le cameroun de 1884 a 1939

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le cameroun de 1884 a 1939
LE CAMEROUN DE 1884 A 1939
28 décembre 2013
LECON 14
L’ŒUVRE ALLEMANDE AU CAMEROUN
- Présenter les réalisations de l’Allemagne au « Kamerun » sur les plans politico-administratif,
économique et social.
- Montrer que ces réalisations étaient destinées plus à servir les intérêts de l’empire allemand.
INTRODUCTION
En 1884, un ancien consul d'Allemagne à Tunis, Gustav Nachtigal, explora la région et signa,
à la demande du chancelier Otto Von Bismarck, des traités avec les souverains doualas de la
côte camerounaise : l'Allemagne établit ainsi son protectorat allemand, un Schutzgebiet, sur le
Kamerun (nom qui ne désignait que la région de Douala). Dès lors, la ville de Douala fut
baptisée Kamerun-Stadt. Les Allemands entreprirent ensuite la colonisation du pays et
atteignirent l'Adamaoua en 1899 et le Lac Tchad en 1902. Ces conquêtes leur permirent de
procéder à des réalisations sur les plans politico-administratif, économique et social.
I- L’ŒUVRE POLITICO-ADMINISTRATIVE : MISE EN PLACE DES STRUCTURES
CONSTITUTIVES DE L'ÉTAT DU CAMEROUN
L’occupation allemande est marquée par le début de la mise en place des structures
constitutives de l'État du Cameroun. Il s’agit essentiellement de la fixation des frontières du
« Kamerun » et de la création d’unités administratives.
1- La fixation des frontières du « Kamerun » par l’Allemagne
C'est avec les allemands que les frontières du Cameroun furent adoptées et précisées. En effet,
conformément aux résolutions de la conférence de Berlin (novembre 1884-février 1885) qui
recommandaient que les puissances coloniales en Afrique s'entendent pour délimiter leur zone
d'occupation, Allemands, Anglais et Français se rencontrèrent pour établir les frontières du
Cameroun.
Les frontières du nouveau protectorat sont fixées un an plus tard en marge de la conférence de
Berlin, c'est l'acte du Congo. Des traités sont signés ensuite pour rectification de frontières le
3 mai 1885 (avec la Grande-Bretagne), le 24 décembre 1885 (avec la France), le 27 juillet
1886 (avec la Grande-Bretagne), le 2 août 1886 (avec la Grande-Bretagne), le 14 avril 1893
(avec la Grande-Bretagne), le 15 novembre 1893 (avec la Grande-Bretagne), le 15 mars 1894
(avec la France), en 1901 et 1902 (avec la France) et en 1908 (avec la France). Un décret
allemand du 1er janvier 1901 imposa l'usage du mot Kamerun pour l'ensemble du pays dont la
superficie était évaluée à 495 000 km2.
A la fin du XIXème siècle, celles-ci étaient déjà définitives, mais en 1911 du fait d'une
nouvelle convention signée avec la France, elles connurent une extension qui agrandit la
superficie du Cameroun, superficie qui atteignit les 750.000 km². En effet, L’incident
d’Agadir survenu en juillet 1911 et ayant opposé la France à l’Allemagne donna l’occasion à
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cette dernière d’accroître la superficie du Kamerun. Aux termes d'âpres 1 tractations2,
l'Allemagne renonce à être présente au Maroc en échange de l’abandon par Paris de
272 000 km2 de territoires d'Afrique équatoriale, au Gabon, au Moyen-Congo et en OubanguiChari, au profit du Cameroun allemand. Un traité franco-allemand est signé le 4 novembre
1911 à Berlin, laissant les mains libres à la France au Maroc. En 1912, l’Allemagne céda le
territoire du « bec de canard » à la France pour régulariser la frontière orientale. Désormais, le
« neue Kamerun » a une superficie de 750 000 km². Le « protectorat » s'étendit du lac Tchad
au nord aux rives de la Sangha au sud-est. La ville de Buéa au pied du mont Cameroun en
devint la capitale avant d'être destituée au profit de Douala en 1908. Et la carte définitive du
Cameroun sera dressée par le géographe Max Moisel en 1913.
