henri cartier - bresson paul strand

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henri cartier - bresson paul strand
Dossier enseignants
HENRI
CARTIER-BRESSON
PAUL STRAND
Mexique 1932-1934
Exposition du 13 mai au 2 septembre 2012
Henri Cartier-Bresson Mexique, 1934
Présentation
Au début des années 1930, Paul Strand et Henri CartierBresson séjournent successivement au Mexique. Le premier
est déjà l’un des représentants de la photographie moderne
à New York, le second encore un jeune photographe
ambitieux.
Le Mexique, où art et politique sont alors en débat,
constitue pour tous deux une étape déterminante. En
découvrant les traditions et la vie d’un peuple, chacun y
expérimente une manière de voir – mobile et parfois crue
chez Cartier-Bresson, plus posée chez Strand.
Outre des documents sur leur activité au Mexique,
l’exposition réunit une centaine de tirages, dont quelques
chefs-d’œuvre, de ces photographes majeurs
du XXe siècle.
Présentation des artistes
à l’automne 1932, Paul Strand (1890-1976) quitte les
États-Unis et une vie personnelle en crise pour le Mexique.
C’est sur une invitation de Carlos Chavez, rencontré un
peu plus tôt et désormais responsable du département des
Beaux-Arts au secrétariat à l’Éducation publique, que Strand
découvre ce pays dont il disait : « Je pensais au Mexique
comme quelque chose de mystérieux, sombre et dangereux,
inhospitalier. » Strand restera pourtant deux ans au Mexique
jusqu’à son retour à New York en décembre 1934.
Le soutien de Carlos Chavez s’avère très important et
permet à Strand d’exposer pour la première fois au
Mexique à la Sala de Arte du secrétariat à l’Éducation
publique en février 1933. Après ce premier succès, il
est nommé professeur d’éducation artistique et part au
printemps 1933 enquêter sur l’art et l’artisanat mexicain
dans l’état du Michoacán. Fasciné par la culture indigène
et la piété des habitants, il ramènera de cette mission des
portraits de statues religieuses, d’hommes, de femmes et
d’enfants dans les rues, de paysages et d’architecture.
Paul Strand se voit ensuite confier la réalisation d’une
série de films pédagogiques. À partir de l’automne 1933,
il travaille au scénario d’un moyen métrage Redes, fiction
d’inspiration documentaire qui relate la lutte de pêcheurs
contre l’exploitation dont ils sont victimes. Les acteurs du
film sont principalement les habitants du village d’Alvarado,
près de Veracruz dans le golfe du Mexique. La réalisation
est complexe mais le film est finalement projeté au théâtre
Juarez de Alvarado en juin 1936. à peine un an plus
tard, c’est sous le titre The Wave que le public américain
découvre ce film très largement influencé par le cinéma
soviétique. Entre temps, le départ de Carlos Chavez, après
l’élection en 1934 du nouveau gouvernement de Lazaro
Cardenas, a entraîné l’abandon du projet de série de films
et Strand a décidé de rentrer à New York. Il délaisse alors la
photographie, pour participer à la coopérative de cinéastes
militants Nykino, avant de devenir président de Frontier Film
qui prend sa suite.
Paul Stand est l’un des premiers photographes auxquels
le Museum of Modern Art consacre une exposition
monographique en 1945. Il travaille aux États-Unis jusqu’en
1950, date à laquelle le développement du maccarthysme le
conduit à s’installer en France.
Henri Cartier-Bresson (1908-2004) débarque à Mexico
en juillet 1934. Il fait partie d’une mission ethnographique
menée par le docteur Julio Brandan et soutenue par
le musée d’Ethnographie du Trocadéro pour suivre la
construction d’une grande route panaméricaine. La mission
s’engage mal car les financements attendus sont remis en
question par le nouveau gouvernement mexicain.
La majorité des membres de l’expédition rentre alors en
France. Mais Henri Cartier-Bresson décide de rester car
« il éprouve un vrai coup de foudre pour ce pays ».
Cartier-Bresson parcourt le pays avec son Leica. Il
fréquente poètes et artistes, se passionne pour les fresques
révolutionnaires des muralistes, publie un peu dans la presse.
En mars 1935, il expose au Palacio de Bellas Artes avec le
photographe mexicain Manuel Alvarez Bravo. Au moment
de partir, il se décrète à vie « Français du Mexique. »
Pendant son séjour, Cartier-Bresson reste en contact avec
le galeriste new-yorkais Julien Levy qui l’avait déjà exposé
en 1933. En avril 1935, celui-ci présente ses photographies
récentes avec celles de Manuel Alvarez Bravo et de Walker
Evans sous le titre « Documentary and Anti-graphic
Photographs ». Comme Paul Strand qu’il rencontre sans
doute à New York, Henri Cartier-Bresson se tourne alors
vers le cinéma : « La photographie n’a jamais été pour moi
qu’un des différents moyens d’expression visuelle. [... ] Je me
suis donc mis, chez Paul Strand avec d’autres, à apprendre le
cinéma. Je changeais d’outil. » Il s’achète une caméra 35 mm
et travaille avec le groupe Nykino. à son retour en France,
il devient l’assistant de Jean Renoir, auquel il a envoyé ses
photographies, notamment pour La vie est à nous produit
en soutien au Front populaire. À partir de 1937, il participe
à des films militants en faveur des Républicains espagnols
(L’Espagne vivra, Victoire de la vie et With the Abraham Lincoln
Brigade in Spain).
En 1947, Henri Cartier-Bresson bénéficie à son tour d’une
rétrospective au Museum of Modern Art. Cofondateur
de l’agence Magnum, il réalisera par le suite de nombreux
reportages à travers le monde.
Le comparaison du travail au Mexique de Paul Strand et
Henri Cartier-Bresson fait apparaître de fortes différences.
Le premier photographie les statues comme les visages
dans un temps suspendu ; le second saisit instantanément
des moments de la vie ordinaire. Néanmoins, le Mexique
fut pour chacun un moment clé, inaugurant une pratique
cinématographique marquée par le contexte politique
des années 1930. Au-delà de l’affirmation de deux
« styles », cette exposition témoigne d’un même désir
d’expérimentation sociale et artistique.
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Quelques pistes pédagogiques
La passionnante confrontation de deux photographes
majeurs du XXe siècle autour d’un même sujet permet
de questionner plusieurs aspects de l’histoire de la
photographie et plus généralement de l’histoire de l’art.
Paul Strand, avec son lourd appareil Graphlex, et Henri
Cartier-Bresson, avec son petit Leica, parcourent le Mexique,
dans un bouillonnement révolutionnaire et artistique.
En 1930, la photographie est une jeune centenaire et
les deux artistes sont au fait de la création plastique
contemporaine. Henri Cartier-Bresson ancien élève d’André
Lhote est proche du mouvement surréaliste d’où la
première interrogation :
Henri Cartier Bresson, un photographe surréaliste ?
Paul Strand, fréquente la galerie 291 d’Alfred Stieglitz.
Il découvre l’art moderne et fait référence à la peinture
cubiste et particulièrement à George Braque.
Il rejette le pictorialisme photographique pour mettre en
œuvre le modernisme photographique.
Que signifie cette « révolution » ?
Paul Strand, du pictorialisme à la Straight photography ?
La confrontation des deux regards finement analysée par
Christian Caujolle permet de replacer chaque artiste dans
son parcours artistique. À partir d’une photographie d’Henri
Cartier-Bresson, le directeur de l’agence Vu propose, de
façon très éclairante, un recadrage que Paul Strand aurait pu
réaliser. Il questionne également la qualité « informative » ou
non de la photographie :
Deux regards, un pays, la photographie ?
En complément et pour approfondir l’approche historique
de l’exposition il est nécessaire de situer la photographie
surréaliste, la position d’André Breton et les relations
photographies/arts plastiques....
Les rapprochements photographiques permettent de
découvrir :
• La position centrale de l’œuvre et la carrière d’Alfred
Stieglitz dans les années 1930 avec l’analyse de son œuvre
L ‘Entrepont.
• L’œuvre incontournable du mexicain Manuel Alvarez
Bravo.
• Le regard singulier sur le Mexique d’un photographe
contemporain Bernard Plossu.
Paul Strand
Hommes de Santa Anna, Pátzcuaro, Michoacán, 1933
En référence aux programmes suivants
(liste indicative)
Arts plastiques en 4e :
Les images et leurs relations au réel.
