Blanche-Neige - Opéra national du Rhin

Transcription

Blanche-Neige - Opéra national du Rhin
Dossier pédagogique
Saison 2016 - 2017
Contact : Hervé Petit • tél + 33 (0)3 68 98 75 23 • courriel : [email protected]
Opéra national du Rhin • 19 place Broglie
BP 80 320 • 67008 Strasbourg
Blanche-Neige
Marius Félix Lange
En deux mots
du rhin
opéra d'europe
operanationaldurhin.eu
Blanche-Neige plus blanc que blanc. Le conte des frères
Grimm décapé à l’instar du visage lifté de la Reine.
Mais le miroir magique ne sait pas mentir. De quoi, comme à
l’accoutumée, déclencher la fureur de sa propriétaire et son
envie de faire disparaître sa concurrente de belle-fille. Revu et
à revoir, un conte pour enfants… petits et grands.
Opéra pour enfants sur un livret du compositeur
d’après le conte des frères Grimm
Créé en 2011 à l’Opéra de Cologne
Direction musicale
Vincent Monteil
Mise en scène
Waut Koeken
Décors
Florian Angerer
Costumes
Carmen Van Nyvelseel
Lumières
Glen D’haenens
Traduction, adaptation du livret
Benjamin Prins, Waut Koeken
Ensemble orchestral
de l’Académie supérieure de musique
- HEAR et du Conservatoire de Strasbourg
COLMAR Théâtre
me 14 déc. 10 h 30* et 14 h 30
je 15 déc. 10 h 30* et 14 h 30*
ve 16 déc. 14 h 30* et 20 h
STRASBOURG CMD**
ma 3 janv. 10 h* et 14 h 30*
me 4 janv. 10 h* et 14 h 30
ve 6 janv. 14 h 30* et 20 h
sa 7 janv. 20 h
di 8 janv. 10 h et 15 h
ma 10 janv. 10 h* et 14 h 30*
me 11 janv. 10 h* et 14 h 30
je 12 janv. 10 h* et 14 h 30*
Blanche-Neige
Louise Pingeot
La Reine
Coline Dutilleul
Le Miroir
Jean-Gabriel Saint-Martin
Le Chasseur / Nain Ourson
Georgios Papadimitriou
Le Marchand ambulant / Nain Pic
Emmanuel Franco
1er Courtisan / Le Prince
Camille Tresmontant
2e Courtisan / Nain Api
Antoine Foulon
Une Souris / Nain Oups
Francesca Sorteni
Un Écureuil / Nain Chouquette
Gaëlle Alix
Nain Rubi
Diego Godoy
Nain Quartz
Nathanaël Tavernier
Production de l’Opéra Studio de l’OnR
MULHOUSE La Sinne
ve 20 janv. 10 h 30* et 14 h 30*
sa 21 janv. 20 h
di 22 janv. 15 h
Séances scolaires
Cité de la musique et de la danse
*
**
Langue : français surtitré en français et en allemand
Durée approximative : 1 h 20
Conseillé à partir de 5 ans : élémentaires et collèges (6e)
Argument
Scène 1 - Au château
Entourée de ses courtisans, la Reine écoute les boniments d’un marchand itinérant qui lui vante les mérites
du scalpel pour empêcher la beauté de se faner. Blanche-Neige apparaît et veut jouer avec sa belle-mère
qui la renvoie. Le marchand exhibe alors le miroir qui, en aparté, donne de la Reine un portrait peu flatteur.
Scène 2 - Dans la clairière
Blanche-Neige, entourée d’animaux, fabrique des couronnes de fleurs et chante.
Scène 3 - Au château
Le miroir, voyant approcher la Reine, se désespère de la vérité qu’il s’apprête à lui asséner.
« Miroir ô Miroir chéri, qui est la plus belle de tout le pays ? »
Bon gré, mal gré, l’interlocuteur est bien contraint d’avouer que la plus belle est sa bru.
L’appel du cor de chasse sauve in extremis la vie du miroir. La Reine demande au chasseur de tuer BlancheNeige et de lui rapporter son cœur.
