La victimisation, le sentiment d`insécurité et l`image de la police

Transcription

La victimisation, le sentiment d`insécurité et l`image de la police
TC
T C TEA M CONSUL T
Diagnostic Local de Sécurité 2004
pour la région d’Yverdon
Diagnostic et recommandations
31 mars 2004, version II.0
Préface et introduction
La réalisation du présent Diagnostic Local de Sécurité (DLS) pour la région
d’Yverdon-Les-Bains s’inscrit dans le processus de mise en place d’une sécurité de
proximité : celle-ci doit prendre en compte les attentes de la population et les
problèmes de sécurité à l’échelle locale dans l’esprit d’une meilleure sécurité et de
service à la population.
La sécurité de proximité est l’un des grands axes de la réforme née de Police 2000.
En parallèle aux efforts consentis pour lutter contre la moyenne et grande criminalité
et assurer une intervention rapide et efficace pour les appels urgents, il s’agit de
mettre en place des prestations qui garantissent une prise en charge plus directe des
préoccupations sécuritaires quotidiennes des citoyens. L’action policière doit devenir
plus pro-active, s’attacher à résoudre et prévenir les problèmes, contribuer à
améliorer le cadre et la qualité de vie et diminuer le sentiment d’insécurité. Sans se
substituer aux autres acteurs, la police travaillera de concert avec eux pour coproduire, en partenariat, la sécurité au quotidien des gens.
Le DLS est, pour ainsi dire, le fondement de cette sécurité de proximité puisqu’il
recueille systématiquement la demande sociale en matière de sécurité et, par ses
recommandations, suggère des pistes prioritaires et stratégiques pour la mise en
place des prestations de sécurité de proximité. Dans la démarche de Police 2000, le
diagnostic a un horizon de trois ans et, en fournissant des « indicateurs de
sécurité », permet le contrôle méthodique et périodique de la qualité et du bien-fondé
des prestations préconisées.
Le DLS est un outil composite qui combine plusieurs méthodes et champs d’analyse.
Il repose tout d’abord sur une analyse des statistiques policières qui portent sur la
criminalité et les accidents. Ensuite, un volet important de l’analyse est l’enquête dite
de victimation. Il s’agit d’un sondage représentatif auprès des résidents de la région
concernée portant sur la délinquance, les incivilités, la satisfaction face aux
prestations policières, les attentes et les problèmes jugés prioritaires. Le
questionnaire du sondage est standardisé, permettant ainsi des comparaisons dans
le temps et entre les zones où des DLSs similaires ont été réalisés. Finalement, les
appels au central d’engagement cantonal pour la région concernée sont également
pris en compte dans l’analyse.
Sous la supervision du sergent-major Olivier Botteron, membre de la Cellule de
Conduite de l’Opération Police 2000, le DLS a été réalisé par une équipe de TC
Team Consult, Genève, et de l’Ecole des Sciences Criminelles (ESC) de l’Université
de Lausanne composée de Michael Bloch (TC), Dominique Wisler (TC) et Tannaz
Chamot (ESC). Les entretiens téléphoniques pour le sondage ont été réalisés par
l’Institut M.I.S. Trend à Lausanne.
Le Chef de l’Opération Police 2000
Denis Froidevaux
1
Le DLS dans la région d’Yverdon-Les-Bains
Le périmètre du diagnostic comprend treize communes qui ensemble forment la
région d’Yverdon-Les-Bains. Pour affiner l’analyse et tenir compte de la densité
urbaine, deux zones principales ont été distinguées : la ville d’Yverdon-Les-Bains, à
caractère fortement urbanisé, et le reste de la région, en majeure partie de type rural.
La zone dite rurale comprend ici les communes de Belmont-sur-Yverdon, Chamblon,
Cheseaux-Noréaz, Cuarny, Ependes, Gressy, Montagny-près-Yverdon, Pomy,
Treycovagnes, Valeyres-sous-Montagny, Villars-Epeney, Yvonand et Grandson. Les
traits principaux de ces deux zones sont résumés dans le tableau suivant :
Zones
Zone rurale
Zone urbaine
(Yverdon-Les-Bains)
Canton
Indicateurs
Habitants
(en milliers)
Densité de
population
(km²)
Chômage
(en %)
Pop.étr.
