Le management des connaissances comme atout stratégique

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Le management des connaissances comme atout stratégique
© ISO Management Systems, www.iso.org/ims
DOSSIER
Management
des connaissances
Le management des
connaissances comme atout
stratégique de l’entreprise
Reconnaissant l’importance croissante du management des connaissances et la multiplicité des façons de comprendre et d’adopter le concept dans les secteurs public et privé,
l’organisme australien de normalisation, Standards Australia, a engagé, en 2000, un processus de consultation en vue de produire, sur le sujet du management des connaissances,
d’abord un manuel puis une norme, qui sera publiée cette année.
D
semble faire écho avec tout un ensemble
ans
le
monde
incertain
de solutions holistiques, flexibles et
d’aujourd’hui en perpétuelle
diversifiées, avancées pour résoudre les
évolution, la seule constante
problèmes de management complexes
c’est le changement. Dans ces conditions,
que rencontrent la plupart des organila responsabilité de gérer une affaire ou
sations.
une entreprise et de trouver les moyens
d’assurer son succès est un défi majeur.
Dans ce contexte, pour relever
ce défi, la fin du 20e siècle a assisté à
Interdisciplinarité
l’émergence d’un éventail d’outils et de
Or, si la complexité de ces problèmes
techniques de management, tels que le
se prête mal à une définition simple, le
management total de la qualité (TQM),
management des connaissances ne se
la reconfiguration des processus (RP),
limite pas à un ensemble de principes
les indicateurs clés de performance
ou de processus unanimement acceptés.
(ICP) et les tableaux de bords équilibrés.
Pour compliquer les choses, le manageSi chacune de ces approches a sa place,
ment des connaissances est clairement
aucune ne constitue une recette de sucun domaine interdisciplinaire souvent
cès universellement acceptée.
interfonctionnel dans
Tout récemment,
pratique. Il n’y a
la complexité et les
Le concept de management la
guère de consensus
pressions de l’enviquant à savoir si le
ronnement moderne,
des connaissances apparu
management des conainsi que les progrès
naissances est un sujet
des technologies de
dans le contexte
d’ordre technique, un
l’information et de la
des entreprises et des
domaine des ressourcommunication (TIC)
ces humaines, une
ont dynamisé l’intérêt
cercles gouvernementaux
question de procédure
du savoir en tant que
ou une composante du
ressource et/ou atout
a rapidement mobilisé
management stratégistratégique. Le conque. La perspective la
cept de management
l’imagination
plus récente va dans
des connaissances aple sens d’un mélange
paru dans le contexte
ou d’une combinaison de ces différents
des entreprises et des cercles gouverneaspects.
mentaux a rapidement mobilisé l’imagiEn 2000, Standards Australia a
nation.
reconnu l’importance du management
Depuis la fin du 20e siècle et maindes connaissances, avec l’émergence,
tenant au nouveau millénaire, le manadans quelques organisations, d’éléments
gement des connaissances est un sujet
de compréhension et d’expertise en
en vogue dans nombre de conférences,
progression dans le domaine alors que
revues, publications et séminaires. Il
PAR
H ELEN H ASAN
ET
V ICTOR L EE
Mme Helen Hasan (à gauche)
est professeur associé,
systèmes d’information,
School of Economics and
Information Systems,
Faculty of Commerce,
University of Wollongong,
NSW, et membre du Comité
australien de normalisation
sur le management des
connaissances.
E-mail [email protected]
M. Victor E.J. Lee (à droite)
est responsable du On
Demand Workplace Australia
/ New Zealand, Services
de consultation d’IBM
et membre du Comité
australien de normalisation
sur le management des
connaissances.
E-mail [email protected]
ISO Management Systems – mars-avril 2004
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Management
des connaissances
1) La norme AS 5037 (Int) 2003
Knowledge Management (Management
des connaissances), prix USD 50,69
version papier et USD 45,76 fichier
pdf, peut être commandée au magasin
en ligne de Standards Australia :
www.standards.com.au
Tél. + 61 2 8206 6010.
Fax + 61 2 8206 6020.
