Le méteil : un fourrage en interculture

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Le méteil : un fourrage en interculture
COLLECTION THÉMA
RÉSEAUX D’ÉLEVAGE POUR LE CONSEIL ET LA PROSPECTIVE
LE MÉTEIL : UN FOURRAGE
EN INTERCULTURE
BOVINS
VIANDE
Une solution parmi d’autres en élevage bovin allaitant pour
gagner en autonomie alimentaire
Le méteil est un mélange d’une ou plusieurs espèces de
céréales à paille avec une ou plusieurs espèces de protéagineux qui présente un potentiel et une diversification de la
ressource fourragère qui peuvent être intéressants en région
Aquitaine, avec ou sans irrigation. C’est une culture d’hiver
qui demande peu d’interventions, peu d’intrants, avec des
effets bénéfiques sur le plan agronomique et qui se récolte
immature au printemps, libérant ainsi la parcelle pour
d’autres cultures. Ensilé ou enrubanné, il constitue un
fourrage de base équilibré, source de protéines et de fibres
qui convient particulièrement à l’alimentation des bovins
allaitants. Polyvalent et souple d’utilisation, il peut être
distribué en plat unique ou en association avec du maïs
fourrage.
BEAUCOUP D’AVANTAGES…
Assurer du stock avant l’été
La culture de méteil permet le stockage de
fourrages au printemps (mai-juin) avant les
risques de sécheresse estivale. Elle ne
nécessite pas d’irrigation. Son potentiel de
rendement observé en Aquitaine varie
entre 5,5 TMS/ha (sols séchants à faible
potentiel) et 12 TMS/ha (sols profonds) : un
printemps sec pénalise les rendements, un
excès d’eau en hiver pénalise la teneur en
protéine du mélange récolté.
Un fourrage à moindre coût
La culture de méteil est économe en intrants. Elle ne nécessite pas ou
peu d’apport d’azote, les légumineuses du mélange fixant l’azote
atmosphérique. Sur une parcelle normalement propre, le désherbage est
inutile grâce à une couverture rapide du sol par le mélange et à son
aptitude étouffante envers les adventices. Enfin, l’association de plusieurs
espèces rend le méteil peu sensible aux maladies.
Des avantages agronomiques
Le mélange céréales-protéagineux épuise moins les réserves en eau du
sol qu’un ray-grass dérobé et le laisse bien structuré, grâce à la variété et
à la densité de son système racinaire : un avantage pour les reprises de
sol sur des fenêtres de temps courtes en interculture. Derrière le méteil,
on pourra envisager un semis de maïs précoce (conditions favorables) ou
bien de sorgho, moha ou autres graminées fourragères estivales. Enfin, le
méteil peut servir de culture intermédiaire en rénovation de prairie.
Un fourrage équilibré et polyvalent en élevage allaitant
La valeur alimentaire du fourrage dépend de la proportion de protéagineux dans le mélange récolté qui améliore son taux de MAT. Aussi
fibreux qu’un foin, le méteil peut être distribué à volonté en plat unique
et couvrir les besoins des animaux à l’entretien (vaches en gestation),
combler les trous d’été et préparer aux vêlages de fin d’été et d’automne.
Distribué en complément de l’ensilage de maïs, il apporte des fibres et
permet de gagner en protéines. S’il est trop fibreux en revanche (récolte
tardive, enrubannage), il perd en appétence et les refus peuvent être
importants.
Aquitaine
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LE MÉTEIL : UN FOURRAGE EN INTERCULTURE
UNE SOLUTION PARMI D’AUTRES EN ÉLEVAGE BOVIN ALLAITANT POUR GAGNER EN AUTONOMIE ALIMENTAIRE
UN ITINÉRAIRE CULTURAL
SIMPLE
Choix des espèces
Les associations peuvent être mutiples et
plus ou moins complexes. Les proportions
à la récolte ne sont jamais celles du semis
(concurrence entre espèces) et varient
selon l’année (conditions climatiques qui
favorisent l’une ou l’autre espèce). Pour
connaître la composition du mélange
récolté, un comptage en vert au champ est
nécessaire.
