The Servant : un ténébreux jeu de domination,Nous, rêveurs

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The Servant : un ténébreux jeu de domination,Nous, rêveurs
Voyage mélancolique avec Victor Hugo au
Lucernaire
Le 18 juillet 1843, Victor Hugo qui a 41 ans commence son traditionnel voyage d’été.
Ce voyage de près de deux mois le mène de Biarritz à Oléron, en passant par l’Espagne
et les Pyrénées.
Lieu : Lucernaire
Dates : jusqu’au 8 octobre
Mise en scène et adaptation : Sylvie Blotkinas
Avec : Julien Rochefort
Comme les passagers d’une croisière
Une voix retentit dans l’obscurité de la salle du Paradis, au Lucernaire. En juillet
1843, Victor Hugo entame son habituel voyage d’été à travers la province, en compagnie
de Juliette Drouet dont il taira le nom dans tout son récit. Chaque jour, il rédige
ses émotions sur un carnet de voyage, raconte son périple et décrit avec
émerveillement les villages par lesquels il passe. Hugo écrit aussi à sa fille
Léopoldine, tout juste mariée et dont on connaît le tragique destin.
« On loue Bordeaux comme on loue la rue de Rivoli : régularité,
symétrie, grandes façades blanches et toutes pareilles les unes aux
autres, etc. ; ce qui pour l’homme de sens veut dire architecture
insipide, ville ennuyeuse à voir. »
Hugo part pour Bordeaux, une ville dont il apprécie le charme paradoxal, qu’il décrit
comme un subtil mélange entre la cathédrale d’Anvers et le château de Versailles. Là
où certains voient en Bordeaux la rigueur et la symétrie, Hugo perçoit l’élégance et
l’authenticité. Bordeaux est pour Hugo une ville « curieuse, originale, peut-être
unique ». Hugo continue son périple, dans lequel il nous transporte à travers la voix
de Julien Rochefort, en passant par Bayonne son « souvenir d’enfance ». Puis Biarritz,
dont le charme indescriptible le transporte. Visionnaire, Hugo voit dans la beauté des
roches de Biarritz un avenir sclérosé par le tourisme (NDLR : il n’avait finalement
pas si tort). « Biarritz est un lieu admirable, je n’ai peur qu’il devienne à la
mode » précise-t-il. Puis viennent Saint-Sébastien, Pampelune, Cauterets.. et enfin,
Oléron. Comme les passagers d’une croisière, les spectateurs sont stupéfaits par la
grâce du texte et par la finesse de Julien Rochefort dans cette interprétation.
Mélancolie
Julien Rochefort est brillant. On est comme transporté par la lecture de ce journal
intime, et même sans décor et sans fard, les jeux de lumières plonge le spectateur au
plus profond de son imaginaire. On imagine les rues de Bordeaux, la splendeur de la
côte basque, l’émerveillement dû au voyage. C’est un texte profondément mélancolique,
une mélancolie que rappelle l’absence de décor, cette scène vide et noire sur laquelle
le comédien s’exerce à raconter le voyage. Car en écrivant ce texte inachevé, Hugo
connaîtra le tournant de sa carrière, la tragédie qui bouleversera le reste de sa vie.
Un matin, dans un journal local, il apprend le décès accidentel de sa chère fille
Léopoldine, noyée dans la Seine le 4 septembre 1843. C’est par cette nouvelle que se
termine, brutalement, ce voyage dans les Pyrénées.
« Voici ce que je contemple de ma fenêtre : une grande montagne remplit
la terre ; un grand nuage remplit le ciel. Entre le nuage et la
montagne, une bande mince du ciel crépusculaire, clair, vif, limpide, et
Jupiter étincelant, caillou d’or dans un ruisseau d’azur. Rien de plus
mélancolique et de plus rassurant et de plus beau que ce petit point de
lumière entre ces deux blocs de ténèbres.. »
Pyrénées ou le voyage de l’été 1843 est une pièce à voir absolument au Lucernaire,
poétique, mélancolique et extrêmement bien jouée. Elle plaira aux amateurs de Hugo
comme aux initiés.