(en %)
9151
23’389
627’933
138.5
2077.2
194
2.6
6.2
3.4
9.0
31.4
26.8
Le Diagnostic Local de Sécurité Yverdon-Les-Bains repose sur :
a) les statistiques policières de la criminalité (CRIPOL 2001-2003)
b) les statistiques policières sur les accidents de la circulation (2001-2003).
c) les statistiques de la Centrale d’Engagement (CET) de la police (2001-2003)
d) un sondage de victimation réalisé auprès d’un échantillon représentatif de 500
personnes entre les 20 et 31 janvier 2004. 250 interviews ont été réalisées en
ville d’Yverdon-Les-Bains et 250 en zone dite rurale.
Pour tenir compte de la périodicité des diagnostics locaux de sécurité, renouvelables
tous les trois ans, les analyses portent sur la période courant de 2001 à 2003 et,
séparément, l’année 2003. Les données du sondage sur la victimation portent
également sur cette période de trois ans et permettent donc de mesurer la
prévalence de la victimation sur les années 2001-2003.
Afin de mettre en relief les résultats des analyses du DLS Yverdon-Les-Bains, on
indiquera fréquemment les chiffres de référence du DLS réalisé dans les zones
pilotes de Police 2000, à savoir le district d’Echallens (zone rurale), le district de
Vevey et l’agglomération de Morges (zone urbaine).
2
La délinquance
Pour l’analyse de la délinquance, sept délits pertinents ont été retenus. A l’aide du
sondage représentatif effectué, les taux de victimation pour les délits en question ont
pu être relevés. La prévalence mesure le nombre de personnes sur 100 ayant subi
un délit pour une période donnée.
Prévalence de la victimation face à la délinquance
(sources : sondage DLS 2004 Yverdon et DLS 2001 zone pilote)
Yverdon
Zone pilote
2001-2003
2003
2001
rural
urbain
rural
urbain
rural
urbain
Vol de moto, scooter, bicyclette
18.5
29.4
11.1
26.5
1.1°
2.8°°
Vandalisme sur la voiture
17.6
24.6
11.5
15.6
5.8°
5.9°°°
Cambriolage
11.2
17.2
4.8*
10.4*
1.2°
2.2°°°
Vandalisme sur
habitation/objets déposés
7.6**
16.4**
6.0*
12.4*
1.6°°
2.2°°°
Vol de biens personnels
8.8*
15.2*
6.0*
11.2*
1.6°°
4.1°°°
Vol dans la voiture, autoradio,
pièce de la voiture
7.6
13.3
4.0
7.6
2.5
2.1°°
Agression dans le but de voler,
de faire mal, ou pour des
raisons sexuelles
6.4
9.2
5.2
7.6
2.4
1.7°°°
Différence entre zone urbaine et rurale : * p < 0.05 ; ** p < 0.01
Différence entre Yverdon (rural/urbain) et zone pilote (rural/urbain) :° p < 0.05 ; °° p < 0.01 ; °°° p < 0.001
Les données de sondage confirment les tendances que l’on peut observer à l’aide
des statistiques policières. Le niveau de la délinquance est élevé dans l’ensemble du
périmètre du diagnostic et, pour tous les délits étudiés, se situe systématiquement au
dessus de la moyenne observée dans la zone pilote1. La ville d’Yverdon-Les-Bains
est de loin la plus touchée par le phénomène de la délinquance.
Le délit le plus fréquent est le vol de cycles. Pratiquement 1 propriétaire de
motocycle ou bicyclette sur 3 dans la ville d’Yverdon-Les-Bains affirme avoir été
victime d’un vol durant les derniers trois ans. 2003 a connu une recrudescence de ce
type de vol. La statistique policière, qui ne comprend pas les chiffres de la criminalité
non rapportée, fait état de 663 vols de bicyclettes en 2003 en ville d’Yverdon-LesBains, soit une progression près de 50% par rapport à l’année précédente.