Le choix des espèces et des variétés doit
répondre à 3 enjeux :
• Avoir la même vitesse de croissance afin
de limiter la concurrence entre espèces,
• Choisir un bon tuteur céréalier pour
éviter la verse,
• Rechercher la meilleure valeur azotée
possible.
Préparation du sol
Elle dépend du précédent et du type de sol : soit itinéraire classique
(labour, reprise, semis) en condition difficile, soit techniques culturales
simplifiées (sans labour).
Semis
Période de semis : octobre à mi-novembre
En un seul passage avec semoir à céréales à 2-3 cm de profondeur : bien
mélanger les semences avant de les placer dans le semoir et veiller à
remélanger régulièrement les graines dans la trémie.
En 2 passages : céréales et protéagineux sont semés séparément en
passages croisés. Protéagineux d’abord à 4-5 cm, céréales ensuite à 2 cm.
Astuce de M. Lagouardette - 64
Mélanger environ 1/3 de litre d’huile végétale pour les 150 kg
de semences hectare pour constituer un mélange homogène.
Entretien de la culture
Dans le cas d’un apport régulier de fumier, la fumure de fond n’est pas
nécessaire ; autrement, prévoir un apport de 80 à 100 U de P et K. Un
apport d’azote de 30 à 60 U en sortie d’hiver peut aider le développement des céréales mais n’est pas indispensable.
Le désherbage ne s’impose pas. Le recours aux traitements phytosanitaires est rare mais peut s’avérer utile en cas d’attaque sévère d’oïdium.
La culture répond bien à l’irrigation en cas de sécheresse précoce sur des
sols légers.
Récolte
Les protéagineux les plus courants : pois
fourrager (risque de verse, ne pas dépasser
30 kg/ha), vesce (souplesse de récolte),
féverole.
Les céréales les plus rencontrées : triticale
(rustique, tuteur du pois), avoine
(appétente, pouvoir couvrant mais moins
énergétique), orge, blé, seigle. Veiller à
limiter les variétés barbues.
Proportions couramment utilisées (doses
semis/ha) : 90 à 120 kg de céréales et 30 à
50 kg de protéagineux selon la capacité de
maîtrise du semis.
Pour optimiser la proportion de chaque
espèce, mieux vaut raisonner en poids de
mille grains (PMG) pour éviter des erreurs
grossières. Densité de semis : 250 à 300
grains/m2 (mettre 15 % de plus avec des
semences fermières).
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La récolte est l’étape délicate pour réussir son méteil : le taux de matière
sèche évolue rapidement en fin de cycle et la fenêtre de récolte au stade
optimal du mélange est courte. C’est l’état de maturité de la céréale
(stade laiteux-pâteux du grain) qui la déclenche. Elle a lieu entre fin avril
et fin mai selon la zone pour les cultures intercalaires avec un objectif de
30 % de MS. Attention à l’égrenage des protéagineux à la récolte.
Stockage en ensilage : plus approprié en coupe directe mais tous les
modes de récolte peuvent convenir. Hacher fin et bien tasser le silo.
Stockage en enrubanné : récolter à un stade plus vert, fauche (rotative
ou conditionneuse), pressage et enrubannage le lendemain. Mettre 6
couches de film à 50 % de recouvrement quand la céréale a une paille
rigide.