Les Damnés : l’effroyablement belle mise en
scène d’Ivo van Hove
Les Damnés – d’après Visconti – mise en scène par Ivo van Hove
Au Festival d’Avignon du 6 au 16 juillet 2016 puis à la Comédie Française, salle
Richelieu du 24 septembre au 13 janvier 2017
Avec la Troupe de la Comédie Française : Sylvia Bergé, Éric Génovèse, Denis Podalydès,
Alexandre Pavloff, Guillaume Gallienne, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Adeline d’Hermy,
Clément Hervieu-Léger, Jennifer Decker, Didier Sandre, Christophe Montenez.
Après 23 ans d’absence, la Comédie Française fait son retour au Festival d’Avignon
avec Les Damnés, pièce mise en scène par le belge plusieurs fois primé cette
année, Ivo van Hove.
Un complot à la Macbeth
Inspiré du film de Luchino Visconti sorti sur les écrans en 1969, Les Damnés raconte
la descente aux enfers d’une famille d’industriels allemands. Le 27 février 1933,
alors qu’Hitler est chancelier depuis à peine un mois, le Reichstag prend feu. Les
nazis instrumentalisent l’incendie à des fins politiques. Dans le même temps, le Baron
Joachim (Didier Sandre), chef de la famille von Essenbeck, propriétaire de grandes
aciéries dans la Ruhr, est assassiné. Le jeune directeur des usines Herbert Thallmann
(Loïc Corbery), fervent opposant au régime nazi, est accusé à tort du meurtre de
Joachim et doit fuir en laissant sa femme Elisabeth (Adeline d’Hermy) et ses deux
filles. Friedrich Bruckmann (Guillaume Gallienne) et sa maîtresse Sophie von Essenbeck
(Elsa Lepoivre) à l’aide de son fils dégénéré Martin (Christophe Montenez), proches
des S.S, vont organiser un complot à la Macbeth pour s’emparer des usines. L’industrie
von Essenbeck devient rapidement une usine d’armement au service du régime nazi. S’en
suit une série de massacres et de crimes au sein d’une famille entièrement détruite
par le nazisme.
Bain de sang
Représenter l’horreur, personnifier la haine, montrer la mort. Ivo
van Hove a fait
fort dans cette mise en scène dérangeante des Damnés de Visconti. Dans l’enceinte de
la Cour d’honneur du Palais des Papes, les gradins tremblent à l’arrivée des premiers
personnages. Toute la pièce sera ainsi : dans une ambiance lugubre, terrorisante,
imposante. Un sol de revêtement orange figure « l’appareil bureaucratique de l’Etat »
précise Tal Yarden, responsable vidéo du spectacle.
Sur fond d’images documentaires,
les comédiens font revivre des épisodes clés de l’Allemagne de 1933-1934 : l’incendie
du Reichstag, les autodafés allemands ou la Nuit des longs couteaux symbolisée par un
épisode sanglant dans lequel Konstantin von Essenbeck (Denis Podalydès), membre de la
S.A, après une beuverie démente et obscène, termine dans un bain de sang. C’est un
spectacle effroyable mais criant de vérité.
La mort en direct
Dans cette mise en scène magistrale, Ivo van Hove fait vivre à son public la mort en
direct et sur écran géant. A chaque personnage qui meurt, la cérémonie, comme un
véritable rituel, se répète : les comédiens se rassemblent, raides, le regard vide.
L’un s’avance vers la mort, des cercueils disposés côté cour, le visage blafard. Sur
l’écran géant, le spectateur le suit jusqu’à l’agonie, pendant que la pièce reprend
sur scène. C’est un schéma répétitif, évoquant la mort à la chaîne, une mort anonyme
et violente. Du début à la fin tragique et puissante des Damnés, la tension est
palpable. L’ambiance musicale y joue aussi pour beaucoup : du quatuor de saxophones
installé auprès des cercueils, à l’utilisation du groupe de métal allemand Rammstein,
la musique fait partie intégrante du spectacle. Selon ses maîtres d’oeuvre, on
retrouve dans cette musique « la volonté de créer de nouveaux moyens de destruction
massive ».
Jusqu’à la scène finale d’une violence monstrueuse, c’est un silence complet dans la
cour du Palais des Papes. Puis c’est une standing ovation pour la troupe de la Comédie
Française (tous excellentissimes) et pour Ivo van Hove et son équipe. Plus que
dérangeante, les Damnés laisse à son public un goût amer, mais c’est l’effet escompté.
Attendons de voir comment cette mise en scène sera adaptée en salle Richelieu, à la
rentrée.