Cette entrée s’ouvre au dialogue entre l’image et son
référent « réel » qui est source d’expressions poétiques,
symboliques, métaphoriques, allégoriques ; elle met en
regard la matérialité et la virtualité.
Arts plastiques, en série L. Classe de première :
La figuration ; figuration et image.
Ce point du programme est à aborder sous l’angle de la
question de la distance de l’image à son référent : le trompel’oeil, le réalisme, la fiction, le schématique, le symbolique, etc.
Classe terminale :
L’œuvre et son chemin.
Ce point du programme est à aborder sous l’angle d’une
analyse du processus global qui fait suite à l’intuition et à la
réflexion : la formalisation de l’œuvre engage les modes de
sa diffusion, de son exposition et des commentaires qu’elle
suscite. Ce cheminement de l’œuvre mobilise des rapports
aux techniques et induit des choix plastiques déterminants
pour porter l’œuvre en servant le projet esthétique
intrinsèque.
Henri Cartier-Bresson
avec son Leica en 1957
Paul Strand avec
son Graflex en 1972
Henri Cartier-Bresson
Un photographe surréaliste ?
Notions :
Bien que ne faisant pas parti du groupe surréaliste,
Henri Cartier-Bresson allait souvent aux réunions du Café
de la place blanche à la fin des années 1920. Il appréciait
particulièrement les conceptions d’André Breton.
Celui-ci prenait en compte « le rôle du jaillissement et
de l’intuition et surtout l’attitude de révolte ». Pour les
surréalistes, l’écriture automatique et la photographie
permettaient d’explorer l’inconscient visuel.
Au milieu des années 1950, le peintre Georges Braque
offre à Cartier-Bresson le livre d’Eugen Herrigel Le Zen
dans l’Art chevaleresque du tir à l’arc . Cet ouvrage explique
que la voie de l’arc est un art guerrier lié à la spiritualité
Zen. C’est aussi une discipline mentale permettant
l’harmonie entre le corps et l’esprit. La maîtrise corporelle
requise pour le tir entraîne la maîtrise spirituelle de
l’archer. C’est la disponibilité totale en faisant le vide en soi
grâce à une concentration intense.
Alors que l’arc est l’arme du prédateur pour chasser sa
proie, Henri Cartier-Bresson utilise son appareil photo
pour ramener une image. C’est la même chose pour les
deux disciplines : visée puis détente. Herrigel dit qu’il faut
maîtriser la technique pour la rendre inconsciente. Il faut
qu’elle devienne un réflexe réfléchi à cause de la maîtrise
du temps (« l’instant décisif ») et de l’espace (position de
l’archer / photographe et sa cible). Pour Cartier-Bresson
la notion de « hasard objectif » se retrouvera dans
ses œuvres faites durant ses voyages en Europe et au
Mexique entre 1932 et 1934.
Source : S. Gil, Henri Cartier-Bresson, l’œuvre photographique
Hors série n°1, Collection actualité des arts plastiques,
Centre national de documentation pédagogique.
Propositions de travail :
• Rechercher dans l’exposition des photographies
évoquants :
. un regard lancé
. une bouche happant une parole
. un pas suspendu
. une attitude interrompue.
• « La beauté sera convulsive ou ne sera pas » : André
Breton, Nadja (1928). Trouver des exemples et expliquer
pourquoi cette beauté est présente dans l’exposition.
Citations :
« On perçoit tout d’abord à quel point Cartier-Bresson
est un photographe de la visée, sa virtuosité au Leica a fait
sa réputation, et d’une visée qui bénéficie d’une culture
de l’art moderne entièrement soumise à l’exigence de
la composition par formes géométriques, en tous les cas
par masses, ligne, plans. Il réinjecte la leçon de la peinture
moderne dans la capacité de l’appareil à interrompre le
déroulement d’une scène. Mais cela n’est possible que
lorsqu’il reconnaît devant lui une composition conforme,
et cette reconnaissance ne peut s’effectuer que par
l’effet d’un hasard qui s’objective : c’est bien sûr la culture
surréaliste de Cartier-Bresson qui lui en donne les moyens.
Ce rapport au temps – bien mal servi par l’expression
prime sautière « à la sauvette » (le titre français de
son ouvrage publié avec Tériade, Images à la sauvette
(1952) et mieux rendu par la formule anglaise « Decisive
Moment » (la version américaine du livre) – est celui du
tir de l’instantanéiste. Les images de Cartier-Bresson sont
donc toujours synchrones avec leur référent, ce qu’elles
saisissent est ce qu’elle montre, il se produit une manière
d’écriture automatique où ce qui est donné à voir porte
en soi la magie du furtif soustrait au flot continue du
monde : un enregistrement. Mais un enregistrement qui
contredit immédiatement le caractère machinique, c’està-dire standardisé de sa procédure, en sélectionnant
jusqu’au raffinement. Le spectateur se voit ainsi nourri de
« rareté », ce qui lui donne le sentiment d’échapper
lui-même au banal tout en n’abandonnant rien de
« la vie ». Ou, plus exactement, que le générique, le
prosaïque s’effondre immanquablement sous l’effet
d’une conversion en un exceptionnel apprivoisé. Ce qui
s’interrompt chez Cartier-Bresson doit se manifester
comme tel : un regard lancé, une bouche happant une
parole, un pas suspendu, une attitude interrompue en
somme. Mais, en même temps, le détail s’équilibre dans
un autre détail, une masse trouve sa contrepartie, un angle
contredit une ligne de fuite. Ainsi la scène d’une pièce
jamais écrite s’invente en même temps que son décor. »
Extrait de Michel Poivert, « Cartier-Bresson / Walker
Evans : Confession d’un impatient », Vite Vu, 2008.
« Preuve de son intérêt [pour le surréalisme], au Mexique,
il demande à son père de lui envoyer Le Surréalisme et la
Peinture d’André Breton. Sur place, dans la droite ligne du
mouvement né à Paris, il va saisir l’étrangeté du quotidien,
shooter des images qui en évoquent d’autres. Exemple
avec ces simples outres, transportées par un camion, mais
dont la peau gonflée, tendue à craquer, ligotée, fait penser
à des corps suppliciés qu’on emmène à l’abattoir. Chez un
autre photographe d’inspiration surréaliste, une pince de
homard se changeait en visage menaçant. »
Extrait d’un blog sur l’exposition à la Fondation HCB.
Dans une interview publiée dans Le Monde du
5 septembre 1974, Henri Cartier-Bresson insiste sur la
nécessité de « s’abstraire, [de] ne pas essayer de prouver
quoi que ce soit ». « La photo ne veut rien dire, elle
ne dit rien, elle ne prouve rien. [... ] Avoir investi dans la
photographie cette valeur de “preuve”, affirme-t-il, a créé
la concurrence et les photos “bidons”. Quand il s’agit
d’une vision personnelle, il n’y a pas de concurrence.
Ce qui compte, ce sont les petites différences, les “idées
générales” ne signifient rien. Vivent Stendhal et les petits
détails ! Le millimètre crée la différence. Et tout ce que
prouvent ceux qui travaillent dans la “preuve”, c’est leur
démission devant la vie. »
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Deux regards, un pays,
la photographie ?
D’après une analyse de l’exposition
par Christian Caujolle, fondateur de l’agence Vu
Extraits d’une vidéo sur Telerama.fr
« Henri Cartier Bresson et Paul Strand vont au Mexique
pour deux raisons différentes, Henri Cartier-Bresson
est loin et Paul Strand est proche, ils n’ont pas la même
perception du Mexique : Henri Cartier Bresson arrive avec
une équipe d’ethnologues, avec des scientifiques qui y vont
pour l’ethnographie et lui il y va pour le surréalisme. [... ]
André Breton a décrété que le Mexique est le seul pays du
surréalisme réel.
Paul Strand a déjà une affirmation claire du propos
documentaire, il a une volonté de connaissance, d’une
rigueur absolue et en même temps modeste face à ses
sujets, terriblement humain, souvent bouleversant ; [... ]
Paul Strand est capable de photographier une femme de
profil (voir ci-contre : Femme d’Alvarado, Veracruz, 1933)
avec son manta noir sur la tête avec une attention à quoi ?
Une attention à la façon dont une raie de lumière va se
poser sur la joue et laisser le reste du visage et du regard
partir sur la droite de l’image.
Les images de Strand ne sont pas démonstratives, on a le
sentiment qu’il recueille quelque chose qui est révélé par la
lumière. Henri Cartier-Bresson, lui est dans une liberté, pas
seulement dans une saisie de l’instant mais d’étonnement.