LE MÉTEIL : UN FOURRAGE EN INTERCULTURE
UNE SOLUTION PARMI D’AUTRES EN ÉLEVAGE BOVIN ALLAITANT POUR GAGNER EN AUTONOMIE ALIMENTAIRE
> Graphique 1 : plages de rendements observés pour un mélange semé 70 %
céréales / 30 % protéagineux
UN FOURRAGE ÉQUILIBRÉ ET
POLYVALENT
Les rendements
Ils varient de 5 à 10 TMS/ha, avec une forte
contribution de la céréale. Ainsi, le méteil
exprimera pleinement son potentiel de
production sur des bonnes terres
profondes et sera moins productif en sols
superficiels et séchants. La verse fait chuter
le rendement de 10 à 20 %. Une récolte
avant le stade grains pâteux pénalise le
rendement et peut générer des écoulements de silo (graphique 1).
> Tableau 1 : valeur alimentaire de méteil (essais lycées, références
chambres départementales)
PDI/UF
Taux
MS
12 à 15 % 26 à 34 % 0,65 à 0,8 55 à 100 110 à 145
23 à
45 %
MAT
Plages de
variation
UFL
Cellulose (/kg
MS) PDIN
Enrubanné
(lycée
Périgueux)
12 %
34 %
0.69
76
110
31 %
Ensilage
(lycée Dax)
13 %
26 %
0.70
81
116
23 %
La valeur alimentaire du fourrage
La matière azotée du fourrage est liée à la
part relative des espèces protéagineuses
dans le mélange récolté qui varie en
fonction du mélange semé, de l’humidité et
froid hivernaux, de la sécheresse de
printemps et des conditions de récolte
(égrenage). Une analyse est vivement
recommandée. Sa fiabilité est conditionnée
par un comptage en vert au champ pour
apprécier la proportion des espèces
(tableau 1).
Les utilisations par le troupeau
Le 100 % méteil :
• en plat unique pour les animaux à l’entretien et à besoins modérés (vaches
gestantes, génisses de plus de 2 ans),
• avec complémentation en concentrés
équilibrés pour les animaux à plus forts
besoins (vaches suitées, génisses de 1 an).
Exemples de rations
Chez Monsieur Jean-Luc Peret, à Uzan (64)
60 vaches Blondes d’Aquitaine, 7 ha de méteil
Animaux à faibles besoins :
25 kg bruts d’ensilage de méteil + foin à volonté
Vaches suitées, jeunes génisses :
complémentées avec 1,5 à 2 kg de céréales + 0,5 kg soja + 100 g CMV
Au lycée de Périgueux (24)
70 vaches Limousines, 2,5 ha de méteil
Vaches suitées :
50% méteil enrubanné, 50 % foin (en MS) + 1 kg céréales + 80 g CMV
Ou
40 % ensilage de maïs, 40 % méteil, 20 % foin enrubanné + 0,3 kg tourteaux de colza
+ 80 g CMV
Le mixte maïs-méteil : le méteil amène fibre
et protéine et permet d’économiser du
concentré :
• le maïs rationné à 40 % maximum de la
capacité d’ingestion (environ 5 kg MS soit
15 kg bruts) avec méteil et foin à volonté,
• le « 3 tiers » : 1/3 MS de maïs (13 kg
bruts soit 4,3 kg MS), 1/3 méteil (13 kg
bruts soit 4,3 kg MS), 1/3 foin (5 kg bruts
soit 4,3 kg MS).
Dans les 2 cas, vérifier l’équilibre azoté de la
ration et complémenter avec un concentré
selon les besoins.