Cédric Chapuis nous transporte au-dessus de
la mêlée
Au-dessus de la mêlée, de et avec Cédric Chapuis, mise en scène de Mira Simova.
Festival d’Avignon off, du 8 au 30 juillet, les jours pairs au théâtre Pandora à 10h50
Après avoir conquis le public avec « Une vie sur mesure », premier seul en scène dans
lequel le talentueux Cédric Chapuis raconte la vie d’un jeune autiste amoureux de la
batterie (nominé pour le Molière du meilleur seul en scène 2016), le comédien revient
à Avignon avec une nouvelle création.
Sur scène, un parterre de fausse pelouse, un ballon ovale et un banc de vestiaire.
Bastien a neuf ans lorsqu’il commence le rugby dans la petite équipe du RC Brignac.
Frêle, timide et un peu bébé sur les bords, le yoga lui conviendrait certainement
mieux. A l’école, Bastien est un souffre-douleur, on lui vole ses affaires, les plus
grands le menacent. Mais à la maison, Bastien souffre en silence. C’est grâce à son
entraîneur de rugby, celui qu’on appelle Moustache, que Bastien va prendre confiance
en lui. De match en match, le jeune garçon grandit, auprès de son père spirituel et de
sa famille d’accueil : son entraîneur et son équipe de rugby. A la télé, Bastien
regarde les All-Blacks et rêve d’être un jour le Jonah Lomu du RC Brignac.
C’est un spectacle qui fait du bien. Cédric Chapuis incarne ses personnages avec une
dextérité impressionnante. De l’entraîneur de rugby avec un bon accent gascon jusqu’à
Jennifer, la supportrice numéro 1 et petite copine d’un joueur de l’équipe, le
comédien joue tous les rôles. Au-dessus de la mêlée, c’est d’abord une belle histoire
d’amitié entre des jeunes soudés par ce sport collectif, mais cette pièce est aussi un
vrai récit de fraternité. Cédric Chapuis met en avant la solidarité et la force du
rugby. De ce sport de ballon parfois brutal, il fait une véritable œuvre d’art et
sublime les mouvements du joueur dans une chorégraphie impressionnante de grâce. La
mise en scène de Mira Simova est musicale et rythmée, et les jeux de lumières de Cilia
Trocmée-Léger donnent l’impression d’être dans un stade, comme au cœur d’un match de
rugby. Cédric Chapuis est beau dans ses crampons, et ses personnages sont attachants.
Il y a Patou, le cliché du rugbyman au grand cœur mais à la cervelle assez peu
remplie, mais aussi Kiki le joueur qu’on préfère voir sur le banc de touche, il y a
Sylvain le beau-gosse un peu casse-cou qui sort avec la jolie supporter Jennifer. Et
surtout, il y a Moustache, l’entraîneur passionné qui refuse de prendre sa retraite
malgré ses problèmes cardiaques, parce que cette équipe du RC Brignac, c’est toute sa
vie.
Au-dessus de la mêlée est une histoire émouvante, qui plaira aux amateurs de rugby
comme aux novices en la matière. C’est une pièce riche, qui aborde avec subtilité les
questions de harcèlement scolaire, de crise d’adolescence et met en exergue
l’importance des valeurs sportives dans la construction personnelle, l’importance du
rêve et de l’espoir. Standing ovation pour Cédric Chapuis, encore une fois.
The Servant : un ténébreux jeu de
domination
Lieu : Studio des Champs-Elysées
Dates : jusqu’au 3 juillet
Mise en scène : Thierry Harcourt
Avec : Maxime d’Aboville, Roxane Bret, Xavier Lafitte, Adrien Melin, Alexie Ribes,
Juliette Petiot
Marionnettes et tourbillon machiavélique
Maxime d’Aboville mérite bien son Molière (meilleur comédien dans un spectacle du
théâtre privé en 2015). Dans cette incroyable course à la domination, le comédien se
surpasse. La pièce mise en scène par Thierry Harcourt, adaptation d’un scénario
d’Harold Pinter (lui-même inspiré du roman de Robin Maugham) avait déjà été
proposée au cinéma en 1963. Tout se déroule dans un intérieur bourgeois, immense
demeure londonienne appartenant au jeune aristocrate Tony. Lorsque Tony décide
d’engager, pour les tâches ménagères et du quotidien, l’étrange et mystérieux Hugo
Barrett,
celui-ci
s’avère
être
un
personnage
tout
particulier.
