Téléchargement - Antoine Cozin

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Téléchargement - Antoine Cozin
L’homme qui savait qu’il allait mourir
« Des putes à 9 heures du matin, et pourquoi pas baiser un cendrier ? ». C’est
ce qu’il s’est dit en arrivant Rue Saint-Denis. Des putes. Il y avait quelques
putes postées là, au seuil de sombres cages d’escaliers, mélangées aux graffitis
et aux traces de pisses contre les murs. Elles portaient des bas-résilles en
lambeaux, elles-mêmes semblaient en lambeaux. Quand elles vous sifflaient à
votre passage, ça faisait le bruit navrant d’une autre époque ; quelque-chose
d’une vieille camionnette de gitan, de poissonnières de fin de marché. Elles
étaient finies, terminées, anéanties, et si elles étaient encore là à 9 heures du
matin c’est seulement parce que personne n’en avait voulu.
Lui aussi travaille la nuit. Dans un hôtel. Travailler la nuit ça vous bute un
homme, quelqu’un lui avait un jour dit. « Mais je vais très bien, moi, je vais très
très bien même ! Un coq en pâte, ma parole ! Verdi devait ressentir plus ou
moins cela, le jour qui lui a pris de composer La Traviata. ».
On venait de lui annoncer qu’il allait mourir. Un peu insolite comme réveil,
pas vrai ?
Mais ce n’était pas à proprement parler son réveil, puisqu’il travaillait la nuit,
à l’hôtel. Pendant que les autres dormaient. Lui pas. Il dansait sur le parquet, des
entrechats ou la toupie, parfois même la double toupie ; il boxait contre un
adversaire imaginaire, et ça se rendait coup pour coup, crochet pour crochet, les
mâchoires craquaient et les dents sautaient comme des petites culottes
nymphomanes ; il mélangeait chocolat-chaud et café, ou bien fromage de chèvre
et confiture à l’abricot ; ou bien il écrivait quelque-chose de si fou qu’il était tout
bonnement impossible que ce fût un jour édité ; bref, il faisait tout ce qui peut se
faire la nuit tout seul dans un hôtel, sauf dormir – ou travailler.
Si ses souvenirs étaient bons, ç’avait plutôt été une bonne nuit que cette nuitlà. Il avait bu dix-neuf cafés et mangé deux pains en entiers. Ensuite il avait
fermé l’hôtel à clé et était allé faire une ballade dans Paris. Tout ça l’avait mis
en grande forme de bon matin.
Son patron est arrivé, chemise à la cool et tête de con, une vague grimace leur
servit pour se saluer et d’un bref clignement d’yeux sans importance, ils se sont
détestés. Aucune importance. Des tonnes de gens vivaient ainsi. Parfois même
au sein d’un couple, ou d’une famille. Les jours continuaient de filer et rare
n’étaient ceux qui créaient de nouvelles vocations de meurtriers.
Comme il enfilait son chapeau-tulipe, son patron lui a rappelé le rendez-vous
pour la visite médicale. Sans pouvoir s’empêcher de faire en passant une petite
réflexion à propos des retards et autres absences dont il était coutumier. Lui
avait incliné son chapeau-tulipe comme il avait vu les faire les cow-boys dans
les films poussiéreux, puis incliné son menton de la même sorte, sa façon de dire
OUAIS. COMPRIS, MEC. Le chapeau-tulipe étincelant. Son patron l’avait
dévisagé une dernière fois, l’estomac vaguement levé, puis s’en était allé à son
bureau.
Dans la salle d’attente, il avait sagement patienté en lisant les petits dépliants
qu’on laissait à disposition. On y parlait du cancer du côlon, des gestes qui
sauvent de la fibrillation auriculaire, du tabac, des drogues expliquées aux
parents… Qu’est-ce que c’était rassurant tous ces petits dépliants ! La société
prenait vraiment bien soin de vous. Oui – on pouvait dire tout ce qu’on voudrait
sur les politiciens, c’était tout de même des gens qui travaillaient à votre
bonheur. La société était bonne, le café gratuit était bon, même la secrétaire qui
gérait les dossiers était bonne.
