Naples 2060, vers la réactivation d`un territoire volcanique
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Naples 2060, vers la réactivation d`un territoire volcanique
ESA - Ecole Spéciale d’Architecture DES - Diplôme d’Etudes Supérieures Villes en Projet Durable et Architecture des Milieux Roberto D’ARIENZO Naples 2060 Vers la réactivation d’un territoire volcanique Directeur d’Etudes Jury Chris YOUNES Stéphane BONZANI Isabel HERAULT Alain PELISSIER Didier REBOIS Chris YOUNES PARIS - SEPTEMBRE 2009 1 INTRODUCTION / INTRODUCTION 6 PARTIE 1 : SUR LE CONTEXTE 8 CHAPITRE 1. NAPLES CAPITALE : LES RAISONS DE L’HISTOIRE 9 1.0 Introduction / Introduction 9 1.1 1860 et l’unification de l’Italie : vers la ville moderne 1.1.1 Nouvel Etat, nouvelle Capitale 1.1.2 Le prestige de l’ancienne métropole bourbonienne 1.1.3 Le déclin progressif et le « Ventre de Naples » 1.1.4 Le XIX siècle et l’époque contemporaine 10 10 10 11 12 1.2 Brève histoire de la fondation de Naples 1.2.1 Les contexte historico - géographique de la fondation 1.2.2 La « Grande-Grèce » et les colonisations : Palaepolis et Neapolis 1.2.3 Le choix du site : entre nécessités et symboles 1.2.4 Une ville souvent capitale 14 14 15 16 17 1.3 Les problématiques actuelles 1.3.1 Naples métropole : entre ressources et résistances 1.3.2 La criminalité 1.3.3 Le taux de chômage 1.3.4 Les déchets 1.3.5 L’expansion incontrôlée 1.3.6 La congestion urbaine 18 18 18 19 19 20 21 1.4 Des idées et des projets 1.4.1 Une somme de solutions partielles 1.4.2 Vers un regard exhaustif 21 21 22 CHAPITRE 2. METRONAPOLI : LE DECRYPTAGE D’UNE OCCASION LOCALE 24 2.0 Introduction / Introduction 24 2.1 Le nouveau réseau métropolitain : 100 stations 2.1.1 Naples, une « ville poreuse » 2.1.2 La restructuration des transports publics existants : trois instruments majeurs 2.1.3 Le Consortium « Napolipass » et le titre de transport « Unique » 2.1.4 Le réseau des 100 stations 24 24 25 26 27 2.2 La ligne 1 : le métro dell’arte 2.2.1 Une double spécificité 2.2.2 L’hétérogénéité urbaine et la cohérence artistique 2.2.3 Le métro et les changements de la ville 28 28 28 30 2.3 Origine du métro de Naples 2.3.1 Les expérimentations et les primats durant le royaume des Bourbones 2.3.2 Lamont Young 30 30 31 2.4 Enquête dans le métro 2.4.1 Les déplacement urbains et leur perception 2.4.2 Les portes de la ville 2.4.3 Des nouveaux rapprochement urbains : ville réseau et temporalités 2.4.4 Le phénomène de perception de la ville 2.4.5 Les interviews aux usagers du métro de Naples 2.4.6 Le rôle stratégique du « Métro dell’Arte » 34 34 34 35 36 38 39 2.5 Vers la durabilité 2.5.1 Un scénario pour la ville de Naples 2.5.2 La région de Naples et la question de l’énergie 2.5.3 Un nouveau regard orienté vers le territoire 40 40 42 44 CHAPITRE 3. MARE NOSTRUM ET CAMPANIA FELIX : LA COMPREHENSION DU TERRITOIRE 45 2 3.0 Introduction / Introduction 45 3.1 Durabilité et Développement Durable 3.1.1 Le concept de durabilité 3.1.2 Le développement durable 3.1.3 Les facteurs critiques du développement durable 3.1.4 Les cinq dimensions du développement durable 46 46 47 48 51 3.2 Climat - Ressources – Civilisation 3.2.1 La gestion des ressources et les civilisations anciennes 3.2.2 Le CO2 et l’effet de serre : la part de la nature et celle de l’homme 3.2.3 L’activité des hommes et les répercussions sur l’environnement 3.2.4 Optimum et pessimum climatiques 51 51 52 54 54 3.3 Environnement : de la Nature au Paysage 3.3.1 Le résultat d’une relation synergique 3.3.2 Le paysage politique et le paysage habité 3.3.3 Le paysage de l’ingénieur 55 55 57 58 3.4 Ville et Territoire 3.4.1 Les territoires aujourd’hui : les villes centripètes et les villes centrifuges 3.4.2 La libération du territoire : les prothèses technologiques 3.4.3 La ville contemporaine el les facteurs d’agression du territoire 59 59 60 61 3.5 Ville et Energie 3.5.1 Les ressources d’énergie, le fonctionnements de la ville et les formes urbaines 3.5.2 Les villes contemporaines comme systèmes ouverts : la dissipation d’énergie 3.5.3 L’évolution des ressources énergétiques : états de crise et nouvelles ressources 3.5.4 L’apparition des ressources fossiles : la ville verticale et la ville horizontale 3.5.5 Les cinq paradigmes du rapport actuel entre les villes et l’énergie 3.5.6 Les « sustaining technologie » et les « disruptive technologie » 62 62 63 64 65 67 68 3.6 Energie renouvelable 3.6.1 Ressources épuisables et ressources renouvelables 3.6.2 Energie hydraulique 3.6.3 Energie géothermique 3.6.4 Energie éolienne 3.6.5 Energie solaire 3.6.6 Energie des biomasses 70 70 71 72 72 73 74 3.7 Ville renouvelable 3.7.1 Le système ville 3.7.2 La ville durable 3.7.3 Trois approches envers le territoire 3.7.4 L’approche territorialiste pour une Révolution Energétique Renouvelable 3.7.5 Les cinq aspects de la ville renouvelable 74 74 75 76 77 79 3.8 Des échelles entrecroisées 3.8.1 La décomposition de la ville en éléments et en relations 3.8.2 Echelle 1 : le bâti 3.8.3 Echelle 2 : le quartier 3.8.4 Echelle 3 : l’urbain 3.8.5 Vers un système écologique en équilibre : la relation avec les éléments naturels 3.8.6 Synergie urbaine 80 80 80 82 83 84 85 PARTIE 02 : SUR LE PROJET 89 CHAPITRE 4. PHLEGRAIOS : LE CHOIX D’UNE TECHNOLOGIE FEDERATRICE 90 4.0 Introduction / Introduction 90 4.1 Volcans et durabilité : la fin d’un oxymore ? 4.1.1 Une nouvelle synergie territoriale 4.1.2 Un nouveau regard sur les volcans 90 90 91 4.2 Qu’est-ce que la géothermie 4.2.1 Les caractéristiques de la géothermie 4.2.2 La structure du globe terrestre et les ressources géothermiques 4.2.3 Les différents types de géothermie 4.2.4 Exploitation historique de la géothermie 92 92 93 94 95 3 4.3 La géothermie dans le monde 4.3.1 Le gradient géothermal et les gisements mondiaux 4.3.2 Les deux filières principales de la géothermie dans le monde 97 97 97 4.4 La géothermie en Italie 4.4.1 Un Pays entre deux plaques de la lithosphère 4.4.2 Des recherches prometteuses 98 98 98 4.5 La géothermie à Naples : Vésuve et Champs Phlégréens 4.5.1 La Campanie et ses volcans récents 4.5.2 Le « Campi-Flegrei-Deep-Drilling-Project » 99 99 100 4.6 Les technologies de la géothermie 4.6.1 Les technologies spécifiques et les usages dérivés 4.6.2 La centrale géothermique 4.6.3 La pompe à chaleur 101 101 101 102 CHAPITRE 5. NAPLES SOUTERRAINE : LE CHOIX DES LIEUX DU PROJET 105 5.0 Introduction / Introduction 105 5.1 Une reterritorialisation 5.1.1 Déterritorialisation et reterritorialisation 5.1.2 L’identité du territoire : permanences et invariances 5.1.3 Le « génie du lieu » 5.1.4 Les villes et leur cadre géographique 106 106 106 107 108 5.2 Un territoire volcanique 5.2.1 Les deux aires volcaniques 5.2.2 Les Champs Phlégréens 5.2.3 Le Vésuve 108 108 109 110 5.3 Naples et son « Genius Loci » 5.3.1 Le Naples avant Naples 5.3.2 Analyse 1 : la morphologie des lieux 5.3.3 Analyse 2 : la morphologie urbaine et celle architecturale 111 111 112 114 5.4 L’Italie souterraine 5.4.1 Un paysage articulé 5.4.2 Un réseau magique 5.4.3 Un réseau aquatique 5.4.4 Un réseau funéraire 5.4.5 Un réseau archéologique 5.4.6 Un réseau écologique 5.4.7 Un réseau primitif 5.4.8 Un réseau arabe 115 115 116 116 117 117 117 118 118 5.5 La géologie napolitaine et la pierre de tuf 5.5.1 La morphologie volcanique : une ossature et un manteau 5.5.2 L’abondance du tuf et la localisation de la ville 5.5.3 Les caractéristiques du tuf jaune napolitain 5.5.4 Différentes méthodes d’extraction 119 119 120 120 121 5.6 Les grottes de Naples dans l’histoire 5.6.1 Une symbiose perpétrée 5.6.2 Les nécessités de l’histoire 5.6.3 Un déséquilibre dangereux 122 122 122 124 5.7 Différentes origines pour les grottes de Naples 5.7.1 Les deux catégories principales de cavité 5.7.2 Les carrières suburbaines 5.7.3 Les infrastructures hydrauliques urbaines 5.7.4 Une continuité physique brisée 124 124 124 125 126 5.8 Les grottes de Naples entre réalité et légende 5.8.1 Des liens ancestraux 5.8.2 Des mythes, des croyances et des divinités 5.8.3 Une légende métropolitaine : le monaciello 126 126 127 128 5.9 Les grottes de Naples dans les chroniques quotidiennes 5.9.1 Guerre et camorra 5.9.2 Désastres contemporains et déversoirs provisoires 128 128 129 4 CHAPITRE 6. NAPLES 2060 : L’ENTRELACEMENT DES DONNEES 131 6.0 Introduction / Introduction 131 6.1 Un projet en trois phases 6.1.1 Réactualiser les données et les relations locales 6.1.2 Retisser les possibilités latentes 6.1.3 Un indispensable phasage temporel et programmatique 6.1.4 La porosité sociale 6.1.5 Un nouveau regard envers les grottes 132 132 133 133 134 134 6.2 Phase 01 : de l’énergie urbaine 6.2.1 Profiter d’une occasion latente 6.2.2 L’aire industrielle de Bagnoli 6.2.3 Le cratère de Agnano 6.2.4 Le rôle névralgique de la centrale géothermique 135 135 136 136 137 6.3 Phase 02 : les « Centres d’Architecture » 6.3.1 De parasites à catalyseurs autonomes 6.3.2 Le Monte Echia 6.3.3 Le Vallone de San Rocco 6.3.4 Structuration d’un Centre d’Architecture 138 138 139 140 142 6.4 Phase 03 : de l’énergie domestique 6.4.1 Une déclination domestique de la virtuosité urbaine 6.4.2 Situation 1 : les zones périphériques étalées 6.4.3 Situation 2 : les quartiers centraux denses 142 142 143 143 6.5 Naples durable 6.5.1 Une ville durable en cinq points 6.5.2 Le Passé, le Présent et le Futur 144 144 145 REFERENCES Ouvrages principaux Ouvrages sur Naples Autres ouvrages consultés Références Internet 146 146 149 150 151 5 Introduction / Introduction Ancienne capitale de royaumes divers désormais détrônée, accablée aujourd’hui par des nombreuses problématiques sociales et territoriales, intéressée par des projets ambitieux autant que partiels, tournant le dos à un territoire qui constitue un unicum dans le panorama des villes italiennes, Naples se présente aujourd’hui comme un laboratoire idéal pour concevoir un développement durable à l’échelle locale. A l’occasion de la réalisation du nouveau réseau métropolitain qui positionne la ville dans un rôle névralgique au sein de toute la région et dont la finalisation est perçue comme stratégique par ses propres habitants, « Naples 2060 » est un projet qui vise à mettre en oeuvre une durabilité urbaine et sociale. Lorsque plus des trois quart de la population mondiale vivront en des milieux urbanisés, et face à une crise énergétique globale qui se traduit par une forte dépendance de la Campanie des importations d’électricité nécessaires à son fonctionnement, la redécouverte du territoire comme ressource énergétique et l’exploitation du potentiel géothermique de ses volcans pour la production d’électricité verte à l’échelle urbaine, permet de transformer le « Métro dell’Arte » en un système de transport vertueux, et d’en faire ainsi un clair manifeste pour le développement futur de la ville. Ce fil vert continu, qui a l’ambition et le pouvoir de relier des parties de Naples très hétérogènes les unes des autres, devient le moyen commun pour re-venir en contact avec les traces laissées par l’homme - bâtisseur sous les nombreux strates de la baie, à savoir les grottes ancestrales qui depuis trois millénaires ponctuent ses profondeurs, et qui se proposent aujourd’hui comme une incontournable ressource pour recréer un équilibre prospectif entre la ville contemporaine et ses origines. Transformées pour l’occasion en des centres d’agrégation et d’échange au seins de l’agglomération, elles deviennent les berceaux pour l’acquisition des savoirs environnementaux et des principes énergétiques fondamentaux ; elles informent et préparent en autre le transfert de ceux-ci dans les milieux domestiques, ou la géothermie elle-même, adaptée efficacement aux différents tissus de la ville, peut garantir un habitat durable. 6 Projet réalisé en trois phases distinguées, « Naples 2060 » vise à considérer de manière nouvelle les différents héritages naturels et historiques de la ville ainsi que son potentiel social poreux, afin de les conjuguer en un ensemble conscient, synergique et surtout opérationnel. Ancient capital of various kingdoms now overcome, overwhelmed today by the many social and regional issues, interested by ambitious projects that provided some partial solutions, turning away from a territory which represent an unicum in the panorama of Italian cities, Naples is today as a ideal laboratory to design sustainable development at the local level. At the completion of the new subway network that positions the city in a vital role within the region and whose completion is seen as strategic by its own people, "Naples 2060" is a project which aims to implement a social and urban sustainability. When more than three quarter of the world population will live in urban environments, and facing a global energy crisis which is reflected by a strong dependence of Campania from imports of electricity necessary for its operations, the rediscovery of the territory as energy source and the utilisation of the volcanoes geothermal potential in the production of green electricity to the urban scale, can transform the "Metro dell'Arte" in a virtuous transport system, and can make it a clear manifest for the future development of the city. This green line, which has the ambition and the power to connect parts of Naples very heterogeneous from each others, becomes the common means to re-come into contact with the traces left by mans - builders in many strata Bay, the ancestral caves that punctuate its depths since three millennia, and is now offering an essential resource for recreate a prospective balance between the contemporary city and its origins. Transformed by the project in some centres of aggregation and exchange inside the metropolitan area, they become the cradles for the acquisition of basic environmental knowledge and principles about energy, they inform and prepare the transfer thereof within the household, where the geothermal itself, efficacy adapted to the different tissues of the city, can ensure a sustainable habitat. Project in three distinguished phases, "Naples 2060" aims to consider anew the natural and historical heritages of the city and its porous social potential to combine into a conscious, synergistic and operational set. 7 Partie 1 : sur le contexte 8 Chapitre 1. Naples Capitale : les raisons de l’histoire 1.0 Introduction / Introduction Naples, souvent capitale illuminée de royaumes divers et lointains, détrônée suite à l’unification du Pays en 1860, se présente aujourd’hui fortement accablée par des nombreuses problématiques, de nature sociale et territoriale, qui en rythment son histoire quotidienne et contribuent de la sorte à assombrir son passé glorieux. La ville est intéressée, pour autant, par des projets d’envergure, qui malheureusement traitent seulement d’aspects circonscrits de sa réalité complexe, et qui la plupart des fois tournent le dos aux spécificités locales exceptionnelles, qui rendent son territoire un unicum dans le panorama des villes italiennes. Le choix, alors, d’appréhender cette complexité par le biais de son nouveau réseau métropolitain en cour de réalisation, se base justement sur la nature même de cette infrastructure qui, de manière inédite, renoue, même si le plus souvent invisiblement, toutes les parties de la ville contemporaine, en nous permettant de la sorte de les retisser selon une nouvelle logique : celle d’un développement durable à l’échelle locale. Naples, often illuminated capital of various and distant kingdoms, overcome following the unification of the country in 1860, is now heavily burdened by numerous problems, social and territorial cohesion, which punctuate the story daily and contribute to the so as to darken its past glory. The city is concerned, however, by large-scale projects, which unfortunately cover only limited aspects of its complex reality, and most turning away from the local circumstances, which makes it a unique territory in the panorama of Italian cities. The choice, then, to understand this complexity through its new metro network under construction, is based precisely on the nature of this infrastructure, so new, renewed, even if mostly invisible, all parts of the contemporary city, allowing us to rethink them according to a new logic: that of sustainable development at the local level. 9 1.1 1860 et l’unification de l’Italie : vers la ville moderne 1.1.1 Nouvel Etat, nouvelle Capitale Le 7 Septembre 1860 la ville de Naples, avec les provinces méridionales, était incluse dans un nouvel Etat naissant, l’Italie. La nouvelle capitale choisie était Rome, malgré le fait que, à l’époque, la ville se présentait, selon les termes de Jean-Noël SCHIFANO, « parcourue de troupeaux de moutons et de troupes de prêtres » ; en même temps, à 200 kilomètres au sud, une vraie capitale, liée à toutes les grandes villes européennes, était détrônée 1 . Après les premiers instants d’enthousiasme, exprimés par une foule en délire qui accompagnait l’entrée et la pénétration de Garibaldi en ville ainsi que son discours aux citoyens, il est apparu clairement que la perte du rôle de capitale allait avoir des conséquences néfastes pour le futur de la ville 2 . Cette perte, en fait, allait provoquer, d’un coté, la disparition de nombreuses avantages dont jouissez la noblesse, et, de l’autre, l’appauvrissement de toute une partie de la population qui vivait et gagnait grâce à la présence de la cour royale, en un condition de symbiose et de parasitisme ; d’autre part, les usines et les activités productives alors actives en ville étaient, pour la plupart, soutenues et encouragées par les rois Bourbones eux même, et leurs existence allait, de ce fait, être mise en péril. 1.1.2 Le prestige de l’ancienne métropole bourbonienne Durant la domination espagnole, et en particulier sous l’égide de la dynastie des Bourbones, derniers rois de Naples, la ville avait perdu son caractère provinciale et était devenue une vraie métropole ; elle était devenue la capitale du Royaume des Deux Siciles, qui comptait toute l’Italie méridionale, y compris la grande île méditerranéenne. Naples avait donc été intéressée par une période de grands changements et innovations, soit sur le plan culturel, soit sur celui technique et industriel. Il suffit, afin d’en saisir l’envergure, de rappeler quelques-uns parmi les plus importants primats qui ont fait du royaume lui-même un lieu 1 2 SCHIFANO Jean-Noël, 2004. Sous le soleil de Naples. Gallimard, Paris DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, 2006. Breve storia di Napoli. Pacini, Pise 10 d’avant-garde : l’inauguration, en 1839, de la première ligne ferroviaire ; la mise au point du premier système d’illumination urbain au gaz ; la réalisation du premier programme d’habitat social ; l’ouverture des premiers observatoires sismologique et astronomique ; la construction du plus important nombre de théâtres et d’écoles de musique dans une ville 3 . Les ouvrages défensives, désormais inutiles aux nouvelles techniques de guerre, avaient étés détruites, et des nouvelles rues avaient étés tracées de manière à ouvrir enfin la ville à son territoire. Pour des nécessités d’expansion, en autre, des nouveaux quartiers avaient été créés dans des zones limitrophes, avec de projets ambitieux, signés par des architectes et des urbanistes de grande renommé. Tout ces changements, accompagnés par des ouvrages d’embellissement à l’intérieur du tissu existant, avaient fait de Naples, quant au nombres d’habitants, la troisième ville en Europe après Londres et Paris, sans doute la plus grande ouverte directement sur la mer 4 , et une des plus importantes étapes touristiques européennes 5 . 1.1.3 Le déclin progressif et le « Ventre de Naples » La perte de ce rôle, par conséquence, à inauguré une longue période de déclin, tant sur le plan économique que sur celui sociale. La ville, en raison de son ancien rôle, se retrouvait devant une double alternative : soit déclancher un vrai et moderne développement industriel au sein du nouveau Pays auquel désormais elle appartenait, soit régresser progressivement en dépensant les ressources accumulées jusqu’alors. Durant les décennies qui ont suivies l’unification d’Italie, le taux de croissance de Naples a ainsi été le plus bas par rapport à celui des autres villes industrielles du nord du Pays, telle que Milan, Turin ou Gêne, avec une activité productive peu 3 http://www.realcasadiborbone.it/ita/archiviostorico/primati.htm 4 NITTI Francesco Saverio, 1995. La città di Napoli. Studi e ricerche su la situazione economica e la possibile trasformazione industriale. Caliceditori, Naples 5 ROSI Massimo, 2004. Napoli entro e fuori le mura. Le trasformazioni urbanistiche, demografiche e territoriali di un’antica capitale rimasta per troppo tempo vincolata dalle sue stesse mura. Newton & Compton, Rome 11 importante si comparée au secteur de la construction immobilière ; ceci à démonstration du fait qu’elle demeurait une ville habitée de gens riches, mais non pas une ville riche en elle-même 6 . Le résultat de cette situation critique a été, entre autre, l’aggravation des conditions hygiéniques à l’intérieur de la ville, ce qui allait emmener, en 1884, à une grave épidémie de choléra. Cette épidémie, décrite superbement par Matilde SERAO dans son enquête journalistique rédigée durant les journées mêmes de désordres citadins 7 , a été spécialement violente dans les quartiers « bas » de la ville, ceux qui se trouvaient entre le socle de la fondation gréco-romaine et la zone littorale de l’ancienne plage ; ces quartiers, appelés par SERAO elle-même le « ventre de Naples », étaient caractérisés par des conditions de vie précaires, surtout à cause du taux de pauvreté des habitants, de la grande concentration de ceux-ci, et de l’inexistence d’un système de récolte et de séparation des eaux. Le plan de réaménagement qui a fait suit à cette urgence a été mis en œuvre à travers la transformation et l’éventrement du tissu ancien de la ville, ainsi qu’avec la construction de nouveaux quartiers, surtout sur les collines jusqu’alors agricoles, choisies pour la salubrité de l’air. Ce plan à, entre autre, emmené à la séparation horizontale des classes sociales, autrefois réparties verticalement au sein d’un même immeuble, selon un rapport proportionnel entre hauteur et prestige familial 8 . Une condition, celle-ci, qui a favorisé la diffusion de la camorra qui, débarquée à Naples lors de la domination espagnole du XVI siècle, avait trouvée, en ville, les conditions idéales pour sa survie et son développement 9 . 1.1.4 Le XIX siècle et l’époque contemporaine A cette situation difficile, caractérisée par une économie basée presque complètement sur le secteur édile et qui faisait ainsi de Naples, au sein de l’Italie, une ville de consommation plutôt que 6 7 8 9 NITTI Francesco Saverio, op. cit. SERAO Matilde, 1988. Il ventre di Napoli. Gallina, Naples DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, op. cit. SCHIFANO Jean-Noël, op. cit. 12 de production, la loi du 1904 a répondu avec un vrais plan de « renaissance économique » 10 , à déclencher à travers la réalisation de nouveaux complexes industriels aux deux extrémités du tissu urbain ; ceux-ci, construit donc au-delà de la colline du Pausilippe vers les Champs Phlégréens, et dans la plaine marécageuse vers le Vésuve, ont par la suite conditionnés fortement l’étalement de la ville sur le territoire, jusqu’à l’époque contemporaine. Après une période presque d’inactivité due à la première guerre mondiale, le régime fasciste à promu de nombreux projets administratifs, de réaménagement et de construction, visant à faire de Naples la troisième ville italienne avec plus d’un million d’habitants. Les destructions causées par la deuxième guerre mondiale, ensuite, ont transformée la structure physique et sociale de la ville ; ceci s’est produit, tout d’abord, à travers la mutation de l’économie de proximité en une activité de contrabbando, et, ensuite, à travers une importante activité de spéculation immobilière, guidée par les administrations locales en accord avec les propriétaires et les entrepreneurs. Le résultat de cette construction sauvage a été celui d’une profonde mutation de la physionomie de la ville et de ses paysages ; les collines et les moindres zones libres ont été attaquées et recouvertes de construction, tout en gardant leur primitive trame viaire qui s’est, de ce fait, démontrée inadéquate. L’activité de certain constructeur, liée à la réalisation de bâtiments érigés dans des endroit névralgique de la ville et qui se sont, de se fait, imposés dans son image millénaire, a marquée la physionomie de Naples comme l’avaient fait autrefois l’œuvre des plus importants architectes et urbanistes. Le plan urbain de la ville du 1958, à travers la réalisation des quartiers sociaux, a, de ce point de vue, ultérieurement aggravé la situation en créant de vrais ghettos sans aucune intégration, soit-elle sociale ou urbaine, nonobstant la présence, par fois, de projets architecturaux de qualité. Le tremblement de terre du 23 Novembre 1980, célébré dans la célèbre exposition Terra Motus installée aussi au Grand Palais de Paris en 1987, à emmené, selon certain chercheurs 11 à une transformation anthropologique des napolitains eux-mêmes. La successive croissance 10 11 NITTI Francesco Saverio, op. cit. DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, op. cit. 13 incontrôlée de la ville a produit une fusion de Naples et des communes limitrophes, suite à laquelle, comme nous le verrons à propos du réseau métropolitain, tous les projets doivent être considérés dans une échelle provinciale ou même régionale. Aujourd’hui, le plan de développement urbain, le « Piano Regolatore Generale », approuvé en 2004, se réfère aux trois zones d’importance névralgique dans lesquelles de divise la ville de Naples : le centre ancien, inclus dans la liste du Patrimoine de l’Unesco pour l’importance historique de son tracé urbain, et les deux zones adjacentes, celle orientale, vers le Vésuve, et celle occidentale, vers les Champs Phlégréens ; ces dernières, occupées jadis par des établissements industriels désormais inactifs, sont aujourd’hui intéressés par des projets de réaménagement de grande importance pour le développement futur de la ville. 1.2 Brève histoire de la fondation de Naples 1.2.1 Les contexte historico - géographique de la fondation Avant de passer à l’analyse de la ville actuelle et de ses nombreuses problématiques contemporaines, il nous parait de grand intérêt de s’attarder sur le récit des origines de Naples, voici presque trois millénaires, afin d’essayer de comprendre les raisons premières qui ont dictées sa fondation, son rapport ancestrale aux données environnementales, ainsi que la fonction centrale qu’elle a toujours occupée, en raison, entre autre, de sa position géographique privilégiée. Avant même la naissance effective de la ville, la baie de Naples, qui se trouve entre deux aires volcaniques actives qui en ont fortement conditionnée l’occupation, étais fréquentée par des populations de différentes origine et provenance. A l’époque préhistorique, en fait, les régions italiennes, surtout celles plus internes, étaient habitées par différentes populations Italiques, comme les Ligures, les Latins et les Samnites 12 ; les cotes, en même temps, étaient intéressées par des trafiques commerciaux de la part de populations qui provenaient du nord, comme les Etrusques, du sud, comme les Phéniciens, et de l’est de la Méditerranée, comme les Grecs. Ces derniers, qui habitaient le proche orient, avaient une organisation urbaine basée sur les polis, dans 12 CUSTODERO Gianni, 2000. Antichi popoli del sud. Apuli, Bruzii, Lucani, Messapi, Sanniti e Greci prima della conquista romana. Capone, Lecce 14 lesquelles était naît une nouvelle culture ; cette culture, encore aujourd’hui, représente la base de notre tradition intellectuelle 13 . La polis se basait sur un nombre idéal d’habitants, qui était une fonction de la possibilité de garantir un développement harmonieux : un nombre qui garantissait une armée efficace en cas de guerre et qui confirmait le bon fonctionnement de l’assemblée des citoyens ; un fois ce nombre dépassé, il fallait fonder une nouvelle ville dans des terres lointaines. Les conditions recherchées par les colons grecs étaient les suivantes : un port naturel pour la protection et les échanges commerciaux, un socle en surplomb sur la mer pour la défense des attaques ennemis, et la proximité d’eau potable 14 . 1.2.2 La « Grande-Grèce » et les colonisations : Palaepolis et Neapolis Après des premières installations dans le sud de l’Italie, qui était ainsi appelée la « GrandeGrèce », et notamment sur les îles de Procida et Ischia et ensuite au nord de la Campanie vers le IX siècle avant J.-C., le lieu choisit a été celui de la petite île rocheuse de Megaris, au milieu du Golfe de Naples, ou un petit habitat est fondé au VI siècle avant J.-C. Il s’agissait, tout d’abord, d’une base commerciale et d’un port militaire, située dans les anfractuosités naturelles de l’île, creusée de nombreuses grottes par les vents, la mer et l’activité des hommes (en grec megara veut dire grotte). Cette habitat s’est ensuite étalé sur le promontoire de Pizzofalcone et il a pris le nom de Parthénopé, acquerrant la structure d’une vraie petite ville, protégé aux quatre points cardinaux par l’eau et les irrégularités du terrain ; la colline, en fait, surplombait la mer sur trois cotés, tandis que le quatrième, l’actuelle Via Chiaia, était une profonde douve naturelle. En 470 avant J.-C., les grecs provenant de Cumes ont décidés la fondation d’une nouvelle, vraie ville. Pour cela, ils ont choisit un endroit à l’est de l’ancienne Parthénopé, au delà d’un petit cour d’eau aujourd’hui enterré, endroit où actuellement se trouve le centre historique ; il l’ont doté d’une structure urbaine que nous pouvons encore parcourir aujourd’hui et lui ont choisit le nom de 13 BENEVOLO Leonardo, 1975. Storia della città. Laterza, Roma-Bari [Trad. franc. 2004] Histoire de la ville. Parenthèses, Marseille 14 ROSI Massimo, op. cit. 15 Neapolis, ville nouvelle, afin de marquer la différence avec le précédent centre urbain, qui allait devenir Palaepolis, ville ancienne. La ville a représentée immédiatement, pour les romains, le lieu de l’otium, oisiveté, loin du negotium, négoce, de la ville de Rome ; elle s’est enrichie, pour ce fait, de somptueuses villas 15 . 1.2.3 Le choix du site : entre nécessités et symboles Placé au milieu d’un système triangulaire de collines, le socle où a été réalisée la nouvelle polis constituait la partie la plus élevée de la plaine située entre les amphithéâtres cratérisés des Champs Phlégréens et du Vésuve 16 . Ce socle résultait meilleur du précédent et donc mieux disposé à accueillir une vrai ville, car il était plus étendu et plus lié au territoire alentour, tout en étant bien défendable. Selon Marcel RONCAYOLO, en fait, la condition nécessaire pour l’origine de la ville est, toujours, l’existence d’un surplus, qui permette d’entretenir la population et les activités urbaines 17 . Le site ainsi choisit, naturellement délimité, vers les cotés latéraux, par deux canaux d’eaux pluviales, et, vers le coté opposé, par un vallon naturel, descendait progressivement et finissait en aplomb sur la mer ; il résultait donc, par rapport à aujourd’hui, mieux protégé car plus éloigné et plus élevé par rapport à la ligne de cote. La conformation naturelle des lieux a suggéré l’implantation urbaine, qui s’est organisée selon une « abstraction cosmique », afin d’enrichir les potentialités primitives des lieux : une vingtaine de cardes secondaires, à orientation nord-sud, rencontraient à 90 degrés les trois routes principales, les decumanii. Ceux-ci, avec leur direction est-ouest, parallèle à la ligne de cote, représentaient le parcours du soleil. « Appelés à dicter les normes pour la fondation de Périntie, les astronomes définirent le lieu et le jour selon la position des étoiles, tracèrent les lignes entrecroisées du decumanus et du cardo, orientées l’une d’après le cours du soleil et l’autre selon l’axe autour duquel roulent les ciels, ils divisèrent le plan selon les douze maisons du zodiaque de telle sorte que chaque temple et 15 16 17 SCHIFANO Jean-Noël, op. cit. DE SETA Cesare, 1981. Napoli. Laterza, Rome-Bari RONCAYOLO Marcel, 2002. Lectures de villes. Formes et temps. Parenthèses, Marseille 16 chaque quartier reçoive des constellations opportunes le juste influx, ils fixèrent l’endroit où dans les murs ouvrir les portes, prévoyant que chacune cadrerait une éclipse à la lune dans les milles ans à venir. Périntie, assurèrent-ils. Allait refléter l’harmonie du firmament ; la raison naturelle et la grâce des dieux allaient donner forme aux destins des habitants » 18 . Il est clair que la ville est naît et s’est développée en tant que ville de mer ; le mythe fondateur, la sirène Parthénopé, était en fait issu de la mer, cette même mer, ou Mare Nostrum, qui a représentée et a demeurée la plus grande ressource pour la ville, des siècles durant. Il est tout aussi vrai que, après un certain temps, les habitants ont commencez a regarder avec intérêts aux campagnes fertiles environnantes, celle de la Campania Felix, pour leur soutènement 19 . 1.2.4 Une ville souvent capitale Durant l’histoire qui suit cette fondation, et qui nous conduit à petits pas vers les temps modernes, la ville de Naples, plusieurs fois capitale, a été une ville d’extrême importance pour des royaumes et des vice-royaumes divers : ceux Normands, Allemands, Angevins, Aragonais, Français, Espagnols, enfin Bourbons. Selon certains chercheurs, c’est justement de cela qui dérive l’attitude de ses habitants : l’avoir assisté aux processus d’amélioration de la ville et de la vie en général, aussi bien qu’aux tragédie de son histoire, avec un rôle de spectateur en non pas d’acteur, a emmené à cette manière de vivre le territoire en attendant que les choses se succèdent et, surtout, a profiter de la situation donnée avant qu’elle ne finisse. Et, comme nous allons le voir par la suite, il est justement sur la participation des habitants de la ville qui se base une stratégie urbaine durable. 18 CALVINO Italo, 1972. Le città invisibili. Einaudi, Turin [Trad. franc. 1974] Les villes invisibles. Seuil, Paris 19 DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, op. cit. 17 1.3 Les problématiques actuelles 1.3.1 Naples métropole : entre ressources et résistances Naples se présente aujourd’hui comme une métropole diffusée, comme un dense et ramifié continuum urbain, peuplé, dans une extension de 50 kilomètres, par quatre millions de personnes, à savoir, les deux tiers de la population de la Campanie, la région la plus dense d’Italie 20 . La ville, suite à son évolution historique très articulée au fil des siècles, se montre, sous différents points de vue, comme une réalité complexe et hétérogène, tissée autour de nombreuses problématiques qui rythment le parcours quotidien de ses habitants. Aucune analyse qui s’intéresse à sa compréhension, ne peut donc ignorer la tangibilité de cette réalité, visible ou latente, qui oblige le chercheur de s’y attarder afin d’en discerner les potentialités ou les limites. Dans un effort extrême de synthèse, guidé et obligé par une volonté de compréhension et par l’opérativité que le projet lui-même nous impose, nous pouvons extraire, de cette complexité, les problématiques suivantes, qui nous paraissent profiler au mieux le terrain sur lequel chaque intervention doit se concrétiser. 1.3.2 La criminalité Appelée ici Camorra, elle dérive de la présence, sur le territoire, de groupes criminels organisés, ou clans, et est considérées comme étant, en même temps, la cause et l’effets des problèmes socio-économiques de la Campanie. D’origines très anciennes, nous l’avons vu, elle est souvent comparée à la Mafia sicilienne, malgré le fait qu’elle soit différente de celle-la sous plusieurs aspects, comme celui, par exemple, de la division du pouvoir en plusieurs clans, qui opèrent selon des méthodes différentes, souvent en lutte entre eux pour conquérir la suprématie. Aujourd’hui elle compte des milliers d’adeptes, répartis en plus de 200 familles différentes, et représente, en raison de sa percolation et de son infiltration obstinées, un empêchement à l’essor et à la réussite d’activités productives, soient-elles individuelles ou privées. 20 GRAVAGNUOLO Benedetto, 2006. Metrò-polis. In Metrò-polis. Abitare Segesta, Milan 18 Ceci demeure un point très délicat lorsqu’on considère les possibilités concrètes d’intervention, car il nous guide vers des solutions caractérisées par des résultats, malgré LE CORBUSIER, qui ne sont pas de l’ordre de la chirurgie, mais de la médecine 21 . 1.3.3 Le taux de chômage Sur la base des données du dernier recensement, celui du 2001, la ville de Naples, comparée aux dix premières villes italiennes, présente les difficultés le plus importantes en ce qui concerne le domaine de l’occupation. Dans un situation qui est dominée par les secteurs publique et administratif, qui occupent, au totale, le 30,70% des habitant de la ville 22 , on y retrouve, en fait, le plus important taux de chômage, qui implique le 31,40% de la population, alors que, dans le reste de l’Italie, il concerne en moyenne le 11,60% 23 . Un projet durable dans un tel contexte, nous allons le voir par la suite, est sûrement un projet qui, tout en prenant appuis de la situation actuelle, crée de nouvelles occasions, capables de conduire à une régénération interne, lente mais néanmoins propre. 1.3.4 Les déchets Il s’agit d’une problématique datée, de nature technique, administrative, politique autant que criminelle ; elle n’a jamais été résolue complètement, ne serait-ce que de manière épidermique, en proposant à chaque fois, suite a des urgences plus ou moins graves, l’ouverture de nouvelles décharges ou le transfert des déchets vers un ailleurs, porche ou lointain ; ceci, en réponse à une attitude qui, en anglais, est appelée effet NYMBY 24 (Not In My Back Yard). Récemment, cette même problématique s’est imposée, avec toute son urgence, dans un débat nationale et internationale ; en même temps elle à été abordée, et en partie soulagée, grâce à l’intense implication de la population de chaque quartier intéressé. 21 22 23 LE CORBUSIER, 1925. Urbanisme. Grès et Cie, Paris http://www.na.camcom.it http://www.comune.napoli.it 24 BROWN Lester R., 2008. Plan B 3.0 - Mobilizing to save civilisation. Earth Policy Institute [Trad. it. 2008] Piano B 3.0. Mobilitarsi per salvare la civiltà. Edizioni Ambiente, Milan 19 Un aspect, celui de la participation, qui s’est démontré comme un indéniable ressource pour la ville, et sur lequel nous reviendront par la suite, au moment de la proposition, pour Naples, d’un projet durable à l’échelle urbaine. 