Galop d`essai (avril 2011)

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Galop d`essai (avril 2011)
Droit civil, Licence 1 Droit équipe 1 – Madame le Professeur Vatinet, avril 2011.
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Galop d’essai (avril 2011) :
Droit civil, Licence 1 équipe 1 – Madame le Professeur Vatinet
Cas pratique
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Remerciements
ASSAS.NET souhaite remercier, très sincèrement, Camille de
contribuer à cette opération et de donner ainsi aux étudiants les outils
nécessaires pour assurer leur réussite.
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Droit civil, Licence 1 Droit équipe 1 – Madame le Professeur Vatinet, avril 2011.
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Note : 19/20
Appréciations du correcteur : Très bon travail
Cas pratique :
Monsieur Yvon Dusseigneur est un homme politique connu, député de la région PACA, candidat à la candidature aux
prochaines élections présidentielles. Il est propriétaire d’un ensemble immobilier situé dans l’un des plus beaux
quartiers de Nice et d’une maison de campagne dans l’arrière-pays niçois.
1°) Depuis quelques mois, ses week-ends à la campagne sont gâchés. En effet, son voisin, après avoir passé une
convention avec la SPA, a obtenu des pouvoirs publics l’autorisation d’aménager dans sa propriété un refuge pour
animaux errants. Le refuge est particulièrement bruyant. Les aboiements de chiens sont absolument incessants, de
nuit comme de jour. Des chats faméliques rôdent désormais dans le jardin des Dusseigneur. Il y a quelques semaines
(en l’absence de la famille Dusseigneur, fort heureusement !), un molosse paraissant très dangereux s’est enfui
pendant quelques heures du refuge, terrorisant le couple de gardiens employé par M. Dusseigneur, au point que le
couple menace de quitter ses fonctions si aucune mesure n’est prise.
Monsieur Dusseigneur peut-il agir contre son voisin ? (4 points)
Un homme politique possède une maison de campagne.
Son voisin a fait aménager sur sa propriété un refuge pour animaux errants, refuse particulièrement bruyant, les
aboiements de chiens étant absolument incessants, de jour comme de nuit.
Il s’agit alors de savoir si l’homme politique peut agir contre son voisin.
L’article 544 du Code civil dispose que « la propriété est le droit de jouir et de disposer de la manière la plus
absolue ».
En application de l’article 544, le propriétaire voisin devrait donc pouvoir jouir et disposer de son terrain de la
manière la plus absolue, sans qu’on puisse y apporter une quelconque limite.
Cependant, cela ne signifie pas pour autant que le droit de propriété doive permettre, volontairement ou non, de
nuire librement à autrui.
La jurisprudence a donc créé le trouble anormal de voisinage, afin de faire prévaloir l’esprit de la règle de droit.
Pour que le trouble anormal de voisinage soit caractérisé, le trouble doit être excessif et répété.1
En l’espèce, il est indiqué que les aboiements de chiens sont « absolument incessants », de nuit comme de jour : ils
sont donc répétés.
De plus, il est indiqué que des chiens potentiellement dangereux s’échappent parfois du refuge : le trouble paraît
donc excessif.
Le trouble anormal du voisinage est donc caractérisé.2
Le propriétaire peut donc agir contre son voisin pour faire cesser ce trouble anormal de voisinage et/ou obtenir des
dommages et intérêts.3
2°) Dans quelques jours, Monsieur Dusseigneur sera grand-père. On sait que ce sera une fille et il en est très heureux.
Son fils et sa belle-fille, Nathalie Maire, ont l’intention de la prénommer Belle et de lui transmettre le nom de famille
de sa mère.
-Si un jour elle constate que son prénom lui vaut d’être l’objet de moqueries, pourra-t-elle demander à en changer ?
(4 points)
-Comment sera-t-il possible de lui transmettre le nom de sa mère ? (4 points)
1
Conditions ?
Appréciation souveraine des juges du fond
3
Peu importe l’autorisation donnée par les pouvoirs publics
2
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-Un couple envisage de prénommer sa fille Belle, qui s’appellerait alors Belle Maire.
