La flèche également efficace sur cerf, chevreuil et sanglier

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La flèche également efficace sur cerf, chevreuil et sanglier
FFCA - Plaisirs de la Chasse - Fiches de tir - Wild L - 2009-05.doc
La flèche également efficace sur cerf, chevreuil et sanglier !
(Plaisirs de la Chasse, avril 2009, Laurent WILD)
Une étude de 25 ans de fiche de tir…
Les archers ont toujours eu le souci de démontrer l’efficacité de leurs flèches. Ainsi il y a 25 ans, des chasseurs à
l’arc regroupés au sein de l’ASCA se sont attachés à noter dans des fiches les circonstances et les caractéristiques
de leurs tirs. D’abord confidentielle, cette pratique s’est élargie avec l’augmentation du nombre de pratiquants et
depuis des années, la FFCA a continué de collecter, conserver et exploiter avec la même rigueur les fiches de ses
adhérents. A ce jour, la base de données contient plus de deux mille fiches de tir, petit et grand gibier, prélevés un
peu partout dans le monde depuis 25 ans.
Evidement, entre l’esprit et la lettre l’écart est grand… Et si tous les chasseurs à l’arc avaient rempli une fiche pour
chaque animal tué, c’est 20 ou 30 000 fiches que compterait la base… Mais entre celles qui se sont perdues, celles
qu’on a oublié d’envoyer et celles qui sont inexploitables, il reste 2000 informations fiables, comparables donc
exploitables. Cet échantillon est pertinent au plan statistique pour permettre quelques analyses.
Les données que nous vous publions ici, avec l’autorisation de la FFCA, sont tirées d’une étude publiée dans Trait
d’Union N°15 la revue de la FFCA.
Par souci de clarté et de concision, nous nous sommes limités à l’étude des tirs sur Cerf, Chevreuil et Sanglier.
Concernant le vocabulaire, nous appellerons « traditionnel » l’ensemble des arcs droits et recourbés et « compound
» les arcs à mécanisme.
Premier enseignement - Les français tirent plutôt « lourd » et…
traditionnel
Pour le grand gibier européen, la force moyenne des arcs utilisés est de 63 livres pour les compounds et de 65
livres pour les traditionnels (pour ces derniers, 5% des tirs ont été réalisés avec des arcs de plus de 81 livres). Donc
les archers français utilisent des arcs plutôt forts en comparaison de leurs collègues américains (cf. les magazines
américains). Peut-être que l’espoir de rencontrer un gros sanglier y est-il pour quelque chose ?
Nous utilisons beaucoup l’arc traditionnel : 52% des tirs ont été réalisés avec ce type d’arc ; cette proportion monte
à 82% pour le petit gibier. C’est un point souvent mentionné comme une « exception française » : en comparaison,
aux USA la proportion de traditionnels est de 11 %.
Deuxième enseignement - La flèche tue aussi bien que la balle
mais différemment : la distance de fuite moyenne est de cent
mètres
Le sujet le plus délicat, pour une bonne compréhension de la chasse à l’arc, est la fuite de l’animal mortellement
fléché. Un animal fléché ne réagit pas de la même façon qu’un animal tiré à balle car la flèche tue par hémorragie ;
elle ne provoque pas d’onde de choc. Beaucoup de chasseurs méconnaissent cette réalité ou la négligent et en
tirent des conclusions erronées sur l’efficacité de la flèche. Nous savons maintenant mesurer ce phénomène. On
peut affirmer l’efficacité de la flèche sur grand gibier au même titre que la balle, mais cela implique d’accepter le
fait qu’à l’arc les distances de fuites sont plus grandes. Ainsi l’archer fait plus de recherches au sang non parce qu’il
tue moins en proportion de ces tirs, ou moins efficacement, mais parce que la flèche tue différemment.
Le tableau ci-dessus donne une information essentielle : l’arc et la flèche sont efficaces pour tuer nos grands gibiers
puisque l’on constate qu’ils sont retrouvés en moyenne au bout d’une centaine de mètres. Dans la très grande
majorité des cas, il sont retrouvés avant trois cent cinquante mètres et quelques fois au-delà.
Troisième enseignement - La flèche aussi efficace sur le « gros que
le petit »… pourvu qu’ils soient tirés près
Le plus gros sanglier, 165 kg, a été tiré à 15 mètres, le plus petit 10 kg à 20 mètres… Les distances de fuite sont de
40 et 80 mètres. La flèche est efficace sur le gros comme sur le petit… à condition de respecter une distance de tir
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courte. On mesure ici la pertinence, et la portée pratique de la devise de la FFCA : « Toujours plus près ». Sur cette
question du tir des gros animaux, il y aurait matière à enrichir les données. En effet, les questions d’angle de tir,
d’angle de pénétration, de la nature et du nombre d’organes touchés… ont une importance déterminante.
