3 Des ”besoins” de la psyché au syndrome de glissement ou à la
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3 Des ”besoins” de la psyché au syndrome de glissement ou à la
Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 Des ”besoins” de la psyché au syndrome de glissement ou à la mort brutale: “une étrange euthanasie”? Catherine Desprats Péquignot Certaines situations cliniques portent à soupçonner le possible chez un sujet hospitalisé d’un «se donner la mort» dans une «étrange euthanasie» par action physique du psychique. Une action qu’on peut penser à la fois conséquente et corrélative d’une grave et durable mise à mal des «besoins» de la psyché et pouvant conduire à ce qui apparaît comme une mort brutale mais aussi au «syndrome de glissement» qui souvent se termine par la mort. Dans ces situations, régression pathologique, processus d’autodestruction, logiques psychiques primitives semblent œuvrer à une défense paradoxale: se sauver de l’anéantissement par l’anéantissement. Où est à considérer l’importance, au regard de ces situations, de la fonction psychique de «la relation de soins» qui implique le rapport à l’autre/l’Autre et par laquelle il peut être répondu aux «besoins» de la psyché. Mots clés: Autodestruction, besoins de la psyché, mort brutale, syndrome de glissement, hospitalisme 3 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 4 Dans le fil de sa réflexion sur l’autoérotisme et sur le «mystère du caractère physique du psychique» le psychanalyste Pierre Fédida en venait à formuler dans le cadre de son enseignement à l’université: «Le psychique agit physiquement, il agit physiquement par influence, par une action exercée de soi sur l’autre mais aussi sous la forme de l’action exercée de soi sur soi. Il faut resituer ce contexte. Tout récemment un collègue s’occupant de patients en stade terminal de la maladie me faisait remarquer une chose, c’est, qu’au fond, on ne comprenait pas très bien comment certaines personnes, notamment des personnes âgées (mais pas seulement) semblent avoir la capacité d’agir sur leur cœur au moment où elles le veulent dans un stade souvent très proche de la mort. Ces personnes demandent qu’on les laisse tranquilles, ce sont des personnes qui expriment préalablement leur fatigue mais ne l’expriment pas comme un état d’épuisement, mais plutôt comme une sorte de résolution intérieure, avec le sentiment qu’elles peuvent mourir au moment où elles le décideront. Est-ce qu’on a compris cette étrange euthanasie qui n’est pas un suicide mais où l’expression «se donner la mort» prendrait une forme littérale: le sujet se donne la mort. Il se la donne, il se l’approprie. Il s’agit de mettre en évidence la modalité d’action du psychique dans sa forme physique et sur le physique» (Fédida, 1996-97). Ce qui advient chez des sujets adultes, âgés ou non, hospitalisés pour des motifs divers, dont le pronostic létal n’est pas forcément engagé au départ, mérite d’être considéré à partir d’une telle approche. Certaines situations cliniques portent en effet à soupçonner le possible d’un «se donner la mort» dans une «étrange euthanasie» par «action du psychique». Une action qu’on peut penser à la fois conséquente et corrélative d’une grave et durable mise à mal des « «besoins» de la psyché» » (formulation de Piera Aulagnier) et pouvant conduire à ce qui apparaît comme une mort brutale mais aussi à l’efflorescence de ce qu’il est convenu d’appeler, dans la littérature médicale, le «syndrome de glissement» considéré comme une pathologie spécifique de la personne Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES âgée. Mais, au regard de ces situations dont certaines seront évoquées, on peut se demander alors: dans bien des cas, n’est-ce pas quand des «besoins» de la psyché d’un sujet, âgé ou non, sont mis à mal de façon grave et durable qu’un cap rédhibitoire se franchit malgré des soins corporels appropriés et que, dès lors, plus rien ne fait rempart au «choix» de «se donner la mort»? En prenant appui sur la clinique, c’est sur la base de ces hypothèses que je vais avancer dans cette réflexion qui portera aussi à engager la question de la «relation de soins», relation psychique «d’échange/transfert» qui implique le rapport à l’Autre, et de ses incidences chez l’adulte dans la rencontre soigné/ soignant(s). Syndrome de glissement ou mort brutale: d’un «équilibre psychique de catastrophe» à sa rupture? Le «syndrome de glissement», à propos duquel il est souvent souligné dans les articles médicaux que la personne «semble refuser de vivre», est décrit dans la littérature médicale comme une pathologie gériatrique relativement peu fréquente et affectant surtout des personnes très âgées souvent dans les derniers mois, voire les derniers jours de leur vie. La plupart du temps consécutif à une maladie ou un accident, survenant parfois au domicile, mais en général dans le contexte d’une hospitalisation ou dans les suites d’un placement (tel en maison de retraite), le déploiement de ce syndrome, s’avère, en bien des cas, irréversible. Il y a un certain consensus pour considérer que ce syndrome est sans rapport saisissable d’évidence avec la maladie initiale ou l’accident (une chute par exemple), qui ont conduit, le plus souvent, à l’hospitalisation. Il semble donc apparaître après ce qui est appréhendé comme un «intervalle libre» entre le problème ayant nécessité l’hospitalisation et qui semble résolu, et les premiers troubles inquiétants dont la flambée peut engager, parfois rapidement, sur la voie d'une évolution mortelle. Différentes conceptions médicales, parfois assez divergentes, tant du point de vue clinique que pathogénique, proposent un abord de ce syndrome. Un ensemble polysémique de troubles sont considérés par certains d’ordre psychiques (ou psychologiques) par d’autres neuropsychiques (ou neuropsychologiques). A ces troubles s’associe souvent très vite des désordres somatiques ouvrant, dans une décompensation plus ou moins rapide de l’état général, à la désorganisation des grandes fonctions et, par là, à la mort. Modification des comportements, en particulier désintérêt pour toutes choses, refus de communiquer, de s’alimenter, de se mouvoir dans une opposition Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 5 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 6 ferme, si ce n’est véhémente, agitation, troubles confusionnels, atteinte des fonctions intellectuelles. Certains médecins considèrent donc que ces troubles dits alors, selon les auteurs, neuropsychiques ou neuropsychologiques, sont d’étiologie organique, ce qui les conduit à parler d'un «effondrement somatopsychique». D’autres sont plutôt enclins à penser qu’ils sont pour l’essentiel d’ordre psychique et provoqués par des «traumatismes affectifs», le désespoir, la fuite régressive d’une situation anxiogène, ce qui les conduit alors à parler d'un «effondrement psychosomatique». Qu’ils soient dits psychiques (ou psychologiques) ou neuropsychiques (ou neuropsychologiques), se retrouve un consensus pour référer ces troubles à la «dépression», à un «état dépressif», un «complexe dépressif», et glissement et «dépression chez la personne âgée» en viennent à se superposer dans nombre d’études. De façon générale, pour les médecins actuels, cette dépression relève plutôt d’un contexte somatopsychique, mais même si l’étiologie initiale est considérée plutôt d’ordre psychique, le traitement prescrit et privilégié par tous est neurochimique. Si les mentions «de l’entourage relationnel», voire de «psychothérapie» (sans que soit explicité ce qui est entendu sous ce terme) apparaissent parfois, c’est à titre d’adjuvants aux traitements médicamenteux. Que l’option retenue soit «somatopsychique» ou «psychosomatique», explique peutêtre le peu d’attention portée à une approche autre que neurochimique dans l’une ou l’autre des options, la «biologisation» du psychique. Ce qui va dans le sens de ce qu’avancent certains: chez le sujet âgé, glissement/dépression témoignerait de l'œuvre «naturelle» de la pulsion de mort qui serait congruente chez la personne âgée avec un âge «normal» pour mourir, et à laquelle ne pourraient s’opposer les forces libidinales épuisées du sujet. Des situations que j’ai pu connaître, notamment en service de médecine interne et en service de réanimation polyvalente, au fil d’un travail clinique quotidien, dans la rencontre au «lit du malade» de sujets, âgés ou non, et au décours pour certains de leur hospitalisation, m’ont portée à penser que le «glissement» ne concernait pas seulement des personnes âgées à propos desquelles le syndrome est invoqué, mais qu’il pouvait se trouver engagé chez des sujets jeunes encore. J’en suis venue par là à reconsidérer cette question en envisageant que pouvait se manifester ainsi, chez des sujets âgés ou non, la résultante d’une grave et durable mise à mal des «besoins de la psyché». Si on suit l’hypothèse d’une privation quant aux «besoins de la psyché», et d’une action psychique induisant ce qui va aboutir à un effondrement généralisé de tout l’être et à l’issue souvent mortelle du «glissement», cela pose alors la question du rapport entre ces «besoins» psychiques et des processus à l’œuvre chez des sujets qui «glissent» et «filent» (la mort) comme disent parfois les soignants. Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES Un lien est parfois évoqué entre le «glissement» et des formes de régressions qui sont rapprochées, quant à la pathogénie, des états régressifs aigus chez le vieillard décrit par Daumézon (1961), lequel rend compte d’une réversibilité de ces états chez ce dernier. Mais à ce jour, des études ne semblent pas reprises du côté du problème de la régression, et telle que la conçoit la psychanalyse au regard d’une clinique du sujet, soit un problème d’ordre psychopathologique et non pas «neuropsychique». Suivant cette piste, dans une étude ancienne (Desprats Péquignot, 1988), à propos précisément de la personne âgée, je faisais l’hypothèse d’un lien entre régression pathologique et syndrome de glissement. J’envisageais alors que ce syndrome, chez nombre de sujets, pouvait être l’ultime expression et l'aboutissement morbide d’un processus psychique de régression pathologique méconnu. Un processus ayant porté à la mise en place d’un «équilibre psychique de catastrophe» et témoignant, dans la flambée des troubles psychiques puis somatiques, de la rupture de cet équilibre, ceci conduisant en bien des cas, malgré les mesures de soins médicaux énergiques, à la désorganisation des grandes fonctions et à la mort. Je me demandais, notamment, dans cette réflexion, si une limite n’est pas déjà franchie quand la régression n’est plus un processus «normal» de repli temporaire, de réaménagement provisoire, mais devient un mode prévalant et durable de fonctionnement psychique. Souvent, c’est d’abord par ce qui apparaît, plus ou moins brusquement, comme un désintérêt, un détournement du monde extérieur, une opposition active à la relation (mutisme, tourner le dos, fermer les yeux) et à l’autoconservation du corps (manger, bouger, se soigner), que se manifestent de façon perceptible, mais sans être forcément repérés comme tels, les premiers signes de glissement. Ce qui va conduire, la plupart du temps, à l’imposition par contrainte de soins de tous ordres. Si on admet que cette position de retrait et de refus fait indice d’une grave mise en défaut de «besoins de la psyché», témoigne d’un état de déréliction subjective sur fond de détresse qu’un «equilibre psychique de catastrophe» dans la régression ne peut plus contenir, s’impose alors le rapprochement avec la situation de régression pathologique de «l’hospitalisme» décrit par Spitz chez le très jeune enfant hospitalisé ou placé. L’hospitalisme dit aussi «syndrome de la pouponnière», se manifeste par un syndrome de régression mentale, une dépression dite «anaclitique» (inhibition anxieuse, désintérêt pour l’extérieur, refus de s’alimenter etc.) et un ensemble de troubles physiques qui sont dus chez le jeune enfant à une carence affective par privation de la mère. Si cette carence est totale et prolongée les troubles peuvent aboutir à des états de marasme irréversibles et à la mort. On peut trouver, rarement, un lien fait entre hospitalisme et syndrome de glissement, mais c’est sur le mode implicitement entendu, des risques inhérents Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 7 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 8 aux extrémités de la vie, voire de leur conjonction (le vieillard est souvent pensé «retomber en enfance», et dans les institutions souvent traité comme tel). Ce n’est pas là qu’est l’intérêt de rapprocher glissement et hospitalisme et empêche plutôt de se poser la question de ce qui peut conduire un sujet en perdition, qu’il soit jeune ou vieux, jusqu’à l’effondrement généralisé de son être. On peut se demander, en effet, si ce n’est pas quand des conditions de vie psychique ne sont plus assurées, quand les «besoins de la psyché» d’un sujet sont mis à mal et que rien ne vient sauver d’un insupportable interne/externe, impossible à fuir ou à amender, que le «choix» d’une «étrange euthanasie» s’impose comme seul recours. Si on considère que, chez des sujets pris dans certaines situations, la régression pathologique vise à une préservation, une survie psychique, à un «équilibre psychique de catastrophe» tentant une sauvegarde du psychique par voie de déréliction, c’est alors non pas tant une question d’âge, qu’une question de ce qui se joue pour un sujet quant aux besoins de «sa» psyché, et du possible ou non d’y répondre. Le registre du vital corporel se trouve engagé par l’incidence somatique d’une défense paradoxale dans la régression mettant en jeu des logiques psychiques primitives (inconscientes) qu’on peut énoncer en ces termes: parer à l’anéantissement par l’anéantissement. Et ceci en suivant les voies de ce que j’appelle processus de «déshabitation» ou «désanimation». Soit un processus visant à venir à une vie «sans que l’habitant soit là», à une vie «où il n’y a encore personne», à une vie qui est là, un «soubassement», un «humus», un état de la vie sans manifestation, émergence de vie encore. Ainsi