Sri Aurobindo - International Bureau of Education

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Sri Aurobindo - International Bureau of Education
M. K. Raina
Sri Aurobindo
Perspectives, vol. XXXII, n° 3, septembre 2002
Langue originale : anglais
M. K. Raina (Inde)
M. K. Raina, qui est professeur, dirige, à New Delhi, au Conseil national de la recherche pédagogique et de la
formation, le Département des fondements psychosociologiques de l’éducation. Ancien attaché principal de
recherches au Conseil indien de la recherche en sciences sociales de l’Université de Jawaharlal Nehru à New
Delhi, il a été lauréat du Prix Rao VKRV de sciences sociales et du Prix de la créativité que décernait pour la
première fois le World Council for Gifted and talented Children des États-Unis. Il a récemment publié une étude
sur Rabindranath Tagore et ses deux derniers ouvrages sont Creativity passion [Passion de la créativité] et
International perspectives in creativity research [Perspectives internationales de la recherche sur la créativité].
Rédacteur adjoint de l’Encyclopedia of psychology [Encyclopédie de la psychologie], il collabore également à
l’Encyclopedia of creativity [Encyclopédie de la créativité] et à l’Encyclopedia of psychology and neuroscience
[Encyclopédie de la psychologie et des neurosciences].
PROFILS D’ÉDUCATEURS
SRI AUROBINDO
(1872-1950)
M. K. Raina
Explorateur et aventurier de la conscience humaine (Das, 1977, 1999 ; Joshi 1998a),
visionnaire de l’évolution (Satprem, 1998), Sri Aurobindo (1972a, p. 49) avait déclaré :
« Personne ne peut écrire sur ma vie car elle n’est pas visible de l’extérieur ». Rabindranath
Tagore (voir Raina, 1997), son compatriote bengali, artiste et poète, et lauréat du prix Nobel,
avec lequel il était lié par de profondes affinités, s’était fait l’écho de ces propos en déclarant
également qu’on ne devait pas chercher à expliquer le poète par sa biographie. McDermott
(1972) estimait pour sa part que vouloir interpréter la vie d’une grande personnalité spirituelle
est toujours une entreprise dangereuse, a fortiori lorsqu’il s’agit de celle de Sri Aurobindo,
laquelle est particulièrement énigmatique (McDermott, p. 15).
Né le 15 août 1872 à Calcutta, alors capitale de l’Empire britannique des Indes,
Aurobindo Ackroyd Ghose - le deuxième prénom, occidental, lui ayant été donné par son père
à sa naissance – était le troisième fils du Dr. Krishnadhan Ghose et de Swarnalata Devi. Le
titre honorifique « Sri », traditionnellement conféré en signe de respect ou de dévotion, faisait
partie de son nom. En sanskrit, le mot « Aurobindo » signifie « lotus ». Le père d’Aurobindo
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l’avait choisi pour son originalité sans se douter que le lotus est le symbole de la conscience
divine dans le langage de l’occultisme.
Aurobindo, qui reçoit les premiers rudiments de son éducation dans une école religieuse
pour enfants européens, est emmené en 1879 en Angleterre par son père pour qu’il y
poursuive ses études à Manchester. Plus tard, son père l'inscrit à la St. Paul’s School à
Londres, qui lui octroie une bourse pour le King’s College de Cambridge où il entre en 1889.
Aurobindo y obtient presque tous les prix de grec et de latin, ainsi que la première partie du
tripos de lettres classiques avec la mention très bien en 1892. La même année, il passe avec
succès le concours de recrutement des cadres de l'administration indienne, mais est déclaré
inadmissible à la fonction publique pour ne pas s’être présenté à l’épreuve d’équitation.
Sri Aurobindo, qui commence à écrire très tôt, dès l’époque de ses études à Manchester
(1879-1884), fait preuve de créativité durant toutes les étapes mouvementées de sa vie, même
en prison. Il publie son premier livre, un recueil de poèmes, intitulé Songs to Myrtilla en
1895. Ensuite, jusqu’à son dernier livre publié de son vivant, Savitri (1978), il écrit de
nombreux ouvrages sur le yoga, la culture, la sociologie, en plus de ses œuvres poétiques et
dramatiques, dont la somme constitue à maints égards une immense contribution à la pensée
et à l’action humaines. Dans son livre La vie divine, considéré comme « le chef-d’œuvre
philosophique du siècle » (Vrekhem 1999, p. 44), il jette les bases d’une nouvelle cosmologie
et d’une nouvelle métaphysique. Dans ce même ouvrage, ainsi que dans ses Lettres, il
révolutionne toute notre conception de la psychologie en lui donnant un nouveau fondement.