1.3.5 L’expansion incontrôlée Nous avons pu suivre, durant le récit historique qui nous a conduit vers la Naples moderne et contemporaine, l’envahissement progressif et souvent illicite, de la part du bâti, des espaces agricoles, ou simplement libres, qui entouraient la ville ; ceci afin de répondre à une forte demande de logements, et de pouvoir soutenir le marché immobilier en plein essor. Le résultat de ce processus a été celui d’une tache d’huile qui s’est répandue à partir des zones anciennes de la ville et qui a « grimpée » sur les collines alentour, malgré les difficultés que cela comporte. Ceci a emmené à la perte du rapport millénaire entre la ville et ses paysages idylliques, rapport qui faisait de Naples, encore aux temps du voyage de GOETHE et de STENDHAL, une étape imperdable du Grand Tour de l’Italie : « Cette baie si belle, qui semble faite exprès pour le plaisir des yeux, les collines derrière Naples toutes garnies d’arbres, cette promenade au village de Pausilippe par le chemin en corniche de Joachim, tout cela ne peut pas plus s’exprimer que s’oublier » 25 . Au cours du temps, cet envahissement s’est traduit non pas seulement par une nappe minérale qui couvre, tant bien que mal, les irrégularités du territoire, mais notamment par une soudure de la ville avec les centres urbains alentour, surtout vers la plaine en direction du Vésuve et le long de la cote. Cette même soudure, nous l’avons déjà évoqué, nous oblige à nous intéresser à la ville dans un effort de lecture qui nous permette de la considérer dans une dimension non plus communale, mais provinciale et régionale. 25 STENDHAL, 1987. Rome, Naples, Florence. Gallimard, Paris 20 1.3.6 La congestion urbaine Elle dérive de la haute densité de population qui réside en ville et du fait que sa concentration dans les zones centrales n’a jamais cessée d’augmenter, malgré des périodes cycliques de forte crise qui se sont succédées. Différemment aux autres villes européennes, il s’agit pour Naples, comme Massimo ROSI l’a justement remarqué, d’une sorte de croissance endogène, non pas causée par des phénomènes d’immigration, mais générée d’un processus de développement interne, qui pourtant ne se reflète pas dans un changement de structure urbaine, culturelle, sociale ou économique de même signe et de même importance 26 . Une situation, celle-la, qui a créée des importantes difficultés quant aux déplacements quotidiens, qui concernent, selon le recensement du 2001, le 58,4% de la population ; de ces déplacements, en outre, le 61,5% s’effectuent à l’intérieur de la ville avec le recours, surtout, à la voiture privée 27 . Cette complexité, qui à suggérée d’ailleurs la construction du nouveau réseau métropolitain de la ville, constitue pour nous un point de départ ainsi qu’une opportunité, afin d’essayer d’exploiter, à l’intérieur du tissu urbain presque saturé, les créneaux ignorés par cette croissance aveugle, créneaux qui ont étés oubliés par la suite et qui, aujourd’hui, se re-présentent comme des précieuses ressources. 1.4 Des idées et des projets 1.4.1 Une somme de solutions partielles Malgré ces indéniables difficultés, Naples demeure une ville d’une beauté incontournable ainsi qu’une réalité fort stimulante, sur laquelle pouvoir confronter des idées et des projets qui s’intéressent aux différents aspect de sa complexité. A l’image de l’indéniable hétérogénéité de sa structure urbaine et sociale, la ville se trouve aujourd’hui au centre d’un nombre important de propositions, pour la plupart partielles, qui, pour 26 27 ROSI Massimo, op. cit. http://www.istat.it 21 cela, reflètent et représentent au mieux la difficulté que l’on rencontre à vouloir considérer sa réalité dans son ensemble. Les solutions envisagées, en fait, se proposent de soulager ce qui est présenté et perçu, selon les cas, comme étant le nœud crucial ou la problématique centrale à résoudre ; ce faisant, elles agissent à l’intérieur d’un périmètre d’action qui demeure trop circonscrit, pour que cela puisse avoir des conséquences appréciables au niveau de l’ensemble de l’organisme urbain. 1.4.2 Vers un regard exhaustif Partant de la considération qu’une ville n’est pas la somme, quoique bien tissée, de partialités, mais un organisme dont le bon fonctionnement dépend de l’articulation maîtrisée de ses parties, la situation architecturale de Naples, autre que immobile, apparaît pour autant guidée par un enthousiasme qui semble orienté vers la recherche de réponses circonscrites à des questions partielles, qui manquent, de ce fait, d’un regard global, capable de saisir la ville en ses vrais enjeux contemporains. Mise à part la réalisation des infrastructures de transports, dont l’étude et l’analyse font l’objet du chapitre suivant, et qui demeure la proposition la plus ambitieuse et infiltrée dans cette complexité, les projets qui se mettent en œuvre dans la ville de Naples ponctuent désormais sa surface en ses différentes parties, et se manifestent comme le résultat d’études conduites par des équipes de professionnels d’envergure, appartenants souvent à la scène architecturale internationale. Il concernent, souvent, les parties qui sont considérées comme étant les plus névralgiques pour le futur de la ville ; les deux aires industrielles démantelées, à l’ouest et à l’est de la partie historique, deviennent ainsi l’occasion pour des nouveaux parcs urbains ; la ligne côtière, qui selon certain experts à perdu son rapport direct et immédiat avec la ville, se redessine en un nouveau waterfront, qui se propose de redonner, au port de Naples, l’ancien rôle de rencontre entre les gens, les marchandises et, surtout, les lingues et les cultures diverses ; les anciens quartiers centraux, qui demeurent parfois en des conditions de forte dégradation, font l’objet d’exigeants projets de réhabilitation 28 . 28 GRAVAGNUOLO Benedetto, 2005. Idee e cose: Bilancio sulle nuove architetture e infrastrutture in Campania. In Dal duemila al futuro, architetture e infrastrutture per lo sviluppo a Napoli e in Campania. Casabella 737, Mondadori, Milan 22 Nous ressentons donc la nécessité, pour Naples, d’un projet qui regarde à la ville comme envers un organisme à traiter dans son ensemble ; d’un projet qui soit complexe dans l’entrelacement de ses actions, sans pour autant être compliqué dans sa mise en œuvre. Le point de départ que nous allons choisir pour notre proposition est ainsi le réseau des transports métropolitains en cour de réalisation en ville ; l’objectif est de pouvoir profiter d’un projet qui, même si le plus souvent invisiblement, touche à toutes les parties de la ville, afin de pouvoir y accéder et réussir à retisser cet ensemble selon une nouvelle logique : celle de la durabilité. 23 Chapitre 2. Metronapoli : le décryptage d’une occasion locale 2.0 Introduction / Introduction La mobilité constitue aujourd’hui un défi décisif pour le développement de Naples Métropole. Le réseau de transport souterrain conçu par la ville, qui fait écho à celui plus ancien de ses grottes ancestrales, présente des nombreuses difficultés de nature technologique et historico archéologique. Il est pour autant caractérisé par une importante spécificité linguistique : il relie, tel un canal de communication souterrain, des parties de la ville très hétérogènes les unes des autres, avec une admirable continuité technologiques et artistique. La compréhension du rôle stratégique de ce réseau au sein de la communauté nous permet d’intégrer, dans ses objectifs principaux, celui de la durabilité énergétique, compte tenu que la ville, comme l’Italie elle-même, importe la plupart de l’électricité dont elle nécessite pour son fonctionnement. Mobility is now a challenge for the development of Naples Metropolis. The underground transportation network developed by the city, which echoes the oldest ancestral caves, presents many challenges such as technological and historical - archaeological. It is however characterized by significant linguistic specificity: it connects, as an underground channel of communication, parts of the city very heterogeneous from each other, with admirable artistic and technological continuity. Understanding the strategic role of the network within the community allows us to incorporate into its main objectives, that of energy sustainability, given that the city, like Italy itself, most important of the electricity it requires for its operation. 2.1 Le nouveau réseau métropolitain : 100 stations 2.1.1 Naples, une « ville poreuse » Naples, connue aussi comme la ville « poreuse », cache une réalité parallèle, souterraine, un négatif de sa surface, qui est le résultat de l’action des hommes sur un territoire à la nature exceptionnelle, friable et tendre ; ce territoire est le produit de la longue activité des volcans qui entourent la ville, à l’est comme à l’ouest. Durant sa trimillénaire histoire urbaine, Naples a toujours gardée un fidèle rapport avec ces lieux souterrains, qui n’ont jamais cessés de nourrir des secrets, 24 des légendes et des curiosités. Son développement urbain a toujours été accompagné de celui de ses viscères, qui ont suivis fidèlement les directions adoptées par la ville. Aujourd’hui, à cause des risques d’écroulements superficiels, la ville procède progressivement à la fermeture de ses viscères, qui deviennent, la plupart des fois, des lieux de l’abandon et de l’oubli. Cette opération est, en même temps, équilibrée par l’ouverture de nouveaux tunnels, ceux du réseau métropolitain qui, à terme, aura une dimension non seulement urbaine, mais aussi régionale. Si il est vrai que le réseau métropolitain suit l’étalement de la ville pour en reprendre les directions du développement, la Naples souterraine, considérée comme le reflet de celle de surface, se structure par contre selon une logique de signe inverse : elle précède ce même développement car c’est en creusant le territoire que la ville de Naples, au fil de l’histoire, s’est bâtie. 2.1.2 La restructuration des transports publics existants : trois instruments majeurs Le nouveau réseau métropolitain, comme nous l’avons introduit dans le chapitre précédent, fait partie d’un projet qui prévoit la restructuration du système de transport existant, à travers la réalisation de lignes nouvelles ainsi que la construction d’arrêts supplémentaire pour celle déjà présentes. L’objectif est celui d’améliorer le service de transport public actuel afin de réduire l’utilisation de la voiture privé, qui représente une des causes de la forte congestion urbaine dont souffre aujourd’hui la surface de la ville 29 . Pour ce faire, la Mairie de Naples entreprend la planification, de manière intégré, à la fois du territoire et du système de transports ; ceci à travers la rédaction de trois documents différents : le Plan Communale des Transports, le Plan du Réseau Routier Principale, et le Plan des 100 Stations. Ces trois instruments de planification visent à rendre possible, entre autre, la délocalisation de certaines fonctions et services aujourd’hui concentrés en centre ville et, surtout, à transformer le système existant en un vrai réseau de transport intégré. Suite, en fait, à la réalisation des 29 http://www.comune.napoli.it 25 premières lignes de transports public en siège propre, le système napolitain présentait, il y a encore quelques années, une fragmentation physique, tarifaire et donc administrative, qui rendait son utilisation difficile à profiter. Cette situation avait emmené, d’un coté, à l’usage extensif des moyens de transport particuliers, et, de l’autre, à l’apparition de modes de déplacement parallèles, comme les fourgonnettes illégales pour les trajets entre les communes limitrophes à Naples, ainsi que pour ceux internes à la ville elle-même 30 . 2.1.3 Le Consortium « Napolipass » et le titre de transport « Unique » La valeur des innovations récemment apportées à ce système consiste en une double intervention : d’un coté, la dite rédaction des différents plans des transports, et de l’autre, la constitution d’un consortium, le « Napolipass », qui dérive de la mise en réseau des différentes entreprises agissant autrefois séparément sur le territoire. Il s’agit d’une vrai fédération des différentes acteurs et non pas de la signature, entre eux, d’une simple convention 31 . A cela s’est ajouté l’introduction d’un nouveau titre de transport, l’ « Unico », qui couvre toute la région Campanie selon des tarifs qui varient en rapport à la distance entre la commune intéressée et le centre ville de Naples, pris comme destination de référence. L’espoir de ces opérations est celui de mettre en œuvre des innovations efficaces, qui soient non seulement d’un ordre technique, mais aussi politique, institutionnel et procédural. L’objectif serait d’aller au-delà des approches simplement monomodales en matière de transport, afin de voir les politiques de « transports urbains » devenir progressivement des politiques de « déplacements urbains » 32 : des politiques orientées non pas exclusivement au renforcement du transport public comme alternative à la voiture particulière, par le biais de solutions d’ingénierie civile et de système de maîtrise des heures de pointe, mais à des solutions qui s’intéressent aux 30 DI CIOMMO Floridea, 2003. L’accessibilité : l’enjeu prioritaire de la nouvelle politique des transports publics à Naples. In JOUVE Bernard (sous la direction de), 2003. Les politiques de déplacements urbains en Europe. L’innovation en question dans cinq villes européennes. L’Harmattan, Paris-Budapest-Turin 31 ibid. 32 JOUVE Bernard, 2003. Le double défi des politiques de déplacements urbains : innover dans la forme et sur le fond. In JOUVE Bernard (sous la direction de), 2003. Les politiques de déplacements urbains en Europe. L’innovation en question dans cinq villes européennes. L’Harmattan, Paris-Budapest-Turin 26 conséquences que ces déplacements ont sur les autres modes de transports à l’échelle de la ville, à travers une vrai synergie entre différentes décisions sectorielles. 2.1.4 Le réseau des 100 stations Le réseau des 100 station, dont la construction est au centre d’un effort considérable qui le rend, juste après le TGV italien (TAV), l’œuvre publique la plus importante du Pays 33 , prévoit deux phases pour sa mise en oeuvre : la première, de quatre ans et déjà conclue, est consacrée à la mise en réseau du système existant et à la valorisation des différentes connexions ; la deuxième, d’environ quinze ans dont la conclusion est prévue pour l’année 2011, est ciblée autour de la construction de nouvelles lignes de métro et de funiculaires, ainsi que de la réalisation de nouveaux nœud modaux d’échange entre différents modes de déplacement. Le programme envisagé préconise, à terme, que le territoire desservi par le transport ferroviaire passe de 1900 ha à 4350 ha, avec un taux d’incrémentation du 137%, ce qui correspond à 2,5 fois le territoire actuel ; que les personnes intéressés par le système lui-même, eu outre, passent de 536.000 à 970.000. Cela veut dire que presque le double des voyageurs actuels aura, en partant à pied de chez-soi ou de son lieu de travail, la possibilité d’accéder au métro, ainsi que plusieurs options s’offriront à la moitié d’entre eux. Aujourd’hui, sur les 57 stations existantes, il y a un transit de 140.000 passagers durant les heures de pointes, alors qu’à terme, sur le réseau complet qui prévoit 114 stations, ce même trafic comptera, durant les mêmes horaires, plus de 500.000 voyageurs 34 . Le réseau final consistera en 53 kilomètres de voie ferrée, dont 45 kilomètres dérivants de la transformation de lignes existantes de chemin de fer et de tramway, et 8 kilomètres obtenus à travers les extensions de lignes précédentes, la construction d’une ligne entièrement neuve , ainsi que la réalisation de 4 lignes de tramway et de six funiculaires 35 . 33 JERVOLINO Rosa Russo, 2006. Il Sindaco. In Metrò-polis. Abitare Segesta, Milan 34 35 http://www.comune.napoli.it DI CIOMMO Floridea, op. cit. 27 La ligne 1 du métro, connue aussi comme le « métro dell’arte », s’impose comme le berceau de ces système, car elle se configure comme un anneaux qui entoure la ville et qui intercepte plus de la moitié des transits de toutes les lignes, à savoir plus de 250.000 passagers 36 . 2.2 La ligne 1 : le métro dell’arte 2.2.1 Une double spécificité Cette nouvelle ligne, dont les travaux déjà terminés ont suscité l’intérêt et l’admiration internationales, ainsi qu’une chronique sur le Times de Londres qui le définit comme « le métropolitain le plus beau du monde » 37 , se caractérise par une double spécificité. La première, de nature technologique, est due à différentes raisons : d’un côté, le fort dénivelé existant entre les différents quartiers desservis par le métropolitain, oblige à creuser de tunnels à des profondeurs très importantes, ce qui le rend le métropolitain le plus profond au monde 38 ; de l’autre, la présence inattendue d’anciennes structures, comme par exemple les vestiges romaines de l’ancienne Neapolis, deviennent difficultés ainsi que stimules en ce qui concerne leur intégration dans la conformation des arrêt. La deuxième spécificité, de nature linguistique, est due à la nouvelle manière de concevoir les stations : non plus comme des non-lieux 39 , des espaces techniques anonymes qui accompagnent les usagers jusqu’aux trains, mais comme des centres d’agrégation à l’intérieur du tissu de la ville, capables d’agir comme autant de véhicules de requalification des alentours, grâce aussi à l’attention portée vers les questions d’accessibilité et de design urbain. 2.2.2 L’hétérogénéité urbaine et la cohérence artistique Ces objectifs sont atteint grâce à une étroite collaboration entre architectes et artistes durant le processus de conception de l’arrêt lui-même, en suivant le principe qui voit chaque station 36 http://www.comune.napoli.it 37 BASSOLINO Antonio, 2005. Presentazione. In Dal duemila al futuro, architetture e infrastrutture per lo sviluppo a Napoli e in Campania. Casabella 737, Mondadori, Milan 38 39 www.danpiz.net/napoli/trasporti/MetroArte-Frames.htm AUGE’ Marc, 1992. Non-Lieux. Introduction à une anthropologie de la sur-modernité. Seuil, Paris 28 caractérisée par un langage différent, selon la spécificité de chaque site. Si, en fait, on considère le métropolitain comme « un canal de communication souterrain invisible qui fait correspondre, à la cohérence technologique, une grande variété entre les parties de la ville desservies par les différentes stations » 40 , nous pouvons reconnaître comme ce discours est valable spécialement dans le cas de Naples, ville hétérogène et articulée en ce qui concerne sa géographie, son histoire et son anthropologie. Les efforts se concentrent, donc, sur le processus de conception des différents arrêts, qui sont ainsi réalisés comme de vrais volumes bâtis, qui se prolongent en sous-sol avec des généreux espaces d’exposition ; ceux-la accompagnent les voyageurs, durant leur parcours, le long d’une sorte de musée d’art contemporain, qui se définit comme étant hypogé, dynamique et émouvant, mais aussi obligatoire selon la définition de Achille BONITO OLIVA 41 , coordinateur artistique des « STAZIONI DELL’ARTE ». Ces lieux sont, d’ailleurs, nés à partir de 2001, avant même que la ville n’ait assisté à la naissance des ses actuels musées d’art contemporain, et ont fonctionnée, pour cela, comme autant de précurseurs. Les architectes italiens tels que D’ASCIA, FUKSAS, LAMPUGNANI, PODRECCA, SIOLA, opèrent à côté de personnalités internationales de l’envergure de EISENMAN, HADID, FUTURE SYSTEM, KOLLHOFF, MIRALLES-TAGLIABUE, PERRAULT, RASHID, ROGERS, SIZA, SOUTO DE MOURA, dans un effort de collaboration avec des artistes du calibre de BASILICO, CHIA, CUCCHI, DEL PEZZO, KAPOOR, KOUNELLIS, LEWITT, MERZ, PALADINO, ROTELLA, dont les œuvres expriment leurs langages personnels, différents les uns des autres. Ces œuvres, d’après le même OLIVA, « sont dotés d’une double dimension, celle du transit et celle de la pause. Pendant le transit, le spectateur vit le fugitif, c’est-à-dire le temps nécessaire pour se déplacer d’un endroit à un autre du parcours ; pendant la pause il développe le plaisir esthétique d’une rencontre avec l’art et d’une surprise pour le regard ». 40 MENDINI Alessandro, 2006. La filosofia della Metropolitana di Napoli. In Metrò-polis. Abitare Segesta, Milan 41 BONITO OLIVA Achille, 2006. Il museo obbligatorio. In Metrò-polis. Abitare Segesta, Milan 29 2.2.3 Le métro et les changements de la ville Selon l’architecte portugais Eduardo SOUTO DE MOURA 42 , « les villes changent principalement pour deux raisons : à la suite des catastrophes, et après la construction des réseaux de circulation tels que la voie ferrée, l’autoroute et le métropolitain ». L’innovation apporté par le métropolitain de Naples nous apparaît, de toute évidence, caractérisée aussi par une dimension sociale. Cela est vrai selon deux points de vue : d’un côté, en raison du fait que ce même réseau finalise une liaison, jadis inexistante,entre les différentes parties urbaines de la ville, en inventant une proximité entre « les quartiers anciens et ceux de récente urbanisation, qui sont encore dépourvus d’une identité monumentale spécifique » 43 ; de l’autre coté car, si nous reprenons l’affirmation de l’architecte portugais SOUTO DE MOURA selon laquelle « là où passe le métropolitain, rien ne peut plus être comme auparavant », il faut préconiser que le métropolitain, qui est naît comme réponse à certaines nécessités urbaines et territoriales de la ville de Naples, va probablement déclencher des nouvelles réactions et transformations, à considérer soit sur le plan urbain que sur celui social. 2.3 Origine du métro de Naples 2.3.1 Les expérimentations et les primats durant le royaume des Bourbones Avant de passer à l’étude de cette dimension sociale du réseau napolitain, il nous parait intéressant d’analyser les tâtonnements historiques qui ont conduit, à travers différentes étapes, à la naissance du métro en ville. Il s’agit de projets qui, lors d’une réalisation concrète, auraient pu marquer fortement le développement successif de la ville de Naples ; ils étaient dotés d’une dimension utopique, quelque part, mais il ne manquaient pas, pour autant, d’une forte et pertinente argumentation problématique 44 . 42 SOUTO DE MOURA Eduardo, 2005. Cambiare la città…pezzo dopo pezzo. interiview de Cornelia Tapparelli In Forme del movimento. Casabella 739_740, Mondadori, Milan 43 GRAVAGNUOLO Benedetto, 2005. Idee e cose: Bilancio sulle nuove architetture e infrastrutture in Campania. In Dal duemila al futuro, architetture e infrastrutture per lo sviluppo a Napoli e in Campania. Casabella 737, Mondadori, Milan 44 DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, 2006. Breve storia di Napoli. Pacini, Pise 30 Les transports ferroviaires et métropolitains ont toujours trouvés, dans la baie de Naples, un terrain d’essai d’excellence. Après la réalisation de la première ligne ferroviaire italienne, la Naples Portici, durant le royaume des Bourbones en 1839, la conformation de la ville et de l’extraordinaire territoire alentour, ont données un élan particulier à l’expérimentation, notamment dans le domaine des transports en siège propre ; à Naples il y avait en fait la première installation italienne de seggiovia à sièges mobiles, ainsi que le premier système au monde de funiculaire capable de grimper sur un volcan actif. 2.3.2 Lamont Young Peu de temps après l’unification de l’Italie, nous l’avons déjà évoqué, la ville de Naples se trouvait dans une situation très délicate à cause de la perte de son rôle de capitale ; malgré cela, elle gardait le charme qui l’avait caractérisée durant toute son histoire, et restait donc une étape de visite très recherchée par les intellectuels de toute l’Europe ; ceux-la venaient y séjourner pour des longues périodes, par exemple durant les mois hivernaux, en raison surtout de la beauté de ses paysages et de la clémence de son climat 45 . A cette catégorie d’intellectuels appartenaient le couple anglo-indien YOUNG-SWINHOE, parents du futur ingénieur Lamont YOUNG ; ce dernier, né donc à Naples mais éduqué par la suite en Suisse et en Angleterre, allait garder, de ce fait, une extranéité et une distance envers la classe professionnelle napolitaine. Cette même extranéité allait l’emmener, durant sa vie professionnelle, à proposer des idées et des intuitions pour la ville qui, malgré le fait d’être issues des mêmes prémisses que les autres concurrents, le conduisaient à des solutions fort différentes. Cette extranéité nous la retrouvons notamment dans la rédaction, de la part de YOUNG, du projet de métropolitain pour la ville de Naples. Ce projet, qui dérivait d’une profonde connaissance de la réalité urbaine locale, était dépourvu pour autant des prévisions réalistes concernant le programme de financement, et ignorait, de ce fait, les conditions économiques de la ville. La première esquisse pour un projet de métro à Naples est à retracer dans l’idée d’un concours qui, en 1874, imaginait la réalisation de voies ferrées à parcourir à chevaux, afin de 45 ALISIO Gian Carlo, 1978. Lamont Young. Utopia e realtà nell’urbanistica napoletana dell’ottocento. Officina, Rome 31 substituer les « omnibus », des simples véhicules guidés par les mêmes animaux. Ce projet, en même temps, allait avoir des répercussions sur le tracé des rues concernées, déjà à l’époque suffisamment congestionnées, car superposait sur celles-la des trajets fixes ; raison pour laquelle il avait rencontré, comme réaction, beaucoup de scepticisme. Durant la rédaction des premières propositions, YOUNG s’était rendu compte du grand décalage existant entre les préoccupations du concours de Naples et les rapides progrès qui, en même temps, étaient effectués, pour le domaine des transports, dans le reste de l’Europe. Il allait donc proposer, en 1880, un vrai projet de métro qui partait de l’exemple du tube anglais qui date de 1863 46 ; projet qui proposait des tracés à l’échelle territoriale et qui allait donc comporter la modification de la structure même de la ville. Le projet prévoyait un tracé souterrain de 22 kilomètres, creusé à 15 mètres de profondeur sous la ville, afin d’éviter tous contacts avec les fondations des bâtiments existants ; il comptait 12 arrêts en centre ville et une sur la colline du Vomero ; il prévoyait en outre la construction de viaducs pour le parcours le long de la mer, en raison des caractéristiques malsaines et instables des terrains côtiers. Ce projet allait être bien accueilli par la presse, soit italienne que étrangère : le Times de Londres allait lui consacrer un article d’éloges, en démontrant d’apprécier son caractère innovant et ses équipements techniques, comme par exemple les ascenseur, éclairés au gaz comme le reste des espaces de fréquentation ; la presse italienne, quant à elle, avait appréciée l’intelligence de certaines solutions, comme celle qui prévoyait l’utilisation de dispositifs techniques de taille compatibles avec ceux du système ferroviaire de l’Etat, afin de permettre, à terme, l’utilisation de ses tracés par d’autres convois ferroviaires. Le projet, jugé comme utile et raisonnable pour les nécessités contemporaines de la ville, n’a pas pour autant été approuvé. Le suivant, qui date du 1883, était rédigé de concert avec un projet d’expansion de la ville, à mettre en œuvre à travers la réalisation de deux nouveaux quartiers résidentiels. Il confirmait l’hypothèse d’un tracé souterrain pour le métro, afin d’éviter les problèmes dérivant de la forte congestion de la superficie de Naples : la ville, en fait, comptait à l’époque le 46 RAGON Michel, 1986. Histoire de l’architecture et de l’urbanisme modernes. Casterman, Paris 32 double de la population de la ville de Paris, et deux fois et demi celle de Londres, à parité d’unité de surface considérée 47 . YOUNG, à cette occasion, décrit Naples comme une « sirène », dont la tête est posée sur les collines et les pieds baignent dans la mer ; en raison de sa topographie particulière et de sa congestion, elle devient pourtant incommode et malsaine à vivre. Il avait en outre souligné l’importance d’approuver les trois projets, celui du métro et ceux des quartiers résidentiels, comme étant partie d’un même processus, afin de faire face aux problèmes de nature économiques et techniques en même temps. Ces projets ne devaient jamais voir leur concrétisation, surtout en raison du manque des financements nécessaires. En tout état de cause, ce qu’à l’époque de YOUNG devait sembler irréalisable, et qui avait fait considérer le projet comme utopique, nous apparaît aujourd’hui être l’aspect le plus intéressant de la proposition. Selon les prévisions, en fait, le développement de la ville ne se effectuait pas à travers, tout d’abord, les éventrements des quartiers centraux et, ensuite, l’étalement à tache d’huile du bâti, mais se rendait par contre possible par le biais d’une croissance dynamique en direction des villages périphériques qui entouraient la ville, grâce à un efficace système de transport en commun ; un modèle, donc, qui n’était pas inspiré des expériences parisienne du Baron Haussmann, mais des contemporaines dynamiques anglosaxonnes 48 . Finalement, comme à l’image des rêves utopiques de Lamont YOUNG, le tracé ferroviaire Naples-Rome du 1910, appelé direttissima et inauguré par l’Etat fasciste, réalisait un parcours qui, lors du passage en souterrain à travers la ville, était doté d’arrêts urbaines intermédiaires. Cela a effectivement emmené à la naissance du premier service métropolitain existant alors en Italie 49 . 47 48 49 ALISIO Gian Carlo, op. cit. ibid. DI MAURO Leonardo, VITOLO Giovanni, op. cit. 33 2.4 Enquête dans le métro 2.4.1 Les déplacement urbains et leur perception Le métro, parmi les différents systèmes de transports qui parcourent le territoire d’une ville, représente une innovation absolue, qui peut avoir des fortes répercussions sur au moins deux aspects caractérisants sa structure : d’un coté, il agit sur la perception que les habitants ont de l’espaces urbain en général ; de l’autre, son introduction intervient sur la modification des modes de déplacements à l’intérieur de la ville ainsi que, dans certains cas, sur la manière même d’y accéder car, en quelque sorte, il joue un rôle de substitut de l’ancien système de portes urbaines. 2.4.2 Les portes de la ville Nous pouvons effectivement considérer le métro comme un moyen qui non seulement nous permet la circulation à l’intérieur du tissu de la ville, mais aussi d’y accéder depuis des territoires qui peuvent en être plus ou moins éloignés ; ceci sans pour autant nous y introduire progressivement par le biais d’une succession d’espaces urbains, ce qui est le cas dans une circulation de surface. La porte, selon Marina CAVALIERI, à le pouvoir d’établir la limite de l’espace et d’en rythmer le temps 50 . Pourvu que la découverte d’un lieu implique le franchissement de son seuil, la porte urbaine, en tant que lieu visuellement remarquable, a toujours été chargée de valences symboliques, en référence avec la ville à laquelle elle donnait accès. En ce qui concerne, alors, le premier de ces changements, celui qui agit sur la manière d’accéder à la ville, il s’est produit, dans le cas de Naples, suite à un processus qui a une longue histoire, commune d’ailleurs à beaucoup d’autres villes occidentales. Cette histoire débute au XIX siècle lorsque la destruction des remparts qui entouraient la ville, de concert avec et la suppression des portes qui en constituaient les seuils, fait en sorte que les nouvelles et grandes infrastructures urbaines, à savoir le port, l’aéroport et la gare des trains, commençaient a constituer les nouveaux points de rentrée, les nouvelles portes urbaines. A partir de ce moment, 50 CAVALIERI Marina, 1995. Porte, portali e roste di Napoli. Newton £ Compton, Rome 34 les personnes arrivées, une fois franchi ce nouveau seuil, pouvaient se déplacer à l’intérieur de la ville grâce aux différent systèmes de transports qui parcouraient sa surface. Aujourd’hui, en revanche, la mise en œuvre du nouveau réseau métropolitain change ce phénomène car, dans certain cas, il déplace le seuil dont le franchissement permet l’accès en ville : depuis les nœuds de correspondance entre le métro et les infrastructures urbaines d’arrivé, en fait, la possibilité de se servir du métro pour rejoindre directement, en souterrain, les lieux souhaités, transforme les arrêts de celui-la, éparses sur un territoire urbain de plus en plus vaste, en une sorte de nouvelles portes urbaines. 2.4.3 Des nouveaux rapprochement urbains : ville réseau et temporalités En considérant maintenant le deuxième aspect du changement mis en œuvre par le réseau des transports urbains, non pas celui de l’arrivée en ville mais celui des déplacements à l’intérieur de celle-la, nous pouvons remarquer que les différents lieux touchés par le parcours du métro se retrouvent, par le biais de ce dernier, rapprochés les uns aux autres. Ce rapprochement ne se mesure pas selon un point de vue géographique, mais temporel : en fait, ce n’est pas la contiguïté physique qui rend proches les différentes zones de Naples desservies actuellement par le métro, mais la possibilité d’une liaison directe, jadis inexistante ; une liaison qui requiert, aujourd’hui, seulement quelques minutes de déplacement. La ville, selon les paroles de André CORBOZ 51 , ne se présente plus comme une surface, mais comme un réseau. Une surface, en fait, nécessite de la présence d’un périmètre, alors que le réseau n’est constitué que de points terminaux. L’auteur, toujours à propos d’analogies, abandonne l’idée de texte, qui exige une lecture ordonnée du début jusqu’à la fine, et introduit celle de hypertexte, caractérisé par une grande quantité de données qui peuvent se lire dans des ordres et selon des modalités diverses. En tout état de cause, il nous parait évident qu’une position centrale, en matière de compréhension des nouvelles dynamiques qui se mettent en place avec la construction du métro, est occupée par les habitants de la ville, considérées en tant qu’acteurs principaux de la scène 51 CORBOZ André, 2001. Le Territoire comme palimpseste et autres essais. Les Editions de L’imprimeur, Besançon 35 urbaine. Retracer alors le rôle que ces habitants reconnaissent au réseau lui-même, nous parait un enjeu décisif, afin d’en discerner les potentialités latentes qui peuvent nous aider à constituer un fil conducteur efficace à la réalisation d’un projet durable. Les utilisateurs du métro se trouvent, par rapport au passé, à avoir accès à une expérience directe d’une partie beaucoup plus étendue de la ville qui n’est plus, de ce fait, la seule représentation de leurs rythmes. A cet égard, Bernardo SECCHI 52 nous aide à la compréhension de ce phénomène : l’auteur du livre « la città del ventesimo secolo » nous explique, en fait, que les nouvelles infrastructures de la mobilité peuvent modifier les temporalités de chaque individu, en engendrant une nouvelle perception du temps et de l’espace. Les citoyens, autrefois, faisaient l’expérience d’une partie restreinte de l’espace urbain à travers des déplacements qui avaient lieu entre des endroits définis, récurrents et reconnaissables par eux-mêmes. Aujourd’hui, en revanche, ces mêmes individus explorent un territoire élargi et aux confins incertains, et s’y déplacent selon des trajectoires personnelles. Pour une partie toujours plus importante de la population urbaine, de ce fait, l’image mentale de la ville et de son territoire correspond à celle d’une série de lieux, très éloignés les uns des autres, mais connectés par le biais d’un réseau, qui peut être ainsi matériel et immatériel. Michel FOUCAULT parle de notre époque comme de l’époque de l’espace : « nous somme à l’époque du simultané, nous somme à l’époque de la juxtaposition, à l’époque du proche et du lointain, du cote à cote, du dispersé. Nous somme à un moment où le monde s’éprouve, je crois, moins comme une grande vie qui se développerait à travers le temps, que comme un réseau qui relie des points et qui entrecroise son écheveau » 53 . 2.4.4 Le phénomène de perception de la ville Toutes ces considérations posent, il est certain, des nouvelles interrogations quant à la perception de l’espace urbain en toute sa complexité, à travers la lecture qu’en donne le parcours continu du métro. C’est ce que nous allons traiter par la suite au sein d’une série d’interviews 52 SECCHI Bernardo, 2005a. La città del ventesimo secolo. Laterza, Rome-Bari 53 FOUCAULT Michel, 1984. Des espaces autres. In FOUCAULT, 1994. Dits et écrits II, 1976-1988. Gallimard, Paris 36 adressées aux usagers du métro de Naples, le but recherché étant celui de comprendre comment les interviewés perçoivent la ville et son nouveau système de transport métropolitain. Nous savons en fait, grâce aux analyses de François ASCHER 54 , que les systèmes de transport rapide modifient les dimensions spatio-temporelles de la ville. L’auteur de Métapolis nous démontre que les vitesses, dans les communications, concurrent à faire percevoir les différents lieux d’une métropole plus proches ou plus lointains selon la rapidité du déplacement qui les dessert, et que, par ailleurs, ceci peut provoquer une reconstitution de nouvelles continuités et discontinuités urbaines ; si à ce phénomène nous ajoutons ce que l’auteur appelle l’« effet de tunnel », il est clair que les zones desservies par les arrêts de métro peuvent apparaître, aux usagers, plus proches de celles qui ne sont par contre que seulement traversées. Le Corbusier 55 , à cet égard, avait noté combien les systèmes de transport rapides bouleversaient les rythmes des actions humaines car, en rendant les distances moins importantes et les communications beaucoup plus efficaces, ils faisaient apparaître le « soleil plus rapide » ! Les usagers du métro de Naples, auxquels sont adressées les questions qui font l’objet de nos interviews, d’autre part, peuvent nous aider à discerner ce que Kevin LYNCH 56 définit comme l’image publique d’une ville, considérée comme étant la somme des différentes images individuelles. LYNCH, en se référant par exemple à ses propres analyses autour du réseau métropolitain de la ville de Boston, décrit ce réseau comme une sorte de « fil invisible conceptuel pour la ville » ; celui-ci n’est pas toutefois mis en relation avec le reste de l’ambiance, sauf aux endroits où il monte en surface et où, par conséquent, il peut être considéré comme un potentiel nœud stratégique, à relier avec le reste de la structure urbaine. Encore une fois, le déchiffrage de l’image que les citoyens ont de leur ville, par le biais de son réseau métropolitain, nous est utile à la compréhension de l’action que nous pouvons mener à l’intérieur de sa structure urbaine, afin de rendre efficace une intervention visant à la reformulation 54 55 ASCHER François, 1995. Métapolis, ou l’avenir des villes. Odile Jacob, Paris LE CORBUSIER, 1970. Sur les quatre routes. L’automobile, l’avion, le bateau, le chemin de fer. Denoël, Paris 56 LYNCH Kevin, 1960. The Image of the City. Massachusetts Institute of Technology and the President and Fellow of Harvard College, Boston [Trad. it. 2006] L’immagine della città. Marsilio, Venise 37 d’objectifs durables à l’échelle territoriale, en partant pour cela de l’échelle qui implique tout un chacun. 