le peintre Tal Coat parlet-il de ce qu’est le «fond de toile» pour lui. Fond de toile comme fond de vie psychique qu’aucun habitant «signifié» n’anime encore. Reprenons autrement cette question à partir de ce que Ferenczi déjà permet d’envisager et aussi d’avancées de Searles . Ferenczi donne à penser, en lien avec la question du trauma, qui a toute sa place ici, une stratégie d’autodestruction d’une part de soi qui vise à «délivrer de l’angoisse» et à survivre, à conserver de la vie donc quand, comme l’écrit celuici «le sauvetage ne vient pas et même l’espoir du sauvetage semble exclu». Et il remarque: «Le plus facile à détruire en nous, c’est la conscience, la cohésion des formations psychiques en une entité: c’est ainsi que naît la désorientation psychique (l’unité corporelle n’obéit pas aussi promptement au principe d’autodestruction). La désorientation aide: 1° immédiatement, comme soupape, comme succédané de l’autodestruction; 2° par l’arrêt de la perception plus large du mal, en particulier de la souffrance morale, plus élevée – je ne souffre plus, tout au plus une partie de mon corps; 3° par une formation nouvelle d’accomplissement de désir à partir des fragments, au niveau du principe de plaisir» (Ferenczi, 1931-32, p. 141). Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES Ce que formule Harold Searles à partir de son travail avec des psychotiques (schizophrènes en particulier) le porte vers d’autres considérations et perspectives que celles qui me préoccupent ici mais qu’il peut aider à réfléchir. Sa clinique l’invite à penser une «aspiration à devenir non humain» dans la régression, mais aussi une angoisse de «devenir non humain», de perdre une «identité d’être humain» (Searles, 1960, p. 170 sq et 229 sq). C’est au regard de certaines situations en réanimation que j’ai rapprochées des propos du peintre Tal Coat sur sa démarche, que j’en suis venue d’abord à penser l’œuvre d’un processus psychique de «déshabitation» ou «désanimation dans la défense paradoxale de sauvegarde psychique. Ce qui, à reprendre l’approche de Searles ici, peut s’entendre au sens de l’aspiration à l’état d’une vie que rien d’humain n’anime, n’habite, n’affecte. Une vie psychique désanimée, déshabitée, désaffectée de soi, de l’autre/Autre, ce à quoi vient aider «une formation nouvelle d’accomplissement de désir» comme l’écrit Ferenczi: accomplissement du désir d’un vivre à l’état «déshumain», de vivre d’une vie qui vit «sans personne», sans que de «l’habitant» soit là, une vie sans sensation de soi, sans sensation de l’autre/Autre. Ce qui vient se conjoindre à l’angoisse de se dissoudre, de perdre une «identité d’être humain», soit une cohésion interne dont se soutient la «subjectivité corporelle» selon l’expression de Pierre Fédida. À admettre l'hypothèse, dans l’instauration d’un syndrome de glissement chez un sujet, d’une grave et durable carence dans les besoins de sa psyché et d’une action psychique qui suit des logiques de sauvegarde par des voies de destruction «quand le sauvetage ne vient pas et même l’espoir du sauvetage semble exclu», la question des limites de cette solution et de ce traitement se pose. Ferenczi le souligne: «l’unité corporelle n’obéit pas aussi promptement au principe d’autodestruction» que la cohésion des formations psychiques. Mais la menace n’en est pas moins là dès lors que «le principe d’autodestruction» est à l’œuvre et n’est pas contré. Ce décalage pointé par Ferenczi peut aussi aider à penser certaines situations de mort brutale. Pourrait trouver là son motif un écart, un hiatus entre guérison qui semble assurée au plan médical et mort brutale inexplicable comme «point d’orgue» de l’action physique et sur le physique du psychique qui a poursuivi, sans pouvoir faire retour, sur les voies de l’anéantissement, j’y reviendrai. Si rien ne vient «sauver» à temps, et si tant est que le bon chemin soit trouvé ou qu’il existe encore une voie, le sujet est livré souvent inexorablement à la pente de l’involution psychique et de l’autodestruction jusque dans sa concrétude somatique. Hospitalisme ou glissement, enfant ou adulte âgée ou non, c’est ici le secours du psychique qui peut contrer les processus de néantisation. Encore faut-il que ce secours, qui se joue dans l’échange/transfert de la «relation de soins», intervienne avant l’inéluctable franchissement d’un seuil irréversible, Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 9 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE qu’il réponde aux «besoins» de la psyché et puisse alors «réanimer» les voies pulsionnelles, libidinales, narcissiques par lesquelles un sujet peut revenir à l’envie de la vie, se «redonner» la vie. On va en voir un aspect avec le cas de Mme C de X, et on verra avec le cas du «monsieur à la serviette» hospitalisé en réanimation que je reprendrai un peu plus loin, que la sauvegarde chez l’adulte des «besoins de la psyché» et les modalités de la «relation de soins» peuvent prendre des formes et des voies inattendues. Madame C de X ou «la destitution imposée» 10 C’est dans un processus de «glissement» dans lequel cette femme, âgée de quatre-vingt ans hospitalisée en médecine interne, que j’appellerai madame C. de X, paraît «s’enfoncer». Un processus dont s’alerte des soignants mis en difficulté par le sentiment de «forçage», de violence qu’ils éprouvent dans les soins qui lui sont prodigués au cours de ce qui est sa deuxième hospitalisation dans le service. Une première hospitalisation d’une semaine de cette dame, sans problèmes notables, avait eu lieu pour une chute chez elle où elle vit seule (elle n’a jamais été mariée et n’a pas d’enfants). Sont notées dans le dossier, au décours de l’examen clinique d’entrée lors de cette hospitalisation, une perte de la vue douze ans plus tôt, une arythmie, la prise de médicaments pour dormir car elle est insomniaque depuis vingt ans, ainsi que la nervosité et l’anxiété de cette patiente. Il est noté aussi qu’elle est la dernière descendante de la lignée et du nom des «de X….». Lors de cette première hospitalisation, comme je le faisais parfois, j’assiste à la visite médicale du matin et note ce qui s’y passe, s’y dit. En voici pour l’essentiel la teneur: madame C de X est couchée. Un externe dit: «c’est madame C…, elle a fait une chute chez elle et n’a pas pu se relever. La malade rectifie son nom: «on m’appelle toujours madame de X» et conteste le fait de n’avoir pu se relever. Il est question de l’arythmie. Un externe: «ses cousins sont cardiaques et sont tous mort du cœur» et il signale un petit goitre diffus. La malade: «je n’ai plus vingt ans». Examen clinique. Les draps sont retirés, la malade est dévêtue, se retrouve nue. Auscultation des poumons et du cœur. Le médecin qui ausculte lui dit: «ne me regardez pas comme si j’étais responsable». La malade: «je ne vous vois pas monsieur, je suis aveugle». Celuici demande alors: «comment vit cette dame?». Un externe: «elle vit toute seule». La malade: «je me débrouille très bien, j’ai une femme de ménage». Pendant que les médecins parlent entre eux elle dit: «vous savez, je suis très