Méticuleux, psychorigide et doté d’une finesse d’esprit à en décrypter les motscroisés du Times, Barrett noue rapidement une curieuse relation avec son maître Tony.
Il est aux petits soins avec son maître, lui décore son intérieur et lui tient
compagnie de jour comme de nuit. Jusqu’à susciter la jalousie de Sally, la fiancée de
Tony, et l’inquiétude de son meilleur ami Richard. Relation amoureuse ? Peut-être.
Amitié malsaine ? Pourquoi pas. Toutes les hypothèses sont soulevées et le jeu
ténébreux et dérangeant de Maxime d’Aboville (Barrett) fait trembler. Plus la pièce
avance, et plus Barrett semble posséder Tony. Rapidement, il lui propose d’embaucher
sa nièce Vera pour l’épauler dans les tâches du quotidien dans la maison. S’en suit
un espèce de ménage à trois dont on ne pouvait se douter. Ce tourbillon machiavélique
n’a d’égal au théâtre et le public est captivé. Très vite, le domestique dépasse le
maître, le domine. C’est à ce jeu de marionnettes incessant que se risquent les
personnages troublés de The Servant.
Sur le casting, il n’y a aucune erreur :
dans une incarnation parfaite de son
personnage Barrett, d’Aboville excelle. Xavier Lafitte est totalement séduisant,
Alexie Ribes excellente dans son rôle de femme désemparée. Adrien Melin est parfait
comme meilleur ami et Roxanne Bret délicieuse en jeune domestique insouciante.
Dans cette mise en scène de Thierry Harcourt, il n’y a aucun faux pas. Seule la fin
laisse le spectateur (peut-être volontairement) sur sa faim. Brutale, dérangeante, on
sort de cette pièce étrangement questionné, mais conquis.
Nous, rêveurs définitifs : un moment
magique au Rond-Point
L’homme, ce rêveur définitif
Apparitions,
lévitations,
métamorphoses…
Ce
cabaret
rassemble des numéros classiques et inédits lors d’une
grande fête de la magie, provocatrice d’émerveillements, art
majeur des détournements du réel et de l’incitation au rêve.
Nous, rêveurs définitifs ravira petits et grands, qui iront
d’émerveillements en émerveillements.
Lieu : Théâtre du Rond-Point
Dates : jusqu’au 3 juillet
Conception : Clément Debailleul, Raphaël Navarro
Avec : Éric Antoine, Ingrid Estarque, Yann Frisch, Étienne
Saglio, Calista Sinclair
Magie nouvelle.
« Nous, rêveurs définitifs » n’a rien d’un spectacle traditionnel. Cette production du
Théâtre du Rond-Point et de la Compagnie 14:20 propose une immersion dans un similicabaret parsemé de numéros improbables. Carton plein, le public est émerveillé par les
apparitions et métamorphoses de ces artistes virtuoses. La Compagnie 14:20, portée
depuis les années 2000 par Clément Debailleul et Raphaël Navarro, est à l’initiative
du mouvement de la magie nouvelle (ils rédigent actuellement un Manifeste de la magie
nouvelle). Une magie contemporaine, qui marie les disciplines et croise les pratiques
artistiques comme la danse, le théâtre, la vidéo ou encore les marionnettes. Un
savoureux mélange que l’on retrouve parfaitement dans « Nous, rêveurs définitifs ».
La magie nouvelle affirme la magie comme un langage autonome et
foisonnant, contemporain et populaire
Crédit : Clément Debailleul
Un voyage extraordinaire.
La poésie opère dès les premières minutes, passées dans le noir, bercés par une
mélodie au piano de Madeleine Cazenave. L’intégralité du spectacle est rythmé par la
jeune pianiste et par le musicien Camille Saglio, virtuose aux multiples facettes,
amoureux de musiques du monde. Ingrid Estarque envoûte le public avec des danses en
lévitation, Yann Frisch est épatant en jongleur psychédélique, Etienne Saglio fait
rêver avec ses fantômes de papier volants et le duo Calista Sinclair / Eric Antoine
transporte les spectateurs dans un numéro d’illusions impressionnant. Pour le plus
grand plaisir des amateurs de magie humoristique, Eric Antoine n’a pas manqué de faire
quelques tours de passe-passe à la sauce « magicomique ». Toujours avec finesse et non
sans humour, les artistes emmènent leur public dans un voyage extraordinaire, aux
confins d’un monde surnaturel.
