Lejouroùlebobo s`estfaitvolersonbeauvélo

Transcription

Lejouroùlebobo s`estfaitvolersonbeauvélo
Ici et ailleurs
S. 30
Chronique eschoise.
Le jour où le bobo
s’est fait voler son beau vélo...
Guy van Hulle
L’engin en question ne fut certes pas le
„beau vélo de Ravel“ bien connu de l‘émission télé-touristique belge, mais l’outil écolo et très pratique d’un autre ténor bien
connu du barreau culturel local, lequel
pour changer de direction usa du plus bel
effet de manches pour filer à droite ou à
gauche à la recherche de quelque dossier
égaré.
On s‘était habitué à voir passer dans le
centre ville et en coup de vent cet indissosciable duo, l’ancien Colnago et son gentil
proprio, ce dernier pris par une multitude
de tâches et d’obligations faisant inlassablement la navette et le grand écart entre son
étude, l’Hôtel de Ville et le tribunal, voire la
maison de retraite, où régulièrement il y eut
quelque nonagénaire à féliciter et à fleurir...
Toujours pressé, insaississable et évasif
sur sa monture et en dehors au point d’en
avoir fait son image de marque, maître J.,
plutôt que de s’embarrasser d’une voiture
pour faire ses courses ou d’opter pour un de
ces vélos du CIGL boudés par le public et
en faire la promotion par la même occasion,
préférait se servir quant à lui de son fidèle,
pratique et élégant V.T.T. recyclé en CityBike.
A force d‘être dans le déni
de la grivèlerie...
A la fois trop pressé et trop crédule, alors
rien que de par son expérience professionnelle, il aurait pu et dû se méfier, le gentleman-biker eschois aux multiples casquettes, hélas, omît de cadenasser sa monture
qu’en gentil bobo-cool il avait pris l’habitude de déposer négligemment devant quel-
Photo: Tageblatt/Archiv
Il était une fois un beau vélo tout terrain
italien de marque Colnago, non pas un
de ces surdimensionnés et supersophistiqués Mountainbike actuels, mais un
élégant V.T.T. classique de la première
génération doté de freins cantilever et
de gros pneus Ballon au cadre bleu clair
argenté et au graphisme losangé qu’on
voyait souvent sillonner les rues d’Esch
et qui avec son maître au guidon formait un équipage sympathiquement
vintage et „class „...
que façade ou pan de mur avant d’aller vaquer vite fait à ses occupations en s’enfoncant à l’intérieur d’un bâtiment communal,
tribunal ou autre agence de voyages afin de
prendre un peu de recul ...
Ce qui devait arriver finît par arriver un
jour où, dans le prolongement de la rue Jean
Jaurès, le beau vélo rétro ayant pignon sur
rue sournoisement lui fut subtilisé devant
une crèche de mioches qu’il tint à visiter entre deux rendez-vous, quelques divorces,
une quenelle de voisins et plusieurs autres
dossiers. Depuis ce jour maudit l‘échevin
échevelé semble s‘être fait une raison et on
le voit circuler désormais un brin moins décontracté qu’avant sur un vieux clou - un
Gitane, Mercier ou MBK - à la valeur sentimentale encore plus grande, vu qu’il lui fut
donné, paraît-il, en cadeau à l’occasion de
sa première communion... Que l’ami J. sache qu’en tant que pépère fondateur du
mouvement vététiste nous déplorons très
sincèrement le vol de ce beau spécimen et
que ce fait d’hiver, loin de nous en réjouir et
même si cela n’en a pas l’air, nous a au contraire fortement chagriné!
Une leçon à retenir
Echaudé par la perte de sa petite reine
s‘étant „fait la malle“, victime sans doute de
la bande organisée sévissant au pays et jetant normalement leur dévolu sur des vélos
à plus de 5000 euros, à moins que ce ne fut
le nième larcin perpétré par un de ces nombreux voyous courant les rues, le trop gentil
J. - et là sa réaction a beau être humaine, elle n’en est pas moins révélatrice - comme
tout un chacun dans un tel cas, s’est juré de
prendre désormais ses précautions.
Obligé de reconnaître „à l’insu de son
plein gré“ comme dirait Virenque, qu’il
puisse tout de même y avoir un tout petit
problème en matière de délinquance à Esch
et ne serait-ce qu‘à travers ses vils voleurs
de vélos... alors que d’autres, voire les mêmes qui sait...semblent détester les bagnoles au point d’y mettre le feu en narguant la
police par dessus la place du marché... A
noter que le même malheur est arrivé à Albert l’apothicaire plus que sexagénaire, qui
suite à un moment d’inattention fut délesté
à l’identique de son Mérida-da, le laissant
tout aussi dépité et penaud.
Parking „Velovip“
En garant dorénavant son vieux clou pas
glamour pour deux sous dans le hall marbré
de l’Hôtel de Ville, lors des sessions, voire
dans celui de la piscine municipale, pardon
des „Bains du Parc“, au pied du tableau de
Moritz Ney, les lundi soir de sauna, alors
que le citoyen eschois lambda, ne bénéficiant pas de ce privilège, est tenu à ranger sa
bicyclette dans les rateliers au dehors prévus pour, l‘échevin de la véloculture nous
semble en légère contradiction avec ce qu’il
prône en matière de sécurité (poil au nez)...
A quelque chose malheur sera-t-il bon?
Toujours est-il que ce faisant il est forcé de
reconnaître, et ne serait-ce qu’implicitement, que contrairement à sa propre personne, tout le monde n’est pas aussi beaubeau ni aussi gentil dans notre cité chérie,
que lui et ses amis de party essaient de nous
le faire croire depuis des années...
De là à revenir à l’appellation peu flatteuse d‘„Esch la Mauvaise“, comme on nommait la deuxième ville du pays non sans raison dans les années vingt, il est vrai qu’il y a
plusieurs pas à ne pas franchir, même si les
politiciens persistant dans le déni jusqu‘à
essayer de nous la présenter comme une cité radieuse et ideale, une espèce d’Esch-sûre-sûre en quelque sorte, feraient bien de tenir enfin compte des doléances et du ras-lebol de ses habitants qui ont bien des raisons
pour ne plus l’avoir à la bonne...

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