emploi des traitements hormonaux pour réduire les CSI demeure
controversé en raison du fait qu’ils induisent une castration chimique.
C La trazodone est généralement efficace à petite dose pour réduire les CSI.
D Le kétoconazole et la spironolactone peuvent être employés de façon
sécuritaire en gériatrie pour réduire les CSI.
E Il a été démontré que des doses de citalopram supérieures à 20 mg/jour
peuvent être employées dans cette population puisque les effets
antiobsessifs et antilibidinaux seraient en lien avec la dose employée.
9. Parmi les affirmations suivantes, laquelle est fausse ?
A Il n’existe pas, à l’heure actuelle, de consensus sur l’ordre dans lequel il faut
utiliser les diverses thérapies proposées pour réduire les CSI en démence.
B La plupart des auteurs s’entendent pour dire qu’un antidépresseur de type
ISRS devrait être tenté en première intention de traitement pour cette
indication.
C Un auteur propose une approche de traitement basée sur la symptomatologie du patient afin d’orienter le choix de traitement. Par exemple, utiliser
un anticonvulsivant si l’on suspecte une manie.
D Comme tous les traitements pharmacologiques des CSI en démence ont
des indications non officielles, il importe d’avoir une communication claire
avec les patients ou les membres de leur famille au sujet des avantages et
des risques potentiels que représentent ces traitements.
E Les femmes font de plus en plus partie des études pour les CSI en
démence.
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