2.4.5 Les interviews aux usagers du métro de Naples Le grand intérêt du procédé que nous avons mis au point au sein des interviews est celui d’agir en cours, à savoir durant le processus de réalisation du réseau métropolitain lui-même, le but recherché étant celui d’essayer de comprendre le rôle actuel du réseau métropolitain et celui que nous pourrions lui conférer à terme, en profitant de la finalisation du projet. Une proposition de projet de type a priori, donc, est ici remplacée par une autre, que l’on peut définir, en accord avec Françoise CHOAY, de a posteriori. Cette proposition dérive de la connaissance du point de vue des habitants de la ville, afin de comprendre comment cette dernière est perçue par les consciences qui l’habitent : l’usager du métro devient, à l’occurrence, un interlocuteur précieux pour orienter les choix du projet 57 . L’échantillon d’usagers sélectionnés pour nos interviews est constitué de personnes, résidentes en ville ou non, qui fréquentent Naples quotidiennement ou périodiquement, ou qui l’ont visitée seulement en tant que touristes. Ceci a l’avantage de nous donner des points de vue fort différents entre eux, à croiser et retisser afin de pouvoir tracer le profil de la ville. La perception du réseau de la part d’une personne qui traverse Naples pour aller a son lieu de travail est, en fait, fortement éloignée de celle d’une autre qui, par exemple, habite la ville et y recours tout les jours pour ses déplacements ; de la même manière, les attentes et les impressions sont fortement différentes entre un individu, napolitain, qui prend rarement le métro, et un touriste qui visite Naples pour la première fois et qui découvre, à cette occasion, son système de transport souterrain. Toutes les personnes interviewés ont donc fait recours, pour les déplacements à l’intérieur de la ville, à son réseau métropolitain, et spécialement à son nouveau « Métro dell’Arte ». Les interviews, quant à elles, sont structurées selon quatre parties différentes, afin d’essayer tout d’abord d’introduire le sujet avec des questions générales, et de rentrer ensuite 57 CHOAY Françoise, 1965. L’urbanisme, utopies et réalités. Une anthologie. Seuil, Paris 38 pertinemment dans les thématiques traitées, sans pour autant troubler ou conditionner les critères d’évaluation personnels. Durant la première partie, nous avons donc essayés de comprendre les pratiques du transport métropolitain de Naples de la part de ses usagers, d’en discerner les avantages et les inconvénients, et de clarifier les critères selon lesquels ce système de transport est vu et considéré comme étant napolitain ; avec la deuxième partie, nous avons consacrés une attention majeure à discerner l’imaginaire existant autour du concept de métro lui-même ; ensuite, pendant la troisième partie, nous avons essayez de décrypter les sensations que l’on éprouve lorsqu’on voyage en métro, et les différences que l’on arrive à percevoir entre le voyage en soussol et celui qui s’effectue en surface ; enfin, dans la quatrième et dernière partie, nous nous somme préoccupés de nous faire décrire des scénarios pour un possible futur de la ville de Naples. 2.4.6 Le rôle stratégique du « Métro dell’Arte » Nous avons pu constater que, à l’image des grandes ambitions que le projet envisage avec sa réalisation complète, les usagers d’aujourd’hui lui reconnaissent un rôle stratégique à partir de différents points de vue, premièrement car le métro permet de rejoindre facilement des lieux qui ne l’étaient pas auparavant, en raison de la distance géographique importante et de l’altimétrie accidentée qui caractérise la ville. En ce qui concerne le rapport entre les infrastructures propres au métro lui-même et la surface de la ville, en outre, les usagers affirment de remarquer, à l’intérieur du métro, une dimension de fiabilité, qui consiste en la possibilité d’éviter la ville de surface et les problèmes de circulation que naissent à l’intérieur de son tissu urbain extrêmement dense, en raison du nombre de personnes qu’y circulent et de la grande concentration de voitures. Quelqu’un s’est exprimé à ce sujet en parlant d’aventure improbable quant aux déplacements en bus pendant les horaires critiques de la journée, ainsi que des bruits assourdissants de la ville, comparés au sous-sol où règne le calme et le silence. Les usagers remarquent, à l’intérieur des espaces de pertinence du métro, une ambiance plus entretenue, et même les personnes se démontrent comme étant plus éduqués et plus respectueuses. 39 En ce qui concerne le « coté régional » du réseau, contemplé par le projet lui-même, les interviewés lui ont encore reconnu un rôle stratégique, car cela pourrait permettre aux gens d’arriver depuis les autres villes de la Campanie, de bouger a l’intérieur de Naples, et de rejoindre enfin les lieux d’arrivé et de départ les plus importants de la ville, sans difficultés. Ceci est vu, en outre, comme un pas à franchir afin de déclencher des conséquences urbaines très importantes, comme la diminution du trafic des voitures et la décongestion du centre ancien. Les conséquences économiques seraient liées, quant à elles, à la possibilité d’arriver dans chaque coin de Naples, qui pourra ainsi se développer par la suite. Même les attentes pour le futur semble être guidées par un sentiment de confiance : les usagers font référence à une ville vraiment européenne, enfin accessible dans sa totalité, mieux fréquentée, plus orientée vers un développement économique et touristique soutenus par l’efficacité du réseau lui-même ; une ville dans laquelle l’usage intensif du métro apportera, par ailleurs, des améliorations environnementales considérables, à cause d’une baisse de l’utilisation de la voiture particulière et, par conséquent, de la pollution de l’air. Les gens ont ainsi fait référence à des concepts comme occasion et espoir pour le développement et le progrès de la ville, possibilité de rééducation et de re-civilisation de sa population, même revanche vis-à-vis de sa condition actuelle. 2.5 Vers la durabilité 2.5.1 Un scénario pour la ville de Naples « Un scénario n’est pas, bien évidemment, une prévision (…). Un scénario n’est pas non plus la représentation de nos désirs (…). Construire des scénarios veut dire accepter la part de l’ignorance et formuler une où plusieurs hypothèses concernant les différents phénomènes qui intéressent la ville, l’économie et la société afin d’en éclairer les conséquences » (…). Construire cette hypothèse veut dire chercher des indices, des tendances à partir de l’observation du monde actuel et de son histoire (…). Explorer l’évolution possible de certaines grandeurs et les paysages 40 qu’elles peuvent générer (datascape) (…) en cherchant de manière non banale les rapports qui s’établissent, à des échelles différentes, entre populations et territoires pertinents » 58 . Aujourd’hui, la ville de Naples se trouve dans une situation très délicate, avec ses problèmes de chômage, de déchets, de criminalité, de congestion. Les scénarios imaginés par ses habitants portent, souvent, sur une ville tissée, demain autant qu’aujourd’hui, autour de nombreuses contradictions ; une sorte de collage de solutions partielles, mise l’une à coté de l’autre, sans continuité et surtout sans une vision globale de ses besoins. A l’intérieur de ces scénarios, le métropolitain lui-même revêts, selon notre point de vue, un rôle particulier : il est, d’un coté, une pièce de cette mosaïque articulée et, de l’autre, une manière de lier ces discontinuités les unes aux autres, en tentant de créer une homogénéité de lecture urbaine qui soit, en quelque sorte, une synthèse, un palimpseste de la ville elle-même. Il est évident, d’autre part, que le projet de métro est perçu, par les habitants, comme une sorte de manifeste, capable se véhiculer une nouvelle attitude envers la ville et son futur. Cela en ne s’adressant pas exclusivement aux habitants actuels de la ville, mais aussi aux futurs usagers, par rapport auxquels le réseau lui-même est orienté. Reyner BANHAM dans son livre sur la ville de Los Angeles, nous relate : « Comme les générations passées d’intellectuels anglais se mettaient à l’italien pour lire Dante dans les textes, c’est pour pouvoir lire Los Angeles dans les textes que l’ai appris à conduire » 59 . La question qui nous nous posons vis-à-vis de cette situation est, donc, la suivante : faudra-t-il apprendre à se déplacer en métro pour appréhender enfin la ville de Naples, pour en discerner les enjeux contemporains et futurs ? Françoise CHOAY 60 , en analysant l’évolution de l’espace public au fil de l’histoire, constate comment l’intervention des nouveaux facteurs économiques, technologiques, épistémologiques et esthétiques, entraîne la disparition, entre autre, de l’ancienne distinction entre ville et campagne. 58 SECCHI Bernardo, 2000. Prima lezione di Urbanistica. Laterza, Rome-Bari [Trad. franc. 2006] Première Leçon d’urbanisme. Parenthèses, Marseille 59 BANHAM Reyner, 1971. Los Angeles, The Architecture of Four Ecologies. Allen Lane, Londres [Trad. franc. 2008] Los Angeles, l’architecture des quatre écologies. Parenthèses, Marseille 60 CHOAY Françoise, 2003. Espacements. L’évolution de l’espace urbain en France. Skira, Milan-Genève 41 Aujourd’hui, d’après BAUDRILLARD et NOUVEL 61 , nous savons de pouvoir considérer un territoire comme étant urbain, à partir du moment ou il est possible d’y accéder avec d’autres personnes et de le partager. L’espace lui-même en résulte modifié : « le cadre spécifique des rapports humains actuels est un espace de connexion qui assure la coïncidence de l’information et de la circulation ; espace de plus en plus abstrait et médiatisé, constitué par l’ensemble des réseaux nécessaire à la circulation des personnes, des idées et des marchandises » 62 . 2.5.2 La région de Naples et la question de l’énergie Le métro de la ville de Naples est ainsi un occasion pour relier, nous l’avons déjà souligné, des parties de la ville très hétérogènes les unes des autres, en se fiant à sa cohérence technologique et artistique. Néanmoins, nous pouvons remarquer que le projet ne se pose pas, vis-à-vis de la situation actuelle de la ville et de sa région, en des termes de durabilité. Sans s’attarder sur le concept luimême et sur ses multiples dimensions, qui constituent l’objet du chapitre suivant, il est de grand intérêt de rappeler ici la situation énergétique de la Campanie, afin de pouvoir profiler, le plus efficacement possible, une direction à suivre pour faire en sorte que ce même projet soit doté d’une attention particulière à la durabilité et au développement locale. La Campanie, aujourd’hui, présente une consommation totale d’énergie qui équivaut au 5% de celle nationale. Le secteur le plus énergétivore est celui des transports, suivi de ceux civile, industriel et agricole 63 . Pourtant, la région ne possède pas des ressources énergétiques primaires propres, ne serait-ce que pour le potentiel représenté par celles renouvelables. Elle présente, de ce fait, une dépendance énergétique du 96,6%, nettement supérieure à celle italienne qui est du 84,6%. Durant les années qui vont du 1973 au 2004, la production d’énergie électrique de la part de la région a été presque constante, alors que sa demande est augmentée constamment : le résultat de cette situation est donc celui d’un déficit d’énergie 61 BAUDRILLARD Jean, NOUVEL Jean, 2000. Les objets singuliers. Architecture et philosophie. Calmann-Lévy, Paris [Trad. it. 2003] Architettura e nulla. Oggetti singolari. Mondadori Electa, Milan 62 63 CHOAY Françoise, op. cit. ROSSI Federico, 2006. Energia. Guida, Naples 42 électrique qui actuellement consiste en le 81,3%, alors qu’en Italie il représente seulement le 14%. En ce qui concerne les prévisions pour le futur, elles se basent su deux scénarios distingués, dépendants d’une prévision différente quant aux taux de croissance interne. En tout état de cause, la plus probable d’entre elles préconise une augmentation de la consommation d’énergie électrique du 2,7% pour la période 2003-2014, légèrement supérieur à celle de l’Italie qui sera de l’ordre du 2,6%. Sur la base de la loi 308 du 1982, les Régions ont le pouvoir de rédiger le PER, Plan Energétique Régionale ; cette même loi comporte l’intégration, à l’intérieur du Plan Régulateur Générale des Communes qui comptent plus de 50.000 habitants, des plans relatifs à l’utilisation de sources d’énergie renouvelable. Suite à la loi 96 du 1999, les régions ont obtenu certains pouvoirs administratifs concernant les thématiques de l’énergie, certains d’autres faisant partie des compétences de l’Etat ou des Organismes Locaux, comme par exemple les Provinces. La même loi promeut les démarches suivantes : un approvisionnement énergétique adéquat, une réduction de l’émission de gaz à effet de serre, une rationalisation du réseau énergétique actuel, une optimisation de l’utilisation d’énergie, un accès équitable aux ressources énergétiques. Elle prévoit, en outre, la valorisation des ressources énergétiques locales et les formes de production par polygénération, en privilégiant ainsi la génération distribue sur le territoire. Encore, cette loi donne beaucoup d’importance au PEAR, Plan Energétique Environnementale Régionale, qui malheureusement n’a pas encore été rédigé dans le cadre de la région Campanie. Néanmoins il existe des documents préliminaires orientés vers une diminution, avant l’année 2010, de l’actuel déficit énergétique régional, à obtenir à travers le développement des ressources énergétiques renouvelables endogènes, ainsi que par des processus de production par cogénération. En ce qui concerne les ressources renouvelables, la Campanie, en 2004, s’en est partiellement servi pour la production d’énergie, en exploitant localement son potentiel hydraulique, éolien, des biomasse et photovoltaïque 64 . Il nous parait manifeste le manque, dans cette liste, de la cinquième famille d’énergie renouvelable, celle représentée par l’utilisation de la géothermie 64 ROSSI Federico, op. cit. 43 malgré, comme nous allons le voir dans les chapitres suivants, le grand potentiel présent au niveau régional. 2.5.3 Un nouveau regard orienté vers le territoire Si nous considérons maintenant que, au fil de l’histoire, les plus importantes étapes de l’évolution de la société ont été étroitement liées à celles de l’évolution des systèmes énergétiques, il est nécessaire de souligner que, afin de déclencher un processus de développement locale qui soit durable, il est impératif de changer le cursus actuel des choses ; ce cursus qui désormais accable la région Campanie et la contraint dans une position de presque complète dépendance des ressources énergétiques exogènes. C’est justement sur ces mêmes ressources qui fait référence aussi le nouveau réseau métropolitain, qui en nécessite afin de pouvoir satisfaire les besoins en énergie indispensables à son fonctionnement. Il est donc intéressant de se tourner vers les territoires qui entourent la ville de Naples, en les considérant pour cela au sens large du terme : vers le Mare Nostrum et la Campania Felix. La compréhension de leurs potentialités, ainsi que des ressources qui peuvent être utilisées à partir d’aujourd’hui, peut nous guider en direction d’un objectif majeur : rétablir une synergie entre la ville et son territoire, la même synergie qui a toujours caractérisé l’histoire urbaine et qui a été par la suite perdue, oubliée, substituée. Cette ignorance a été supportée par la création d’une série de prothèses technologiques toujours plus importantes, et qui aujourd’hui nous paraissent indispensables 65 . Le résultat obtenu de ce processus a été celui d’une presque totale indépendance entre la ville et son territoire, qui a conduit, d’autre part, à une forte et grandissante dépendance des ressources lointaines importées, en rendant les approvisionnements complètement invisibles et incompréhensibles aux yeux des citoyens. 65 MAGNAGHI Alberto, 2000. Il progetto locale. Bollati Boringhieri, Turin 44 Chapitre 3. Mare Nostrum et Campania Felix : la compréhension du territoire 3.0 Introduction / Introduction L’homme a toujours interagit opiniâtrement avec le territoire environnant afin d’en y extraire les ressources premières nécessaires pour sa survie. Cette interaction perpétuelle à produit, au fil de l’histoire, une remarquable coïncidence entre les lieux de production et ceux de consommations de l’énergie. Avec l’apparition et la large diffusion des ressources fossiles, l’éloignement progressif de ces lieux rend indispensable le recours aux nombreuses prothèses technologiques, et contribue à une déresponsabilisation de la population quant aux comportements énergétiques. L’utilisation diffusée des énergies renouvelables aux différentes échelles de l‘organisme urbain, se démontre indispensable pour la création de la ville durable, une ville re-territorialisée qui sait exploiter ses propres ressources, qui abandonne les processus de simple croissance matérielle pour s’orienter vers des véritables dynamiques de développement, une ville de la sobriété qui sait exploiter le potentiel synergique de sa structure complexe. Man has always stubbornly interacts with the surrounding territory in order to extract the resource materials needed for survival. This perpetual interaction product, throughout history, a remarkable coincidence between the places of production and consumption of energy. With the advent and wide dissemination of fossil resources, the gradual removal of these places makes the use of many technological prostheses required, and contributes to the disempowerment of the people about energy behaviours. The use of distributed renewable energy at different scales of urban organization, proves essential for creating sustainable cities, a re-territorialized city who knows the exploitation its own resources, which leaves the simple process of material growth towards the real dynamic of development, a city of sufficiency who knows how to exploit the synergistic potential of its complex structure. 45 3.1 Durabilité et Développement Durable 3.1.1 Le concept de durabilité Dans le chapitre précédent, à propos du réseau métropolitain de la ville de Naples, nous avons introduit, sans le développer, le concept de durabilité, en nous attardant simplement sur la constatation que la situation énergétique de la Campanie se caractérise aujourd’hui comme dominée par un fort déficit 66 . Ce déficit est du fondamentalement à la nécessité de recourir à une presque totale importation de toutes les ressources énergétiques qui sont indispensables au fonctionnement et au développement de la région. Il nous parait de grand intérêt, alors, de définir le concept de durabilité, afin d’arriver à en comprendre les enjeux majeurs qui le caractérisent et de réussir, par la suite, à proposer un projet dont la concrétisation peut ainsi en respecter les objectifs principaux. Le terme même de durabilité, qui est issu des domaines scientifiques, à une signification facile et intuitive : il concerne, en fait, l’utilisation d’une certaine ressource de manière à en respecter la capacité de reproduction ou de régénération. Il s’agit d’un concept qui est applicable, bien évidemment, aux ressources de type renouvelable, comme les arbres ; pour celles qui par contre se définissent épuisables, comme par exemples les ressources minéralières, nous parlons essentiellement de réglage des conditions et des temps d’exploitation, plutôt que de limitation de l’usage. Il est évident que le concept de durabilité se fonde sur celui de capital naturel 67 , à savoir le stock de matériaux d’origine naturelle à partir duquel il est possible d’extraire un flux de biens et de services, appelés pour cela la rente de ce capital. Nous pouvons alors aisément distinguer deux type de durabilité, la faible et la forte 68 . Quant à la première, elle prévoit une substituabilité mutuelle entre les capitaux naturels et ceux artificiels, et vise à ce que leur somme ne soit pas en 66 ROSSI Federico, 2006. Energia. Guida, Naples 67 WACKERNAGEL Mathis, REES William E., 1996. Our Ecological Footprint. Reducing Human Impact on the Earth. New Society Publishers, British Columbia (Canada) [Trad. it. 1996] L’impronta ecologica. Come ridurre l’impatto dell’uomo sulla terra. Edizioni Ambiente, Milan 68 WACKERNAGEL Mathis, REES William E., op. cit. 46 décroissance. La durabilité forte, par contre, nécessite que les stock de capital naturel soient tenus à un niveau constant indépendamment de la croissance éventuelle de ceux artificiels. Il existe aujourd’hui, autant que dans le passé, des nombreux cas d’utilisation non durables des ressources de la Planète, comme par exemples l’exploitation des forets primaires et la chasse de certaines espèces animales sauvages, qui ont conduit à des résultats néfastes autant pour l’équilibre des écosystèmes naturels que pour les hommes eux-mêmes, et ont ainsi obligés ces derniers à une régulation forcée de leur utilisation. 3.1.2 Le développement durable En ce qui concerne maintenant le concept de développement durable, nous devons souligner qu’il s’agit d’un principe caractérisé par une multitude de facteurs, issus de différents domaines et étroitement entrelacés. Ce concept a été utilisé pour la première fois vers la fin de années 80 du siècle dernier. Il apparaît, en fait, en 1987 à l’intérieur du rapport « Our Common Future » rédigé par la Commission mondiale sur l’environnement et le développement, et il a ainsi prit le non de la Présidente orvégienne Gro Harlem BRUNDTLAND 69 . Dans ce rapport, il est définit comme le développement qui répond aux besoins des générations du présent sans pour autant compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Cette définition, bien évidemment, fait référence à une série de principes fondamentaux, notamment ceux de substituabilité, d’équité et d’irréversibilité 70 , que nous allons brièvement analyser. - la substituabilité est un concept qui part de la constatation que les cycles de production actuels sont structurés autour de facteurs de production de type composite, car dérivés de la somme d’éléments physiques, humains et environnementaux ; les proportions de ces facteurs diffèrent selon les époques historiques et les différents Pays considérés. La substituabilité entre 69 70 http://www.worldinbalance.net/agreements/1987-brundtland.php LANZA Alessandro, 2006. Lo sviluppo sostenibile. Il Mulino, Bologne 47 ces facteurs, ainsi que leur dosage, constitue donc un enjeu déterminant afin de garantir la poursuite du développement mais en respectant pour cela les règles de durabilité. - l’équité concerne l’accès aux ressources naturelles ainsi que celui à la richesse économique, et prend pour ceci en considération autant les générations actuelles qui peuplent la Planète, que celles futures. - l’irréversibilité, enfin, analyse les conséquences qui peuvent s’engendrer sur les équilibres globaux suite à l’exploitation d’une certaine ressource de manière non durable. En partant de ces considérations, la situation mondiale actuelle nous paraît dominée par une forte inégalité, soit du point de vue des possibilités d’accès à la richesse économique, que de celui de la consommation des ressources naturelles. Il est suffisant de rappeler que, malgré l’importante croissance économique qui a suivie la seconde guerre mondiale, le 20% de la population actuelle demeure en des importantes conditions de sous-développement, alors que le 20% de la population qui vit dans les Pays industrialisés consomme aujourd’hui le 58% de l’énergie totale et produit le plus de déchets 71 . 3.1.3 Les facteurs critiques du développement durable Le développement durable nous apparaît cependant comme étant étroitement lié à une série de facteurs critiques : - Croissance démographiques : elle concerne le nombre d’habitants que la Planète est en mesure de soutenir. Ce nombre dépend, bien évidemment, de la quantité de ressources naturelles qui sont nécessaires au soutènement des différentes populations. La plupart des évaluations qui ont été menée dans ce domaine, et notamment le 40% d’entre elles, estime à 8 milliards le nombre d’habitants maximal tolérable par la Terre. Or, il est indéniable que le taux de croissance démographique est énormément augmenté à partir du siècle dernier : à commencer dès 300 millions de personnes de l’année zéro, l’humanité a nécessité de 1700 ans pour arriver à 400 millions ; ensuite, et toujours plus rapidement, elle est arrivée à compter 1 milliard d’habitants en 1804, 3 milliards en 1960 et 6 milliard en 1999, et plus précisément le 12 Octobre de cette année. 71 LANZA Alessandro, op. cit. 48 Aujourd’hui, la population croit avec un rythme de 200 individus chaque minute 72 . Il est évident que ce taux de croissance comporte une diminution de la quantité de ressources disponibles pour chaque habitant, notamment en ce qui concerne l’eau, l’espace et les matière premières 73 . - Développement économiques : il est lié avant tout au phénomène de la distribution de la richesse, qui n’est pas équitable aux différents endroits de la Planète. Aujourd’hui, en fait, le 20% de la population mondiale possède le 87% des entrées monétaires, avec des fortes différences qui se présentent non pas seulement entre le Nord et le Sud du monde, mais aussi à l’intérieur des différents Pays considérés. Ces disparités sont à l’origine des phénomènes de migrations au niveau local et global, qui sont en désaccord avec certains principes du développement durable. Le PNB (Produit National Brut), en outre, ne mesure pas la richesse des Pays ni leur niveau de bien-être, mais seulement les flux de matière et les activités économiques mesurables 74 , ce qui emmène, la plupart des fois, à des observation et à des conclusions contradictoires. - Ressources naturelles et environnement : il concerne le rapport direct qui existe entre la croissance économique et le respect, ou le manque de respect, pour l’environnement. La situation actuelle est à la recherche d’un indispensable état d’équilibre, qui se présente pour autant comme extrêmement difficile à atteindre. Cela en raison, surtout, du fait que la condition d’optimum considéré au niveau social n’est pas mise en relation directe avec celle prise au niveau individuel. Une des solutions envisagée pour faire face à cette contradiction consiste en l’ajout d’une taxe économique qui grave sur les acteurs polluants, en les orientant vers des processus de production et de consommation moins compromettants pour l’environnement. - Pollution locale : elle considère des phénomènes de pollution pour lesquels il est reconnaissable une sorte de superposition entre les acteurs polluants et les acteurs pollués ; le cas le plus évident est celui qui évalue les effets directs sur l’environnement locale qui dérivent de certains comportements de la communauté résidente. Les différents secteurs d’activité 72 73 LANZA Alessandro, op. cit. WINES James, 2000. L’architecture verte. Taschen, Koln 74 WEIZSACKER Ernst U., LOVINS Amory B., LOVINS L. Hunter, 1997. Factor Four : Doubling Wealth, Halving Resource Use - A Report to the Club of Rome. Earthscan, Londres [Trad. franc. 1997] Facteur 4. Deux fois plus de bien-être en consommant deux fois moins de ressources. Un rapport au Club de Rome. Terre Vivante, Mens 49 économique ont, en fait, des plus ou moins fortes répercussions sur l’environnement local : le secteur agricole, par exemple, est responsable de l’érosion et de la salinisation des sols, de la perte de leur capacité de régénération et de stockage naturel de l’eau, de la pollution des nappes phréatiques ; le secteur industriel est responsable de la production de déchets, de la consommation de ressources naturelles épuisables ainsi que de la pollution généralisée de l’air, des sols, des eaux ; le secteur énergétique est responsable des importantes émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ainsi que des risques de pollution qui dérivent des nécessités de transports de l’énergie et de ses ressources ; le secteur des transports, enfin, est responsable des émissions des gaz nocifs dans l’air que nous respirons, due à l’utilisation des carburants obtenus à partir des ressources fossiles. - Problèmes environnementaux globaux : ils prennent en considération tous les phénomènes qui ne sont pas exclusivement déterminés par l’activité de pollution des acteurs locaux mais qui dérivent de la somme des pollutions engendrées par la totalité de ceux-la. Ils sont caractérisés, pur cela, par un forte inertie, due au décalage temporel entre une cause déterminée et la manifestation de son effet écologique 75 . Parmi les problèmes environnementaux globaux, nous pouvons indiquer les suivants : les dérèglements climatiques 76 , qui peuvent engendrer, ensemble avec la fonte des calottes polaires, une hausse du niveau des océans, une augmentation des phénomènes météorologiques extrêmes, une modification des écosystèmes naturels, une baisse de la productivité alimentaire de certaines régions ainsi qu’une extension des zones arides privées de ressources en eau ; la destruction des forets primaires qui demeurent essentielles à la régulation du climat global de la Planète ainsi qu’à la conservation de la biodiversité ; la réduction de la couche d’ozone qui représente un indispensable filtre pour les radiations solaires ; les pluies acides. 75 76 WACKERNAGEL Mathis, REES William E., op. cit. SCHWARTZ Peter, RANDALL Doug, 2006. Rapport secret du Pentagone sur le changement climatique. Allia, Paris 50 3.1.4 Les cinq dimensions du développement durable Il est ainsi évident que le développement durable se présente comme composé par différentes dimensions, entre elles fortement entrecroisées. Selon Alberto MAGNAGHI 77 , nous pouvons en distinguer cinq : - la durabilité politique s’obtient grâce à une forte capacité d’autogouvernement de la part de la communauté. - la durabilité sociale se concrétise à travers un important degré d’intégration de tous les acteur, y compris les acteurs faibles, dans les processus de gouvernement du territoire. - la durabilité économique vise à la production de valeurs ajoutées au territoire, notamment les ressources. - la durabilité environnementale s’obtient grâce à l’application de règles vertueuses capables de déclencher des processus de autodurabilité. - la durabilité territoriale dérive dès manières d’habiter le territoire qui soient en mesure de conduire à des processus de reterritorialisation. 3.2 Climat - Ressources – Civilisation 3.2.1 La gestion des ressources et les civilisations anciennes La recherche d’une relation équilibrée entre les nécessités de l’hommes et les ressources du territoire nous paraît ainsi fondamentale. Il s’agit, bien évidemment, d’une relation très anciennes, qui nous oblige à remonter à l’envers le cours de l’histoire, afin d’en éclairer progressivement les règles et les enjeux. Les différences des milieux spécifiques sont à la base, en fait, des hétérogènes parcours évolutifs qui caractérisent l’histoire des peuples de la Planète 78 , selon une relation de cause à effet que Paolo FEDELI appelle déterminisme de l’environnement 79 . 77 MAGNAGHI Alberto, 2000. Il progetto locale. Bollati Boringhieri, Turin 78 DIAMOND Jared, 1997. Guns, germs and Steel. The fates of human societies. W. W. Norton , New York [Trad. franc. 2000] De l’inégalité parmi les sociétés. Essai sur l’homme et l’environnement dans l’histoire. Gallimard, Paris 79 FEDELI Paolo, 1990. La natura violata. Ecologia e mondo romano. Sellerio, Palermo [Trad. franc. 2005] Ecologie antique. Milieux et modes de vie dans le monde romain. InFolio, Gollion 51 Nous savons, en outre, que les résultats de cette relation ont comportés, quelque part, l’essors et l’effondrement des civilisations passées : parmi les causes qui sont à la base de la disparition de certaines d’entre elles, que Jared DIAMOND définit écocide 80 , nous retrouvons, en fait, la mauvaise et non durable gestion des ressources naturelles, la dégradation de l’environnement locale et l’inadéquation de la société à répondre aux nouvelles conditions générées 81 . C’est le cas, par exemple, du peuple des Mayas, dont les ressources hydriques se sont démontrées insuffisantes à soutenir une importante explosion démographique ; ou de la civilisation de l’île de Paque, dont les habitants, une fois coupé le dernier arbre de la foret primordiale, se sont retrouvés privés d’une des ressources première nécessaire à leur soutènement 82 . Au contraire, la lutte incessante des hommes contre des conditions naturelles particulièrement défavorables afin de réussir à en maîtriser les phénomènes a produit le miracle vénitien, une victoire sur un site urbain condamné par nature à une inéluctable défaite, treize siècles durant 83 . Ce qui aujourd’hui met en péril la réussite et la survie de certaines espèces animales et végétales, y compris celle humaine selon ses actuels modes de vie, demeure le rapport existant entre le climat, l’homme et les ressources naturelles ; de grande importance étant notamment la concentration, dans l’atmosphère, des gaz à effet de serre. Il est de grand intérêt, alors, de comprendre ces phénomènes et d’en éclairer les répercussions qu’ont toujours affectés le déroulement de la vie sur la Terre. 3.2.2 Le CO2 et l’effet de serre : la part de la nature et celle de l’homme Grâce aux archives glacières de l’Antarctique, et notamment au forage de Vostok qui à permis de procurer des échantillons vieux de 400 000 ans, les scientifiques sont en mesure de reconstituer aujourd’hui la nature de l’air qui se trouve encapsulée dans la glace fossile, afin de 80 DIAMOND Jared, 2005. Collapse. How societies chose to fail or succeed. Viking Press, New York [Trad. franc. 2006] Effondrement. Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie. Gallimard, Paris 81 82 83 VICARI Jacques, 2007. Ecologie urbaine. . InFolio, Gollion TOZZI Mario, 2008. Italia segreta. Viaggio nel sottosuolo da Torino a Palermo. Rizzoli, Milan BRAUNSTEIN Philippe, DELORT Robert, 1971. Venise. Portrait historique d’une cité. Editions du Seuil, Paris 52 connaître la composition de l’atmosphère durant certaines périodes préhistoriques ; cela permet notamment de remonter aux relatives concentrations de CO2. Cette concentration est à la base du phénomène très connu de l’effet de serre, un phénomène dont le juste équilibre demeure fondamentale pour le maintient de la vie sur la surface de la Terre : grâce à la présence de l’atmosphère, en fait, la température moyenne de notre planète n’est pas de -19°C comme elle le devrait, mais de +15°C 84 . Les gaz contenus à l’intérieur de sa composition, et notamment le CO2, sont en mesure d’éviter la totale réflexion et dispersion des rayons du Soleil, à travers la captation de la chaleur qu’ils véhiculent ; ceci réussi à assurer la juste température sur la surface du globe. Il est évident, par contre, qu’avec une excessive concentration de ces gaz dans l’atmosphère, suite par exemple aux émissions nocives qui dérivent des l’activités anthropiques, ce phénomène d’équilibre parfait s’altère et se transforme en un réchauffement globale, qui peut avoir des conséquences dangereuses pour la survie des espèces qui peuplent la Terre, au moins selon les conditions et les règles que nous connaissons actuellement 85 . A partir d’une concentration de 275 parts de CO2 par million en début de XX siècle, nous sommes en fait passés à une concentration actuelle de 370 parts par million ; si aucun remède ne sera pris, cette augmentation peut arriver à une valeur de 550 à la fin de ce siècle. Cela correspondrait à un changement climatique de la même intensité, mais de signe opposé bien évidemment, à celui qui nous sépare aujourd’hui de la dernière glaciation 86 . Nous savons, grâce aux prélèvements d’échantillons antarctiques, que la concentration de CO2 dans l’atmosphère a présentée des valeur variables selon les époques considérées. Avant d’être une conséquence de l’activité humaine, cette concentration est, en fait, une fonction du rapport qui existe entre la Terre et le Soleil : tous les 100 000 ans, l’excentricité de l’orbite terrestre procure une variation de la distance entre les deux astres, et donc une différente radiation solaire 84 LANZA Alessandro, op. cit. 85 SZOKOLAY Steven V., 2004. Introduction to Architectural Science. The Basis of Sustainable Design. Architectural Press, Oxford [Trad. it. 2006] Introduzione alla progettazione sostenibile. Hoepli, Milan 86 MENNA Pietro, 2003. L’energia pulita. Il Mulino, Bologne 53 qui intéresse notre planète ; de celle-la dépendent ensuite les oscillations des températures sur sa surface. 3.2.3 L’activité des hommes et les répercussions sur l’environnement Selon les recherches contenues dans l’ouvrage de Jacques VICARI 87 , il aurait du se produire une nouvelle glaciation depuis quelques millénaires, mais l’époque de la combustion déclenchée par l’Homo Sapiens voici 5 000 ans à travers son intense activité de domestication de la nature, et poursuivie depuis lors à travers l’œuvre de presque toutes les civilisations qui l’ont suivie, a modifié le cursus naturel des choses. Les géologues ont confirmé l’apparition des phénomènes de sécheresse et de désertification de territoires entiers, tant en Afrique qu’en Asie, il y a justement 5 000 ans. En Europe aussi, et notamment en Italie, certaines régions méridionales, arides par nature mais recouvertes jadis d’abondantes forets, ont été désertifiées par la présence de l’homme et par son activité, autour de la même époque. Ces régions sont ainsi devenues le théâtre d’une civilisation rupestre qui a été capable de répondre habilement aux nouvelles conditions, en s’adaptant efficacement à un territoire aux équilibres extrêmement délicats ; cette même civilisation a donné naissance aux fameux habitats troglodytiques des Sassi de Matera, un des plus précieux témoignages de bioarchitecture au monde 88 . 3.2.4 Optimum et pessimum climatiques Nous savons, par le biais de nombreuses recherches, que les changements climatiques ont eu au cours de l’histoire des conséquences importantes sur l’évolution des espèces : les australopithèques, par exemple, naissent durant une période de refroidissement générale afin de pouvoir s’adapter, en marchant sur le sol, à la disparition de milieux forestier auxquels ils s’étaient accoutumés 89 . Ces mêmes changement ont en outre comportés des effets spectaculaires en 87 88 VICARI Jacques, op. cit. LAUREANO Pietro, 1993. Giardini di pietra. I Sassi di Matera e la civiltà mediterranea. Bollati Boringhieri, Turin 89 GORE Al, 1992. Earth in the Balance. Ecology and the Human Spirit. Houghton Mifflin, Boston [Trad. franc. 