Un spectacle qui ravira petits et grands. A voir absolument avant le 3 juillet.
Wonder.land : du Lewis Carroll 3.0 au
Théâtre du Châtelet
Neuf ans après l’opéra pop Monkey, Journey to the West (2007), le compositeur pop-rock
britannique Damon Albarn retrouve la scène du Châtelet pour la création française de
wonder.land, un nouveau musical 2.0 inspiré des Aventures d’Alice au pays des
merveilles. Le Châtelet poursuit sa mission de création d’œuvres musicales hybrides
avec un nouveau musical rock qui, comme le livre dont il s’inspire, s’adresse autant
aux adultes qu’aux enfants (à partir de 10 ans).
Wonder.land jouait jusqu’au jeudi 16 juin au Théâtre du Châtelet à Paris.
http://chatelet-theatre.com/
Who’s ruining my life ?
Aly (Lois Chimimba) est une ado comme les autres.
Cloîtrée dans sa chambre à pianoter sur ses écrans, elle répond insolemment à sa mère
qui lui « gâche la vie », encaisse les problèmes d’argent et d’addiction de son père
et jalouse son petit frère Charlie. « Who’s ruining my life ? » s’écrit-elle en
chanson. Comme de nombreux jeunes de son âge, Aly n’aime pas sa vie et ne s’aime pas
elle-même. Elle se pose des questions existentielles, subit les critiques de ses
camarades de classe, se réfugie sur les réseaux sociaux. C’est en tapant sur son
précieux
smartphone
«
être
quelqu’un
d’autre
»
qu’elle
tombe
sur
le
site
www.wonder.land, un jeu en ligne mystérieux dans lequel elle incarnera son personnage
rêvé : Alice.
« Quand Alice rentre dans cette maison, dans ce rêve, toute rationalité
est abolie ». Damon Albarn.
Avatar.
Aly veut être Alice, dans son monde virtuel. Elle se crée alors un
personnage made in Lewis Carroll, petite blonde à la robe bleu et blanche.
Cette
Alice sera son avatar, une représentation d’elle-même dans son jeu en ligne. Dans
cette aventure aux allures de jeu vidéo, Aly/Alice devra répondre à une question
essentielle « Qui je suis ? » (faisant écho au « Who are you ? » posé par la chenille
Absolem à Alice dans le livre). Une quête d’identité qui s’annonce d’autant plus
difficile que la tyrannique directrice de son école, Mrs Manxome, va vite s’emparer du
jeu et s’approprier wonder.land.
Crédit : Brinkhoff Mögenburg
Pays des Merveilles 3.0.
Le wonderland de Lewis Carroll est totalement
revisité dans cette mise en scène ultra-moderne. Ici, wonder.land est un lieu virtuel
où se cachent créatures pixellisées et personnages imaginaires. Mais loin d’être
dénaturé, l’univers de Carroll est bien présent : la marre de larmes d’Alice,
la
chenille Absolem, le célébrissime Lapin Blanc et le Chat de Chester ont leur place
dans ce Pays des Merveilles 3.0.
Toute l’intelligence de ce Alice revisité réside
dans la modernité du sujet traité. Sentiment d’isolement, mal-être et complexes,
recherche d’identité…
Là où Lewis Carroll, dans Alice through the looking glass,
utilisait un miroir comme échappatoire, Moira Buffini, Ruffus Norris et Damon Albarn
choisissent un medium actuel, internet.
Dans cette version contemporaine du Alice in Wonderland du XIXe siècle, les auteurs
soulèvent
une question essentielle sur la jeunesse actuelle et sur le rôle important
du numérique dans la quête d’identité. Un Alice Rock’n’roll et moderne, tout en
beauté.
Teaser de Wonder.land
Dernier coup de ciseaux : la pièce dont
vous êtes le héros
Dernier coup de ciseaux, comédie policière
interactive écrite par Paul Pörtner et mise en scène par Sébastien Azzopardi, en est à
plus de 1 500 représentations. Après avoir décroché le Molière de la meilleure pièce
comique en 2014, la pièce fait toujours salle comble. Le metteur en scène a pour
habitude de briser le quatrième mur, et c’est chose faite.
