La peinture en France au XVe siècle par

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La peinture en France au XVe siècle par
La peinture en France au XVe siècle par Isabelle Marquette
L’art du XVème montre une diversité des commanditaires et changement du statut de l’artiste avec une multiplication des titres honorifiques.
L’art devient un moyen de faire passer un message, d’affirmer une position. On assiste à l’émergence d’une nouvelle catégorie de
commanditaires. A côté de la noblesse et des princes de fleurs de lys, une bourgeoisie enrichie et anoblie voit dans la commande artistique un moyen
d’asseoir et d’affirmer son nouveau statut. Les difficultés connues par le roi, notamment lors de la guerre de Cent ans ont favorisé l’apparition ou le
développement de nouveaux foyers artistiques à travers la France. Le contexte de la création se modifie peu à peu entre émotion et monumentalité
I – Autour de 1400, le gothique international La fin du règne de Charles V, en 1380, s’accompagne d’une certaine stabilité politique et prospérité
économique. Le roi et ses frères : Jean, duc de Berry, Louis, duc d’Anjou et Philippe le Hardi, duc de Bourgogne développent une politique de
commande artistique intense. Paris a un statut de véritable capitale des arts à échelle européenne. Originaire de Flandre Jean de Bondol vient travailler
à Paris (Jean Bondol ou Jean de Bruges Bible de Jean de Vaudetar. Frontispice et Cartons de la Tapisserie de l’Apocalypse d’Angers.) Dans ce contexte d’émulation et d’échanges
se définit le style en vogue dans toutes les cours européennes vers 1400. L’esthétique du gothique international est issue de l’époque de Philippe le
Bel, issue du courant courtois (Jean Pucelle, qui connaissait l’art avignonnais) du courant naturaliste qui apparaît vers 1340. Les 2 courants mêlant
élégance et préciosité se réunissent.
Maître de Boucicaut, Heures du Maréchal de Boucicaut, vers 1400, Paris, Jacquemart-André. Conserve l’élongation des figures, le style poupin, la grande élégance, mais
aussi porte une attention nouvelle, presque atmosphérique, au paysage. Une trace d’italianisme se ressent dans la composition architecturée de
l’espace de la Nativité. A noter le développement des marges aux rinceaux élégants, contorsionnés.
Philippe le Hardi fait travailler un peintre venu de Nimègue, Jean Malouel. La construction de la Chartreuse de Champmol est le grand chantier de
Philippe le Hardi, puis de Jean Sans Peur. Malouel et Sluter travaillent à cette sépulture dynastique des ducs de Bourgogne.
Grande Pietà ronde, vers 1400, Paris, Musée du Louvre (Tondo) Le Christ mort soutenu par son Père mélange de 2 iconographies : Pietà et Trinité pour laquelle les
ducs de Bourgogne avaient une dévotion particulière. Surement à usage de dévotion privée compte tenu des dimensions.
Henri Bellechose, Retable de saint Denis, 1415-1416, Paris Louvre. Christ en croix entouré de deux scènes du martyre de saint Denis. Philippe le Bon accède au pouvoir
et se déplace dans les territoires flamands où un autre style est en train d’éclore (primitifs flamands).
Le mécénat de Jean de Berry (1340-1416). Duc de Berry, comte d’Auvergne et de Poitou, il règne sur un vaste territorial, mitoyen des Bourguignons.
Dijon et Bourges ne cesseront de dialoguer. Jacquemart de Hesdin a travaillé sur de nombreux manuscrits pour le duc dont les Grandes Heures du duc de
Berry. A la fin du manuscrit, il manque quelques feuillets pour clore le cycle de la Passion. Le Portement de croix1409 (Louvre) pourrait en faire partie. Dans sa
composition, il fait preuve d’une connaissance de l’art italien, et de celui de Simone Martini-Portement de Croix, Louvre fait pour Avignon mais présent à
Champmol très rapidement.
Les frères Limbourg Originaires de Nimègue, ils sont issus d’une famille d’artiste. Leur oncle maternel Jean Malouel les fait venir à Paris en 1399. Ils
se forment auprès d’un orfèvre. En 1409, ils sont mentionnés comme « valets de chambre » de Jean de Berry. Ils meurent en 1416.
Très riches Heures du duc de Berry, Chantilly (février et avril). Les paysages mettent en scène les activités du duc dans une vision idéale. Paysage naturaliste, le
mois de février est sans doute la 1ère scène de neige.
