The Servant : un ténébreux jeu de domination,Nous, rêveurs
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The Servant : un ténébreux jeu de domination,Nous, rêveurs
Voyage mélancolique avec Victor Hugo au Lucernaire Le 18 juillet 1843, Victor Hugo qui a 41 ans commence son traditionnel voyage d’été. Ce voyage de près de deux mois le mène de Biarritz à Oléron, en passant par l’Espagne et les Pyrénées. Lieu : Lucernaire Dates : jusqu’au 8 octobre Mise en scène et adaptation : Sylvie Blotkinas Avec : Julien Rochefort Comme les passagers d’une croisière Une voix retentit dans l’obscurité de la salle du Paradis, au Lucernaire. En juillet 1843, Victor Hugo entame son habituel voyage d’été à travers la province, en compagnie de Juliette Drouet dont il taira le nom dans tout son récit. Chaque jour, il rédige ses émotions sur un carnet de voyage, raconte son périple et décrit avec émerveillement les villages par lesquels il passe. Hugo écrit aussi à sa fille Léopoldine, tout juste mariée et dont on connaît le tragique destin. « On loue Bordeaux comme on loue la rue de Rivoli : régularité, symétrie, grandes façades blanches et toutes pareilles les unes aux autres, etc. ; ce qui pour l’homme de sens veut dire architecture insipide, ville ennuyeuse à voir. » Hugo part pour Bordeaux, une ville dont il apprécie le charme paradoxal, qu’il décrit comme un subtil mélange entre la cathédrale d’Anvers et le château de Versailles. Là où certains voient en Bordeaux la rigueur et la symétrie, Hugo perçoit l’élégance et l’authenticité. Bordeaux est pour Hugo une ville « curieuse, originale, peut-être unique ». Hugo continue son périple, dans lequel il nous transporte à travers la voix de Julien Rochefort, en passant par Bayonne son « souvenir d’enfance ». Puis Biarritz, dont le charme indescriptible le transporte. Visionnaire, Hugo voit dans la beauté des roches de Biarritz un avenir sclérosé par le tourisme (NDLR : il n’avait finalement pas si tort). « Biarritz est un lieu admirable, je n’ai peur qu’il devienne à la mode » précise-t-il. Puis viennent Saint-Sébastien, Pampelune, Cauterets.. et enfin, Oléron. Comme les passagers d’une croisière, les spectateurs sont stupéfaits par la grâce du texte et par la finesse de Julien Rochefort dans cette interprétation. Mélancolie Julien Rochefort est brillant. On est comme transporté par la lecture de ce journal intime, et même sans décor et sans fard, les jeux de lumières plonge le spectateur au plus profond de son imaginaire. On imagine les rues de Bordeaux, la splendeur de la côte basque, l’émerveillement dû au voyage. C’est un texte profondément mélancolique, une mélancolie que rappelle l’absence de décor, cette scène vide et noire sur laquelle le comédien s’exerce à raconter le voyage. Car en écrivant ce texte inachevé, Hugo connaîtra le tournant de sa carrière, la tragédie qui bouleversera le reste de sa vie. Un matin, dans un journal local, il apprend le décès accidentel de sa chère fille Léopoldine, noyée dans la Seine le 4 septembre 1843. C’est par cette nouvelle que se termine, brutalement, ce voyage dans les Pyrénées. « Voici ce que je contemple de ma fenêtre : une grande montagne remplit la terre ; un grand nuage remplit le ciel. Entre le nuage et la montagne, une bande mince du ciel crépusculaire, clair, vif, limpide, et Jupiter étincelant, caillou d’or dans un ruisseau d’azur. Rien de plus mélancolique et de plus rassurant et de plus beau que ce petit point de lumière entre ces deux blocs de ténèbres.. » Pyrénées ou le voyage de l’été 1843 est une pièce à voir absolument au Lucernaire, poétique, mélancolique et extrêmement bien jouée. Elle plaira aux amateurs de Hugo comme aux initiés. Les Damnés : l’effroyablement belle mise en scène d’Ivo van Hove Les Damnés – d’après Visconti – mise en scène par Ivo van Hove Au Festival d’Avignon du 6 au 16 juillet 2016 puis à la