Synthèse de l`étude de cas : Londres, ville mondiale.

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Synthèse de l`étude de cas : Londres, ville mondiale.
Synthèse de l’étude de cas : Londres, ville mondiale.
Intro : C’est à la sociologue néerlando-américaine Saskia Sassen que l’on doit la notion de ville mondiale (The global city : New
York, London, Tokyo, 1991) pour désigner les villes se situant au niveau supérieur de la hiérarchie urbaine à l’échelle mondiale.
Bien que les géographes aient fait évoluer la définition du concept dans un contexte de montée en puissance des grandes
métropoles des pays émergents, rares sont les villes-carrefours qui concentrent autant de fonctions décisionnelles, de capitaux et
de services spécialisés que Londres. En effet, les pays du Nord continuent de concentrer les principales villes mondiales, ne seraitce que du fait de leur insertion ancienne dans des réseaux, facteur de leur capacité à contrôler l’économie mondiale.
A/ Des fonctions exceptionnelles et spécifiques d’un pôle majeur de la mondialisation. (Londres, centre d’impulsion de la
mondialisation.)
La spécialisation fonctionnelle des quartiers londoniens est largement un produit de l’histoire. Les fonctions spécifiques de
Londres sont des fonctions économiques (place boursière majeure – la City, accueil de sièges sociaux d’entreprises
transnationales), logistiques (hub aéroportuaire international – London Heathrow), touristiques et universitaires (Cambridge,
Oxford). Londres est un pôle de la mondialisation du fait à la fois de sa spécialisation dans certains domaines (finance, assurance,
immobilier) mais aussi de la diversité de ses fonctionnements de commandement dans le tertiaire supérieur.
La fonction commerciale se concentre plutôt dans la partie ouest du centre de Londres (Oxford Street en est le cœur battant) tout
comme les fonctions culturelles (à la fois intellectuelles et touristiques) et les activités politiques depuis longtemps concentrées en
rive gauche de la Tamise dans le quartier de Westminster.
Londres possède trois quartiers d’affaires correspondant à trois phases d’aménagement successives. Si la City a émergé dès
l’époque de l’Empire britannique, le London Bridge Quarter qui lui fait face en rive droite de la Tamise est encore en cours
d’aménagement. Le développement des quartiers d’affaires (Central Business District) est lié au remplacement des fonctions
résidentielles du centre-ville et de certaines activités de commerce au profit de la concentration d’activités à très haute valeur
ajoutée. Les prix très élevés du foncier contribuent à la concentration d’activités qui ont besoin de peu d’espace tout en générant
de très forts rendements financiers (banque, assurance).
L’organisation d’un des événements mondiaux les plus médiatisés comme les Jeux Olympiques (août 2012) sont également pour
la ville l’occasion de montrer sa suprématie sur la scène internationale et sa capacité à se montrer particulièrement innovante à un
moment où tous les projecteurs sont tournés vers elle.
Enfin le marketing urbain passe par la volonté de la ville de chercher constamment à se tourner vers la modernité. Installer un des
plus grands musées d’art contemporain, la Tate Modern, dans une ancienne centrale thermique est un moyen pour Londres
d’affirmer sa modernité, son dynamisme et sa capacité à exploiter les éléments de son histoire passée en les inscrivant dans
l’avenir. Les opérations de renouvellement urbain sont l’occasion pour les villes mondiales de se poser en vitrine de la modernité.
Elles peuvent montrer leur capacité à mener des projets urbanistiques particulièrement innovants afin de faire toujours mieux que
les métropoles concurrentes (appel à des architectes de renommée mondiale : Renzo Piano, Norman Foster, etc.)
Les fonctions d’une ville mondiale sont des fonctions de commandement dans les domaines économiques (et en particulier
financier), politiques (sièges d’institutions internationales), culturelles (pôles touristiques majeurs), et logistiques (les métropoles
constituent des plateformes multimodales).
B/ L’organisation d’une ville mondiale. (Les manifestations de la puissance londonienne.)