SANGLIER
Moins de 70 kg
De 70 à 100 kg
Plus de 100 kg
Total
nombre
449
64
29
542
Poids
moyen
41
83
114
48
Distance de
tir
14
13
13
13
Distance de
fuite
114
107
143
109
Quatrième enseignement - Arc traditionnel ou compound même
efficacité !
Voila un constat qui ne va pas relancer de polémique sur l’efficacité du « traditionnel contre le compound » : la
distance de fuite moyenne est identique. Ce qui prouve l’efficacité des deux armes et confirme une évidence que
certains oublient parfois : c’est la flèche qui tue et non l’arc. Autrement dit, la question n’est pas de savoir avec quel
arc (tradi ou compound) l’on chasse mais comment on s’en sert au moment du tir. A cet égard on constate que les
distances moyennes de tir au compound sont supérieures de 15% par rapport à celles attribuées au tradi, et cela
sans effet négatif sur la distance de fuite. Cet écart semble très raisonnable… Les chasseurs au compound ne tirent
finalement pas beaucoup plus loin que le collègues équipés de tradi. Cette différence de quelques mètres en
moyenne, si elle n’est pas significative quant au tir lui-même, est sans doute beaucoup plus significative quand à la
technique de chasse. Dit autrement : quand on peut se le permettre, tirer deux mètres plus loin est sans doute plus
facile qu’approcher deux mètres plus près.
La force des arcs ne semble pas affecter de façon significative les résultats ; il semblerait quand même que les
animaux tués avec des arcs de plus de 65# (compound mais surtout tradi) parcourent en moyenne quelques mètres
de moins mais la différence est faible. Cela demandera à être confirmé avec une analyse plus fine…
Cinquième enseignement - T i r à l a c o u r s e : les animaux sont
retrouvés en moyenne une fois et demie plus loin !
Cette fois, les données varient de façon vraiment significatives : les animaux tués à la course parcourent une
distance bien supérieure que ceux tués arrêtés ou marchants. Sans doute le taux d’adrénaline et des atteintes
moins précises, dues aux conditions de chasse (battues, poussées…) ! Quand on connaît le taux de raté sur les
animaux tirés à la course et que l’on voit ici que, même lorsqu’ils sont tués, ils vont plus loin (et sont donc plus
difficiles à retrouver), il est clair que cet exercice doit s’accompagner d’une discipline de tir sans faille. Il faut donc
en tirer les conséquences : tous les modes de chasse sont accessibles à l’arc, à condition que l’archer puisse s’y
adapter. Ainsi, un poste de battue pour archer sera souvent différent car il devra favoriser les occasions de tir sur
gibier à l’arrêt ou marchant : poste de « rebrousse », au sein de l’enceinte, ou à l’extérieur par exemple.
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Dernier enseignement - Prudence sur l’interprétation des données
Faut-il rappeler qu’il ne s’agit là que des animaux retrouvés : on est donc dans le cas où l’on sait que 100% des
gagnants au Loto avaient… joué au Loto. Cette étude ne révèle rien de ceux non retrouvés alors qu’il y aurait
probablement beaucoup d’enseignements à en tirer. Il y a quelques années l’UNUCR a lancé une collecte des
fiches qui concernent les recherches d’animaux blessés par flèche ; la FFCA a participé à la mise au point de cette
fiche et il y a beaucoup à attendre de l’étude sur les recherches sur gibier fléché à venir car elle livrera encore
d’autres informations…
Par ailleurs, les angles d’atteintes et les organes touchés sont des points très déterminants, bien plus par exemple
que le nombre de lames ou le type d’arc qui a envoyé la flèche. Cette information, les organes transpercés, est plus
difficile à mettre en catégorie et la FFCA améliore actuellement la collecte et la modélisation des données sur ce
point. Tout cela, pour expliquer que ces données ont encore beaucoup à nous apprendre. Pour l’heure, on n’en est
encore qu’à des analyses très simples. Les études approfondies, par combinaison de variables, nécessitent de
consolider encore les données. A trop se presser, des résultats trop approximatifs pourraient induire en erreur les
chasseurs voulant bien faire, comme des personnes moins bien intentionnées.
La FFCA développe des outils pour améliorer notre efficacité à la
chasse
Sans la FFCA, et ses milliers d’adhérents qui font l’effort de collecte et d’archivage, rien n’existerait. Aussi, la FFCA
et ses adhérents vont poursuivre l’effort ; la fédération va développer de nouveaux outils de collecte, de saisie et de
traitement des fiches. Cela permettra d’affiner les connaissances sur des combinaisons de matériels et de situations
afin d’améliorer les choix matériels, les pratiques, les programmes de formation et… in fine, notre efficacité à tous à
la chasse.
