L`évolution du corps de la Légion Etrangère depuis le début du

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L`évolution du corps de la Légion Etrangère depuis le début du
Rapport au ministre de la Défense Nationale
L’évolution du corps de la Légion Etrangère depuis le
début du conflit en cours
1er décembre 1942
Par le général de brigade Raoul Magrin-Vernerey 1
Rappel historique
Corps fondé en 1831 pour permettre l’incorporation de soldats étrangers dans l’Armée
française, la Légion Etrangère s’est depuis lors illustrée sur tous les théâtres d’opérations
français au cours des 111 années écoulées, comme en attestent une foule de noms glorieux :
Magenta, Sébastopol, Camerone, Gallipoli, le Maroc, le Levant, le Tonkin…
La Légion Etrangère au début du conflit
A la déclaration de guerre, le 3 septembre 1939, la Légion Etrangère était composée de six
Régiments Etrangers d’Infanterie et deux Régiments Etrangers de Cavalerie :
– 1er REI : Sidi-bel-Abbès (Algérie) (Q.G. traditionnel de la Légion)
– 2e REI : Meknès (Protectorat du Maroc)
– 3e REI : Fez (Protectorat du Maroc)
– 4e REI : Marrakech (Protectorat du Maroc)
– 5e REI : Vietri (Tonkin) (le 5e REI était traditionnellement basé en Indochine)
– 6e REI : Baalbeck (Syrie) (dernier né des REI, ce régiment a été constitué en octobre 1939
au Levant)
– 1er REC : Sousse (Tunisie)
– 2e REC : Midelt (Protectorat du Maroc)
Ces huit unités sont à la fois des régiments de combat et des régiments-cadres, qui assurent
l’incorporation et l’entraînement des recrues puis la formation de nouvelles unités.
La Légion Etrangère dans les combats de 1940
Au 9 mai 1940, le nombre d’engagés dans la Légion (l’engagement est réservé aux hommes
âgés de 17 à 40 ans) atteignait le chiffre historique de 48 924 hommes. Par dédoublement des
bataillons de ses régiments cadres et grâce à un fort afflux d’engagements de volontaires
étrangers à l’ouverture du conflit, la Légion Etrangère réussit à mettre sur pied de nouvelles
unités entre l’entrée en guerre et l’attaque ennemie allemande du 10 mai 1940 :
– 13e DBLE
– 11e REI (6e DINA), 12e REI (8e DI)
– GRDI n°97 (issu des 1er et 2e REC)
– 21e, 22e et 23e RMVE : ces régiments de marche de volontaires étrangers dépendaient
administrativement de la Légion Etrangère, mais ne contenaient que peu d’officiers et de
sous-officiers d’active ou de réserve. Ils ont été formés en Métropole, sans passer par Sidibel-Abbès, donc sans recevoir la culture de la Légion Etrangère. Néanmoins, ils se sont battus
avec héroïsme.
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1
NDE – Le général Magrin-Vernerey, alors sans affectation, avait été choisi par ses pairs pour faire la synthèse
de leurs rapports individuels. Il devait au début de 1943 recevoir le commandement de la 6e BMLE.
Toutes ces unités ont combattu de mai à juillet dans la campagne de France, à l’exception de
la 13e DBLE, qui est intervenue en Norvège et a conquis les villes de Bjervik et Narvik avant
de revenir en France début juin.
Le 11e REI, au sein de la 6e DINA, basé dans le secteur de Sedan, a résisté héroïquement dans
le bois d’Inor les 27 et 28 mai (pertes estimées à 300 hommes). En juin, il s’est d’abord replié
sur la Meuse où il a combattu en arrière-garde près de Verdun avant de devoir capituler,
prisonnier de la poche de Lorraine.
Le 12e REI, au sein de la 8e DI, a été sévèrement étrillé lors de la défense des ponts de l’Aisne
au mois de juin. Ses derniers éléments ont continué le combat au sein de la 3e Armée.
Le GRDI n°97 a effectué des actions retardatrices au mois de mai sur l’axe Péronne-Barleux
puis a participé à la défense de la Somme et de l’Avre au début du mois de juin. Le 9, son
commandant, le lieutenant-colonel Lacombe de La Tour, a trouvé la mort au combat dans le
bois de Noroy, près de Compiègne. Par la suite, le GRDI a couvert la 7e DINA.