A Paris, Charles VI devient fou, Armagnacs et Bourguignons s’affrontent, la guerre de Cent ans reprend. La régence anglaise sous le duc de Bedford
maintient une certaine activité artistique Maître du duc de Bedford Tour de Babel, Livre d’heures à l’usage de Paris, 1423, Londres, BL.
II – L’art en Provence au XVe siècle En 1417, le pape Martin V va à Rome, entraînant un coup d’arrêt artistique dans cette région.
Peintre provençal, Retable de Thouzon, vers 1410-1420, Musée du Louvre. Représente des scènes de la vie de saint André. C’est un écho des grandes productions du
XIVe avec des influences siennoises sensibles (architecture, Saint représenté en pied sur un fond d’or immatériel)
Vers1440, la Provence (Avignon et d’Aix) retrouve son prestige. Contrairement au XIVe, le XVe voit arriver des artistes originaires du Nord.
Barthélémy d’Eyck vient des Pays-Bas méridionaux et est de 1446-1470 au service de René d’Anjou qui règne sur un territoire élargi (Naples).
Triptyque de l’Annonciation d’Aix, 1445-1446, église de la Madeleine à Aix en Provence ; MRBA, Bruxelles ; Rotterdam, Musée Boymans van Beunigen. Réalisé pour le drapier aixois Pierre
Corpici, on y note l’influence flamande (attention aux détails et au naturalisme), l’influence de la sculpture bourguignonne du début du XVe (expression
et monumentalisme). La lumière forte découpe nettement les figures. En tant qu’artiste officiel, Barthélémy d’Eyck est connu à travers les enluminures
illustrant les livres rédigés par René.
Le Livre du Cœur d’amour épris, vers 1460, Vienne, Österreichbibliothek. Cœur, héros du livre, cherche à comprendre l’art d’aimer. Véritable composition individuelle, le
peintre porte une grande attention à l’atmosphère (rendu de la nuit) et la représentation des paysages toute nouvelle (subtile utilisation de la lumière qui
structure l’espace et accroit le caractère dramatique ou narratif).
Le livre des Tournois, vers 1460, BNF est un témoin de l’engouement pour l’idéal chevaleresque qui anime le XVe s, la chevalerie ayant elle-même à tendance à
disparaître. Là encore attention au rendu de l’espace, à la vie et au réalisme des personnages. Les enluminures sont conçues comme des œuvres
indépendantes. La vision sculpturale et synthétique de Barthélémy d’Eyck se retrouve chez des contemporains.
Peintre provençal, Retable Boulbon, vers 1450, Musée du Louvre . Représente une iconographie complexe, mêlant Résurrection, Trinité, Arma Christi, et un chanoine
présenté par saint Agricol. Là encore importance de la lumière qui sculpte le corps du Christ placé sur un fond sombre d’une étable.
Enguerrand Quarton est originaire de Laon, connu en 1444 à Aix, en 1447 à Avignon où il est mentionné jusqu’en 1461. Il a probablement été formé
en Picardie. Il n’a pas travaillé pour René d’Anjou, mais surtout pour de riches notables et ecclésiastiques de la région avignonnaise.
Couronnement de la Vierge, 1453, Villeneuve-lès-Avignon. Œuvre pour laquelle on conserve le prix-fait. Destiné à l’autel de la chapelle de Trinité de la Chartreuse de
Villeneuve-lès-Avignon, il présente un couronnement de la Vierge par la Trinité au centre. Autour le monde céleste avec anges, apôtres, saints et élus.
En dessous le monde terrestre avec 2 villes : Rome et Jérusalem, puis le purgatoire et l’enfer. Entre ces mondes, le seul moyen d’accès est le Christ.
La composition rigoureuse et complexe permet d’articuler un ensemble très peuplé. Couleur et lumière permettent aux personnages d’être identifiés.
Vierge de Miséricorde, Musée Condé, Chantilly. Commandé en 1452 par Pierre Cadard à Enguerrand Quarton et Pierre Villate et destiné à décorer la chapelle
funéraire parentale. Les personnages solidement campés se détachent nettement du fond et les volumes sont fortement modelés par la lumière. On
retrouve la composition rigoureuse et claire, des traits réguliers, des jeux de clairs obscurs d’Enguerrand Quarton.