Scène 4 - Dans la clairière
Les animaux chantent autour de la petite, quand surgit le chasseur qui les fait fuir. Il révèle à BlancheNeige la demande de sa belle-mère. Il lui laisse le temps de fuir. Les animaux lui concoctent un « cœur de
Blanche-Neige » à rapporter à la Reine.
Scène 5 - Dans la forêt, à la maison des nains
Blanche-Neige, épuisée par sa course folle au travers des bois, découvre la maison des nains sans ses habitants.
Elle y pénètre, se régale d’une soupe et s’endort dans le plus grand des sept lits. Voilà qu’arrivent Api, Quartz, Pic,
Oups, Ourson, Chouquette et Rubi : les sept nains. Ils découvrent l’invitée surprise et décident de la laisser dormir.
Scène 6 - Au château
La Reine vient de faire du « cœur de Blanche-Neige » son repas, mais décide, quoique persuadée d’être
désormais la plus belle du pays, de reposer la fameuse question au miroir. Et celui-ci de lui annoncer que
Blanche-Neige, dans la maison des sept nains, est mille fois plus belle… La Reine en furie prépare sa vengeance.
Scène 7 - Dans la maison des nains
Blanche-Neige se réveille après une bonne nuit. Elle se demande chez qui elle se trouve. Chacun des nains
se présente. Puis elle se présente à son tour, leur demandant asile en leur avouant les funestes projets de
la Reine. Ils acceptent volontiers. Les nains quittent la maison, non sans avoir averti la nouvelle habitante
de ne pas ouvrir la porte et de ne rien accepter de personne.
Voilà que la Reine, déguisée, frappe à la porte. Malgré les conseils de ses nouveaux amis, Blanche-Neige
lui ouvre et se laisse tenter par une guêpière que la « marchande » lui fait essayer, serrant si fort les lacets
que Blanche-Neige en perd connaissance. Revenant à la maison, les nains la découvrent, et desserrent le
lacet. Elle reprend vigueur.
Scène 8 - Au château
Revenue au château, la Reine questionne son miroir qui immanquablement lui répète sa litanie :
« Blanche-Neige est toujours mille fois plus belle que vous ». La Reine ne s’avoue pas vaincue pour autant.
Scène 9 - Dans la maison des nains
Les nains sont sur le départ et redonnent leurs consignes à Blanche-Neige.
Mais la Reine, coiffée d’un bonnet pointu, approche, prétend être la naine Germaine, et propose un bonnet
à celle qui doit, selon elle, le revêtir pour être mieux acceptée par les nains. Bon gré mal gré, BlancheNeige se laisse embobiner et enfile le bonnet trop serré qui lui fait encore perdre connaissance. Les nains
la découvrent en rentrant et la libèrent du bonnet.
Scène 10 - Au château
La Reine consulte son miroir qui, une fois encore, lui annonce que Blanche-Neige est toujours la plus
belle. La Reine affine sa vengeance. Une pomme. Une moitié blanche et sucrée, l’autre moitié rouge et…
empoisonnée !
Scène 11 - Dans la maison des nains
Les nains vont quitter la maison, et interdisent à Blanche-Neige d’ouvrir à quiconque. Mais à peine partis,
la Reine déguisée s’approche de la maison, propose des pommes à qui en veut. Entamant l’une d’elles du
côté blanc, elle propose l’autre moitié, rouge, à la petite qui la croque et tombe à la renverse. Les nains
découvrent Blanche-Neige morte et décident de ne pas l’enterrer, mais de l’exposer dans un cercueil en
verre.
Scène 12 - Au château, le miroir raconte…
…que la Reine est déclarée la plus belle. Mais arrive un Prince…
Scène 13 - Dans la forêt
… le Prince Adelar, qui tombe amoureux à la vue de Blanche-Neige dans son cercueil. Cependant, les nains
ne sont pas prêts à se séparer de la dépouille. Dans le tumulte qui les oppose au Prince, le cercueil tombe,
Blanche-Neige en sort et le morceau de pomme sort de sa bouche. Elle se réveille. Le Prince arrive à
convaincre les nains de le laisser partir avec elle.