Le 21e RMVE, intégré à la 35e DI et déployé au sud des Ardennes, a tenu son secteur durant
de longues semaines avant de devoir capituler.
Le 22e RMVE, près de Péronne (dans les Ardennes), a participé le 24 mai à la prise de
Villers-Carbonnel, mais a finalement été anéanti par les chars allemands près de Berny au
début du mois de juin.
Le 23e RMVE est entré en action au cours de la bataille de Soissons le 7 juin, puis s’est
notamment battu à Pont sur Yonne quelques jours plus tard avant de devoir finalement battre
en retraite. Des trois premiers RMVE (c’est-à-dire en dehors des quatre RMVE constitués à la
hâte en juin), c’est le seul qui ait pu évacuer une partie des ses hommes lors du Grand
Déménagement.
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Mi-juin 1940, face à la gravité de la situation, tous les dépôts métropolitains de la Légion ont
formé des bataillons de marche. Par ailleurs et surtout, l’appel du gouvernement aux
Républicains Espagnols a permis un nouvel afflux de volontaires, issus des camps et des
Compagnies de Travailleurs Etrangers – dans l’urgence et sur l’ordre de l’autorité politique,
l’Armée a dû passer outre ses doutes sur la fiabilité de ces réfugiés et a accepté d’armer des
hommes engagés jusque là dans les CTE, désarmées). Plus de 20 000 hommes ont répondu à
l’appel et 9 000 ont pu être incorporés dans des unités combattantes. Ce renfort a permis de
créer quatre nouveaux régiments de marche de volontaires étrangers, les 24e, 25e, 26e et 27e
RMVE. Encore plus mal équipés et encadrés que les trois premiers RMVE, ces « régiments
ficelles » n’en ont pas moins combattu avec énergie sur la Dordogne, dans les Landes et en
Provence (notons cependant que ces unités possédaient souvent un encadrement officieux
assuré par d’anciens officiers et sous-officiers de l’armée républicaine espagnole).
Ces quatre RMVE ont subi des pertes effrayantes, puisque sur un effectif initial de 16 000
hommes, seuls 4 000 hommes ont pu être évacués vers l’Afrique du Nord lors du Grand
Déménagement. Mais selon nos renseignements, une partie non négligeable de leur effectif a
échappé à la capture et alimente aujourd’hui les réseaux de Résistance.
Dans le même temps, la politique d’incorporation des volontaires espagnols a conduit à
l’incorporation de prisonniers issus des camps du Maroc et d’Algérie, qui ont été envoyés à
Sidi-bel-Abbès, où ils ont suivi une formation classique de légionnaire, excepté qu’après la
formation initiale, ils ont été directement versés dans la 11e ou 14e DBLE.
Il est à noter que la plupart des Espagnols recrutés dans les camps, en Métropole comme en
AFN, avaient, dans les semaines suivant la déclaration de guerre, refusé de servir dans la
Légion, affirmant ne vouloir servir que dans « l’armée française véritable », selon leur
expression. Presque tous sont revenus sur ce choix après le Sursaut. Selon les témoignages
recueillis, ils avaient été impressionnés par le refus de capituler du gouvernement français et
désiraient permettre à leurs familles d’échapper aux camps d’internement et à un renvoi en
Espagne.
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Durant l’été 1940, la Légion Etrangère a participé de façon substantielle à la conquête de la
Libye, avec la participation aux combats des 1er et 3e REI et des 1er et 2e REC (escadrons
montés et motorisés). En juillet, le 1er REI et le 1er REC ont participé à l’encerclement de
deux divisions italiennes en Tripolitaine avec la réserve du XIXe C.A. du général Bessières,
qui les a utilisés comme troupes de choc et d’exploitation. Le 3e REI et deux escadrons du 2e
REC, au sein de la 3e DM, ont pris part à la prise de Bir-el-Ghnem, Jefren et Tazzoli et se sont
illustrés pendant toute la campagne de Lybie.