Paul Strand, Femme d’Alvarado, Veracruz, 1933
Proposition de recadrage « à la Paul Strand »
suggérée par Christian Caujolle
Il y a cette image d’une outre, qui est une peau de porc
gonflée, elle est une surprise visuelle, elle est accompagnée
d’un certain nombre d’objets en terre et puis derrière les
lattes de bois, il y a trois regards qui nous fixent. Ce n’est
évidemment pas documentaire.
On peut imaginer que Strand aurait cadré beaucoup plus
sur la forme en elle-même, il aurait vraisemblablement
ignoré ces regards. Pas pour Henri Cartier-Bresson, car il a
capté cette étrangeté du réel et c’est ce qui l’intéresse.
Une image caractéristique de ce moment-là, est d’une
composition géométrique absolue, étonnante. Avec cette
utilisation des ombres sur la diagonale... Mais elle n’est pas
encore « formaliste », parce que Henri Cartier-Bresson
aurait pensé que les pattes du chien étaient coupées.
Pourtant ce qui est étonnant c’est l’apparition de ce
personnage, de dos, qui est une femme mais on ne sait
pas qui elle est, c’est l’espace qui est rythmé et qui respire,
et le personnage n’a plus d’importance, il y a une drôle
d’ambiance... Il y a on ne sait pas très bien, quoi.
On est dans plein de choses qui se mélangent, dans son
humanisme, mais aussi dans l’incompréhension absolue de
ce qui ce passe. La photo est incapable de nous le dire.
Aucune photo n’est capable de nous donner des
informations précises et on se retrouve face à la
photo telle qu’elle est, c’est-à-dire de la forme, nous
reconnaissons les choses, des éléments mais nous ne
savons rien. [... ] »
Henri Cartier-Bresson, Mexique, 1934
Henri Cartier-Bresson, Mexique, 1934
Paul Strand du pictorialisme à la
Straight photography
Notions :
« Paul Strand est justement célébré comme l’un des
pionniers de la photographie moderniste aux États-Unis.
Pour le dire simplement, il est l’un des premiers à avoir
abandonné l’esthétique du pictorialisme au profit d’une
Straight photography, c’est-à-dire à rejeter l’esthétique
symboliste de la stylisation et de l’évocation, à renoncer
aux possibilités offertes par le flou et le bougé, à toutes
sortes d’artifices de tirage, au profit d’une pratique
photographique directe et objective, reposant sur
le principe d’une saisie immédiate de la réalité, sans
transformations ou le moins possible. Son article-manifeste
de 1917, « Photography », écrit à l’âge de vingt-sept ans,
proclame clairement : « La plus parfaite réalisation
de [cette objectivité absolue qui est le propre de la
photographie] est atteinte sans aucun truc ni procédé,
sans manipulation, grâce à l’utilisation de méthodes
photographiques directes [straight photographic
methods].» Comme l’a remarqué l’historien Alan
Trachtenberg, ce programme moderniste repose sur
l’affirmation d’une innocence de l’appareil photographique;
or, sans qu’il soit besoin d’aller y voir très loin, il est
remarquable que cette supposée innocence et ce
caractère direct soient manifestés, rendus visibles, comme
toujours dans l’histoire de l’art (l’exemple de Monet vient
immédiatement à l’esprit), grâce à une stratégie formelle
spécifique : la neutre objectivité ne se donne à voir comme
telle qu’à travers des choix subjectifs, la saisie directe n’est
possible que mise à distance. »
Extrait de Eric de Chassey, « Paul Strand, frontalité et
engagement », Études photographiques n° 13, juillet 2003
Propositions de travail :
• Étudier la rigueur de construction des photographies
de Paul Strand, la géométrie des cadrages, la posture des
personnages...
• Que peut-on en déduire sur la pratique photographique
de Paul Strand ?
• En quoi s’oppose-t-elle à la pratique photographique
d’Henri Cartier-Bresson ?
• Paul Strand dit à ses étudiants en 1940 : « Lorsque vous
mettez une photographie sur un mur, soit elle marche
comme une totalité soit elle ne marche pas du tout. Et
tous les prétextes, tous les raisonnements, toutes les
légendes dont vous pourrez l’accompagner ne la rendront
pas meilleure. »
Trouver et expliquer cette « totalité » dans l’exposition.
Citations :
« Paul Strand développe [... ] une approche très formelle
autour de la lumière, des formes et des personnes, figure
humaine qu’il approche en un premier temps
« masqué », en se servant d’un objectif dissimulé qu’il
pointe sur ses sujets. Représentative de ses préoccupations
de construction par la lumière et les contrastes, Fence
(1916) se compose comme les paysages qu’il fera au
Nouveau-Mexique et au Mexique à partir de 1930.
À ce moment, il participe d’un développement de la
photographie à proprement parler à l’échelle nordaméricaine. Cette modernité que les Européens célèbrent
dans la glorification du progrès, de la ville, de la machine,
sentiment quasi inné aux États-Unis, Paul Strand et ses
contemporains la cherchent dans l’objectivité, une certaine
droiture vis-à-vis du médium et sa technique, qu’ils
qualifient de « straight ». Cette période-ci est abordée
dans l’exposition avec des photographies prises à Taos
au Nouveau-Mexique, notamment celle figurant l’église
du village. L’église de San Francisco est faite en terre, un
contrefort massif et doux soutient ses murs trapus, la
blancheur de ses murs irréguliers éclatent dans un ciel
parcourus de nuages. »
Extrait de la présentation de l’exposition
« Paul Strand, trois chemins parcourus »
Musée d’art américain de Giverny, 2006
Paul Strand, Christ aux épines, Huexotla, 1933
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Bibliographie sélective
au centre d’art
La France de profil
Paul Strand
Textes : Claude Roy
Éd. Aperture
2001
Catalogue de l’exposition
Henri Cartier-Bresson
Paul Strand
Mexique, 1932-1934
Textes : Agnès Sire, directrice
de la Fondation Henri
Cartier-Bresson, et Clément
Chéroux, conservateur pour
la photographie au Centre
Pompidou.
Éd. Steidl
2011
Tir A’Mhurain. The Outer Hebrides of
Scotland
Paul Strand
Textes : Basil Davidson et
Catherine Duncan
Éd. Aperture
2002
Quelques ouvrages de Paul Strand
Les Hébrides
Paul Strand
Textes : François Nourissier
Éd. La Guilde du Livre
1962
Un paese
Paul Strand
Textes : Cesare Zavattini
Éd. Einaudi
1955
Southwest
Paul Strand
Éd. Aperture
2004
Paul Strand in Mexico
Éd. Aperture
2010
Documentary and Anti-graphic
Photographs
Henri Cartier-Bresson / Manuel
Alvarez Bravo
Éd. Steidl, 2004
Quelques ouvrages de Henri Cartier-Bresson
Images à la sauvette
Henri Cartier-Bresson
Éd. Verve
1952
Scrap book
Henri Cartier-Bresson
Textes : Martine Franck, Agnès Sire,
Michel FRizot
Éd. Steidl
2006
L’Autre Chine
Henri Cartier-Bresson
Textes : Robert Gullain
Direction éditoriale : R. Delpire
Éd. Cnp / Photo Poche
1989
Henri Cartier-Bresson et Le Monde
Textes : Michel Guerrin
Éd. Gallimard
2008
Henri Cartier-Bresson
Textes : Jean Clair
Direction éditoriale : R. Delpire
Éd. Cnp / Photo Poche
1989
Quelques ouvrages autour de la photographie surréaliste
La photographie surréaliste
Textes : Christian Bouqueret
Éd. Actes Sud / Photo Poche
2008
Henri
Henri Cartier-Bresson
Textes : Brigitte Ollier
Éd. Filigranes
2003
La subversion des images
Éd. Centre Pompidou
2009
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Le Mexique vu par...
Les indispensables...