Pietà, vers 1455, Villeneuve-lès-Avignon La Vierge profère les paroles issues des Lamentations de Jérémie gravées en latin sur le fond d’or : « Ô vous tous qui
passez par ce chemin, regardez et voyez s’il est douleur pareille à la mienne ». Il faut accepter la souffrance et prendre de conscience de la valeur du
sacrifice. (Peintre provençal, Pietà de Tarascon, achevée en 1457, MNMA.)
A côté de cette production de panneaux, Quarton se distingue également dans l’enluminure. Missel de Jean des Martins, 1466, Paris, BNF. Réalisé ce docteur en
droit, chancelier de Provence entre 1444 et 1477. C’est un ouvrage de très grand format (36x28cm) et de très grand luxe.
Nicolas Froment est originaire d’Uzès, il adopte la manière des 2 grands peintres. Il connaît l’art flamand contemporain (Dirk Bouts ou d’Hugo van der
Goes). Il travaille pour René d’Anjou, commanditaire du retable. Retable du Buisson ardent, 1476, Aix-en-Provence, cathédrale St-Sauveur.
III – Le Centre et la Touraine Jacques Cœur à Bourges, riche armateur devient argentier de Charles VII. Au sein de son hôtel, il édifie une chapelle
particulière et appelle un artiste venu du Nord Jacob de Littemont. Anges, voûte de la chapelle, hôtel Jacques Cœur, Bourges, c. 1445. Après la disgrâce de Jacques
Cœur en 1451, Jacob de Littemont entre au service de Charles VII, avec le titre de « peintre du roi ». Il travaille également pour René d’Anjou. Pour les
obsèques de Charles VII, il réalise le masque mortuaire du souverain, peint par Jean Fouquet. C’est probablement l’un des plus grands peintres de son
temps car il sut insuffler à la peinture une manière personnelle enrichie d’apports extérieurs. Présent en Italie vers 1445, il peint le portrait du pape
Eugène IV aujourd’hui disparu. Il connaît l’art de Fra Angelico. Vers 1450, il s’installe à Tours. Artiste polyvalent, il excelle en peinture sur panneau et en
enluminure. Ses commanditaires sont les grands prélats tourangeaux, les personnages de la cour, les rois résidant souvent dans la région.
Portrait de Gonella, vers 1440 ?, chêne, 36x24cm, Vienne, Kunsthistorisches Museum, Inv. 1840. Portrait supposé de Gonella, bouffon de Nicolo III d’Este. La connaissance de
l’art du Nord est sensible (traitement sans concession du bouffon, pose audacieuse projetant la figure en avant.)
Portrait de Charles VII, roi de France (1403-1461), vers 1450-1455, chêne, panneau avec son cadre d’origine, 99x85cm, inscription du XVe siècle sur le cadre : le tres victorieux roy de France. / .
(de la Sainte-Chapelle de Bourges). Fouquet aurait ici opéré une synthèse entre la traditionnelle représentation du
monarque en pied et du portrait intime à mi-corps, imposée par les maîtres flamands des années 1420-1430
Charles septiesme. de ce nom., Paris, MDL
Portrait de Guillaume de Jouvenel des Ursins (1401-1472), baron de Trainel, Chancelier de France, vers 1460-1465, chêne aminci et parqueté au revers, 96x74cm, Paris, MDL
Probablement seul volet restant d’un diptyque. Il se détache sur un fond architecturé doré. Fouquet montre sa connaissance italienne dans le
vocabulaire (pilastre, emploi de marbre noir). La présence de nombreux emblèmes renvoient à la personnalité et à la famille du chancelier. Le décor
luxueux et novateur à l’honneur du personnage représenté, sert d’arrière-fond à la figure, presque d’un nimbe. (Dessin préparatoire).
Diptyque de Melun, volet droit, La Vierge et l’Enfant entourés d’anges, vers 1452-1455, Anvers, mrba & volet gauche, Etienne Chevalier présenté par saint Etienne, vers 1452-1455, Berlin,
Originaire de Melun, d’extraction bourgeoise, Etienne Chevalier fait carrière dans la finance sous Charles VII et Louis XI. Il fait construire sa sépulture et
celle de sa femme, morte en 1452, dans la collégiale ND de Melun. Le diptyque est un tableau votif, le seul de ce type conservé de l’artiste. Volet droit :
La Vierge à l’Enfant dans une: vision presque surnaturelle du monde divin, céleste. Une vision très sculpturale et parfaite. La pose de la Vierge est
originale, est-ce le portrait d’Agnès Sorel ? D’après Fouquet, Portrait d’Agnès Sorel, copie du XVIe siècle Volet gauche : le monde terrestre avec toute sa pesanteur et
sa profondeur. Vision assez géométrique dans la composition caractéristique avec des lignes fortes. Le cadre de ce diptyque a disparu mais on
conserve un médaillon : Autoportrait, médaillon de cuivre, émail bleu sombre, camaïeu d’or, diam 7,5cm, Paris, MDL.