Lui était tout à la lecture d’un de ces adorables catalogues, celui qui parlait du
seminome. C’était frémissant, rempli d’anecdotes anatomiques. Il adorait ça. On
l’a appelé pour commencer la consultation et pendant un bref instant il a été un
peu déçu – d’avoir été interrompu en pleine lecture. Le cancer des testicules.
Une magnifique manière de quitter ce monde, lui semblait-il.
D’abord on l’avait envoyé aux toilettes. Faites pipi dans le gobelet, merci.
Tenez, je suis désolé j’avais plus grand-chose – mais non, mais non, c’est très
bien. Si j’avais su qu’on m’eût demandé un peu d’art, je me serais économisé
cette nuit. C’est très bien ne vous inquiétez pas, vous vous en êtes très bien sorti
– vous êtes un grand garçon. Merci madame – cependant qu’elle l’amenait dans
une autre salle. Maintenant il y avait des tests visuels. Il fallait regarder dans un
viseur et appuyer sur un gros bouton pour dire OUI ou NON, selon ce qu’on
voyait. Au début, il respectait les règles et puis il n’avait pas trouvé ça très
divertissant – alors il répondait selon l’humeur de l’instant. L’idée qu’il pût rater
des tests important pour la suite de sa vie rajoutait une légère touche de fantaisie
à la chose.
Le test visuel se termina dans un artistique concerto de lumignons rouges.
La médecin avait plutôt un joli visage. Elle n’était pas ce que la plupart des
gens auraient qualifié de jolie femme – mais bien souvent la plupart des gens ont
tort, en plus d’avoir de très mauvais goûts. Elle était jolie ; jolie parce qu’elle
souriait dès 8h30 du matin ; jolie parce que ses yeux étaient vivants, parce qu’ils
vous regardaient ; elle était jolie comme une fleur ou une montre, comme à peu
près toute chose en ce bas-monde lorsqu’on a passé une nuit à rester debout. Ses
tâches de rousseur. Ça, ça lui avait plu. Ça lui donnait l’air gaie, comme
saupoudrée de pollen. Elle était fraîche, humaine – il lui sembla même qu’elle
lui avait frôlé le prépuce, en prenant sa tension. Mais pouvait pas vraiment dire.
On peut jamais vraiment dire, lorsque l’on n’a pas dormi de la nuit. Tout est flou
à cette heure de l’insomnie, intolérablement probable.
Elle consultait ses résultats. C’était une petite fiche verte, sérieuse. Les
sourcils étaient froncés. Sans doute une mauvaise note.
« Monsieur Cozinsky ?
— Lui-Même.
— Z’allez mourir.
— C’est… c’est grave, docteur ?
— Plutôt, oui. Non : disons que c’est emmerdant.
— Ah… merde alors.
— J’vous donne pas deux heures.
— Comment vous y seriez-vous prise, si vous aviez pu ?
— J’vous aurais taillé une pipe, une looooooooongue pipe. Avec la langue et
les petits bruits de succion… Mais j’ai un bridge tout neuf.
— Ah… je comprends. Merci docteur…
— Cozinsky ?
— Oui ?
— Je l’aurais fait… je veux dire, sans cette histoire de bridge. Je l’aurais fait.
— Ce n’est pas grave. Je ne suis pas un fameux fumeur, de toute manière. »
En sortant de là, mon vieux ! Qu’est-ce qu’il se sentait bien ! L’air frais le
soleil l’odeur d’une pâtisserie habile. C’est bon de savoir qu’on va mourir, de
temps en temps. Oui oui oui ! Ça donne une nouvelle petite saveur à toutes les
petites choses, voilà : c’est comme si ces petites choses, c’était la première fois
que vous les voyiez. La peau morte mais l’œil neuf, sûrement ! Ces petites
choses ici-et-là, elles étaient en fait pas petites du tout, il s’est dit. Les petites
choses étaient en fait immenses ! C’est fou. Puisque je vous le dis.