Laurent Wild
Encarts
Les fiches de tir de la FFCA : un patrimoine unique en Europe
Dès les débuts de la chasse à l’arc moderne en France, les archers se sont organisés pour bien connaître l’efficacité
de leurs tirs. C’est l’Association Sportive des Chasseurs à l’Arc qui a mis au point une fiche de renseignement sur
les animaux fléchés à l’attention de ses membres. Lorsque la FFCA a été créée, Philippe Gras, le responsable
initial de cette base et également administrateur fédéral, a pu élargir la collecte de ces fiches à l’ensemble des
adhérents de la FFCA. A ce jour la base contient plus de 2000 fiches, la plus ancienne date de 1964. Environ 1800
pour le grand gibier (dont 1600 pour l’Europe), et 255 pour le petit gibier (tous les ragondins n’ont pas été saisis).
Les tirs 2008 ne sont pas tous rentrés… Les statisticiens reconnaîtront à un échantillon de 2000 observations une
forte valeur prédictive, à condition que les calculs et leurs interprétations soient faits dans le respect des lois de la
statistique et surtout que les informations soient collectées et conservées avec des méthodes constantes. La base
de données des fiches de tir de la FFCA respecte ces critères. Elle a une valeur informative, scientifique et
historique unique en Europe. Seul les bases de données du Pope and Young Club aux USA ont une valeur
comparable. Avec l’augmentation du nombre de pratiquants et en maintenant l’effort de remplir des fiches de tir, la
FFCA disposera d’une base de données unique en Europe permettant aux chasseurs à l’arc d’appréhender de façon
toujours plus rigoureuse et précise l’efficacité de leur équipement et de leurs pratiques.
La fuite : une réaction quasi systématique de l’animal mortellement fléché
Le sujet souvent difficile à appréhender pour une bonne compréhension de la chasse à l’arc est la fuite de l’animal
mortellement fléché. Certains chasseurs ont du mal a admettre qu’un animal mortellement touché puisse fuir sur
une distance plus ou moins longue. De la à remettre en cause l’efficacité de la flèche et de l’arc il n’y a qu’un pas,
qu’ils franchissent parfois. Pourtant, un animal fléché au cœur meurt quasiment instantanément ; avec une flèche,
comme avec une balle, un impact au cœur peut laisser quelques secondes de souffle vital à l’animal : le temps de
courir quelques dizaines de mètres avant de s ‘écrouler mort. Dans le cas d’une flèche ou d’une balle d’artère
(quelle que soit l’artère touchée), la mort est encore très rapide et intervient dans les vingt secondes. Dès lors qu’un
organe vital est touché, l’effet de la flèche est aussi létal que celui de la balle.
En fait, la différence fondamentale, c’est que la flèche tue par hémorragie ; elle opère comme une lame et ne
provoque pas d’onde de choc, alors que la balle opère par destruction des tissus et provoque une onde de choc
importante. En clair : le gibier tiré à la balle tombe souvent sur place alors que le gibier fléché part souvent à toute
allure. Si les mêmes organes vitaux sont touchés un gibier fléché meurt aussi sûrement qu’un gibier tiré à la
carabine, mais il fuit sur une plus grande distance. Quelques illustrations :
- Un sanglier non stressé qui trotte à la vitesse de 30 mètres par seconde, mortellement fléché au cœur,
pourra « encore » se déplacer de 20 à 150 mètres (5 secondes) avant de « tomber mort ». Le même
sanglier touché au cœur par balle pourra soit tomber sur place, choqué par la balle, soit fuir, parfois sur 50
mètres.
- Le même sanglier stressé et courrant à la vitesse de 50 mètres par seconde, mortellement fléché au cœur,
pourra « encore » fuir sur 250 mètres avant de tomber mort. Dans les mêmes conditions mais touché par
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une balle, ce sanglier pourra à nouveau soit « rouler bouler » sur place, choqué par la balle, soit fuir, parfois
sur 50 mètres.
- Toujours le même sanglier, mortellement touché à une artère (quelle qu’elle soit) pourra parcourir de
quelques dizaines de mètres à plusieurs centaines, selon qu’il « trotte ou qu’il court »…
Dans tous les cas ci-dessus, le sanglier fléché est bel et bien mort. Néanmoins, en terme de recherche, le recours à
un chien de sang s’avère souvent nécessaire et la recherche elle-même peut être sans rapport avec la distance :
100 mètres de fuite, soit 5 secondes de course pour un sanglier, cela peut donner 1 heure de recherche pleine de
suspens… Ce n’est pas parce qu’une recherche est longue que le gibier à mis plus de temps à mourir.
Chacun, archer ou non, chasseur comme responsable de battue ou de chasse, devrait comprendre et ne ja mais
oublier cette réalité : l’animal mortellement fléché, n’est pas « choqué », il n’en est pas moins « tout aussi mort »
qu’à balle, mais il fuit sur une plus grande distance. De toute façon, ce qui compte vraiment, à balle comme à
flèche, c’est qu’un ou plusieurs organes vitaux soient touchés.
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