2- L’établissement de l’administration coloniale
Le Kamerun Schutzgebiet fut placé sous l'autorité d'un gouverneur représentant le chancelier
du Reich et divisé en unités administratives dénommées postes et stations pour les plus
petites, Bezirk (au sud) et Residentur (au nord) pour les grandes.
Douala fut tout d'abord choisie pour abriter la résidence des gouverneurs et le siège du
gouvernorat (1885-1901), puis ce fut le tour de Buéa (1901-1909), au climat plus frais et
choisie par le gouverneur von Puttkamer. L'éruption du Mont Cameroun qui eut lieu en 1908
mit prématurément fin au règne de Buéa. Ce fut de nouveau le retour à Douala où les
Allemands se heurtèrent cette fois-ci à la révolte des Doualas qui refusaient de se laisser
expulser de leurs terres. . Considérant en effet qu'ils devaient vivre à Douala dans un
environnement expurgé de leurs voisins indigènes, les Allemands entreprirent un programme
d'expropriation des Douala de leurs terres du plateau Joss. La révolte des Douala, qui prit
plusieurs formes, se termina par la pendaison par les Allemands de son principal meneur,
Rudolf Douala Manga Bell et de son secrétaire Ngoso Din.
Le premier gouverneur, nommé haut-commissaire en juillet 1885, est le baron Julius von
Soden qui administrait le Togoland. Le siège du gouvernement colonial se trouve à Douala de
1
D’une dureté acharnée et intraitable Synonyme: rude Exemple : mener d'âpres négociations • être âpre au gain
Négociation souvent secrète et complexe pour parvenir à un accord [Remarque d'usage: parfois péjoratif]
Exemple : un accord concrétisé au bout d'un an de tractations
2
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1884 à 1901, puis à Buéa, près du mont Cameroun, de 1901 à 1916. C'est surtout le
gouverneur Jesko von Puttkamer (1895-1906) qui marque la colonie en développant les
infrastructures et en appuyant le développement économique. Il prend la décision de
déménager l'administration coloniale à Buéa, emplacement considéré comme plus sain. Le
territoire est divisé en districts, postes administratifs ou militaires, et « résidences »
(Residentur), avec administration indirecte dans le nord musulman du territoire.
Les districts sont ceux de Rio del Rey, Victoria, Douala (Duala en allemand), Jabassi,
Johann-Albrecht-Höh, Bare, Ossidinge, Bamenda, Kribi, Edéa, Ebolowa, Lomié, MolunduJukaduma, Dume, Yaoundé (Jaunde en allemand) et Banjo. Les résidences sont Adamaoua et
la zone allemande du lac Tchad. Deux autres résidences sont créées en 1913 à Ngaoundéré
(Ngaundere en allemand) de la division d'Adamaoua (Adamaua en allemand) et en 1914 à
Bamoum (Bamum en allemand).