1993] Urgence planète Terre. L’esprit humain face à la crise écologique. Hachette Littératures, Paris 54 provoquant des transfert massif de populations d’une aire géographique de la Planète à une autre : une des plus grandes migration de l’histoire, celle qui à porté l’espèce humaine sur le continent américain, est notamment le résultat d’une glaciation qui à eue comme conséquence une baisse du niveau des océans 90 . Avec l’étude directe de la succession des époques les plus récentes, les historiens ont réussi à souligner, de la même manière, une alternance d’optimum et de pessimum climatiques, en concomitance avec l’essors, l’apogée et le brusque effondrement des civilisations dominantes : c’est le cas, par exemple, des civilisation mésopotamiennes ; des Empires romain et sassanide suivis des invasions barbares ; des progrès qui ont caractérisés l’An Mil et qui précèdent la successive petite ère glacière ; de la modernité et enfin de l’époque contemporaine. Cette dernière se présente comme une succession de quatre révolutions : agricole, industrielle, énergétique, démographique 91 , dont les conséquences, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, n’ont pas une connotation géographique locale mais affectent toute la Planète et sa population, en une manière ou en une autre, en touchant aux équilibres délicats existants entre le climat, les hommes et les ressources. 3.3 Environnement : de la Nature au Paysage 3.3.1 Le résultat d’une relation synergique Les activités de l’homme sur l’environnement qui l’entoure produisent, depuis plus de cinq millénaires, des effets remarquables sur la nature ; des effets qui conduisent à la formation d’une nouvelle nature, plus anthropique, issue de cette relation synergique. Cela en raison du fait que les établissements humains ont toujours nécessités d’une maîtrise de l’environnement et de ses conditions, maîtrise que Reyner BANHAM distingue selon les milieux dans lesquels l’homme se trouve à devoir survivre : nous retrouvons alors des structural solutions, qui demandent un investissement personnel de la part de l’homme afin de bâtir des structures répondantes aux conditions climatiques données, et des power-operated solutions, qui par contre nécessitent de la 90 91 GORE Al, op. cit. VICARI Jacques, op. cit. 55 présence de ressources énergétiques locales, parfois difficiles à repérer, afin de pouvoir recréer des conditions artificielles plus adéquates 92 . MAGNAGHI, alors, définit le Territoire comme l’œuvre d’art la plus importante que l’humanité ait exprimé, issue du dialogue entre deux entité vivantes, l’Homme et la Nature ; un dialogue qui s’est perpétré, comme nous l’avons vu, durant une longe histoire 93 . Entité physique et mentale à la fois, le territoire se définit, selon André CORBOZ 94 , comme le résultat d’un double processus : d’un coté il se modifie spontanément selon des rythmes naturels, et de l’autre il subit les interventions humaines. Indéniablement, le territoire est aussi intéressé par certains phénomènes dont la durée est telle, comme c’est le cas par exemple pour les changements climatiques, à rendre ses effets imperceptibles à l’observation directe de la part d’un individu ou d’une génération entière ; ceci lui confère, parfois, le même caractère d’immuabilité qui connote normalement la nature. Selon CORBOZ, en outre, aussitôt qu’une communauté s’installe sur un territoire, elle commence à le modifier ; le résultat est donc un produit, un projet collectif. Durant ce processus de modification, il se trouve que certaines traces laissées auparavant par d’autres hommes soient supprimées, alors que d’autres y soient ajoutées : le territoire ressemble pour cela à un palimpseste 95 . Le concepts de territoire nous emmène, par extension, à celui de paysage, auquel JACKSON, désireux d’en donner une nouvelle définition, apporte une contribution considérable. Il s’éloigne, en fait, d’une conception purement esthétique du paysage, conception qui place l’homme en un rôle de spectateur, et en adopte une autre qui résulte guidée par des raisons pratiques. Il nous parle, alors, d’une composition d’espaces élaborée par l’homme sur le sol, sur la surface de la terre, afin de pouvoir répondre aux besoins d’une communauté ; d’un ensemble doté d’un certain degré de permanence, topographique et culturelle ; d’un élément non pas simplement naturel faisant partie de l’environnement, mais d’un espace synthétique, culturel ; d’un système 92 93 94 95 BANHAM Reyner, 1969. The Architecture of Well-Tempered Environment. The University of Chicago Press, Chicago MAGNAGHI Alberto, op. cit. CORBOZ André, 2001. Le Territoire comme palimpseste et autres essais. Les Editions de L’imprimeur, Besançon CORBOZ André, op. cit. 56 artificiel, créé pour accélérer ou ralentir les processus naturels, afin d’imposer ceux de nature humaine ; d’un espace social, d’un territoire, constitué avant tout d’une interaction entre activités humaines et réalités naturelles. Tous paysage, alors, est porteur d’un but, même si parfois de façon inconsciente ; il est porteur d’une signification. Il est alors intéressant de remarquer que, lorsque apparaît pour la première fois dans l’histoire la civilisation urbaine, avec son pouvoir centrale dépersonnalisé 96 , les différentes nécessités de mesurer la réalité afin de pouvoir la lire et la cataloguer, ont emmené à une profonde standardisation du monde. Cette standardisation, qui à intéressé le plus particulièrement le paysage agricole, à transformé ce dernier en une entité sexagésimale, dont les champs et les canaux se mesurent finalement selon des unités simplifiées et des rapports conventionnels. Ceci comporte une véritable révolution dans l’approche mentale de la réalité que, selon LIVERANI, est de même importance de celle causée parallèlement par l’introduction de l’écriture. 3.3.2 Le paysage politique et le paysage habité Les hommes, en tant qu’animaux politiques et habitants de la terre à la fois, ont tendance à créer une communauté ; ce faisant, ils participent à la création des paysages, qui sont donc la manifestation visible de leurs intentions. La double spécificité de l’homme peut avoir des répercussions fort différentes sur la manière d’interagir avec la nature. Nous pouvons ainsi reconnaître, en accord avec JACKSON, deux différents types de paysage : le paysage politique et le paysage habité. Quant au premier, il naît de manière délibérée pour permettre aux hommes de vivre dans une société juste, maîtrisée ; il se présente comme la réalisation d’un archétype, d’un idéal social, religieux et moral, et pour cela demeure indifférent à la topographie qu’il recouvre et à la culture endogène des lieux ; il est, de ce fait, le paysage de la grande échelle, de la géométrisation du territoire qui, poussée à l’extrême, produit des phénomènes imposants comme celui de la grille territoriale des Etats-Unis ; l’aspect naturel contenu en son intérieur, demeure dépourvu d’une identité propre, comme étant au service d’un objectif humain. 96 LIVERANI Mario, 1998. Uruk. La prima città. Laterza, Rome-Bari 57 Le paysage habité, quant à lui, appelé aussi par JACKSON paysage vécu, évolue au rythme des tentatives différentes que les hommes font pour essayer de vivre de manière harmonieuse avec la nature ; il est alors le produit d’un incessant processus d’adaptation, dont l’identité se manifeste durant le parcours même d’accomplissement ; il se réalise comme une intégration au lieu et à son peuple ; il peut se définir, donc, comme un paysage existentiel, et demeure, bien évidemment, le type de paysage le plus ancien et le plus répandu. L’homme politique voit dans le paysage une création, la sienne ; une création qui est en mesure de lui conférer un statut spécifique, différent de celui des autres animaux. L’homme habitant de la terre, en revanche, y voit un quelque chose de déjà existant, qui précède son arrivée et son action. Comme pour tout être humain, qui ne peut se considérer comme étant ni exclusivement animal politique ni habitant de la terre, mais comme un mélange équilibré des deux aspects, de la même manière tous paysage ne peut se traiter comme si doté d’une seule et unique identité, mais plutôt comme une coexistence des deux natures ; coexistence qui n’est pas pour autant en équilibre parfait, mais dans laquelle une des réalité est plus présente et déterminante que l’autre 97 . 3.3.3 Le paysage de l’ingénieur Avec la modernité, un nouveau type de paysage se profile à l’horizon, un paysage qui, toujours selon JACKSON, est celui de l’ingénieur. Il s’agit cette fois-ci d’un type de paysage particulier, car sa réalisation est consacrée à la production, à la conservation et à l’utilisation de l’énergie. Selon le point de vue de l’ingénieur, en fait, un paysage est beau lorsque les systèmes de circulation de l’énergie fonctionnent de manière impeccable. Ce nouveau type de paysage, une fois bouleversé efficacement l’environnement, procède à modifier les mentalités mêmes de la population intéressée. Cette dernière se retrouve à n’avoir plus aucun contact directe et responsable avec la nature alentour et se réfugie, alors, à l’intérieur de la ville. Or, elle voit désormais l’environnement simplement comme un lieu où acheter, ou prendre gratuitement, les ressources nécessaires, afin de pouvoir les transférer en ville ; ses 97 BRINCKERHOFF JACKSON John, 1984. Discovering the Vernacular Landscape. Yale University Press, New Haven et Londres [Trad. franc. 2003] A la découverte du paysage vernaculaire. ACTES SUD / ENSP, Arles et Versailles 58 expériences avec cet environnement deviennent programmées, collectives, ainsi qu’urbaines, car elles se consomment en n’excluant pas la présence d’autrui 98 . 3.4 Ville et Territoire 3.4.1 Les territoires aujourd’hui : les villes centripètes et les villes centrifuges L’apparition de ce nouveau type de paysage nous emmène à des considérations importantes concernant la situation du territoire aujourd’hui ; une situation qui est fortement conditionnée par l’étalement de la structure de la ville contemporaine, et par conséquent de l’activité urbaine, sur un espace qui est de plus en plus vaste et éloigné de son noyau d’origine. Au début, en fait, la ville et la campagne se présentaient comme deux entités nettement séparées, et pour cela fortement reconnaissables. La transformation topologique qui est intervenue ensuite a transformé progressivement la campagne en une sorte d’élément urbain, qui a concourue pour cela à dessiner l’espace métropolitain. Les grandes infrastructures qui ont triangulé le territoire, ont englobé dans leur maille des parties toujours plus importantes de sol libre, qu’aujourd’hui n’appartient pas à la nature en tant que telle et qui, en même temps, ne peut pas non plus se définir comme étant une partie de la ville. La géographie est devenue ainsi une manière de structurer l’ensemble de l’espace urbain 99 . L’antagonisme même qui existe entre la ville et la campagne est, alors, une notion complètement citadine. Si aujourd’hui nous voyons disparaître l’ancienne opposition entre le rural et l’urbain, c’est surtout à cause de l’extension de l’urbain à l’ensemble du territoire. Suite en fait à l’introduction et à la diffusion des technologies, processus qui déclenche une radicale modification des comportements humains ainsi qu’une homogénéisation des différents modes de vie, l’espace urbain n’est pas considérable aujourd’hui comme un espace caractérisé par une succession serré de bâti, mais plutôt comme celui dans lequel les habitants ont acquis une mentalité citadine 100 . 98 BRINCKERHOFF JACKSON John, op. cit. 99 MARTI ARIS Carlos, 2005. La cimbra y el arco. Fundaciòn Caja de Arquitectos, Barcelone [Trad. it. 2007] La cèntina e l’arco. Christian Marinotti Edizioni, Milan 100 CORBOZ André, op. cit. 59 Selon KOOLHAAS, d’ailleurs, l’ancien exode de la population dès campagne vers la ville se traduit aujourd’hui par un mouvement vers la Ville Générique, à savoir une ville tellement invasive qui est en mesure de rejoindre la campagne 101 . Ceci, en accord avec Lewis MUMFORD 102 , nous emmène à distinguer cette expansion urbaine, contemporaine, à celle des origine de la civilisation, lorsque le mouvement à considérer était diamétralement opposé : non pas une explosion mais une implosion, qui à vue les différents éléments de la communauté, jusqu’alors épars sur une grande vallée ou sur des étendue encore plus vastes, rassemblés pour la première fois à l’intérieur des remparts de la ville. 3.4.2 La libération du territoire : les prothèses technologiques L’homme, on l’a dit, a tendance alors à couvrir le territoire environnant d’objets, d’œuvres, d’infrastructures, de poisons ; ce faire l’emmène à la libération de ce territoire, et à la construction d’une seconde nature, qui peut se définir comme étant artificielle 103 . « La construction des réseaux autoroutiers, celle des nouvelles infrastructures ferroviaires et aériennes, l’équipement systématique des cotes les plus favorables au tourisme estival et celui des régions montagneuses impropres à l’agriculture et au logement pour accueillir celui de l’hiver, telles sont les traces les plus visibles d’une activité essentiellement citadine, dont le but consiste à mettre les continents à la disposition de l’homme des villes » 104 . Le processus de progressive libération de l’homme du territoire, dont parle MAGNAGHI 105 dans son ouvrage « Le projet local », se fait à travers la réalisation, nous l’avons déjà évoqué, de prothèses technologiques ; c’est en fait la technologie qui permet de se servir du territoire comme d’un simple support aux activités et aux infrastructures, qui sont ainsi placées sur sa surface selon 101 KOOLHAAS Rem, 1995. The generic city. In OMA, KOOLHAAS Rem, MAU Bruce, 1995. S,M,L,XL, The Monacelli Press, New York/010 Publishers, Rotterdam [Trad. it. 2006] La città generica. In Junkspace. Per un ripensamento radicale dello spazio urbano. Quodlibet, Macerata 102 MUMFORD Lewis, 1961. The city in history. Harcourt, Brace and Jovanovich, New York [Trad. it. 1967] La città nella storia. Bompiani, Milan 103 104 105 MAGNAGHI Alberto, op. cit. CORBOZ André, op. cit. MAGNAGHI Alberto, op. cit. 60 des méthodes qui demeurent étrangères à sa nature, et donc exclusivement guidées par des logiques fonctionnelles et économiques. Cette situation se révèle comme étant non durable, car elle se trouve à être considérée comme la responsable de l’énorme consommation de sol de la part des villes, de leur impressionnante voracité énergétique, de l’utilisation de ressources non renouvelables, de la concentration de facteurs polluants, de la création de nouvelles pauvretés. L’habitant du lieu est à considérer, aujourd’hui, comme un producteur et un consommateur. 3.4.3 La ville contemporaine el les facteurs d’agression du territoire La ville contemporaine, reconnue comme la responsable première de cet agression œuvrée sur le territoire, se présente aujourd’hui comme caractérise par une nouvelle série de facteurs et de règles de fonctionnement. - les progrès technologiques, tout d’abord, ont permis de s’abstraire des anciennes nécessités territoriales, qui étaient représentées autrefois par la nécessité de s’installer près des ressources énergétiques, de trouver une dimension pour la ville apte à garantir la reproductibilité des ressources environnementales locales ainsi que des temps raisonnables pour les transports des personnes, des marchandises, des énergies et des informations. - la prédominance de réflexions de type économique à l’intérieur des processus d’organisation de l’espace urbain, ensuite, ont conduit au respect exclusif des logiques de fonctionnement du cycle de production, et ont ainsi produit un éloignement entre la structure urbaine et la vrai signification du territoire. - l’application de processus industriels à tous les secteurs de la production ainsi que l’utilisation de matériaux standardisés pour la concrétisation de l’espace urbain, d’autre part, ont emmené à une indifférence entre l’architecture et les conditions spécifiques du lieu, ainsi qu’à une perte de connaissances de l’environnement et des règles et des principes qui régissent son fonctionnement. - la perte de valeur de l’espace urbain, encore, que aujourd’hui n’est plus considéré comme un lieu de rencontre mais comme une pure connexion entre les différentes spécificités fonctionnelles, a généré une diminution des anciennes relations sociales qui caractérisaient la ville 61 auparavant. La transformation du territoire, enfin, en un produit, en une sorte de marchandise à acheter, a entraîné un processus de construction qui tend à oublier les anciennes règles de constitution de l’habitat humain 106 . L’architecture, considérée comme une discipline qui construit les formes physiques du territoire anthropique, doit alors promouvoir, afin que ce système puisse fonctionner, une transformation de la nature en un nouveau système qui soit productif et habitable à la fois 107 . 3.5 Ville et Energie 3.5.1 Les ressources d’énergie, le fonctionnements de la ville et les formes urbaines Il est évident que la cause première qui a déterminé la naissance du rapport modern entre la ville et son territoire et qu’ensuite, durant les époques plus récentes, en a régie la forte brisure qui s’est produite, est a retracer dans la relation qui s’est toujours instaurée entre les ressources d’énergie nécessaires au fonctionnement de la ville et la conformation physique qui en dérive. Avec la révolution agricole et les domestications animales et végétales qui en ont suivis, en fait, il a été franchi un pas important en ce qui concerne l’exploitation de l’énergie solaire 108 . Les villes sont de l’énergie 109 . L’évolution de la structure urbaine, au fil des époques historiques, se présente en fait comme le résultat d’un effort continu et opiniâtre perpétré par les hommes, afin de satisfaire leur besoins en énergies, en essayant de rendre disponibles et utilisables des ressources toujours nouvelles et plus efficaces. Les lieux où cette recherche s’est manifestée le plus intensément sont justement ceux mêmes où le développement socioéconomique et technologique a été supérieurs, à savoir les villes. Historiquement les ville, alors, ont toujours étés le résultat de leurs régimes énergétiques 110 : leur conformation, leur fonction et 106 107 108 MAGNAGHI Alberto, op. cit. MARTI ARIS Carlos, op. cit. MUMFORD Lewis, op. cit. 109 DROEGE Peter, 2006. The Renewable City-A comprehensive guide to an urban revolution. John Wiley & Sons, Chichester [Trad. it. 2008] La città rinnovabile. Guida completa ad una rivoluzione urbana . Edizioni Ambiente, Milan 110 ibid. 62 leurs perspectives étaient la conséquence des prérogatives et des disponibilités énergétiques présentes sur le territoire. Selon Paolo DE PASCALI, d’autre part, cette même relation demeure valable si nous la considérons en sens inverse : c’est-à-dire que la croissance et l’articulation des consommations énergétiques influencent fortement la structure de la ville, et notamment sa diversification et sa complexification progressives 111 . 3.5.2 Les villes contemporaines comme systèmes ouverts : la dissipation d’énergie Les villes représentent donc les lieux où, historiquement, s’est enregistré une concentration de la demande d’énergie, et dans lesquels se sont vérifiés en même temps les plus massives utilisations de celle-la, telles à avoir des répercussions sur l’économie, la culture et la société en général 112 . La ville, cependant, est comparable à un puissant système ouvert qui emporte surtout matières premières, énergie, informations et personnes, et qui, après un processus que l’on pourrait comparer à celui du métabolisme, exporte essentiellement d’autres informations ainsi que des biens de consommation, des déchets et de la pollutions, y compris des grandes quantités de CO2 et d’autres gaz à effet de serre ; ces derniers sont à distinguer entre ceux qui sont produit directement par la ville, et notamment par son système de fonctionnement énergétique, et ceux qui sont produits indirectement à travers l’activité de production des produits qui sont destinés à une consommation urbaine. Les villes peuvent alors être considérées, en accord avec Richard ROGERS 113 , comme des immenses organismes parasites, à l’intérieur desquels le processus de conversion, ce métabolisme qui est dépendant du climat, du niveau de développement, de la dimension, de la structure et de l’histoire, se traduit, en quelque sorte, en une dissipation et en un gaspillage d’énergie. Cela est imputable à l’actuel model de fonctionnement urbain, déterminé par les 111 112 DE PASCALI Paolo, 2008. Città ed energia. La valenza energetica dell’organizzazione insediativa. Franco Angeli, Milan DE PASCALI Paolo, op. cit. 113 ROGERS Richard, GUMUCHDJIAN Philip, 1997. Cities for a small planet. Faber and Faber, London [Trad. franc. 2000] Des villes durables pour une petite planète . Le Moniteur, Paris 63 processus de production de biens, par les différents modes de transport, et par les outils qui sont mis en œuvre pour l’obtention du moderne et diffusé niveau de confort. Les principaux secteurs de consommation d’énergie en milieu urbain sont en fait l’industrie, les ménages et les transports ; au secteur des ménages il est normalement rattaché celui du tertiaire car les consommation sont de nature et de caractéristiques comparables 114 . 3.5.3 L’évolution des ressources énergétiques : états de crise et nouvelles ressources En partant de ces considérations, nous pouvons conclure que l’histoire urbaine, et notamment celle de l’utilisation du territoire environnant, peut être interprétée comme une fonction de l’évolution des ressources énergétiques et des technologies nécessaires à leur conversion et utilisation ; et que, encore, aux périodes de crises des différentes ressources correspond un processus de changement socio-économique et d’organisation territoriale, qui emmène à l’essors d’une nouvelle d’entre elles. Chaque époque a ainsi été caractérisée par un différent système énergétique, qui visait à utiliser les ressources locales disponibles tout en essayant d’améliorer leur efficacité par le biais de l’exploitation de la force des éléments naturels et des différentes dynamiques climatiques ; à chacun de ces effort correspondait une certaine organisation urbaine ; le déclin d’une des composantes de cette relation, ou des deux en même temps, a déclenché, historiquement, l’apparition et l’imposition de nouveaux systèmes. A l’origine, le passage même du système de la récolte et de la chasse à celui de la mise en culture et de l’élevage, qui a conduit l’homme vers la naissance de la civilisation ainsi que vers l’apparition de la culture urbaine, a été guidé par l’insuffisance des ressources énergétiques dont disposaient les êtres humains pour leur soutènement ; il s’agissait notamment d’un bilan encore fortement déséquilibré entre la quantité d’énergie dépensée pour se procurer de la nourriture et celle obtenue comme résultat même de l’alimentation. Pour une longue partie de l’histoire, plus ou moins depuis la naissance de l’humanité jusqu’à l’époque préindustrielle, l’évolution de la civilisation a été guidée essentiellement par deux sources 114 MERLIN Pierre, TRAISNEL Jean-Pierre, 1996. Energie, environnement et urbanisme durable. Presse Universitaire de France, Paris 64 énergétiques principales : d’un coté les muscles, soit des hommes et des esclaves que des animaux, comme source d’énergie mécanique ; de l’autre coté le bois, comme matière première pour obtenir de l’énergie thermique. Même après l’apparition de la voie ferrée, les chevaux en ville demeuraient très nombreux et conditionnaient pour cela la configuration même des espaces urbains ainsi que les formes et les volumes du bâti. Les conséquentes quantités de bois et de biomasses en général, nécessaires pour l’alimentation des habitant et pour la construction de la ville elle-même, déterminaient, d’autre part, la dimension urbaine ; elle était calculée en fonction de l’espace agricole et forestier nécessaire pour son approvisionnement en matières premières, espaces qui devaient, alors, être laissés libres. En ce qui concerne les autres sources, comme par exemple le vent et l’eau, même si elles ont étés utilisées à partir d’époques très anciennes, elles non pas pour autant eue une diffusion généralisée ; elle ont servie plutôt à garantir la couverture de quantités seulement partielles des différents besoins énergétique : l’eau des rivières, pour les ville qui en disposaient, a souvent trouvée une application et une intégration à l’intérieur de la structure et de l’économie citadines, alors que la présence des vents dominants, déterminée par des conditions géographiques et topographiques particulière et pour cela non maîtrisables directement par l’homme, a toujours nécessité de la présence d’importants espaces libres, souvent éloignés du tissu de la ville, et par conséquent rarement intégrés à l’intérieur de la structure urbaine. 3.5.4 L’apparition des ressources fossiles : la ville verticale et la ville horizontale Le passage, ensuite, dès ressources animées, celles constituées dès être humains et dès animaux, à celles fossiles, tout d’abord le charbon et ensuite les hydrocarbures, ensemble avec le recours à l’utilisation de systèmes de conversion technologiquement plus avancés et adaptés aux besoins, a déterminé de manière progressive, mais inéluctable, la séparation entre la production et la consommation énergétiques, en participant de la sorte à la déresponsabilisation progressive visà-vis des utilisations individuelles 115 . En outre, l’ancien rapport de voisinage entre le lieu de 115 CLERC Denis, CHALON Claude, MAGNIN Gérard, VOUILLOT Hervé, op. cit. 65 production et celui de consommation, qui avait suggéré les manières d’utiliser le territoire alentour pour des siècles durant, termine brusquement, surtout en raison de la possibilité de transporter les ressources requise d’un endroit à un autre, toujours plus facilement. Ceci a déterminé donc un éloignement définitif entre les lieux de disponibilité de la source et ceux de son utilisation finale, à savoir les villes. Une autre limitation qui devient obsolète avec la diffusion des nouvelles technologies, est celle relative aux temps des usages : les sources énergétiques inanimées, en fait, n’obligent plus les hommes à une utilisation immédiate de l’énergie produite, mais garantissent, en revanche, une disponibilité continue et ininterrompue. Le pas successif, l’installation des infrastructure en réseau pour la distribution de l’énergie, qui parfois se réalisent en même temps que celle de la viabilité et des transports, ont permis, plus récemment, l’apparition et la propagation d’un nouveau modèle d’habitat, celui diffusé ; ce dernier est possible à réaliser, au moins théoriquement, en chaque lieu et en tout moment. Les réseaux informatiques, enfin, ont augmentés ces possibilités en créant une inédite relation de voisinage, celle que l’on définit de proximité sans contiguïté 116 . Avec la diffusion des sources inanimées, d’autre part, le binôme ville - énergie voit un nouveau terme apparaître : celui de la pollution. En fait, à partir de l’utilisation du charbon et ensuite avec celle du pétrole et du gaz naturel, la pollution devient progressivement la protagoniste de la grande ville, où justement l’utilisation de cette ressources demeure massive et où il existe un plus important degré de concentration d’hommes et d’activités consommatrices à la fois. Avec l’invention et la diffusion de l’électricité, en outre, la ville se transforme radicalement : le Regenerative Mode, celui qui naît dans des domaines techniques et qui fait recours intensivement aux pouvoirs mécaniques, substitue toujours plus profondément les systèmes précédents, que BANHAM appelle de Conservative et Selective 117 . De pair avec la ville, change aussi la société urbaine en général : les réseaux électriques, en fait, permettent, et donc promeuvent, des comportements et des styles de vie complètement inédits, en raison de la forte pénétration des applications qui utilisent les dispositifs électriques à l’intérieur de la vie quotidienne. Cet aspect 116 117 DE PASCALI Paolo, op. cit. BANHAM Reyner, op. cit. 66 représente, d’autre part, une importante limite contenue à l’intérieur de la source elle-même, car cette dernière détermine et conditionne trop profondément la presque totalité des habitudes de la vie contemporaine, qui résulte ainsi dépendante et vulnérable aux risques d’intermittence de l’approvisionnement. La ville, quant à sa structure, devient verticale : ses bâtiments commencent à monter en hauteur et, par conséquent, à nécessiter de quantités toujours plus importante d’énergie ; ils sont ainsi l’expression la plus aboutit de la ressource énergétique qui les dessert ; ils se transforment en des machines énergétivores. Avec la diffusion du pétrole, ensuite, démarre un nouveau phénomène d’expansion et de diffusion de la ville ; celle-la se trouve, en fait, complètement restructuré par la construction des grandes infrastructures de transports et par celle des nouveaux quartiers périphériques, ainsi que par la réalisation d’une quantités impressionnantes d’habitats individuels épars. La ville devient dorénavant horizontale. Il s’agit, bien sure, d’un modèle de développement de type non durable ; il dépend, en fait, fortement de l’existence de la source, que nous savons par contre être épuisable, de sa diffusion, qui n’est pas généralisé, et surtout de sa fourniture. Ce modèle se traduit donc en une forte dépendance dès Pays fournisseurs, avec tous les déséquilibres, géographiques et politiques, que cela comporte. 3.5.5 Les cinq paradigmes du rapport actuel entre les villes et l’énergie DE PASCALI, à cet égard, nous parle de cinq paradigmes, appelés aussi nœuds, autour desquels s’articule la question actuelle du rapport entre ville et énergie. - le premier paradigme est celui de l’épuisabilité des ressources fossiles, dont la prise de conscience, relativement récente, nous oriente vers la recherche de nouvelles ressources plus durables, aptes pour autant à répondre à nos besoins actuels. - le deuxième est celui environnementale, conséquent, quant à lui, à l’étude des répercussions négatives que les techniques actuelles de production et de distribution de l’énergie ont sur l’environnement. - le troisième paradigme est ensuite celui donné par la dématérialisation et par l’informatisation de certains secteurs d’activité ; ce processus, si d’un coté a eu des répercussions 67 positives sur les procédés de production, d’un autre il a emmené vers une énergisation du territoire et des comportements humains en général. - le quatrième est celui de la dépendance, qui dérive de la somme de quatre autres dépendances : celle de la non diversification, et donc de l’insubstituabilité, des ressources énergétiques utilisées aujourd’hui ; celle du nombre limité de Pays fournisseur ; celle des caractéristiques des infrastructures mise en œuvre pour la production, le transport et la distribution de l’énergie ; celle de la rigidité des technologies adoptées. - le cinquième paradigme, enfin, est celui de la grande diffusion de l’énergie qui ne correspond malheureusement pas à une décentralisation et à une autonomie des méthodes de production. 3.5.6 Les « sustaining technologie » et les « disruptive technologie » Le système énergétique actuel semble arrivé à sa maturation ; nous pouvons même admettre qu’il présente des nombreux signes de crise, une crise qui n’est pas pour autant à concevoir comme négative, mais au contraire comme une nouvelle phase de transition qui peut ainsi permettre d’arriver à la mise en œuvre de nouveaux systèmes de production et de distribution de l’énergie ; ceci peut se faire grâce au recours à des techniques modernes « non gaspilleuses » et aptes à épargner l’environnement élémentaire 118 . Les contraintes, comme l’histoire nous l’enseigne de manière efficace, peuvent représenter une chance pour un développement ultérieur, de type nouveau : ceci s’est produit, nous l’avons introduit, avec la révolution agricole, résultante d’un état de crise du à une importante pression démographique, qui s’est avéré pour l’homme cueilleur - chasseur d’autrefois comme étant incompatible avec les ressources disponibles localement 119 . Il est intéressant, en outre, de 118 GUERY François, 2002. Coloniser la terre. Réflexions sur les établissements humains. In YOUNES Chris, PAQUOT Thierry (sous la direction de), 2002. Philosophie, ville et architecture. La renaissance des quatre élèments. La Découverte, Paris 119 CLERC Denis, CHALON Claude, MAGNIN Gérard, VOUILLOT Hervé, 2008. Pour un nouvel urbanisme. La ville au cœur du développement durable . Yves Michel, Gap 68 remarquer que la parole crise nécessite dans la lingue chinoise de deux idéogrammes pour être exprimée : le premier est le symbole de danger, alors que le deuxième est celui d’opportunité 120 . Il est évident que, face à chaque crise et comme il s’est toujours produit durant le cursus de l’histoire, il existe différentes alternative : d’un coté, celle qui cherche une amélioration de la situation donnée, de l’autre, celle qui essaye de trouver des solutions autres, plus innovantes. Dans le domaine de la technologie, il est coutume de parler, à cet égard, de disruptive technology et de sustaining technology 121 . Une technologie de type sustaining est celle qui possède déjà un marché développé, et dont les produits et les services évoluent selon les progrès de la science et de la technologie relatives. Une technologie disruptive, par contre, est une technologie normalement plus simple, plus pratique, plus économique, mais qui présente en même temps moins de potentialités car elle n’est pas, ou pas encore, adaptée au marché existant, et par conséquent n’est pas préférée et choisie par les entreprises qui dominent les différents secteurs. Selon un paradoxe, qui pourtant s’est déjà produit en passé plusieurs fois, les technologies de type disruptive demeurent aussi les plus capables à révolutionner complètement le marché existant : les exemples les plus éclairants sont celui concernant le PC ou, plus récemment, les appareilles photographiques numériques. Dans le domaine qui nous occupe dans ces pages, une technologie de type disruptive peut être considérée celle du réseau urbain de gaz, qui à complètement substitué les lampes à huile ; ou encore celle de l’éclairage électrique qui, peu de temps après, intervient à rendre le gaz lui-même un système obsolète. Aujourd’hui, comme nous allons le voir par la suite, nous disposons déjà de nouvelles technologies de type disruptive ; celles-la, appliquées à différents niveaux de l’organisme urbain, à savoir à l’échelle de l’habitat jusqu’à celle de la ville entière, tout en passant par celle de chaque quartier qui la structure, peuvent apporter un changement radical dans la configuration urbaine en toutes ses parties, et peuvent modifier ainsi complètement son fonctionnement. Il s’agit, bien évidemment, des technologies liées à la production d’énergie provenant des ressources 120 121 GORE Al, op. cit. BUTERA Federico M., 2004. Dalla caverna alla casa ecologica. Storia del comfort e dell’energia. Edizioni Ambiente, Milan 69 renouvelables locales et qui, de la sorte, pourrait restructurer, de manière synergique, le rapport entre la ville et le territoire. 3.6 Energie renouvelable 3.6.1 Ressources épuisables et ressources renouvelables Appelées aussi ressources d’énergie propre, les renouvelables sont représentées pas le soleil, l’eau, le vent, les biomasses et la chaleur de la terre. A la différence des ressources fossiles, elles ne s’épuisent pas durant l’utilisation, en raison du fait qu’elles se régénèrent continuellement. En outre, leur utilisation ne comporte pas une déperdition énergétique, car elles permettent de produire de l’électricité ou de la chaleur de manière directe, sans écart important entre l’énergie finale, celle résultante, et l’énergie primaire, celle utilisé durant le processus lui-même 122 . Parfois nous assistons à l’inclusion, parmi ces ressources renouvelables, des déchets urbains, même s’il est plus convenable de les considérer comme appartenants à une deuxième catégorie, en raison du fait que, même si en quelque sorte ils demeurent renouvelables, il ne peuvent pas être considérés comme étant durables car ils promeuvent une production conséquente d’eux-mêmes. Nous pouvons tout de même les considérer comme des ressources utilisables en une écologie de type industriel, celle qui voit les résultats des processus de production comme des ressources pour alimenter d’autres activités productives 123 . En quelque sorte, si les ressources fossiles seraient utilisées en respectant les temps nécessaires à leur régénération, elles pourraient être considérées comme étant renouvelables. Malgré leur abondance qui dérive d’une accumulation perpétrée pour presque 3 milliards d’années, le rythme vertigineux de l’exploitation actuelle les rend indiscutablement épuisables. Les calcules effectués aujourd’hui par des organismes spécialisés, à cet égard, préconisent la durée des gisement fossiles disponibles actuellement, en considérant, bien évidemment, des rythmes 122 123 CLERC Denis, CHALON Claude, MAGNIN Gérard, VOUILLOT Hervé, op. cit. ibid. 70 d’exploitation en accord avec les prévisions de développement économique mondiales ; il s’agit de 40 ans pour le pétrole, de 60 ans pour le gaz naturel et de 200 ans pour le charbon 124 . Les énergie renouvelables, quant à elles, représentent les mêmes ressources qui ont été utilisées par l’humanité durant toute son histoire, au moins jusqu’à l’époque préindustrielle ; elles peuvent être re-utilisées aujourd’hui de manière efficace, à la fois pour la production d’électricité et de chaleur, et à la fois pour la production de biocombustibles. Elle font aujourd’hui l’objet d’études très approfondies, visant à en analyser les répercussions sur l’homme et sur l’environnement, durant tout leur cycle de vie ; ces études confirment que les émissions de CO2 et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère, qui dérivent de leur utilisation, se maintiennent sur des valeurs nulles ou assez limitées. Les technologies dont nous disposons actuellement, en outre, nous garantissent la possibilité d’exploiter les différentes ressources en une manière efficace et, enfin ou de nouveau, durable 125 . Procédons maintenant à l’analyse de chaque famille d’énergie renouvelable, de manière à en comprendre les potentialités et les limites : 3.6.2 Energie hydraulique Elle est la ressources renouvelable la plus exploitée actuellement dans le monde entier. Pour la production d’électricité, elle représente, en fait, la deuxième ressource planétaire après le charbon. L’électricité s’obtient par l’exploitant de la force cinétique de l’eau, préalablement maîtrisée à travers des infrastructures, comme les barrages, qui peuvent atteindre parfois une taille très importante. Différent est, par contre, le cas d’autres complexes, appelés de micro-hydraulique, qui ne demandent pas la réalisation de digues en raison des différentes technologies dont ils nécessitent. A la famille de l’énergie hydraulique appartient, en outre, celle qui provient de l’exploitation des mers et des océans. Celle-la se divise en une double branche : celle qui se réfère à l’utilisation 124 125 MENNA Pietro, op. cit. ibid. 71 du cinétisme contenu dans le phénomène des marées, et celle qui procède à travers la conversion du flux des ondes marines ; ce dernier type, qui possède un grand potentiel, manque encore pour autant des technologies adaptées à une exploitation à la grandes échelle. 