Par ailleurs, 1 propriétaire d’automobile sur 4 a été victime d’un acte de vandalisme
sur son véhicule dans les derniers 3 ans. La statistique policière relève que 414
actes de vandalismes ont été commis à Yverdon-Les-Bains en 2003.
1
Bien que pour les deux sondages DLS (zone pilote et Yverdon) n’aient pas suivi de méthodologie
strictement identique concernant la prévalence de la victimation, la comparaison reste possible sur
l’année précédent le sondage. Pour les vols de bicyclette, moto et de scooter une seule question a été
posée à Yverdon ; en zone pilote, deux questions distinctes ont été posées (pour les cycles et les vols
de motos, scooter respectivement). L’indicateur pour la zone pilote est donc composite.
3
Les cambriolages sont eux aussi très au dessus de la moyenne des zones pilotes.
En 2003, 1 personne sur 10 en ville déclare avoir subi un cambriolage en ville contre
près de 1 personne sur 50 dans les zones pilotes sur 1 année. La statistique
policière fait état d’une augmentation constante des vols par effraction et des vols
simples à Yverdon-Les-Bains ces dernières années: en 2003, plus de 1000 cas ont
été rapportés à la police.
Délits dans la région d'Yverdon, prévalence sur 3 ans
(source: sondage DLS 2004)
35
30
25
20
15
10
5
0
Vol dans la
voiture
Vandalisme
sur voiture
Vol moto,
scooter,
bicyclette
Cambriolage
Vandalisme
habitation
Vol/tentative
de vol sous
menace
Vol de biens
personnels
Ville
13.3
24.6
29.4
17.2
16.4
9.2
15.2
Zone rurale
8.8
17.6
18.5
11.2
7.6
6.4
8.8
Selon la statistique policière CRIPOL, plus des trois quarts de la délinquance dans la
zone sont le fait de 4 types de délits: le vol par effraction ou introduction clandestine,
le vol de cycle, le vol simple et le dommage à la propriété. Selon ces statistiques,
deux fois plus de cycles sont volés en ville d’Yverdon-Les-Bains qu’ailleurs dans la
zone.
Les 4 délits les plus fréquents dans la zone
d’Yverdon-Les-Bains
% l’ensemble de la
% en ville
% en
criminalité
zone
rurale
23.4
22.6
27.0
19.0
21.2
9.4
19.1
19.0
19.4
16.4
16.3
16.6
22.1
20.9
27.6
100%
100%
100%
(source : CRIPOL 2003)
Vol avec effraction ou introduction clandestine
Vol de cycle
Vol simple
Délits contre la propriété
autres
Total
4
Les auteurs des délits
Le trait le plus saillant du profil des auteurs est leur jeunesse. Il est frappant de
constater que 70% environ des délits les plus fréquents (le vol avec effraction ou
introduction clandestine, le vol simple, le vol de cycle et délits contre la propriété)
sont le fait, selon les statistiques de la police, de personnes de moins de 25 ans.
Environ 40% de la délinquance est même due à des auteurs de moins de 18 ans.
Les plus jeunes commettent avant tout des dommages à la propriété, tandis que les
18-24 ans sont responsables surtout de vols par effraction et de vols simples.
L’âge des auteurs de la criminalité en fonction des zones
-18 ans
Entre 18 et 24
25 ans et plus
ans
38.0 %
32.5 %
29.5 %
Zone rurale
41.5 %
Zone urbaine
27.3 %
31.2 %
(source : CRIPOL 2003)
La délinquance routière
Le volume des accidents constatés est resté pratiquement inchangé entre 2001 et
2003. Environ 70% des accidents de la région ont lieu en ville d’Yverdon-Les-Bains.
Alors que le nombre de constats d’accidents avec dégâts matériels est en légère
diminution, on a pu observer une sensible augmentation des accidents avec blessés
depuis 2001.
En 2001, il y a eu respectivement 7.3 accidents avec constat en moyenne pour la
ville d’Yverdon et 8.5 pour la zone rurale d’Yverdon. Le taux d’accidents graves
augmente en milieu rural où l’on circule avec des vitesses plus importantes. Ces
chiffres se situent dans la moyenne constatée dans la zone pilote. Le graphique
suivant présente les valeurs absolues des accidents avec constats dans les deux
zones pour trois années consécutives.
