Sphérocytose héréditaire néonatale sévère : à propos d`une
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Sphérocytose héréditaire néonatale sévère : à propos d`une
Journal de pédiatrie et de puériculture (2016) 29, 155—157 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com CAS CLINIQUE Sphérocytose héréditaire néonatale sévère : à propos d’une observation Hereditary spherocytosis: Report of a severe neonatal form I. Ayadi Dahmane ∗, S. Chaouachi , B. Rabaii , A. Hajji , A. Bezzine , E. Ben Hamida , Z. Marrakchi Service de néonatologie, hôpital Charles-Nicolle, boulevard 9 Avril 1938, 1006 Tunis, Tunisie Reçu le 19 mars 2016 ; accepté le 8 avril 2016 MOTS CLÉS Sphérocytose héréditaire ; Anémie hémolytique ; Ictère ; Nouveau-né KEYWORDS Hereditary spherocytosis; Hemolytic anemia; Jaundice; Newborn ∗ Introduction La sphérocytose héréditaire (SH), appelée aussi maladie de Minkowsky Chauffard, est une maladie constitutionnelle du globule rouge. Elle est secondaire à un déficit quantitatif ou qualitatif de certaines protéines de la membrane érythrocytaire : ankyrine, bande 3, spectrine, protéine 4,2 [1]. Son incidence est estimée à 2—4/10,000 naissances aux États-Unis de [1] et à 1/5000 naissances en Europe du Nord [2]. Le mode de transmission est dominant dans 75 % des cas, elle peut être secondaire à une transmission autosomique récessive ou secondaire à des mutations de novo. La SH se manifeste par une anémie régénérative de gravité très variable selon les individus, certains sujets sont asymptomatiques, d’autres nécessitent des transfusions régulières. La forme sévère de la SH est caractérisée par un taux d’Hb entre 6 et 8 g/dL avec un taux de réticulocytes > 10 % [3]. Nous rapportons une observation de SH sévère chez un nouveau-né. Observation Nouveau-né de sexe féminin, née à 38 semaines d’aménorrhées par césarienne pour utérus cicatriciel, avec une bonne adaptation à la vie extra-utérine, eutrophique pour son terme. Auteur correspondant. Adresse e-mail : imen [email protected] (I. Ayadi Dahmane). http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.004 0987-7983/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 156 Il y avait une histoire familiale de SH. Sa mère âgée de 27 ans, atteinte de SH diagnostiquée au cours de la petite enfance, splénectomisée à l’âge de 14 ans. Sa grand-mère maternelle, ses deux tantes et son oncle sont aussi atteints de SH, tous splénectomisés. Sa fratrie est faite de deux frères, l’un âgé de cinq ans et l’autre âgé de quatre ans. Le frère aîné était sans antécédents pathologiques, nous lui avons demandé un Pink test qui s’est révélé pathologique à 40 % (valeur de référence < 28 %). Le cadet âgé de quatre ans avait présenté un ictère néonatal en rapport avec une SH modérée (Pink test pathologique). Le père était âgé de 31 ans, sans antécédents pathologiques. Le mariage était non consanguin. L’examen clinique à H20 de vie a objectivé un ictère intense associé à une pâleur cutanéomuqueuse, sans hépatosplénomégalie. Le bilan biologique du nouveauné a montré : une hyperbilirubinémie non conjuguée à 163 mol/L, la numération formule sanguine a montré : un taux d’Hb à 10,4 g/dL, GR : 2,97 × 106 /mL, VGM : 101 fL, CCMH : 36 pg/dL, GB : 14,020/mL, plaquettes : 341,000/mL, un taux de réticulocytes à 13 % (soit 386,400/mL). Le nouveau-né était de groupe sanguin B positif, le TCD était négatif. La mère était de groupe sanguin A positif. Le frottis sanguin a montré des éléments en faveur du diagnostic de la SH : de très nombreux sphérocytes, quelques schizocytes, une anisocytose et des hématies polychromatophiles. Le Pink test : 70 % (valeur de référence < 28 %). La prise en charge a inclus plusieurs séances de photothérapie intensive. L’évolution était vers l’augmentation de bilirubinémie non conjuguée au cours des premiers jours de vie avec un maximum à 266 mol/L à j3 de vie, puis baisse progressive du taux sérique de la bilirubine non conjuguée. Il n’y avait pas besoin de recourir à une exsanguinotransfusion. L’anémie s’est accentuée au cours des premiers jours de vie avec recours à une transfusion de culot globulaire phénotypé, irradié à j3 de vie pour anémie à 7,6 g/dL. Le nouveau-né a été mis sortant à j7 de vie avec un taux de bilirubine non conjuguée à 180 mol/L et taux d’Hb à 11,3 g/dL. Actuellement, l’enfant est âgé de 3 ans, suivie en hématopédiatrie, polytransfusé. Discussion En période néonatale, le diagnostic de SH est souvent évoqué devant un ictère pathologique du nouveau-né. Certaines études ont rapporté que le diagnostic de SH est souvent méconnu en période néonatale. En effet, 50 % des cas de SH ont des antécédents d’ictère néonatal, souvent étiqueté comme ictère physiologique [4]. Il s’agit d’un ictère précoce et souvent associé à une pâleur cutanéomuqueuse témoignant d’une anémie, la splénomégalie est rarement présente. Dans le cas présenté, le diagnostic de SH était orienté par d’histoire familiale. Le diagnostic peut être difficile en absence d’antécédents familiaux (25 % des cas). Dans ce cas, certains signes biologiques permettent d’orienter le diagnostic. L’anémie néonatale régénérative est un facteur pronostique de sévérité de la SH. Ceci était le cas de notre patiente avec anémie hémolytique fortement régénérative (réticulocytes > 10 %), nécessitant