Comme ça, il s’est mis à fredonner un petit de de Verdi, La donna e mobile.
Je vous jure, il sautillait même. Foutu Ténor napolitain.
Ainsi les putes de 9 heures du matin. Rue Saint-Denis, il y était passé pas mal
de fois – mais jamais le matin. Et bien figurez-vous que même à neuf heures du
matin, il y a des putes, Rue Saint-Denis. Mais ce ne sont pas les mêmes que la
nuit. La nuit, ce sont de grosses africaines qui ressemblent à des œufs
d’anophèle. Le matin par contre, ce sont des vieilles européennes – ou
européniennes, si vous me permettez le jeu de mot. Elles étaient vieilles, vieilles
et moches ! Pas du tout l’espèce de petit-déjeuner qu’on aurait envie de prendre.
Sauf peut-être pour dégueuler une sacrée gueule de bois.
On pourrait se dire : bon il va mourir, alors qu’à cela ne tienne ! il va aller en
s’en taper une. Mais ce serait pas du tout original. Tout le monde avant de
mourir il se dit qu’il fera l’amour une dernière fois. Pas lui. Il trouvait affreux
comme dernier souvenir d’ici-bas – un vagin qui clapote. Beurk beurk beurk !
Ou bien imaginons qu’il vous vient une panne – vous êtes sur le point de crever,
et vous êtes là, pathétique et liquide, à essayer de battre des ailes. Non vraiment,
c’est ridicule. Aux putes, il leur a seulement sourit. Quel beau sourire avait-il.
On aurait pu en faire des boîtes de chocolat blanc.
Il est rentré dans la première boutique et c’était une boutique qui faisait des
jus de fruit. Il devait rayonner, puisque le jutier (mais ce mot existe-t-il ? si le
bonhomme existe, alors pourquoi pas le mot ?) lui fait immédiatement goûter un
petit échantillon gratos. Fraise banane pomme et gingembre. C’était savoureux.
Il en a commandé un maxi format. Beaucoup de gingembre ? Beaucoup de
gingembre – j’ai une femme à aimer, une femme grande comme une journée. Le
jutier hoche du menton, pour faire semblant qu’il a pigé. Lui ne prend pas la
peine de payer. Il rayonnait, je vous dis.
Il fit le même coup à la pâtisserie ainsi qu’au tabac. Désormais, il avait donc
un grand jus frais, un cigarillo et un chausson aux pommes exquis – de vrais
morceaux de pommes à l’intérieur, recouverts d’un léger glaçage savoureux. Il
ne payait, rien, nulle part. Il rayonnait, les gens étaient fous de lui. Bon Dieu, si
ça c’est mourir, alors je veux bien mourir tous les jours ! il s’est dit.
Il fumait un coup, puis il arrachait un morceau du chausson, puis il rinçait sa
gorge avec le velours. Et il recommençait. Il savait plus où donner de l’amour.
Y’avait une bouche de métro. Le soleil donnait plein face. Il a escaladé la
barrière et s’est improvisé un petit espace pour pique-niquer là-dessus. Toujours
judicieux de s’aménager un espace, s’est-il fait la remarque en s’asseyant. Il a
regardé autour de lui et s’est attendu à ce qu’une vieille obèse à la peau cinabre
vienne lui hurler dessus DE DESCENDRE IMMÉDIATEMMENT DE LÀ !!!!!
COZINSKY SACRÉ FILS DE PUTE DESCENDEZ DE LÀ SI VOUS
VOULEZ PAS PASSER LES DIX PROCHAINS WEEK-ENDS DE L’ANNÉE
EN RETENUE !!! Et puis il s’est rappelé que l’école, c’était fini depuis
longtemps. De soulagement il a soupiré. C’est fou comment ces saloperies
s’étaient incrustées profondément dans son crâne. À croire que c’était dans ce
genre d’endroit, qu’on commençait à vous tuer l’homme. C’est qu’un putain
d’abattoir, le monde, il s’est soudain dit, en regardant la mine des gens qui
descendaient au métro. Ces gens-là feraient mieux eux aussi de mourir dans
deux heures. Rien de pire que de mourir quatre-vingts années.
