La maison basse énergie: confort et écologie font bon ménage
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La maison basse énergie: confort et écologie font bon ménage
DPrintemps OS SIER 2003 • Mars - Avril - Mai La maison basse énergie: confort et écologie font bon ménage Notre logement est synonyme de chez-soi et souvent de bien-être. Du moins dans les pays de ce côté-ci de l’équateur. Notre logement est aussi l’endroit où nous passons de longues heures, où se façonne en quelque sorte notre vie quotidienne. Mais trop souvent, nos maisons ont été et sont encore mal conçues, ce qui entraîne une série de problèmes: courants d’air, mauvaise ventilation et problèmes d’humidité ne sont que trois des vices liés à une mauvaise conception. Résultat, elles ne sont pas saines, pas confortables et consomment beaucoup trop d’énergie. Et bien sûr, qui dit consommation importante, dit aussi coûts prohibitifs puisqu’il faut payer toute cette énergie qui s’échappe par les portes, les fenêtres et le toit! Le défi d’aujourd’hui est de construire des maisons qui satisfont à toutes les exigences techniques tout en étant plus confortables, plus saines, moins coûteuses et, aspect non négligeable, moins consommatrices d’énergie. Rêve d’idéaliste, mission impossible? Pas le moins du monde! DOSSIER En route vers la maison basse énergie. Pourquoi? Faire plus avec moins Il faut donc sortir de l’impasse de cette (sur)consommation. Il en va de notre qualité de vie sur Terre. Tout le monde doit y mettre du sien. Les ménages aussi. Halte au gaspi Des maisons basse énergie: tout le monde en parle aujourd’hui. Bonne isolation, bons vitrages, appareils peu “énergivores”... Mais voyons d’abord pourquoi il est essentiel de réduire la consommation d’énergie des ménages. Les ménages consomment en moyenne 30% de l’énergie totale utilisée dans nos pays. Un pourcentage beaucoup trop élevé. Cette situation ne peut se perpétuer, d’autant plus lorsqu’on sait que l’approvisionnement énergétique mondial est dominé par les combustibles fossiles (78%). Le GIEC* a montré que sans mesures efficaces de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le climat pourrait se réchauffer jusqu’à 5,8°C d’ici 2100. Certains prônent la filière nucléaire. Mais remplacer un problème par un autre n’a jamais constitué une solution. La pollution de l’air provoquée par cette consommation croissante d’énergie est aussi source de maladies et d’inconfort. Augmentation des problèmes respiratoires, des allergies... N’est-ce pas là le “privilège” de nos sociétés industrielles? 18 Greenpeace • Printemps 2003 Il faut bien l’admettre, nous sommes plus forts pour gaspiller nos ressources énergétiques que pour les utiliser de façon rationnelle. Seulement 2% de l’énergie d’une centrale nucléaire ou thermique sont convertis en lumière dans une ampoule à incandescence (60% de l’énergie est perdue au niveau de la centrale, 10% au niveau du transport et 95% au niveau de la lampe). Sans oublier notre attitude et nos équipements propices au gaspi: la chaleur qui s’échappe par les toits insuffisamment isolés, un vieux frigo énergivore, notre télé ou vidéo que nous laissons en veille toute l’année... Heureusement, la maladie du gaspillage peut se guérir. En 1975 déjà, un ingénieur de 29 ans, Amory Lovins, qui créera ensuite le Rocky Mountain Institute (centre de recherche sur l’utilisation efficace et durable des ressources), dénonça la principale faiblesse de notre système énergétique: la faible productivité des ressources. Selon lui, nous pouvons faire tout ce que nous faisons aussi bien, voire mieux, avec seulement le quart de l’énergie que nous utilisons actuellement. Pour lui, la réponse au problème énergétique mondial consiste clairement à “faire plus avec moins”. Deux exemples: les économies d’énergie réalisées par le Danemark lui ont permis de stabiliser sa