Pour Etienne Chevalier, il réalise un livre d’Heures où l’on retrouve toutes les caractéristiques de son art. Composition axée sur de grandes figures
géométriques, goût pour les motifs italiens, personnages stylisés et ben campés. Heures d’Etienne Chevalier, vers 1455, Chantilly, Musée Condé
Pietà, noyer, 146x237cm, vers 1460-1465, inscriptions en capitale dorées le long des parties du cadre : vere lagores n[ost]ros ip[s]e tvlit et dolores n[ostr]os semel pro peccatis nostris motvvs est
ivstvs pro i[n]vstis (I Pierre, 3-18), Nouans-les-Fontaine (Indre et Loire), église paroissiale .
Seul retable d’église à thème religieux qui soit conservé de Fouquet, ce n’est pas
une Piéta à proprement parler. Entre Descente de Croix et Mise au tombeau. La pyramide centrale formée par le groupe quasi trinitaire du Christ,
Vierge et St Jean, est étayée par Joseph d’Arimathie et Nicodème. Au sein de ce groupe, se détache un groupe lumineux de la Vierge et du Christ.
Toute la composition s’articule par une sorte de déduction logique autour de noyau central. La couleur joue un rôle capital en lui insufflant un rythme et
un équilibre. Jean Fouquet a métamorphosé l’art pictural de son époque et l’a marqué durablement. L’écho s’en trouve à la fin du siècle comme chez
l’enlumineur tourangeau Jean Poyer Retable de Liget, conservé au château de Loches, date de 1485.
IV – Paris Dans cette capitale sans roi, certains peintres polyvalents jouent un rôle central au sein d’une production diversifiée dont l’exceptionnel
développement s’explique par la concentration d’une clientèle exigeante. Un artiste de la transition : le Maître de Dunois
Trinité aux chanoines de ND de Paris, Paris, ENSBA. Le motif de la Trinité est une référence au Maître de Flémalle.
Heures de Guillaume Jouvenel des Ursins, vers 1450, acquis en 1998 par la BNF On sent l’influence de l’ars nova dans les plis cassants et solidement campés, perspective
atmosphérique qui indique nettement la profondeur. Le Maître de Dreux Budé est un peintre de formation septentrionale, peut-être André d’Ypres. La
culture de ce peintre si novateur renvoie à Tournai, et au Maître de Flémalle et van der Weyden.
Retable de la Crucifixion du Parlement de Paris, vers 1449, MDL . Le caractère sculptural des personnages sacrés du premier plan, enveloppés dans de lourds drapés,
n’est pas étranger à la densité plastique des figures de panneaux dits de Flémalle, conservés à Francfort.
Un petit Triptyque avec la Crucifixion (panneau central Los Angeles, Getty, Museum), dont les volets représentent Arrestation du Christ avec deux donateurs (Brême, collection particulière, volet
gauche) et La Résurrection de Lazare avec Jeanne Peschard, femme de Dreux I Budé et ses filles Jacquette et Catherine présentées par Ste Catherine (volet droit, Musée Fabre, Montpellier).
Le Maître de Coëtivy : Colin d’Amiens ? Les œuvres de cet artiste, dont le nom vient d’un ensemble de manuscrits réalisés pour Olivier de Coëtivy et
son épouse Marie de Valois, fille naturelle de Charles VII, s’échelonnent sur une bonne partie de la 2nde ½ du XVe. Un style influencé par l’ars nova
Résurrection de Lazare, vers 1450-1460, Paris, Louvre : échelonnement de plans parallèles au spectateur, horizon clos par des enceintes urbaines aux tours
massives, parfois curieusement évasées. Ces décors sont densément peuplés de personnages trapus et solides, dont les visages, ceux des hommes
en particuliers, sont souvent laids et prognathes, assez proches des figures soldatesques de la Crucifixion de Dreux Budé.