Bon, il se fume son cigarillo et regarde les culs de femmes monter les
marches. Leurs cheveux ondulaient au soleil, on aurait dit de la harpe, mais
vraiment, vraiment bien jouée. Aucune fausse note – tout de même, y avait eu
un sacré paquet de types qui avaient eu de l’inspiration, au moment d’éjaculer.
Une femme pourrait très bien être moche, mais elle est jolie. C’est étrange, il
s’est dit. Le cigarillo, le goût qu’il lui laissait en bouche, ça lui rappelait les
baisers d’une femme qu’il avait connue ; ses baisers vous envahissaient, ils
escaladaient vos lèvres jusqu’à la trachée, jusqu’aux poumons, partout. C’était
un bataillon d’hussards armés de roses. Cette sacrée fumeuse ; il avait fini dans
son cendrier. Ça n’avait aucune importance.
Il regardait les femmes monter les marcher et onduler des hanches et c’est là
qu’il a compris : pour être amoureux d’une femme, être amoureux pour de bon,
faudrait seulement la voir jamais que de dos. C’est ce qu’il s’est dit.
Tant de gonzesses, c’était vertigineux. D’un coup il a imaginé un grand
champ de tournesols, avec des verges à la place des tournesols.
Quand on ne dort pas de la nuit, on devient philosophe à sa manière. « Est-ce
que l’impossible peut exister ??? » « Comment peut-on savoir qu’une chose est
infinie si jamais personne n’est parvenu à la mesurer ? » « Et les saumons, ontils une âme les saumons ? La conservent-ils lorsqu’on les consomme à la
papillote ? L’enfer des saumons c’est quoi, c’est une bouche de clochard ??? »
« Ouais… Dieu pourrait me poser une colle, probab que j’y répondrai sans
sourciller… Hé… mais p’têtre bien que c’est moi Dieu… Et pourquoi pas ?
Pourquoi faudrait toujours que ça soit quelqu’un d’autre ? ». Vraiment, il était
vertigineux, intouchable. Certains le dévisageaient en passant. Il leur souriait, ils
lui souriaient. La vie était belle au royaume du sourire niais.
Une femme s’approche de lui. Je peux avoir un autographe s’il vous plait ?
D’accord, d’accord, mais par contre je ne signe pas. Un homme lui demande ses
allumettes. Crack ! Lui sourit. Sont splendides, ces allumettes. Un autre lui
demande où peut-il trouver la crème qui lui donne si ce joli teint ? Savon
d’ânesse, mon vieux – on fait pas d’omelette sans casser les œufs. Un autre
encore lui demande s’il peut embrasser ses pointes de chaussure – seulement les
pointes, vous comprenez, je ne mérite pas votre tendon. Et ainsi de suite. Mieux
qu’un pot de confiture.
Il continue sa route, c’est une hirondelle, un triomphe incontestable, partout
on l’acclame. Il serre la main aux passants – demande des nouvelles du pays, et
comment ça va là-bas ? Toujours du poil au menton ? Ah-ah, sacré toi ! Tu ne
changeras donc jamais ? Certains s’interrogent. Il est fou, certainement, mais
est-il dangereux ? Lui ne se pose plus de questions. Deux heures, c’est court, il
aurait à peine le temps d’atterrir à Nice s’il le voulait – avec ces retards
inévitables, et puis le trafic aérien est si capricieux, et si son bagage ne rentrait
pas en soute ? Non, il n’aurait jamais le temps d’arriver à Nice. Il mourrait donc
sa jamais n’avoir vu la Promenade des Anglais. C’est bien la seule chose qui est
triste dans la mort, il se dit : de pas avoir tout vu. Y’en a des choses à voir !