Scène 14 - Au château
« Miroir ô Miroir chéri, qui est la plus belle de tout le pays ? »
Folle de rage en entendant la sempiternelle réponse, la Reine brise le miroir.
Scène 15
Le miroir conte comment la Reine, chassée du château, en est réduite à se produire là dans une baraque
de foire.
Mais voici qu’arrive le cortège nuptial de Blanche-Neige et de son Prince...
Les sept nains se présentent
Api
Je suis Api, le Sage
Rubi
Moi, Rubi, l’orfèvre
Pic
Pic, à la mine je pi-que
Quartz
Mon nom est Quartz-Pierre : souffleur de verre
Extraits du livret de l’opéra
Ourson
Ourson, forgeron
Oups
Numéro six, je m’appelle Oups
Mes rimes gliss’, mais font parfois ‘gloups’
Chouquette
Chouquette, ça c’est mon nom
Question meubles je suis le patron
Du conte à l’opéra
Marius Felix Lange au sujet de Blanche-Neige « Clothilde, la marâtre de Blanche-Neige, est belle, très belle même. Mais de toute évidence, l’admiration
qu’éveille son physique est montée à la tête de la reine qui manifeste des signes indiscutables de folie : personne
ne doit la surpasser en beauté, coûte que coûte.
L’importance de la beauté est à mes yeux l’élément central de ce conte. Une question tout à fait actuelle car
l’importance que les médias surtout accordent aujourd’hui à une beauté standardisée et à la jeunesse qui en
est indissociable prend souvent des traits absurdes, quasi religieux même.
L’obsession de la reine-marâtre attire à la cour un certain nombre de profiteurs, dont un colporteur qui, outre
des produits et des méthodes (chirurgicales) propres à accroître la beauté, lui propose un miroir magique.
Celui-ci est d’un naturel plutôt accommodant et opportuniste, et souffre du sort qui le contraint à toujours dire
la vérité. C’est lui le narrateur du conte.
Si pour la reine, la beauté et l’admiration qu’elle suscite passent avant tout, Blanche-Neige, elle, n’a rien à en
faire. Si elle est belle, c’est à cause de sa nature intérieure. Et l’infinie supériorité de sa beauté sur celle de la
reine n’échappe pas au miroir qui s’affole, se voyant déjà réduit en morceaux.
On peut encore citer parmi les participants un chasseur naïf grand amateur de tir, des nains bourgeois et
besogneux qui ne voient de beauté que dans le travail bien fait, et le prince Adelar, un authentique prince de
contes de fées.
La marâtre de Blanche-Neige est belle, très belle même. Sa beauté est chantée par les bardes du royaume et
vantée dans toute la presse. Elle va jusqu’à se procurer un miroir magique et parlant, chargé de la flatter à tout
instant et de lui confirmer qu’elle est effectivement la plus belle de tout le royaume.
Mais comme le miroir ne peut pas mentir, il répond un jour à la question immuable de la reine désireuse
de savoir qui est la plus belle du pays : « Oui, la Reine est très belle, en effet, mais Blanche-Neige est mille
fois plus belle qu’elle. » Prise d’une violente colère, la marâtre mijote un plan absolument diabolique. Et
l’histoire suit son cours – également derrière les sept montagnes, chez les sept nains. »
Traduction Odile Demange
Retrouvez des extraits de l’opéra Blanche-Neige et apprenez La Chanson des nains
sur le site de la Direction Académique du Bas-Rhin
(Histoire des Arts → aller à l’opéra → Blanche-Neige de Marius-Félix Lange)
Marius Felix Lange
Compositeur
Né à Berlin en 1968, il étudie le violon et le piano et a comme professeur
S. Gawriloff au Julius-Stern-Institut à l’université de Berlin. Il poursuit ses études
de violon à Cologne et Klagenfurt, puis à Stuttgart où il s’intéresse, entre 1997 et
2000, au jazz et à la musique populaire et compose ses premières œuvres. De
1998 à 2002, il étudie la musique de film et le design sonore à la Filmakademie
du Bade-Wurtemberg et la composition avec Ulrich Leyendecker à Mannheim
où il obtient ses prix en 2006. L’un des temps forts de sa carrière fut l’obtention
du 1er prix du premier concours international de composition d’opéra pour
enfants et adultes de Cologne avec Das Opernschiff oder Am Südpol, denkt man,
ist es heiss (Le Bateau opéra ou Au Pôle Sud, croit-on, il fait chaud), sur un livret
d’Elke Heidenreich, créé à l’Opéra de Cologne en 2004. Son deuxième opéra,
Schneewittchen (Blanche-Neige) est créé en avril 2011 à l’Opéra de Cologne et à l’Opéra Studio de l’OnR en
français en 2013. Pour l’Opéra de Zurich il compose Das Gespenst von Canterville en 2013, donné à Berlin en
2014. Suivent Vom Mädchen, das nicht schlafen wollte à Düsseldorf, Duisburg, Dortmund et Bonn (livret de
Martin Baltscheit). En avril 2016 est créé son dernier opus Die Schneekönigin d’après le conte d’Andersen,
dont il signe le livret comme pour Blanche-Neige.