3.6.3 Energie géothermique Elle est issue d’une source d’énergie qui se trouve distribuée, pour ainsi dire, sous nos pieds : à savoir la température, plus au moins haute, présente dans les profondeurs de notre planète. Cette température n’est pas généralement très élevée, mais elles se présente pourtant distribuée de manière constante sur toute la surface de la Terre : à seulement 2 ou 3 mètres de profondeur, en fait, la température se manient constamment, durant toute l’année, autour des valeurs moyennes de la localité considérée 126 . En revanche, en correspondance de certains points particuliers de la surface de la Terre, la où normalement se produisent les tremblements de terre et les activités volcaniques, cette température peut atteindre des valeurs très élevés. Cette variation de situation et donc de ressource, alors, déclenche des usages énergétiques différents : la géothermie à basse températures s’utilise, en fait, pour obtenir de la chaleur, alors que celle à haute température sert à la production d’électricité. 3.6.4 Energie éolienne Elle est issue de la conversion de l’énergie cinétique contenue dans les courants d’air naturelles, tout d’abord en énergie mécanique, et ensuite en électricité. Les courants d’air sont générées par les variations de température entre les différents strates de l’atmosphère terrestre, et dépendent pour cela autant des mouvements globaux de la planète que de ceux à l’échelle locale, dus aux conditions topographiques particulière de chaque territoire. L’énergie potentielle qui peut en dériver, alors, subit des variations importante selon le cycle des saisons et les horaires de la journée. Le plus grand potentiel éolien se trouve, de toute 126 SZOKOLAY Steven V., op. cit. 72 manière, le long des cotes marines et dans les régions montagneuses ; il peut être exploité, en outre, même en cas d’absence d’un réseau électrique déjà construit. Selon les études réalisées jusqu’à aujourd’hui, le potentiel d’énergie éolienne disponible dans toute la planète est supérieur à la totalité des besoins énergétiques mondiaux : la quantité qui dérive des différents calcules varie, en fait, entre les 20 000 et les 50 000 milliards de kWh, alors que les nécessités mondiales en électricité correspondent à 15 000 milliards de kWh 127 . 3.6.5 Energie solaire Elle constitue la force vitale de tous les systèmes énergétiques terrestres, soient ils animales ou végétales ; elle concerne, en fait, l’énergie contenue à l’intérieur des rayons du Soleil. Sa disponibilité, selon la localité géographique considérée, dépend, il est évident, des variations quotidiennes et saisonnières, ainsi que des conditions météorologiques locales. Pourtant, nous pouvons affirmer que, en général, la quantité d’énergie que le soleil nous envoi dépasse abondamment celle dont toute l’humanité a besoin. En considérant les latitudes de l’Italie méridionale, où par exemple se trouve la ville de Naples, il suffit de considérer que la quantité d’énergie que nous pouvons obtenir, le long de toute une année, à travers l’exposition de seulement 1 mètre carré de surface sensible, équivaut à celle que l’on obtient de l’utilisation d’un baril de pétrole 128 . Il existe aujourd’hui différentes manières pour utiliser ce type d’énergie renouvelable, et les technologies dont nous disposons varient donc considérablement. Il est possible, en fait, de se servir de la chaleur su soleil directement et activement à travers les collecteurs pour l’eau chaude, ainsi que indirectement, grâce à une conception de la ville et du bâti qui soit sensible et intelligente aux données climatiques et environnementales ; de transformer en électricité l’énergie contenue dans certains fluides chauffés préalablement à travers l’exposition au soleil ; ou encore de convertir la radiation solaire en électricité par le biais de cellules photovoltaïques. 127 128 MENNA Pietro, op. cit. ibid. 73 3.6.6 Energie des biomasses Les biomasses sont en général les différents matériaux organiques, tels que le bois, les résidus des produit de l’agriculture et des forets, ainsi que les plantations agricoles. L’énergie produite dérive donc de la transformation des molécules organiques, nourries par le soleil à travers tout leur cycle de vie, à travers des procès de combustion. Il est évident que le quantitatif de carbone libéré durant le processus de combustion ne contribue pas au réchauffement climatique seulement dans le cas d’un cycle de production de type clos, à savoir dans le cas où l’activité d’utilisation des biomasses végétales est équilibrée par celle de mise en plantation de nouvelles cultures. Nous pouvons aujourd’hui obtenir, de l’exploitation dès biomasses, trois produit différents dont les usages varient par conséquent : tout d’abord le bois et les résidus végétaux, qui sont utilisé comme du combustible pour produire de la chaleur, et qui ressoudent pour cela les problèmes du stockage des déchets végétaux ainsi que celui de l’exploitation des ressources fossiles, par exemple le charbon ; les biocombustibles, qui sont obtenus à travers la transformation de la biomasse solide et qui peuvent être utilisés soit comme carburant pour les véhicules que comme combustible pour les systèmes de chauffage ; les biogaz, issus de la fermentation des biomasses et des résidus végétaux, et qui s’utilisent comme une ressource pour produire directement de la chaleur ; il peuvent servir aussi à la production d’électricité à travers un système de production par cogénération. 3.7 Ville renouvelable 3.7.1 Le système ville Selon la définition de Peter DROEGE, les villes sont les systèmes le plus articulés jamais réalisés par l’homme 129 . Cette complexité les rends toujours plus ressemblantes aux organismes biologiques qui vivent grâce au maintien de délicats équilibres métaboliques. A’ l’images de ces organismes qui, en nature, sont tous différents les uns des autres, chaque ville a des 129 DROEGE Peter, op. cit. 74 caractéristiques individuelles qui la rendent unique, malgré le fait que l’évolution du XX siècle, avec sa tendance à l’uniformisation formelle, aient produit des édifices et des schémas urbains égaux aux quatre coins du monde. Mais par contraste aux organismes biologiques dont les modifications et les évolutions adviennent en des longues périodes, celles des villes se produisent en des temps beaucoup plus contenues. Par conséquent, plus vite est le taux de croissance, plus haut est la consommation des ressources naturelles, et plus élevé est la production de déchets qui en résulte. Aujourd’hui, les villes consomment le 75% de l’énergie mondiale et sont la cause du 80% de la pollution globale 130 . Elles peuvent se considérer comme étant les protagonistes principales d’un processus de développement que, nous l’avons vu, n’est pas durable, à cause surtout du fait que presque toute la quantité d’énergie qu’elles consomment provient de la combustion des ressources fossiles. La ville, actuellement, même si physiquement reconnaissable comme un entier, possède des confins indéterminables à cause du flux continu des populations non résidentes qui la fréquentent quotidiennement, de la quantité de produit importés d’un ailleurs plus ou moins lointain, ainsi que des consommation énergétiques qui demeurent comme invisibles aux yeux de ses habitants. 3.7.2 La ville durable Afin de réussir à concevoir une ville qui soit durable nous devons préalablement essayer d’en donner une définition. Une ville durable est, selon notre point de vie, une ville régie par un type de développement qui soit en mesure de l’accompagner vers une croissance prioritairement dictée par les spécificités territoriales locales, à savoir la culture, le climat, l’histoire, les ressources ; ces mêmes spécificités qui, d’ailleurs, ont représenté sa richesse et qui ont accompagnées son développement pour des siècles durant. Il s’agit, alors, d’une ville qui vise, avant tout, à la réinvention de rapports 130 DROEGE Peter, op. cit. 75 synergiques avec son environnement, à travers un acte que MAGNAGHI définit de reterritorialisation 131 . Il est évident, en fait, que la durabilité globale ancre ses racine le plus profondément dans la structuration et le renforcement des communautés et des économies régionales, en un équilibre synergique entre les ressources locales et les échanges globaux 132 . Une ville durable est alors une ville qui substitue au concept de croissance, qui prévoit une augmentation quantitative de matériaux, celui de développement, qui concerne par contre une potentialisation des ses propres capacités, avec une tendance non pas au mère grandissement mais à l’amélioration progressive 133 . Une ville durable est encore une ville qui préfère la sobriété, à savoir une utilisation des ressources en des quantités suffisante selon les besoins réels, en évitant le gaspillage et surtout en se demandant si le besoin lui-même est justifié 134 . 3.7.3 Trois approches envers le territoire MAGNAGHI, à cet égard, individu trois approches différentes en matière de rapport entre l’activité de l’homme, et donc de la ville en général, et son environnement : - l’approche fonctionnaliste. Il s’agit d’une approche qui considère simplement la capacité du territoire à supporter une action déterminée. Elle donne beaucoup d’importance aux aides provenant des différentes technologies, considérées alors comme étant capables de résoudre les différentes situations environnementales par le biais de la construction d’une seconde nature artificielle. Cet approche se traduit par une série d’actions de type correctif et limitatif, à appliquer à chaque processus de production, qui demeure ainsi issu de règles exogènes et pas forcement durables. Elle se concrétise parfois à travers la monétisation des ressources environnementales, 131 132 133 134 MAGNAGHI Alberto, op. cit. WACKERNAGEL Mathis, REES William E., op. cit. ibid. WEIZSACKER Ernst U., LOVINS Amory B., LOVINS L. Hunter, op. cit. 76 avec l’espoir de déclencher un processus dans lequel le marché économique devient en même temps un régulateur environnementale. - l’approche environnementale. Cette approche envisage une interaction réciproque et vertueuses entre l’environnement et les activités anthropiques. En considérant l’environnement comme un système naturel, cette approche vise, alors, à obtenir un développement anthropique qui soit respectueux des règles de autoreproduction du contexte biophysique dans lequel il intervient. - l’approche territorialiste. Il s’agit, enfin, d’une approche qui considère la durabilité comme un système de relations vertueuses entre les trois composantes du territoire, à savoir l’environnement naturel, l’environnement construit et l’environnement anthropique. Le point de départ pour la réalisation de la durabilité n’est donc pas, cette fois, la nature, mais le territoire ; un point de vue qui vise à traiter les relations réciproques qui se produisent entre la culture, la nature et l’histoire. 3.7.4 L’approche territorialiste pour une Révolution Energétique Renouvelable Il est évident que cette dernière approche résulte être la plus capable à déclencher une vrai synergie entre les différents acteurs qui composent la réalité territoriale. Nous considérons, avant tout, les possibilités, en quelque sorte nouvelles même si historiquement utilisées, offertes par le territoire de fournir de l’énergie locale à la ville et à toutes ses composantes, à travers une nouvelle lecture des alentours qui soie orientée à la compréhension du potentiel renouvelable existant. Nous avons raconté brièvement, dans les pages précédentes, l’histoire énergétique de la ville ; or, l’introduction d’un nouveau chapitre dans cette histoire, celui qui voit l’utilisation des énergies renouvelables locales, pourrait conduire à une nouvelle reconstitution des rapports entre la ville et son environnement. Peter DROEGE s’est exprimé à cet égard en parlant, même, d’une quatrième révolution technologique, qui se situe après la révolution Industrielle, la révolution Fossile et celle Informatique. Cette quatrième révolution, appelée aussi Révolution Energétique Renouvelable, vise à la redécouverte du rôle spécifique de la ville dans son contexte territoriale, régional et 77 national ; ceci selon un processus de enveloppement considéré comme une sorte de décroissance guidée par l’élimination progressive de toutes les criticités urbaines. Cette même révolution emmènerait à la réduction de l’empreinte écologique 135 urbaine, considérée comme la surface de la Planète, éclatée à travers le monde entier et beaucoup plus vaste que les limites physiques de la ville elle-même, dont cette dernière dépend pour se refournir en matières premières et pour évacuer ses pollutions. Il s’agit d’un indicateur agrégé introduit pour la première fois par l’équipe de recherche de Mathis WACKERNAGEL et William E. REES en substitution du précédent, celui de la carrying capacity ou charge humaine qui mesurait auparavant la capacité maximale de charge supportable par un milieu donné. L’empreinte écologique, quant à elle, résulte d’une importance fondamentale dans le contexte contemporain, car la localisation écologique de nos villes ne coïncide plus avec leur localisation géographique. Cette quatrième révolution, qui se structure, bien évidemment, autour des villes et de leur fonctionnement, pourrait emmener à la création d’une nouvelle structure urbaine, celle d’une vraie ville renouvelable 136 , Cette ville serait tissue autour de dynamiques vertueuses capables de réagir positivement aux données contextuelles, y compris celles climatiques, ainsi que d’utiliser les sources énergétiques présentes localement sur le territoire de manière intelligente, en évitant leur gaspillage. Le système ouvert qui schématise actuellement le fonctionnement de la structure urbaine contemporaine, se transforme ainsi en un système clos, à l’instar de tous les majeurs cycles planétaires, comme notamment celui de l’eau. Cette clôture du cycle s’obtient à travers la restructuration du métabolisme même des villes, en le transformant en un métabolisme circulaire 137 , guidé par une consommation limitée de ressources ainsi que par une efficace réutilisation des mêmes. 135 136 137 WACKERNAGEL Mathis, REES William E., op. cit. DROEGE Peter, op. cit. ROGERS Richard, GUMUCHDJIAN Philip, op. cit. 78 3.7.5 Les cinq aspects de la ville renouvelable La ville ainsi conçue serait, selon notre point de vue, au sein d’un vrai processus de développement durable, considéré selon ses différentes dimensions, en accord avec ce que nous avons introduit au début de ce chapitre. - la durabilité territoriale, pourrait s’obtenir à travers l’acte même de reterritorialisation ; nous savons, en accord avec MAGNAGHI, que le territoire est constitué de certaines valeurs, qui sont indépendantes de leur utilisation. Ces mêmes valeurs deviennent des ressources lorsque une société les interprète et les utilise activement ; le patrimoine territoriale, alors, définit comme le résultat du processus historique de territorialisation, n’existe que par le biais de l’interprétation qui est faite par ceux qui l’habitent et l’utilisent 138 . - la durabilité environnementale serait obtenue à travers la création d’un nouvel équilibre entre la ville et son territoire, équilibre dicté et garanti par le nouveau rôle spécifique acquit par ce dernier. - la durabilité économique se déclencherait à travers la reconnaissance de nouveaux valeurs, notamment énergétiques, au territoire alentour, valeurs qui deviennent alors d’une importance névralgique. - la durabilité sociale serait déclenchée à travers une profonde participation des habitants de la ville, générée par l’apparition de nouveaux emplois en raison des nouvelles nécessités dans le milieu de la recherche, de la technologie, de la main d’œuvre ; les citoyens, d’autre part, seront invités à abandonnent progressivement leur rôle de consommateurs passif pour acquérir celui de producteurs actifs, ce qui les transformerait, pour le dire avec DROEGE, en des « prosumateurs » 139 . - la durabilité politique, serait le résultat d’une implication de toute la communauté dans les processus décisionnels, à travers la prise de conscience des enjeux territoriaux et des répercussions des comportements individuels et collectifs sur le rôle et le futur de la ville. 138 139 MAGNAGHI Alberto, op. cit. DROEGE Peter, op. cit. 79 3.8 Des échelles entrecroisées 3.8.1 La décomposition de la ville en éléments et en relations Mais comment les énergies renouvelables et les technologies associées peuvent contribuer à la structuration de la nouvelle ville ? Comment peuvent-elles intervenir à l’intérieur d’une structure autant complexe que celle contemporaine ? Afin de réussir à répondre à ces questions, il est indispensable de souligner que la ville actuelle se compose de différentes parties, entrelacées entre elles de manière à structurer un ensemble, qui peut ainsi résulter plus ou moins efficace. Il est en outre évident que la forme de la ville a des répercussions importantes sur les consommations énergétiques, notamment en ce qui concerne la densité de l’habitat et les besoins de transports qui en dérivent 140 . L’unité de base est représentée par le bâti, qui à ses logiques de fonctionnement individuelles et de relation au contexte ; l’assemblage fonctionnel d’un certain nombre d’unité bâtie donne ensuite naissance aux différents quartiers, qui sont régis par des règles spécifiques mais qui en même temps sont le résultat des dynamiques concernant chaque unité ; enfin, l’articulation des différents quartiers constitue la ville, dont la complexité dérive alors de toute une série de fonctionnements, que nous allons voir individuellement. 3.8.2 Echelle 1 : le bâti En ce qui concerne la première échelle d’intervention, celle du bâti, nous allons nous attarder avant tout sur la maison, en la considérant comme la fibre de base de la trame urbaine. Comme pour la ville en général, la maison a été le théâtre de différentes évolutions, perpétrées le long de l’histoire et visant à obtenir des conditions d’habitabilités toujours plus adaptées à la vie de l’homme. La construction de l’habitation permet à l’origine à l’homme d’obtenir un nouveau microclimat, artificiel, en étendant la gamme des zones thermiques naturelles 141 . 140 MERLIN Pierre, TRAISNEL Jean-Pierre, op. cit. 141 HESCHONG Lisa, 1979. Thermal delight in architecture. MIT Press, Cambridge [Trad. franc. 1981] Architecture et volupté thermique. Parenthèses, Marseille 80 Née au début de la civilisation seulement pour des courtes utilisations, la maison était vue simplement comme un refuge contre les intempéries, ainsi que comme un hébergement pour dormir ; équipée de rares fenêtres sans vitrages, dépendant des cycles naturels pour s’éclairer, se chauffer et se ventiler, elle était fournie d’une cour interne exclusivement pour les populations les plus riches, qui pouvaient ainsi y passer les temps libre et se consacrer aux activités domestiques. Les siècles suivants ont étés déterminants pour arriver, à travers des inventions formidables et géniales, aux maisons telles que nous les connaissons aujourd’hui. Il suffit de rappeler certaines de ces inventions pour avoir une idée des gros progrès effectués en ce domaine : la cheminée pour cuisiner, le vitrage aux fenêtres, les lampes à huile pour s’éclairer, l’eau pour l’hygiène, jusqu’à arriver aux innovations contemporaines dues aux ressources fossiles et à l’électricité 142 . Ces dernières, accompagnées par l’agrandissement progressif des espaces domestiques, conséquents aussi aux changement des rythmes de vie de l’homme, représentent des conquêtes relativement récentes. Il est évident, pourtant, que les améliorations qu’elles ont apportées au milieu domestique ont contribué à augmenter considérablement les dépenses énergétiques et d’espace, en transformant la maisons, et en général les immeubles, en une machine énergétivore 143 , capable de nous offrir, pour le dire avec les paroles de Philippe RAHM, une éternelle journée printanière 144 . Actuellement nous savons que une grandes partie des consommations globales d’énergie sont attribuables à celles du bâti, et nous connaissons en même temps des solutions qu’y peuvent être apporté afin de les transformer en des producteurs d’énergie 145 . Ceci en travaillant non seulement sur l’orientation et sur l’enveloppe isolante du bâti, mais aussi sur des nouveaux processus capables de fournir de l’énergie en se servant des ressources renouvelables, et qui permettent d’obtenir ainsi de l’auto production, comme dans le cas de la cogénération et de la trigénération, qui concernent la production simultanée d’électricité, de chaleur et de froideur. 142 143 144 145 BUTERA Federico M., op. cit. ibid. RAHM Philippe, 2009. Architecture météorologique. Archibooks + Sautereau Editeur, Paris BUTERA Federico M., op. cit. 81 Des nombreux exemples existent en des Pays nordiques comme l’Angleterre, l’Allemagne ou la Suède, où des maisons sont réalisées aujourd’hui complètement dépourvues de système de chauffage : à Gotebord cela est possible grâce à un système d’isolement de la maison tellement efficace à faire en sorte que la chaleur produite par les personnes, la cuisson des aliments, le fonctionnement des électroménagères, ne soit pas cédée à l’extérieur ; les maisons du quartier « BedZed » de Londres, quant à elles, sont conformées en sorte à avoir le coté sud plus élevé de celui nord, de manière à réduire les dispersions de chaleur ; les « PassivHaus » allemandes, enfin, avec des attentions du même genre, arrivent à consommer 15 kWh par mètre carré au lieu des 220 qui sont habituels en ces latitudes. Il s’agit souvent, nous le constatons, non pas d’un manque de technologie ou des moyens nécessaires, mais d’un problème culturel. C’est sur cela qu’il faut intervenir en une manière particulière selon les cas spécifiques, en proposant des solutions que, encore une fois, demeurent essentiellement locales ; le terme locale est ici considéré non pas comme indiquant une attitude de défense et fermeture d’une communauté envers les étrangetés, mais dans le sens d’une potentialisation des différentes spécificités endogènes à une territoire avec des finalités évolutives. 3.8.3 Echelle 2 : le quartier La deuxième échelle pour la conception d‘une ville durable, nous l’avons introduit, est celle qui concerne la juxtaposition et la relation de chaque édifice durable, jusqu’à former les différents quartiers qui structurent une ville. Il est clair, en fait, que, même si les immeubles sont conçus dans le respect de tous les paramètres bioclimatiques, la relation qui s’instaure entre eux demeure déterminante dans le bilan de leurs consommations énergétiques. Des attentions particulières, comme par exemples l’orientation des volume selon le parcours du soleil, le positionnement des uns par rapport aux autres, ainsi que leur distribution selon les directions des vents dominants, peut avoir des répercussions sur les nécessités énergétiques de chacun d’entre eux, et donc de celles finales de toute la ville. Nous savons, en fait, que certains facteurs physiques, comme la densité de la masse construite d’un tissu urbain ainsi que les besoins en transport individuels et privé qui en dérivent, ensemble avec les questions relatives à la 82 mixité fonctionnelle comme moyen de réduire les déplacements quotidiens indispensables, concourent à la détermination des nécessités énergétiques au niveau de l’ensemble du bâti. A cet égard, le quartier de Malmo en Suède, une City of Tomorrow de 700 bâtiments à usage mixte, est un exemple très réussi car il arrive à couvrir le 100% des besoins énergétiques avec des ressources renouvelables. Des aérogénérateurs utilisent la mer et des nappes phréatiques accessibles comme précieuses sources thermiques ; des accumulateurs du réseau stockent la chaleur produite en excès durant l’été pour la livrer durant l’hiver ; les énergies renouvelables, intégrées aux différents immeubles, produisent de l’électricité à céder au réseau commun ; un parc éolien, placé loin de l’habitat pour éviter les nuisances sonores, fournit un pourcentage important de ces productions ; le réseau de télé-chauffage sert à récolter et redistribuer la chaleur de différentes provenances ; le transport public est alimenté par biogaz ou électricité. Un réseau de télécommunication très sophistiqué, enfin, sert pour la régulation de tout le système ainsi que pour informer les habitants de leur niveau de consommations, un point qui est considéré comme très important pour la réussite de l’opération, car il contribue à sensibiliser atour de la question des réductions de la consommation individuelle. Il s’agit d’un exemple de génération distribuée 146 car, à l’image de ce qui est advenu des siècles durant, la production d’énergie ne se fait plus à travers de grandes installations, qui se démontrent comme étant faibles et exposées aux différents risques, mais par des myriades de petites centrales qui sont distribuées sur tout le territoire, alimentées par de ressources d’énergie renouvelable. 3.8.4 Echelle 3 : l’urbain Il est clair enfin que, même après avoir conçu des immeubles vertueux et de les avoir positionnés sur le territoire de manière intelligente, ce qui n’est d’ailleurs pas toujours possible surtout en présence des tissus urbains existants, les dépenses énergétiques finales d’une ville dépendent en grand partie de ses nécessitées urbaines, comme par exemple celles qui dérivent 146 BUTERA Federico M., op. cit. 83 des systèmes de transports, des consommations des bâtiments d’intérêt collectif, et des services publics en général, comme par exemple l’éclairage. Une troisième étape dans le parcours qui nous guide vers une ville durable, consiste alors en l’étude des différents systèmes énergétiques qui peuvent fournir de l’énergie à l’échelle urbaine, en exploitant les ressources renouvelables. A cette échelle, en fait, nous pouvons profiter du fait que les différentes activités, comme par exemple les bureaux et les habitations, ne nécessitent pas d’énergie durant les mêmes horaires ; ceci permet de réduire les pics de demande et de consommation et de pouvoir imaginer des systèmes fonctionnant comme des cycles, capables de recycler tous les surplus énergétiques provenant de chaque utilisation. L’exemple de la ville suédoise de Goteborg est éclairant à cet égard : elle se trouve aujourd’hui à un pas seulement de distance de la durabilité urbaine complète, grâce à des systèmes qui exploitent des situations locales et qui font un large recours aux cycles, en entamant un équilibre qui semble presque celui d’un oasis du désert mais en essayant de répondre aux nécessités de ses citoyens modernes. La récupération de la chaleur dégagée par l’activité de deux usines communales ainsi que de celle contenue dans les eaux domestiques dépurées, le recyclage de tous les déchets recyclables, l’incinération de ceux qui ne le sont pas, produit de l’énergie qui alimente le réseau commun 147 . 3.8.5 Vers un système écologique en équilibre : la relation avec les éléments naturels En considérant le principe d’efficacité énergétique comme un principe dérivant d’une planification hautement performante et autonome ainsi que d’une utilisation finale rationnelle, le résultat à viser est celui d’une ville conçue comme un système écologique en équilibre ; un équilibre qui n’est pas pour autant stable mais en évolution permanente à cause des progrès de la technologie ; un équilibre qui est déterminé par l’utilisation des ressources renouvelables, par l’utilisation rationnelle de l’énergie et par une gestion intelligente de sa demande. 147 BUTERA Federico M., op. cit. 84 Cet équilibre part de la considération que les établissements humains se trouvent au croisement entre plusieurs dimensions, notamment celle naturelle et celle culturelle, dans un nouage de relations réciproques qui sont à la fois symboliques et concrètes 148 . Le défi contemporain demeure alors la création d’un nouveau type de paysage, où technique et nature s’associent, et qui trouve sa juste place dans l’interface entre les éléments naturels et les espaces créés, artificiels. La création architecturale, à toutes ses échelles, redevient alors une relation signifiante et orientée dans la présence des éléments en un site 149 . 3.8.6 Synergie urbaine Nous avons parlé, jusqu’à présent, de Révolution Energétique Renouvelable 150 . Il nous faut maintenant introduire un nouveau concept, celui de Révolution de l’Efficacité 151 . Il s’agit d’un concept qui concerne la productivité des ressources et qui nous semble d’une importance majeure, notamment lorsque l’on se réfère aux contextes urbains, caractérisés par des ressources naturelles premières extrêmement limités. Pourvu, d’autre part, que la plupart des villes qui seront les actrices de cette révolution ont déjà été réalisée à ce jour, il faut concentrer nos attentions sur les potentialités cachées à l’intérieur des structures urbaines, afin de réussir à y extraire des richesses importantes dans une perspective de durabilité. En considérant, en fait, que la pollution elle-même peut être définie comme une ressource qui n’est pas à sa place 152 , ou encore que jeter équivaut à gaspiller des ressources 153 , la compréhension du potentiel énergétique caché derrière leur fonctionnement 148 REBOIS Didier, 2002. Dynamiques réelles et symboliques des éléments. In YOUNES Chris, PAQUOT Thierry (sous la direction de), 2002. Philosophie, ville et architecture. La renaissance des quatre élèments. La Découverte, Paris 149 YOUNES Chris, MANGEMATIN Michel, 2002. Bien vivre avec les éléments. In YOUNES Chris, PAQUOT Thierry (sous la direction de), 2002. Philosophie, ville et architecture. La renaissance des quatre élèments. La Découverte, Paris 150 DROEGE Peter, op. cit. 151 WEIZSACKER Ernst U., LOVINS Amory B., LOVINS L. Hunter, 1997. Factor Four : Doubling Wealth, Halving Resource Use - A Report to the Club of Rome. Earthscan, Londres [Trad. franc. 1997] Facteur 4. Deux fois plus de bien-être en consommant deux fois moins de ressources. Un rapport au Club de Rome. Terre Vivante, Mens 152 153 WEIZSACKER Ernst U., LOVINS Amory B., LOVINS L. Hunter, op. cit. ARTHUS - BERTRAND Yann, 2009. Home. Editions de La Martinière, Paris 85 complexe, peut nous permettre de réactiver la nécessaire synergie de réseau, qui constitue aujourd’hui une ressource gaspillée d’incontournable valeur. Richard BUCKMINSTER FULLER 154 , durant ses analyses pour la compréhension des problèmes environnementaux dont souffre la Planète Terre, décrit cette dernière comme un système qui, malgré son inévitable entropie, garde son équilibre énergétique grâce à l’apport d’un autre corps céleste, le Soleil. La compréhension de ses principes de fonctionnement, nécessaire à la survie et au développement des êtres vivants, a emmené l’homme à utiliser son intellect, qui demeure sa faculté suprême, afin d’en extraire des principes généraux. En comparant le genre humain à un oiseau qui peut initialement se nourrir exclusivement du liquide contenu à l’intérieur de son œuf, les hommes, suite à une première période caractérisée par une abondance immédiatement consommable, se trouvent face à un moment critique et doivent pour cela chercher une nouvelle relation avec l’Univers, par le biais des ailes de leur intellect. BUCKMINSTER FULLER déclare, alors, que les problèmes majeurs de notre environnement dérivent fondamentalement de l’excessive spécialisation de l’homme, spécialisation qui a été la cause, selon lui, de l’extinction de certaines civilisations anciennes car elle fait que les homme, suite à la découverte des principes opérants dans l’Univers, les appliquent de manière séparé, en externalisant les fonctions originellement intégrées. Selon lui, par contre, l’Univers est synergique, le Système Solaire est synergique et la Vie, en général, est synergique. En ce qui concerne en outre la société, l’entropie, que les physiciens définissent comme la dispersion énergétique, concerne le niveau de complexité d’une société 155 . Gaston BACHELARD 156 , quant à lui, analyse une attitude, de nature symbolique, chez les peuples préhistoriques : celle de l’utilisation des cendres comme fertilisant (fécondant) des champs. Ce faisant, il nous indique de quelle manière le concept de synergie a été au cœur du fonctionnement des établissements humains, face à un environnement hostile et aux ressources 154 BUCKMINSTER FULLER Richard, 1969. Operating Manual for Spaceship Earth. Lars Muller, Baden 155 CARERI Francesco, 2002. Walkscapes. Walking as an aesthetic practice. Gustavo Gili, Barcelone [Trad. it. 2006] Walkscapes. Camminare come pratica estetica . Einaudi, Turin 156 BACHELARD Gaston, 1949. La psychanalyse du feu. Gallimard, Paris 86 limitées. Même la ville électrique 157 a du revoir ses principes de fonctionnement d’un point de vue synergique, suite aux nombreuses crises pétrolifères qui ont commencées à apparaître après les années ’70 et qui ont emmenées à l’apparition de mécanismes de energy saving et de cogénération à l’intérieur des processus de production, afin d’en résoudre les gaspillages présents. Lester R. BROWN dans son Plan B 158 et Al GORE avec son Plan Marchal 159 profilent cette synergie au niveau planétaire, alors que les intelligentes déclinaisons de l’équipe SCHIBEL et ZAMBONI 160 nous illustrent habilement le potentiel latent contenu en toute ville, indépendamment des caractéristiques de leur territoire spécifique : l’utilisation fructueuse des huiles de friture des restaurants urbains comme biocarburants pour les transports en commun ; l’exploitation du cinétisme de l’eau des bassins de potabilisation pour produire de l’électricité ; la récolte des résidus de la maintenance des parcs et des boulevards des villes ou celle de l’activité des usines du bois pour l’obtention de précieuses biomasses ; le captage du biogaz des décharges existantes, celui des déchets organiques des zoo ou des vapeurs des centrales thermiques, représentent autant d’exemples d’échanges possibles aptes à faire des villes contemporaines des structures performantes et énergétiquement équilibrées ; des villes où chaque partie fonctionne efficacement et se lie aux autres de manière synergique. Les territoires de la ville peuvent devenir ainsi un support approprié pour imaginer une nouvelle synergie entre le double capital existant, celui social et celui naturel. Nous y reconnaissons, ce faisant, les composantes d’une véritable ville latente 161 aux potentialités prometteuses. Une lecture approfondie de leur formes cachées 162 , à savoir celles nées de 157 GIUNTINI Andrea, PAOLINI Giovanni (sous la direction de), 2003. La città elettrica. Esperienze di elettrificazione urbana in Italia e in Europa fra Ottocento e Novecento. . Laterza, Rome-Bari 158 BROWN Lester R., 2008. Plan B 3.0 - Mobilizing to save civilisation. Earth Policy Institute [Trad. it. 2008] Piano B 3.0. Mobilitarsi per salvare la civiltà. Edizioni Ambiente, Milan 159 GORE Al, 1992. Earth in the Balance. Ecology and the Human Spirit. Houghton Mifflin, Boston [Trad. franc. 1993] Urgence planète Terre. L’esprit humain face à la crise écologique. Hachette Littératures, Paris 160 SCHIBEL Karl-Ludwig, ZAMBONI Silvia, 2005. Le città contro l’effetto serra. Cento buoni esempi da imitare . Edizioni Ambiente, Milan 161 ZANFI Federico, 2008. Città latenti. Un progetto per l’Italia abusiva. Bruno Mondadori, Milan 162 BERGER Patrick, NOUHAUD Jean-Pierre, 2004. Formes cachées, la ville. Presses Polytechniques et Universitaires Romandes, Lausanne 87 l’interaction entre le milieu naturel et le milieu construit, peut nous suggérer efficacement la richesse des démarches à suivre, afin que cette situation délicate se transforme en une ressource apte à être utilisée. 88 Partie 02 : sur le projet 89 Chapitre 4. Phlegraios : le choix d’une technologie fédératrice 4.0 Introduction / Introduction En regardant les volcans non plus comme une source de risque mais comme une précieuse opportunité, la redécouverte du territoire comme ressource énergétique et notamment l’exploitation du potentiel géothermique locale pour la production d’électricité et de chaleur propres, permettent la réactivation d’un rôle stratégique spécifique à la ville et à ses potentialités. La nécessité, en outre, d’activer un processus de durabilité efficace pour un contexte autant articulé que celui de Naples, nous emmène à étudier des solutions techniques qui soient applicables aux différentes échelles de la ville, et notamment aux tissus extrêmement hétérogènes qui la composent. Ceci permet de décliner efficacement la durabilité territoriale vers des utilisations domestiques vertueuses et responsables, en contribuant au profilement d’un habitat durable. Looking volcanoes rather than as a source of risk but as a precious opportunity, the possibility to rediscover the territory as energy source and in particular the exploitation of geothermal potential for local production of electricity and heat, allow possible the reactivation of a strategic role specific to the city and its potentialities. The need to activate a process of sustainability provided for an articulated context like Naples, takes us to explore technical solutions that are applicable to different scales of the city, including her extremely heterogeneous tissues. This effectively allows to decline the sustainability territorial towards the domestic virtuous and responsible uses, contributing to profiling a sustainable housing. 4.1 Volcans et durabilité : la fin d’un oxymore ? 