Dates
Noms
26 mai 1885 - Julius
Von
14 février 1891 Gouverneur
15 avril 1891 - Eugen von
13 août 1895
Gouverneur
Remplaçants
Soden, 13 mai 1887 - 4 octobre
1887 : Jesko Von Puttkamer
4 octobre 1887 - 17 janvier
1888 : Eugen Von Zimmerer
17 janvier 1888 - 26
décembre 1889 : Julius Von
Soden
26 décembre 1889 - 17 avril
1890 : Eugen Von Zimmerer
17 avril 1890 - 3 août 1890 :
Markus
Graf
Pfeil
3 août 1890 - 14 août
1890 :…
Kurz
14 août 1890 - 2 décembre
1890 : Jesko von Puttkamer
Zimmerer, 7 août 1891 - 5 janvier
1892 :
Bruno
von
Schuckmann
27 juin 1893 - 24 février
1894 :…
Leist
31 décembre 1894 - 27 mars
1895 : Jesko von Puttkamer
28 mars 1895 - 4 mai 1895 :
…
von
Lücke
5 mai 1895 - 13 août 1895 :
Jesko von Puttkamer
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Remarques
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13 août 1895 - 9 Jesko von
mai 1907
Gouverneur
Puttkamer, 27 octobre 1895 - 10
septembre 1897 : Theodor
Seitz
12 janvier 1898 - 13 octobre
1898 :
Theodor
Seitz
17 janvier 1900 - 31 juillet
1900 :
August
Köhler
1er août 1900 - 6 septembre
1900 :
…
Diehl
6 septembre 1900 - 15
novembre 1900 : … von
Kamptz
3 février 1902 - 3 octobre
1902 :
…
Plehn
9 mai 1904 - 31 janvier
1905 :
Otto
Gleim
Janvier 1906 - Novembre
1906 :
Oberst
Müller
er
Novembre 1906 - 1 juillet
1907 : Otto Gleim
9 mai 1907 - 27 Theodor Seitz, Gouverneur
août 1910
10 février 1909 - Octobre
1909 : … Hansen
28 août 1910 - Otto Gleim, Gouverneur
29 janvier 1912
Août 1910 - Septembre
1910 :
…
Steinhausen
Septembre 1910 - 25 octobre
1910 :
Hansen
Octobre 1911 - 29 mars
1912 : … Hansen
29 mars 1912 - Karl
1916
Gouverneur
Fin
de
9 octobre 1913 - 1914 : … mandat non
Full
définie, du
fait
de
l'occupation
francobritannique.
Ebermaier,
Août 1914
Occupation partielle par le Royaume-Uni et la France
4 mars 1916
Le Kamerun allemand capitule - début de l'occupation
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3- Troupes coloniales
La défense est constituée en 1900 de quinze officiers allemands et vingt-trois sous-officiers,
de deux compagnies d'Askaris de 318 hommes. De plus 150 policiers indigènes assurent la
sécurité. En 1914, le nombre d'Askaris s'élève à 1 500 hommes encadrés par 185 officiers
allemands. Les troupes de police paramilitaire (fondée en 1891) comprennent 1 200 hommes
et 31 officiers. Une grande partie des troupes est recrutée ailleurs (Libéria, Togoland,
Dahomey), mais est dominée par les tribus Ngambi ou Ndou et aussi par des Peuls. Les
troupes coloniales augmentent, jusqu'à dix mille hommes au cours de la Campagne d'Afrique
de l'Ouest (Première Guerre mondiale).
4- Population

Kamerun: 2 600 000 habitants

Neukameun (ou Nouveau-Cameroun) à partir de 1911: 2 000 000 habitants environ

Dont Européens:
o
1897: 253 habitants (dont 181 Allemands)
o
1912: 2 000 habitants environ (dont la moitié d'Allemands)
Toute cette armature politico-administrative visait à faciliter l’exploitation économique de la
colonie.
II- L’ŒUVRE ECONOMIQUE : L’EXPLOITATION ECONOMIQUE OU LA MISE EN
VALEUR DU CAMEROUN
A- La forte attraction des richesses du Cameroun sur les opérateurs économiques allemands
Les premières explorations d'importance des terres intérieures ont lieu de 1888 à 1891 sous le
commandement de Richard Kund, Hans Tappenbeck et Curt Morgen. Ils explorent l'intérieur
de la côte des Batangas, tandis que l'explorateur Eugen Zintgraff s'avance dans la savane du
Cameroun occidental, où il fonde dans les montagnes le poste de Baliburg, à 300 km au nordest de l'embouchure du fleuve Cameroun. Kund et Tappenbeck fondent, quant à eux, le poste
de Jeundo (devenu Yaoundé) qui sera pendant toute la période allemande une base arrière
importante pour le Kamerun du sud-est et du centre.