Les frères Grimm
Wilhelm Grimm
Wilhelm Grimm, né à Hanau le 14 février 1786, ne cesse de participer aux recherches
philologiques de son frère Jacob, plus connu que lui, et de partager sa vie. Ils étudient
ensemble le droit à Marbourg. En 1814, il est nommé secrétaire de la bibliothèque
de Kassel et en 1831, il rejoint son frère à Göttingen, comme bibliothécaire adjoint.
Pour des raisons politiques, il quitte en même temps que son frère l’Université de
Göttingen et débute alors une carrière universitaire. En 1831, il est chargé de cours,
et en 1845, il est nommé titulaire, devenu entre temps membre de l’Académie des
sciences de Berlin en 1841. Il publie avec son frère et Görres les Contes d’enfants
et du foyer en 1812, dont les plus connus sont Blanche-Neige et les Sept Nains et
Hänsel et Gretel. C’est à lui que revient la rédaction de la majeure partie des Contes.
Il meurt le 16 décembre 1859 à Berlin.
Jacob Ludwig Karl Grimm
Jacob Ludwig Karl Grimm est né à Hanau le 4 janvier 1785. Orphelin très tôt, il passe une enfance difficile : il doit
assumer la responsabilité de ses cinq frères et sœurs et subvenir à leurs besoins. Après avoir fait ses études à Marbourg
et à Paris, il occupe dans son pays différents emplois dans l’administration. En 1814, puis en 1815, il revient à Paris pour
récupérer des livres et des manuscrits qui avaient été subtilisés par les troupes de Napoléon. Il participe au Congrès
de Vienne en 1816. à cette même époque, il est nommé bibliothécaire en second à Kassel où il demeure jusqu’en 1829,
date à laquelle il part à Göttingen où un nouveau poste lui est proposé. Sa destitution, pour des raisons politiques
en 1837, est retentissante. Il vit alors durant quatre ans à Kassel avec son frère Wilhelm jusqu’à leur nomination à
l’Académie des sciences de Berlin. En 1848, il est élu au premier parlement allemand. Durant toutes ces années, il
écrit beaucoup, réunissant et publiant les contes et légendes germaniques : poésie des maîtres chanteurs en 1811,
Contes d’enfants et du foyer avec son frère en 1812, Légendes allemandes en 1818, et Légende héroïque allemande en
1829. On lui doit également une Histoire de la langue allemande en 1848 et un Dictionnaire allemand en 1852 et 1858,
partiellement publié de son vivant. Il est considéré comme le fondateur de l’histoire d’Allemagne et comme le plus
grand représentant de la méthode historique appliquée aux travaux littéraires. Il meurt à Berlin le 20 septembre 1863.
Repères biographiques extraits du programme de Hänsel et Gretel
de Engelbert Humperdick, OnR, Saison 2000-2001
Confidences face au miroir
Entretien avec Waut Koeken, metteur en scène
Hervé Petit : Quelle a été votre première réaction à la lecture
du livret de Marius Felix Lange ?