Il formule une approche radicalement novatrice de la sociologie dans son ouvrage intitulé Le
cycle humain et démontre, au terme d’une étude approfondie des systèmes de pensée sociaux
et politiques, actuels et passés, en quoi une attitude vraiment spirituelle est indispensable pour
mettre en place un ordre social nouveau et viable. Dans son livre L’idéal de l’unité humaine,
il étend la portée de cette approche à la politique internationale. Dans ses écrits sur
l’éducation, il formule une théorie qui, valable, sous réserve de quelques variations, pour
toutes les nations du monde, favoriserait l’essor d’une conscience intégrale dans l’esprit de
chaque élève, et rétablirait l’autorité de l’Esprit sur une matière pleinement développée et
utilisée. Dans La synthèse des yoga, il montre comment les différents systèmes de yoga se
complètent et s’unissent sur le chemin qui mène au Supramental. Dans ses ouvrages The
secret of the Vedas, Essai sur la Guîtâ et ses travaux sur les Upanishads, il ouvre de nouvelles
approches qui ont marqué l’histoire de l’étude des textes anciens de la pensée indienne en
appréhendant la philosophie d’une manière nouvelle et en mettant l’anthropologie et
l’anthropomorphologie à la place qui est la leur dans un système équilibré de la connaissance.
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Il propose une éblouissante interprétation de plusieurs siècles de culture indienne dans son
livre Fondements de la culture indienne. Dans Savitri, œuvre épique très élaborée, Aurobindo
porte à la perfection tous les styles qu’il a pratiqués dans ses divers travaux. Œuvre de 24 000
vers blancs, Savitri passe pour être le plus long poème de langue anglaise. Dans son ouvrage
La poésie future, Sri Aurobindo élabore une théorie littéraire (Heehs, 1989, 1998) qui, pour le
concept de la poésie qu’elle propose, est considérée comme une contribution originale à
l’esthétique (Gokak, 1973). Ces derniers ouvrages, ainsi que ses traductions, ses Lettres et
travaux de moindre ampleur ont été rassemblés et systématiquement publiés après sa
disparition, le 5 décembre 1950. Une nouvelle édition de l’ensemble de son œuvre en
30 volumes a paru en 1972 à l’occasion du centenaire de sa naissance. En 1950, peu de temps
avant sa mort (Heehs, 1989), l’Académie suédoise envisageait sa nomination au prix Nobel.
Il existe plusieurs approches possibles de l’œuvre de Sri Aurobindo, mais, comme l’a
noté Joshi (1998), la lumière qu’elle nous apporte dépend de la profondeur et de l'étendue de
la quête de chacun. C’est le questionnement sur le monde et ses perspectives, sur le rôle que
nous sommes appelés à y jouer et la manière de s’y préparer, qui nous fera mesurer la
pertinence réelle de l’œuvre de Sri Aurobindo et nous dotera des moyens indispensables pour
étudier sa pensée et la conscience supramentale qu’il a découverte et révélée au monde.
Les trois questions fondamentales qui ont orienté la quête spirituelle et la pensée
philosophique de Sri Aurobindo, et à partir desquelles il a bâti ses grandes théories, sont le
paradoxe de la vie nationale de l’Inde, le conflit qui existerait entre la spiritualité et l’action,
et l’évolution de l’homme. La façon dont il cherche à résoudre ces problèmes est liée à la
tension créative sans précédent qu’il a ressentie, dans sa propre expérience, entre la
spiritualité et la politique, tant au cours de ses années d'activité politique que pendant les 40
ans de retraite spirituelle (sadhana) qu'il a passés à Pondichéry (Chaudhuri, 1972 ;
McDermott, 1972). Les écrits d’Aurobindo apportent la force nécessaire à l’action, à la
réalisation et à la transformation qui transparaît dans la philosophie qu'il a forgée dans son
propre vécu. Il écrit : « je ne me suis senti satisfait qu'une fois l’expérience venue, cette
expérience sur laquelle j'ai plus tard fondé ma philosophie » (Heehs, 1989, p. 110). Sa
philosophie intégrale est en effet née de son yoga, et non l’inverse (Sokorin, 1960).
Deux expressions, « Perfection intégrale » et « Religion spirituelle de l’humanité »,
dominent son œuvre et résument son message. Les déclarations qui suivent témoignent
admirablement de son appel à l’intégralité et à la synthèse : « Nous, qui appartenons au jour
qui vient, sommes à l’aube d’une nouvelle ère de développement qui doit mener à une
synthèse si nouvelle et tellement plus vaste. (…) Nous n’appartenons pas aux aurores du
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passé, mais aux midis de l’avenir » (Joshi, 1998b, p. 3). Sri Aurobindo jugeait que l’éducation
avait un rôle essentiel à jouer dans la réalisation de la perfection intégrale.