En septembre, la 13e DBLE a brillamment combattu en Sardaigne lors de l’opération
Marignan, malgré l’échouage du paquebot Mexique transportant les deux tiers de ses effectifs.
Elle s’est illustrée lors de la prise, par ses seules forces, de Monserrato. Elle a joué un rôle
prépondérant et décisif dans le siège de Cagliari.
En septembre-octobre, le 6e REI, au sein de la 192e DI, a participé à l’opération Cordite. Il a
combattu lors de la conquête du Dodécanèse puis il a participé à l’occupation de cette région
au sein du Détachement d’Armée Dodécanèse.
L’organisation de la Légion Etrangère après le Grand Déménagement
La Légion Etrangère a su faire évoluer ses unités dans le cadre de la réorganisation de
l’Armée française en exil dans l’Empire. Au 1er janvier 1941, elle alignait les unités de
combat suivantes :
– 1er REI (au sein de la Division Territoriale d’Alger)
– 3e REI (au sein de la 3e DM [général Mordacq], au Maroc)
– 5e REI (toujours déployé en Indochine)
– 6e REI (au sein de la 192e DI [général Jeannel], en Méditerranée Orientale)
– 10e Demi-Brigade de la Légion Etrangère (colonel Girard) : 3 bataillons
– 11e DBLE (colonel Pablo) : 3 bataillons
– 13e DBLE (lieutenant-colonel Amilakhvari) : 3 bataillons
– 14e DBLE (colonel Moreno) : 3 bataillons
– 3e BMLE (à l’instruction en Tunisie, général Jouffrault)
– 6e BMLE (à l’instruction à Marrakech, général Faure)
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En effet, au vu du succès de la 13e DBLE en Norvège, la Légion Etrangère a mis sur pied trois
autres unités comparables, de format plus souple que le régiment et bien adapté à des actions
de choc dans des terrains difficiles et compartimentés. Ces unités ont été formées à partir des
cadres des 2e et 4e REI (lesquels poursuivent leur existence administrative comme régimentsdépôts, stationnés au Maroc et permettant la formation de nouvelles unités de combat) ainsi
que des engagés étrangers des RMVE qui avaient pu être évacués lors du Grand
Déménagement.
Par ailleurs, poursuivant la mécanisation de ses unités de cavalerie, la Légion a mis sur pied
deux brigades mécanisées, les 3e et 6e BMLE, à partir des 1er et 2e REC (devenus eux aussi
des régiments-dépôts, stationnés en Tunisie et au Maroc).
L’impact de l’afflux de volontaires sur les traditions de la Légion Etrangère
La tradition de la Légion a toujours été de gommer la nationalité de ses engagés et d’éviter au
maximum la création d’unités formées à partir d’une nationalité ou d’une ethnie dominante,
afin de limiter les éventuelles infiltrations pouvant être organisées par une puissance ennemie
et de respecter les traditions de la Légion qui veulent que chaque engagé, quel qu’il soit et
quoi qu’il ait pu faire, ne soit plus qu’un camarade aux yeux de ses camarades. C’est pourquoi
les hommes de même origine avaient toujours été consciencieusement disséminés dans toutes
les unités de la Légion de par le monde.
Néanmoins, suite aux événements de juin 1940 communément appelés « le Sursaut »,
l’engagement dans la Légion Etrangère d’un grand nombre d’internés espagnols a conduit
dans l’urgence à constituer des RMVE dont presque tous les hommes étaient espagnols,
encadrés par de trop rares sous-officiers et officiers français.
Les membres de ces RMVE qui ont pu être évacués ont rejoint les volontaires recrutés en
AFN et sont passés fin 1940 et début 1941 par le creuset de Sidi-bel-Abbès pour se fondre
dans l’esprit et la culture de la Légion. Si leur incorporation s’était faite ensuite sur le modèle
habituel de la Légion, ces volontaires auraient été dispersés dans toutes les unités du corps.