nerveuse». Une radio est examinée. Un externe en réponse à une question: «j’ai dit qu’elle avait un gros cœur». Discussion sur son cœur. La malade parle du cadre Noir et dit Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES qu’elle faisait du cheval. Réexamen clinique. À une question sur sa chute, la malade répond qu’elle n’a pas pu rallumer. Amusement autour du fait que la malade dit qu’elle allume la nuit (alors qu’elle n’y voit pas). Un soignant: «il faut la bradycardiser». La malade se tourne interrogative vers celui qui a parlé, mais ne dit rien. On lui dit: «votre cœur s’est emballé, on est en train de le ralentir». Une sortie rapide est envisagée ce qui est formulé de façon plaisante en relation avec son nom et son arbre généalogique. Cette malade, avec laquelle je reste après la visite, dit qu’elle supporte très mal l’hospitalisation, qu’elle n’a jamais été malade, qu’elle n’a même jamais été chez un gynécologue, qu’elle est vierge. Elle se sent «humiliée», «déconsidérée» dans cette situation (la promiscuité pour la toilette – chambre à deux lits sans isolement pour se laver, lors des soins, mise à mal de sa pudeur, on l’appelle non seulement madame C…, mais aussi «mamie», malgré ses protestations, on la coiffe avec des «couettes ridicules» dont s’amuse tel ou telle). Le jour de sa sortie, je la rencontre. Très amène, elle parlera pour l’essentiel de son titre nobiliaire et de son père («nous avons suivi Henri IV» dira-t-elle), du «temps de la splendeur» et des revers de fortune. Elle raconte aussi qu’elle a vécu soixantesept ans avec sa sœur cadette, qu’elles ne se sont jamais quittées jusqu’au décès de celle-ci qui remonte à quelques années, qu’aucune des trois sœurs ne s’est mariée et n’a eu d’enfants faute de «bons partis», qu’à sa mort elle rejoindra les siens, «qu’elle ne vit que dans le souvenir des morts». Une deuxième hospitalisation a lieu deux mois après la précédente, et pour la même raison d’une chute au domicile. Quelques jours après son admission, madame C de X qui, cette fois, ne peut pas du tout se lever seule encore à ce moment et dépend des soignants pour tout, reste couchée en position fœtale, garde ses deux mains sur son visage sous les draps relevés, et tient des propos, souvent confus, et à thèmes persécutifs. Elle exprime la crainte que soit divulgué un secret de famille (elle aurait entendu parler d’elle dans le couloir et de ce secret) et dit que son entourage a profité de la précédente hospitalisation pour lui voler des objets, en particulier le papier des armoiries et le document permettant de les expliquer. Elle en est très affectée. Les médecins se demandent s’il s’agit «d’un délire qui flambe» ou d’une hémorragie méningée. Les troubles vont en s’accentuant. Elle ne mange plus, demeure dans un mutisme total, garde les yeux fermés même au fauteuil, détourne le visage ou tourne le dos ostensiblement dans son lit lorsqu’on lui parle. On lui tient les mains pour la faire boire, on ne peut la faire manger, elle s’agite et gémit lors de soins qu’elle refuse et qui sont faits par contrainte (piqûres, petite toilette, prise de température, mise sur le bassin, mise au fauteuil). On commence à la nourrir par sonde gastrique et des lavements sont pratiqués (ventre gonflé). Le risque d’un «glissement» inéluctable est là. Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 11 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 12 Cet épisode, au cours duquel elle tombe de son lit se faisant un important hématome, a évolué sur plus de trois semaines au cours desquelles un traitement médicamenteux est prescrit (association de neuroleptiques et d’antidépresseurs). C’est en ayant en mémoire les propos échangés lors de sa première hospitalisation, et en pensant aux possibles effets conjugués, et cette fois ravageurs, d’une destitution subjective dans la confrontation renouvelée à ce dont elle avait pu dire l’inacceptable pour elle, que je vais dans sa chambre, à son chevet. Dans mes premières rencontres avec elle, alors que, comme à tous, elle tourne le dos, et qu’elle reste muette, je vais lui parler à partir de ces éléments (nom, descendance, filiation, dégradation, nudité, pudeur, honte, humiliation). Avec toute l’équipe (des médecins aux aides-soignantes) sont aussi discutées et reconsidérées les modalités d’approche et d’adresse (la nommer toujours madame de X…, frapper et se présenter en entrant dans la chambre, la prévenir des gestes et des soins qui vont être fait et pourquoi, et, si c’est possible, à l’occasion de tous les soins, commenter combien ce peut être difficile quand on est indépendant, autonome, pudique etc. , d’être obligé de demander, de dépendre du bon vouloir pour tout, de devoir être soignée, lavée, d’être dépouillée de son intimité). Une rencontre quotidienne avec moi, sur le mode du rendez-vous (je lui dis à quel moment alors même qu’elle ne me répond pas) a lieu dans sa chambre. Quand elle commencera à me parler, je viendrai tout un temps pour elle à la place de sa sœur cadette décédée dont elle a l’impression, me dira-t-elle, qu’elle est à côté d’elle et nous parlerons de sa vie, de son histoire, du temps de la «splendeur». L’ensemble de cette approche concertée, dont il est difficile d’apprécier le poids respectif des différentes modalités, a conduit, de toute façon, à l’instauration d’un tout autre rapport des soignants à cette personne. Ce dont, on peut penser, s’est modifiée la «relations de soins» qui a permis ici de contrer le «filage psychique» d’un mourir, de restaurer, de rétablir une situation psychique vivable permettant un arrêt du mouvement de «fuite vitale» dans la «recomposition» subjective, une reprise narcissique et libidinale. Elle dira, alors qu’elle est à quelques jours de la sortie de cette deuxième hospitalisation de presque deux mois, et qu’il est envisagé qu’elle rentre à son domicile à sa demande insistante (elle fait valoir qu’elle se lève, marche, se lave et mange seule, elle s’efforce de prouver que ses propos sont cohérents, qu’elle est bien orientée dans l’espace et le temps), qu’elle a eu ici une «impression de meurtre», «qu’ici on ne la soigne pas, qu’on la fait mourir à petit feu», qu’elle a souhaité, et souhaite encore, «qu’on en finisse». Mais aussi, elle se soucie à plusieurs reprises de savoir si on a bien confirmé son rendez-vous pour l’opération d’un oeil qui doit avoir lieu dans quelques semaines (il semble qu’elle pourrait retrouver un peu de vue avec celui-ci). Elle s’inquiète qu’on puisse l’empêcher d’y aller, que personne ne lui dit rien à ce sujet. Elle dira qu’elle n’aime pas Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES demander et dépendre des autres, qu’elle n’a pas été élevée comme ça, que dans sa famille il y a beaucoup de principes. Plusieurs semaines après je la croiserai un jour dans la rue, marchant d’un pas plutôt assuré avec sa canne blanche, bien habillée et coiffée, sa prestance retrouvée. Si j’ai repris ce cas, certes d’une personne «très âgée», c’est qu’il me paraît proche par bien des aspects, au plan de la situation psychique, de ce qui peut se