Il s’agit alors de savoir si la fille pourra demander à changer de prénom.
L’article 60 du Code civil dispose que « toute personne qui justifie d’un intérêt légitime peut demander à changer de
prénom ».
En l’espèce, la question qui se pose concerne bien un changement de prénom.
Il faut maintenant déterminer si la demande de la fille serait justifiée par un intérêt légitime. Cet intérêt légitime est
apprécié par le juge. Ici, la demanderesse pourra invoquer le ridicule de l’association de son prénom, Belle, et de son
nom, Maire, et les moqueries dont elle serait victime.
Ceci pourrait très vraisemblablement constituer un intérêt légitime aux yeux du juge.
L’article 60 pourrait donc s’appliquer, et Belle pourrait obtenir le changement de son prénom.4
-Il s’agit alors de savoir si le couple pourra donner à sa fille le nom de famille de la mère et non celui du père.
L’article 311-21 du Code civil permet aux parents de choisir le nom de famille de leur enfant au moment de sa
déclaration de naissance : ils pourront lui donner soit le nom de la mère, soit le nom du père, soit les deux noms
accolés, et ce dans la limite d’un nom transmis par parent.
Si les parents ne précisent pas de nom, c’est le nom de famille du père qui sera automatiquement transmis.
En l’espèce, l’enfant n’est pas encore né, la déclaration de naissance n’a donc pas encore eu lieu. L’article 311-21 du
Code civil est donc applicable.
Les parents, s’ils souhaitent donner à leur fille le nom de famille de la mère, devront donc le préciser au moment de
la déclaration de naissance en vertu de l’article 311-21 du Code civil.5
3°) Monsieur Dusseigneur vient d’apprendre la parution prochaine d’un livre qui lui sera consacré. L’auteur est un
journaliste particulièrement malveillant. Monsieur Dusseigneur a réussi à obtenir un exemplaire de l’ouvrage, qui est
sous presse.
-Il comporte des photos de l’ensemble immobilier niçois ainsi que de la maison de M. Dusseigneur accompagnées de
diverses indications précises, notamment sur leur situation et sur la valeur de ces biens.
Monsieur Dusseigneur pourra-t-il empêcher la publication de cette photo et des indiscrétions qui l’accompagnent ?
(4 points)
-L’ouvrage comporte une autre photo qui représente M. Dusseigneur participant à une partie de chasse aux
tourterelles en compagnie d’un homme d’affaires qui vient d’être condamné pour de graves faits de corruption. Une
telle publication risque de le rendre impopulaire auprès des amis de la nature et, surtout, elle risque de conduire les
électeurs à douter de sa probité.
Monsieur Dusseigneur pourra-t-il empêcher la publication de cette photo ? (4 points)
-Un livre consacré à l’homme politique comporte des photos de ses biens immobiliers ainsi que des indications
précises sur leur situation et sur leur valeur.
Il s’agit alors de savoir si l’homme politique en question pourra empêcher la publication de ces photos et des
indications qui l’accompagnent.
Intéressons-nous d’abord à la photo des biens immobiliers dont l’homme politique est propriétaire : a-t-il un droit
absolu sur l’image de ses biens lui permettant d’en empêcher la reproduction par un tiers ?
L’article 544 du Code civil dispose que « la propriété est le droit de jouir et disposer de la chose de la manière la plus
absolue ».
En l’espèce, le litige porte sur la reproduction d’un immeuble dont l’homme est propriétaire. En appliquant l’article
544 du Code civil, on pourrait donc estimer que l’image du bien étant liée au droit de jouissance et ce dernier étant
absolu, le propriétaire a un droit absolu sur l’image de son bien.
Cependant, la jurisprudence (Ass. Plén., 7 mai 2004) considère que le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un
droit exclusif sur l’image de celle-ci.
L’homme politique ne pourra donc pas invoquer un droit absolu sur l’image de ses biens pour faire interdire la
publication de la photo.