Waut Koeken : Avant tout et surtout, j’ai été vraiment ravi de
relire une fois de plus un des contes les plus riches et les plus
profonds qu’on ait jamais écrit ! […] On est tellement loin d’un
divertissement pour enfants « innocents » ! Comme tout artiste
qui s’intéresse à l’histoire de Blanche-Neige, le compositeur
a créé sa version « personnelle » du conte, ajoutant des
personnages, des situations et des allusions à notre propre temps
et à notre propre société. Mais j’ai été frappé – et enchanté –
par sa fidélité à la structure du récit « original », c’est-à-dire de
l’histoire telle que nous la connaissons par les frères Grimm.
H.P. : Comment avez-vous décidé de traiter cette version contemporaine du conte des frères Grimm ?
W.K. : Il est rempli de références directes à notre temps, à notre monde. Mais pour moi, cela ne fait que prouver
la nature intemporelle du sujet. […] Ce dont je rêve pour cette production, c’est qu’elle fonctionne comme un
miroir où chaque enfant puisse se reconnaître dans Blanche-Neige et dans ses expériences. Il m’a paru essentiel
que notre présentation visuelle laisse suffisamment de place à l’imagination du public – qu’elle évoque le palais,
la forêt obscure, les sept montagnes, la maison des nains… et surtout l’impression que dégagent ces lieux et leur
signification – plutôt que d’en proposer des images « figées ».
H.P. : Mettre en scène un opéra pour enfants : quelles sont les spécificités ?
W.K. : Qu’un opéra pour enfants puisse être une sorte de « réduction » ou de simplification condescendante de « la
chose authentique », une sorte de menu enfants, est une idée qui me fait horreur. […] Les enfants méritent – et
apprécient – la forme artistique dans toute sa complexité.
À propos de critiques : une particularité du travail pour les enfants est que les critiques n’arrivent pas a posteriori,
dans la presse, non, vous les obtenez à chaud, sur place ! Les enfants sont extrêmement réceptifs, leur faculté de
compréhension est étonnante – sans doute parce que leur esprit n’est pas encore bourré de préjugés… – et leur
expérience est très immédiate – ce qui exige du metteur en scène et des chanteurs une honnêteté foncière à tout
moment : des belles images, un beau chant ne suffisent pas, il faut que les enfants puissent vous croire. Pas de
trucages ! La vraie magie, ils n’accepteront rien d’autre. Avec un public d’enfants, une des choses les plus merveilleuses
– et les plus difficiles, surtout pour les chanteurs –, c’est que pour eux, c’est toujours la « première fois » (et si nous
faisons mal notre boulot, peut-être la dernière !) parce qu’ils risquent d’associer par la suite opéra avec ennui, ou
pire encore, avec bidonnage. […] En m’asseyant au milieu de mon public pendant les représentations, j’ai appris les
choses les plus incroyables.
H.P. : Le miroir est le fil conducteur de l’histoire. Comment l’avez-vous envisagé ?
W.K. : Dans cette pièce, le miroir est […] un personnage à part entière, qui commente les événements qu’il reflète
et assume souvent une fonction de « narrateur ». Cela ne fait pas seulement de lui un symbole de vérité, mais une
incarnation de la sagesse et du savoir.
Le miroir est un symbole si puissant, si ancien et si riche dans la littérature aussi bien que dans la psychologie
mondiales qu’il est devenu l’élément central de notre interprétation et de notre scénographie – pas comme un
ingénieux « trucage de théâtre magique » destiné aux passages de « Miroir, mon beau miroir », mais comme
métaphore poétique de tout ce dont traite cette histoire, à mon sens. Le miroir se rattache à tous les thèmes centraux
de Blanche-Neige : identité et recherche d’identité, connaissance de soi et illusion, l’enfant et son développement.