140
120
100
dommages matériels
blessés
80
60
40
20
0
Urbain
2001
Rural
2001
Urbain
2002
Rural
2002
Urbain
2003
(source : statistiques policières 2001-2003)
5
Rural
2003
L’incivilité
A côté de la délinquance et des accidents, le diagnostic retient l’incivilité comme
signal de l’insécurité. Six incivilités ont été retenues pour l’analyse. Les taux de
prévalence pour chacune de ces incivilités sont présentés pour les deux types de
zones dans les tableaux ci-dessous.
Prévalence en fonction des zones et des périodes (sources :
sondage DLS 2004 Yverdon et DLS 2001 zone pilote)
Yverdon
Zone pilote
2001-2003
2003
rural
urbain
Violence à l’école
38.1
41.9
Tapages nocturnes
18.8**
31.2**
Bandes de jeunes
11.2***
24.8***
Problèmes de circulation
22.4
Problèmes de voisinage
Chiens dangereux
rural
2001
urbain
rural
urbain
27.6**
17.4
19.6°
9.6***
20.8***
11.9
13.8°
22.0
20.4
20.8
27.2
22.9
10.0**
19.6**
8.0*
16.0*
10.7
15.2
7.2
6.4
4.4
5.2
4.7
3.6
17.2**
Différence entre zone urbaine et rurale : * p < 0.05 ; ** p < 0.01 ; *** p < 0.001
Différence entre Yverdon (rural/urbain) et zone pilote (rural/urbain) :° p < 0.05
Comme pour la délinquance, les taux de victimation pour les incivilités apparaissent
élevés en région d’Yverdon par comparaison à la zone pilote. Cela est
particulièrement vrai de la violence scolaire mais aussi du phénomène des bandes
de jeunes ainsi que des tapages nocturnes, en particulier en ville d’Yverdon-LesBains. Ici les tapages nocturnes apparaissent comme un problème récurrent avec un
taux d’incidence qui approche les 30% sur l’année 2003. Les autres incivilités,
notamment les incivilités routières, sont dans la moyenne, voire légèrement en
dessous. Toutefois, en milieu rural, l’incivilité routière reste le problème principal, mis
à part la violence scolaire.
Ce qui frappe avant tout est l’ampleur du phénomène de la violence à l’école
rapportée par les parents d’élève. Le phénomène ne semble pas être nouveau. Sur
les trois dernières années, 40% environ des parents d’élève font état de cas de
violence ou racket au sein de l’école de leur(s) enfant(s)2. En comparaison, sur les
derniers cinq ans, moins de 10% des résidents des zones pilotes ont mentionné ce
problème. Nous consacrons à cette question une section plus loin.
2
A noter que la période 2001-2003 concerne à la fois la violence constatée par les parents au sein de
l’école de leurs enfants ainsi que la victimation directe de leurs enfants. La mesure à comparer avec la
zone pilote est constituée par la victimation directe sur un an.
6
Incivilités dans la région d'Yverdon, prévalence sur 3 ans
(source: sondage DLS 2004)
45
40
35
30
25
20
15
10
5
0
Tapages
nocturnes
Problèmes
voisinage
Chiens
dangereux
Problèmes
circulation
Bandes
jeunes
Ville
31.2
19.6
Zone rurale
18.8
10
Violence
école
6.4
22
24.8
41.9
7.2
22.4
11.2
38.1
La violence à l’école
La violence scolaire frappe de plein fouet la région d’Yverdon. Environ 40% des
parents ont constaté des violences ou du racket à l’école de leurs enfants. 1 parent
d’élève sur 5 affirme que son propre enfant a été l’objet de violences ou racket à
l’école. Pour l’année 2003, le taux est triplé par rapport à la zone pilote. L’agression à
répétition est la règle : plus de 50% des victimes le sont plusieurs fois dans l’année.
Signe de la gravité du problème, dans 70% des cas, les parents jugent l’incident
comme étant sérieux ou très sérieux.