L’éducation intégrale pour le développement de l’âme
Poète et homme politique avant d'être philosophe, Sri Aurobindo s’est investi pendant 45 des
78 années de sa vie dans la pratique du yoga, et a conçu une philosophie de l’affirmation
complète, affirmant la réalité du monde d’un point de vue suprême et l’importance de l’action
sociopolitique du point de vue spirituel (cf. Chaudhuri, 1972). Il était éminemment conscient
de l’importance des variantes des concepts d’homme (sa vie et son destin), de nation,
d’humanité et de vie de l’espèce humaine, qui ressortent des différentes philosophies de
l’éducation, et a développé son principe d’éducation intégrale ancrée dans « l’âme en devenir
de l’Inde, ses besoins futurs, la grandeur de son auto-création prochaine, son esprit éternel »
(Sri Aurobindo dans Sen, 1952, p. 3). Selon Sri Aurobindo (1990, p. 15), l’Inde a toujours vu
une âme dans l’homme, pris en tant qu’individu, une portion de la Divinité enveloppée dans
le mental et le corporel, une manifestation consciente du moi et de l’esprit universels dans la
nature. Dans sa philosophie de l’éducation, Sri Aurobindo (ibid., p. 9) soutient un principe
fondamental, mais souvent méconnu : « la question primordiale et vitale à laquelle nous
sommes confrontés est celle de l’esprit. Il ne s’agit pas ici d’une opposition entre la modernité
et le passé, mais entre une civilisation importée et les possibilités plus grandes de l’esprit et de
la nature de l’Inde, une opposition non pas entre le présent et le passé, mais entre le présent et
le futur ». Sri Aurobindo pensait que trois éléments devaient entrer en ligne de compte dans la
conception d’une éducation véritable et vivante : l’homme (l’individu à la fois singulier et
pareil à tous les autres), la nation ou le peuple, et l’humanité universelle.
Aussi, Sri Aurobindo concevait-il l’éducation comme l’instrument du vrai travail de
l’esprit dans le mental et le corps de l’individu et de la nation. Il pensait que l’éducation
devait, chez l’individu, faire du développement de l’âme, de ses pouvoirs et de ses
possibilités, sa principale préoccupation, et dans la nation, privilégier la préservation, le
renforcement et l’enrichissement de l’âme du pays et de sa vertu (Dharma) pour ériger
l’individu et la nation en pouvoirs de vie et élever l’esprit et l’âme de l’humanité. A aucun
moment, l’éducation ne devrait perdre de vue la plus noble aspiration de l’homme : l'éveil et
le développement de son être spirituel (ibid., p. 16), concept sous-jacent à l’éducation
intégrale authentique et vivante.
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Une éducation intégrale est conçue comme un processus de croissance organique
permettant de développer et d’intégrer les différentes facultés de l’enfant selon son
inclination, la rapidité de sa progression, les lois du développement qui lui sont propres, ses
dispositions naturelles (swabhava) et sa nature profonde (Swadharma). Sri Aurobindo ne
perçoit pas l’éducation intégrale comme la juxtaposition de disciplines, ni même comme la
juxtaposition de différentes facultés. Son idée est de favoriser le développement d’un certain
nombre de facultés, de sujets d’étude et de combinaisons dans la quête de la connaissance, des
pouvoirs, de l’harmonie et des compétences dans le travail. Ces facultés sont inculquées de
manière à ce que chaque élève et chaque enseignant puissent s’en servir pour favoriser
naturellement un développement harmonieux.
L’esprit (antahkarna) : instrument du pédagogue
Selon Sri Aurobindo, l’esprit (antahkarna), composé de quatre couches, est l'instrument au
service du pédagogue. Réservoir des impressions mentales passées, l’entrepôt de la mémoire
(citta), qu’il faut distinguer de l'acte ponctuel de mémoire, constitue l’assise sur laquelle
l’ensemble des couches repose. La mémoire passive (citta) n’a pas besoin d'être cultivée. Elle
remplit automatiquement et naturellement sa fonction ; il n’existe pas un seul objet de la
connaissance s’y rapportant, si insignifiant qu’il soit, qui ne soit enregistré, classé et
parfaitement conservé dans cet admirable réceptacle. En revanche, la mémoire active,
fonction supérieure mais moins évoluée, demande à être améliorée.
Le mental lui-même (Manas), sixième sens de la psychologie indienne, correspond à la
seconde couche. Sa fonction est de recevoir l’apparence des choses traduite sous la forme
d’images, de sons, d’odeurs, de goûts et d’impressions tactiles, et de les traduire à son tour en
sensations de pensée. Aussi le bon usage des six sens est-il important pour vérifier qu’une
mauvaise utilisation ne les a pas atrophiés ou abîmés, et que l’enfant les exerce correctement
sous la direction de l’enseignant afin que ses sens accèdent à la parfaite précision et à la fine
sensibilité dont ils sont capables. En outre, toute aide dont peuvent bénéficier les organes
moteurs doit être entièrement utilisée. Il faut, par exemple, entraîner les mains à mimer ce que
les yeux voient et ce que l’esprit ressent. Le langage doit également faire l’objet d’un
entraînement pour atteindre une parfaite expression de la connaissance que l’ensemble du
antahkarna détient.