D’abord : les strings à Copacabana, évidemment, en buvant le coprah à même
l’écorce ; y’a l’Orénoque et le Nil, dont on dit le plus grand bien ; y’a Venise,
c’est fantastique Venise, de l’eau partout, partout, comme si le ciel avait une
descente d’organe ; y’a l’Afghanistan, excellent climat là-bas, ça vous fait des
merveille pour l’eczéma ; Bombay et Saint-Pétersbourg ; et puis le Pôle Nord,
pour vérifier s’il y fait vraiment si froid que ça – oui oui oui, ça en fait des
choses à voir !
Mourir essoré, sans plus avoir d’amour à donner, voilà sans doute quelquechose de triste, s’est-il dit. Un cul passe ; vous reprend soudain l’envie d’aimer –
le coup de foudre est un coup de déhanché au milieu d’une lourde après-midi
d’été. Le cœur humain. Bordel.
JE T’AIME, TU COMPRENDS ??? JE T’AIME MARIONS-NOUS SANS
PLUS ATTENDRE, EMBRASSONS-NOUS PUIS JETONS-NOUS DANS LA
SEINE IMMÉDIATEMENT POUR NE RIEN GÂCHER. LA MORT SERA
NOTRE TÉMOIN, ET PARIS CROULERA SOUS LES BOMBES POUR
NOUS RESSEMBLER. La fille le regarde. Elle est rousse. Des yeux noirs,
noisettes, délicieux comme des noisettes qu’on croque, et puis qu’on recrache
dans les poumons. Espiègles avec ça, on dirait deux tétons qui pointent sous un
chemisier. Elle lui dit une méchanceté. Ça le rend fou de joie – il en pleure
presque, il l’embrasse incontinent – elle hurle – il redouble de salive pour sa
dulcinée – on dirait qu’il a la rage, qu’il a avalé un tube d’aspirines en entier. TU
M’AIMES, DIS ? Elle se débat, elle s’enfuit. Son cul fait des claquettes dans
une pièce de sombres braises où filtre le crépuscule par des stores vénitiens. Il se
lèche les commissures – si fraîche qu’elle lui en a gercé les lèvres.
Dans le métro. Du monde – beaucoup de monde. Poilante, toute cette foule. Il
a envie de la prendre dans ses bras, ou bien de la mettre dans sa poche et de
l’emporter, de sauter avec elle dans un trou. Yes, il a le cœur qui brille, les
cornets qui braisillent. Des choses à déclarer, apparemment. Toi là, ouais toi !
T’es MORT ! MORT, tu m’entends ? Et toi là, qu’est-ce tu crois ??? MORT
MORT MORT ! Z’êtes tous MORTS, REGARDEZ-VOUS PUTAIN DE
MERDE !!!! REGARDER-VOUS !!! TOUS LES MORTS QUI SE
CONVAINQUENT D’ÊTRE VIVANTS, ÇA NE FAIT PAS DE VOUS UNE
VÉRITÉ ! QUELLE MASCARADE !!!!!! ÉCOUTEZ-MOI, SI VRAIMENT
VOUS VIVIEZ, VOUS NE VOUS SERIEZ SÛREMENT PAS HABILLÉS DE
LA SORTE CE MATIN, BORDEL DE MERDE, PUTAINS D’ÉTRONS
FUMANTS, ON CROIRAIT VOUS AVOIR PEIGNÉS AVEC UNE
BALAYETTE À CHIOTTES !!! MAIS POURQUOI ??? POURQUOI ÊTESVOUS AINSI, POURQUOI ??? ALORS QUE LES OISEAUX CHANTENT
DE BON MATIN !!! C’EST AFFREUX CE GÂCHIS, C’EST DÉGOÛTANT,
DÉGOÛTANT !!! VOUS NE RENDEZ-VOUS PAS COMPTE QUE C’EST
VOUS-MÊME QUE VOUS ASSASSINNEZ MATIN APRÈS MATIN À NE
VOULOIR LE CÉLÉBRER ??? VOUS ÊTES MORTS PARCE QUE VOUS
VOUS ÊTES ASSASSINÉS, ET SANS L’AIDE DE PERSONNE, VOUS
M’ENTENDEZ ????? VOUS POURREZ ACCUSER LE MONDE ENTIER
MAIS C’EST VOUS-MEME QUI JOUR APRÈS JOUR PORTIEZ LES
COUPS !!! MAIS QU’EST-CE QUE VOUS ATTENDEZ ???? HEIN ??