consommation au cours des trente dernières années, tout en assistant à une croissance de son économie de 75% durant cette période. La Chine a réussi, pendant trois années consécutives, à réduire ses émissions annuelles de gaz carbonique malgré une croissance économique de 7%. Pour y parvenir, elle a remplacé bon nombre de ses usines à consommation excessive par de nouvelles installations moins énergivores. Une telle démarche s’applique aussi pour les ménages. *Groupe international d’Experts sur les Changements climatiques. Quantité d’énergie perdue lors de la transformation de l’énergie primaire en électricité, du transport de l’électricité et de son utilisation. L’énergie utile ne représente plus que 2% de l’énergie primaire consommée au départ... Tenez compte de l’orientation de votre maison: de grandes fenêtres placées côté Sud apportent une chaleur appréciable. © GREENPEACE/BEERE © GREENPEACE/HODSON DOSSIER Pensez aux panneaux solaires: ils produisent de l’électricité directement à partir de la lumière du soleil. La maison basse énergie: l’avenir à nos portes Une maison basse énergie consomme en moyenne trois fois moins d’énergie qu’une maison mitoyenne traditionnelle. Lorsqu’on sait que les ménages consomment près de 30% de l’énergie totale utilisée, autant dire que le développement de ce concept en vaut la peine! Si vous comptez rénover votre logement ou construire une nouvelle habitation, optez donc pour le concept “basse énergie”! (Pour la construction, vous pouvez aussi privilégier un concept encore plus poussé, celui de la maison “passive” – voir plus loin –). L’environnement s’en portera mieux et vous augmentez votre confort! Un exemple réussi de rénovation basse énergie Impossible? Pas du tout! Le concept de la maison basse énergie s’applique depuis des années déjà dans les pays scandinaves, en Allemagne, en Suisse... où il connaît un vif succès. Certains prétendent que les technologies nécessaires ne sont pas encore disponibles. C’est faux. Elles existent, sont adaptées aux connaissances actuelles et n’attendent qu’à prendre le relais. Il y a près de cinq ans, Wim de Groote, spécialisé dans l’utilisation rationnelle de l’énergie, procéda à la rénovation de sa maison mitoyenne située à Gand, en Belgique. Il a ensuite, pendant cinq années consécutives, procédé à des relevés mensuels de sa consommation d’énergie. Le but? Avoir le cœur net quant aux bienfaits des rénovations pratiquées dans cette maison dotée de tout le confort moderne. Nous ne ferons pas ici le compte-rendu détaillé de toutes les modifications apportées par le ménage, composé de deux adultes et de deux enfants en bas âge. Disons seulement que les propriétaires ont veillé à isoler le plus possible leur maison (20 cm de laine minérale dans le toit par ex.), ce qui leur a permis de limiter le système de chauffage et d’opter pour des convecteurs au gaz. A côté de cela, la maison a été équipée d’un système d’éclairage très efficace, d’un séchoir au gaz, d’un frigo très économe en énergie... Résultat, la consommation totale d’électricité du ménage s’élève à quelque 1.100 kWh par an, ce qui équivaut à un cinquième de l’électricité consommée par d’autres ménages de quatre personnes. Sa consommation de gaz (chauffage + eau chaude + cuisinière + séchoir) s’élève quant à elle à 7.500 kWh/an (750 m3), soit trois fois moins que la moyenne! Autant dire que les coûts supplémentaires réalisés par la famille au moment de la rénovation (dû notamment à l’achat d’appareils à haut rendement parfois plus onéreux) ont été amortis depuis longtemps! Greenpeace • Printemps 2003 19 DOSSIER Les trois clés d’une maison basse énergie L’isolation... Qui dit bonne isolation, dit moins d’énergie pour le chauffage. Ainsi, dans une maison basse énergie, isolée de façon optimale, les besoins en chauffage sont facilement trois fois moins élevés que dans une