produire chez d’autres sujets adultes, âgés ou non, qui répondent à ce qui leur advient d’impossible à fuir ou négocier, par un «glissement», mais aussi chez des sujets venant parfois répondre d’une toute autre façon à l’anéantissement, ou à sa menace, par la «solution» de l’anéantissement. Chez des sujets adultes, guère âgés, peut survenir en effet le risque du «glissement». Alors que tout semble aller au mieux du point de vue somatique, qu’une sortie du service est envisagée par les médecins, peuvent apparaître des comportements incompréhensibles pour l’équipe soignante (pleurs et/ou agressivité, refus de manger, de se lever, d’être touché, refus des soins), et se produire une dégradation somatique inattendue que des soins médicaux intensifs ne peuvent pas toujours amender. On va en voir le cas avec le «monsieur à la serviette». Mais aussi des équivalents suicidaires (arrachage de perfusions, de sondes, passage volontaire par-dessus les barrières du lit) voire des suicides accomplis peuvent se produire chez des sujets, âgés ou non, dont le pronostic vital n’est pas ou n’est plus en jeu. Tel ce monsieur dont j’évoque le cas dans un ouvrage à propos de la question du trauma qui a toute sa place ici (Desprats Péquignot, 1998). Hospitalisé en réanimation, ce monsieur, jeune encore, se ressentant «abandonné» et traité comme «un enfant puni» par les soignants, se fera apporter par sa femme un petit couteau sous prétexte d’éplucher un fruit. Un couteau qu’il se plantera dans le cœur devant l’équipe médicale réunie dans sa chambre lors de la visite du matin. La situation qui a poussé cet homme à l’autodestruction «devant les médecins», à un suicide, je dirai, «dans le transfert», il était difficile dans ces lieux où on se bat pour la vie, d’en penser et mesurer l’importance psychique singulière pour lui: malgré ses appels réitérés aucun soignant n’est venu lui donner l’urinoir, l’équipe s’occupant d’une urgence, il est resté des heures dans des draps trempés n’ayant plus pu se retenir. Ce monsieur, plutôt souriant et combatif, cherchant à soutenir sa position «virile» dans son rapport aux femmes, je le trouverai en pleurs, complètement défait, «décomposé», et ne pourrai obtenir que quelqu’un intervienne au plus vite pour une situation considérée sans urgence médicale et sans risque vital. Parfois chez des adultes hospitalisés, situation que j’ai aussi connue dans le contexte d’un service de réanimation, ce n’est pas un suicide ou un «glissement», mais une mort brutale et inattendue qui survient alors que la guérison médicale était à l’ordre du jour, que les soins intensifs n’ont plus cours et que le patient Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 13 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE convalescent se promène dans le couloir, cette mort laissant les médecins devant une énigme. «Glissement», suicide, mort brutale inexplicable au plan médical: n’at-on pas là des situations qui, apparemment sans rapport, peuvent être rapprochées pour autant qu’on considère que c’est à des épreuves psychiques comparables, où se sont trouvées gravement mis à mal des «besoins de la psyché», que se confrontent des sujets hospitalisés et les conduit à l’autodestruction, pour certains par les voies d’une «étrange euthanasie»? Besoins de la psyché et «relations de soins» 14 Ce que des sujets hospitalisés, en particulier en réanimation, et qui n’ont pas présenté ce type de problème, ont pu exprimer de l’épreuve qu’ils ont traversée, ce qu’ils parviennent à en verbaliser dans le temps de leur hospitalisation ou lors d’entretiens ultérieurs, peut nous en apprendre, je pense, sur ce qui peut se passer pour d’autres sujets, d’autres psychés, aux assises peut-être déjà plus fragiles. Ce qu’ils expriment, en effet, invite à penser que ce à quoi ils s’étaient confrontés et qui les laissait en profond désarroi, parfois bien des mois après, pouvait éclairer ce qui se passait pour ceux conduits aux abords du «glissement», voire pour lesquels, alors que la guérison était là, survenait la mort. Ce qui laisse en désarroi ces sujets n'est pas réductible aux seuls événements «objectifs» qui feraient en eux-mêmes traumatismes (hospitalisation, maladie, natures et conditions de soins, risque létal qui a pu être effectif). Ils disent cela aussi, mais c’est autre chose qui s’est produit, qui s’est précipité dans ces contextes et qui, alors même que «tout va bien», semble les laisser dans un désarroi sans limite. Chez ces sujets, parfois ayant repris le cours habituel de leur vie, rétablis sur le plan physique, semble avoir été franchie une «frontière psychique» qui s’entend dans la parole, à l’évocation difficile de leur «séjour en réa», comme l’impossible remontée d’un abîme insondable de douleur psychique et de désespoir. Si, comme on dit, ils sont quelquefois «revenus de loin» sur le plan somatique, sur le plan psychique ils semblent ne pas pouvoir faire aisément un même retour. Plutôt que des pensées saisissables, des «sensations psychiques» de déperdition et de luttes obscures «à la vie à la mort» dans une solitude où, disentils, nul ne venait à l’aide, sont évoquées par certains qui en sont ou en demeurent toujours bouleversés. Ils font entendre la terreur engendrée par le risque d’être «oublié», par l’impuissance à fuir ou faire appel (ce que les réactions motrice et vocale, souvent empêchées en réanimation, renforce), la violence de l’emprise et de la contrainte implacables qu’exercent en interne/externe des excitations Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES psychiques et/ou physiques intenses qui débordent toute capacité d’intégration, la menace d’annihilation qu’elles emportent. Une violence, une menace qui viennent se conjuguer, non pas seulement avec la pensée d’un danger de mort effectif, mais avec ce qui est ressenti comme désir et puissance de vie ou de mort de l’autre/Autre «soignant». Il n’est pas rare que des sujets hospitalisés en réanimation expriment des pensées de rétorsion, de punition comme on l’a vu, mais aussi fréquemment de persécutions, de tortures qui s’associent à la guerre, aux nazis etc., chez des sujets pouvant être dans les états confuso-oniriques ou non. On peut repenser au cas Mme C de X parlant de meurtre et disant «qu’ici on la faisait mourir». Pour chacun d’entre nous, les figures internes de l’Autre qui se sont forgées au fil de son histoire psychique peuvent être aussi bien secourable que destructrice. Ce qui, dans le contexte de l’hospitalisation, se conjoint ici à une réalité externe: c’est dans bien des cas, et plus ou moins durablement, de la présence réelle de l’autre / Autre, de son intervention attendue mais aussi qui peut être redoutée, notamment du fait de soins répétés bien souvent douloureux, que dépend le sujet et parfois sa vie même ou sa mort. Cette «situation traumatique» dont ils ont fait l’épreuve et mettant plus ou moins en carence pour eux les «besoins de la psyché», on peut se demander si elle n’est pas d’autant plus ravageante chez certains d’entre eux qu’elle est venue actualiser, via la régression et par répétition