Manuel Alvarez Bravo
Textes : Brigitte Ollier
Éd. Hazan
1999
Les routes de la passion
Antonio Caballero
Textes : Alfonso morales
Éd. Toluca
2005
Le Voyage mexicain
Bernard Plossu
Textes : Denis Roche
Éd. Cahier de Voyage
1990
Mexico DF
Artiste :Collectif
Éd. Toluca
2004
Alfred Stieglitz
Textes : Graham Clarke
Éd. Phaidon
2006
The history of photography
Textes : Beaumont Newhall
Éd. M.O.M.A
1993
Lettres à Edward Weston 1922 - 1931
Textes : Tina Modotti
Éd. Anatolia
1995
D’autres pistes pédagogiques
La photographie surréaliste
La photographie surréaliste naît officiellement en 1924
avec le Manifeste du mouvement par André Breton. La soif
d’expériences nouvelles qui motive la création surréaliste
alimente l’exploration du médium photographique sous
diverses formes. Parmi les procédés exploités, citons
les solarisations de Man Ray qui consistent à réexposer
le négatif à la lumière, les brûlages de Raoul Ubac, les
photomontages de Pierre Molinier ou les jeux de miroirs
d’André Kertész… autant de techniques qui déréalisent les
sujets et les objets et leur confèrent une part de mystère,
faisant éclore une beauté irrationnelle, merveilleuse et
convulsive.
Extrait du site Yourshot : http://www.yourshot.eu/
La photographie, les arts plastiques, deux histoires
parallèles ?
À la fin du XIXe siècle, l’arrivée de la photographie a
beaucoup influencé la peinture. La première interaction
véritable a lieu lorsque, avec le fauvisme, des peintres se
préoccupent clairement davantage des lois du tableau
que celles de la réalité extérieure. Un certain nombre de
photographes choisissent alors d’opérer un renouveau
et inventent la « Photographie pure » (« Straight
photography »). La vision et le cadrage de certaines toiles
sont typiques d’une vision photographique par le choix
de l’instant (les personnages semblent figés au 1/100e de
seconde) et par la découpe dans l’espace qui rompt avec
les traditions visuelles classiques.
Après les années 1900, l’art engendre un nombre
incroyable de courants dans lesquels la photographie
s’inscrira. Les caractéristiques propres à la photographie
– voire au cinématographe en pleine croissance – seront
interprétées et transposées au sein des avant-gardes
(du futurisme au surréalisme), occupant ainsi une place
prépondérante dans la théorie et la pratique artistiques
de l’entre-deux-guerres. Les grands mouvements d’avantgarde et la photographie vont donc se trouver en osmose.
Entre 1907 et 1914, le cubisme qu’Alfred Stieglitz (18641946) et Edward Steichen (1879-1973) vont faire
connaître aux États-Unis, grâce à la galerie 291, influence
des photographes comme Alvin Langdon Coburn (18821966) crée ce qu’il appelle des « Vortographs » totalement
abstraits, ou Angus Mac Bean (1904) faisant des portraits
mêlant face, profil et trois quarts sur la même image. Alors
que le courant pictorialiste préconise une « esthétisation »
des images par le recours à des procédés complexes
de tirage et d’impression qui leur donnent une matière
aussi raffinée que la gomme bichromatée, Alfred Stieglitz
et Edward Steichen imprègnent cependant leur art de
modernisme en privilégiant des sujets urbains, comme
le Flat Iron Building, ou des thèmes sociaux traités sans
complaisance. C’est en 1917 que le nouveau courant
baptisé « Straight photography » (photographie directe ou
pure) prend naissance avec la publication de photographies
de Paul Strand. Ce courant réclame le respect des moyens
proprement photographiques. L’image doit être montrée
telle qu’elle a été prise, sans retouches d’aucune sorte ni
effet de flou que l’invention de l’instantané par George
Eastman rend d’ailleurs artificiels depuis 1888. Tout l’art
doit résider dans la lumière, le cadrage et le choix des
détails ainsi exposés, que ceux-ci permettent de distinguer
clairement des objets ou qu’ils tendent à l’abstraction.
Aux États-Unis, après la grande cassure de la première
guerre mondiale, l’art subit des métamorphoses
importantes auxquelles la photographie n’échappe pas.
Alfred Stieglitz et beaucoup de ses amis du groupe Photo
Secession (Paul Strand et Edward Steichen en particulier)
abandonnent la photographie pictorialiste pour en venir
à des « photographies pures » sans aucune manipulation.
Déjà en 1907, il avait réalisé The Steerage (L’Entrepont)
qu’il a toujours considéré comme sa meilleure image.
(voir l’analyse de L’Entrepont page suivante). Un ancien
adepte du pictorialisme va devenir le chantre de la «
photographie pure » américaine et certainement l’un de
ses représentants les plus marquants : Edward Weston
(1886-1958), commence sa carrière comme portraitiste
pictorialiste, se passionne pour la beauté de l’art industriel
dans l’Ohio dans les années 1920. En 1924, il part au
Mexique où il est en contact avec les grands artistes
mexicains dont Diego Rivera (1886-1957), José Clemente
Orozco (1883-1949) et Tina Modotti (1896-1942) qui
l’aident à prendre sa nouvelle orientation. Il commence
d’ailleurs à tenir son journal intime et y note ses réflexions
mais aussi toutes ses difficultés à vivre la photographie
en tant que créateur à part entière. Weston appréciait le
réalisme de la photographie : un réalisme interprété, chargé
d’esthétisme et non pas le réalisme social de ses collègues
mexicains. Sa position d’avant-garde était américaine, elle
s’appuyait sur la forme signifiante du document direct.
Dans la photographie d’avant-garde aux États-Unis, la
réduction et la mise à nu des formes ne s’opéraient pas
de la même manière que pour les formes des images
de Matisse, de Picasso, de Boccioni ou de Duchamp par
exemple. Pour la photographie moderniste, réduction
signifiait simplicité, gros plans et fragment, c’est-à-dire
description attentive d’un objet d’une personne. Cela ne
pouvait pas être obtenu en passant directement de la
peinture d’avant-garde à la photographie, mais en partant
de documents quotidiens revus et repensés.
Extrait de Laurent Jackel, « Le renouveau avant-gardiste »
André Breton et la photographie
L’étude des rapports qu’André Breton entretenait avec la
photographie s’attache habituellement à décrire ­à travers
Nadja et L’Amour fou l’expérimentation d’une nouvelle
forme de récit poétique. Surréalisme et photographie
ont par ailleurs été questionnés dans la perspective d’une
définition de l’essence même de l’esthétique surréaliste,
comme s’y était employée Rosalind Krauss dans un article
resté célèbre. On s’est en revanche peu interrogé sur
l’usage stratégique que fit Breton de la photographie,
notamment lorsqu’il se préoccupa de défendre sa théorie
de l’automatisme. C’est pourtant la photographie qui
lui permet, dans les années 1930, de revaloriser l’idée
d’automatisme, quand l’heure de l’engagement politique
commande le rejet de l’individualisme et « la stupide
aventure littéraire ». À ce moment, Breton doit faire face à
une profonde contradiction : mettre en accord l’idée d’un
modèle intérieur avec celle d’une nécessaire action sur la
réalité extérieure. La photographie sera l’un des agents
d’une telle réconciliation, en mettant en image l’idée, restée
éminemment abstraite, d’automatisme psychique.
Michel Poivert, « Politique de l’éclair », Études
photographiques n° 7, mai 2000
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Rapprochements photographiques
Bernard Plossu
Le photographe français Bernard Plossu naît le 26 février
1945 à Da Lat, Sud-Vietnam.
Il n’a que treize ans lorsque son père, montagnard aguerri,
l’initie au désert africain du Sahara et à la photographie
avec un Brownie Flash. Durant son adolescence, il dévore
les séances quotidiennes de la cinémathèque, au point de
sécher les cours, pour découvrir Dreyer, Bergman, Buñuel,
Satyajit Ray puis pour la Nouvelle Vague. Il aime également
la musique d’Elvis et le jazz de Miles Davis. À 19 ans, il
part rendre visite à ses grands-parents au Mexique avec
l’intention de faire des études de philosophie.
« La photographie parle de tous les moments
apparemment sans importance qui ont en fait tant
d’importance », c’est ainsi qu’il résume sa recherche.
Il mène une vie de routard et n’hésite pas à se faire
passer pour photographe professionnel pour se joindre à
l’expédition ethnographique Zaschen-Max qui le conduit
dans la jungle du Chiapas pendant trois mois. Il abandonne
sa vocation de cinéaste, après avoir perdu sa caméra
Super 8 dans une rivière. Ses images donneront le jour à
un petit livre culte intitulé Le Voyage mexicain, qui paraît des
années plus tard, en 1979, aux éditions Contrejour.
En 1968, il vit à San Francisco, adhère aux idées de la Beat
generation, fait la rencontre d’Allen Ginsberg et de Joan
Baez. En 1970, il part en Inde. En 1972, il publie un petit
recueil de séquences photographiques intitulé Surbanalisme.