QU’EST-CE QUE VOUS VOULEZ À LA FIN ??? QU’EST-CE QU’IL VOUS
FAUT DE PLUS ???? DITES-MOI !! BON DIEU MAIS DITES-MOI, PAR
PITIÉ DITES-LE MOI, JE VOUS JURE DE M’ÉTRIPER POUR VOUS LE
DONNER !!! QUE QUELQU’UN PARLE, NOM DE DIEU, QUITTE À
HURLER, QUITTE À FONDRE EN LARMES OU EXPLOSER !!! PARCE
QUE SI QUELQU’UN ÉTAIT VRAIMENT VIVANT LÀ, TOUT DE SUITE,
IL FONDERAIT UNE NOUVELLE RELIGION, SA PROPRE RELIGION, ET
ELLE NE FERAIT DE MAL À PERSONNE, ELLE NE FERAIT AUCUNE
GUERRE SA RELIGION, ELLE BRILLERAIT ET MOURRAIT AVEC LUI,
ET BASTA !!!! SI VOUS ÉTIEZ VIVANT, CHACUN DE VOUS
COMPOSERAIT SA TRAVIATA INCONTINENT !!!! SI L’UN DE VOUS
ÉTAIT VRAIMENT VIVANT, ALORS IL ÉCLATERAIT EN ATOMES
COMME UN CIEL DE TROP D’ÉTOILES ! ET VOUS N’IRIEZ NI
TRAVAILLER NI MÊME FAIRE VOS COURSES, VOUS N’IRIEZ NULLE
PART, LE CIEL EST DÉJÀ PARTOUT, VOYEZ-VOUS ? LA PREUVE QUE
VOUS ÊTES MORT : L’UN DE VOUS AURAIT DEJA DÛ SE LEVER
POUR ME CASSER LA BOUCHE ! MAIS NON, REGARDEZ-VOUS :
INNOFENSIFS COMME… COMME DES PILULES POUR ROUPILLER !!!
MORTS MORTS MORTS ! MORTS DE FROUSSE, MORTS DE VIDE !!!
C’EST PIRE QUE DE N’AVOIR SURVOLÉ L’ORENOQUE : VOUS
N’AUREZ MÊME PAS VU VOTRE VOISIN !!!
Les gens fuient son regard. Son regard est un orage. Ils ont peur de la foudre.
Ce qu’il dit. La mort. C’est des choses taboues ça, pourquoi qu’il en cause avec
tant de détachement ? Ouais, pourquoi qu’il nous fout pas la paix avec notre
peur, ce fils de pute ? À la station suivant, on le tire par le col. Les flics
l’alpaguent. Ils ont des dents pointues, comme des douilles de plomb. Alors,
p’tit malin ? On fait le malin ? Et si on te tape, tu continueras à sourire ? Et si on
te casse toutes les dents ?
On l’envoie chez le juge. Comparution immédiate. Trouble à l’ordre public. Il
a seulement affolé des montres.
Place de Grève, c’est la pause-déjeuné. Il monte sur l’échafaud. On le
conspue. HOOOOuuuuUUUU. NUL NUL NUL. T’ES NUL ! TUEZ-LE !
OUAIS, BUTEZ-LE !!! CE SALOPARD A FAILLI ME FAIRE DOUTER !
TUEZ-LE TUEZ-LE IL EST TROP VIVANT IL EST DANGEREUX !
Quelques-uns lui jettent des tomates pourries au visage – lui ouvre la gueule et
savoure l’UMAMI.

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