L’étape du miroir c’est le risque, le moi vient au monde ; l’enfant réalise qu’il est différent de sa mère ; son identité
commence. Le Miroir montre ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas. Il montre l’opposition entre la vraie nature
des individus et le paraître. Il est le reflet de la vie réelle, mais en même temps du sombre côté des choses, toute
l’horreur du monde. En fait, il s’agit de ce que l’on peut voir de l’autre côté du miroir. On montre l’apparence, puis
on présente la vérité. La présence permanente de l’objet miroir et sa multiplication dans la scénographie lui donnent
le change : le somptueux palais de la Reine, la forêt menaçante, avec des arbres qui semblent avoir des visages, les
sept montagnes, le fameux cercueil en verre... Le cadre de scène est lui aussi le cadre d’un miroir, mettant en abyme
les personnages, leurs actions, leurs ressorts et leurs rêves – le Théâtre, c’est pour moi le Miroir Magique dans lequel
nous regardons pour voir la vie, le monde et nous-mêmes.
H.P. : Que répondriez-vous à la Reine si vous étiez le Miroir ?
W.K. : Je ne suis pas très sûr qu’un simple mortel comme moi soit capable d’asséner une vérité aussi absolue et
implacable qu’un Miroir Magique qui « voit tout et qui dit TOUJOURS la vérité »... Cette honnêteté absolue n’est
sans doute pas notre qualité humaine la plus marquante... Cocteau a dit un jour avec beaucoup d’esprit : « les
miroirs feraient bien de réfléchir avant de renvoyer des images » ! – ce genre de « réflexion » très humaine nous rend
peut-être enclins à une certaine hésitation devant la vérité, à la flatterie et même à l’hypocrisie. […] Je ne peux pas
désapprouver la justice et la sagesse du Miroir quand il déclare à la Reine que son corps deviendra aussi répugnant que
son âme. Mais j’aurais peut-être pitié d’elle. J’ai pitié d’elle parce que – bien que la Beauté soit l’unique obsession de
sa vie – elle est incapable de la voir et d’en être émue. Cette reine de beauté ne pourra jamais comprendre la Beauté,
de près ou de loin. Elle est incapable de voir la plus belle chose de sa vie : la beauté d’un enfant qui devient adulte.
H.P. : Si vous deviez choisir le rôle de l’un des nains de cette version, quel serait-il ? Pourquoi ?
W.K. : J’aurais du mal à choisir un seul rôle... Je considère les nains comme un tout – une sorte d’entité « mystique »
ou magique telle que nous en rencontrons souvent dans les contes. […] Ils vont ensemble, si on en voit un, on
les voit tous. Dans le conte de Grimm, les nains ne possèdent même pas de noms, ni vraiment de personnalités
individuelles. […] Marius Felix Lange leur a attribué différents métiers, qui reflètent à leur tour certains aspects
de leurs personnalités. […] Mais si vous tenez absolument à ce que je choisisse un nain en particulier (étant moimême l’aîné d’une fratrie de quatre : trois nains et une Blanche-Neige), j’avoue que je serais probablement Api, le
plus vieux, plein de bonnes intentions, mais qui est bien obligé parfois de reconnaître que toute la sagesse n’est pas
contenue dans ses livres…
Propos recueillis en septembre 2012 Traduction Odile Demange
Le parti pris de la mise en scène
«Miroir, miroir...»
Blanche-Neige et la pomme empoisonnée
Le prince charmant sur son cheval de bois
©Alain Kaiser
Biographies
Vincent Monteil
Direction musicale
Après sa formation au Conservatoire d’Angers puis de Rueil-Malmaison, il
poursuit des études de musicologie à la Sorbonne et se perfectionne en direction
d’orchestre aux côtés de Gérard Devos et Pierre Dervaux. De 1991 à 1996, il est chef
assistant au Capitole de Toulouse auprès de Michel Plasson. En 1996, il rejoint
l’Orchestre philharmonique de Nice et y dirige une trentaine de représentations
par an pendant six années. De 1999 à 2003, il initie une collaboration suivie avec
l’Opéra national de Prague où il devient chef invité pour l’opéra français. Lors
du Printemps de Prague 2002, il dirige Carmen, Robert le Diable et Ariane et Barbe-Bleue. Les opéras qu’il
enregistre à Prague lui valent l’invitation de Sir John Eliot Gardiner à préparer pour lui Ariane et Barbe-Bleue
à Zurich. Depuis 2005, il a été choisi par l’AFAA (puis CulturesFrance et l’Institut français) pour diffuser la
musique française à l’étranger dans le cadre du programme « un chef un orchestre ». C’est ainsi qu’il dirige
autant le répertoire symphonique que lyrique en République Tchèque, Hongrie, Géorgie, Serbie, Russie
mais aussi en Espagne, Italie, Allemagne et au Canada. De 2012 à 2014 il est Directeur Artistique du festival
Cantiere Internazionale d’Arte di Montepulciano, en Toscane. Depuis 2008, il est Directeur musical de
l’Opéra Studio et Conseiller musical de l’OnR.