Il vit ensuite à Taos, au Nouveau-Mexique, où il côtoie la
fine fleur de la photographie américaine, tel Ansel Adams,
Wynn Bullock, Lisette Model, Les Krims, Lewis Baltz, Cole
et Brett Weston. Naissance de son fils Shane.
Bernard Plossu, Mexique, 1966
Bernard Plossu, Retour à Mexico, 1970
De 1975 à 1977, il voyage en Afrique où il rencontre les
Peul Bororo. Correspondance avec R. Quilici : « Je suis
photographe, j’ai commencé à faire de la photo en 1963,
bien avant Contrejour, même si pendant dix ans, j’ai fait
des tas de mauvaises photos. Cela dit, comme les années
1970 ont été extrêmement dynamiques pour réfléchir sur
la photographie, la promouvoir et la diffuser, je me suis
investi avec Claude Nori, Gilles Mora et Denis Roche. Mais
j’ai d’abord fait de la photo couleur de voyage. C’était un
métier et ce n’était pas une honte. Pendant 15 ans je n’ai
fait que de la photo de voyage spectaculaire, en couleur et
au grand angle. J’ai quasiment brûlé tous les négatifs noir et
blanc faits au grand angle. En même temps, j’ai toujours eu
l’instinct de faire des photos pour moi, en noir et blanc au
50 mm. Donc, d’un côté il y avait ce qui se vendait, et de
l’autre, ce qui ne se vendait en aucun cas. À l’époque on ne
pensait pas à être des artistes. Quand mes photos ont été
exposées en 1973 en Californie, je n’en croyais pas mes
yeux. Pour moi j’étais photographe de revue de voyage en
couleur et au grand angle. »
En 1988, une exposition rétrospective organisée par
Alain Sayag au Centre Georges Pompidou présente ses
vingt-cinq années de travail, ce qui lui vaut le Grand Prix
national de la photographie. Consacré par le Prix de la Villa
Médicis hors les murs, il poursuit son projet « Le jardin de
poussière » dans les déserts du monde. Ses photographies
sont des récits de voyages, qui sont autant de voyages
intérieurs. Exposé dans le monde entier, on lui connaît
également un goût pour la correspondance entretenue
avec Max Pam, Paulo Nozolino ou Sergio Larrain
photographe chilien mythique. Il a participé à la revue
Nueva Lente, à Madrid. Sa notoriété a traversé l’atlantique,
ce qui fait de lui un des photographes auteurs des plus
renommés. Il a exercé une influence sur de nombreuses
générations de photographes et l’on peut dire qu’il a
inventé un style qui lui est propre. Souvent comparé à tort
avec Robert Frank, photographe américain, avec lequel me
semble t’il, il ne partage que le fait d’avoir fait des images
de l’Amérique à la même période, dans ces photographies
c’est plutôt la sérénité qui règne, ce qui ne l’empêche pas
de témoigner, mais sans ce désir de dénoncer qui est celui
de Robert Frank.
En 1986, il se marie avec Françoise Nunez, talentueuse
photographe espagnole, avec laquelle il a deux
enfants Joaquim et Manuela. Parmi ses images les plus
emblématiques, sa famille figure en bonne place.
En 1992, après avoir vécu en Andalousie, il pose ses valises
à La Ciotat, près de Marseille, et se consacre à l’édition
de livres et à la préparation d’expositions, entrecoupées
de longues marches en montagne. Ses titres expriment la
poésie contenue à l’intérieur de Voyages vers l’Italie,
D’où vient la lumière, Routes, Forget me not, Train de
Lumière, Le long du Nil, Lettre pour un très lent détour, Plossu
l’extrêmement sensible, Celui qui encore est au monde.
Citations :
« Si j’ai toujours beaucoup voyagé, je ne suis pas pour
autant un photographe du voyage, de la même façon que
je ne suis pas un photographe du flou, ni un photographe
du Midi. J’ai horreur de toutes ces étiquettes. Le premier
voyage initiatique a eu lieu pour moi à l’âge de treize ans,
au Sahara où mon père m’avait emmené, et peut-être
que, devenu adulte, je n’ai fait que chercher à retrouver ce
voyage là. »
Bernard Plossu
diriger ; par la suite, il s’occupe de The Intimate Gallery
(1925-1929), puis de An American Place (1929-1946).
Il aide de nombreux artistes européens à exposer sur
le continent américain : Georges Braque, Constantin
Brancusi, Paul Cézanne, Henri Matisse, Pablo Picasso,
Auguste Rodin... En 1917, Alfred Stieglitz tourne son
appareil vers le ciel et photographie des nuages (il produit
un ensemble de petites rêveries poétiques réunis sous
le nom d’ « Équivalents ») et, sept ans plus tard, épouse
l’artiste Georgia O’Keeffe. Tout au long de sa carrière, il
est admiré comme un photographe de talent et comme
le grand rassembleur de l’avant-garde artistique du début
du vingtième siècle. Avec talent, il parvient à concilier les
pictorialistes et les adeptes de la photographie pure, les
photographes et les plasticiens. Cent cinquante prix ont
récompensé sa carrière... Il s’éteint à Lake George,
le 13 juillet 1946.
« En photographie, on ne capture pas le temps, on
l’évoque. Il coule comme du sable fin, sans fin, et les
paysages qui changent n’y changent rien. »
Bernard Plossu
Alfred Stieglitz
États-Unis, 1 janvier 1864, Hoboken New Jersey - 13 juillet
1946 à Lake George.
Élevé à New York dans une riche famille d’origine juive
allemande, l’Américain Alfred Stieglitz est très tôt passionné
par la photo. (...) Ses premières photos, d’apparence très
conventionnelle, datent de 1883.
Celles-ci sont marquées par le mouvement pictorialiste
(en 1888, il se voit décerner le Prix P. H. Emerson, nom
du grand maître du pictorialisme). À la différence de ses
confères, Alfred Stieglitz ne truque pas ses clichés pour
obtenir des effets plastiques (il n’utilise pas la gomme
bichromatée et ne retouche pas ses négatifs), mais profite
des conditions météorologiques (brouillard, neige...) pour
obtenir des flous artistiques. En 1890, Alfred Stieglitz
retourne définitivement à New-York. Il adhère au Club
de la photographie de New York et expérimente dans le
domaine de la photographie (modification des procédés
d’exposition, de développement...). Parmi ses principales
découvertes, figure « la photographie non falsifiée ».
Il édite le journal American Amateur Photographer (18931896) puis Camera Notes (1897-1902). Parmi ses thèmes
de prédilection : l’architecture new-yorkaise. En 1902,
Alfred Stieglitz se fait internationalement remarquer en
co-fondant avec Alvin Langdon Coburn le courant de la
Photo Secession (parmi les adeptes les plus connues :
Frank Eugène, Gertrude Käsebier et Clarence H. White)
et, l’année suivante, en lançant la revue Camera Work (50
numéros de 1902-1917). Avec ses amis, il organise une
exposition au National Arts Club de New York. De 1905
à 1917, Alfred Stieglitz gère, à New York, une galerie de
photographie, la 291 (située au 291 Fifth Avenue).
Celle-ci est la première des trois qu’il a l’occasion de
Alfred Stieglitz, The Steerage (L’Entrepont), 1907
Analyse de son œuvre majeure L’Entrepont, 1907
L’Entrepont correspond à l’esthétique de la Straigth
Photography tel que Alfred Stiegiltz l’entend. Le
photographe commence par condamner le pictorialisme
qui abuse de la gomme bichromatée et de la glycérine
pour une définition de la photographie plus pure, plus
proche de sa nature. Loin d’une photographie sociale qui
pratique une frontalité plus compatible à traiter un sujet
difficile, la Straight photography n’hésite pas à rompre
ce face à face. Dans le cas de cette photographie, Alfred
Stieglitz a cherché un endroit précis, le meilleur endroit
possible du point de vue plastique pour que l’épreuve
soit réussie. La thématique est sociale sans doute par la
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
représentation de l’immigration. Le sujet est en réalité
cette fragile passerelle fermée et jetée entre deux mondes
inaccessibles, en bas les femmes qui sont assises et en haut
les hommes qui sont debout. Il n’y a pas de frontalité mais
une légère contre-plongée permet de diagonaliser
l’ensemble. Le photographe raconte d’ailleurs comment la
lumière lui a donné la révélation de cette image. Elle jette
un rai sur cette passerelle et structure ainsi, avec la forme,
toute la surface de la photographie. De même, le rendu
de la matière devient une finalité. Le piqué pose, de fait, la
question du support papier, de son grain, de sa sensibilité
et du temps d’exposition nécessaire pour obtenir une
parfaite qualité de l’image. Cette qualité pose, en dernier
ressort, la question de la lumière et du chimique. Un soin
tout particulier est donc porté au médium dont dépendra
l’image finale. La qualité d’une photographie est déterminée
en fonction non seulement du talent du photographe mais
également en fonction de la qualité de l’outil. N’importe
qui ne peut plus faire de la photographie contrairement
à ce qui se laissait sous-entendre au départ. Il faut être
initié, formé et des enseignements se mettent en place au
même titre que la peinture. C’est seulement après une
parfaite compréhension des processus photographiques
et un équilibre entre l’optique et le chimique que l’individu
réalisera une bonne photographie.