Ainsi, grâce aux rapports des explorateurs, les richesses de l'hinterland camerounais furent
connues. Dès 1850, Barth avait pu s'engager dans les régions du Nord-Cameroun. Son travail
fut poursuivi de 1869 à 1873 par Gustav Nachtigal. Un peu plus tard, de 1882 à 1883, Flegel
qui était à la fois explorateur et commerçant, pénétra dans l'Adamaoua par le Niger et la
Bénoué.
Les peuples Doualas détenaient le monopole du commerce sur les côtes du Cameroun. Ils
servaient d'intermédiaire entre les populations de l'intérieur du Cameroun avec les Allemands.
Devant l'abondance des produits vendus par les Doualas et que ceux-ci supposaient être
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récoltés à l'état sauvage, les Allemands vont conclure que l'acquisition de la région s'imposait
du fait que celle-ci se prêtait fort bien à la création des plantations. La richesse de la brousse
en épices, caoutchouc, noix de palme et autres fournissait un indéniable témoignage de la
fertilité des sols et montrait combien ces ressources pourraient être accrues par la culture
(Etoga Eily 1971 : 128). Le profit réalisé par les Doualas grâce à ce monopole était alors
immense. Seulement des infiltrations des commerçants à l'intérieur du pays étaient de plus en
plus fréquentes et elles devinrent irréversibles du jour où Woermann obtint une très grande
concession dans la région d'Edéa et y fonda la première grande plantation de la colonie.
Par ailleurs les possibilités agricoles de la région du Mont-Cameroun furent l'objet de
nombreux rapports aussi bien par des voyageurs que par des explorateurs. F.R. Burton, consul
britannique dans la baie de Biafra et à Fernando-Poo, ne signalait-il pas, bien avant
l'occupation allemande, que les basses pentes du massif du Mont-Cameroun étaient favorables
à la culture du café, du cacao et de la canne à sucre ? Il regrettait même qu'un sol d'une telle
fertilité fut abandonné aux seules pratiques agricoles des indigènes dont les méthodes étaient à
la fois inefficaces et destructives (Etoga Eily 1971 : 160).
Aussi, la tendance principale dans la politique coloniale fut donc d'offrir aux intérêts
économiques privés des conditions favorables à leurs entreprises coloniales et cela sans
participation financière de la part de ces acteurs privés (Fark-Grüninger 1995 : 45). Ceux-ci
cherchaient au Cameroun des débouchés pour leur surproduction, une amélioration de leur
condition d'approvisionnement et cela à des coûts aussi faibles que possible. L'attitude hostile
du parlement obligea l'administration allemande au Cameroun de se procurer une grande
partie des ressources nécessaires au Cameroun même. Ceci n'ira pas sans conséquence sur
l'organisation sociale du Cameroun. Il fallait donc briser les monopoles des populations
côtières et créer des conditions nécessaires à la mise en place des plantations.
B- L’œuvre de mise en valeur proprement dite
La tendance principale dans la politique coloniale fut donc d'offrir aux intérêts économiques
privés des conditions favorables à leurs entreprises coloniales et cela sans participation
financière de la part de ces acteurs privés (Fark-Grüninger 1995 : 45). Ceux-ci cherchaient au
Cameroun des débouchés pour leur surproduction, une amélioration de leur condition
d'approvisionnement et cela à des coûts aussi faibles que possible. L'attitude hostile du
parlement obligea l'administration allemande au Cameroun de se procurer une grande partie
des ressources nécessaires au Cameroun même. Ceci n'ira pas sans conséquence sur
l'organisation sociale du Cameroun. Il fallait donc briser les monopoles des populations
côtières et créer des conditions nécessaires à la mise en place des plantations.
Etablie pour accroître la puissance économique de la métropole, la colonisation donne lieu à
une exploitation économique intensive des colonies. Pour cela, les Européens transforment
profondément l'économie des territoires colonisés. Ils cherchent avant tout à s'assurer un
approvisionnement en matières premières nécessaires à leurs industries. Ainsi, transformentils l’agriculture locale ; Peu d'industries sont implantées dans les colonies ; On assiste aussi au
développement du commerce ; D'importantes infrastructures sont construites afin d'acheminer
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ces produits en Europe : chemins de fer, ports de commerce. De 1881 à 1915, l’administration
allemande s’attèle à de très grands travaux dont l’exécution est confiée à la WOERMANN
LINIE dans le but d’étendre l’exploitation économique de l’hinterland.