Le Maître des Très Petites Heures d’Anne de Bretagne et la troisième génération de la famille d’Ypres. Il a aussi fourni de nombreux cartons pour
différentes techniques. En tapisserie a fourni des cartons pour la Dame à la Licorne, la Chasse à la Licorne (Cloisters), Hercule et le lion de Némée, Paris musée arts
décoratifs. & Très Petites Heures d’Anne de Bretagne, BNF, l’Annonciation. Les modèles sont transposés dans un langage moins expressionniste. Il allonge les canons et
vêt ses personnages à la mode de l’époque. Il existe à Paris quelques grands ateliers qui, assurant la transmission de formes durant plusieurs
décennies, ont contribué à la formation d’un art que l’on pourrait qualifier de « parisien », mais qui puise ses racines dans la peinture du nord. A partir
de 1450, la paix revenue, Paris réassume son rôle de capitale du royaume.
V – La Picardie La Picardie et la région d’Amiens sont influencées par les Pays-Bas, quand ces territoires passent sous domination bourguignonnes.
Simon Marmion est fils de peintre et sculpteur. Vers 1454 il s’installe à Valenciennes, où il fonde la Confrérie de Saint-Luc. Il est connu comme
enlumineur. Son lieu de travail le met en contact direct avec l’art flamand.
Volet du retable de la vie de saint Bertin, vers 1455-1459, Berlin, Gemälde galerie. Influencé par l’art flamand : jeu subtil des coloris, répétition du noir qui en fait une ligne
conductrice, attention aux paysages, aux intérieurs et à perspective atmosphérique mais le ton baigné dans une douce lumière. Lien avec le Nord
confirmé par sa participation à la réalisation des Grandes Chroniques de France, 1457, Saint-Pétersbourg, BN de Russie. Commandé par l’abbé de Saint-Bertin, la
vignette représente Philippe le Bon, le chancelier Rolin et le Charles le Hardi acceptant les Chroniques des mains de Simon Marmion le 1er janvier 1457
Les Puy Notre-Dame d’Amiens sont une production spécifique. La confrérie Notre-Dame du Puy est un puy, société littéraire pieuse de la fin du
Moyen Âge aux Pays-Bas, en Belgique, en Picardie et en Normandie. Fondée en 1388, cette société en vint progressivement à exercer son mécénat en
« sponsorisant » la création d'œuvres picturales destinées à orner la cathédrale. Maître des Heures de Colin, Le Sacerdoce de la Vierge, 1438, Louvre est le plus ancien
"Puy d'Amiens'' conservé. Le marchand mercier Jean du Bos, désigné en 1438, présente le "palinod'' (formule poétique) de l'année, Digne vesture au
prestre souverain, illustré par la Vierge donnant au Christ enfant son vêtement sacerdotal, symbole de l'Incarnation.
IV – La régence des Beaujeu et le Maître de Moulins Les régents s’attachent les services de Maître de Moulins ou Jean Hey qui est originaire des
Pays-Bas méridionaux. Il travaille dans la région de Lyon et s’installe ensuite à la cour du duc Pierre II de Bourbon et d’Anne de Beaujeu à Moulins.
Jean Hey, Triptyque de Moulins, 1498-1500, Moulins, cathédrale . Grand retable en 3 parties panneau central : l’Immaculée Conception : sous l’aspect d’une Vierge à
l’Enfant assise sur une chaise, avec un croissant de lune sous les pieds. Elle est entourée d’une gloire d’anges. La Vierge ici est triomphale et
empreinte de modestie. L’Enfant en revanche est bien un enfant d’homme : seul son geste de bénédiction le rend divin. L’Enfant et sa mère sont
disposés devant un cercle rougeoyant, cerné d’une sorte d’arc-en-ciel. Volets portent le duc et la duchesse priant, présentés par leurs saints patrons.
Les volets offrent une vision terrestre de la dévotion, avec des corps qui affirment leur matérialité. Les donateurs semblent figés alors que leurs saints
patrons Pierre et Anne se penchent. Les portraits sont actualisés, le duc a vieilli par rapport au triptyque eucharistique. Avec la présence de leur fille, les
commanditaires ont privilégié une image dynastique. Revers des volets : Annonciation en grisaille, selon un parti fréquent dans les Pays-Bas.