Cependant, les Espagnols étaient alors trop nombreux au sein de la Légion Etrangère pour que
cette dispersion soit possible (la moitié environ des effectifs légionnaires étaient espagnols !)
et la République vivait des heures trop sombres pour que son armée se prive de ces renforts,
qui plus est motivés et doublement expérimentés. C’est pourquoi il fut décidé de constituer
quelques unités à composition quasi exclusive d’une même origine : c’est ainsi que furent
formées les 11e DBLE Teruel et 14e DBLE Ebro, ainsi que la 6e BMLE Brunete.
Plus tard, en 1942, l’afflux de volontaires juifs venus du Levant, de Palestine, d’Afrique du
Nord et d’Europe occupée, mais aussi de Palestine et des Etats-Unis, rejoignant les Juifs
allemands et autrichiens qui avaient fui leur pays en 1937 et 1938, permit la constitution de la
15e DBLE Massada-Valmy. L’impact de cette unité pour notre propagande n’est pas neutre
dans notre lutte commune contre l’Allemagne d’Hitler et pour nos idéaux.
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Cependant, une tradition séculaire ne saurait être purement et simplement abandonnée. La
création de ces trois demi-brigades ne signifiait pas que la composition d’unités sur une base
nationale ou ethnique allait devenir la règle au sein de la Légion. Ainsi, ni les volontaires
allemands (la plupart antifascistes) incorporés avant la guerre, ni les centaines d’Indochinois
issus de la dizaine de milliers de travailleurs transférés en Métropole au début de la guerre et
engagés entre l’automne 1940 et le printemps 1941 ne furent regroupés au sein d’unités
homogènes ; ils furent tous dispersés au sein des formations de la Légion. La question ne s’est
pas non plus posée pour les 250 à 300 jeunes volontaires venus des Etats-Unis (en 1940-1941)
et d’Amérique du Sud, désireux de défendre la France et ses idéaux 2.
L’enrôlement de Noirs sud-africains, dont plusieurs centaines étaient désireux de combattre
sous nos couleurs, ne put tenir toutes ses promesses. Les décisions prises par le gouvernement
à l’égard des Indigènes de nos colonies n’étaient sans doute pas étrangères à cet engouement,
ainsi que les accointances idéologiques entre les principaux mouvements d’opposition de
Pretoria et certains de nos parlementaires. Après de longues discussions avec le gouvernement
du Premier ministre Smuts et grâce aux bonnes relations entretenues par notre ambassadeur, il
a été convenu de limiter le nombre d’engagés à 150. La coutume de disperser les engagés
d’une même origine a été strictement appliquée pour éviter une inutile crise diplomatique.
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Aujourd’hui, le parcours traditionnel d’une recrue de la Légion a été rétabli : d’abord
inscription dans un de nos bureaux de recrutement sur la planète, puis passage par Sidi-belAbbès pour une période de formation initiale, ensuite envoi dans l’un des régiments-dépôts :
1er REI (à Sidi-bel-Abbès), 2e REI (au Maroc), 4e REI (au Maroc), 6e REI (au Levant), 1er
REC (en Tunisie) ou 2e REC (au Maroc). La nouvelle recrue est ensuite incorporée au sein
d’une unité combattante.
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NDE – Le général Magrin-Vernerey « oublie » opportunément dans ce décompte les « envoyés spéciaux » de
l’US Army, de l’US Navy et de l’US Army Air Corps, tous officiers ou sous-officiers, dont l’intégration dans les
forces françaises s’était faite sous le masque de la Légion. Tous devaient par la suite (au plus tard au début de
1942) retrouver leurs couleurs nationales. Leur nombre reste encore aujourd’hui secret.
L’évolution des types d’unités de la Légion Etrangère
Au printemps 1940, la Légion alignait quatre types d’unités de combat : le régiment étranger
d’infanterie (REI), le régiment de marche de volontaires étrangers (RMVE), la demi-brigade
de la Légion Etrangère (DBLE) (une seule) et le groupement de reconnaissance de division
d’infanterie (GRDI) (un seul).
L’évolution des doctrines, et en particulier la motorisation et la mécanisation des unités
montées, a orienté la cavalerie de la Légion Etrangère vers la mise sur pied de brigades
mécanisées, les Brigades Mobiles de la Légion Etrangère (BMLE), unités fortement dotées en
blindés, aptes aussi bien à la contre-attaque qu’à l’exploitation, en terrain plat ou modérément
accidenté.