1- La transformation de l’agriculture locale en agriculture de plantation
S’il est vrai que les colonies offrent des débouchés pour les produits manufacturés des
métropoles, elles constituent avant tout des sources d’approvisionnement3 en matières
premières notamment agricoles. Il y a donc développement de l’agriculture commerciale
destinée à l’exportation : Les colons développent les cultures d'exportation.
Au Cameroun, cette transformation de l’agriculture a commencé par la mainmise4 des sociétés
européennes et allemandes sur le secteur productif. Ainsi, l’économie du Cameroun était-elle
entre les mains des firmes de Hambourg qui voulaient établir une colonie commerciale, la
Handelskolonie, au Cameroun. Remarquons qu’avant l’occupation allemande, certaines
firmes allemandes étaient déjà présentes au Cameroun dont les deux plus importantes étaient
Woermann et Jantzen et Thormalen. Avec les expropriations qui suivirent les conquêtes, ce
chiffre décupla5 :
-
La « Hamburg west african plantation company de Victoria, fondée en 1897, chargée
de la culture cacao et du caoutchouc à Neutagel, Molyko, Bolivamba, Isoka, Moli,
Malende, Toli, etc.
-
LA Prine Alfred plantation pour le cacao, le café et le caoutchouc.
-
La German Rubber company produisant le cacao, le caoutchouc et l’huile de palme.
-
La Meanja Rubber plantation
-
L’Africa Fruit comany, fondée en 1912, basée principalement à Tiko.
-
La Bimbia plantation…
Ensuite, les colons développent les cultures d'exportation au détriment des cultures vivrières.
C’est la mise en place d’une économie de plantation6
3
Ravitaillement en produits.
Domination exclusive et souvent abusive (sur quelque chose) [Remarque d'usage: peut-être péjoratif]
Synonyme: emprise Exemple : une entreprise qui a la mainmise sur une activité économique
5
Décupler : accroître de manière importante
6
Le terme de plantation ne s’emploie que pour des exploitations situées dans les pays tropicaux. Les principaux
produits des plantations sont la canne à sucre, la banane, le café, le thé, le cacao, le coton, le tabac, l’huile de
palme, l’arachide, le caoutchouc et les épices. Cependant, si le terme de plantation peut désigner dans certaines
régions une parcelle de culture vivrière, la plantation correspond essentiellement à un domaine de culture
spéculative. L’économie de plantation s’appuie sur les propriétés du sol et du climat tropical pour produire en
masse des produits destinés à un marché national ou international. On distingue deux types de plantation : la
plantation industrielle et la plantation familiale.
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Afin de faciliter cette exploitation, les Allemands créèrent la Kolonial Witschaftliches
Komittee, le comité colonial économique (CCE), en 1898. C’était un organe du Comité pour
l’importation des produits en provenance des colonies allemandes fondé en 1897.
2- Des infrastructures destinées à l’acheminement des produits en Allemagne
Les équipements et l’infrastructure sont un facteur important de l’exploitation économique.
Le développement du réseau de communication vise à relier les postes coloniaux entre eux, à
faciliter l’écoulement des produits locaux vers les côtes pour leur acheminement vers les
métropoles. Aussi, les politiques de « mise en valeur » ne bénéficient-elles pas directement
aux populations indigènes.