La ville de Londres est une métropole polycentrique, comme toute ville mondiale. Les fonctions métropolitaines sont localisées
dans le quartier de la City ainsi que dans des pôles situés plus en périphérie : à l’ouest dans le quartier proche du centre de WestEnd, plus en périphérie autour de l’aéroport d’Heathrow, au sud dans le pôle de Croydon et à l’est dans les quartiers des
Docklands et dans le corridor du Thames Gateway. Celui-ci, un des plus importants projets de renouvellement urbain en Europe,
est l’objet de réaménagements multiformes susceptibles de renforcer l’attractivité de Londres. À côté du quartier d’affaires
historique situé au centre géographique de la ville, apparaissent de nouveaux centres en périphérie qui fonctionnent en réseau avec
le centre traditionnel et qui renforcent la puissance de l’aire urbaine métropolitaine.
L’aire urbaine est un support indispensable à la puissance d’une ville mondiale car elle permet de disposer de multiples centres
décisionnels chacun spécialisés dans un ou plusieurs domaines mais très connectés entre eux et complémentaires. La structure
polycentrique de la métropole lui permet d’être à la fois spécialisée et diversifiée, deux conditions indispensables pour un
rayonnement à l’échelle internationale. Ainsi historiquement les fonctions centrales étaient essentiellement concentrées dans le
quartier de la City, le quartier de la finance londonienne, fondement de la puissance du Royaume-Uni depuis le XIXe siècle, ainsi
qu’autour de la plateforme multimodale d’Heathrow qui depuis les années 1960 s’est spécialisée dans la recherche-développement
notamment dans le domaine informatique. Mais plus récemment sont apparus d’autres pôles décisionnels bien reliés à
l’hypercentre : les activités financières se sont étendues dans le quartier des Docklands réhabilité à partir des années 1980 et vont
certainement investir le site du parc olympique un peu plus au nord maintenant que l’événement sportif est terminé. Dans ces
espaces objets de nouvelles centralités à l’est de la capitale autrefois plus industriel et ouvrier, se développent également des
entreprises dans le secteur de la communication et des médias comme d’ailleurs dans le quartier de West-End spécialisé en outre
dans l’immobilier. Enfin le pôle de Croydon est davantage tourné vers les services administratifs.
Les objectifs du renouvellement urbain visent à l’affirmation comme une des vitrines de la modernité en étant le laboratoire de
nouvelles expériences urbanistiques comme à la tertiarisation des espaces de friches industrielles en déclin en créant de nouvelles
dynamiques pour l’emploi. Ainsi, les nouvelles architectures (tours) composent des skylines érigées en vitrines de la modernité au
service d’une mise en scène de l’urbanité que l’on retrouve tant dans les villes des pays du Nord (Francfort, Toronto), que dans les
BRICS (Moscou, Shanghai), les pays pétroliers (Dubaï, Doha) et les autres émergents (Istanbul, Buenos Aires, Santiago…). New
York constitue le modèle de cette dynamique des paysages urbains métropolitains parfois qualifiée de « manhattanisation » et qui
contribue à une certaine uniformisation des paysages des grandes métropoles.
Le cosmopolitisme londonien s’explique par la grande attractivité de la ville pour les migrants (étudiants ou travailleurs étrangers)
provenant essentiellement d’Asie, mais également d’Afrique et des Caraïbes. Comme New York, Londres constitue une des
plaques tournantes majeures du système migratoire mondial.
C/ Les défis d’une ville mondiale. (Conséquences et fragmentation socio-spatiales.)
Afin de rester un des centres du réseau des villes mondiales, Londres doit repenser la performance de son système de transports,
être davantage résiliente aux risques de nature variée auxquels elle est confrontée, et chercher à diminuer les inégalités territoriales
croissantes qui l’affectent. Les villes mondiales sont confrontées à la montée des inégalités sociales engendrant une importante
fragmentation socio-spatiale croissante, à des difficultés de gouvernance, ainsi qu’à des risques multiples (naturels,
technologiques, sociaux et économiques du fait de l’instabilité du capitalisme contemporain).