Comédie Française, salle Richelieu du 24 septembre au 13 janvier 2017 Avec la Troupe de la Comédie Française : Sylvia Bergé, Éric Génovèse, Denis Podalydès, Alexandre Pavloff, Guillaume Gallienne, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Adeline d’Hermy, Clément Hervieu-Léger, Jennifer Decker, Didier Sandre, Christophe Montenez. Après 23 ans d’absence, la Comédie Française fait son retour au Festival d’Avignon avec Les Damnés, pièce mise en scène par le belge plusieurs fois primé cette année, Ivo van Hove. Un complot à la Macbeth Inspiré du film de Luchino Visconti sorti sur les écrans en 1969, Les Damnés raconte la descente aux enfers d’une famille d’industriels allemands. Le 27 février 1933, alors qu’Hitler est chancelier depuis à peine un mois, le Reichstag prend feu. Les nazis instrumentalisent l’incendie à des fins politiques. Dans le même temps, le Baron Joachim (Didier Sandre), chef de la famille von Essenbeck, propriétaire de grandes aciéries dans la Ruhr, est assassiné. Le jeune directeur des usines Herbert Thallmann (Loïc Corbery), fervent opposant au régime nazi, est accusé à tort du meurtre de Joachim et doit fuir en laissant sa femme Elisabeth (Adeline d’Hermy) et ses deux filles. Friedrich Bruckmann (Guillaume Gallienne) et sa maîtresse Sophie von Essenbeck (Elsa Lepoivre) à l’aide de son fils dégénéré Martin (Christophe Montenez), proches des S.S, vont organiser un complot à la Macbeth pour s’emparer des usines. L’industrie von Essenbeck devient rapidement une usine d’armement au service du régime nazi. S’en suit une série de massacres et de crimes au sein d’une famille entièrement détruite par le nazisme. Bain de sang Représenter l’horreur, personnifier la haine, montrer la mort. Ivo van Hove a fait fort dans cette mise en scène dérangeante des Damnés de Visconti. Dans l’enceinte de la Cour d’honneur du Palais des Papes, les gradins tremblent à l’arrivée des premiers personnages. Toute la pièce sera ainsi : dans une ambiance lugubre, terrorisante, imposante. Un sol de revêtement orange figure « l’appareil bureaucratique de l’Etat » précise Tal Yarden, responsable vidéo du spectacle. Sur fond d’images documentaires, les comédiens font revivre des épisodes clés de l’Allemagne de 1933-1934 : l’incendie du Reichstag, les autodafés allemands ou la Nuit des longs couteaux symbolisée par un épisode sanglant dans lequel Konstantin von Essenbeck (Denis Podalydès), membre de la S.A, après une beuverie démente et obscène, termine dans un bain de sang. C’est un spectacle effroyable mais criant de vérité. La mort en direct Dans cette mise en scène magistrale, Ivo van Hove fait vivre à son public la mort en direct et sur écran géant. A chaque personnage qui meurt, la cérémonie, comme un véritable rituel, se répète : les comédiens se rassemblent, raides, le regard vide. L’un s’avance vers la mort, des cercueils disposés côté cour, le visage blafard. Sur l’écran géant, le spectateur le suit jusqu’à l’agonie, pendant que la pièce reprend sur scène. C’est un schéma répétitif, évoquant la mort à la chaîne, une mort anonyme et violente. Du début à la fin tragique et puissante des Damnés, la tension est palpable. L’ambiance musicale y joue aussi pour beaucoup : du quatuor de saxophones installé auprès des cercueils, à l’utilisation du groupe de métal allemand Rammstein, la musique fait partie intégrante du spectacle. Selon ses maîtres d’oeuvre, on retrouve dans cette musique « la volonté de créer de nouveaux moyens de destruction massive ». Jusqu’à la scène finale d’une violence monstrueuse, c’est un silence complet dans la cour du Palais des Papes. Puis c’est une standing ovation pour la troupe de la Comédie Française (tous excellentissimes) et pour Ivo van Hove et son équipe. Plus que dérangeante, les Damnés laisse à son public un goût amer, mais c’est l’effet escompté. Attendons de voir comment