D'une manière générale, l'exploitation économique des colonies développe particulièrement
leur littoral, où se trouvent les villes les plus dynamiques. Il y a donc déséquilibre spatial des
colonies. Sous l’administration allemande, les routes et les chemins de fer partaient de
Douala ou convergeaient vers elle.
a- Le développement de l’infrastructure portuaire
Du temps de la colonisation, il y a eu une amorce de spécialisation de ports : port bananier
pour Tiko, Kribi pour le bois, Douala pour toutes transactions confondu, Victoria aujourd’hui
Limbé pour la banane.
b- La construction du chemin de fer
Les Allemands mirent un accent particulier sur la construction du chemin de fer. La première
ligne de chemin de fer, « la ligne du nord7 », partait de Bonabéri à Nkongsamba sur une
distance de 160 km. Cette voie fut ouverte au trafic en 1911 et 1912. Une autre ligne fut
ouverte entre Douala et Widimenge sur la rivière Nyong, sur la route de Yaoundé. L’intention
des Allemands était d’étendre le chemin de fer à l’Adamaoua et, au-delà, au Tchad, mais la
première guerre mondiale les en empêcha.
Le port de Douala relie la colonie à l'extérieur. Les compagnies maritimes hambourgeoises de
la HAPAG et de la Woermann desservent l'Afrique à l'Allemagne et des navettes sont
organisées entre Douala et les petits ports de Campo, Kribi, Rio del Rey et Victoria.
Les principales voies de communication sont des pistes que l'on parcourt à pied. Les
Allemands commencent donc à construire des routes et à partir de 1900 deux lignes de
chemin de fer. La ligne centrale part de Douala au fleuve Nyong. En 1916, 131 kilomètres de
cette ligne étaient en activité. L'autre ligne, celle du nord, part vers Manenguba. 161
kilomètres sont terminés en 1916. Le troisième projet au sud ne demeure qu'à l'état de projet,
faute de financement nécessaire de la part de la métropole. Cependant de petites lignes privées
construites par des compagnies de plantation, comme celle2 (66 kilomètres) construite par la
Westafrikanische Pflanzungsgesellschaft Victoria, sont en activité. Il y a donc 500 kilomètres
en activité et 2 000 en construction.
7
Nordbahn
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La poste a en 1911 un réseau de 37 stations et de onze stations de télégraphe qui envoient plus
d'un million de lettres et 70 000 télégrammmes. Un câble sous-marin relie en 1912 Monrovia
au Togo et au Kamerun, afin d'assurer aux Allemands leur indépendance par rapport aux
transmissions britanniques. Enfin la station de radio-télégraphie sans fil de Kamina au Togo
est construite à partir de 1911.
C- Le problème du travail forcé
Pour réaliser leur programme économique, les Allemands utilisèrent une main d'œuvre
trouvée sur place ou une autre prise ailleurs au Cameroun et transplantées dans les zones
d'exploitation. Les modes de recrutement adoptés n'étaient pas toujours orthodoxes et c'est
sans hésitation que les Allemands recouraient au recrutement forcé, utilisant la bastonnade
comme mode de réprimande pour les récalcitrants. Dans l'ensemble, il est autorisé de dire que
les relations sociales entre allemands et indigènes du Cameroun étaient empreintes de
brutalité. Pourtant on constate paradoxalement chez la plupart de ceux qui témoignent
aujourd'hui de leur vécu quotidien sous les allemands, une certaine nostalgie admirative.
III- L’ŒUVRE SOCIALE : LA GERMANISATION DU « KAMERUN »
A- La situation d’avant la domination allemande
À partir de 1845, des missionnaires de la Baptist Missionary Society de Londres s'installèrent
sur le littoral camerounais. Ils y exercèrent des activités d'évangélisation et utilisèrent le
douala comme langue véhiculaire. Sous l'initiative d'Alfred Saker, les missionnaires
entreprirent la traduction de la Bible en douala et normalisèrent son orthographe. Cette œuvre,
certainement remarquable, marqua le début de la formation et de l'éducation dans une langue
camerounaise et influencera la démarche des autres missionnaires de l'époque coloniale. Le
douala devint une langue de travail, à l'exclusion des autres langues camerounaises. En même
temps, naissait une autre langue sur la côte camerounaise : le pidgin-english, qui s'était
structuré sur une base d'anglais. Graduellement, les négociations et les transactions
commerciales se firent en pidgin-english. Même les pétitions officielles auprès de la GrandeBretagne ou de l'Allemagne, furent rédigées en pidgin-english.