E-mail [email protected]
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dans de nombreuses autres régnait une
tion des connaissances. Cette approche
confusion toujours plus grande. Stanimplique la conception, la revue et la
dards Australia a entrepris un processus
mise en œuvre de processus sociaux et
consultatif pour produire un manuel sur
technologiques permettant d’améliorer
le sujet du management des connaissanl’application des connaissances, dans
ces dans le but de clarifier et de valoriser
l’intérêt collectif des parties prenantes.
le domaine en Australie.
Cette définition ainsi que d’autres
En 2001, Standards Australia publiait
(voir, par exemple, le site www.brint.com),
HB 275 Knowledge Management — a fraélargit la perspective du management des
mework for succeeding in the knowledge
connaissances, qui intéresse les organisaera – (le management des connaissances
tions découragées par les doubles emplois
– un cadre pour réussir à l’ère du savoir).
inutiles, le manque de partage et de transCe manuel bien accueilli offrait un cadre
fert de connaissance, la sous-utilisation des
permettant de mieux comprendre le
ressources et une faible motivation. La
management des connaissances. Il fallait
première rencontre avec le management
toutefois trouver encore un degré de
des connaissances suscite cependant souconsensus et de transparence supérieur
vent plus de questions que de réponses :
à ce que pouvait offrir un manuel.
que sont ces connaissances, où peut-on
Convaincu qu’un document d’orienles trouver, comment peut-on les gérer et
tation ayant un niveau de crédibilité plus
pourquoi, qui doit en être responsable ?
élevé apporterait une contribution supérieure, Standards Australia créait en 2001 un
Intégration
comité chargé d’élaborer une norme dans le
domaine du management des connaissances.
Il semble qu’il y ait deux perceptions
différentes des connaissances : la première
Ce comité, constitué de représentations de
considère les connaissances comme un
différentes organisations, notamment des
objet qui peut être capitalisé, stocké et
institutions universitaires, professionnelles,
utilisé et la seconde les envisage comme
des organismes industriels et des organes
un potentiel d’action intégré dans le pergouvernementaux, avait pour vocation
sonnel. La connaissance organisationnelle
de refléter la diversité et le caractère
peut être perçue comme intégrée à la commultidisciplinaire propre au domaine du
munauté, elle est alors considérée comme
management des connaissances.
un bien public généré,
La norme intérimaintenu et échangé
maire AS 5037 (Int)1)
socialement au sein des
fut diffusée en février
Le management
groupes ou des commu2003, en même temps
des connaissances est
qu’était lancé un pronautés (par exemple au
cessus d’enquête visant
sein des communautés
clairement un domaine
à recueillir l’avis du
de pratique).
public sur le document.
Les
métaphores
interdisciplinaire souvent
« mémoire organisaL’empressement
des
tionnelle »,
« savoir
cercles spécialisés dans
interfonctionnel dans
organisationnel »,
le management des
« travail(leur)
du
connaissances à faire
la pratique
savoir », etc. devienconnaître leurs idées
nent des expressions
et points de vue fut un
courantes. Le management des connaissigne encourageant et les observations
sances peut aussi être perçu comme le
reçues sont maintenant intégrées dans la
tout dernier élément d’une longue série
norme finale qui sera publiée en 2004.
d’applications des technologies de l’inLa norme, qui est un document descriptif
formation et des communications destiplus que prescriptif, s’attache à décrire les
nées à mettre à la disposition des orgaconcepts clés du management des connaisnisations des solutions pour l’entreprise,
sances et fournit un modèle générique que
même si la question de savoir comment
les individus et les organisations peuvent
les organisations peuvent utiliser les TIC
adapter à leur contexte.
pour le management des connaissances
En raison de la diversité du sujet,
est beaucoup plus difficile qu’elle en a
il existe plusieurs définitions du manal’air. Les concepteurs de systèmes ne
gement des connaissances et, après de
disposent pas de modèle agréé en ce
longues discussions, le comité chargé de
qui concerne le caractère intangible et
la norme a choisi la définition suivante :
complexe du travail que les « systèmes
Management des connaissances :
de management des connaissances » sont
Approche multidisciplinaire visant des
supposés appuyer.
objectifs organisationnels par l’exploita-
ISO Management Systems – mars-avril 2004
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Le management des connaissances
et l’application de ses principes et
pratiques peut être utile à toutes les
organisations, groupe, équipe, service,
département, communauté, gouvernement, institution de charité, club de
sport et autres collectivités ou réseau à
but lucratif ou non. Chaque organisation
a son contexte, son histoire, sa culture,
ses ressources, ses connaissances, ses
stratégies et ses performances propres.