Un salon de coiffure au décor kitschissime, un peu de musique disco et des coiffeurs
quelques peu stéréotypés, et le tour est joué. Vous voilà partis pour une aventure
dont vous vous souviendrez. Comme dans tous les salons de coiffure, on parle de la
pluie et du beau temps, de la petite laine et des saisons (même si en fait, « il n’y a
plus d’saisons » n’est-ce pas…). Comme à son habitude, la bourgeoise Domitille Bioret
vient faire faire son brushing entre deux aller-retour chez Chanel. Ce qu’elle ignore,
c’est qu’aujourd’hui, le rendez-vous risque d’être plus décoiffant que d’habitude…
Car à l’étage du dessus, une célèbre pianiste répète et répète d’incessantes
symphonies d’Edvard Grieg, à en rendre fou de rage Romain Canard, le patron quelque
peu déjanté du salon de coiffure.
Et quelques minutes plus tard, les mélodies du piano s’arrêtent brusquement,
et c’est
d’un meurtre à coups de ciseaux que tous se retrouvent soupçonnés. Mais qu’ont-ils à
voir avec cette célèbre pianiste ? Pourquoi l’un d’eux aurait-il été poussé à
l’assassiner ?
« Mesdames Mesdemoiselles, Messieurs, voici le moment où vous allez
intervenir ! »
Propulsés dans un véritable Cluedo à taille humaine, vous (les spectateurs, mais pas
que) aurez comme mission de décrypter les moindres détails et déceler les infimes
indices pour trouver qui des 4 suspects est en fait le meurtrier. Mais qui est le
meurtrier ? Est-ce la naïve (et quelque peu sotte) coiffeuse ? Le gay survolté patron
du salon de coiffure ? Ou peut-être l’antipatique et mystérieux client M. Mercoeur ? A
moins que ce ne soit la riche bourgeoise Mme Bioret… Ou pourquoi pas… Plusieurs
d’entre eux ?
L’énigme, c’est vous qui allez l’élucider, en reconstituant les moindres faits et
gestes des personnages avant l’assassinat. Et le tout parfaitement orchestré deux
flics en planque devant l’immeuble où allait, quelques minutes plus tard, se dérouler
l’étrange affaire.
En plus d’une performance d’acteurs parfaitement admirable, d’une mise en scène
exceptionnelle et d’une intrigue saisissante, l’issue de la pièce extravagante de
Sébastien Azzopardi et sa troupe de fabuleux comédiens dépend totalement… de vous !
Et qui sait… Peut-être que demain… L’assassin aura changé.
Dernier coup de ciseaux
Théâtre des Mathurins
Jusqu’au 30 août 2014
Du mardi au samedi à 21h
Le samedi à 16h
www.theatredesmathurins.com
Article publié initialement sur www.publikart.net
Reprise de Bigre, Mélo Burlesque au Théâtre
Tristan Bernard
Synopsis : Il était une fois, aujourd’hui, dans une grande ville, trois petites
chambres de bonnes habitées par trois personnes dont le destin serait de tout rater.
Mais de tout rater merveilleusement.
Dates : à partir du 28 mai
Lieu : Théâtre Tristan Bernard
Metteur en scène : Pierre Guillois
Comédiens : Pierre Guillois, Agathe L’huillier et Jonathan Pinto Rochois
Bigre est de ces ovnis du théâtre qu’on a plaisir à voir. Mélo burlesque : c’est bien
résumer ce spectacle d’un genre non identifié, mêlant des sketchs improbables à des
moments de poésie. Ils sont trois voisins, on ne connaîtra pas leurs noms, mais tous
les trois vivent dans un simili-appartement d’une dizaine de mètres carrés, chacun
dans son univers. Le premier vit dans une pièce aseptique et est obsédé par la
propreté, le deuxième habite dans un espèce de ghetto fourre-tout, la troisième dans
un coin girly avec son poisson rouge qui va bientôt subir des misères. Tous les trois
vont se croiser, se rencontrer et se retrouver dans des circonstances improbables.
A mi chemin entre le théâtre et le spectacle de rue, l’univers
clownesque de Bigre est à se tordre de rire.
Après avoir triomphé au Rond-Point, jouant à guichet fermé, Bigre revient au Théâtre
Tristan Bernard pour la saison estivale. Un spectacle à voir absolument !
Pour mes amis agenais, Bigre sera également de passage au Théâtre Ducourneau le 27
janvier !