Taux de victimation de violence scolaire
Yverdon 2001Yverdon 2003
2003
rural
urbain
rural
urbain
Violence à l’école
38.1%
41.9%
Victimation directe
17.9%
24.2%
13.1%
22.6%
Zone pilote 2001
rural
urbain
6.8%
6.3%
(sources : sondage DLS 2004 et zone pilote 2001)
La plupart du temps, les agressions ont lieu dans l’enceinte de l’école plutôt que sur
le trajet qui mène de la maison à l’école. En effet, selon les sondés, dans 57% des
cas, l’agression s’est déroulée à l’école, dans 30% sur le trajet et dans 13% à la fois
à l’école et sur le trajet.
La politique des établissement scolaires à l’égard du phénomène est jugée
globalement insatisfaisante par les parents: seul un parent sur trois s’estime
satisfait de la gestion de la violence par l’école. Par ailleurs, dans 1 cas sur 2, les
parents d’élève pensent que l’école n’est pas intervenue pour résoudre le problème
ou n’était simplement pas au courant de l’incident.
7
Commentaire : Ne s'agit-il
pas plutôt de 4/10??
Un profil de victime ?
Qui sont les victimes? Un profil se dégage-t-il à partir des données de sondage?
Pour la délinquance, les jeunes apparaissent clairement comme les victimes
principales. La victimisation est en effet la plus forte pour les plus jeunes catégories
d’âge et diminue progressivement (linéairement) ensuite. Ainsi, 71% des 16-19 ans
affirment avoir subi au moins un délit ces derniers trois ans alors qu’ils ne sont « plus
que » 34% pour les 60 ans et plus.
L’analyse des modalités de la victimation par agression permet de préciser que ce
type de délit survient la plupart du temps pendant l’activité de loisir des répondants
(près de 40% des cas).
Autres
Dans parc
Dans centre commercial
Pendant activité de loisir
Sur lieu du travail
Sur chemin de travail
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
(source : sondage DLS 2004)
Pour les victimes d’incivilité, il faut en fait différencier le jugement. L’analyse montre
que les 20-29 ans sont nettement plus exposés que les autres aux problèmes des
bandes de jeunes et de voisinage. En revanche, les 40-49 ans citent en priorité des
problèmes d’incivilités routières et de tapages nocturnes.
La victimation à répétition
Il est assez rare pour une personne d’être sujette au même délit plus d’une fois par
année. Cela étant, la victimation à répétition, ou multivictimation, est une réalité pour
un certain nombre de délits. Dans ce cas de figure, la personne a été victimisée plus
d’une fois par année. La multivictimation est la plus fréquente pour les agressions et
les vols de moto, scooter, bicyclette (cf. tableau ci-dessous). Tous délits confondus, 1
résident de la région d’Yverdon-Les-Bains sur 3 a été sujet en 2003 à plusieurs
délits.
Pourcentage des personnes multivictimisées pour un même
délit en 2003
33.3
31.3
23.7
22.2
13.2
12.0
11.6
Vol de moto, scooter, bicyclette
Vols sous menace
Dommages sur voiture
Vandalisme sur habitation
Cambriolage
Vol dans la voiture
Vol sans violence
(source : sondage DLS 2004)
8
Pour les incivilités, en revanche, la multivictimation est la règle. Le problème à
répétition le plus fréquent est l’incivilité routière : plus de 1 victime sur 3 dit avoir été
victime plus de 20 fois en 2003 d’incivilités routières. Les problèmes des bandes de
jeunes et des tapages nocturnes se répètent également souvent sur une année. 3
personnes sur 4 qui affirment avoir été importunées par des bandes de jeunes l’ont
été plus de trois fois en 2003. La proportion est pratiquement identique pour les
tapages nocturnes.
La reportabilité des délits et incivilités et ses raisons
Une part importante des délits n’est jamais rapportée à la police et ne figure donc
pas dans ses statistiques. Ce constat vaut pour la Suisse entière autant que pour la
région d'Yverdon-les-Bains. Il est convenu d’appeler cela les chiffres gris de la
criminalité ou « criminalité grise ». Celle-ci est en règle générale importante et
voisine les 50%. Les délits les moins rapportés dans la région d’Yverdon-Les-Bains
sont les agressions ainsi que les actes de vandalismes. Le plus faible taux de
dénonciation des actes d’agressions, par rapport aux délits contre les biens,
s’explique en principe par le fait qu'une plainte soulève de nombreuses interrogations
sur le conflit qui a précédé et le rôle joué par les deux protagonistes. Les délits les
plus dénoncés sont les cambriolages et les vols de motocycles. Les taux pour la
région d'Yverdon se comparent d'ailleurs avec ceux obtenus lors du sondage réalisé
en l'an 2000 pour l'ensemble de la Suisse.