Le véritable instrument de la pensée, qui correspond à la troisième couche, est l’intellect
(buddhi). Il organise et démêle la connaissance acquise par d’autres parties de la machine
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humaine et est pour l’éducation, de très loin, la plus importante des trois couches mentionnées
jusqu’ici. Sri Aurobindo le conçoit comme un organe composé de plusieurs groupes de
fonctions, divisibles en deux grandes classes, les fonctions et les facultés de la partie droite,
d’une part, et les fonctions et les facultés de la partie gauche, d’autre part (cf. Raina, 1979,
pour les conséquences de cette théorie dans la spécialisation hémisphérique et l’éducation).
Les facultés de la partie droite sont globales, créatrices et synthétiques ; les facultés de la partie gauche sont
critiques et analytiques. Le jugement, l’imagination, la mémoire, l’observation relèvent de la partie droite, la
comparaison et le raisonnement de la partie gauche. Les facultés critiques distinguent, comparent, classent,
généralisent, déduisent, infèrent, concluent ; elles correspondent à toutes les parties constitutives de la logique.
Les facultés de la partie gauche englobent, commandent, émettent des jugements personnels, saisissent,
retiennent et manipulent. L’intelligence de la partie droite régit la connaissance ; l’intelligence de la partie
gauche lui obéit. La partie gauche n’embrasse que le corps de la connaissance tandis que la partie droite en
pénètre l’âme. La partie gauche se borne à la vérité établie, la partie droite saisit ce qui est encore allusif et non
vérifié. Toutes deux sont indispensables pour que la raison humaine soit achevée. Ces fonctions importantes de
la machine humaine doivent toutes les deux être élevées jusqu’à leur plus haut degré d’efficacité et de précision,
si l’on ne veut pas que l’éducation de l’enfant soit imparfaite et déséquilibrée (Aurobindo, 1990, p. 24).
Sri Aurobindo ajoute qu’il existe une autre couche correspondant à une autre faculté qui, sans
être encore arrivée à pleine maturité chez l’homme, tend à se développer et à gagner en
perfection. « Les pouvoirs propres à cette strate supérieure de la connaissance nous sont
connus principalement à travers le phénomène du génie : discernement aigu, perception
intuitive de la vérité, discours parfaitement inspiré, intuition directe de la connaissance si forte
qu'elle confine souvent à la révélation, cet état où l'homme devient un prophète de la vérité.
Ces pouvoirs atteignent rarement la plénitude de leur développement, mais il est de nombreux
individus qui les possèdent de manière incomplète ou par éclairs. Cependant, le mélange
d'erreurs, de caprices et d’imagination subjective qui entrave et perturbe le fonctionnement de
ces pouvoirs les expose toujours à une méfiance tenace de la part de la raison critique des
hommes. Pourtant, il est clair que l’humanité n’aurait pas atteint l’état actuel de son évolution
sans l’aide de ces facultés. Nous touchons ici à une question que les pédagogues ne se sont
pas encore posée, à savoir : comment aborder cet élément à la fois imposant et déroutant
qu’est le génie chez l’élève ? Le professeur aux vues étroites s’applique à décourager et à
étouffer le génie mais l’enseignant à l’esprit plus ouvert lui réserve un bon accueil » (ibid.,
p. 25).
L’importance de l’éducation physique et morale
Cherchant à faire la synthèse des valeurs occidentales et orientales dans la philosophie
contemporaine de l’éducation, Sri Aurobindo insiste sur le fait qu’un corps sain est
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indispensable au développement intellectuel et spirituel de l’individu. Selon lui, l’éducation
physique vise non seulement au bon fonctionnement des différents organes du corps mais
également à l’épanouissement de la force, de l’équilibre et d’une certaine beauté.
Sri Aurobindo pense que la beauté est l’idéal que l’éducation physique se doit d’atteindre.
« Si ce à quoi nous aspirons est une perfection totale de l'être, on ne peut négliger le corps. Il
est le matériau de base, l’instrument que nous devons utiliser. […] La perfection du corps,
dans la mesure où les moyens dont nous disposons nous permettent de l’atteindre, doit être le
but ultime de la culture physique. Aussi le développement de notre conscience physique doitil toujours constituer une part considérable de notre objectif, ce pour quoi le bon
développement du corps lui-même est essentiel. Santé, force, forme physique, sont certes les
besoins primordiaux, mais la structure physique doit être la meilleure possible » (ibid., p. 6869).
Aurobindo affirme qu’une éducation de l’intellect qui ne va pas de pair avec
l’acquisition de la perfection morale et affective est préjudiciable au progrès de l’homme. Il
reconnaît qu'il est difficile d'impartir aux jeunes une formation morale appropriée au cours de
leurs années d'études scolaires et universitaires. Il fait la différence entre le cœur et l’esprit en
disant qu’instruire l’esprit n’équivaut pas à instruire le cœur. Il devine le danger que
constituent les manuels scolaires de morale utilisés dans cette optique car ils rendent
mécanique et artificielle la méditation sur les sujets élevés ; or, ce qui est mécanique et
artificiel ne sert jamais le bien. En outre, il fait remarquer avec pertinence que toute tentative
visant à assurer l’éducation morale et religieuse des jeunes garçons en leur enseignant le
contenu des manuels de morale et de religion est une entreprise vaine et illusoire, justement
parce que le cœur n’est pas l’esprit et que l’on peut instruire l’esprit sans rendre le cœur
meilleur (ibid., p. 27).