rapidement une transfusion à j3 de vie. Le frottis sanguin montre, le cas I. Ayadi Dahmane et al. de notre observation, la présence de sphérocytes, de nombreuses cellules hyperdenses, reflet de la déshydratation cellulaire [5]. Christensen et al. ont comparé la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine (CCMH) chez des nouveau-nés atteints de SH par rapport à des nouveaunés présentant un ictère immunologique. Ils ont trouvé qu’une CCMH ≥ 36 g/dL avait une sensibilité de 82 % et une spécificité de 98 % dans le diagnostic d’un ictère en rapport avec un SH [6]. En effet, la CCMH élevée est le témoin d’une déshydratation intraérythrocytaire. Les tests d’hémolyse tel le test de résistance osmotique, le Pink test (test d’hémolyse en milieu glycérolé), le acidified glycerol lysis test (test de lyse en milieu acidifié), sont peu coûteux et permettent le diagnostic dans la plupart des cas. Le Pink test, utilisé pour faire le diagnostic dans le cas présenté, a une sensibilité de 95 % et une spécificité de 91 % dans le diagnostic de la SH [7]. Pour les cas où ces tests sont négatifs, le diagnostic de SH peut se confirmer par deux méthodes : la cytométrie en flux après marquage des GR avec l’éosine-5-maléimide et l’ektacytométrie. La première méthode a une sensibilité de 93 % et une spécificité de 98 % [7]. L’ektacytométrie étudie la déformabilité de la membrane érythrocytaire, aussi la résistance osmotique des globules rouges. C’est le test le plus sensible et le plus spécifique. Elle permet le diagnostic de la SH et de la distinguer des autres anomalies constitutionnelles de la membrane érythrocytaire [8]. Ces méthodes diagnostic ne sont pas disponibles en Tunisie. La SH est de transmission autosomique dominante dans 75 % des cas. C’est une maladie génétique à pénétrance incomplète, caractérisée par une hétérogénéité phénotypique et génotypique. Dans notre observation, le frère aîné était asymptomatique, pourtant porteur de la maladie avec un Pink test pathologique. Sheffield et al. ont rapporté l’observation de deux jumelles ayant présenté en période néonatale une hyperbilirubinémie, une réticulocytose et une CCMH élevée, en rapport avec une SH. Ceci a permit de porter le diagnostic de SH chez leur mère et leur frère aîné âgé de 4 ans qui étaient asymptomatiques [9]. Le nouveau-né atteint de sphérocytose héréditaire risque de développer une anémie sévère liée à l’incapacité de la moelle osseuse à compenser l’hyperhémolyse. Ces spécificités physiopathologiques, propres à la période néonatale, expliquent le recours à un traitement par érythropoïétine (EPO) proposé comme alternative aux transfusions. En effet, 70 à 80 % des enfants atteints de SH nécessitent des transfusions sanguines au cours de leur première année de vie. Rocha et al. ont rapporté une corrélation positive entre le taux de l’EPO et le taux des réticulocytes chez les patients atteints de SH, cette corrélation disparaissait dans les formes sévères de la maladie avec mauvaise réponse de la moelle à l’anémie hémolytique [10]. Tchernia et al. ont étudié l’effet d’un traitement par l’EPO humaine recombinée à la dose de 1000 UI/Kg/semaine chez des enfants atteints de SH. Ils ont trouvé que l’EPO était efficace dans la gestion de l’anémie et pourrait servir comme une alternative aux transfusions de culots globulaires [11]. Certains auteurs ont rapporté des cas de nouveau-nés atteints de SH traités avec sucées par l’EPO [12]. Contrairement, Morrison et al., dans une étude récente, évaluent les bénéfices de l’EPO versus la transfusion de culot globulaire chez enfants atteints de SH. Ils ont trouvé que l’EPO, qui coutait deux Sphérocytose héréditaire néonatale sévère : à propos d’une observation fois le pris d’une transfusion, elle ne permettait pas toujours de prévenir la transfusion [13]. En effet, il n’y a pas de données suffisantes pour recommander son utilisation. L’EPO n’est pas disponible en Tunisie, la transfusion de culot globulaire reste la seule alternative pour la prise en charge des enfants atteints de la forme sévère de la SH, tel est le cas pour notre patiente. Il n’existe pas de recommandations définissant un seuil transfusionnel optimal, le seuil du taux d’Hb recommandé pour indiquer une transfusion est généralement de 7 à 8 g/dL. L’indication de la splénectomie dépend de l’importance de l’anémie et surtout de sa tolérance clinique. [4] [5] [6] [7] Conclusion La sphérocytose héréditaire est souvent méconnue comme cause de l’hyperbilirubinémie néonatale. La forme néonatale sévère est rare, le diagnostic est facile, surtout en cas d’antécédents familiaux. Sa prise en charge est lourde nécessitant des transfusions répétées, les patients sont généralement splénectomisés à l’adolescence. [8] [9] [10] Déclaration de liens d’intérêts [11] Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Delaunay J. The molecular basis of hereditary red cell membrane disorders. Blood Rev 2007;21:1—20. [2] Sullivan DW, Glader BE. Hereditary spherocytosis. Pediatr Ann 1980;9:308—11. [3] Eber SW, Armbrust R, Schröter W. Variable clinical severity of hereditary spherocytosis: relation to erythrocytic spectrin [12] [13] 157 concentration, osmotic fragility, and autohemolysis. J Pediatr 1990;117:409—16. 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