B- Le Problème de langue dans l’œuvre éducative
L'implantation de l'administration allemande entraîna le départ de la Baptist Missionary
Society au profit de la «mission de Bâle», de confession protestante, qui allait prendre la
relève et poursuivre l'œuvre d'évangélisation chrétienne. Même si les Allemands ne
souhaitaient pas vraiment l'expulsion des baptistes anglais, ceux-ci préférèrent ouvrir d'autres
missions au Congo car ils ne pouvaient pas assumer simultanément toutes ces responsabilités.
L'installation de la mission de Bâle fut accompagnée du premier conflit linguistique. Les
Bâlois se rendirent compte que le douala était la langue véhiculaire et celle de l'instruction
dans les écoles. Toutefois, une partie du Kamerun, l'enclave de Victoria, avait été évangélisée
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en anglais du temps de l'Empire britannique. Les Victoriens s'opposèrent vivement à
l'introduction du douala dans leur ville au détriment de l'anglais. Au sein de la communauté
allemande, des voix s'élevèrent contre l'usage du douala, car la marginalisation des autres
langues, dont l'allemand, était à craindre. Finalement, les Bâlois décidèrent d'avoir des écoles
où l'on enseignait en douala et d'autres en allemand. Les Victoriens, qui s'opposaient au
douala, apprirent l'allemand plutôt que l'anglais. Mais les Allemands et les ethnies
camerounaises (autres que les Doualas) se méfiaient du douala, alors que les Camerounais
voulaient apprendre une langue occidentale, symbole de l'accès à la modernité. En même
temps, le pidgin-english poursuivait son expansion.
Puis le gouvernement de Bismarck autorisa, en 1886, l'intervention de missions catholiques au
Kamerun. Les missionnaires de la Societas Apostolus Catholici, plus connue sous le nom de
son fondateur V. Pallotti — les «pères Pallotins» —, s'installèrent dans la colonie en 1890.
Plus désireux que les Bâlois (généralement indépendants) d'entretenir de bonnes relations
avec l'administration allemande, les pères Pallotins offrirent un enseignement en allemand à
ceux qui le désiraient, tout en continuant à ouvrir des écoles de village non seulement en
douala, mais aussi en bakweri, en éwondo, en ngumba, etc., tandis que les protestants
continuaient l'enseignement en douala et parfois en boulou (presbytériens américains). Mais
l'enseignement catholique, plus conservateur, inculquait aux petits Camerounais les vertus de
l'obéissance et du respect envers les autorités coloniales allemandes. La langue allemande
commença à exercer un certain attrait auprès de la société camerounaise urbaine qui désirait
pouvoir communiquer avec la puissance coloniale.
Le gouverneur allemand Von Zimmerer commença, en 1891, une politique de germanisation
du Kamerun, afin de fournir à l'Administration des cadres autochtones parlant l'allemand.
Cependant, cette politique tarda tant à être appliquée dans les écoles que finalement fort peu
de Camerounais apprirent à parler l'allemand avant la Première Guerre mondiale. De fait,
avant 1910, la mission de Bâle ne comptait que deux écoles moyennes germanophones, et
l'allemand était enseigné comme discipline, non comme langue d'enseignement. L'arrêté du 25
avril 1910, sous l'initiative du gouverneur Th. Seitz, précisait que l'allemand devait être utilisé
dans les écoles à l'exclusion de toute autre langue européenne et locale. La nouvelle politique
linguistique allemande mit fin à l'enseignement de l'anglais et réduisit le rôle et l'expansion du
douala. Il y eut même des tentatives pour introduire l'éwondo dans la région du littoral pour
remplacer le douala; les Éwondos, massivement convertis au catholicisme, étaient très
appréciés des Allemands.
CONCLUSION
L’œuvre allemande était essentiellement vouée à faciliter la prise en main et l’exploitation du
Kamerun par l’Allemagne. Mais, elle fut brusquement interrompue par la première guerre
mondiale qui n’a pas tardé à s’étendre au Cameroun.
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