Le meilleur type de formation morale de l’être humain, selon Sri Aurobindo, consiste à
le
prédisposer
aux
émotions
justes,
aux
plus
nobles
fréquentations, aux meilleurs
comportements mentaux, émotionnels et physiques, et à l’aptitude à manifester les élans
fondamentaux de sa nature profonde par de bonnes actions (ibid., p. 27). Toute tentative
visant à imposer une certaine discipline aux enfants dans le cadre d’une éducation morale et
religieuse en les coulant dans le même moule et en leur faisant emprunter de force la voie que
l’on veut qu’ils suivent est une entreprise hypocrite et cruelle. Seul ce que l’homme admire et
accepte de lui-même fait partie de son être ; le reste n’est qu’un masque. Toutefois, négliger
l’éducation morale et religieuse revient à corrompre l’espèce humaine. C’est pourquoi, en
matière d’instruction morale, Sri Aurobindo insiste sur l’utilité de la suggestion et s’élève
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contre la coercition. « La première règle de l’enseignement moral “dit-il” est de suggérer,
d’inviter, et non d’ordonner ou d’imposer. La meilleure méthode procédant par suggestion
consiste dans l’échange, chaque jour, des expériences de chacun et dans la lecture quotidienne
des livres » (ibid., p. 29).
« Il faudrait donner à chaque garçon les moyens matériels et le courage intellectuel de
cultiver tout ce qu’il y a de meilleur dans sa nature. S’il a des défauts, de mauvaises
habitudes, de mauvais samaskaras (comportements) de l’esprit ou du corps, on devrait l’aider
à s’en débarrasser par le Rajayogic (un type de yoga), une méthode de maîtrise de soi
(samyama), qui procède par rejet et substitution » (ibid., p. 30) plutôt que le traiter durement
comme s’il s’agissait d’un délinquant. Sri Aurobindo souhaiterait qu’on les encourage à
considérer leurs mauvais penchants « non comme des péchés ou des délits mais comme les
symptômes d’une maladie guérissable qu’un effort régulier et soutenu de la volonté pourrait
effacer. Le mensonge serait alors répudié et remplacé par la vérité, la peur par le courage,
l'égoïsme par le sacrifice et l’abnégation, la malveillance par l’amour » (ibid., p. 30). De
même, on ne devrait pas rejeter les vertus incomplètes en les assimilant à des défauts.
Selon Sri Aurobindo, un enseignement religieux n’a aucune valeur « s’il n’est pas vécu.
Le recours aux différentes sortes d’entraînements et d’exercices spirituels (sadhana) constitue
la seule préparation efficace à la vie religieuse. De nombreux esprits perçoivent le rituel de la
prière, de l’hommage et de la cérémonie comme une préparation nécessaire qui favorise
considérablement le progrès spirituel pourvu qu’il ne soit pas considéré comme une fin en
soi ; s’il est rejeté, on doit lui substituer d’autres formes de méditation, de dévotion ou de
devoir religieux. A défaut de quoi l’enseignement religieux serait d’une piètre utilité. Mieux
vaudrait presque alors n’en dispenser aucun » (p. 31).
Les principes de l’enseignement et l'entraînement des sens
Dans une série d’articles écrits entre 1909 et 1910, Sri Aurobindo énonce trois principes
fondamentaux de l’enseignement. « Le principe premier d’un véritable enseignement est que
rien ne peut s’enseigner. L’enseignant n’est pas un donneur d’ordre ou un maître qui mène ses
élèves à la baguette ; il est un appui et un guide. Son devoir est de suggérer, et non
d’imposer ». Le deuxième principe est qu’« il faut s’adresser à l’esprit à mesure qu'il se
développe ». Il fait remarquer que l’idée qui consiste à couler l’esprit de l’enfant dans un
moule prescrit par les parents ou l’enseignant relève d’une superstition barbare et ignorante. Il
déclare que forcer la nature à renoncer à sa propre dharma revient à lui causer un tort
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irrémédiable, à empêcher son développement et à altérer sa perfection. Il n’existe pas d’erreur
plus grande de la part des parents ou des enseignants que de fixer à l’avance les qualités, les
aptitudes, les opinions, les vertus que l’élève cultivera plus tard, ou de décider de sa
préparation scolaire en vue d’une carrière qu’ils auront eux-mêmes arrêtée. Le troisième
principe de l’éducation, que Sri Aurobindo pose, consiste à travailler sur ce qui est proche
pour aller vers le plus lointain, à partir de ce qui est vers ce qui sera. Autrement dit,
Sri Aurobindo souligne que l’éducation doit reposer sur l’expérience directe et que même ce
qui en est éloigné ou abstrait doit s’appuyer sur le vécu. La connaissance devrait progresser à
partir de l’expérience personnelle vers une expérience plus large, plus intense et plus élevée.