Pour rester dans la compétition mondiale, la ville de Londres doit pallier les défaillances de son système actuel de transports
collectifs, lutter contre la spéculation immobilière excessive qui conduit un grand nombre de Londoniens à s’éloigner de plus en
plus de la capitale, répondre aux impératifs environnementaux en corrigeant un certain nombre de dysfonctionnements qui
pourraient à terme entraîner un développement non durable (diminution des espaces de biodiversité, augmentation des pollutions
et des émissions de gaz à effet de serre du fait de la concentration d’hommes et d’activités dans la métropole, etc.). Pour répondre
à ces différents défis, les acteurs métropolitains ont mis en place un certain nombre de politiques notamment dans l’Est londonien
: création de nouvelles lignes de transport franchissant la Tamise, création d’un réseau permettant d’aller de banlieue à banlieue
sans nécessairement passer par le centre, faire du site olympique un modèle de ville durable pouvant être reproduit ensuite dans
d’autres quartiers, etc.
Londres en tant que métropole est plus vulnérable aux risques qu’une ville ordinaire du fait de l’importante densité de population
exposée à ces risques, et de la concentration de multiples enjeux stratégiques dans les domaines politiques, économiques, culturels
sur un territoire restreint. Les dommages humains et matériels en cas de catastrophe seront donc bien plus importants que dans une
ville économiquement moins puissante et moins peuplée. Surtout du fait de sa plus grande exposition, elle est davantage exposée à
certains types d’aléas comme le terrorisme. Enfin les risques auxquels la métropole est confrontée ne sont pas des risques urbains
classiques mais des risques métropolitains dans la mesure où les espaces directement exposés ne seront pas seuls touchés en cas de
catastrophe : un attentat dans le quartier de la City aura des effets indirects sur l’ensemble de l’économie de la métropole, du pays
et même de la planète, tant la finance londonienne est inscrite dans des réseaux multiples à différentes échelles.
Selon les statistiques du recensement de la population britannique, le tiers de la population londonienne appartient à une minorité
ethnique et on y dénombre pas moins de 50 communautés étrangères dont l’effectif dépasse les 10 000 membres. La capitale
britannique constitue une véritable mosaïque ethnique qui est la conséquence d’une immigration massive. Celle-ci est pour
l’essentiel originaire de l’ancien empire colonial britannique, notamment d’Asie (Inde, Pakistan, Bangladesh), d’Afrique
subsaharienne (Nigeria, Ghana) et du bassin caraïbe (Jamaïque, Barbade). L’ensemble de ces pays fait partie du Commonwealth :
la maîtrise de l’anglais et, plus généralement, le maintien de relations héritées du passé peuvent expliquer l’attractivité migratoire
de Londres. Si une grande partie de ces immigrés se consacrent à des activités de service à faible qualification (petit commerce,
restauration, ménage, industries, transports), certains flux alimentent aussi le brain drain (Indiens, Pakistanais, Ghanéens).
La reconversion du quartier des docks a consisté en un vaste programme de rénovation urbaine conduisant à sa gentrification.
Ainsi, cela met en évidence les conséquences socio-spatiales très contrastées de l’intégration dans la mondialisation. La
spécialisation des quartiers destinée à garantir leur attractivité pour les capitaux et à asseoir leur compétitivité dans un contexte de
concurrence accrue entre les métropoles constitue un facteur de dualité sociale. L’augmentation des prix du foncier renforce la
ségrégation socio-spatiale voire la fragmentation des espaces urbains rendant assez largement caduque l’émergence d’une société
mondiale.
Ccl : La hiérarchie des villes mondiales est évolutive et la notion de villes mondiales, de même que leur liste, fait débat. Si les plus
actives d’entre elles se situent toujours dans les pays du Nord (New York, Tokyo, Paris, Chicago), de nouveaux centres émergent,
notamment en Asie Orientale (Singapour, Hong Kong, Shanghai).
La mondialisation se définit par son caractère très sélectif. Si des pays s’insèrent progressivement dans l’économie mondiale, de
vastes territoires demeurent assez largement en marge de ce processus (Afrique subsaharienne, États insulaires du Pacifique…).
Mais c’est à plus grande échelle que l’on peut constater l’inégale insertion des territoires dans la mondialisation : les États et les
métropoles connaissent des formes d’organisation spatiale de plus en plus duales.

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