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UNE SOLUTION PARMI D’AUTRES EN ÉLEVAGE BOVIN ALLAITANT POUR GAGNER EN AUTONOMIE ALIMENTAIRE
APPROCHE ÉCONOMIQUE
> Tableau 2 : coût de production 2010 des principaux fourrages (charges directes travaux par tiers incluses)
Ensilage
de méteil
Objectif de
rendement (/ha)
6 TMS
10 TMS
Charges
directes (/TMS) 50 à 60 € 40 à 45 €
Ensilage
de maïs
Herbe stockée
EnruFoin Ensilage bannage
13 TMS
50 €
4 TMS
(2 x 2TMS)
5 TMS
45 €
43 €
Pâture
55 €
25 €
M. Grelaud, chef d’exploitation à l’ESAT de Captieux,
100 bazadaises, sème 20 ha de méteil depuis plusieurs
années
« C’est une culture d’hiver qui me permet de produire une belle quantité de
fourrage équilibré entre 2 maïs, qui ne me coûte pas cher et qui me permet d’être
plus autonome. C’est une culture facile car je ne désherbe pas et le méteil se
contente d’un apport d’environ 80/30/60, sans fumier. Dans nos sables très
séchants, je le sème sur mes terres à maïs pour pouvoir l’irriguer un peu, si besoin
en cas de sécheresse de fin d’hiver… mais en année normale, la culture se débrouille
toute seule ! Je récolte mi-mai en ensilage : on fauche avec une conditionneuse puis
on ensile le lendemain. Il n’y a pas de problème particulier. J’obtiens des
rendements de 7 à 9 TMS/ha. Je le donne en plat unique avec du foin aux vaches à
l’entretien. J’en donne aussi aux bœufs et génisses en croissance en complémentant
avec un peu d’aliment concentré. Il n’y a pas de problème d’appétence mais je
remarque un temps d’adaptation de 5 à 6 jours… après, il n’y a aucun refus et je
constate même que mes animaux ressortent mieux et affichent une meilleure
croissance après une période d’alimentation au méteil ».
M. Péret, éleveur de Blondes d’Aquitaine à Uzan,
cultive depuis 2 ans environ 7 ha de méteil
« Je fais du méteil entre 2 maïs en remplacement du ray-grass. C’est un bien
meilleur précédent : le sol se reprend plus facilement, il est moins asséché. Les
légumineuses me permettent d’économiser de l’azote sur mon maïs et c’est une
culture facile qui laisse un sol propre parce que bien couvert : après le semis, je ne
fais plus rien jusqu’à la récolte. Je fauche puis j’ensile au pick-up dans la foulée.
C’est un fourrage très appétent que les vaches apprécient. En été, les suitées
reçoivent 25 à 30 kg de méteil et 1,5 kg de farine de maïs, les gestantes seulement
du foin et du méteil. Je n’apporte pas d’autre protéine et j’économise du foin car
cet ensilage est déjà bien fibreux ».
Contacts
• Laurent AYMARD (CA 24)
• Michel AIME (CA 33)
• Didier LAHITTE (CA 40)
• Vincent JOLIET (CA 47)
• Thierry DELTOR,
Beñat GONZALEZ (CA 64)
• Marion KENTZEL
(Institut de l’Elevage)
Crédit photos : Institut de l’Élevage, Chambres d’Agriculture - Création : Bêta Pictoris - Réalisation : Florence Benoit - Impression : Imprimerie de Lens
La simplicité de l’itinéraire cultural, qui limite
les dépenses à la semence et à un faible
apport azoté, rend le coût de production
du méteil fourrager stocké tout à fait
intéressant en comparaison aux autres
types de fourrages (tableau 2).
LES RÉSEAUX D’ÉLEVAGE
Les Réseaux d’Élevage sont un dispositif partenarial associant des éleveurs et des ingénieurs
des Chambres d’Agriculture et de l’Institut de l’Élevage.
LES PARTENAIRES FINANCEURS
Ce document a été élaboré avec le soutien financier conjoint du CasDAR et de l’Union Européenne (FEADER).
Il a été édité sur les fonds de diffusion du Conseil Régional d’Aquitaine. Les connaissances qui y sont diffusées ont été acquises dans le cadre du
programme régional d’expérimentation animé par le GIE Herbivores Aquitaine et financé par le Conseil Régional d’Aquitaine.
avec la contribution financière
du compte d'affectation spéciale
"Développement agricole et rural"
Juillet 2011
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Document édité par l’Institut de l’Élevage - 149 rue de Bercy, 75595 Paris cedex 12
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