4
5
Possibilité d’utiliser son deuxième prénom
A défaut, possibilité de prendre le nom de la mère à titre d’usage
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La jurisprudence précise que le propriétaire peut s’opposer à l’utilisation de l’image de son bien par un tiers si elle lui
cause un trouble anormal.
En l’espèce, il semble difficile qu’un trouble anormal soit reconnu.
Monsieur Dusseigneur ne pourra donc pas faire interdire la publication de la photo de ses biens sur le fondement du
droit de propriété.
Intéressons-nous maintenant aux indications qui accompagnent la photo, précisant la valeur et la situation des biens :
l’homme politique pourra-t-il invoquer le droit au respect de sa vie privée pour en faire interdire la publication ?
L’article 9 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
En l’espèce, le livre qui s’apprête à être publié comporte des indications sur la valeur et la situation des biens
immobiliers d’un homme politique.
La jurisprudence considère que la publication de renseignements d’ordre purement patrimonial ne porte pas atteinte
à la vie privée (Cass. Civ. 1re, 28 mai 1991). Or, les indications sur la valeur de biens immobiliers, qui forment le
patrimoine, sont des renseignements d’ordre patrimonial.6
De plus, le propriétaire des biens dont il est question est un homme politique connu, député et potentiellement
candidat aux prochaines élections présidentielles. Les juges pourront donc considérer que la publication de sa
situation patrimoniale relève du droit du public à être informé sur celle-ci.7
L’article 9 ne pourrait donc pas être invoqué ici pour faire interdire la publication d’indications sur le patrimoine de
l’homme politique.
Cependant, les indications portent également sur la situation des biens immobiliers, c’est-à-dire là où l’homme
politique réside.
Ceci entre totalement dans la vie privée, et peut donc être protégé par l’article 9 du Code civil.
L’homme politique pourra donc vraisemblablement obtenir sur le fondement de l’article 9 du Code civil l’interdiction
de la publication des indications sur la situation des biens immobiliers dont il est le propriétaire, mais pas de celles sur
leur valeur.
-Le livre comporte également une photo représentant l’homme politique participant à une chasse aux tourterelles en
compagnie d’un homme d’affaires qui vient d’être condamné pour corruption.
Il s’agit alors de savoir si l’homme politique représenté sur la photographie pourra empêcher la publication de cette
photo.
L’article 9 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
En l’espèce, la photographie représente l’homme politique en compagnie d’un homme d’affaires.
Or, il est admis par la jurisprudence, notamment par la Cour européenne des droits de l’homme, que la vie privée
englobe les relations nouées par une personne.
L’article 9 a donc vocation à s’appliquer ici.
On peut imaginer que le juge reconnaisse un droit légitime du public à être informé sur les relations entretenues par
l’homme politique, notamment pour la prévention d’éventuels conflits d’intérêts, mais ceci est assez incertain.
Selon la jurisprudence (Cass., 12 décembre 2000), « l’atteinte au droit au respect de la vie privée et au droit à l’image
constituent deux sources de préjudices distinctes, ouvrant droit à deux réparations distinctes ».
L’homme politique pourra donc peut-être empêcher la publication de la photo sur le fondement du droit à l’image.
En l’espèce, la photographie représente l’homme politique participant à une chasse aux tourterelles.
Rien n’indique qu’il ait donné son consentement à la prise de cette photographie, et a fortiori à sa publication
puisqu’il souhaite l’empêcher.
Or, en principe, la diffusion d’une photographie nécessite le consentement des personnes qui y sont représentées,
même si elle a été prise dans un lieu public.
L’auteur du livre pourrait alors invoquer le fait que l’homme politique soit une personnalité publique, et que donc le
consentement était tacite, mais en l’espèce, la photographie ne le représente pas dans l’exercice de sa fonction.
L’homme politique pourra donc empêcher la publication de cette photographie sur le fondement de son droit à
l’image et aussi, éventuellement, de l’article 9 du Code civil et du droit au respect de sa vie privée.
6
7
Oui, sauf si précisions sur le mode de vie
Discussion
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