maison classique. Les valeurs d’isolation d’une maison basse énergie (voir cadre ci-dessous) sont plutôt inhabituelles pour la Belgique, heureusement un peu moins pour des pays comme la France et la Suisse. La Suède fait mieux encore. Depuis plus de dix © KRIS BAERT © GREENPEACE/NÖRLEM • Isolez comme il faut! Au moins 12 à 15 cm dans les murs, 20 cm dans le toit et 10 cm dans le sol. • Utilisez du double vitrage super isolant. • Placez correctement l’isolation. Evitez à tout prix les ponts thermiques. • Prévoyez une bonne ventilation de votre maison, en limitant le plus possible les pertes de chaleur. ans, le pays appliEpaisseurs moyennes d’isolation dans que des normes les murs en cm - Europe 2001 (source: Eurima) strictes en matière Belgique d’isolation. RésulTurquie tat, le chauffage Grèce Italie d’un nouveau logePortugal ment y nécessite Espagne Slovaquie près de deux fois République tchèque moins d’énergie Autriche Pologne qu’un logement siAllemagne Irlande milaire chez nous, Royaume-Uni même avec des Pays-Bas France températures hiverSuisse nales qui descenDanemark Norvège dent jusqu’à -30°C! Finlande Suède Bon nombre de 0 5 10 15 20 25 personnes continuent à prétendre qu’une “trop bonne” isolation entraîne Ensemble, ils représentent 40% de la des problèmes d’humidité... C’est là un consommation énergétique des ménamythe qui a la vie dure dans nos pays. ges! Dans une maison basse énergie, ce L’important est de prévoir une bonne poste peut être réduit à environ 1/5 de la ventilation! consommation moyenne, sans sacrifier Les sommes supplémentaires consaau confort. Car nous l’avons dit, loin de crées à l’isolation sont compensées par nous l’idée d’abandonner toutes ces une installation de chauffage plus petimachines qui facilitent le quotidien, te et moins chère. mais d’encourager le développement d’appareils moins énergivores. ...Les appareils économes en Ici aussi, si l’investissement de départ est énergie... légèrement plus élevé, ce surcoût est rapidement amorti grâce aux économies que Vos lampes, votre frigo, votre machine à vous réalisez sur votre facture d’électricité! laver... consomment de l’électricité. Pour votre maison, choisissez une localisation centrale, à proximité des transports publics, de votre travail, de l’école... Optez aussi pour une maison dimensionnée selon vos besoins, mitoyenne plutôt que quatre façades. DOSSIER La lampe halogène: un élément très efficace pour... cuire un œuf! Saviez-vous que la température au-dessus de certaines lampes halogènes est si élevée qu’on peut y faire cuire un œuf ou pourquoi pas un steak! Ces lampes peuvent d’ailleurs présenter un risque pour la sécurité. Ce sont surtout les lampes halogènes de 300 W sur pied, avec variateur, qui peuvent être à l’origine d’incendies. A bon entendeur! Et le soleil brillera! Dans une maison basse énergie, une part importante de l’énergie encore nécessaire peut être produite à partir de sources renouvelables, comme le soleil. Pensez aux panneaux solaires. Ils se placent assez facilement et votre lumière brillera grâce au soleil! Envie d’eau chaude “solaire”? Optez pour un boiler solaire! L’énergie tirée du soleil prend tout son sens dès que les mesures d’économie d’énergie ont été réalisées. • Remplacez votre pommeau de douche ordinaire par une douchette économique. Elle permet de se doucher tout aussi confortablement en utilisant 50% moins d’eau (5 à 7 l/min au lieu de 10 à 18 l/min)! • Placez des limiteurs de débit sur votre robinet. Ils régulent la quantité d’eau. • Placez un chauffe-eau solaire: il utilise l’énergie du soleil pour produire de l’eau chaude! © GREENPEACE/JOHNS • Remplacez vos lampes à incandescence classiques et vos lampes halogènes par des lampes économiques. Les deux premières catégories de lampes ont des rendements très bas, de l’ordre de 5%. Près de 95% de l’électricité est donc