4.1.1 Une nouvelle synergie territoriale Durant le chapitre précédent, nous avons évoqué la possibilité de déclencher une nouvelle synergie entre la ville contemporaine et le territoire environnant ; une synergie qui soit en mesure de guider l’organisme urbain vers un processus de développement locale durable. Ceci par le biais du fait que l’invisibilité des ressources énergétiques qui caractérise aujourd’hui les approvisionnements urbains, ainsi que celle de leur provenance géographique, laisserait la place à 90 une nouvelle visibilité, capable de mettre en ouvre une dépendance vertueuse entre la ville et son territoire ; une dépendance qui, dorénavant, viserait à re-orienter les rapports entre la croissance urbaine et les différentes ressources énergétiques dont celle-la nécessite. Il nous faut, cependant, voir comment ce principe, théoriquement très vertueux, pourrait se concrétiser dans un contexte tout à fait spécifique, comme celui qui, par exemple, caractérise la ville de Naples. Naples se localise, nous l’avons souligné dans le deuxième chapitre de ce mémoire, à l’intérieur d’une région qui demeure unique dans le panorama des villes italiennes : les cratères qui la ponctuent, à l’est comme à l’ouest, en ont fortement conditionné l’étalement urbain jusqu’aux époques les plus récentes. L’activité d’extraction de ces pierres précieuses d’origines volcaniques, indispensables à l’édification de la ville sur un territoire fortement sismique, a en outre produit une correspondance entre la structure urbaine visible et celle de ses profondeurs, son négatif, qui reprend, même si invisiblement la plupart des fois, ses différentes articulations de surface ; la présence et l’utilisation de ces matériaux locaux, abondamment disponibles sur le territoire environnant, ont donné naissance, de ce fait, à une structure urbaine régie par une forte homogénéité morphologique qui, depuis ses origines, est née et a vécu en une symbiose directe avec ses ressources locales. Ce rapport, que nous allons étudier en détail durant le chapitre suivant, s’et interrompu, bien évidemment, durant l’époque moderne, selon une logique d’homogénéisation, formelle et structurelle, comparable à celle qui a intéressée les autres villes à elle contemporaines. 4.1.2 Un nouveau regard sur les volcans Ce que nous proposons, alors, au sein de notre stratégie de projet durable, concerne notamment la récupération du rapport millénaire entre la ville et son territoire volcanique, une récupération qui se traduit, pourtant, à travers une manière complètement inédite de regarder à ce contexte : les différents volcans, en fait, ne sont plus envisagés comme des sources de risque pour un développement locale de type durable, mais sont, au contraire, considérés comme des précieuses ressources énergétiques particulières, capables de permettre à la ville de re-découvrir son milieu spécifique. 91 Les volcans demeurent, alors, les instruments nécessaires à la structuration de la ville de Naples, mais ils ne revêtent plus ce rôle en prenant exclusivement en considération la matière première précieuse qu’ils peuvent fournir pour l’édification du bâti, mais en les envisageant, surtout, comme des ressources d’énergie propre, celle provenant de leur profondeur. Parmi les différentes familles d’énergies renouvelables qui présentent un potentiel concret dans le contexte napolitain, nous choisissons, alors, de concentrer notre attention et nos efforts sur la compréhension de celle représentée par la géothermie ; ceci en considérant notamment la possibilité d’une exploitation énergétique qui soit adaptée, en même temps et en accord avec ce que nous avons analysé dans le chapitre précédent, aux différentes échelles de la structure de la ville : à savoir celle de son bâti et celle de ses articulations spécifiquement urbaines. 4.2 Qu’est-ce que la géothermie 4.2.1 Les caractéristiques de la géothermie Quand nous parlons d’énergie géothermique, nous parlons d’une énergie dotée de multiples facettes, certaines d’entre elles communes aux autres énergies propres, certaines spécifiques à elle seule. Il s’agit, en fait, d’une énergie à la fois écologique, renouvelable, diffusée, locale, régulière et économique 163 : -écologique, car la quantité moyenne de rejets de CO2 émise dans l’atmosphère par le fonctionnement d’une centrale géothermique est 10 fois moins importante de celle d’une centrale de taille similaire mais qui exploite le gaz naturel. Cette quantité peut d’ailleurs être ramenée à des valeurs complètement nulles à travers le procès de réinjection des fluides géothermaux, prélevés et utilisés, dans les mêmes réservoirs dont ils sont issus. Elle est, pour cela, considérée comme une énergie propre car, à la différence des énergies fossiles, elle ne participe pas à la dégradation du climat global de la planète. - renouvelable, car, selon le principe que nous avons introduit dans le chapitre précédent, elle ne s’épuise pas durant son exploitation. Ceci en raison du fait que, tout d’abord, la chaleur qui est exploitée comme ressource énergétique est contenue directement à l’intérieur des roches 163 PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, 2004. La géothermie. ADEME, BRGM, Valbonne, Orléans 92 souterraines, et cela indépendamment de leur utilisation ; ensuite parce que l’eau qui est prélevée pour le fonctionnement du système se régénère complètement, soit à travers les mécanismes qui régissent son cycle naturels, soit grâce au processus de réinjection artificielle. - diffusée, car la chaleur géothermique est présente, en différentes quantités, dans tous les continents de la Terre, et son utilisation s’offre pour cela à une diffusion planétaire ; évidemment, la conformation géologique des différentes régions considérées rend ce même potentiel plus ou moins accessibles et exploitable. - locale, car elle est une énergie à consommer sur place. Ceci, outre à éviter les pertes dues normalement aux systèmes de transports, fait de la géothermie une énergie spécifique à chaque territoire : elle peut, en fait, facilement d’adapter aux différents besoins qui caractérisent la surface de ce dernier, en promouvant ainsi un développement de type local. - régulière, car contrairement aux autres énergies renouvelables, comme celle éolienne et celle solaire par exemple, l’énergie géothermique ne dépend pas des mutations des conditions climatiques locales, mais seulement des caractéristiques endogènes du sous-sol. - économique, car même si les investissements de départ, nécessaires à la réalisation des forages initiaux, résultent parfois élevés, le coût d’exploitation qui en suit demeure faible. 4.2.2 La structure du globe terrestre et les ressources géothermiques Or, qu’est ce que la géothermie ? Du grec gêo (terre) et thermos (chaud), la géothermie se définit comme l’exploitation de la chaleur présente dans les sous-sols de notre planète, sous formes d’eau ou de vapeur. La structure interne de la Terre, que nous connaissons en partie, en ce qui concerne les premiers dix kilomètres seulement, grâce aux analyses directes, et en partie par le biais des études indirectes, comme celle sur la propagation des ondes sismiques, est constituée de différents éléments : le noyau solide, le noyau liquide, le manteau et la croûte ; cette dernière, ensemble avec la partie supérieur du manteau, constitue la lithosphère, divisée, quant à elle, en douze plaques. L’épaisseur de la croûte terrestre est fortement variable : des 30-70 kilomètres qui caractérisent les zones continentales, il rejoint les 20 kilomètres en correspondance des fonds des 93 océans, et il est ensuite de seulement quelques kilomètres en proximité des différentes failles qui séparent les plaques de la lithosphère entre elles. La chaleur dégagée par notre globe, qui dépend de la composition chimique des roches qui le composent ainsi que de l’age de leur formation, augmente quasi constamment, nous l’avons introduit, en fonction de la profondeur du terrain considéré. Tout de même, il existe des lieux particuliers, sur la surface de la Terre, où cette même chaleur résulte plus élevée, en raison du fait que le magma, présent dans les profondeurs, a réussi à remonter vers la surface : ces lieux particuliers se trouvent notamment en correspondance des frontières entre les failles de la lithosphère, et sont caractérisés, souvent, par les manifestations volcaniques et par les tremblements de terre 164 . 4.2.3 Les différents types de géothermie Nous pouvons distinguer, de ce fait, différentes types de géothermie, en fonction de la profondeur des gisements, de leur température et, par conséquent, de l’usage qui se rend possible : - la géothermie très basse énergie. Elle concerne l’exploitation des aquifères peu profonds, avec une température moyenne inférieure à 30°C. Elle peut donc être utilisée simplement pour le chauffage et la climatisation des immeubles avec l’ajout éventuel d’une pompe à chaleur, que nous allons étudier par la suite. - la géothermie basse énergie. Elle consiste en l’exploitation de l’eau, à une température inférieure à 90°C, présente en des gisements situés à une profondeur variable entre 1.500 et 2.500 mètres. Le niveau de chaleur étant encore insuffisant pour la production d’énergie électrique, ce type de géothermie peut servir, tout de même, pour l’alimentation des réseaux de chauffage urbain collectif, ainsi que pour certaines applications industrielles. - la géothermie moyenne énergie. Les aquifères qu’elle utilise, pour l’extraction d’eau chaude ou de vapeur, se trouvent à une température comprise entre 90 et 150°C, et à une profondeur 164 MENNA Pietro, 2003. L’energia pulita. Il Mulino, Bologne 94 inférieure au 1.000 mètres. Elle peut être utilisée pour la production d’électricité, mais ceci seulement par le biais de l’utilisation d’un fluide intermédiaire. - la géothermie haute énergie. Elle concerne l’utilisation de fluides, captés sous forme de vapeur sèche ou humide, qui se trouvent à une température supérieure à 150°C, et dont les réservoirs se localisent à une profondeur variable entre 1.500 et 3.000 mètres. Ce type de géothermie résulte idéale pour la production de l’électricité. A ces différents types de géothermies, nous pouvons en ajouter une autre, celle que normalement est appelée profonde : elle est caractérisée, en fait, par l’exploitation de températures très hautes qui se trouvent, malheureusement, emmagasinées en des formations rocheuses peu perméables ; ces températures, en absence d’eau, résultent donc difficiles à capter. Ce type de géothermie consiste, alors, en la création artificielle d’un gisement géothermique à haute énergie, par le biais de l’injection d’eau sous pression dans les roches chaudes fracturées, qui se trouvent à une profondeur comprise entre 3 ou 5 kilomètres ; ce système est aussi appelé hot dry rock. La vapeur qui en résulte peut ainsi être utilisée pour alimenter des centrales électriques. Un programme pilote en ce sens, financé par la ADEME, le Gouvernement Allemand et l’Union Européenne, est déjà en cour en France, à Soultz-sous-Forêts, où la chaleur des granites est extraite afin de produire de l’électricité ; les études effectuées montrent, en outre, que la mise en exploitation géothermique de seulement le 3% de la surface de l’Alsace pourrait assurer une production électrique équivalente à celle d’une dizaine de centrales nucléaires pendant plusieurs décennies 165 . 4.2.4 Exploitation historique de la géothermie L’exploitation de la chaleur de la Terre pour des fins énergétiques, qu’aujourd’hui s’impose parmi les énergies renouvelables grâce à ces différentes caractéristiques positives, est une activité que nous retrouvons, déjà, durant toute l’antiquité. 165 PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. 95 Les traces des premières utilisations sont en fait très anciennes, et ont été retrouvées dans le site de Niisato au Japon, un site qui remonte au troisième age glacière, voici 15.000 ou 20.000 ans. Avec l’apparition de la civilisation, les pratiques des bans thermaux se répandent très vite, aussi bien au Japon que en Amérique et en Europe : ici les utilisations thermales, connues par les étrusques et exploitées ensuite de manière généralisée par les romains, revêtent un rôle très réputés de lieux de sociabilité, d’échange et de rencontre. A Naples, plus précisément, les romains ont toujours utilisé les ressources endogènes, notamment la géothermie, pour soulager l’esprit et le corps 166 . Durant des époques plus récentes, l’exploitation de cette chaleur conduit à des utilisation que l’on pourrait définir presque industrielles : dès 1330 en France, nous avons le témoignage d’un seigneur local qui prélevait une taxe pour assurer la distribution d’eau géothermale à quelques maisons particulières, dans le sud de l’Auvergne, depuis la même source d’eau qui était aussi exploitée pour le lavage de la laine et des peaux ; durant la même période en Italie, dans la région de Volterra en Toscane, certains bassins d’eau chaude saumâtre, avec de la vapeur à une température de plus de 100°C, étaient exploités pour l’extraction du soufre, du vitriol et de l’alun. A partir du XIX siècle, une meilleur connaissance des sous-sols de notre planète ainsi que les nombreux progrès techniques, font en sorte que la chaleur, avec sont potentiel énergétique, ne soit plus utilisée uniquement aux endroits où elle jaillit naturellement, mais qu’elle soit recherché en des profondeurs toujours plus importantes, et aussi mieux exploitée. Encore en Toscane, et plue exactement à Larderello, en 1904, des expériences d’avant-garde conduisent à la naissance de la géothermie moderne : le Prince Conti, en première mondiale, allume, en fait, quelques ampoules grâce au recours à de l’électricité produite par la géothermie. Le premier réseau moderne de chauffage urbain est installé, quant à lui, en Islande, à Reykjavik, en 1930 ; aujourd’hui le 95% des habitations de l’île sont chauffées au moyen de 700 kilomètres de conduites qui transportent de l’eau chaude. 166 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, 2008. Napoli il sottosuolo, la storia. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples 96 4.3 La géothermie dans le monde 4.3.1 Le gradient géothermal et les gisements mondiaux Malgré l’indiscutable potentiel que la géothermie présente comme source de production énergétique, dans les 50 Pays qui actuellement en font recours la puissance installée équivaut à seulement l’1% de la consommation mondiale d’énergie 167 . L’importance des gisements géothermiques est une fonction du gradient géothermal, à savoir du rapport entre la température et la profondeur ; ce rapport dépend de la position des différentes régions de la planète par rapport aux plaques lithosphériques. Nous pouvons retrouver, alors, de la géothermie haute énergie surtout aux frontières entre ces plaques, notamment le long de la ceinture de feu du Pacifique, à l’arc des Antilles, à l’arc Méditerranéen et au grand Rift Africain. La géothermie moyenne énergie, en revanche, se trouve dans les zones limitrophes à celle haute énergie ainsi que dans des bassins sédimentaires et en correspondance des discontinuités rocheuses. La géothermie basse énergie, quant à elle, est présente dans des nombreuses zones de la planète, notamment en Amérique du sud, aux Etats-Unis, en Europe ainsi que en Australie et en Asie centrale et méridionale. 4.3.2 Les deux filières principales de la géothermie dans le monde Les principales productions mondiales contemporaines concernent les deux filières distinguées de la géothermie : la production de chaleur pour celles très basse et basse énergie, et la production d’électricité pour celles moyenne et haute. En ce qui concerne la chaleur, les principaux producteurs sont aujourd’hui le Japon, la Chine, l’Union Soviétique, l’Europe centrale et orientale et les Etats-Unis. En Europe cette filière est en pleine progression, avec un important taux de croissance qui à rejoint le 4,3% les dernières années 168 . En ce qui concerne l’électricité, en revanche, les 350 installations actuelles se trouvent réparties dans le monde en fonction de la disponibilité de la ressource. Les premiers producteurs demeurent les Etats-Unis, suivis des 167 168 PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. 97 Philippines, de l’Italie, du Mexique, de l’Indonésie, du Japon, de la Nouvelle Zélande, de l’Islande, du Salvador et du Costa Rica. 4.4 La géothermie en Italie 4.4.1 Un Pays entre deux plaques de la lithosphère L’Italie présente un potentiel géothermique exceptionnel, en raison de sa position extraordinaire du point de vue soit volcanologique que géologique. Elle se situe, en fait, entre deux différentes plaques de la lithosphère : celle africaine, qui pousse vers le haut, et celle ionienne, très ancienne, qui tende à descendre vers le fond des mers. La pression exercée entre les deux plaques remonte en surface et se manifeste à travers les nombreux volcans, certains éteints et certains encore actifs, qui ponctuent le territoire tyrrhénien du Pays, de la Toscane jusqu’à la Sicile. Au fait, nous pouvons distinguer quatre régions géothermiques en Italie : la Toscane, les Champs Phlégréens en Campanie, le Tyrrhénien méridional et le canal de Sicile. 169 4.4.2 Des recherches prometteuses Les études du sous-sol italien sont pourtant relativement récentes : elles remontent, en fait, aux années 1976 quand, suite à l’importante crise pétrolière mondiale, le Ministère de l’Industrie avait commandé une analyse détaillée du potentiel géothermique du Pays, ceci afin de comprendre les concrètes possibilités, présentes sur le territoire national, pour la production d’une forme d’énergie alternative à celle provenant des ressources fossiles. Ces études, conduite pour quelques années à travers de nombreux forages épars sur tout le territoire, y compris les mers, ont dévoilés des ressources géothermiques d’une ampleur telle à positionner l’Italie en deuxième position en Europe, juste après l’Islande ; des ressources qui pourraient lui valoir même une totale indépendance énergétique 170 . 169 170 http://www.analistgroup.it http://www.analistgroup.it 98 A la fin de la crise, malheureusement, la chute des prix du pétrole a fait baisser l’intérêt envers les énergies renouvelables en général, car elles retournaient à avoir un coût global qui n’était plus compétitif à l’égard de celui de l’or noir. Malgré cette perte d’élan envers la géothermie, l’Italie demeure aujourd’hui le premier producteur d’électricité géothermique en Europe ; elle occupe en outre, comme nous l’avons vue, la troisième position dans le monde après les Etats-Unis et les Philippines. 4.5 La géothermie à Naples : Vésuve et Champs Phlégréens 4.5.1 La Campanie et ses volcans récents La Campanie, quant à elle, est une région exceptionnelle du point de vue géothermique, une des plus importantes en Italie ensemble avec la Toscane et le Latium ; elle est, en fait, caractérisées par la présence de volcans de formation relativement récentes et encore actifs aujourd’hui, ainsi que par des nombreuses manifestations thermales, sur terre aussi bien que au fond de la mer. Les recherches géothermiques ont commencées durant les années 1950 sous l’égide des groupes industriels AGIP et ENEL, surtout dans les zones des Champs Phlégréens et de l’île d’Ischia ; des études qui étaient orientées, particulièrement, à l’individuation du potentiel haute énergie exploitable pour la production d’électricité dans la région. La province de Naples, notamment, s’est démontrée étant riche en sources d’eau et de vapeur : ces sources, caractérisées par des températures très variables mais généralement assez élevées, même en proximité de la surface, présentent une moyenne de 58°C et un pic de 147°C à l’intérieur du cratère de la Solfatare à Pozzuoli 171 . Les premières analyses effectuées sur le cratère du Vésuve n’ayant pas conduit à des résultats satisfaisants, l’attention s’est concentrée, donc, vers la deuxième caldère volcanique qui caractérise la baie de Naples, celle des Champs Phlégréens. Il s’agit d’une des zone vulcaniennes les plus dangereuses et actives d’Europe, avec des bouches volcaniques distribuées dans une superficie de quatre kilomètres autour de la ville de 171 http://www.analistgroup.it 99 Pozzuoli. Cette région, dont nous allons connaître l’histoire volcanique dans le chapitre suivant, a été intéressée, voici 12.000 ans, par une forte explosion, qui a généré une énorme quantité de magma : il s’agissait de 50 kilomètres cubes, ce qui nous semble encore plus impressionnants si nous les comparons aux 3 kilomètres seulement qui ont été produit par l’éruption du Vésuve qui a détruit Pompéi en 79 après J.-C. 172 . Ce magma, qui allait modifier à jamais le territoire où un jour seraient arrivé les colonisateurs, est allé se distribuer, sur une épaisseur de 50 mètres, à 350 kilomètres de distances ; ses cendres légères sont arrivées se déposer jusqu’à la ville de Moscou, en Russie 173 . 4.5.2 Le « Campi-Flegrei-Deep-Drilling-Project » Aujourd’hui cette même région, caractérisée d’ailleurs par le volcanisme le plus explosif au monde, de même nature que celui de Yellowstone, de Santorini, de Iwo Jima et des îles Galapagos 174 , se trouve au centre d’un projet de recherche internationale, le « Campi-FlegreiDeep-Drilling-Project », sous la direction de l’Instituto Nazionale di Geofisica, du CNR et de l’Osservatorio Vesuviano 175 . Ce projet se propose un double objectif : d’un coté, la connaissance du système d’alimentation magmatique et de sa relation avec les aquifères profonds ; de l’autre, l’exploitation de son potentiel pour des objectifs énergétiques. De cette manière, le risque volcanique très élevé de cette zone qui se présente, malgré cela, densément urbanisée, caractérisée par un gradient géothermal parmi les plus élevé du monde, pourrait être reconvertit en un progrès scientifique globale et en une richesse économique locale. Pour la première fois dans la volcanologie mondiale, le projet vise à déterminer, à travers des perforations et des études directes, les mécanismes physiques qui produisent les éruptions les plus dévastant de la planète. 172 173 TOZZI Mario, 2008. Italia segreta. Viaggio nel sottosuolo da Torino a Palermo. Rizzoli, Milan CERVASIO Stella, Repubblica - 12 Novembre 2006 174 DE NATALE Giuseppe, TROISE Claudia, Istituto Nazionale di Geofisica e Vulcanologia – Osservatorio Vesuviano – Napoli http://www2.ogs.trieste.it 175 MANCUSI Franco, Il Mattino - 12 Novembre 2006 100 Le système géothermale, d’une profondeur de 3 kilomètres, est étudié grâce à un systèmes de forages qui comprend deux puits sur terre ainsi que 6 ou 7 au large de la cote. Les premiers forages sont situés à l’intérieur de la caldère du Pausilippe, dans un site occupé auparavant par les usines ILVA désormais démantelées, aujourd’hui en attente d’une urbanisation définitive ; le premier d’entre eux rejoint une profondeur de 2 kilomètres, alors que le deuxième, d’une forme déviée, arrivera à 4 kilomètres. 4.6 Les technologies de la géothermie 4.6.1 Les technologies spécifiques et les usages dérivés Il est temps, maintenant, d’étudier les différentes technologies qui sont aujourd’hui disponibles pour l’exploitation de la ressource géothermique, et qui peuvent, donc, s’appliquer aux différentes échelles de la ville, à partir de celle urbaine jusqu’à celle domestique ; ceci pourrait nous emmener à re-concevoir le fonctionnement de Naples en ses différentes parties. Nous savons que les principales productions mondiales géothermiques concernent actuellement deux filières distinguées : celle pour la production d’électricité, qui pourrait servir, grâce à la possibilité d’être distribuée par le biais du réseau existant, aux services urbains ; et celle pour la production de chaleur, qui pourrait facilement s’adapter aux besoins individuels des différents bâti qui composent la ville. 4.6.2 La centrale géothermique En ce qui concerne la production d’électricité, le processus à mettre en œuvre consiste, avant tout, en des recherches spécifiques visant à la découverte d’une source de chaleur magmatique, ainsi qu’à la compréhension de ses caractéristiques propres, notamment à l’individuation des limites physiques du réservoirs ; ceci, nous le savons, est actuellement en cours dans la baie de Naples au sein du workshop international « Campi-Flegrei-Deep-Drilling-Project ». La première étape de ces recherches consiste en la réalisation, en exploitant la même technique utilisé pour les sondages pétroliers, d’un forage de production 176 capable de faire 176 PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. 101 remonter l’eau chaude du sous-sol vers la surface. Un problème qui se pose, par la suite, est celui du rejet de l’eau après l’échange de la chaleur : si cette eau est peu chargée de sels minéraux, la solution envisagée le plu souvent est celle qui prévoit son évacuation en surface ; dans le cas contraire, où cette évacuation pourrait apporter des endommagements à l’environnement, dus à la composition minérale de l’eau elle-même, cette dernière est réinjectée dans la nappe phréatique d’origine. Ce processus garantit, en même temps, la pérennité de la ressource. L’évacuation se fait à travers la technique du doublet : afin de ne pas refroidir la ressource, en fait, les puits d’exploitation et de réinjection doivent se trouver à une certaine distance l’un de l’autre ; ceci peut s’obtenir soit en positionnant les puits en deux endroits séparés entre eux, soit en leur donnant une trajectoire déviée, surtout lorsque l’opération de recherche est conduite en des milieux urbains, qui manquent alors de l’espacement nécessaire au premier cas de figure 177 . L’eau, transformée en vapeur, est en mesure de faire tourner, grâce à sa pression, une turbine et un alternateur, qui alimentent une centrale géothermique 178 . 4.6.3 La pompe à chaleur La deuxième filière de la géothermie est celle pour la production de chauffage. Ce processus consiste en l’utilisation d’une pompe à chaleur (PAC) 179 : il s’agit d’un dispositif technique capable de transférer de l’énergie d’un niveau à basse température, comme celui de l’air (aérothermie), du terrain (géosolaire), ou d’une nappe phréatique superficielle, vers un niveau à température plus élevée. Ce transfert, bien évidemment, consomme de l’énergie, mais celle totale, restituée par la pompe elle-même, demeure supérieure à celle nécessaire pour la faire fonctionner. Nous appelons ce rapport « coefficient de performance » 180 : il varie de 4 à 5, et pour les dispositifs modernes il peut atteindre des niveau encore plus importants. 177 178 179 180 PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. http://www.edf.com BERANGER Bruno, 2008. Les pompes à chaleur . Eyrolles, Paris PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. 102 Les pompes à chaleur peuvent ainsi permettre la production d’eau chaude, sanitaire ou pour le chauffage des ambiances ; elles peuvent aussi servir au refroidissement et à la climatisation, en inversant simplement le circuit de fonctionnement ; Federico BUTERA parle, à cet égard, de réfrigérateur inversé 181 . Les pompes à chaleur, mise à part le système de captage de l’air qui ne se considère pas avantageux en toutes conditions climatiques, et en cas d’absence d’une nappe phréatique peu profonde, peuvent fonctionner, partout dans le monde et en toutes conditions, en utilisant la chaleur présente dans le proche sous-sol, par le biais d’un certain nombre de capteurs chargés d’un fluide caloporteur 182 . Ce type de système est considéré comme étant entièrement propre, car il ne produit aucun déchets ; en outre il ne dépend pas des conditions climatiques locales, car nous savons que le sous-sol proche se trouve à une température constante durant toute l’année. La dimension réduite de ce dispositif fait en sorte qu’il soit adapté à des maisons individuelles autant que à des bâtiments professionnels. Les capteurs peuvent, à l’occurrence, être de deux catégories distinguées, selon les besoin énergétiques et les différents milieux intéressés : ils peuvent être, en fait, horizontaux, enterrés à une profondeur variable, selon l’altitude, entre 0,60 et 1,20 mètres sur une surface qui est égale à une fois et demi celle interne à chauffer ; ou verticaux, positionnés dans des forage de seulement 10 ou 15 centimètres de diamètre et d’une profondeur qui varie selon la surface à chauffer. La Suisse nous donne un exemple très stimulant à suivre : les sondes géothermiques, en fait, sont mises en place systématiquement au moment de la construction des immeubles, soient ils individuels ou collectifs ; la technologie à laquelle ils font recours est celle des pieux géothermiques 183 , à savoir des sondes placées à l’intérieur des gros œuvres de fondations. Ces puits d’énergie, en outre, stockent, en été, la chaleur en excès dans les immeubles pour la libérer, en hiver, dans le réseau de chauffage. Le système implanté, par exemple, dans l’extension de 181 182 183 BUTERA Federico M., 2004. Dalla caverna alla casa ecologica. Storia del comfort e dell’energia. Edizioni Ambiente, Milan PAPPALARDO Michèle, VESSERON Philippe, op. cit. ibid. 103 l’aéroport de Zurich, composé de 350 pieux qui descendent à 30 mètres de profondeur, est prévu pour une durée de vie d’un siècle, tout en ne réclamant qu’une maintenance minimale. 104 Chapitre 5. Naples Souterraine : le choix des lieux du projet 5.0 Introduction / Introduction Naples, la poreuse, cache une réalité parallèle, qui se présente comme le résultat de l’action des hommes sur un territoire à la nature exceptionnelle, généré par la longue activité des volcans qui entourent la ville. L’hétérogénéité géologique et morphologique de son paysage n’a pas d’égale au monde, à cause de la présence des deux aires volcaniques encore actives et de sa vaste et fertile campagne environnante : le lieu choisit pour la fondation de Naples est, de ce fait, une synthèse parfaite des caractères d’ouverture et de protection du territoire ambiant. Durant sa trimillénaire histoire urbaine, le développement de Naples a toujours été accompagné de celui de ses viscères, excavées extra – muros pour y extraire les précieux matériaux de construction et intra – muros pour refournir ses habitants en eau potable. La présence de ces cavités n’a jamais cessé d’alimenter des mythes, des légendes et des croyances populaires, et se pose aujourd’hui comme une incontournable opportunité pour recréer un équilibre prospectif entre la ville et ses origines. The porous Naples hides a parallel reality, which is the result of the actions of men in a territory on the exceptional nature, generated by the long activity of volcanoes surrounding the city. The geological and morphological heterogeneity of the landscape has no equal in the world, due to the presence of both still active volcanic area and its vast and fertile countryside: the venue for the foundation of Naples is, therefore, a perfect synthesis of the characteristics of openness and protection of the surrounding territory. During his trimillenary urban history, the development of Naples has always been accompanied by that of its viscera, excavated extra - city to extract valuable building materials and intra - city to bring its inhabitants the drinking water. The presence of these cavities has never ceased to fuel the myths, legends and beliefs, and is today an indispensable opportunity to recreate a balance between the city and its origins. 105 5.1 Une reterritorialisation 5.1.1 Déterritorialisation et reterritorialisation Nous avons déjà parlé de l’importance, afin de déclencher un processus de développement durable dans le cadre de la ville contemporaine, d’adopter une approche qui, en accord avec Alberto MAGNAGHI 184 , se définit de type territorialiste ; à savoir une approche capable de créer des synergies efficaces entre les trois composantes qui structurent le territoire, envisagé, ce dernier, en tant que relation. Ces composantes sont représentées notamment par l’environnement naturel, l’environnement construit et l’environnement anthropique. En partant, en fait, de la considération que la déterritorialisation soit un résultat dérivé de la déstructuration des rapports existants entre ces trois composantes, la durabilité peut se retrouver dans l’actuation de processus de reterritorialisation qui soient capables de reconstruire ces relations perdues. Il est impératif de souligner, en fait, que toutes société, établie sur un territoire donné, est en mesure de construire, avec l’environnement naturel, des bonnes ou des mauvaises relations et, par conséquent, d’instaurer des bons ou des mauvais équilibres. Afin que ces relations soient durables, il est donc nécessaire que les règles qui régissent les établissements humains soient capables de produire ce que MAGNAGHI lui-même définit une autodurabilité 185 ; celle-ci s’obtient en évitant le recours à des œuvres de « soutènement » techniques de type exogène, qu’aujourd’hui caractérisent malheureusement la plupart des territoires contemporains. 5.1.2 L’identité du territoire : permanences et invariances Or, afin de réussir à nous orienter vers une durabilité valable au niveau territoriale, il est fondamental de reconnaître l’identité de ce dernier, afin de pouvoir déclencher des actes de reterritorialisation qui se démontrent les plus pertinents pour le contexte donné. Tous les cycles de territorialisation, en fait, à travers les processus de réorganisation et de changement du territoire, 184 185 MAGNAGHI Alberto, 2000. Il progetto locale. Bollati Boringhieri, Turin ibid. 106 contribuent à la conservation et à la reproduction de son identité : cette identité, qui dérive donc de l’ensemble des ces processus, nous permet de re-cartographier des éléments qui se comportent comme des permanences et des invariances ; à partir de ces éléments, alors, se construisent les nouveaux actes de territorialisation. Il est clair, enfin, que la compréhension du parcours historique qui conduit à la formation du territoire n’est pas orientée à la conservation de cette entité, telle qu’elle nous est parvenue, mais à la perpétuation de l’important processus qui régi à sa composition, selon, bien évidemment, des règles et des formes nouvelles, en accord avec les besoins de la société contemporaine. 5.1.3 Le « génie du lieu » Christian NORBERG-SCHULTZ, dans son important ouvrage sur le « Genius Loci » 186 , se questionne à propos de la compréhension des différentes « implications psychiques » de l’architecture. L’auteur définit cette dernière comme la concrétisation de « l’espace existentiel » : le « Genius Loci », ou l’esprit d’un lieu, représente la réalité concrète avec laquelle l’homme a affaire durant toute sa vie ; faire de l’architecture correspond, tout d’abord, à la visualisation du Genius Loci. Cette visualisation résulte indispensable afin de pouvoir habiter le lieu et réussir à s’identifier avec celui-ci. NORBERG-SCHULTZ nous précise : « Il n’y a pas des différents types d’architecture, mais seulement des situations différentes qui requièrent des solutions différentes, afin de pouvoir satisfaire les exigences physiques et psychiques de l’homme ». BRINCKERHOFF JACKSON, quant à lui, définit le génie du lieu comme une valeur tout à fait exceptionnelle, qui ne dérive pas exclusivement d’une qualité naturelle ou historique intrinsèque au lieu lui-même, mais qui se présente comme un accent particulier déterminé par les manières culturelles locales d’habiter le territoire, comme une somme particulière d’événements et de sensations ordinaires 187 . Si, alors, l’aliénation de l’homme est causée par la perte d’identification avec les choses naturelles et artificielles qui constituent son habitat spécifique, l’identité d’une personne est, en 186 NORBERG-SCHULZ Christian, 1979. Genius Loci. Paesaggio Ambiente Architettura. Mondadori Electa, Milan 187 BRINCKERHOFF JACKSON John, 1984. Discovering the Vernacular Landscape. Yale University Press, New Haven et Londres [Trad. franc. 2003] A la découverte du paysage vernaculaire. ACTES SUD / ENSP, Arles et Versailles 107 grande partie, dépendante des lieux et des choses qui lui sont accessibles. Selon James WINES, en outre, l’égarement est du à la perte des racines naturelles, perte qui est déterminée par la manière d’habiter les lieux, en ignorant souvent le vaste toile de fond environnementale 188 . 5.1.4 Les villes et leur cadre géographique L’étude des différentes expériences historiques nous confirme que les villes ne sont jamais construites en tournant le dos à leur cadre géographique, mais au contraire en un dialogue étroit avec celui-la. Dans une réalité autant changeante que celle représentée par l’organisme urbain, alors, les rares éléments de permanence concernent certains lieux qui, même si peut-être complètement urbanisés, conservent pour autant un lien fidèle et lisible avec la géographie environnante 189 . Un des exemples les plus éclairant, de ce point de vue, est notamment représenté par la ville de Naples ; une ville qui demeure, encore aujourd’hui, difficile à saisir sans une considération exhaustive de son cadre géographique de grande échelle. 5.2 Un territoire volcanique 5.2.1 Les deux aires volcaniques Le paysage qui entoure la ville de Naples est caractérisé par une hétérogénéité géologique et morphologique qui n’a pas d’égale au monde 190 . Ceci à cause, avant tout, de la présence de deux aires volcaniques, encore actives aujourd’hui, qui la serrent des deux cotés : à l’ouest nous retrouvons la caldère des agités Champs Phlégréens, et à l’est la calme et imposante montagne du Vésuve. Malgré ce que nous pouvons être invité à supposer, en regardant distraitement la baie de Naples et en considérant le pois considérable exercé par le Vésuve, ce n’est pas ce dernier à avoir déterminé la conformation du contexte géologique de la ville : les matériaux qui constituent 188 WINES James, 2000. L’architecture verte. Taschen, Koln 189 MARTI ARIS Carlos, 2005. La cimbra y el arco. Fundaciòn Caja de Arquitectos, Barcelone [Trad. it. 2007] La cèntina e l’arco. Christian Marinotti Edizioni, Milan 190 LICCARDO Giovanni, 2004. Napoli sotterranea. Storia, arte, segreti, leggende, curiosità. Newton & Compton, Rome 108 l’environnement parthénopéen proviennent en fait, en accord avec ce que nous avons introduit dans le chapitre précédent, des nombreux événements éruptifs des Champs Phlégréens 191 . 5.2.2 Les Champs Phlégréens Quant à ces derniers, les Champs Ardents, qui comprennent aussi les proches îles de Ischia, de Procida et de Nisida, ils sont caractérisés par une multitudes de cratères distingués, nés séparément au cours des derniers 150.000 ans mais qui, durant des époques historiques récentes, ont donné naissance à seulement deux manifestations connues : celle de 1302 de l’île de Ischia, et celle de 1538 du Monte Nuovo. Le Monte Nuovo, connu comme la montagne la plus jeune d’Europe, a été formé lors d’une seule éruption, de la durée de deux jours et deux nuits ; il se présente aujourd’hui comme un cône volcanique de la circonférence de 2,4 kilomètres, avec une altitude maximale de 132 mètres depuis la plage contiguë, et dont le fond gît à seulement 6 mètres sur le niveau de la mer 192 . Les activités volcaniques des Champs Phlégréens, que les spécialistes divisent aujourd’hui en quatre cycles successifs, étaient évidemment assez intenses durant le passée : le poète Virgile, dans son Enéide, a reconnu juste sur les bords du lac d’Averne, aux exhalations mortelles à son époque, l’entrée de l’enfer. Parmi les différents cratères qui constituent la caldère, en fait, beaucoup d’entre eux sont facilement individualisables dans les aspérités mêmes du territoire : parfois au fond de certains lacs et parfois le long du périmètre des nombreuses vallées fertiles, peuplées d’écosystèmes délicats et protégés. Cette activité est encore manifeste dans le phénomène, complètement local, du bradisisma : consistant en une modification continue des altimétries du terrains, il caractérise la voisine ville de Pozzuoli ainsi que les quartiers côtiers de Naples. Cette même activité est encore assez intense, en outre, à l’intérieur du cratère du Solfatare, un vulcain qui se situe à quelques kilomètres seulement du centre ville et dont les émissions de vapeurs et de soufre, pendant les journées ventilées, atteignent ses quartiers occidentaux. 