L’exemple d’Alfred Stieglitz, qui raconte la façon dont la
photographie L’Entrepont de 1907 lui est venue à l’esprit et
qu’il prit dans l’instant qui suivit, est symptomatique.
« C’était magique. Je voyais des formes, tout un tableau
de formes qui se répondaient et sous-tendaient autre
chose, comme une vision pour moi : des gens simples ;
la présence du navire, de l’océan, du ciel ; un pas décisif
hors du ghetto des riches. Le nom de Rembrandt me
traversa l’esprit [...] ». Dans ce propos se trouve exposé,
bien sûr, la théorie de ce que peut être la photographie
directe au départ, selon Alfred Stieglitz, c’est à dire une
photographie prise dans l’instant d’une révélation. Mais
apparaît clairement les rapports qu’entretiennent l’optique
et la lumière.
En effet, l’optique, chez Alfred Stieglitz, est déterminée
par le monde des formes qui sont tirées du réel. Mais la
lumière vient de la peinture et donc de l’imaginaire et
transfigure ce qu’Alfred Stieglitz ressent formellement. Elle
n’est pas encore chimique, mais le photographe veut la
lumière et revendique une photographie avec des moyens
strictement photographiques. De fait, prendre conscience
de la lumière pouvait consister à la contraster entre le
noir et le blanc, ce qui caractérise, de plus, parfaitement
la lumière rembranesque. À terme, il était normal que
la génération qui suivit, celle du groupe F/64, trouva une
solution d’une nature moins imaginaire et plus technique.
Alfred Stieglitz est un des liens qui permet de comprendre
le passage entre le Pictorialisme et le groupe F64 d’Edward
Weston qui radicalise le propos.
Texte de Serge Teskrat
Manuel Alvarez Bravo, Sombreros, Ecuador, 1984
Manuel Alvarez Bravo
Mexico, 4 février 1902 - 19 octobre 2002
« Tant que l’impossible n’est pas atteint, le devoir n’est pas
rempli » Manuel Alvarez Bravo.
« Manuel Alvarez Bravo pendant sa longue vie, ses quatrevingt ans d’activité photographique, aura plus que rempli
son devoir de traquer l’impossible, et en l’apprivoisant, de
le faire ruisseler de toutes les pluies bienfaisantes de la
poésie. Lui, il ne s’est pas laissé enfermer dans ce
« labyrinthe de solitude » dont parle Octavio Paz. Il est
sorti au-devant du monde, il a aimé le monde et plus
précisément sa terre mexicaine, sa complexité envoûtante
et écartelée entre religion et magie.
Il cheminait dans son Mexique comme un « photographe
du dimanche », car il se considérait comme tel. Il s’attardait
non pas sur les bruits du monde, sinon rarement lors
de grèves sanglantes, mais sur ses murmures ; car « Le
murmure peut-être est plus vieux que les lèvres » (Ossip
Mandelstam). Manuel Alvarez Bravo a mis l’oreille de
ses émotions sur le ventre de la terre mexicaine, et il a
compris le sens de la terre.
Le dernier livre paru sur son oeuvre immense s’appelle
d’ailleurs Photopoésie, et Manuel Alvarez Bravo, le grand le
plus grand photographe mexicain, est le moins reconnu
comme fondateur de la photographie moderne autant que
Paul Strand, André Kertész, Walker Evans, Henri CartierBresson, son ami indéfectible, Frida Kahlo et Tina Modotti.
Mais il dialoguait aussi avec André Breton, Luis Buñuel,
Diego Rivera, Fuentes, Paz, et d’autres.
Il est bien plus qu’un pionnier de la photographie moderne,
il en est l’artisan discret, parfois amer et ironique qui
regarde la vie qui va, la mort qui marche à ses côtés,
éternellement liée à elle : « La mort renaît à nouveau avec
chaque nouvelle vie » (Alvarez Bravo).
Pour nous, il demeure la figure tutélaire de la photographie
mexicaine, celui qui a rendu compte, plus encore que Tina
Modotti, de la vie de son peuple entre religion, sorte de
magie animiste, culte de la mort, et échappées par le rêve.
Tout ici-bas n’est qu’un symbole et mystère, disait-il. Il aura
essayé de les rendre palpables, proches de nous, familiers
comme tout ce qui entoure les Mexicains entre masques
et vies. Il voulait connaître l’autre. L’autre humain : je suis
l’autre, disait Nerval, et il mettait cette citation sur quelques
séries d’œuvres. Il voulait comprendre qu’on ne peut
séparer le corps des âmes. Ainsi ses photos de nus sont
autant spirituelles que sensuelles. Ses gamins, ses paysans,
ses objets religieux, sont le quotidien de son pays, vu avec
amour et respect. Il voulait aussi connaître l’autre de la
nature, aller au-delà des apparences.
Et il aimait citer cette phrase d’Octavio Paz « Montrer
l’autre côté de ce côté ». Il ne voulait pas philosopher
le regard, simplement agir pour restituer une magie des
lumières antérieures et intérieures de chaque chose, de
chaque être. Les actes disent tout, la vie, la mort.
Aussi il agira, et son œuvre aux multiples contours est
marquée du sceau de la poétique visuelle. Inaltérable
ses images demeurent, non seulement comme miroir
d’un pays, de ses traditions, de sa civilisation, mais de sa
respiration intime. Son credo était simple et évident :
« Quand les yeux voient ce qu’ils n’avaient encore jamais
vu, le coeur ressent ce qu’il n’avait jamais ressenti »
(Baltasar Graciàn). Manuel Alvarez Bravo travaillait
lentement, il semblait soupeser le temps dans la balance
du moment espéré. Et quand la balance penchait enfin, il
appuyait sur le déclencheur. Sur une pancarte posée dans
sa chambre noire, il avait écrit : « Rien ne presse, rien ne
presse ». Son alchimie immobilisait les sabliers.
Il savait voir, et sa fille Aurélia raconte : « Mon père se
considère comme un photographe du dimanche. Mais je
pense qu’il est le photographe de tous les instants, aussi
dérisoires soient-ils. » Combien de fois a-t-il su guider
notre regard aveugle vers des formes et des lumières qui
sans cela se seraient noyées dans le magma insignifiant
de la vie de tous les jours ? Son oeil en noir et blanc
venait sauver les nôtres de la grisaille des perspectives
quotidiennes. « Mon dieu, pourquoi je n’ai pas pris
l’appareil ? ».
Paul Strand, Filets, Michoacan, 1933
Manuel Alvarez Bravo Fruta prohibida, 1976
Ses images emblématiques, souvent énigmatiques et
troublantes, jouent sur les références iconographiques, les
allusions, les reflets interrogateurs. Il joue sur les fragments
de corps plus que sur les corps eux-mêmes, sur des
objets religieux autant que païens, des masses d’individus
indistincts, des gisants comme des morts et des choses
comme des vivants. Il fut un grand admirateur d’Eisenstein
et cela peut s’entrevoir dans sa construction de l’image.
Manuel Alvarez Bravo emplit à la fois un discours poétique
et une harmonie géométrique. De tout cet ensemble
élaboré si longtemps domine une impression de mystère.
Hanté par le langage, il parle avec ses images et le titre qu’il
leur donne. Il ne supportait pas que des photos ne soient
pas légendées, car pour lui elles devenaient anonymes.
Aussi il choisissait méticuleusement ses titres, souvent
marqués par le surréalisme, donc à connotation onirique.
« La pire chose qu’on puisse faire est de donner pour titre
à une photographie : “Sans titre” ; car dès lors elle ne se
différencie pas des autres images » (Alvarez Bravo).