cette mise en scène sera adaptée en salle Richelieu, à la rentrée. Cédric Chapuis nous transporte au-dessus de la mêlée Au-dessus de la mêlée, de et avec Cédric Chapuis, mise en scène de Mira Simova. Festival d’Avignon off, du 8 au 30 juillet, les jours pairs au théâtre Pandora à 10h50 Après avoir conquis le public avec « Une vie sur mesure », premier seul en scène dans lequel le talentueux Cédric Chapuis raconte la vie d’un jeune autiste amoureux de la batterie (nominé pour le Molière du meilleur seul en scène 2016), le comédien revient à Avignon avec une nouvelle création. Sur scène, un parterre de fausse pelouse, un ballon ovale et un banc de vestiaire. Bastien a neuf ans lorsqu’il commence le rugby dans la petite équipe du RC Brignac. Frêle, timide et un peu bébé sur les bords, le yoga lui conviendrait certainement mieux. A l’école, Bastien est un souffre-douleur, on lui vole ses affaires, les plus grands le menacent. Mais à la maison, Bastien souffre en silence. C’est grâce à son entraîneur de rugby, celui qu’on appelle Moustache, que Bastien va prendre confiance en lui. De match en match, le jeune garçon grandit, auprès de son père spirituel et de sa famille d’accueil : son entraîneur et son équipe de rugby. A la télé, Bastien regarde les All-Blacks et rêve d’être un jour le Jonah Lomu du RC Brignac. C’est un spectacle qui fait du bien. Cédric Chapuis incarne ses personnages avec une dextérité impressionnante. De l’entraîneur de rugby avec un bon accent gascon jusqu’à Jennifer, la supportrice numéro 1 et petite copine d’un joueur de l’équipe, le comédien joue tous les rôles. Au-dessus de la mêlée, c’est d’abord une belle histoire d’amitié entre des jeunes soudés par ce sport collectif, mais cette pièce est aussi un vrai récit de fraternité. Cédric Chapuis met en avant la solidarité et la force du rugby. De ce sport de ballon parfois brutal, il fait une véritable œuvre d’art et sublime les mouvements du joueur dans une chorégraphie impressionnante de grâce. La mise en scène de Mira Simova est musicale et rythmée, et les jeux de lumières de Cilia Trocmée-Léger donnent l’impression d’être dans un stade, comme au cœur d’un match de rugby. Cédric Chapuis est beau dans ses crampons, et ses personnages sont attachants. Il y a Patou, le cliché du rugbyman au grand cœur mais à la cervelle assez peu remplie, mais aussi Kiki le joueur qu’on préfère voir sur le banc de touche, il y a Sylvain le beau-gosse un peu casse-cou qui sort avec la jolie supporter Jennifer. Et surtout, il y a Moustache, l’entraîneur passionné qui refuse de prendre sa retraite malgré ses problèmes cardiaques, parce que cette équipe du RC Brignac, c’est toute sa vie. Au-dessus de la mêlée est une histoire émouvante, qui plaira aux amateurs de rugby comme aux novices en la matière. C’est une pièce riche, qui aborde avec subtilité les questions de harcèlement scolaire, de crise d’adolescence et met en exergue l’importance des valeurs sportives dans la construction personnelle, l’importance du rêve et de l’espoir. Standing ovation pour Cédric Chapuis, encore une fois. The Servant : un ténébreux jeu de domination Lieu : Studio des Champs-Elysées Dates : jusqu’au 3 juillet Mise en scène : Thierry Harcourt Avec : Maxime d’Aboville, Roxane Bret, Xavier Lafitte, Adrien Melin, Alexie Ribes, Juliette Petiot Marionnettes et tourbillon machiavélique Maxime d’Aboville mérite bien son Molière (meilleur comédien dans un spectacle du théâtre privé en 2015). Dans cette incroyable course à la domination, le comédien se surpasse. La pièce mise en scène par Thierry Harcourt, adaptation d’un scénario d’Harold Pinter (lui-même inspiré du roman de Robin Maugham) avait déjà été proposée au cinéma en 1963. Tout se déroule dans un intérieur bourgeois, immense demeure londonienne appartenant au jeune aristocrate Tony. Lorsque Tony décide d’engager, pour les tâches