191 192 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, 2008. Napoli il sottosuolo, la storia. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples ibid. 109 5.2.3 Le Vésuve Le Vésuve, ensuite, même si géologiquement est loin de la ville, y est historiquement lié, ne serait-ce que d’un point de vue exclusivement optique, car il contribue à déterminer, avec sa forte présence, une soudure unique entre la ville et son contexte géographique de grande échelle. Le volcan se positionne au sein d’une série de cratères plus grande qui court parallèle à la cote tyrrhénienne de l’Italie et qui, au nord, arrive vers Sienne en passant par Rome. Malgré le fait que la formation géologique de cette ensemble soit à considérer comme récente, les seules éruptions advenues durant des périodes historiques proches sont celles qui ont intéressées la zone de la Campanie, et plus précisément le Vésuve. Probablement il s’agissait, à l’origine, d’un cône sous-marin, ensuite émergé en tant que île volcanique et puis lié à la terre par le biais de ses mêmes matériaux éruptifs 193 . Les spécialistes retiennent que sa formation remonte à la dernière ère glacière, ce qui le rend plus jeune que les Champs Phlégréens eux-mêmes. Pourvu, en outre, que les populations anciennes de la zone ne connaissaient pas le Vésuve en tant que volcan, il faut présumer que, entre l’éruption advenue il y a 3.800 ans et celle qui a détruit la ville de Pompéi en 79 après J.-C., il y a eu une longue période d’inactivité, suite à laquelle le volcan a ressemblé à une simple montagne bruyante. Un premier signe de reprise de son activité a été, d’après les fouilles archéologiques, le tremblement de terre du 63 après J.-C. qui a fortement endommagé Pompéi ainsi que les autres villes de la zone vésuvienne. Durant la successive éruption du 79 après J.-C., qui a enseveli complètement les villes en bouleversant les habitants impréparés à ce risque, la moitié du cône originaire a été détruite en laissant la place à une nouvelle structure, celle visible aujourd’hui ; l’ancien cône, qu’aujourd’hui entoure le Vésuve pour une moitié, est actuellement appelé Monte Somma 194 . Suite à la tragédie qui à intéressée la ville de Pompéi, nous avons des informations concernant d’autres éruptions, à commencer de celle du 203 après J.-C. A partir de l’année 1631, 193 194 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, 2008. Napoli il sottosuolo, la storia. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples ibid. 110 en outre, le complexe volcanique est rentré dans une nouvelle phase éruptive, celle dite récente, caractérisée par une alternance de plusieurs cycles distingués dont la duré varie considérablement. La dernière éruption, qui a eu lieu durant la seconde guerre mondiale, juste après l’arrivée des armées américaines de la libération, a été caractérisé par une colonne de rochers enflammés, haute de 10.000 mètres, visible de Rome à Tarente 195 ; elle a représenté la conclusion d’un nouveau cycle, et a été suivie d’une longue période de quiescence. Selon Jean-Noël SCHIFANO le Vésuve, actuellement le volcan le plus surveillé d’Europe, endormi depuis le mois de Mars 1944, n’est pas perçu par les habitants de Naples comme un exterminateur, mais au contraire comme un œil cosmique qui les protège contre le mauvais œil, la mauvaise sort. Il confère à Naples sa peau noire, car il recouvre la ville de son pavement de lave qui l’éclaire, durant les heures nocturnes, d’une lumière sombre ; il dessine, avec le contigu Monte Somma, un M dans son paysage géographique, qui symbolise le mariage entre les quatre éléments : la terre, le feu, l’air et l’eau 196 . La position de la ville, précisément entre ces deux aires volcaniques, se présente immédiatement comme un exceptionnel abri naturel ; un abri qui est potentialisé, d’autre part, par la présence d’une vaste et fertile campagne environnante, la Campania Felix. 5.3 Naples et son « Genius Loci » 5.3.1 Le Naples avant Naples A une première rencontre avec Naples nous nous apercevons immédiatement de la position géographique très particulière qu’elle occupe ; ceci nonobstant le fait qu’aujourd’hui le véritable accès à la ville, et donc l’impression immédiate qui en dérive, ne soit plus exclusivement la mer. L’image historique première que l’on a de Naples est, de notre point de vue, celle d’un accostage protégé, d’un sûre abri au sein d’un région qui, selon ce que nous avons décrit plus haut, devait sembler très périlleuse. 195 196 SCHIFANO Jean-Noël, 2004. Sous le soleil de Naples. Gallimard, Paris ibid. 111 Afin de réussir à vérifier cette considération, il va falloir, tout d’abord, s’éloigner de la ville elle-même et apprendre à voir le contexte régional qui l’entoure, celui de la Campanie, et plus précisément celui de sa cote tyrrhénienne : celle-la contient, en fait, tout les éléments, les ingrédients, qui constituent la Naples avant Naples ; ces mêmes éléments peuvent concourir à nous révéler le véritable esprit de la ville, aujourd’hui enseveli sous les inconsciences qui caractérisent les manières contemporaines d’habiter le territoire. Les villages de la région, et notamment ceux qui se trouvent le long de la cote, en fait, sont souvent distribués de manière à souligner et mettre en valeur les aspects les plus remarquables du paysage naturel. Nous proposons deux échelles d’analyses pour faciliter la compréhension du sens du lieu à Naples : la première d’entre elles consiste en une étude de la morphologie qui caractérise le paysage côtier de la région ; la deuxième prévoit une comparaison directe entre cette morphologie territoriale et les configurations urbaines et architecturales de la ville elle-même. L’objectif de ces analyses est celui de comprendre en quelle mesure la réponse de la ville soit indissolublement dérivée de son contexte géographique, tant en ce qui concerne la configuration globale de sa structure urbaine, que pour ce qui est de la réalisation de ses masses architecturales, obtenues par le biais de l’utilisation des ressources matérielles disponibles localement. 5.3.2 Analyse 1 : la morphologie des lieux Quant à la première analyse, nous partons de la constatation que la cote de la Campanie, comme nous l’avons décrit dans le paragraphe précédent, est une formation fortement accidentée d’origine volcanique. Le sol se présente recouvert d’un strate très épais d’ancienne lave et cendre, nommé le tuf ; sa nature, souple mais résistante, a fait en sorte que ce matériau soit utilisé, dés le passé, comme matrice pour l’activité édificatrice. Cette pierre peut effleurer, même à l’intérieur du tissu de la ville, à des altimétries très différentes les unes des autres : nous la retrouvons, en fait, sur la colline de S.Martino (249m), le long du Corso Vittorio Emanuele (100m), sur la butte de Pizzofalcone (60m) et enfin au niveau de la mer, sur l’île de Mégaris. 112 L’opération d’excavation, commencée vers l’année 4000 avant .J.-C. 197 , est à considérer comme la responsable, de concert avec les processus d’érosion naturels, de la conformation actuelle des lieux. La ville est, nous le savons, une véritable ville de mer ; même si la mer, selon le point de vue du développement urbain, veut souvent dire ouverture et exposition, dans le cas spécifique de Naples elle signifie aussi et surtout, toujours selon notre interprétation, protection et sûreté. La présence, en fait, des deux bras de cote qui constituent la baie napolitaine, le Pausilippe d’un coté et la cote Amalfitaine de l’autre, donne à la ville une sensation de fermeture ; les nombreuses îles qui ponctuent cette même baie, habitées dés les époques les plus anciennes, concurrent, en outre, à donner ce même effet de protection, car elles participent à la fragmentation de l’espace visuel en différents épisodes, en transformant l’horizon visualisable en une entité plus facilement divisible et contrôlable. La cote accidentée de la Campanie présente, aujourd’hui comme durant le passé, de nombreuses anses naturelles, le long desquelles des petites buttes rocheuses rendent tout à fait possible l’implantation d’une ville : elles font en sorte que l’on se sente, en même temps, abrités et accostables ; sur l’un de ces buttes, le Monte Echia ou Pizzofalcone ou Monte di Dio, est née notamment la ville de Naples. Le lieu choisit pour la fondation de la ville se présente, donc, comme une synthèse parfaite des caractères d’ouverture et de protection qui caractérisent le territoire environnant, malgré le fait qu’aujourd’hui le niveau du sol ait beaucoup changé par rapport au passé et que, par conséquent, les aspérités naturelles du site résultent moins appréciables. Cependant, il n’est peut-être pas possible de retrouver, tout le long de la cote tyrrhénienne proche, une configuration naturelle de lieux caractérisé par une valeur symbolique et pratique semblable, et donc autant préparé à accueillir une conurbation. 197 LICCARDO Giovanni, op. cit. 113 5.3.3 Analyse 2 : la morphologie urbaine et celle architecturale En ce qui concerne, ensuite, la deuxième analyse, nous partons de la considération que l’architecture vernaculaire de la région napolitaine se présente, selon notre point de vue, comme étroitement liée aux ressources naturels locales et à la conformation spécifique des lieux. Les matériaux de construction les plus diffusés localement sont, en fait, le tuf et le piperno. Le premier, comme nous allons le voir dans les pages qui suivent, a été utilisé dés le passé pour l’activité d’édification, alors que le deuxième, à la couleur gris foncé, a été préféré, en raison de sa résistance et de sa dureté, pour le pavement des lieux ainsi que pour la réalisation des détails architecturaux, appliqués à la masse bâtie. Tous deux d’origine volcanique, ces matériaux donnent la couleur typique à la ville, qui se présente, dans ses parties les plus anciennes, à l’instar d’une configuration naturelle plutôt que comme un artifice. La souplesse du tuf et les jointures irrégulières qui configurent les parois verticales de la ville, soient-elles appartenantes à des édifices ou nécessaires aux soutènement des irrégularités du terrain, font en sorte que l’architecture semble plutôt modelée naturellement que construite ; le manque de trottoirs et d’escaliers devant les multiples accès des bâtiments fait en sorte, en outre, que le les rues deviennent, quelque part, des véritables espaces intérieurs qui relient, au lieu de les séparer, les différents immeubles. L’orographie naturelle des territoires qui entourent le socle de fondation de Naples, nous l’avons dit, est responsable de la présence de plusieurs cours d’eau sur les cotés du site occupé actuellement par le centre ville ; ces cours d’eau, nécessaires à l’évacuation des eaux pluviales qui se déversaient depuis les collines contiguës du Vomero et de Capodimonte en direction de la mer, sont devenus, ensuite, des parcours routiers à part entière, indispensables à la liaison de la ville avec ses alentours. Ces rues, aujourd’hui reconnaissables dans certains quartiers centraux de Naples, ressemblent encore, en raison notamment de leur parcours sinusoïdal ainsi que des forts dénivelé qu’elles engendrent, à des espaces excavés dans la colline de tuf plutôt que à des infrastructures construites. La présence, le long de leur parcours, de séquences continues mais irrégulières de maisons concoure à accentuer cet effet : la masse bâtie ressemble alors à une exaltation des 114 formes naturelles locales. Ces bâtiments, construits souvent devant le paroi accidenté de la falaise rocheuse, possèdent, depuis leur cours interne, un accès direct aux grottes artificielles. Les structures voûtées, une sorte de loggia, qui caractérisaient souvent les façades des immeubles anciens, rarement conservées aujourd’hui et visibles surtout en dehors du centre ville, rappellent, d’autre part, les grottes creusées directement dans la masse de tuf ; ceci donne à l’architecture un caractère naturel. Ce même caractère n’est d’ailleurs pas présent exclusivement dans les expressions vernaculaires de l’architecture locale, mais nous les rencontrons aussi dans une multitude de bâtiments importants du centre ville : ici, en raisons de l’importante étroitesse des rues anciennes, les effets architecturaux les plus importants reculent en fond de cours intérieure, où des escaliers ouverts, dont les plus fameuses demeurent celle baroques typiques du langage de Ferdinando SANFELICE, rappellent, avec leur double ordre d’arcades, des excavations dans une paroi rocheuse naturelle. 5.4 L’Italie souterraine 5.4.1 Un paysage articulé La réponse de la ville de Naples à ce contexte géographique exceptionnel nous parait absolument spécifique, et mérite une analyse approfondie et détaillée en ce qui concerne sa structure, son développement historique et ses usages multiples ; il nous parait utile et intéressant, néanmoins, de tisser brièvement un profil souterrain des autres villes italiennes qui, d’une manière ou d’une autre, vantent la présence de structures souterraines auxquelles leur caractère est liée. L’Italie, nous l’avons expliqué dans les chapitres précédents, se trouve en fait entre deux plaques de la lithosphère, et en raison de cette position délicate elle présente un territoire tout à fait particulier : le sol et le sous-sol de la péninsule, en fait, sont le produit d’une intense activité géologique ainsi que de l’opérativité des hommes, qui sont intervenus dynamiquement sur un territoire marqué par une forte présence de volcans et de tremblements de terre. Un petit voyage le long de la botte italienne peut donc nous présenter un Pays autant articulé en surface qu’en sous-sol ; pour ce faire, et pour rendre clair et lisible le bref récit consacré à 115 chaque contexte géographique, nous allons procéder du Nord au Sud du Pays, afin de faciliter une lecture parallèle entre la nature des différentes région et celle spécifique des traces laissées par l’histoire, d’origine différente à chaque fois mais aujourd’hui communément cachées sous les villes contemporaines 198 . 5.4.2 Un réseau magique Un réseau magique extraordinaire, par exemple, est celui caché sous Turin. La ville, autrefois le siège du célèbre ésotériste Nostradamus, présente un réseau impressionnant constitué de grottes alchimiques, qui la positionne à l’intérieur de deux triangles magiques : celui de la « magie blanche » avec Lion et Prague, et celui de la « magie noire » avec Londres et San Francisco. Turin est tout aussi caractérisée par la présence d’espaces, encore une fois souterrains, qui ont une utilisation plus fonctionnelle que magique : par exemple les 35.000 mètres carrés d’esplanade qui se trouvent sous la Piazza Vittorio Veneto, et qui servaient pour héberger les chariots du transport de neige en ville aptes à alimenter ce que nous pouvons considérer comme un ancien réfrigérateur naturel souterrain ; ceci pourvu la position géographique très particulière occupé par Turin, située juste aux pied des Alpes. 5.4.3 Un réseau aquatique Un réseau aquatique, aujourd’hui presque complètement invisible, est celui de Milan. La ville était construite, en fait, au coeur d’une vaste plaine alluvionnaire très fertile, parcourue par des nombreux cours d’eau provenant des Alpes et tributaires du fleuve Pô ; le nom romain de Mediolanum pourrait indiquer, alors, cette position stratégique au sein d’une région géographique de plus grande échelle. Ces rivières, liées entre elles par le biais de nombreux canaux artificiels, les Navigli, permettaient de rejoindre en bateau, depuis la ville, la mer Adriatique et notamment la ville de Venise, tout en passant par le port fluvial de Pavie. Cette importante infrastructure hydraulique donnait à Milan une possibilité qui lui était naturellement niée à cause de la position géographique elle-même ; ces canaux, aujourd’hui presque entièrement supprimés, cachés en sous-sol, constituent un réseau souterrain, un souvenir de l’ancienne ville d’eau à jamais disparue. 198 TOZZI Mario, 2008. Italia segreta. Viaggio nel sottosuolo da Torino a Palermo. Rizzoli, Milan 116 5.4.4 Un réseau funéraire Un réseau funéraire est, ensuite, celui qui caractérise la région de l’Etrurie. Autrefois le siège d’une civilisation florissante, aujourd’hui elle nous est connue archéologiquement surtout grâce à ses vestiges souterraines : les fameuses nécropoles, une sorte de village hypogé constitué par l’assemblage d’une multitude de chambres séparées. La ville de Sienne, quant à elle, conserve, dans son sous-sol, un important réseau, celui des Bottini, d’une longueur de 25 kilomètres, et qui constitue l’ancien aqueduc médiéval, construit pour satisfaire les besoins hydriques de la ville. 5.4.5 Un réseau archéologique Un réseau archéologique exceptionnel, une véritable ville cachée, est celui qui stratifie l’éternelle Rome. Il est suffisant de rappeler que le sous-sol de la Caput Mundi de l’Empire Romain compte aujourd’hui une trentaine de strates archéologiques, contenus en seulement douze mètres de profondeur : les dernières lignes du réseau métropolitain sont, pour cette raison, construites à plus de 40 mètres de la surface, à l’intérieur d’un sol complètement vierge. Un voyage dans ses impressionnants réseaux souterrains, comme celui de l’aqueduc et surtout celui de la cloaque Maxima, se démontre tout à fait intéressant : cette dernière se présente comme une sorte de rue souterraine, de plus de 5.000 kilomètres, submergée d’eau, née voici 2.500 ans à la place d’une petite rivière tributaire du fleuve Tibre et qui, les Etrusques, et ensuite les Romains, ont réglementé, pavé et enfin recouvert ; ou encore le réseau des catacombes et des colombaires, constitué d’un ensemble de 25 lieux différents, qui représentent les traces de la Rome du IV siècle, à savoir les vestiges de la ville de la chrétienté obstinément opposée à celle du paganisme de la surface. 5.4.6 Un réseau écologique Un réseau écologique de toute autre nature est celui de l’Italie ionienne. Nous avons déjà fait référence, dans le troisième chapitre de ce mémoire, aux cavités souterraines de la ville de Matera, à ses habitations troglodytiques des Sassi, nées pas stratifications successives à partir de grottes creusées directement dans les parois rocheux ; les mêmes réflexions sont valables pour toute une partie du territoire des Pouilles, où des petites villes, comme Gravina par exemple, 117 construite près d’un canyon naturel, conservent encore, souvent sans le savoir, les traces d’un sous-sol extrêmement carié, produit d’une structure géologique très particulière, fortement poreuse et à la surface aride ; la symbiose entre architecture construite et cavités et ici très étroite, née afin de satisfaire les besoins hydriques des anciennes populations locales. 5.4.7 Un réseau primitif Un réseau primitif est celui que nous pouvons rencontrer en Sardaigne, et qui selon certains chercheurs constitue les vestiges de la mythologique ville d’Atlantide. Un réseau constitué par les primitives habitations construite, voici 5.000 ans, par le peuple nuragique, peut être des prédécesseurs des Etrusques eux-mêmes. La capitale de l’île, Cagliari, selon les légendes locales, est traversée par un réseau de plus de 700 cavités formé par des passages, des nécropoles et des catacombes, d’origine phénicienne et punique. Des traces souterraines bien plus récentes sont celles que nous retrouvons à Carbonia, la capitale italienne du charbon, une ville nouvelle née durant le régime fasciste afin d’assurer, à travers l’extraction de ce précieux minéral, l’indépendance énergétique du Pays durant le guerre. 5.4.8 Un réseau arabe Un réseau arabe, enfin, est celui caché sous Palerme. Dans la ville du XVII siècle les aristocrates attendaient vivement les vents chauds de l’été pour pouvoir se réfugier dans les soussol, à l’intérieur de cavités d’origine naturelle, modifiées fortement par la main de l’homme afin de former un efficace système de réfrigération. Les chambre du scirocco, une importante œuvre d’ingénierie creusées dans les rochers qui constituent la plaine de la ville et qui fonctionne comme un isolant thermique, exploitent le qanat, un système importé probablement par les dominations arabes : il est constitué par un sophistiquée réseau hydrologique de pièces et canaux qui, née pour garantir de l’eau fraîche aux habitations et aux nombreux jardins de la ville, était utilisé aussi, durant les journées chaudes, pour rafraîchir l’air des chambres, grâce au mouvement continu de l’eau d’une source naturelle, captée et opportunément canalisée. 118 5.5 La géologie napolitaine et la pierre de tuf 5.5.1 La morphologie volcanique : une ossature et un manteau Il est temps, alors, de parler de la ville souterraine qui gît aux sous-sols de Naples : elle se présente comme une réalité unique en son genre, profondément déterminée par la géologie locale, produit d’une activité volcanique récente. Née entre les aspérités du Vésuve et des Champs Phlégréens, selon Maria Virginia CARDI la ville s’identifie fortement avec son ventre, à partir duquel elle semble avoir été produite, presque accouchée 199 . La compréhension de la Naples Souterraine passe forcement, il est évident, par une étude de la géologie du territoire environnant. Nous pouvons affirmer, en accord avec les auteurs de l’ouvrage « Naples, la ville redécouverte », que la morphologie napolitaine est généralement formée par une ossature de pierre de tuf jaune, couverte par un manteau de pouzzolanes 200 : ce dernier se divise, en outre, en une partie superficielle, produite par des causes exogènes comme par exemple le transport des cendres par la pluie et le vent, et en une partie plus profonde, qui a été déposée par l’éruption ellemême et qui se trouve, par conséquent, dans la même position occupée à son origine. Le passage entre les deux strates, celui du tuf et celui de la pouzzolanes, se fait le plus souvent graduellement, par le biais d’une formation conglomératique qui est appelée mappemont. Ces simplifications, utiles pour des fins d’études, ne reflètent pas fidèlement la complexité géologique du territoire de la ville, surtout à cause du fait que les centres d’éruption, au fil de l’histoire, ont été multiples ; par conséquent, les différences, même si le plus souvent minimes, qui existent entre les produits volcaniques de chaque éruption, permettent aux spécialistes de repérer les cratères qui le ont générés. 199 CARDI Maria Virginia, 2008. Città sotterranee. Roma, Napoli, Parigi e altri luoghi : abitare profondità e superficie. Unicopli, Milan 200 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, 2000. Napoli la città riscoperta. Viaggio nel sottosuolo di Napoli. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples 119 5.5.2 L’abondance du tuf et la localisation de la ville En ce qui concerne le premier strate, celui du tuf jaune napolitain, il faut souligner qu’il s’agit d’une pierre qui a jouée un rôle déterminant dans l’histoire de Naples, au point que le positionnement de la ville peut avoir été déterminé, outre que par la configuration géographique des lieux, par l’abondance des affleurements rocheux 201 . Cette hypothèse semble être confirmée par le fait que les premières installations humaines de la baie ont eu lieu sur l’île de Megaris et sur le Monte Echia, où justement le tuf est bien exposé sur les falaises, et résulte donc facile à extraire. Les bâtiments de la ville historique reposent, le plus souvent, directement sur ce banc tufacé, avec une continuité géologique absolument typique. En outre, si nous considérons l’histoire urbaine de Naples avant l’avènement du béton armé, qui constitue aujourd’hui le matériau de référence le plus utilisé pour la réalisation des immeubles et des différentes infrastructures, la pierre de tuf a représentée, depuis les origine de la ville jusqu’à la seconde guerre mondiale au moins, la ressource, disponible localement, qui a été préférée pour bâtir la ville ; une ville réalisée de ce fait grâce aux mêmes matériaux qui constituent son sous-sol ; ceci nous démontre, en outre, la grande quantité de pierre extraite de son territoire pendant plus de 3.000 ans, autant pour la construction immédiate que pour l’exportation. 5.5.3 Les caractéristiques du tuf jaune napolitain Cette pierre, un des plus jeunes matériaux de construction du point de vue géologique 202 présente une composition dérivée d’un ensemble de cendres et fragments de pierres, produits par des éruptions de type explosif ; sa granulométrie se présente donc assez compacte, malgré qu’elle soit formée par un mélange hétérogène. Son utilisation extrêmement diffusée est due, surtout, à ses caractéristiques propres, reconnues comme adaptées à la réalisation des constructions. Nous pouvons synthétiser les caractéristiques suivantes : - bonne résistance mécanique. Le tuf, malgré le fait qu’elle soit une roche facile à rayer, parfois même simplement à l’aide d’un ongle, présente une bonne résistance à l’écrasement ; en 201 202 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, op. cit. ibid. 120 outre, en raison de sa faible densité, due aux vides intergranulaires, elle est considérée comme une pierre légère. - facilité à être ouvragée. Il se prête à être réduit en des blocs réguliers, une caractéristique très appréciée par les anciens mais qu’aujourd’hui résulte moins fondamentale, à cause surtout des processus d’extraction mécanisés. - résistance à l’attaque des agents atmosphériques. Cette propriété, qui varie selon les différentes carrières utilisées, n’est pas très présente dans le tuf qui résulte, en général, doté d’une basse résistance à l’érosion, surtout de la part de la mer et des vents. En raison de sa composition chimique, tout de même, le pierre n’est pas intéressée par l’oxydation et l’hydratation. - capacité de s’allier aux mortiers. Ceci est due à la porosité même de la pierre, qui permet aux liants utilisés de rentrer à l’intérieur des blocs et d’augmenter ainsi la surface d’action. 5.5.4 Différentes méthodes d’extraction Nous connaissons, aujourd’hui, deux méthodes principales pour extraire la pierre de tuf : en souterrain et à découvert. Cette distinction ne doit pas laisser croire que les deux processus étaient séparés, car, le plus souvent, l’ouverture d’une carrière à découvert était suivie d’une extraction en souterrain ; ceci pour deux motivations principales : d’un coté, par de la nécessité de préserver une quantité de sol agricole ou en raison de la présence de bâtiments sur le niveau supérieur de la carrière, qui rendaient impossible l’avancement de l’excavation ; de l’autre, en raison de l’épaisseur, parfois considérable, des matériaux, comme le terrain, qui couvraient la pierre recherchée, et qui rendait nécessaire des importants et couteaux travaux de déblai. En ce qui concerne les extraction en souterrain, elles étaient de deux familles distinguées : la première caractérisée par la présence d’un accès direct depuis un front de tuf, souvent en contiguïté d’une carrière à découvert déjà exploitée ; la deuxième fournie de puis d’accès verticaux, ouverts depuis le plan de campagne, et pratiqués lorsque le tuf n’affleurait pas en surface mais se trouvait à des profondeurs considérables. Un dernier exemple d’excavation des carrières, souvent en ultérieure utilisation des celles initiées selon les deux processus décrits, est représenté par la fosse : celle-ci, obtenue à travers le creusage du sol de manutention de la carrière elle-même, servait, après sa complète exploitation, 121 pour la décharge des matériaux de résulte, comme par exemple le terrain, dont l’élimination se démontrait difficile à pratiquer autrement. 5.6 Les grottes de Naples dans l’histoire 5.6.1 Une symbiose perpétrée Parler du sous-sol de Naples signifie, tout d’abord, parler d’une histoire qui démarre avec celle de la ville elle-même, et qui se traduit par un état de forte symbiose qui demeure unique en son genre ; les auteurs de « Naples, la ville redécouverte » parlent, à cet égard, d’un résultat de 28 siècles ininterrompus d’activités 203 . Il n’est pas étonnant, alors, d’apprendre que les premiers témoignages de vie en ville sont documentés à l’intérieur d’une grotte creusée dans le tuf, dans la colline aujourd’hui centrale de Materdei : ils concernent des tombeaux « à four » de la période néolithique, voici presque 7.000 ans 204 . En parcourant l’histoire urbaine de Naples, on peut facilement remarquer dans quelle mesure l’activité constructive a été la partie visible de celle, beaucoup plus articulée, d’excavation ; nous pouvons même souligner, en accord avec Giovanni LICCARDO, le parallèle existant entre le développement de la ville et le nombre et la quantité des carrières ouvertes en des zones limitrophes à sa structure urbaine 205 . 5.6.2 Les nécessités de l’histoire A l’époque de la fondation grecque remontent les premières carrières de taille considérable, ouverte soit sur terre qu’au niveau de la mer, et transformées parfois en des réservoirs pour la récupération de l’eau de pluie ; les cavités marines, notamment, utiles afin de faciliter le transport de la pierre, on été réutilisée par les romains comme autant des viviers, pour l’élevage des 203 204 205 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, op. cit. LICCARDO Giovanni, op. cit. ibid. 122 murènes et d’autres poissons de qualité 206 . Parmi les carrières grecques nous pouvons en outre considérer celles de Poggioreale, redécouvertes en 1982 et qui conservent encore leur graffitis, ainsi que les deux galléries routières de Seiano et de Cocceio, creusées sous la colline du Pausilippe afin de relier Naples et ses luxueuses villas avec le territoire des Champs Phlégréens. A l’époque romaine remontent les réseaux de cavités ouverts pour la réalisation de l’aqueduc et des égouts urbaines, ainsi que celle creusées pour l’extraction des pierres nécessaires à l’édification des fortifications de la ville ; ces carrières, qui se situaient au nord du site occupé par la ville et qui étaient facilement accessibles par la porte San Gennaro, connue à l’époque comme la porte du Tuf , ont été transformées en autant de catacombes chrétiennes, et ainsi utilisées comme lieu de culte durant les persécutions religieuses. Durant les époques successives, suite à l’importante croissance démographique qui a intéressé la ville, l’ouverture des carrières s’intensifie, en raison surtout de la nécessité d’obtenir de la pierre pour la construction. Le phénomène devenant périlleux, les rois de Naples promulguent des lois spécifiques aptes à limiter, et interdire parfois, l’opération d’excavation dans certaines zones urbaines, jugées comme particulièrement périlleuse pour la stabilité de la ville. Continuées malgré les nombreuses interdissions pendant toute la domination française, les activités d’excavations poursuivent même durant le royaume des Bourbones : les travaux pour l’ouverture du tunnel homonyme, commencé en 1853 par ordre des rois eux-mêmes afin d’obtenir une liaison souterraine entre le palais royale et la gendarmerie, située de l’autre coté du Monte Echia, ont comportés beaucoup de difficultés techniques, en raison surtout du croisement avec des anciennes cavités ; la finalisation du tracé a été abandonnée par l’arrivé de Garibaldi, qui rendait inutile cette infrastructure. Après l’unification d’Italie, et notamment suite à l’épidémie de choléra qui a intéressée, nous en avons parlé, les quartiers bas de Naples, la nécessité de construire des nouvelles zones résidentielles intensifie l’activité d’excavation, notamment aux pieds des collines situées au nord de la ville. 206 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, op. cit. 123 5.6.3 Un déséquilibre dangereux Durant l’époque contemporaine, suite à la seconde guerre mondiale qui réhabilite les cavités en les transformant en des refuges anti-aériens, certains d’entre eux encore visitables aujourd’hui, l’exploitation incontrôlée des grottes souterraines, qui se transforme plutôt en une attitude de destruction et de vandalisme, a porté à la naissance d’un déséquilibre entre les deux ville superposées. Ceci à cause de la perte d’observance d’une ancienne pratique, qui régissait à leur excavation : lorsque, en fait, les immeubles étaient réalisés grâce à des pierres obtenues à travers une excavation directe du site occupé par la construction elle-même, parfois en grandissant des anciennes citernes les masses architecturales pleines reprenaient celles vides des cavités 207 . 5.7 Différentes origines pour les grottes de Naples 5.7.1 Les deux catégories principales de cavité En voulant effectuer une simplification extrême au sein des différentes typologies de cavités napolitaines, nous pouvons les grouper en deux catégories principales : celle des grandes carrières suburbaines, ouvertes pour obtenir des matériaux de construction, et celle des infrastructures hydrauliques urbaines, construites afin de refournir la ville en eau potable. 5.7.2 Les carrières suburbaines En ce qui concerne la première catégorie, elle comporte une impressionnante quantité de vide qui se trouvent, nous l’avons vue, repartis de manière inégale sous les différents quartiers de la ville : les superficies varient entre les 1.030 mètres carrés du quartier Pendino aux 208.165 du Stella, en passant par les 50.000 approximatifs des Avvocata, Chiaia, Marianelle-Piscinola, Posillipo, San Ferdinando. Leur configuration varie selon les époques d’excavation : jusqu’au XIX siècle, en fait, la forme préférée était celle trapézoïdale, alors que les époques successives ont adopté une section 207 LICCARDO Giovanni, op. cit. 124 elliptique, en ignorant le fait qu’elle était moins résistante des précédentes aux processus d’écroulement qui intéressent la voûte. 5.7.3 Les infrastructures hydrauliques urbaines Pour ce qui est de la deuxième catégorie, celle des ouvrages hydrauliques, nous pouvons distinguer trois différents aqueducs : le Augusteo ou Claudio, le Bolla et le Carmignano, tous précédents la réalisation, en 1885, de celui en tubes modernes, encore en fonction aujourd’hui. Le premier d’entre eux était un réseau impériale très sophistiqué, car il emmenait l’eau en ville à l’intérieur de tubes sous-pression depuis des distance considérables : il comptait, en fait, 79 kilomètres jusqu’à Naples, ainsi que 91 jusqu’à la ville de Baia, au cœur de Champs Phlégréens, où se trouvait la splendide Piscine Mirabilis. Quant au deuxième, le Bolla, il est considérée comme le vrai aqueduc de la ville, en raison du fait qu’il était réalisé comme un vrai réseau de canaux où l’eau glissait librement et qui, en souterrain ou en découvert selon les cas, rejoignait, à travers plusieurs diramations, tous les bâtiments de la ville ; le fournissement de chaque immeuble se faisait, ensuite, par le biais de puits de captation, situés au milieu des cours intérieures ou des maisons elles-mêmes. Le réseau était admirablement articulé, avec des pentes idéales au glissement de l’eau, des réservoirs sous chaque immeuble fournis de trottoir pour les inspections, des déversoirs latéraux pour éliminer les impuretés, ainsi que des parois revêtues d’un spéciale induit imperméable, qui encore résiste aujourd’hui. Il faut d’ailleurs souligner, en accord à ce que nous avons décrit précédemment, que probablement les matériaux extraits durant les travaux de réalisation de ce système ont été utilisés pour l’édification des immeubles eux-mêmes, selon cette attention aux ressources locales qui a toujours caractérisée l’histoire de la ville de Naples. Ce réseau présentait, malgré son indiscutable efficacité, certaines graves faiblesses : tout d’abord celle due à son altimétrie, qui était inférieure à celle des égouts de la ville et qui, au sein surtout des quartiers bas, à été considérée comme la cause principale qui a provoqué l’essor et la diffusion de nombreuses épidémies de choléra ; en outre, celle due à sa configuration, car le 125 système même des puits domestiques rendait l’aqueduc vulnérable à la pollution, qui pouvait être causée facilement par les habitants de tous les immeubles. Le troisième aqueduc, enfin, nécessaire pour une ville de plus en plus peuplée, a été réalisé vers 1500 par Cesare CARMIGNANO. Ce dernier, par ses propres dépenses personnelles, à ainsi financé une œuvre fondamentale pour le développement de Naples tout en s’assurant, en contrepartie, le droit de se servir gratuitement de l’eau comme force motrice, la seule d’ailleurs utilisable après les muscles, pour alimenter les moulins de son activité. 5.7.4 Une continuité physique brisée Ce réseau de cavité, entièrement parcourable, d’une part à l’autre de la ville, jusqu’au début des années quarante du siècle dernier, se présente aujourd’hui difficile à saisir dans sa continuité structurelle 208 . Ceci est causé surtout par les nombreuses occlusions abusives qui l’ont intéressé, dues notamment au stockage de déchets depuis le puits de fournissement ainsi qu’aux fréquentes interruptions de tracé générées par la réalisation d’immeubles d’habitation et de nombreux tunnels ferroviaires et autoroutiers. Il suffit de rappeler que, des outre 400 refuges anti-aériens repérés durant la seconde guerre mondiale, plus de 300 résultent aujourd’hui disparus ; des traces en sot néanmoins restées conservées dans les noms des rues, qui encore rappellent d’antécédentes cavités oubliées ou de canyons d’anciens cours d’eau aujourd’hui ensevelis. 5.8 Les grottes de Naples entre réalité et légende 5.8.1 Des liens ancestraux Nous devons nous attarder, même si brièvement, sur une ultérieure lecture de la Naples souterraine, celle qui se présente tissée, depuis ses origines ancestrales, autour de nombreux mythes, rites, symboles et alchimies. Sa longue histoire, en fait, a toujours été accompagnée par une évolution parallèle et continue des croyances de son peuple. 208 POZZI Paola, DI PACE Mario (sous la direction de), 1988. Laboratorio internazionale Napoli sotterranea. Cuen, Naples 126 Cette réalité persiste encore aujourd’hui, liée indissolublement aux profondes blessures qui s’entrevoient dans le corps millénaire de la ville, souvent utilisées comme garages, parkings, dépôts, salles cinématographiques, discothèques, réseaux hydriques et centrales électriques 209 . 