Extrait d’un texte de Gil Pressnitze
Cartier-Bresson, Prostituée, Calle Cuauhtemoctzin, Mexico, 1934
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Biographie de Paul Strand
Paul Strand, fils d’immigrés de Bohême (ouest de la
Tchécoslovaquie aujourd’hui), est né à New York City
le 16 Octobre, 1890.
Strand a reçu son premier appareil photo par son père à
l’âge de douze ans. Deux ans plus tard, il rejoint l’Ethical
Culture Fieldston School où il suit l’enseignement de Lewis
Hine, qui à cette époque est impliqué dans un projet
de photographie sur les immigrants à Ellis Island. Lewis
Hine a également exposé Paul Strand à la Galerie PhotoSecession au 291 Fifth Avenue et l’a présenté avec Alfred
Stieglitz, David Octavius Hill, Julia Margaret Cameron,
Gertrude Kasebier et Clarence White .
Membre du Camera Club, Strand a travaillé pour une
compagnie d’assurance après l’obtention du diplôme
en 1911. Cependant, deux ans plus tard il est devenu
un photographe commercial indépendant. Il a travaillé
en étroite collaboration avec Alfred Stieglitz, qui était
un ardent défenseur de ce qu’il appelait la Straight
photography. En 1916, des photographies de Paul Strand
paraissent dans la revue Camera Work et Stieglitz écrit que
« Strand est sans doute le photographe le plus important
développé dans ce pays depuis Alvin Langdon Coburn ».
Le Museum of Modern Art à New York consacre à Paul
Strand une rétrospective à grande échelle en 1945.
La Photo League, comme beaucoup d’organisations
radicales, a été étudiée par le « House of Un-American
Activities Committee » (Commission de la Chambre sur
les activités anti-américaines), créée pour enquêter sur les
fascistes et les communistes au sein du Gouvernement
fédéral au cours des années 1940. Cela a conduit ses
membres à figurer sur une liste noire. Strand décide de
quitter les États-Unis et de vivre en France.
Strand a publié une série de livres, Time in New England
(1950), La France de profil (1952), Un Paese (1954),
Mexican Portfolio (1967), Outer Hebrides (1968) et Ghana :
An African Portrait (1976).
Paul Strand est décédé le 31 mars 1976 à Orgeval.
Au cours de la Première Guerre mondiale, Strand était
membre du Corps médical de l’armée. Après la guerre,
Strand a collaboré avec Charles Sheeler sur le film
Manhatta (1925). Il travaille en tant que caméraman. En
1933-34, il supervise le film Redes (1936).
Pendant la dépression, Strand est devenu actif en politique.
Un engagement socialiste, il a travaillé avec le Theatre
Group qui avait été formé à New York par Harold
Clurman, Cheryl Crawford et Lee Strasberg en 1931. Le
Groupe était une tentative originale de créer un collectif
de théâtre, une compagnie d’acteurs formés dans un style
unifié et dédié à la présentation de pièces contemporaines.
Les membres du groupe de gauche voulait produire des
pièces qui traitent de questions sociales importantes.
En 1932, Strand a été sollicité par le gouvernement
mexicain pour créer le département de cinéma et la
photographie au secrétariat à l’Éducation publique. En
1935, Strand a visité l’Union soviétique avec Harold
Clurman et Cheryl Crawford où il a rencontré le
réalisateur de film, Sergi Eisenstein. Lorsque Strand est
retourné aux États-Unis, il a commencé à produire
des films documentaires socialement importants. Cela
comprenait The Plow that Broke the Plains (1936), son
film sur les syndicats dans le Sud profond, People of the
Cumberland (1937) et Native Land (1942).
En 1936, Strand rejoint Bérénice Abbot afin de créer la
Photo League de New York. Son but était de fournir à la
presse radicale des photographies des activités syndicales
et des manifestations politiques. Plus tard, le groupe a
décidé d’organiser des projets locaux où les membres se
sont concentrés sur la photographie de communautés
ouvrières.
Paul Strand, The Family, Luzzara, Italy, 1953
Paul Strand, On my doorstep, 1916
Biographie Henri Cartier-Bresson
Né le 22 août à Chanteloup, en Seine-et-Marne.
Fait ses études secondaires au lycée Condorcet à Paris.
1923 Se passionne pour la peinture et pour l’attitude des
surréalistes.
1927-28 Étudie la peinture chez André Lhote.
1931 Parti à l’aventure en Côte-d’Ivoire, il y reste un an et
prend ses premières photographies.
1932 Charles Peignot le publie dans Arts et Métiers
Graphiques.
1933 Expose à la galerie Julien Levy à New York, puis à
l’Ateneo de Madrid. Voyage en Europe avec André Pieyre
de Mandiargues et Leonor Fini.
1934 Voyage au Mexique
1935 Séjourne à New York et s’initie au cinéma aux côtés
de Paul Strand.
1936 Assistant de Jean Renoir sur Une Partie de Campagne.
1963 Retourne au Mexique pour quatre mois.
Life Magazine l’envoie à Cuba.
1965 Voyage pendant plusieurs mois au Japon.
1966 Retourne en Inde. S’éloigne de Magnum qui
conserve néanmoins l’exploitation de ses archives. Comme
auparavant, ses photographies sont tirées chez Pictorial
Service.
1967 Commande d’IBM : L’Homme et la Machine.
1969 Voyage en France pendant un an pour la Sélection du
Reader’s Digest et publie le livre Vive la France accompagné
d’une exposition qui se tiendra au Grand-Palais en 1970.
Réalise aux États-Unis deux documentaires pour CBS.
1972 Retourne en URSS. A partir de 1974, il se consacre
au portrait et au paysage photographiques, ainsi qu’au
dessin.
1975 Première exposition de dessins à la Carlton Gallery
de New York.
1937 Participe à des films en faveur de l’Espagne
républicaine. Aragon l’introduit à Regards où il publie son
reportage sur le couronnement du roi George VI.
1980 Retourne en Inde.
1939 Assistant de Jean Renoir sur La Règle du Jeu.
de Jean Renoir
1986 Reçoit le prix Novecento des mains de la veuve de
Jorge Luis Borges, à Palerme.
1940 Fait prisonnier par les Allemands, il réussit à s’évader
en février 1943 après deux tentatives infructueuses.
1943 Participe à un mouvement clandestin d’aide aux
prisonniers et évadés. Réalise des portraits d’artistes
et d’écrivains pour les éditions Braun : Matisse, Picasso,
Braque, Bonnard, Claudel, Rouault...
1987 Le Musée d’art moderne de New York organise
l’exposition « Early Works ».
1944-45 S’associe à un groupe de professionnels qui
photographient la Libération de Paris. Réalise Le Retour,
documentaire sur le rapatriement des prisonniers de
guerre et des déportés.
1946 Passe plus d’un an aux États-Unis pour compléter
une exposition « posthume » dont le Musée d’Art
Moderne de New York avait pris l’initiative, le croyant
disparu pendant la guerre. Voyage à travers les États-Unis
avec John Malcom Brinnin.
1981 Reçoit le Grand Prix national de la photographie à
Paris.
1988 Le Centre national de la photographie lui rend
hommage.
2000 Décide avec sa femme Martine Franck et leur fille
Mélanie de créer la Fondation Henri Cartier-Bresson,
destinée notamment à rassembler son oeuvre et à créer
un espace d’exposition ouvert à d’autres artistes.
2002 La Fondation Henri Cartier-Bresson est « reconnue
d’ utilité publique » par l’Etat Français.
2003 Ouverture de la Fondation Henri Cartier-Bresson
avec l’exposition « Les Choix d’Henri Cartier-Bresson ».
Rétrospective « De qui s’agit-il ? » à la Bibliothèque
nationale de France.
1947 Fonde l’agence Magnum avec Robert Capa, David
Seymour (dit Chim), William Vandivert et George Rodger.
1948-50 Passe trois ans en Orient : en Inde, à la mort de
Gandhi ; en Chine, durant la transition entre le Kuomintang
et la République populaire ; en Indonésie, au moment de
son indépendance.
1952 Publie son premier livre avec Tériade Images à la
Sauvette (couverture de Matisse).
1954 Publie Danses à Bali chez Robert Delpire avec un
texte d’Antonin Artaud. Début d’une longue collaboration
avec Delpire. Il est le premier photographe admis en URSS
après la détente.
1955 Première exposition en France au Pavillon de Marsan,
au Louvre, qui circule à travers le monde. Publie Les
Européens avec Tériade (couverture de Miro).
1958-59 Retourne en Chine pour trois mois à l’occasion
du dixième anniversaire de la République populaire.