Sri Aurobindo indique d’autres lignes directrices. Lorsqu’il traite des moyens dont
dispose le guru (le maître ou le guide), il écrit que «les outils de travail de ce dernier sont :
l’enseignement, l’exemple et l’influence. Pour autant, le maître avisé ne profitera pas de la
soumission passive d’un esprit réceptif pour imposer sa personne ou ses opinions. Il y
déposera seulement ce qui est fécond et sûr comme une graine qui pousse à l’intérieur sous
l’impulsion divine. Il s’efforcera d’éveiller bien plus que d’instruire. Il visera à ce que facultés
et expérience se développent par un processus naturel de libre expansion. Il proposera une
méthode à ses élèves en la présentant comme une aide, un instrument utilisable, et non
comme une formule impérative ou une règle de conduite prescrite. De même, il prendra garde
que ses méthodes ne tendent à limiter et à mécaniser son enseignement » (Sri Aurobindo,
1984, p. 60).
« Quelles doivent être la méthode et la manière de travailler de l’enseignant ? »
demande Sri Aurobindo. « Il n’a aucune méthode et les a toutes. Sa manière de travailler
consiste à organiser de manière naturelle les méthodes et les activités les plus élaborées dont
la nature soit capable. S’appliquant aux moindres détails et aux actes les plus insignifiants en
apparence avec autant de soin et de minutie qu'aux tâches les plus hautes, il porte finalement
tout à la lumière et transforme tout » (ibid., p. 55).
« Notre nature imparfaite », explique Sri Aurobindo, « contient les matériaux de notre
perfection, mais ces derniers sont incomplets, altérés, mal placés. Ils y ont été jetés sans ordre
ou dans un ordre bien imparfait. On doit patiemment porter ses matériaux à la perfection, les
purifier, les réorganiser, les remodeler et les transformer, au lieu de les taillader, de les
couper, de les tuer ou de les mutiler, ou même de les faire disparaître par la simple contrainte
et le rejet » (ibid., p. 233).
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On notera que de ces principes, subtils et complexes, on ne peut tirer aucune règle ferme
de conduite. Ils imposent de lourdes responsabilités à l’enseignant et exigent de lui les
qualités exceptionnelles d’un profond psychologue (cf. Joshi, 1975).
Pour ce qui touche au développement des sens, Sri Aurobindo vise à la perfection, rien
de moins. Selon lui, ce développement doit être une des premières préoccupations de
l’enseignant. Il fait remarquer que les deux choses que l’on attend des sens sont la précision et
la sensibilité. La qualité de cette précision et de cette sensibilité dépend d’une circulation
fluide dans les nerfs, qui acheminent l’information captée par les sens, et de la réceptivité
passive du mental, destinataire de tout ce processus. En cas d’obstruction, le remède consiste
à purifier le système nerveux. « Ce procédé rétablit inévitablement la parfaite fluidité des
circuits nerveux et, s’il est mené à bien et avec soin, peut conduire à une excellente activité
des sens. Ce procédé s’appelle nadi-suddhi (purification des nerfs) dans la discipline du
yoga » (Aurobindo, 1990, p. 37).
Les six sens qui assurent la connaissance - la vue, l’ouïe, l’odorat, le toucher, le goût et
le mental (manas : le sixième sens dans la psychologie indienne) - peuvent être développés
par le moyen des nerfs et des organes qu'ils commandent, mais le manas peut également se
perfectionner au moyen d'une discipline du yoga (le suksmadristi) ou subtile réception des
images. Aurobindo écrit (ibid., p. 38-39) :
La télépathie, la voyance, l'écoute, le pressentiment, l’art de lire dans les pensées et dans les caractères, ainsi que
de nombreuses autres découvertes modernes, sont autant de pouvoirs de l’esprit très anciens qui ont été laissés en
jachère et qui relèvent tous du manas. Jamais l'on n'a entrepris d'entraîner le sixième sens chez l'homme. Dans
les temps futurs, il aura indubitablement sa place dans la nécessaire formation préliminaire à impartir à
l’instrument humain. En attendant, rien n’empêche d’entraîner le mental à livrer une information exacte à
l’intellect de telle sorte que notre pensée puisse se construire sur des impressions absolument exactes, sinon
complètes.