5.8.2 Des mythes, des croyances et des divinités Les mythes, donc, se présentent structurés, tout d’abord, autour des cavités elles-mêmes : ces fentes, selon la légende, ont hébergées avant tout le tombeau de la sirène vierge Parthénope qui, selon le récit connu, est morte sur les flancs d’un volcan éteint ; il s’agit probablement de l’ancien cratère formé par le Monte Echia et l’île de Megaris, où a eu lieu l’originaire fondation de la ville. Un autre récit nous parle des premiers habitants de la baie, les Cimmeri, une ancienne population provenant de la Mer Noire, qui vivait dans des habitations creusées en souterrain ; un récit qui est, bien évidemment, en accord avec les déjà citées retrouvailles archéologiques de la colline de Materdei. Les croyances sont souvent liées, quant à elles, au culte des morts. Un culte qui est témoigné par Parthénope elle-même qui, selon les populations grecques, avait le rôle de conduire les âmes au royaume de l’au-delà ; ceci tisse indissolublement un lien entre les morts et les cavités de la ville. Ces dernières deviennent, des siècles durant et selon un mixte de christianisme et de paganisme, des refuges pour les Ames du Purgatoire, vénérées dans le quartier aujourd’hui central de la Sanità, un ancien torrent d’eau connu autrefois comme la vallée des morts 210 . Toujours à l’intérieur d’une grotte le poète Virgile rencontre la Sibille de Cumes, dont a parlé Dante après des siècle et de laquelle a peint Michel-ange dans la voûte de la Chapelle Sixtine 211 . Nombreuses divinités étrangère se rencontrent, en outre, dans les cavités de Naples : rappelons simplement Mithra, la déesse indo-persienne qui témoigne des rapports entre le monde gréco-romains et la pensée philosophique de l’Orient ; et Iside, la reine égyptienne, vénérée depuis le IV siècle avant J.-C. et arrivée en Campanie à travers la Méditerranée. Ces divinités 209 210 211 PIEDIMONTE Antonio Emanuele, 2008. Napoli sotterranea. Percorsi tra i misteri della città parallela. Intra Moenia, Naples PIEDIMONTE Antonio Emanuele, op. cit. ibid. 127 deviennent autant de cultes ésotériques, liés aux sous-sols quant aux rites initiatiques et aux positionnement des temples 212 . 5.8.3 Une légende métropolitaine : le monaciello Outre, bien évidemment, les mythes d’origine religieuse, la ville de Naples en raconte d’autres, absolument locaux, qui proviennent du fonctionnement même de sa structure souterraine complexe, jugée parfois comme mystérieuse par ses habitants. Nous avons déjà parlé du réseau de veines et réservoirs qui constitue les anciens aqueducs du Bolla et du Carmignano. Or, la manutention constante de ces importantes infrastructures était confiée à un personnel municipal expert, les pozzari, les puisatiers, dont l’activité consistait notamment en assurer, par le biais de bouchons spéciaux, le maintient du niveau de l’eau dans les citernes des différentes immeubles. La présence de ce personnel à l’intérieur des réseaux hydrauliques souterrains était confondue, par la plupart du peuple de Naples, avec celle des petits esprits, les « monacielli », bons ou mauvais selon les cas, qui fréquentaient les sous-sols de la ville et qui, selon les témoins, avaient des ressemblances humaines et se présentaient souvent pleins de boue. Cette croyance se justifie notamment par la récurrente, mystérieuse, apparition de personnes dans les profondeurs des aqueducs, par les caprices de leurs comportements, dépendants notamment du payement de la taxe requise, et surtout de leur devise spécifique, apte à les protéger de l’humidité, qui était fournie d’une capuche comme les moines 213 . 5.9 Les grottes de Naples dans les chroniques quotidiennes 5.9.1 Guerre et camorra On dit, à Naples, que les hommes ont creusé, en même temps, leur maison et leur grotte : les spécialistes estiment, en fait, que le 60% de la population actuelle de la ville vit et opère sur 212 213 PIEDIMONTE Antonio Emanuele, op. cit. ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, op. cit. 128 une cavité 214 . A partir de la mère reconstruction historique, les récits des grottes napolitaines peuvent facilement et utilement dévier vers une narration des faits quotidiens qui, encore une fois, voient la ville-gruyère habitée de manière continue au fil des années. La guerre par exemple, et cela bien avant le deuxième conflit mondial, a parfois reconnu, dans ces labyrinthes souterrain, un lieu idéal pour certains combats névralgiques : la première utilisation connue à cet égard est celle qui remonte à l’année 537, quand les armées byzantines ont gagné sur la ville grâce à la possibilité de rentrer à son intérieur, même munies de chevaux, à travers les galeries des anciens aqueducs. Ces mêmes lieux faisaient de Naples, pendant la dernière guerre mondiale, la ville italienne avec le plus important nombre d’abris anti-aériens, comme il nous le relate Curzio MALAPARTE 215 dans son livre témoignage de la période de la libération. La camorra, aussi, a historiquement utilisées ces lieux et le fait admirablement encore aujourd’hui : l’organisation criminelle les voit comme un refuges secret pour les recherchés, un stockage pour les armes et pour la drogue, ainsi que comme une voies de fuite en cas de nécessité 216 . 5.9.2 Désastres contemporains et déversoirs provisoires Une longue succession de comportements irrespectueux envers la ville, en oubliant les rapports millénaires avec ses cavités, nous conduit directement aux désastreux écroulements qui ont commencés à caractériser les chroniques de Naples à partir de la seconde guerre mondiale. A cette date, vis-à-vis surtout d’une situation de destruction diffusée qui intéressait les quartiers les plus anciens de la ville, est commencée une intense activité de spéculation immobilière qui à procédé à la minéralisation progressive des collines contiguës ; cette spéculation a créée les 214 215 216 LICCARDO Giovanni, op. cit. MALAPARTE Curzio, 1978. La pelle. Mondadori, Milan PIEDIMONTE Antonio Emanuele, op. cit. 129 prémisses de ce qui fait qu’aujourd’hui chaque orage peut se transformer en une véritable tragédie 217 . A partir des années soixante du siècle dernier, les rues de la ville ont commencé, en fait, à s’ouvrir et à s’écrouler toujours plus fréquemment, en avalant à jamais des trottoirs, des voitures, des personnes et parfois des immeuble entiers ; durant l’année 1967 il y a eu plus de 40 phénomènes de ce genre en seulement douze mois et, durant la période qui va du 1966 au 1969, le chiffre important de 3.911 phénomènes a été la cause de 9 morts et de 37 blessés 218 . Une ultérieure attitude néfaste envers les grottes napolitaines, qui nous prime maintenant de commenter, concerne leur utilisation, historique mais aussi contemporaine, en tant que déversoirs. La Naples souterraine, encore une fois, reflète fidèlement et opiniâtrement la ville de surface, même lors de sa récente émergence déchets : les cavités sont dernièrement devenues des décharges autorisées, avec l’objectif de pouvoir remédier aux manque d’infrastructures plus appropriées, dans l’attente d’une solution définitive au problème. 217 218 PIEDIMONTE Antonio Emanuele, op. cit. ibid. 130 Chapitre 6. Naples 2060 : l’entrelacement des données 6.0 Introduction / Introduction Projet réalisé en trois phases distinguées, « Naples 2060 » vise à considérer de manière nouvelle les différents héritages naturels et historiques de la ville ainsi que son potentiel social poreux, afin de les conjuguer de manière opportune. En considérant le METRO DELL’ARTE et son rôle stratégique pour le futur de la ville, l’application de technologies vertes issues du territoire à ses nouvelles lignes peut les transformer en un véritable manifeste pour un développement local vertueux. Or, pour faire en sorte que cette durabilité ait aussi une dimension sociale, le projet doit parallèlement contempler des lieux de participation et d’implication de la communauté, à savoir des « Centres d’Architecture » qui, intégrés dans le réseau métropolitain lui-même, servent à manifester le projet à ses usagers et à rendre possible la déclination de ses principes vers des applications domestiques. Les grottes qui ponctuent les profondeurs de la ville de Naples deviennent névralgiques pour la mise en œuvre du projet, tout en réactualisant leur rôle historique : les grandes carrières suburbaines, supports ancestraux à l’édification de la ville et des son image visible, se transforment en ces « Centres d’Architecture », berceaux indispensables pour l’acquisition de savoirs environnementaux et des principes énergétiques, aptes à garantir le transfert de ceux-ci vers les milieux domestiques ; les cavités du réseau hydraulique ancien, sources énergétiques primordiales pour les habitants, deviennent des réservoirs et des échangeurs géothermiques pour un habitat durable. La Naples durable est alors la ville qui recrée, de manière efficace, un nouveau dynamisme entre son passé, son présent et son futur. Project in three distinguished phases, "Naples 2060" aims to consider anew the natural and historical heritages of the city and its potential social porosity to combine in a timely manner. Considering the METRO DELL'ARTE and its strategic role for the future of the city, the application of green technologies from the territory to its new lines can turn into a manifesto for local virtuous development. However, to ensure that sustainability has also a social dimension, the project must contemplate the areas of participation and involvement of the community, namely "Centres of Architecture", which incorporated into the metropolitan network itself, serve to show the project to 131 its passengers and to make possible the declination of its principles to domestic applications. The caves that dot the depths of the city of Naples become critical for the implementation of the project, while updating their historical role: large suburban quarries, the ancestral supports to building the city and its visible image, are transformed into "Centres of Architecture”, cradles required for the acquisition of environmental knowledge and principles of energy, able to guarantee the transfer thereof to the domestic environments; cavities of the old hydraulic system, primary energy sources for the people, become reservoirs and geothermal heat exchangers for sustainable housing. Naples is the sustainable city that recreates, effectively, a new dynamic between its past, present and future. 6.1 Un projet en trois phases 6.1.1 Réactualiser les données et les relations locales La présente étude sur la ville de Naples, articulée autour des différents aspects de sa réalité contemporaine ainsi que des nombreuses traces héritées de son passé historique et géologique, nous présente une ville dont l’essence première dérive, de notre point de vue, d’une longue et opiniâtre interaction : celle existante entre son contexte géographique spécifique, fortement instable, et l’action millénaire des hommes, en quête d’une demeure possible. Nous pouvons notamment reconnaître d’un coté une force première, celle volcanique, qui a procédé à structurer un territoire unique dans le panorama de la péninsule italienne et qui à toujours dicté le développement de la ville ; et de l’autre l’action des hommes qui, des millénaires durant, a été guidée par la nécessité d’habiter ce territoire aux apparences mouvementées et de pouvoir y repérer les ressources nécessaires aux justes propriétés. Une interaction qui, pour cela, a conformé un ensemble urbain doté d’un double visage, un positif et un négatif, indissolublement liés. Le projet « Naples 2060 » prend pied de ces prémisses et procède à la réactualisation des données de base : la force première, celle des volcans, devient à l’occurrence une ressource énergétique endogène, précieuse dans un contexte de développement local autant que dans celle d’un équilibre global ; les traces ancestrales de cette interaction ininterrompue entre l’homme et le 132 contexte de grande échelle deviennent les lieux fondamentaux pour l’activation d’une nécessaire conscience individuelle durable, indispensablement structurée autour des questions de la valeur énergétique de comportements domestiques et de son incidence sur l’organisme urbain en général. 6.1.2 Retisser les possibilités latentes A l’occasion du bicentenaire de l’unification de l’Italie, date à laquelle remonte la perte de l’ancien rôle de capitale de la part de la ville de Naples, le projet vise à retisser entre elles les possibilités latentes que nous offre la ville elle-même, afin de mettre en oeuvre un projet qui demeure déterminé par les potentialités spécifiquement locales : - les volcans des Champs Phlégréens, par le biais de l’exploitation de leur potentiel géothermique, deviennent ainsi les moteurs d’une vraie révolution énergétique, en re-confirmant, de la sorte, leur capacité à être la base pour le soutènement de la ville. - le Métro dell’Arte, ensuite, compte tenu du rôle de manifeste que les usagers lui reconnaissent, utilise sa capacité à tisser ensemble les hétérogénéités de la ville pour dessiner un ultérieur file invisible, celui de la virtuosité énergétique, qui touche aux différentes parties du territoire urbain, y compris les grottes souterraines. - les cavités de la ville, enfin, demeurent les lieux de l’interaction entre les hommes et le territoire de grande échelle, notamment en ce qui concerne la lecture et la compréhension du potentiel énergétique locale et la traduction en des utilisations domestiques. 6.1.3 Un indispensable phasage temporel et programmatique Le projet « Naples 2060 » est un projet qui nécessite, bien évidemment, d’un phasage temporel et programmatique indispensable, compte tenu de la stratification géographique, urbaine et sociale propre à la ville ; un phasage qui est notamment nécessaire, comme nous allons l’expliquer par la suite, d’un double point de vue : celui technologique, afin de pouvoir assurer un transfert efficace des technologies utilisées à l’échelle urbaine vers celles adaptées à des utilisations domestiques ; celui sociale, afin de garantir la compréhension des implications globales 133 des consommations énergétiques individuelles, et pouvoir prendre conscience, en outre, de l’importance globale d’une utilisation diffusée des ressources locales du territoire. 6.1.4 La porosité sociale Nous avons déjà évoqué la porosité propre à la ville de Naples ; il faut néanmoins souligner que cette même porosité peut faire référence aussi bien à la communauté de la ville : « Voir un groupe de napolitains rentrer dans un bar, se distribuer entre les tables, même celles déjà occupées, observer l’entrelacement et le mélange des conversations est une véritable leçon de porosité, il n’y a rien d’agressif, comme la tactique allemande pour s’assurer une place, mais le tout est justement cordial et ouvert, une fluidité diffusée et collective » 219 . Il est, à l’occurrence, sur cette porosité sociale qui se base notre proposition de transmission des savoirs environnementaux dans la ville, selon une attitude toute napolitaine, fameuse et habituelle, de communiquer les nouvelles en criant dans les rues et à l’intérieur des cours d’immeuble, des véritables espaces de socialité urbaines, dotés eux aussi d’une remarquable porosité. Walter BENJAMIN la décrit de la sorte : « Poreuse comme cette roche est l’architecture. Faire et construire se mélangent entre eux en des cours, des arcs, des escaliers. Partout est gardé un espace qui peut devenir théâtre de nouvelles et imprévisibles constellations. Le définitif, le codifié est évité » 220 . 6.1.5 Un nouveau regard envers les grottes Plus spécifiquement, l’attitude envers ces grottes s’inscrit dans la nécessité d’en faire des lieux qui répondent aux nouveaux besoins de la ville et de sa société, en les adaptant aux nouvelles directions prises par le développement urbain ; ceci en évitant, bien évidemment, un excès de protection, qui risque de les transformer en des lieux fondamentalement non utilisés. 219 BLOCH Ernst, 1926. Italien und die Porositat. Die Weltbuhne in DONAGGIO Enrico (sous la direction de), 2000. Napoli. L’ancora del Mediterraneo, Naples 220 BENJAMIN Walter, LACIS Asja, 1925. Neapel. Frankfurter Zeitung In DONAGGIO Enrico (sous la direction de), 2000. Napoli. L’ancora del Mediterraneo, Naples 134 Comme nous le dit Richard Rogers en citant l’historien Roy PORTER, « lorsque les bâtiments l’emportent sur les gens, on a le patrimoine, pas l’Histoire » 221 . Cet attitude semble confirmer, en le réactualisant, le rôle que ces grottes ont eu historiquement pour le développement de Naples, à savoir celui d’extraction pour l’édification de sa partie visible ; aujourd’hui ils deviennent les lieux de l’extraction des savoirs énergétiques indispensables à la réalisation de la ville durable. En accord avec James WINES, en fait, nous savons que « l’architecture ne doit plus seulement être considéré comme un objet sculptural, mais devenir une réalisation capable d’absorber et de transmettre des messages » 222 . « Les Victoriens construisirent des bibliothèques pour s’attaquer à l’illettrisme, nous devons construire des centres d’architecture pour impliquer et informer les citoyens, les architectes, les urbanistes et les aménageurs sur la manière dont se conçoit la ville afin de répondre aux besoins des générations futures » 223 . Ces grottes sont conçues comme des espaces « d’esprit ouvert », plurifonctionnels, qui tiennent en considération l’accélération des changements de la forme physique de la ville et de ses nécessités ; des espaces qui doivent être structuré de manière flexible, afin de pouvoir s’adapter aux modifications d’environnement, de forme et d’utilisation. Elles deviennent, alors, autant de « centres d’architecture » à l’intérieur de la ville, à savoir des lieux de formation et d’information autour de la nouvelle orientation écologique nécessaire pour une ville comme Naples. 6.2 Phase 01 : de l’énergie urbaine 6.2.1 Profiter d’une occasion latente Or, comment faire pour exploiter l’énergie géothermique des volcans quand l’on se retrouve face à un tissu urbain autant dense que celui qui caractérise la ville de Naples ? 221 ROGERS Richard, GUMUCHDJIAN Philip, 1997. Cities for a small planet. Faber and Faber, London [Trad. franc. 2000] Des villes durables pour une petite planète . Le Moniteur, Paris 222 223 WINES James, 2000. L’architecture verte. Taschen, Koln ROGERS Richard, GUMUCHDJIAN Philip, op. cit. 135 L’occasion latente dont il est nécessaire de profiter est celle représentée par une partie des Champs Phlégréens, immédiatement contiguë aux quartiers occidentaux de la ville, qui était occupée auparavant par les usines sidérurgiques ILVA, aujourd’hui démantelées : un site intéressé, nous en avons parlé dans le premier chapitre, par des projets ambitieux qui voient la participation de Star de l’architecture internationale, mais qui ignorent pour autant le potentiel énergétique sous-jacent. Les deux zones contiguës de Bagnoli et de Agnano, en fait, se présentent extrêmement riches en des manifestations thermales qui nous dénoncent une intense activité volcanique. 6.2.2 L’aire industrielle de Bagnoli Quant à la plaine de Bagnoli, les activités industrielles du centre sidérurgique ont fait en sorte, malheureusement, que les activités liées à l’exploitation des sources chaudes aient perdu progressivement de l’importance, jusqu’à disparaître complètement aujourd’hui ; ceci rend actuellement très difficile le repérage des sources thermales, mais le manque d’urbanisation permet en même temps des analyses plus approfondies. Il est justement à cet endroit qu’ont eu lieu les expériences liées au workshop international « Campi-Flegrei-Deep-Drilling-Project » que nous avons cité dans le quatrième chapitre. 6.2.3 Le cratère de Agnano En ce qui concerne, ensuite, la zone de Agnano, elle conserve encore des activités liées à la géothermie, comme les bans thermaux, même si essentiellement sous-exploité 224 . Il s’agit d’un ancien cratère volcanique, qui remonte au quatrième cycle d’activité des Champs Phlégréens 225 , avec un périmètre de 6,5 kilomètres en une altimétrie, en son fond, de seulement 2 mètres sur le niveau de la mer. La zone compte, outre des boues naturelles sulfurées et radioactives, des nombreuses sources minérales : en une aire totale de 123 hectares, les 72 224 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, 2008. Napoli il sottosuolo, la storia. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples 225 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, ESPOSITO Vincenzo, 2000. Napoli la città riscoperta. Viaggio nel sottosuolo di Napoli. Associazione “Napoli sotterranea”, Naples 136 sources ont un débit totale de 7 millions de litres d’eau par jour 226 ; elles se divisent, par rapport à leur température, en 7 sources froides (19°-20°), 39 sub-thermales (21°-35°), 17 thermales (36°48°) et 12 iper-thermales (49°-68°). Connue et fréquentée depuis l’antiquité, la vallée s’est transformée, autour du XI siècle, en un lac qui a donc recouvert et caché les sources thermales existantes ; il était néanmoins exploité pour la macération des tissus, une activité témoignée encore aujourd’hui par une plaque en marbre située à la sortie de l’arrêt de métro de Piazza Leopardi qui décrit le taxe à payer pour exploiter les potentialités de la zone. En 1870 le lac d’Agnano a été bonifié par le biais d’un réseau de canalisations qui recueillent l’eau thermale pour la jeter dans la mer près de la plage de Bagnoli ; ce processus de sèchement a de nouveau rendu visibles les anciennes sources chaudes. Aujourd’hui le cratère de Agnano est en partie occupé par l’hippodrome et en partie utilisé comme terrain agricole. Sur les bords du cratère, peu loin des fameuses manifestations du Solfatare, s’ouvre, en direction de la plaine de Bagnoli, la Grotta del Cane, une cavité artificielle aux émissions d’eau et d’anhydride carbonique à hautes températures, qui varient entre les 50° et les 60° ; connue dès l’époque romaine, elle a été fréquentée intensément par les voyageurs du Grand Tour 227 . 6.2.4 Le rôle névralgique de la centrale géothermique L’ouverture d’une centrale géothermique au sein d’une telle zone, autant riche en potentiel énergétique et intensément stratifiée du point de vue historique, pourrait s’inscrire dans le même processus de requalification urbaine en cours actuellement, tout en le potentialisant : les projets en cours voient, en fait, toute l’aire affectée par des infrastructures urbaines, surtout tertiaires, d’une importance névralgique pour le futur de la ville de Naples. La présence de la centrale, alors, pourrait exercer un rôle didactique pour les habitants de la ville et les usagers de la zone ; en outre, grâce à son activité industrielle, considérée propre du 226 227 ALBERTINI Vicenzo, BALDI Antonio, op. cit. ibid. 137 point de vue de l’environnement, elle pourrait assurer la nécessaire mixité fonctionnelle et sociale, que nous savons être un des ingrédient indispensable pour la structuration de la ville durable contemporaine. 6.3 Phase 02 : les « Centres d’Architecture » 6.3.1 De parasites à catalyseurs autonomes Les « centres d’architecture », nous l’avons dit, sont contemplés par le projet « Naples 2060 » à l’intérieur des anciennes cavités de la ville, et plus précisément aux croisements entre celles-la et le parcours de la nouvelle ligne 1 du réseau métropolitain : le Métro dell’Arte. L’étude de leur positionnement représente donc un défi fondamental afin de réussir à leur assurer un rôle vraiment névralgique au sein du quartier qui les accueil, tout autant que de celui la ville entière. La logique qui réside derrière la structuration des centres, en fait, est celle de les concevoir, en un premier temps, comme des entités parasites du réseau métropolitain, afin de leur garantir une fréquentation continue permanente, dérivée des flux des usagers du système de transport luimême ; par la suite, la possibilité / nécessité de déclencher une progressive autonomisation, garantie par la nature actuelle des tissus de la ville dans lesquels ils naissent, pourrait les transformer en des infrastructures urbaines à part entière, en une sorte de catalyseurs des savoirs énergétiques. Les questions qui se posent immédiatement pour le choix des cavités initiales, aptes à déclencher un tel processus, tournent autour d’une double nécessité : tout d’abord celle d’une bonne accessibilité actuelle des lieux eux-mêmes, indispensables non seulement du point de vue des usagers des centres, pour les dynamiques que nous avons expliquées plus haut, mais aussi de celui de leur desserte, garantie par l’éventuelle présence des infrastructures urbaines qui peuvent en assurer le bon fonctionnement ; ensuite, celle de la nature dynamique des contexte urbains spécifiques, qui garantissent un flux continu de personnes et qui permettent et promettent la dite autonomisation. 138 Les deux cavités choisies pour déclencher ce processus sont celle du Monte Echia et celle du Vallone de San Rocco. Ceci pour nombreuses raisons principales, de nature géographique, urbaine et des mobilités métropolitaines, que nous allons traiter séparément. 6.3.2 Le Monte Echia En ce qui concerne le Monte Echia, dont nous avons abondamment parlé dans les chapitres précédents en différentes occasions, il se situe en une zone exceptionnelle pour la ville de Naples : à la limite entre la terre et la mer, il divise le littorale napolitain en deux baies distincte ; il se configure aujourd’hui, du point de vue spécifique des mobilité, comme le lieu de correspondance entre plusieurs ligne du réseau. Situé à l’endroit même intéressé par la fondation grecque de la ville, durant l’époque romaine Lucio Licio Lucullo avait ici sa luxueuse villa, dotée de vastes étendues de terrain qui comprenaient aussi la petite île de Megaris ; ici, notamment, se trouvaient des vrais jardins des délices, où étaient plantés pour la première fois en Europe les cerisiers de Perse 228 . Le quartier se présente actuellement avec une trame urbaine assez dense, entouré en outre par deux quartiers populaires typiquement napolitains : les Quartieri Spagnoli, nés comme campements militaires durant le vice-royaume espagnol, et le Pallonetto di Santa Lucia, juste aux pieds de la colline, qui restait une bourgade de pécheurs jusqu’à il y quelques décennies. Il constitue aujourd’hui un important centre politique, administratif, militaire et culturel pour la ville, en raison de la présence de la bibliothèque, du théâtre ainsi que des bureaux municipaux ; il se présente aussi comme un important pole touristique, avec des nombreux hôtels, les rues littorales, les deux ports touristiques ainsi que les différents musées et monuments 229 . Les cavités présentes à l’intérieur de la collines, ouvertes durant des poques très anciennes, ont différentes origine et nature : nous retrouvons, en fait, celles originairement creusées par les colonisateurs grecques et dont l’usage continu les a transformées ensuite en autant de thermes ou de lieux de culte, comme par exemple celui dédié à Mithra ; celles ouvertes successivement, 228 229 SCHIFANO Jean-Noël, 2004. Sous le soleil de Naples. Gallimard, Paris POZZI Paola, DI PACE Mario (sous la direction de), 1988. Laboratorio internazionale Napoli sotterranea. Cuen, Naples 139 durant l’époque angevine, pour y extraire les matériaux nécessaire à la construction des ouvres civiles et religieuses de la ville ; encore celle représentées par le réseau de canalisations de l’aqueduc de Carmignano et par le long et inachevé tunnel bourbonien. Ce dernier est actuellement utilisé par la Marie de Naples comme garage communale. Le quartier compte 32 cavités, avec une superficie totale de 41.250 mètres carrés et un rapport entre surface pleine et surface vide de 22 à 1 230 . 6.3.3 Le Vallone de San Rocco Le Vallone de San Rocco, quant à lui, se trouve dans la zone nord de la ville de Naples et se présente caractérisé par une profonde douve torrentielle, creusée dans le tuf par un cours d’eau qui descendait autrefois de la colline de Camaldoli. Il nous parait de grande intérêt car il se trouve en une zone particulière de la ville, entre les quartiers anciens et les périphéries proches ; son tissu urbain stratifié est ainsi caractérisé par la présence, à la fois, des anciens aqueducs romains ainsi que des modernes viaducs autoroutiers, des quartiers populaires dégradés ainsi que des lieux de culture renommés comme le Musée de Capodimonte, l’Observatoire Astronomique et les Universités. La vallée est en outre marquée par le passage aérien de la ligne 1 du métro, qui apparaît pour la première fois en découvert après un parcours souterrain sous toute la partie historique de la ville. Ceci nous semble intéressant car le métro, que nous avons imaginé dorénavant comme un système de transport vertueux grâce à l’utilisation de l’énergie électrique provenant de la centrale géothermique, devient soudain visible à tous les usagers de la zone lorsque il enjambe la douve. Situé en dehors de la ville pour des siècles durant et utilisé comme réservoir agricole et de matériaux de construction, le quartier du Vallone a subi un consistent processus d’urbanisation durant les dernières décennies ; il héberge aujourd’hui un des pôles hospitaliers les plus importants de Naples. L’ancien cour d’eau est aujourd’hui un égout à ciel ouvert, en raisons surtout 230 POZZI Paola, DI PACE Mario (sous la direction de), op. cit. 140 des évacuations des mêmes hôpitaux ainsi que du fait que ses bord sont utilisés comme autant de déversoirs abusifs par les habitants 231 . Malgré cette profonde incurie, le Vallone présente un fort potentiel au sein de la ville par le fait même d’être essentiellement libre d’édifications, ce qui constitue une rareté dans une ville dense comme Naples ; il est considéré, par les projets actuellement à l’oeuvre, conne une zone verte, à tisser avec les autres aires limitrophes au centre ancien pour la réalisation d’un grand parc urbain. La vallée, nous l’avons dit, a été creusée profondément par le passage des eaux pluviales, qui ont progressivement mis en évidence la roche de tuf ; cette roche a été extraite en des profondes carrières et est encore aujourd’hui utilisée selon les méthodes d’excavation en découvert. Le quartier compte actuellement 61 cavités pour une superficie totale de 99.764 mètres carrés et une proportion de 76 à 1 232 . Onze d’entre elles ont été relevées directement dans la douve. Elles sont plus nombreuses sur le coté nord, des périphéries, que sur celui sud, de la ville : ceci surtout à cause du fait que, en direction de la ville, les œuvres abusives des constructeurs immobiliers ont transformé la vallée en une décharge de matériaux divers, en provoquant la fermeture de nombreux accès aux cavités. Parmi ces carrières, seulement trois sont actuellement utilisées : la première comme dépôt de matériaux de construction, la deuxième comme fonderie et la troisième comme parking et comme centre de réparation des bus 233 . La carrière choisie pour exemplifier le projet du centre d’architecture se trouve à l’intérieur du Vallone de San Rocco et a été découverte fortuitement durant les travaux du métropolitain. Utilisée durant le seconde guerre mondiale comme refuge pour les troupes alliées, elle avait été oubliée en raisons du fait qu’elle présente ses quatre accès depuis la vallée presque entièrement clos par la végétation spontanée ainsi que par le détritus abusifs. Elle a une superficie de 10.560 mètres carrés, une largeur variable entre 5 et 20 mètres et une hauteur importante qui arrive à 32 mètres. 231 232 233 POZZI Paola, DI PACE Mario (sous la direction de), op. cit. ibid. PIEDIMONTE Antonio Emanuele, 2008. Napoli sotterranea. Percorsi tra i misteri della città parallela. Intra Moenia, Naples 141 6.3.4 Structuration d’un Centre d’Architecture Un « centre d’architecture » doit se structurer, selon notre point de vue, tel une sorte de rue hypogée de liaison entre la ville de surface et le parcours du métropolitain ; sont chemin doit s’articuler autour de différentes activités liées aux dynamiques environnementales, concernant à l’occurrence la géothermie des Champs Phlégréens, mais aussi indépendantes de celles-la, par exemples tissées selon un fil didactique adressé aux différents acteurs de la scène urbaine. Ceci tout d’abord pour le besoin de créer des nouveaux emplois, nécessaires aux nouvelles spécialisations requises par la révolution énergétique, ainsi que dans la perspective d’une autonomisation progressive des espaces, indépendants à terme du réseau métropolitain. Le centre doit s’alimenter énergétiquement de manière autonome : ce dernier aspect nous semble très important car il fait que ces lieux deviennent une sorte de message des différentes technologies disponibles pour une exploitation vertueuses des ressources locales. Le parcours doit s’enrichir, enfin, de nombreuses expositions sur le thème des énergies, des enjeux environnementaux globaux, de l’histoire de Naples et des processus spécifiques déclenchés en ville, notamment ceux qui concernent le métro lui-même ; elles doivent encore fournir des adresses utiles aux usagers, afin de réussir à réaliser l’important relais entre les technologies utilisées au niveau urbain et celles disponibles, dès aujourd’hui, pour une application purement domestique. 6.4 Phase 03 : de l’énergie domestique 6.4.1 Une déclination domestique de la virtuosité urbaine L’ouverture et la fréquentation active des « centres d’architecture », en une première phase par le biais des intersections actées par le réseau métropolitain et ensuite de manière progressivement autonome, ont l’objectif de permettre une connaissance approfondie des différentes problématiques liées à l’environnement, aux consommations énergétiques ainsi que des processus spécifiques que tout habitant peut et doit déclencher afin de pouvoir y remédier, en se servant pour cela des différents types de technologies aujourd’hui existantes. 142 Ces technologies, que nous avons introduit durant le chapitre consacré à la géothermie, doivent pouvoir s’adapter, bien évidemment, aux différentes situations urbaines d’une ville contemporaine, et notamment aux différents tissus qui configurent Naples : plus spécifiquement elles doivent s’appliquer soit aux tissus de type étalés caractéristiques des zones périphériques de la ville, qu’à ceux extrêmement denses de ses quartiers les plus anciens. Ce principe, bien évidemment, ne prévoit pas une transformation radicale des situations existante, mais au contraire une inversion importante du regarder porté vers ces contextes, de manière à en comprendre les potentialités latentes ; ces dernières, mise en synergie entre elles, peuvent déclencher la fondamentale révolution durable. 6.4.2 Situation 1 : les zones périphériques étalées En ce qui concerne la première situation, les pompes à chaleur devront être fournies de capteurs géothermiques de type horizontale ; ceux-la ont, en fait, simplement besoin d’une surface horizontale libre de toute construction, qui ne manque pas en des situations urbaines périphériques, afin de réussir à effectuer les échanges thermiques nécessaire à leur fonctionnement. Cette catégorie de capteurs peut être alors colloqué, par exemple, sous les différentes parts de terrain libre, comme les pelouses ou les espaces jeux pour les enfants, de pertinence des maisons particulières ou des immeubles isolés. Cette stratégie, en outre, utiliserait des espaces déjà existants, en y découvrant un ultérieur potentiel et en les transformant ainsi en des espaces plurifonctionnels. 6.4.3 Situation 2 : les quartiers centraux denses Pour ce qui est de la deuxième situation, celle qui concerne les tissus denses de la ville historique, les pompes à chaleur seront dotées, par contre, de capteurs de type vertical, comme ceux que nous avons cités à propos des projets actuellement à l’oeuvre en Suisse. Ces capteurs, néanmoins, ont besoin d’une certaine surface libre pour pouvoir être installés, au moins qu’il ne s’agisse pas de nouvelles constructions déjà prévues avec cette option énergétique. Les études menées dans ces pages sur la ville de Naples nous suggèrent la solution 143 à adopter : il s’agit d’exploiter, en cas de manque de surfaces libres autour des immeubles, les espaces qui sont présents sous ceux-la, et notamment les cavités souterraines domestiques de l’anciens réseau de l’aqueduc. Cette option, outre à rendre applicable en une ville comme Naples une stratégie énergétique autrement difficile à imaginer, permet une requalification de ces cavités selon un principe qui se veut cohérent à celui qui à accompagné leur naissance ; à savoir la nécessité de satisfaire les besoins d’eau, que quelque part nous pouvons considérer comme une ressource énergétique pour les habitants de la ville d’autrefois. 6.5 Naples durable 6.5.1 Une ville durable en cinq points Naples durable sera, à terme, une ville fortement différente de celle qui nous apparaît aujourd’hui : - une ville qui à habilement récupérée l’ancestrale rapport avec son territoire spécifique, qui de la sorte cesse d’être un simple support à l’étalement de la structure urbaine et réacquiert enfin un rôle stratégique, centrale, énergétique, capable d’indiquer les directions de développement à entreprendre. - une ville à l’intérieur de laquelle s’exprime une nouvelle conscience environnementale, née de la synergie entre les capacités propres du territoire et son fonctionnement, à l’image de celle qui animait son passé et qui déterminait l’utilisation attentive et respectueuse des ressources locales. - une ville où la nouvelle manière de regarder le territoire, ainsi que les nouvelles valeurs énergétiques qui lui sont reconnues, est en mesure de promouvoir un développement économique locale et efficace. - une ville dont les habitants, de toute catégorie sociale et de tout rôle, peuvent et doivent participer activement aux processus mêmes de la révolution énergétique, tout en prenant progressivement conscience des conséquences énergétiques de chaque comportements et du pois relatif des habitudes habitatives. 144 - une ville à l’intérieur de laquelle toute la communauté est impliquée dans la recherche de nouveaux états d’équilibres du système urbain, qui soient en mesure de déclencher une capacité de autogouvernement, grâce au recours à des stratégies spécifiquement locales et non pas exogènes ou importées de modèles étrangers. 6.5.2 Le Passé, le Présent et le Futur Naples durable, enfin, sera une ville dans laquelle le passé, le présent et le futur se conjugueront efficacement à l’intérieur d’un dynamisme nouveau, qui tendra à récupérer les lieux primitifs de sa structure tout en les tissant en un ensemble inédit, régi par des règles systémiques vertueuses ; dans cet ensemble chaque bâtiment, ainsi que les différentes infrastructures urbaines, sera re-conçu de manière efficaces quant à l’utilisation et au respect des ressources locales. 145 Références Ouvrages principaux ARTHUS - BERTRAND Yann, 2009. 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