La mise en place d’un management des
connaissances implique d’entreprendre
la démarche de combiner ces aspects et
de construire une capacité et une culture
organisationnelle à long terme.
La mise en avant des initiatives, des
projets et des systèmes fondés sur le
management des connaissances montre
à quel point l’on reconnaît largement que
des changements fondamentaux interviennent dans la façon dont les entreprises
fonctionnent. Les organisations cherchent
à se démarquer de la concurrence par le
management, le partage et la création de
connaissances (ou atouts), et de nouveaux
outils et techniques sont développés
dans le but spécifique d’appliquer et de
déployer ces atouts.
Les organisations qui jugent la
norme sur le management des connaissances utile sont celles qui adoptent la
perspective du travail reposant sur les
savoirs, c’est-à-dire la quasi-totalité des
entreprises en Australie. Par exemple,
dans les entreprises, les producteurs
de produits primaires utilisent les connaissances pour ajouter de la valeur à
leurs produits, les fabricants utilisent les
connaissances pour améliorer la qualité
et rendre leurs processus plus efficaces
et les entreprises de services utilisent les
connaissances pour contribuer à trouver,
pour leurs services, des débouchés sur
de nouveaux marchés. La norme sera
également utile pour des organisations
du secteur public et des collectivités.
Unicité
La façon d’utiliser et de créer les
connaissances est propre à chaque
organisation et, en définitive, à chaque
individu. Le management des connaissances est une approche qui met en
œuvre et optimalise le savoir-faire pour
atteindre des résultats stratégiques.
Le principe fondamental de la norme
intérimaire australienne sur le management des connaissances est que les
éléments de la connaissance (personnel,
processus, technologie et contenu) et les
éléments de développement (l’arsenal
Management
des connaissances
des outils individuels, des techniques et
des approches utilisées par les praticiens
pour mettre en œuvre les initiatives de
management des connaissances) doivent
être adaptés au contexte, aux éléments
moteurs et aux stratégies.
L’étape suivante serait peut-être
de dire que les activités du savoir ne
devraient pas être simplement adaptées
à l’objectif stratégique, mais qu’elles
devraient en être une composante intégrale. De cette façon, la connaissance est
« gérée » et elle nourrit la stratégie. Un
autre concept que nous prenons également en compte est celui de la disponibilité ou de la maturité de l’organisation et
de ses relations avec la mise en œuvre du
management des connaissances.
L’itinéraire du management des
connaissances peut être un itinéraire de
confrontation pour de nombreuses organisations, car il conduit souvent à interrompre des pratiques et des procédures
existantes et le changement est rarement
géré efficacement par tous ceux qui sont
concernés au sein des entreprises. Il
ne suffit pas de se concentrer sur les
ressources que représentent les savoirs.
D’autres pratiques de management du
changement intégrant le leadership et
le recours aux technologies sont nécessaires pour développer des capacités de
connaissances dans l’organisation toute
entière.
La norme intérimaire a été diffusée
sur le marché pour que des personnes et
des organisations l’utilisent et la testent
afin d’en valider (ou d’en contester) les
principes et de permettre à un cercle
élargi d’apprendre ensemble comment
faire évoluer la norme pour rester en
phase avec les changements en cours.
Utiliser cette norme intérimaire facilitera la démarche dans le domaine pour
toutes les organisations.
L’applicabilité de la norme dépendra néanmoins du contexte de chaque
organisation et de son niveau de
progression dans la démarche. Le but,
pour toute organisation, est de disposer de personnels formés et qualifiés
dans les savoirs pertinents et d’établir
de puissants réseaux fiables entre les
membres pour le partage et la création
des savoirs. Quoi qu’il en soit, le fait de
développer une capacité et une culture
organisationnelles fortes requiert des
approches différentes selon le contexte,
les talents et l’ampleur des réseaux de
chaque organisation.
Le management des
connaissances est
une approche qui met
en œuvre et optimalise
le savoir-faire pour
atteindre des résultats
stratégiques
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