Proportion de délits non rapporté (Yverdon 2001-2003, Suisse 1999)
80
60
40
20
0
Vandalisme sur Dommages sur
habitation
voiture
Agression
Vol simple
Ville
69.6
39.5
63.4
50
Campagne
43.8
50
42.1
72.5
68
59.4
59
Suisse
Vol dans la
voiture
Vol de moto,
scooter
Cambriolage
42.9
30
23.3
40
20
25
33.3
31.5
26.9
(Sources : pour la Suisse: M. Killias, Ph. Lamon, C. Clerici, T. Berruex, Tendances de la criminalité en
Suisse de 1984 à 2000, Lausanne : UNIL 2000 ; pour Yverdon : sondage DLS 2004)
Dans leur très grande majorité, les incivilités ne sont pas dénoncées (70%), d’autre
part, une dénonciation semble intervenir uniquement pour les cas jugés sérieux. Les
incivilités les plus dénoncées sont les tapages nocturnes ainsi que les problèmes de
voisinage. En ville, on note que les tapages nocturnes sont dénoncés à la police près
de 1 fois sur 2. Les chiens dangereux (surtout en zone rurale) sont les incivilités les
moins rapportées. Les incivilités routières ne sont pas dénoncées pour une autre
raison : en général, la « preuve » fait défaut à la victime qui, par suite, s’abstient de
dénoncer. Les motifs de la dénonciation varient en fonction du type de délit. En règle
9
générale, la dénonciation à la police se fait pour des raisons d’assurance ou pour
retrouver les biens volés en ce qui concerne les délits contre les biens. Pour les
agressions, les motifs punitif et moral sont invoqués.
Pour les incivilités, les motifs de la dénonciation sont très différents. La dénonciation
à la police est motivée essentiellement dans une perspective de résolution de
problème. Environ 1 fois sur 2, en effet, le motif principal invoqué est « pour éviter
que cela ne se reproduise ».
Taux d'incivilités non dénoncées sur 3 ans
(source: sondage DLS 2004)
100
80
60
40
20
0
Tapages
nocturnes
Problèmes
voisinage
Chiens
dangereux
Problèmes
circulation
Bandes jeunes
Ville
53.6
62.5
76.9
86.5
71.2
Campagne
58.1
60
90.9
70.6
75
Le sentiment d’insécurité
Malgré des taux de délinquance et d’incivilité assez élevés, les résidents de la région
d’Yverdon-Les-Bains ne se sentent pas particulièrement en situation d’insécurité.
79% des répondants se disent en effet très ou assez en sécurité ; dans les zones
pilotes ils étaient 82%.
Pourtant, on observe d’assez fortes variations entre les catégories sociales. Le sexe
est le facteur qui a l’impact le plus fort sur le sentiment d’insécurité. Le tableau
suivant montre que si 92.3% des hommes s’estiment en sécurité dans la région,
cette proportion tombe à 66.8% seulement pour les femmes. Cela tient avant tout au
sentiment de vulnérabilité des femmes face à la délinquance et à certaines situations
d’incivilités (bandes de jeunes). Contrairement aux hommes, elles s’estiment
incapables de se défendre et, dans un contexte de recrudescence de la délinquance,
en situation de forte insécurité.
Sentiment d’insécurité en fonction du sexe
Yverdon (2001-2003)
Suisse (2000)
Homme
Femmes
Homme
Femmes
Assez ou très sécurisé
92.2
66.8
91.7
63.9
Pas ou pas du tout sécurisé
7.8
33.2
8.3
36.1
Total
100%
100%
100%
100%
(Sources : pour la Suisse: M. Killias, Ph. Lamon, C. Clerici, T. Berruex, Tendances de la criminalité en
Suisse de 1984 à 2000, Lausanne : UNIL 2000 ; pour Yverdon : sondage DLS 2004)
10
En ville, le sentiment d’insécurité est moins bon que dans la zone rurale. L’insécurité
subjective augmente d’environ 15% en ville d’Yverdon par rapport au reste de la
région.