Henri Cartier-Bresson Natcho Aguirre, Santa Clara, Mexique, 1934
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur
Bibliographie
À lire pour comprendre le parcours de Paul Strand
Éric de Chassey, « Paul Strand, frontalité et engagement »,
Études photographiques, n°13, juillet 2003
Flagrants délits, Delpire, 1968.
« Pour le dire simplement, Strand part d’une définition de
l’art – celle du modernisme pictural qu’il admire et auquel
il se confronte explicitement. Il applique cette définition à la
photographie, malgré qu’il en ait à l’époque (contrairement
donc à sa déclaration d’indifférence à l’égard de la question
de l’art). Ce qui est interprété généralement comme un
effet ou un moyen de la réalisation du concept de Straight
photography est donc aussi une imitation des procédés
modernistes en peinture. Strand a bien reconnu le rôle
qu’ont pu jouer dans sa pratique les oeuvres de Picasso et
de Braque. Il a pu en voir des exemples à l’Armory Show
de 1913, puis dans les galeries de Stieglitz et de Marius De
Zayas. Cette influence est cependant traitée en général
de façon très vague ou sur le mode de la dérive, avec une
forte insistance sur une idée tout à fait erronée de ce que
peut signifier historiquement la notion d’abstraction. Il est
patent que l’intérêt de Strand à cette époque est d’abord
formel, ou esthétique – c’est là sa première préoccupation,
comme le montrent des lettres où il insiste notamment
sur le fait que, dans tout ce qu’il produit, depuis les vues
de machines jusqu’à celles de nature ou les portraits, son
intérêt porte sur « l’organisation des formes, dont chacune
n’a d’importance que dans la mesure où elle est reliée à
d’autres. »
Vive la France (texte de François Nourissier), Sélection du
Reader’s Digest / Robert Laffont, 1970.
À lire pour comprendre les enjeux et la place de la
photographie et ses rapports avec l’avant garde artistique
Laurent Jackel, « Le renouveau avant-gardiste »,
www.laurent-jackel.fr/component/jcomments/feed/com_
content/60
Une vidéo passionnante de Stan Neuman sur la
photographie surréaliste, réalisée à l’occasion de
l’exposition « La Subversion des images » au Centre
Pompidou en 2009.
http://www.artevod.com/photographie_surrealiste
Ouvrages spécifiques de et sur Cartier-Bresson
The Photographs of Henri Cartier-Bresson, The Museum of
Modern Art, New York, 1947
L’Homme et la Machine (introduction d’Etiemble),
Le Chêne, 1969.
The Face of Asia (introduction de Robert Shaplen), John
Weatherhill, / Orientations Ltd., 1972.
À propos de l’URSS, Le Chêne, 1973
The Decisive Moment. Henri Cartier-Bresson, Scholastic
Magazines Inc., 1973.
Henri Cartier-Bresson, Aperture / Delpire,1976.
Henri Cartier-Bresson. Photographe (texte d’Yves Bonnefoy),
Delpire, 1979.
Henri Cartier-Bresson. Ritratti (textes de André Pieyre de
Mandiargues et Fernando Scianna), Fabbri, 1983.
Henri Cartier-Bresson en Inde (introduction de Satyajit Ray,
texte d’Yves Véquaud), Centre national de la photographie,
1985.
Photoportraits (texte de André Pieyre de Mandiargues),
Gallimard, 1985.
Henri Cartier-Bresson : The Early Works (texte de Peter
Galassi), The Museum of Modern Art, New York / Thames
and Hudson, 1987.
L’Autre Chine (introduction de Robert Guillain), Centre
national de la photographie, 1989.
L’Amérique furtivement (préface de Gilles Mora), Le Seuil,
1991.
Henri Cartier-Bresson : Premières photos : De l’objectif
hasardeux au hasard objectif, Arthaud, 1991.
Alberto Giacomelli photographié par Henri Cartier-Bresson,
Franco Sciardelli, 1991.
À consulter la bibliographie et filmographie complète sur le
site de la fondation Henri Cartier-Bresson
http://www.henricartierbresson.org/hcb/HCB_biblio_fr.htm
Ouvrages généraux
Images à la sauvette, Verve, 1952.
Dominique Baqué, Photographie plasticienne. L’extrême
contemporain, Le Regard, 2004
Les Danses à Bali (texte d’Antonin Artaud, commentaires
de Béryl de Zoete), Delpire, 1954.
Christian Gattinoni, La photographie en France 1970-2005,
Culture France / La Documentation française, 2006
D’une Chine à l’autre (préface de Jean-Paul Sartre), Delpire,
1954.
Christian Gattinoni et Yannick Vigouroux, La photographie
contemporaine, Scala, 2004
Les Européens, Verve, 1955.
Louis Mesplé, L’aventure de la photo contemporaine de 1945
à nos jours, Le Chêne / Hachette, 2006
Moscou, vu par Henri Cartier-Bresson, Delpire, 1955.
Henri Cartier-Bresson : Fotografie (texte d’Anna
Fárová),1958.
Photographies d’Henri Cartier-Bresson, Delpire, 1963.
Michel Poivert, La photographie contemporaine,
Flammarion / Cnap, 2002
André Rouillé, La photographie, Gallimard, 2005
China (texte de Barbara Miller), Bantam Books, 1964.
François Soulages, Esthétique de la photographie. La perte et
le reste, Armand Colin, 2005
The Galveston that was (texte de Howard Barnstone),
Macmillan / The Museum of Fine Arts, Houston, 1966.
Qu’est-ce que la photographie aujourd’hui ?, Beaux Arts
éditions, 2007
Un centre d’art, tourné vers
la photographie qui associe
expositions, édition, résidences et
formation.
Le Point du Jour, inauguré en novembre 2008, est le premier
centre d’art / éditeur en France tourné vers la photographie.
Adresse et informations
Le Point du Jour
Centre d’art/éditeur
107, avenue de Paris
50100 Cherbourg-Octeville
Tél. 02 33 22 99 23
www.lepointdujour.eu
Le bâtiment a été conçu par Éric Lapierre, lauréat du Prix de la
première œuvre en 2003, décerné au meilleur jeune architecte
français.
Contact : Anne Gilles
[email protected]
Codirigé par Béatrice Didier, David Barriet et David Benassayag,
Le Point du Jour est issu de l’activité, durant une dizaine d’années,
de la maison d’édition du même nom et du Centre régional de la
photographie de Cherbourg-Octeville.
Service éducatif
Quatre expositions sont proposées par an : l’une concerne la
région, deux présentent des artistes contemporains et la dernière
est consacrée à un photographe du passé.
Le Point du Jour publie parallèlement trois ouvrages, liés aux
expositions ou essais concernant la photographie.
Régulièrement, des artistes sont invités à réaliser un travail
photographique dans la région, suivi le plus souvent d’une
exposition et d’un livre.
Enfin, Le Point du Jour organise avec le soutien de la Fondation
Neuflize Vie, le Prix Roland Barthes. Ce prix récompense des
travaux de jeunes universitaires sur la photographie.
La bibliothèque réunit près de deux mille ouvrages concernant la
photographie. Elle accueille aussi régulièrement des conférences
et des rencontres.
Des visites et des formations sont organisées, notamment à
destination des enseignants, tout au long de l’année.
Textes rassemblés et conception : Denis Tessier
Denis Tessier
t. 02 33 22 99 23
f. 02 33 22 96 66
[email protected]
Permanence le vendredi
de 8h à 12h
et sur rendez-vous
Horaires d’ouverture
Du mardi au vendredi de 14h à 18h
Samedi et dimanche de 11h à 19h
et sur rendez-vous
Actualité
L’exposition est coproduite avec la Fondation
Henri Cartier-Bresson
Autour de l’exposition
Des projections et des rencontres ponctueront
l’exposition.
Première rencontre :
Le dimanche 13 mai à 15h avec Agnès Sire, directrice de la
Fondation Henri Cartier-Bresson.
Édition DVD
Le film Redes (sous le titre français Les Révoltés d’Alvarado),
accompagné d’un documentaire consacré à Paul Strand,
vient d’être édité en DVD par Carlotta. Il fait partie
d’un coffret de films restaurés grâce la World Cinema
Foundation.
Visuels Henri Cartier-Bresson
© Magnum Photos /Collection Fondation HCB
Visuels Paul Strand
© Aperture Fondation Inc. / Paul Strand Archive
Henri Cartier-Bresson - Paul Strand, Mexique, 1932-1934 / Service éducatif du Point du Jour, centre d’art/éditeur

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