perdue, essentiellement sous forme de chaleur. • Votre machine à laver rend l’âme? Achetez-en une avec essorage efficace pour réduire le temps de séchage dans le séchoir. • Optez aussi pour un frigo à haut rendement: il est de meilleure qualité, fait moins de bruit et a une durée de vie plus longue. • Coupez les positions “veille” de votre TV et de votre magnétoscope: elles sont à l’origine de respectivement 80% et 95% de l’énergie consommée par ces appareils! Les maisons basse énergie à travers l’Europe ... les économies d’eau chaude! L’eau chaude sanitaire est un autre gros consommateur d’énergie des ménages (10%). La consommation d’eau chaude moyenne d’un ménage de 3 à 4 personnes est de 85 litres par jour. Or, de simples mesures techniques permettent de réduire fortement cette consommation. Alors, réinventons l’eau chaude! Il est difficile d’avoir un aperçu du nombre de maisons basse énergie à travers l’Europe, d’autant plus qu’il n’existe pas de normes uniformes pour l’ensemble des pays. On estime cependant qu’il doit y en avoir quelques dizaines de milliers à travers le continent, situées pour l’essentiel dans les pays germanophones, à savoir l’Allemagne, la Suisse et l’Autriche ainsi que dans les pays scandinaves. De façon générale, l’Europe du Sud accuse un net retard dans ce domaine. Il s’agit à la fois d’une question d’attitude et d’intérêt économique. Il semble évident, vu la répartition géographique des maisons basse énergie, qu’on accorde plus d’importance aux économies d’énergie là où les besoins sont plus grands. Pour la préservation de notre environnement, il serait pourtant essentiel de développer ces maisons “vertes” à grande échelle ou pourquoi pas, d’opter pour des concepts encore plus pointus... Consommation chauffage + électricité (kWh-énergie primaire, ménage de 4 personnes) 45000 35000 30000 20000 15000 10000 5000 0 Greenpeace • Printemps 2003 Maison passive 25000 Maison basse énergie Saviez-vous que chaque produit dont vous disposez a un poids écologique? Autrement dit, “du berceau à la tombe”, un produit nécessite une certaine quantité de matière. La fabrication d’une voiture par exemple représente en moyenne 15 tonnes de déchets solides, sans oublier l’eau consommée -et polluée- pour sa fabrication. Ce même raisonnement vaut pour un frigo, une télévision, une machine à laver, un séchoir, une vidéo... Il est donc important de réduire non seulement la consommation d’énergie de ces appareils, mais aussi leur poids écologique: un tel objectif est faisable techniquement et constitue un impératif essentiel pour la préservation de l’environnement. 40000 Maison neuve ordinaire Déjà entendu parler de “poids écologique”? 21 DOSSIER Maison passive située à Wittlich, dans la Moselle. Une maison en apparence comme une autre! Réalité! La maison passive est aujourd’hui le nec plus ultra en matière d’économie d’énergie. Ce terme fait référence à une norme de construction élaborée par le Dr Wolfgang Feist, du PassivHaus Institut en Allemagne. Les maisons passives ont ceci de particulier qu’elles maintiennent toute l’année, été comme hiver, une température ambiante d’environ 20°C, sans système de chauffage conventionnel. Par ailleurs, leur consommation d’énergie est quatre à cinq fois inférieure à celle d’un logement standard. Kris Baert travaille pour Cenergie, une association spécialisée dans l'efficacité énergétique et les énergies renouvelables. Il fait construire une maison passive. Nous l'avons interrogé pour mieux comprendre ce concept encore peu connu. Greenpeace Magazine: vous construisez en ce moment une maison passive. Quels en sont les principaux avantages? Kris Baert: en fait, la maison passive est une sorte de maison basse énergie poussée à l’extrême: couche d’isolation deux fois supérieure à celle d’une maison basse énergie, vitres et vitrages super isolants... Les fenêtres sont