ménagères et du quotidien, l’étrange et mystérieux Hugo Barrett, celui-ci s’avère être un personnage tout particulier. Méticuleux, psychorigide et doté d’une finesse d’esprit à en décrypter les motscroisés du Times, Barrett noue rapidement une curieuse relation avec son maître Tony. Il est aux petits soins avec son maître, lui décore son intérieur et lui tient compagnie de jour comme de nuit. Jusqu’à susciter la jalousie de Sally, la fiancée de Tony, et l’inquiétude de son meilleur ami Richard. Relation amoureuse ? Peut-être. Amitié malsaine ? Pourquoi pas. Toutes les hypothèses sont soulevées et le jeu ténébreux et dérangeant de Maxime d’Aboville (Barrett) fait trembler. Plus la pièce avance, et plus Barrett semble posséder Tony. Rapidement, il lui propose d’embaucher sa nièce Vera pour l’épauler dans les tâches du quotidien dans la maison. S’en suit un espèce de ménage à trois dont on ne pouvait se douter. Ce tourbillon machiavélique n’a d’égal au théâtre et le public est captivé. Très vite, le domestique dépasse le maître, le domine. C’est à ce jeu de marionnettes incessant que se risquent les personnages troublés de The Servant. Sur le casting, il n’y a aucune erreur : dans une incarnation parfaite de son personnage Barrett, d’Aboville excelle. Xavier Lafitte est totalement séduisant, Alexie Ribes excellente dans son rôle de femme désemparée. Adrien Melin est parfait comme meilleur ami et Roxanne Bret délicieuse en jeune domestique insouciante. Dans cette mise en scène de Thierry Harcourt, il n’y a aucun faux pas. Seule la fin laisse le spectateur (peut-être volontairement) sur sa faim. Brutale, dérangeante, on sort de cette pièce étrangement questionné, mais conquis. Nous, rêveurs définitifs : un moment magique au Rond-Point L’homme, ce rêveur définitif Apparitions, lévitations, métamorphoses… Ce cabaret rassemble des numéros classiques et inédits lors d’une grande fête de la magie, provocatrice d’émerveillements, art majeur des détournements du réel et de l’incitation au rêve. Nous, rêveurs définitifs ravira petits et grands, qui iront d’émerveillements en émerveillements. Lieu : Théâtre du Rond-Point Dates : jusqu’au 3 juillet Conception : Clément Debailleul, Raphaël Navarro Avec : Éric Antoine, Ingrid Estarque, Yann Frisch, Étienne Saglio, Calista Sinclair Magie nouvelle. « Nous, rêveurs définitifs » n’a rien d’un spectacle traditionnel. Cette production du Théâtre du Rond-Point et de la Compagnie 14:20 propose une immersion dans un similicabaret parsemé de numéros improbables. Carton plein, le public est émerveillé par les apparitions et métamorphoses de ces artistes virtuoses. La Compagnie 14:20, portée depuis les années 2000 par Clément Debailleul et Raphaël Navarro, est à l’initiative du mouvement de la magie nouvelle (ils rédigent actuellement un Manifeste de la magie nouvelle). Une magie contemporaine, qui marie les disciplines et croise les pratiques artistiques comme la danse, le théâtre, la vidéo ou encore les marionnettes. Un savoureux mélange que l’on retrouve parfaitement dans « Nous, rêveurs définitifs ». La magie nouvelle affirme la magie comme un langage autonome et foisonnant, contemporain et populaire Crédit : Clément Debailleul Un voyage extraordinaire. La poésie opère dès les premières minutes, passées dans le noir, bercés par une mélodie au piano de Madeleine Cazenave. L’intégralité du spectacle est rythmé par la jeune pianiste et par le musicien Camille Saglio, virtuose aux multiples facettes, amoureux de musiques du monde. Ingrid Estarque envoûte le public avec des danses en lévitation, Yann Frisch est épatant en jongleur psychédélique, Etienne Saglio fait rêver avec ses fantômes de papier volants et le duo Calista Sinclair / Eric Antoine transporte les spectateurs dans un numéro d’illusions impressionnant. Pour le plus grand plaisir des amateurs de magie humoristique, Eric