et transfert, une «situation traumatique originelle» (Freud), voire une «agonie primitive» (Winnicott) qui trouveraient ici leur résonance et peut-être la venue au jour de leurs effets. Ce qu'ils évoquent de moments, d’un temps d’éternité, où, disent-ils, ils se sentaient sans recours ni secours, n’est pas sans faire penser, en effet, aux «expériences catastrophiques» auxquelles peut être livré l'infans et qui le mettent en état de détresse. Un état que Freud considérait comme prototype de la situation traumatique chez l’adulte. «On doit à l’analyse d’avoir montré que la nécessité de la présence d’un Autre n’est en rien réductible aux fonctions vitales qu’il doit assurer. Vivre exige, bien évidemment, la satisfaction d’une série de besoins auxquels l’infans ne peut pourvoir de manière autonome: mais, exactement au même titre, est exigée une réponse aux «besoins» de la psyché, faute de quoi l’infans peut parfaitement, malgré l’état de prématuration qui est le sien, décider de refuser la vie», remarque et rappelle Piera Aulagnier (1975, p.131). On peut en dire autant pour l’adulte en état de vulnérabilité et d’impuissance qui en vient à dépendre pour tout d’un autre/ Autre et dont les «besoins de la psyché» sont gravement mis à mal pour des motifs divers et relativement singuliers à chacun. Il peut, lui aussi, malgré les soins corporels qui lui sont prodigués avec compétence, «décider de refuser la vie». Un refus dont le monsieur à la serviette dont je vais évoquer maintenant le cas avait Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 15 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 16 fait le «choix» dans l’amorce d’un syndrome de glissement, dès lors que privé du secours de ce qui faisait «toute sa vie». Ce monsieur d’un peu plus de soixante ans est hospitalisé en réanimation, amené par les pompiers. Il a été mis sous machine (incapacité de parler). Sans que les médecins comprennent pourquoi, son état somatique guère inquiétant et stabilisé, brusquement s’aggrave de façon alarmante et fait craindre une issue fatale. L’équipe soignante m’informe que ce monsieur, jusqu’alors tranquille, rejette avec virulence toute approche et tout soin. Il pleure, s’agite, fait craindre l’arrachement des perfusions ou le basculement par-dessus les barrières du lit et de ce fait a été attaché. Comme souvent dans les rencontres «au lit du malade» en réanimation, après avoir pu établir un contact, je défais les attaches. Il m’agrippe une main aussitôt et la frappe contre son ventre. Il s’énerve de son impuissance à se faire comprendre par ce geste, de mon incapacité à le comprendre. C’est en allant voir les soignants et en cherchant avec eux si quelque chose avait pu se produire, ce qu’il pouvait vouloir, que j’apprends incidemment qu’on lui a retiré une vieille serviette de cuir pleine de partitions de musique à laquelle il se cramponnait des deux mains déjà dans l’ambulance et depuis qu’il est hospitalisé. Une serviette qu’une fois prise à l’occasion d’un soin, on ne lui a pas redonnée. Or, c’est cette serviette qu’il réclame sur son ventre, qu’il veut contre lui, avec lui, pour la tenir et, on peut dire, s’y tenir, s’y raccrocher. Sans elle, c’est pour lui la déperdition, la mise en détresse psychique et l’impossibilité de lutter pour vivre. Lui rendre sa serviette et la lui laisser, ce dont la consigne est passée aux équipes de soins, s’avérera permettre un « retour au calme » tant psychique que somatique. Cette serviette, pour lui, et peut-être en particulier dans ce contexte, a ou prend dimension «d’objet soi», a ou prend valeur de sauvegarde psychique et fonction thérapeutique. Cette serviette contient «sa musique» qui est, dira-t-il plus tard, «toute sa vie», comme pour ses parents eux aussi musiciens. Tout comme on laisse désormais à l’enfant hospitalisé, cette part de soi/de l’Autre primordial qu’est l’objet dit transitionnel, laisser à ce monsieur sa serviette, sa musique, «toute sa vie» qu’il tient/qui le tient, c’était lui laisser ce rempart, ce secours, cette «barrière psychique protectrice» qui lui était nécessaire pour vivre et désirer vivre. On voit avec cet exemple que, si sur le plan physique la régulation somatique avait pu être rétablie par les soins médicaux, ces soins seuls, dans le cas de cet homme, ne réussissaient plus à contrer de façon efficace la survenue de troubles qui, pour s‘amender, ne dépendait pas que du corps (organisme) et des soins somatiques. Prendre dans ce cas cette serviette, certes un objet incongru sur un lit de réanimation, c’était sans le vouloir ni le savoir, en le privant de sa «musiquevie» matérialisée par la serviette, faire violence psychique par l’autre/Autre soignant prenant alors figure «féroce» dans la «relation de soins», et par là ouvrir une faille dans la continuité de l’exister, le possible du vivre pour ce monsieur. Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES Si ce monsieur n’avait pas par ses pleurs, son agitation, son refus de soins nécessaires conduit les soignants désemparés par cette situation à la dégradation inattendue, à demander l’intervention d’un «psy», la fonction pour lui de la serviette serait restée ignorée et l’aggravation de son état tant psychique que somatique imputé seulement à des perturbations inexplicables de l’organisme malgré les soins appropriés. Ici, ne pas «voir» la serviette de musique seulement comme un objet embarrassant lors les soins et n’ayant rien à faire sur un lit de réanimation, mais en venir à s’interroger sur ce qu’elle pouvait singulièrement représenter pour ce monsieur a permis aux soignants de la lui rendre et de «l’intégrer» dans les soins. De l’intégrer, comme sont intégrés désormais auprès des enfants hospitalisés, y compris en soins intensifs, les «objets de son monde» que l’on pense «soignants» pour lui (maman, doudou etc.). Ce qui n’a pas été sans effets sur le rapport des soignants à ce monsieur mais aussi des soignants entre eux: chacun, réjoui, se demandant et plaisantant sur ce que pouvait être «l’objet de leur vie», sur ce qui les faisait «tenir à la vie». A propos de la psychose, ce que Roussillon appelle «l’expérience de terreur agonistique» lui fait convoquer les approches de Bettelheim sur les «situations extrêmes», de Winnicott à propos d’expériences de «mort psychique», d’expériences d’anéantissement de la subjectivité, ou encore celle de Bion concernant les «terreurs sans nom». Ces approches, de même que celles de Ferenczi ou de Searles qui ont été évoquées, donnent à penser que ces épreuves psychiques et, disons même, psychocorporelles, se trouvent à l’origine du «retrait de la subjectivité». Un retrait pouvant donc prendre différentes formes d’expressions, qui suit les voies de logiques psychiques primitives (inconscientes ) toujours susceptibles d’être actives ou réactivées chez un sujet tout au long de sa vie, et qui peut conduire, tant l’enfant que l’adulte en désespoir et sans secours de l’autre/Autre, jusqu’à l’effondrement de tout l’être. «Vivre le désespoir et ne pas se retirer» (Roussillon, 1999, p. 142-143) suppose que se maintienne ou