Par ailleurs, avec la disparition des RMVE et la constitution des nouvelles divisions
essentiellement à partir de régiments d’infanterie d’Afrique, la Légion Etrangère a réorganisé
la plus grande partie de son infanterie pour en faire des unités interarmes puissantes mais
souples d’emploi, utilisables pour le choc ou la contre-attaque même dans les terrains les plus
difficiles et compartimentés, les Demi-Brigades de la Légion Etrangère (DBLE).
Ainsi, à ce jour, la Légion Etrangère aligne :
– trois Brigades Mobiles : les 3e, 4e et 6e BMLE.
– cinq Demi-Brigades : les 10e, 11e, 13e, 14e et 15e DBLE.
– et deux régiments qui, pour différentes raisons, ont conservé l’ancien format :
- le 1er REI, qui officie au sein de la Division Territoriale d’Alger pour l’accueil des nouveaux
engagés ;
- et le 5e REI, qui a vaillamment combattu au printemps 1941 contre les Thaïlandais, a été
renforcé à l’automne de la même année, puis a défendu le Tonkin contre les Japonais fin 1941
et début 1942 ; il opère maintenant du camp retranché de Dien-Bien-Phu et représente
toujours glorieusement la Légion Etrangère en Indochine.
La dissolution, fin 1941, des 3e et 6e REI 3 a permis de dégager les cadres et hommes de
troupes nécessaires à la mise en place de ces nouvelles unités ainsi qu’au remplacement des
pertes liés aux opérations de 1941 puis 1942.
………
De plus, un nouveau type d’unité a vu le jour au sein de la Légion : il s’agit de la spécialité
parachutiste. Cette dernière avait fait à partir de 1935 ses premiers pas dans l’Armée française
après les stages d’un certain nombre d’officiers à l’école soviétique de Toula-Ryazan, mais ce
sont les succès allemands en Hollande et en Belgique au mois de mai 1940 qui ont fini par
convaincre l’état-major de développer l’Infanterie de l’Air, jusqu’alors embryonnaire.
Cette nouvelle spécialité, ouvrant des possibilités encore inexploitées par notre armée, ne
pouvait qu’intéresser au plus haut point la Légion, qui se devait de participer à cette aventure.
A ce jour, la Légion a constitué le 1er Régiment Etranger de Parachutistes. En dehors de la
Légion, les 1er, 2e puis 3e Régiments de Chasseurs Parachutistes ont été constitués à partir des
quelques éléments d’Infanterie de l’Air de 1940 et des volontaires issus de l’infanterie et de
l’armée de l’air. L’amalgame de ces régiments au sein d’une Division Aéroportée est
envisagé, mais ce projet n’a pas encore reçu de concrétisation.
………
Ces différentes unités et les théâtres d’opérations multiples sur lesquels elles peuvent être
engagées montrent bien la mue aussi certaine que discrète opérée par la Légion Etrangère,
deux ans et demi après le terrible choc du Grand Déménagement. Mais pendant cette mue, la
Légion a continué de livrer bataille.
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Ces deux régiments de la Légion ont été respectivement remplacés par le 3e Régiment de Tirailleurs Marocains
et par le 12e Régiment de Tirailleurs Tunisiens au sein des 3e DM et 192e DIA.
1941-1942 : la Légion remonte au feu
– En février 1941, la 13e DBLE du colonel Kœnig reçoit l’ordre de faire mouvement de
Sardaigne, où elle s’était illustrée à la fin de l’année précédente, vers la Corse. Elle va bloquer
deux fois avec succès les forces allemandes au col de Bavella, avant de devoir évacuer l’île.
En février 1942, la demi-brigade du désormais général Kœnig participe à l’assaut et à la
conquête de Limnos. Elle se trouve aux premières loges pour repousser la contre-attaque
aéroportée allemande, fin mars. Elle quitte Limnos en juin pour réorganisation en Afrique du
Nord, après que le colonel Amilakhvari ait pris son commandement. Depuis le début de
l’hiver, elle est désormais déployée en réserve de l’Armée d’Orient dans le Péloponnèse.