Antoine n’a pas manqué de faire quelques tours de passe-passe à la sauce « magicomique ». Toujours avec finesse et non sans humour, les artistes emmènent leur public dans un voyage extraordinaire, aux confins d’un monde surnaturel. Un spectacle qui ravira petits et grands. A voir absolument avant le 3 juillet. Wonder.land : du Lewis Carroll 3.0 au Théâtre du Châtelet Neuf ans après l’opéra pop Monkey, Journey to the West (2007), le compositeur pop-rock britannique Damon Albarn retrouve la scène du Châtelet pour la création française de wonder.land, un nouveau musical 2.0 inspiré des Aventures d’Alice au pays des merveilles. Le Châtelet poursuit sa mission de création d’œuvres musicales hybrides avec un nouveau musical rock qui, comme le livre dont il s’inspire, s’adresse autant aux adultes qu’aux enfants (à partir de 10 ans). Wonder.land jouait jusqu’au jeudi 16 juin au Théâtre du Châtelet à Paris. http://chatelet-theatre.com/ Who’s ruining my life ? Aly (Lois Chimimba) est une ado comme les autres. Cloîtrée dans sa chambre à pianoter sur ses écrans, elle répond insolemment à sa mère qui lui « gâche la vie », encaisse les problèmes d’argent et d’addiction de son père et jalouse son petit frère Charlie. « Who’s ruining my life ? » s’écrit-elle en chanson. Comme de nombreux jeunes de son âge, Aly n’aime pas sa vie et ne s’aime pas elle-même. Elle se pose des questions existentielles, subit les critiques de ses camarades de classe, se réfugie sur les réseaux sociaux. C’est en tapant sur son précieux smartphone « être quelqu’un d’autre » qu’elle tombe sur le site www.wonder.land, un jeu en ligne mystérieux dans lequel elle incarnera son personnage rêvé : Alice. « Quand Alice rentre dans cette maison, dans ce rêve, toute rationalité est abolie ». Damon Albarn. Avatar. Aly veut être Alice, dans son monde virtuel. Elle se crée alors un personnage made in Lewis Carroll, petite blonde à la robe bleu et blanche. Cette Alice sera son avatar, une représentation d’elle-même dans son jeu en ligne. Dans cette aventure aux allures de jeu vidéo, Aly/Alice devra répondre à une question essentielle « Qui je suis ? » (faisant écho au « Who are you ? » posé par la chenille Absolem à Alice dans le livre). Une quête d’identité qui s’annonce d’autant plus difficile que la tyrannique directrice de son école, Mrs Manxome, va vite s’emparer du jeu et s’approprier wonder.land. Crédit : Brinkhoff Mögenburg Pays des Merveilles 3.0. Le wonderland de Lewis Carroll est totalement revisité dans cette mise en scène ultra-moderne. Ici, wonder.land est un lieu virtuel où se cachent créatures pixellisées et personnages imaginaires. Mais loin d’être dénaturé, l’univers de Carroll est bien présent : la marre de larmes d’Alice, la chenille Absolem, le célébrissime Lapin Blanc et le Chat de Chester ont leur place dans ce Pays des Merveilles 3.0. Toute l’intelligence de ce Alice revisité réside dans la modernité du sujet traité. Sentiment d’isolement, mal-être et complexes, recherche d’identité… Là où Lewis Carroll, dans Alice through the looking glass, utilisait un miroir comme échappatoire, Moira Buffini, Ruffus Norris et Damon Albarn choisissent un medium actuel, internet. Dans cette version contemporaine du Alice in Wonderland du XIXe siècle, les auteurs soulèvent une question essentielle sur la jeunesse actuelle et sur le rôle important du numérique dans la quête d’identité. Un Alice Rock’n’roll et moderne, tout en beauté. Teaser de Wonder.land Dernier coup de ciseaux : la pièce dont vous êtes le héros Dernier coup de ciseaux, comédie policière interactive écrite par Paul Pörtner et mise en scène par Sébastien Azzopardi, en est à plus de 1 500 représentations. Après avoir décroché le Molière de la meilleure pièce comique en 2014, la pièce fait toujours salle comble. Le metteur en scène a pour habitude de briser le quatrième mur, et c’est chose