Fiche HDA : Slave Auction, Jean

Fiche HDA : Slave Auction, Jean-Michel Basquiat
Titre : Slave Auction (« Vente aux enchères d'esclaves »)
Nature : collage de papiers froissés, pastel gras
et peinture acrylique sur toile
Date : 1982
Artiste : Jean-Michel Basquiat (1960-1988)
Lieu : Musée national d'Art moderne,
Centre Georges Pompidou, Paris
Dimensions : 183 x 305,5 cm
L'artiste :
JMB est un artiste peintre américain, né à New York, d'origine américaine et portoricaine. Il a commencé
comme artiste de rue en peignant des graffitis et en vendant divers objets. Au début des années 80, il est
devenu un artiste d'avant-garde très populaire, grâce à des rencontres avec des personnalités importantes, qui
l'ont fait participer à des expositions. Il a notamment rencontré Andy Warhol, grande figure du pop art, avec
qui il a travaillé. JMB puise son inspiration dans la culture populaire, la société de consommation et l'histoire du
peuple noir. Il est mort d'une overdose d'héroïne en 1988, à l'âge de 27 ans.
Le mouvement artistique : le néo-expressionnisme
C'est un mouvement artistique qui se développe en réaction à l'art conceptuel et minimaliste et qui renoue avec
la peinture figurative1. Le style des artistes néo-expressionnistes est souvent violent et plein d'émotion, les
images et les thèmes sont volontiers provocateurs. Ce mouvement renoue avec la matérialité et la gestualité
de la peinture.
Contexte historique :
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~ 1441-1850 : « Traite Atlantique » ou « Traite occidentale ».
Il s'agit d'échanges qui ont été instaurés entre l'Europe, l'Afrique et les Amériques pour assurer la
distribution d'esclaves noirs aux colonies du Nouveau Monde. On désigne également ces échanges par
l'expression « commerce triangulaire ».
1808 : abolition de la traite des Noirs aux États-Unis.
1861-1865 : guerre de Sécession aux États-Unis.
Il s'agit d'une guerre civile qui a opposé les États de « l'Union », dirigés par Abraham Lincoln (qui était
farouchement opposé à l'esclavage et souhaitait son abolition) aux États du sud (la « Confédération »),
les États esclavagistes qui avaient fait sécession avec les États-Unis.
1863 : proclamation du président Lincoln décrétant l'émancipation des esclaves dans les États
confédérés.
1865 : à la fin de la guerre de Sécession, le 13e amendement à la Constitution des États-Unis proclame
l'abolition officielle de l'esclavage dans l'ensemble du pays.
~ 1875-1960 : ségrégation raciale aux États-Unis (lois Jim Crow)
Description :
Cette œuvre, qui date de 1982, s'inscrit dans les travaux de JMB qui s'intéressent à la thématique de l'identité
noire et à celle des minorités opprimées : il s'agit donc d'une œuvre engagée qui, comme l'indique le titre,
dénonce la traite des noirs et l'esclavage du peuple noir. La couleur noire, très présente et qui constitue le
fond du tableau, permet de souligner ce thème.
1 L'art figuratif, qui cherche à représenter le réel, s'oppose à l'art abstrait.
L'impression générale qui se dégage du tableau est celle d'un désordre, d'une confusion, ainsi que d'une
certaine violence. Ce tableau, par sa simplicité, fait penser à des dessins d'enfant ou à des graffitis : cela
rappelle la première forme d'expression à laquelle s'est consacrée JMB. Le style de l’œuvre rappelle d'ailleurs le
style urbain, caractérisé par une certaine forme de chaos et une profusion de signes, comme c'est le cas ici. Les
traces de peinture, les coups de pinceau visibles ainsi que les papiers froissés et/ou déchirés rappellent bien le
mouvement néo-expressionniste.
Le bateau, situé au centre du tableau, rappelle le moyen de transport qui a permis, notamment au XVIIe siècle,
de transporter les populations africaines de leur terre d'origine vers le continent américain, afin qu'ils soient
vendus comme esclaves par les Européens. Ce bateau est peint en doré, couleur qui symbolise le pouvoir de
l'argent des marchands d'esclaves, tandis que le bleu rappelle la couleur de l'océan traversé par les bateaux
d'esclaves.
L'homme en habit noir, à la droite du tableau, qui fait penser à un épouvantail, pourrait représenter l'un de ces
marchands d'esclaves, de par son allure terrifiante. Les visages aux dents menaçantes, sur fond jaune,
représentent les négriers2 ou les maîtres des esclaves, qui sont quant à eux représentés sous la forme de
visages édentés3. La présence ou l'absence de dents constitue un élément symbolique fort. Les dents sont en
effet associées à la force, au pouvoir (l'expression « avoir les dents longues » signifie « être prêt à tout pour
arriver à ses fins », notamment pour s'enrichir) ainsi qu'à la faim (« ne rien avoir à se mettre sous la dent »).
L'absence de dents sur les visages des esclaves rappelle les mauvaises conditions dans lesquelles ils vivaient
ainsi que les mauvais traitements qui leur étaient infligés.
A gauche, le crâne portant une couronne d'épines est une allusion à la crucifixion 4 et à la passion5 du Christ :
cette allusion fait écho au sacrifice et à la souffrance du peuple noir exploité par les négriers.
La forme sur fond orangé en bas à gauche pourrait représenter un insecte et faire ainsi allusion aux tourments
quotidiens endurés par les esclaves dans les champs de coton.
Le tableau comporte également des éléments faisant référence à des faits importants dans la culture
américaine : le joueur de base-ball, en bas au centre, sport extrêmement populaire aux États-Unis ainsi que
des références au jazz, à travers les consonnes présentes en bas à droite du tableau et qui sont celles d'un
célèbre jazzman africain (Charlie Parker) et le costume du marchand d'esclave, qui renvoie au music-hall de la
Nouvelle-Orléans.
Ce tableau n'est donc pas seulement une dénonciation de la traite des noirs et de l'esclavage subi par le
peuple africain pendant des siècles. Il s'agit également d'un hommage qui célèbre le peuple noir comme en
attestent la figure christique, la référence au jazzman noir Parker et le joueur de base-ball qui font référence
aux exploits et aux talents de certaines personnalités noires.
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Négrier = marchand qui transportait et faisait commerce des esclaves noirs.
Édenté = qui n'a plus de dents.
Crucifixion = supplice de la mise en croix.
Passion = souffrance et supplices qui accompagnèrent la mort du Christ sur la croix.