à ce point isolantes que les gains de chaleur sont supérieurs aux pertes! Il s’agit d’un concept optimal d’un point de vue du confort et intéressant sur le plan financier. GPM: quelle est la principale différence entre une maison basse énergie et une maison passive? KB: dans une maison basse énergie, la consommation d’énergie pour le chauf- 22 Greenpeace • Printemps 2003 fage est de maximum 60 kWh/m2 par an; elle nécessite donc encore une installation de chauffage, qui sera toutefois bien plus petite que celle utilisée dans les maisons traditionnelles. Dans une maison passive, la consommation d’énergie pour le chauffage se limite à 15 kWh/m2 par an, même moins. Résultat, elle peut se passer complètement de chauffage! En fait, la puissance d’un fer à repasser suffirait à chauffer la maison. GPM: bon, mais il faut quand même encore chauffer... KB: d’une certaine façon oui... mais sans chauffage conventionnel! Les besoins minimums de chauffage peuvent être satisfaits en chauffant l’air frais cir- culant dans le système de ventilation. En fait, la maison passive est obligatoirement équipée d’un système de ventilation mécanique pour maintenir la qualité de l’air optimale. Cette ventilation est nécessaire, compte tenu du fait que la maison est vraiment hermétique. En chauffant l’air sortant de ce système (via un échangeur de chaleur, connecté par exemple au boiler à gaz), il y a tout à fait moyen de maintenir une température intérieure agréable, même lorsque les conditions météo sont extrêmes! Et bien sûr, la chaleur provenant du rayonnement solaire à travers les vitres orientées Sud, des appareils électroménagers et des habitants eux-mêmes apporte un “plus” non négligeable! Rocky Mountain Institute: un bâtiment passif de la première heure Le Rocky Mountain Institute (RMI), centre de recherche sur l’utilisation efficace et durable des ressources, a élu domicile dans les montagnes Rocheuses de l’Ouest du Colorado, à 2.200 mètres d’altitude. Chose étrange et insolite, les 45 employés du centre n’ont pas besoin d’un système de chauffage classique, même lorsque le thermomètre à l’extérieur descend sous zéro °C. Ils disposent tout au plus de petits poêles à bois fournissant à peine 1% des besoins en chaleur d’une maison normale dans cette région. Les 99% restants proviennent du solaire passif: même par temps nuageux, la chaleur du soleil est piégée par des super vitrages qui laissent passer 75% de la lumière visible et 50% de l’énergie solaire, mais ne laissent pratiquement pas échapper de chaleur; les murs de pierre, épais de 40 cm, et le toit sont isolés de façon à limiter les pertes de chaleur au moins deux fois plus que la normale; les fuites d’air sont pratiquement éliminées; la lumière du jour, pénétrant de tous côtés grâce à de grands espaces vitrés, satisfait 95% des besoins en éclairage, le restant étant assuré par des lampes très efficaces... Ce bâtiment, créé en 1982, a été l’un des premiers bâtiments “verts”. Aujourd’hui, on peut encore faire mieux, les techniques ayant été développées. Mais cet exemple montre bien qu’il ne faut pas attendre les technologies futuristes pour y arriver. Elles sont disponibles aujourd’hui, ont été testées avec succès et attendent une application généralisée. © ROCKY MOUNTAIN INSTITUTE © CENERGIE Vivre sans chauffage? Utopie ou réalité? DOSSIER GPM: y a-t-il moyen de transformer une maison quelconque en maison passive? KB: une maison classique contient quasi inévitablement des ponts thermiques (endroits où l’isolation est interrompue, par exemple entre un mur et une fondation de la maison). Ces ponts thermiques sont tabous dans les maisons passives. Rien que de ce point de vue-là, il n’est hélas pas encore intéressant de transformer un logement existant en maison passive. Les coûts seraient beaucoup trop élevés. En cas de rénovation, le choix d’une maison basse énergie