– En mars 1941, la 14e DBLE Ebro du colonel Moreno, jusqu’alors cantonnée à la
surveillance de la frontière du Maroc espagnol 4, est envoyée en Grèce en avant-garde du
corps expéditionnaire français. Elle participe à la défense héroïque de Kumanovo en mai.
Réorganisée en AFN, elle est engagée cette année en Sicile dès le début de l’opération Torche
(zone Rouge), participant notamment à la prise de Porto Empedocle.
– La 10e DBLE, envoyée en Grèce cette année dans les suites de l’opération Croisade, reçoit
son baptême du feu début juillet 1942 lors de l’opération Ajax (débarquement sur l’ile de
Zante), où elle obtient de rapides et décisifs succès contre des troupes d’élite italiennes. Elle
venge ainsi son chef, le colonel Girard, qui a trouvé la mort à la tête de ses hommes à Akrotiri
dès les premières heures de l’opération. Le colonel Girard a été remplacé par le colonel
Gaucher. Par la suite, la 10e DBLE est engagée lors de Torche, où elle participe à
l’encerclement des forces italiennes près de Falcone. Mais son fait d’armes le plus fameux
lors de la campagne de Sicile reste d’être la première unité française à pénétrer dans Messine,
couronnant le succès de toute l’opération Torche.
– La 11e DBLE Teruel du colonel Pablo, qui reçoit son baptême du feu lors de l’opération
Torche (septembre 1942), est engagée dans l’offensive franco-belge Quiévrain lors de la
phase 2 de Torche, dite opération Trident. Elle capture les villes de Nicosia et Cesaro.
– La 15e DBLE Massada-Valmy du colonel Cazaud, formée cette année, reçoit elle aussi le
baptême du feu lors de l’opération Torche, en septembre-octobre. Faisant partie de la réserve
stratégique, elle débarque fin septembre à l’est de Termini, jouant ainsi un rôle capital dans
les actions voulues par le général Delestraint pour déstabiliser les résistances italiennes dans
l’île. Elle prend Cefalu début octobre avec l’aide des blindés de la 2e DB-US. Elle est
considérée comme l’une des unités qui s’est le mieux comportée dans la dernière phase de la
conquête de la Sicile.
– La 3e BMLE du général Jouffrault 5 reçoit le baptême du feu au mois de juin 1942 dans le
Péloponnèse lors de l’opération Périclès. Elle est aujourd’hui stationnée dans le Péloponnèse.
– La 4e BMLE Saigon du général Schlesser fait partie de la deuxième vague lors de Torche,
recevant là son baptême du feu. Elle prend part à la conquête de Marsala et Trapani et elle est
décisive dans la chute de Randazzo.
– La 6e BMLE Brunete du général Faure, pour sa part, n’a toujours pas été engagée en
opérations.
– Le 5e REI (colonel Alessandri) est aux premières loges dès les premiers jours de la guerre
avec le Japon, en décembre 1941 au Tonkin. A Cao-Bang, plusieurs de ses éléments,
encerclés, se dégagent par une charge à la baïonnette. Le régiment inflige des pertes sévères à
l’ennemi, mais les siennes ne sont pas négligeables. En février 1942, quelques éléments
participent à l’ultime défense de Saigon. Le régiment s’est depuis lors retranché avec les
4
NDE – Le maintien dans ce rôle d’une unité constituée d’anti-franquistes était un message envoyé à Franco,
soulignant que tout excès de complaisance envers Berlin risquait de lui faire perdre gros…
5
NDE – Le général Le Couteulx de Caumont lui succèdera dans les derniers jours de 1942.
forces vietnamiennes et françaises dans la base Epervier, dont il assure la défense en attendant
que la situation opérationnelle en Indochine lui permette de reprendre l’offensive.
– Enfin, en septembre de cette année, le 1er REP (lieutenant-colonel Bergé) participe à
l’opération Torche, assurant la couverture de la zone Rouge du débarquement sur le flanc est.
Couvrant la route de Licata, il fait mieux que bonne figure face aux blindés italiens. Le 1er
REP se trouve actuellement toujours en Sicile, au repos en réserve d’armée.

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