En règle générale en Suisse, le sentiment d’insécurité varie avec l’âge de façon
différente selon le sexe. En effet, ce phénomène apparaît également à Yverdon.
Pour les hommes, l'insécurité objective reste stable jusqu'à 40 ans puis augmente
légèrement avec l'âge. Pour les femmes, par contre, une baisse visible se produit
entre 20 et 40 ans. Au delà, leur sentiment d'insécurité continue d'augmenter avec
l'âge dans des proportions supérieurs aux taux précédant la baisse.
Age et sentiment d'insécurité (sondage 2001-2003)
60
50
40
30
20
10
0
16 à 19 ans
20 à 29 ans
30 à 39 ans
40 à 49 ans
50 à 64 ans
Hommes
6.7
Femmes
40
65 à 99 ans
6.7
4.3
10.6
8.5
9.4
40
27.1
8.7
40
56.7
(Source : sondage DLS 2004)
Dans la région d'Yverdon, le sentiment d’insécurité est un baromètre assez fiable du
taux d’incivilités. En effet, les victimes d’incivilités se montrent nettement plus
insécurisées que les autres. Deux incivilités en particulier ont un impact fort sur le
sentiment d’insécurité. Il s’agit des bandes de jeunes et des problèmes de voisinage.
Les actes de vandalisme, vols sous menace et cambriolage font également grimper
le sentiment d’insécurité, mais dans une mesure moindre que les incivilités. Les
quelques chiffres suivants donnent la mesure de la corrélation. On voit par exemple
que 40% des résidents qui déclarent être importunés par des bandes de jeunes se
déclarent également assez ou très insécurisées. En d’autres termes, le sentiment
d’insécurité double pour ces personnes.
Taux d’insécurité (assez ou très insécurisé) pour les victimes de
Bandes de jeunes
Problèmes de voisinage
Vandalisme sur habitation
Agressions
Cambriolage
Taux moyen
41.1%
32.4%
31.7%
30.8%
26.8%
21.0%
(source : sondage DLS 2004)
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En résumé, le profil typique d’une personne insécurisée dans la région d’Yverdon,
est double. Il s’agit, d'une part, d’une femme, jeune, qui est victime de délits et
d’incivilités et qui vit en ville (insécurité basée sur une victimisation objective); d'autre
part d'une femme, âgée, résidant la ville et peu victimisée (insécurité avant tout
subjective).
La police : quelle image ?
En préambule, il y a lieu de préciser que, d’une part, l’activité de la police a fortement
augmenté depuis 2002 (essentiellement en ville d’Yverdon) et, d’autre part, qu’elle
s’est caractérisée par une réforme importante. L’analyse du Central d’Engagement
(CET) permet d’observer qu’en ville d’Yverdon le nombre d’interventions a
pratiquement triplé en 2002 par rapport à 2001. Il est en effet passé de 1226
interventions en 2001 à 3307 en 2002 et 2934 en 2003. Cela s’explique avant tout
par le surcroît d’activités lié à Expo 02 ainsi que le rapatriement du central local
d’engagement au CET cantonal. Par ailleurs, l’agglomération d’Yverdon-Les-Bains a
intégré les éléments principaux d’une sécurité de proximité dans le courant 2003, ce
qui s’est traduit notamment par une présence visible dans les quartiers plus marquée
que précédemment.
La réforme semble avoir porté ses fruits en ce qui concerne l’image de la police. Le
travail de la police dans la région est jugé bon 3 fois sur 4. En effet, 73.4% des
personnes ayant subi un délit se disent satisfaites du traitement de leur affaire par la
police. Ce taux de satisfaction se situe dans la moyenne constatée dans les zones
pilotes. Pour les incivilités, cette proportion est quasiment identique (72.5%). Ce
dernier chiffre est nettement supérieur à la moyenne constatée dans les zones
pilotes (60% seulement de satisfaits). Il n’est pas exclu que ce bon score s’explique
par les premiers pas de la police de proximité effectués dans la région en 2003.