Constatant que les sens sont de mauvais instruments de collecte de la connaissance,
Sri Aurobindo attribue la cause de leur inefficacité à un « usage insuffisant ». Les élèves, ditil, devraient surmonter l’inertie tamasique (manque de finesse de l’esprit et des sens) et
s’habituer à saisir les images, les sons, etc., qui les entourent, à les distinguer, à en noter la
nature, les propriétés et les sources, et à les fixer dans le citta afin que ces informations
sensorielles soient toujours prêtes à répondre aux demandes de la mémoire. L’attention, selon
lui, est l’élément primordial de la connaissance. Il la considère comme la première condition
de l’exactitude et de la fidélité de la mémoire. En plus de l’attention, Aurobindo déclare que
« la concentration sur plusieurs choses à la fois » est souvent indispensable. Il soutient qu’il
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est tout à fait possible de développer le pouvoir de concentration double, triple et multiple, qui
s’acquiert grâce à un entraînement régulier et naturel (abhasia).
En plus des facultés telles que la mémoire, le jugement, l’observation, l’esprit de
comparaison, de contraste, et d’analogie, autant d’aides indispensables à l’acquisition de la
connaissance, Sri Aurobindo met l’accent sur l’imagination qu’il considère comme l’outil le
plus important et le plus indispensable. Il la divise en trois fonctions : la formation des images
mentales ; le pouvoir de créer des pensées, des images et des imitations ou de nouvelles
combinaisons de pensées et d’images déjà existantes ; et l’appréciation par l’âme des choses,
de la beauté, du charme, de la grandeur, du sens caché, de l’émotion et de la vie spirituelle
présente dans le monde. « L’entraînement de l’imagination est aussi important que le
perfectionnement des facultés qui permettent d'observer et de comparer les objets extérieurs »
(ibid., p. 47). Ces facultés mentales, comme l’indique Aurobindo, devraient d’abord s’exercer
sur les objets puis sur les mots et les idées … en toute simplicité, en s'appuyant sur la curiosité
et l’intérêt, en évitant les enseignements figés et l'apprentissage de règles par cœur.
Sri Aurobindo se montre critique vis-à-vis de la pratique de l’enseignement morcelé
actuellement en usage dans le système éducatif et déclare que l’on doit le jeter aux oubliettes :
On enseigne une matière à petites doses, parallèlement à toute une série d’autres sujets d’études, et voilà que le
garçon assimile mal en sept ans ce qu'il aurait pu apprendre en une seule année. L’enfant quitte alors l’école mal
armé, doté de bribes imparfaites de la connaissance humaine dont il ne maîtrise aucun des grands domaines
(ibid., p. 32).
Sri Aurobindo dit qu'un tel système éducatif « s'emploie à répandre la pratique de
l’enseignement morcelé au début et au milieu des études pour le remplacer subitement par une
impressionnante spécialisation dans l’enseignement supérieur. Une telle approche revient à
faire reposer un triangle sur son sommet en espérant qu’il tiendra en équilibre » (ibid., p. 32).
Aussi Sri Aurobindo reconnaît-il un certain intérêt à l'ancien système éducatif qu’il juge plus
rationnel que le moderne. « S’il ne transmettait pas des informations aussi variées, le vieux
système échafaudait une culture plus profonde, plus noble et beaucoup plus réelle. C’est le
principe pervers de l’enseignement morcelé qui rend compte, pour une grande part, du
caractère superficiel, de la légèreté discursive et de la mutabilité capricieuse de l’esprit
moderne moyen » (ibid., p.32).
Cependant, Sri Aurobindo dit clairement que nous ne devons pas nous attacher à l’un
des deux systèmes, ancien ou nouveau, mais qu'il faut choisir les moyens les plus rapides et
les plus efficaces de maîtriser la connaissance. Selon lui, chaque enfant est un être curieux, un
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investigateur, un analyste, un anatomiste impitoyable. Faisons donc appel à ces qualités qui
sont en lui et offrons-lui la possibilité d’acquérir, sans qu’il s’en aperçoive, le bon
tempérament et la connaissance fondamentale nécessaire au scientifique. Tout enfant a une
insatiable curiosité intellectuelle et le goût de la quête métaphysique. Utilisons ces
dispositions pour lui faire lentement comprendre le monde et se connaître lui-même. Chaque
enfant a le don d’imitation et un certain pouvoir d’imagination. Mettons-les à profit pour lui
donner les bases du talent artistique (ibid., p. 34-35). C’est en laissant la nature travailler que
nous profitons des dons qu’elle nous a accordés. Sri Aurobindo souligne que l’enseignant doit
d’abord prêter attention au support et aux outils de son enseignement. Tant que ces derniers
ne sont pas au point, la multiplication des sujets d’étude dans le cadre d’une instruction
normale n’est qu’une perte de temps et d’énergie. «La langue maternelle, dit-il, est le support
normal de l’éducation. Aussi l’enfant devrait-il consacrer d’abord son énergie à la maîtriser
parfaitement » (ibid., p. 34). En ce qui concerne l’enseignement de la langue, Sri Aurobindo
prône l’initiation de l’enfant à de nombreuses langues une fois que ses outils mentaux seront
suffisamment développés pour qu'il puisse acquérir la connaissance d’une langue facilement
et rapidement, et non au moment où il ne pourra comprendre ce qu’on lui enseigne que
partiellement et ne le maîtrisera que laborieusement et imparfaitement. Sri Aurobindo juge
que l’apprentissage d’une langue impose à l’esprit une discipline utile, notamment
l’apprentissage de la langue maternelle qui, selon lui, prépare à l’apprentissage d’une autre
langue. Il soutient que l’aisance acquise dans la pratique de sa propre langue rend
l’apprentissage d’autres plus facile.