faite. Un salon de coiffure au décor kitschissime, un peu de musique disco et des coiffeurs quelques peu stéréotypés, et le tour est joué. Vous voilà partis pour une aventure dont vous vous souviendrez. Comme dans tous les salons de coiffure, on parle de la pluie et du beau temps, de la petite laine et des saisons (même si en fait, « il n’y a plus d’saisons » n’est-ce pas…). Comme à son habitude, la bourgeoise Domitille Bioret vient faire faire son brushing entre deux aller-retour chez Chanel. Ce qu’elle ignore, c’est qu’aujourd’hui, le rendez-vous risque d’être plus décoiffant que d’habitude… Car à l’étage du dessus, une célèbre pianiste répète et répète d’incessantes symphonies d’Edvard Grieg, à en rendre fou de rage Romain Canard, le patron quelque peu déjanté du salon de coiffure. Et quelques minutes plus tard, les mélodies du piano s’arrêtent brusquement, et c’est d’un meurtre à coups de ciseaux que tous se retrouvent soupçonnés. Mais qu’ont-ils à voir avec cette célèbre pianiste ? Pourquoi l’un d’eux aurait-il été poussé à l’assassiner ? « Mesdames Mesdemoiselles, Messieurs, voici le moment où vous allez intervenir ! » Propulsés dans un véritable Cluedo à taille humaine, vous (les spectateurs, mais pas que) aurez comme mission de décrypter les moindres détails et déceler les infimes indices pour trouver qui des 4 suspects est en fait le meurtrier. Mais qui est le meurtrier ? Est-ce la naïve (et quelque peu sotte) coiffeuse ? Le gay survolté patron du salon de coiffure ? Ou peut-être l’antipatique et mystérieux client M. Mercoeur ? A moins que ce ne soit la riche bourgeoise Mme Bioret… Ou pourquoi pas… Plusieurs d’entre eux ? L’énigme, c’est vous qui allez l’élucider, en reconstituant les moindres faits et gestes des personnages avant l’assassinat. Et le tout parfaitement orchestré deux flics en planque devant l’immeuble où allait, quelques minutes plus tard, se dérouler l’étrange affaire. En plus d’une performance d’acteurs parfaitement admirable, d’une mise en scène exceptionnelle et d’une intrigue saisissante, l’issue de la pièce extravagante de Sébastien Azzopardi et sa troupe de fabuleux comédiens dépend totalement… de vous ! Et qui sait… Peut-être que demain… L’assassin aura changé. Dernier coup de ciseaux Théâtre des Mathurins Jusqu’au 30 août 2014 Du mardi au samedi à 21h Le samedi à 16h www.theatredesmathurins.com Article publié initialement sur www.publikart.net Reprise de Bigre, Mélo Burlesque au Théâtre Tristan Bernard Synopsis : Il était une fois, aujourd’hui, dans une grande ville, trois petites chambres de bonnes habitées par trois personnes dont le destin serait de tout rater. Mais de tout rater merveilleusement. Dates : à partir du 28 mai Lieu : Théâtre Tristan Bernard Metteur en scène : Pierre Guillois Comédiens : Pierre Guillois, Agathe L’huillier et Jonathan Pinto Rochois Bigre est de ces ovnis du théâtre qu’on a plaisir à voir. Mélo burlesque : c’est bien résumer ce spectacle d’un genre non identifié, mêlant des sketchs improbables à des moments de poésie. Ils sont trois voisins, on ne connaîtra pas leurs noms, mais tous les trois vivent dans un simili-appartement d’une dizaine de mètres carrés, chacun dans son univers. Le premier vit dans une pièce aseptique et est obsédé par la propreté, le deuxième habite dans un espèce de ghetto fourre-tout, la troisième dans un coin girly avec son poisson rouge qui va bientôt subir des misères. Tous les trois vont se croiser, se rencontrer et se retrouver dans des circonstances improbables. A mi chemin entre le théâtre et le spectacle de rue, l’univers clownesque de Bigre est à se tordre de rire. Après avoir triomphé au Rond-Point, jouant à guichet fermé, Bigre revient au Théâtre Tristan Bernard pour la saison estivale. Un spectacle à voir absolument ! Pour mes amis agenais, Bigre sera également de passage au Théâtre Ducourneau le 27 janvier !