se retrouve de l’espoir. Dans les contextes que j’évoque ici mais aussi dans d’autres contextes d’hospitalisation (Desprats Péquignot, 2004), l’espoir qui peut faire rempart au retirement et au «choix» de refuser de vivre, c’est dans la «relations de soins» qui s’établit et opère dans la rencontre entre soigné (enfant ou adulte) et soignant(s) qu’il peut pour des sujets, malgré tout ce qui leur advient, parvenir à être sauvegardé ou à se retrouver, mais aussi qu’il peut être perdu. La «relation de soins» implique, je l’ai dit, le rapport du sujet à l’autre/Autre dans un «champ de transférance» pour reprendre ici cette formule de Pierre Fédida. Par la dimension «d’échange/transfert» qu’elle engage, par le maintien et le «porter psychique» qu’elle peut venir assurer pour tel ou tel sujet, on peut la rapprocher de la fonction psychique ce «soin primaire», de ce Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 17 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 18 «soin fondamental» qu’est pour l’infans «l’action» de l’ autre/Autre secourable. Une action qui pare au possible du désespoir d’exister, de la souffrance psychique, d’un état de détresse, en ne «laissant pas tomber», en venant à l’aide par un maintien et un «porter». Ce que Winnicott saisit en termes de holding et «d’expérience de l’échange». «En prenant le terme de «holding» au sens large, il permet de décrire tout ce qu’une mère fait en prenant soin physiquement de son bébé...» écrit Winnicott. Situation de holding à laquelle est associé chez lui le concept de «préoccupation maternelle primaire» ainsi que la question de «l’expérience de l’échange» entre la mère et l’infans (Winnicott, 1969 et 2000). On peut remarquer, dans le fil de cette question du holding, que dans les institutions médicales ou autres, c’est souvent à de seules dimensions d’hygiène, de nécessités physiologiques, à des gestes machinaux et des paroles conventionnelles sans adresse qui ne supposent aucun sujet, que sont ramenés des soins qui suppléent, qui pallient ce qu’une personne ne peut accomplir sans le secours d’un autre. Tels sont les soins qui sont dits, globalement, de «nursing» (laver, changer, nourrir etc.), bien peu valorisés, et dont certains sont même plus ou moins laissés «au bon soin» de l’entourage. Ainsi, par exemple, si placer une sonde gastrique pour nourrir est un soin «valorisé» à l’hôpital comme geste médical, aider à manger une personne qui ne peut le faire seule est plutôt pensé comme une charge de travail indue. Ce sont des soins pourtant par lesquels, de façon privilégiée, peut opérer la fonction psychique de la «relation de soins» dans «l’expérience de l’échange». Des soins donc non pas seulement corporel mais, disons, psychocorporel, via lesquels, chez l’infans, l’autre /Autre primordial maternel répond à l’initial aux «besoins de la psyché». Il ne s’agit donc pas dans ces soins d’être «maternant» au sens commun du terme, ce qui se ramène souvent à traiter l’adulte comme un enfant, mais de soutenir, de «porter» quelque chose du sujet dans une adresse de parole jusque dans les soins d’autoconservation du corps les plus élémentaires. Chacun ne répond pas de la même manière à ce qui l’éprouve, qui peut l’ébranler dans ses assises subjectives et jusqu’aux tréfonds de son être. Chez l’adulte, de plus déjà fragilisé, négliger ou méconnaître l’importance que peut avoir, pour lui, la fonction psychique de «la relation de soins» par laquelle il peut être répondu aux «besoins de la psyché», ne va pas sans dommages, parfois majeurs: elle peut être d’ordre aussi vital pour des adultes que les soins médicaux du soma. Ce qu’on tend trop encore à laisser pour compte. L’autre /Autre soignant, par la modalité de sa présence, de son «contact», par ce qui en est reçu, perçu par un sujet, peut être secourable mais aussi destructeur pour celui-ci, sans que le(s) soignant(s) en soupçonne rien. On a pu en avoir une idée avec les cas de Mme C de X, du monsieur à la serviette ou celui du monsieur qui s’est suicidé devant «ses» soignants . Aurait pu suivre une pente du même ordre ce monsieur Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES venant d’être hospitalisé en réanimation, attaché serré des pieds et des mains car il s’agite, arrache tout et se jette sur les barrières de son lit. Il n’a pas de visite et dans le service, personne ne comprend rien à ce qu’il essaie de dire. Un coup de fil passé en province dans sa famille, qui prend des mesures pour venir, donne à penser qu’il parle peut-être dans son patois local. Un «interprète» sera cherché le jour même pour venir lui parler dans la familiarité d’une langue «maternelle» qui lui est coutumière depuis l’enfance et qui semble la seule qui lui vienne dans son affolement présent. S’ensuivra un apaisement rapide qui permettra de lever les mesures de contention. En guise de conclusion: la question d’un hiatus entre «guérison médicale» et «réanimation» psychique Pierre Fédida remarquait: «L’observation de malades somatiques à l’hôpital général m’a souvent suggéré l’hypothèse que la mort intervient brutalement chez des patients incapables – dirais-je – de somatiser leur état somatique. C’est, par exemple, à l’issue d’une guérison médicale techniquement réussie que survient l’accident mortel (…). Dans de tels cas, tout se passe comme si un travail de deuil somatique était brutalement interrompu par la guérison médicale du malade» (Fédida, 1978, p. 646). Etre «incapable de somatiser un état somatique», n’estce pas dire l’incapacité à ne pas «psychiser» le somatique ou, dit autrement, la compétence de certains à «psychosomatiser» le somatique? Où il faudrait reprendre la question de l’autoérotisme et du psychique dans son action physique, ici en lien avec celle de la mort brutale, et plus incisivement des effets somatiques et sur le somatique du psychique. Chez l’être humain, le registre de l’autoconservation, des besoins vitaux, vient se subordonner, formule Lacan, à l’appareil signifiant qui vient s’y substituer. Le soma, le biologique, leur fonctionnement sont repris «en sous-œuvre», formule quant à lui Laplanche, par l’action psychocorpelle de «la personne secourable» (Freud), et il soutient: «... du côté de l’adulte ce qui s’implante, ce sont des messages avant tout somatiques, inséparables des signifiants gestuels, mimiques ou sonores, qui les portent» (Laplanche, 1999, p. 13). Si on admet cela, c’est alors admettre une compétence plus ou moins grande chez l’être humain à s’ordonner, jusque dans son fonctionnement d’organisme, du rapport à l’autre/ Autre, à l’initial l’autre/«l’Autre primordial maternel», à être modifié et régulé par et dans le jeu des «relations psychiques fondamentales» (Lacan) qui se façonnent dans ce rapport. Un rapport dont l’instauration et les effets se donnent à penser chez Freud avec la question de l’autoérotisme, indissociable de celles de la pulsion Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 19 LATIN AMERICAN JOURNAL OF FUNDAMENTAL PSYCHOPATHOLOGY ONLINE 20 sexuelle et des zones érogènes, le conduisant à penser que le corps tout entier pouvait