Waut Koeken
Direction musicale
Né en Belgique, sa première mise en scène est une adaptation pour enfants de La
Flûte enchantée de Mozart à l’Opéra de Flandre, puis en 2007, il signe l’adaptation
d’Aladin de Nino Rota, qu’il revisite pour l’OnR en 2009-10 et qui sera primée
par le Syndicat de la critique comme meilleure création d’éléments scéniques.
Suivent la création mondiale de La Strada de Luc Van Hove d’après Fellini à
Anvers, L’Ile de Tulipatan et Ba-Ta-Clan d’Offenbach au Wiener Kammeroper,
Die lustige Weiber von Windsor à Erfurt, Die Fledermaus à Nuremberg et à l’OnR,
Barbe-Bleue à Maastricht, Die Entführung aus dem Serail à l’OnR, la création mondiale de l’opéra de Claude
Lenners Der Turm à Luxembourg, Die Feen de Wagner, adapté pour les enfants à l’Opéra de Vienne, La
Princesse de Trébizonde d’Offenbach à Saint-Etienne. En 2012, après Blanche-Neige de Lange à l’OnR, il
s’attaque à Salomé de Strauss au Canada, puis remonte Barbe-Bleue à Nancy et à Angers-Nantes. La saison
dernière il a mis en scène La Vie parisienne à l’OnR et Das Italienische Lieberbuch de Wolf à Luxembourg. En
2015-2016 il reprend La Princesse de Trébizonde à Limoge et monte La Bohème à Operazuid.
Prolongements pédagogiques
Arts du langage
> Du conte à l’opéra, l’histoire des frères Grimm vue par M.F. Lange
> Approche ludique de la lecture orale : élèves lisant, racontant, mimant le conte à des plus jeunes ou à des
personnes empêchées (influence, variations d’expression, de rythme et de ton, d’intensité)
> Vocabulaire riche, imagé, humoristique accompagnant en exergue les différentes parties du livret
> Etablir les cartes d’identité des personnages
Arts du son
> Chanter, écouter des extraits musicaux pour les reconnaître lors du spectacle
> Identifier les voix des personnages et les timbres instrumentaux de l’orchestre
> Jeux vocaux : phrases parlées et rythmées/ phrases chantées, mouvements mélodiques ascendants et
descendants
> Consonances et dissonances liées à l’expression musicale
> Le film d’animation de Walt Disney : sonoriser une scène, interpréter la chanson « Siffler en travaillant »
> à propos de miroir : « Air des bijoux » extrait de Faust de C. Gounod
Arts du quotidien
> Les métiers des sept nains
Arts du spectacle vivant
> Théâtre de marionnettes pour interpréter l’histoire de Blanche-Neige
> Comment représenter scéniquement et le temps et les saisons qui passent ?
EPS/ expression corporelle, danse
> Au delà du miroir, « ce qu’on voit et ce qu’on ne voit pas »
La question de l’apparence et du reflet, le mimétisme, passer au travers du miroir pour rejoindre d’autres univers
Arts du visuel
> Film Les Frères Grimm réalisé par Terry Gilliam
> Blanche-Neige et le cinéma
> Les illustrations de livres pour enfants, les images d’Epinal
> Ateliers de dessin, de photographie, de marionnettes ou poupées : galerie de portraits de Blanche-Neige, la reine,
les sept nains, le miroir, le chasseur en fonction des descriptions du livret de l’opéra
> « Miroir, miroir … » : l’autoportrait, le reflet
Arts de l’espace
> La galerie des glaces du château de Versailles 

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