L’éducation psychique et spirituelle
Sri Aurobindo parle également de l’éducation mentale et psychique mais ce qui l'intéresse
vraiment est d'un ordre plus élevé. C'est ce qu'il dénomme l’éducation spirituelle ou
supramentale. Elle n’implique pas l’annihilation de l’individu, mais son enrichissement grâce
au contact avec l’Absolu. L'ordre spirituel transcende l'ordre mental et psychique. La
justification qu’il donne de l’éducation psychique et spirituelle repose sur trois éléments
essentiels : a) l’éducation doit proposer à l’individu l’exploration systématique de quelque
chose qui est au plus profond de la complexité psychologique de la conscience humaine ; b) la
question la plus importante relative à l’existence humaine porte sur son but, sur le but de la
vie de chacun d’entre nous, et sur sa position et son rôle dans la société. Le meilleur moyen de
répondre à cette question est d’explorer les domaines psychiques et spirituels et d’être capable
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de développer des facultés psychiques et spirituelles de la connaissance ; c) la crise
contemporaine que traverse l’humanité a surgi du déséquilibre entre les progrès matériels et
un progrès spirituel insuffisant. Aussi faudrait-il favoriser le développement de la conscience
psychique et spirituelle si l’on veut résoudre cette crise. Sri Aurobindo tente de faire la
distinction entre le psychique et le spirituel de la manière suivante : au niveau psychique,
l’individu ressent une impression de continuité ininterrompue dans le monde des formes et
perçoit la vie comme une fonction immortelle qui s’étend sur une durée éternelle et dans un
espace sans limite. La conscience spirituelle dépasse le temps et l’espace et s’identifie à
l’infini et à l’éternel. Sri Aurobindo exprime la même idée lorsqu’il dit qu’il faut, dans la vie
psychique, rejeter l’égoïsme alors que, dans la vie spirituelle, le moi n’intervient pas.
Sri Aurobindo insiste sur le fait que l’objectif de l’éducation intégrale n’est pas l’annihilation
de l’individu mais sa transformation. Lorsque l’homme accède à pareille éducation, il se
produit une totale transformation de son essence. Sri Aurobindo l’appelle l’éducation
supramentale car elle s’exercera, non seulement sur la conscience des individus, mais
également sur leur substance même, voire sur l’environnement physique dans lequel ils
vivent.
Sri Aurobindo et la «Mère » ont lancé une expérience sans précédent dans le monde de
l’éducation (Joshi, 1998c) avec l’ouverture, en 1943, à l'Ashram Sri Aurobindo à Pondichéry
d’une école qui ne comptait guère que 20 élèves. Elle s'est vite développée et, en 1951, le
nombre des élèves ayant augmenté, il a fallu organiser des études d’enseignement supérieur et
l’école est devenue le Sri Aurobindo International University Centre. Le Centre a été conçu
comme l’un des moyens les plus efficaces pour préparer l’humanité à un avenir marqué par la
manifestation d’une lumière et d’un pouvoir nouveaux : la lumière et le pouvoir du
supramental. L'expérience a été lancée pour préparer l’élite de l’humanité à travailler à
l’unification progressive de l'espèce tout en incarnant la nouvelle force arrivant sur terre pour
la transformer. Le Centre a mené un programme de recherche expérimentale sous la conduite
directe de la « Mère » et est devenu un laboratoire de l’éducation de demain (cf. Tewari,
1998, pour de plus amples informations).
La doctrine de l’éducation de Sri Aurobindo est étroitement liée à la vision futuriste du
destin de l’humanité qu'il exprime en ces termes : « Les hommes devraient être les enfants du
passé, les détenteurs du présent et les créateurs de l’avenir. Le passé est notre assise, le
présent notre matériau et l’avenir notre objectif et notre sommet » (Aurobindo, 1990, p.12).
L’esprit mystique visionnaire de Sri Aurobindo (1971) a forgé un concept de la vie sans
équivalent au monde, en ce qu'il la voyait comme une riche occasion à nous généreusement
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offerte pour découvrir, comprendre et exprimer le Divin. De cette vision créatrice est née
l'extraordinaire aventure du système éducatif qu'il a imaginé pour favoriser l’éclosion des
potentialités latentes conformément à son concept de la vie. Pour Sri Aurobindo, le destin de
l’être humain est de s'élever vers le supramental, vers la contemplation de la Divinité, objectif
vers lequel toute la force et la souplesse de sa philosophie de l’éducation sont tendues.
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