être érogène, c’est dire autoérotisé. C’est dire que le corps dit «humain» n’est pas qu’un organisme comme d’autres, il est aussi corps pulsionnel, corps de désir, de paroles, corps «psychisé» qui se construit dans le rapport à l’autre/ Autre. C’est là des problèmes d’importance si on considère, et il y a un certain accord sur ce point, que les investissements autoérotiques «jouent certainement un rôle très important dans les phénomènes psychosomatiques» (Lacan, 1954-55, p. 120). A considérer, en effet, cette idée d’un écart, d’un hiatus ici, selon Fédida entre travail de deuil somatique et guérison médicale du malade, n’est-ce pas alors ce qui se fait ressentir comme un «lâcher», un «laisser tomber» dans des soins corporels ayant pris dimension de fonction psychique, que va se jouer chez certains, considérés guéris, l’impossibilité psychique, psychocorporelle, de se passer brusquement de ces soins pris pour eux dans le rapport à l’autre/Autre? Un rapport que, dans les services de soins intensifs comme la réanimation, des «machines-signifiants» peuvent présentifier. On connaît en réanimation néonatale la mort brutale de nourrissons «sevrés» des machines car considérés sortis d’affaire au plan médical et capables, disons, de vivre seuls. Les machines et autres appareillages auxquelles ils sont reliés dès leur naissance souvent peuvent prendre fonction psychique d’Autre, avoir valeur de «part de corps/ part de soi /part de l’Autre». Il peut en être de même chez des adultes. Le débranchement des machines et autres appareillages «signifiants» avec lesquels le sujet à «fait corps» (on sait les difficultés et l’angoisse souvent du «sevrage» du respirateur, du monitoring cardiaque), qu’il a écouté, d’où il s’est «entendu», peuvent s’éprouver comme abandon, comme «lâchage» de l’Autre. Alors que «la guérison médicale techniquement réussie» est là, le sujet lui, peut ne pas être revenu d’un processus de «déshabitation/désanimation» psychique par lequel il s’est secouru et/ou d’un «porter» par l’Autre-machine qui lui est brusquement retiré. Un écart, un hiatus plus ou moins grand et dangereux que peut venir sanctionner la mort brutale. Où on peut penser l’importance, ici aussi, de ne pas négliger «la relation de soins», la fonction psychique du holding, dés le temps même de soins intensifs où des machines viennent suppléer aux «besoins somatiques». C’est là peut-être ce qui pourrait permettre à certains, techniquement guéris, un «travail de deuil somatique», de «somatiser leur état somatique» qui ne vient plus se confondre chez eux, par les voies de logiques psychiques primitives s’instaurant avec «la fonction autoérotique» (Fédida), avec les «besoins de la psyché» et leur mise à mal. Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES References AULAGNIER, P. La violence de l’interprétation. Du pictogramme à l’énoncé. Paris: PUF, 1975. DAUMEZON. Les états régressifs aigus chez la personne âgée. Recherches sur les maladies mentales. 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Nessas situações, regressão patológica, processo de auto destruição, lógicas psíquicas primitivas parecem fundamentar uma defesa paradoxal: se salvar do aniquilamento pelo aniquilamento. Deve-se considerar a importância, no que se refere a estas situações, da função psíquica da «relação de cuidado» que implica a relação com o outro/Outro, e pela qual pode-se corresponder às «necessidades» psíquicas. Palavras-chave: Autodestruição, necessidades do psiquismo, morte brutal, síndrome de deslizamento, hospitalismo 22 Some clinical situations bring to suspect the possibility for an hospitalized subject to “to take him/her’s own life” in a “strange euthanasia” by a physical action of the psychic. An action that can be thought consequent and correlative with a serious and lasting damage of the “needs” of the psychic which can lead to what seems like a brutal death but also like the “shift syndrom” which often ends with death. In these situations, pathological regression, self-destruction process, primitive psychical logics seem to build a paradoxal defence: to avoid annihilation by annihilation. Regarding these situations, the importance is to be taken seriously of the psychical function of “the treatment relation” which implies a link with the other/the Other and by which the “needs” of the psychic can be fulfilled. Key words: Self-destruction, “needs” of the psychic, brutal death, shift syndrom, hospitalism Ciertas situaciones clínicas sugieren la posibilidad de que un sujeto hospitalizado “se mate” en un extraño proceso de eutanasia por acción de lo psíquico sobre lo físico. Una acción que puede ser pensada simultáneamente como consecuencia y correlación de un grave y duradero adolescimiento de las “necesidades” de la psique que puede conducir a lo que aparece como una muerte brutal, pero también al “síndrome de deslizamiento” que frecuentemente termina en muerte. En esas situaciones, regresión patológica, proceso de auto destrucción, lógicas psíquicas primitivas parecen fundamentar una defensa paradoxal: salvarse del aniquilamiento por el aniquilamiento. Se debe considerar la importancia, en lo que se refiere a estas situaciones, de la función psíquica de la “relación de cuidado” que implica la relación con el otro/Otro, y por la cual se puede corresponder a las necesidades psíquicas. Palabras claves: Autodestrucción, necesidades del psiquismo, muerte brutal, síndrome de deslizamiento, hospitalismo Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010 ARTIGOS DE AUTORES DE OUTROS PAÍSES Citação/Citation: Péquignot, C. D. Des «besoins» de la psyché au syndrome de glissement ou à la mort brutale: «une étrage euthanasie»?. Latin American Journal of Fundamental Psychopathology Online, São Paulo, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010. Editores do artigo/Editors : Prof. Dr. Henrique Figueiredo Carneiro, Profa. Dra. Junia de Vilhena e Profa. Dra. Ana Cecilia Magtaz. Recebido/Received : 02.08.2010/08.02.2010 Aceito/Accepted : 30.08.2010/08.30.2010 Copyright: © 2010 Associação Universitária de Pesquisa em Psicopatologia Fundamental/ University Association for Research in Fundamental Psychopathology. Este é um artigo de livre acesso, que permite uso irrestrito, distribuição re reprodução em qualquer meio, desde que o autor e a fonte sejam citados/ This is na open-acess article, which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any madium, provided the original author and source are credited. Financiamento : O autor declara não ter sido financiado ou apoiado/The author has no support of funding to report. Conflito de interesses : O autor declara que não há conflito de interesse/The author declares that has no conflict of interest. 23 CATHERINE DESPRATS PÉQUIGNOT Psychologue clinicienne; Psychanalyste; Maître de conférences HDR, UFR SHC; Université Paris VII; Membre du Centre de Recherches Psychanalyse, Médecine et Société, Paris VII. 56 rue Jeanne d’Arc 75013 Paris, France, Fr e-mail: [email protected] Lat. Am. Journal of Fund. Psychopath. Online, v. 7, n. 2, p. 3-23, novembro de 2010