est beaucoup plus logique. GPM: les maisons passives peuvent-elles être construites n’importe où? KB: en principe, oui, car ces maisons reposent sur un concept très simple. Mais bien évidemment, la résistance thermique des murs, des toits et des fenêtres sera bien sûr très différente d’un pays à l’autre, selon les conditions climatiques. En Suède par exemple, on ne s’étonne plus de voir une couche d’isolation de 50 cm! GPM: et le prix? KB: une maison qui, dès ses débuts, est pensée selon le concept “passif ”, ne coûte pas nécessairement beaucoup plus cher qu’une maison conventionnelle. Cela provient du fait qu’on évite un certain nombre d’investissements coûteux, comme le système de chauffage. La facture d’énergie étant de 4 à 5 fois moins élevée que celle d’un logement conventionnel, le remboursement mensuel total (prêt + facture d’énergie) sera plus ou moins comparable. GPM: ces maisons ont-elles un avenir? KB: le concept de la maison passive s’applique surtout au niveau de la construction (et non de la rénovation), qu’il s’agisse de logements privés, de bureaux, d’écoles, d’hôpitaux... Dans certains pays, en Allemagne et en Suisse par exemple, la maison passive est déjà un concept connu. Nous prévoyons qu’à terme il se généralise au niveau européen. Cela serait somme toute une étape logique, compte tenu de la plus-value économique, du confort élevé et de la très faible consommation d’énergie de ces bâtiments. L’énergie la plus respectueuse de l’environnement est celle que je ne consomme pas! Actuellement, 20% de la population mondiale -du Nord- consomment 80% des ressources énergétiques. Cette situation est insoutenable surtout vis-àvis des 80% du Sud de la planète. Notre (sur)consommation n’est pas sans conséquences! Les pays du Sud n’ont pas les moyens de se prémunir face aux changements climatiques: des millions de personnes s’y retrouvent sans toit suite au passage d’un cyclone, d’une inondation... Le développement rapide de solutions positives, dont les maisons basse énergie constituent un aspect important, profite dès lors à tout le monde: à nous, qui améliorons notre indépendance énergétique et économisons des sommes substantielles; aux Etats du Sud de la planète qui ont tout intérêt à s’engager dans la voie du développement durable, et bien sûr, à l’environnement. Moins nous utiliserons d’énergie, mieux notre petite planète et l’ensemble de ses habitants s’en portera! Caroline Veter Remerciements à Kris Baert pour sa précieuse collaboration. Références: • Facteur 4: Ernst U. von Weizsäcker, Amory B. Lovins, L. Hunter Lovins, un rapport au club de Rome, 1997; • What is a Passive House? Passivhaus Institut; • Economiser l’énergie, guide pour la construction, la rénovation et l’habitat, Greenpeace Belgique; • La maison des [néga] watts; le guide malin de l’énergie chez soi, Terre vivante, 1999; • Passiefhuis-Platform asbl, de REFLEX voor energiebewust bouwen; • Living Today, het duurzame huis van vandaag... de standaard van morgen... • Cenergie, http://www.cenergie.be • Sustainable Energy for Poverty Reduction: an Action Plan; Greenpeace & Practical answers to poverty, 2002. • Rocky Mountain Institute, http://www.rmi.org. Pour plus d’informations: www.greenpeacemagazine.net/fr/57/ © GREENPEACE/BARRY GPM: existe-t-il beaucoup de maisons passives en Europe? Où se trouventelles? KB: en Europe, on compte actuellement quelques milliers de maisons passives, surtout en Allemagne, en Autriche, en Suède et en Suisse. Entre-temps, un certain nombre de bureaux ont à leur tour été réalisés selon ce principe et beaucoup d’autres projets sont en cours. La première maison passive a été construite à Darmstadt par le Dr Feist, en 1992. Lors de l’exposition universelle de Hanovre, en 2000, il y avait même moyen de réserver une nuit dans une maison passive pour goûter au confort qu’offre un tel bâtiment!