Le taux de satisfaction baisse sensiblement en ville. Il est également plus bas pour
les tranches d’âge les plus insécurisées, à savoir les 16-29 ans, les personnes âgées
et les femmes.
Sur l’ensemble de la région, c’est le traitement du problème des bandes de jeunes
qui marque le pas. Le taux d’insatisfaits grimpe pour ce cas à 36.4%. Les agressions
ainsi que les problèmes de circulation ont également de moins bons scores de
satisfaction, respectivement 31.3% et 30.8% pour la région d’Yverdon.
Les raisons de l’insatisfaction résident invariablement dans le sentiment que la police
n’en fait pas assez et qu’elle minimise le problème. Cela est surtout vrai pour les
incivilités. Tout en gardant à l’esprit que les taux de satisfaction sont en général
assez élevés, les répondants en ville manifestent ainsi indirectement une volonté
d’intensification des prestations policières pour les incivilités en priorité et appellent
de leurs vœux une résolution en profondeur de ces problèmes.
Quelles priorités pour la police ? La perspective des résidents
Au choix, les résidents d’Yverdon préfèrent de loin la rapidité d’intervention et la
patrouille pédestre à la présence d’un poste de police local. Contrairement
cependant aux résidents de la zone pilote de Police 2000 qui accordaient une nette
préférence à l’intervention rapide sur tout autre type de prestation, les résidents de la
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région d’Yverdon, et ceci en ville comme dans la zone rurale, désirent un équilibre
judicieux entre la rapidité d’intervention et la présence pédestre.
Les priorités des résidents de la région d’Yverdon 2003
(sources : sondage DLS 2004 et zone pilote 2001)
Rapidité d’intervention
Patrouille pédestre
Poste de police local
Ne sait pas/sans réponse
total
Priorités des résidents
de la zone pilote 2001
% de première réponse
47.0
44.8
4.4
3.6
100%
60.6***
30.2***
6.7
2.3
100%
Différence entre Yverdon (rural/urbain) et zone pilote (rural/urbain) :*** p < 0.001
Une analyse plus fouillée de ce résultat révèle que ce sont les personnes les plus
insécurisées qui accordent leur préférence à la présence policière pédestre : il s’agit
encore une fois des plus jeunes. La préférence de la catégorie d’âge la plus
sécurisée, à savoir les 30-49 ans, va clairement à l’intervention rapide. En ville, les
femmes accordent une nette préférence à la patrouille pédestre (49%) par rapport à
la rapidité d’intervention (46%) et le poste de police (5%).
Pour cerner les priorités des résidents de la région d’Yverdon dans une perspective
globale, l’enquête leur a demandé d’indiquer leurs priorités sur la base d’une liste
(fermée) des champs de problèmes de proximité. Les problèmes jugés prioritaires
par les résidents d’Yverdon sont les suivants :
Les problèmes de proximité prioritaires selon les résidents
de la région d’Yverdon
% de première réponse
Le problème de la drogue
Le racket à l’école
La délinquance juvénile
Bandes de jeunes
Problèmes de circulation
Tapages nocturnes
Chiens dangereux
Problèmes de voisinage
Graffitis
Total
30.0
20.2
20.0
12.2
7.0
4.2
4.0
1.2
1.2
100%
(source : sondage DLS 2004)
Dans le « quatuor » de problèmes de tête, selon l’enquête, on trouve la drogue, le
racket à l’école, la délinquance juvénile et le phénomène de bandes de jeunes. Au
moins 3 des 4 premières citations s’articulent clairement autour du problème des
jeunes, un problème qui, manifestement, inquiète et préoccupe fortement les
résidents de la région d’Yverdon-les-Bains. Ensuite, mais assez loin derrière, vient le
problème de l’incivilité routière. En queue de peloton, on trouve les tapages
nocturnes, chiens dangereux, problèmes de voisinage et graffitis. Cette échelle de
priorités, qui ne varie pratiquement pas entre la ville et la zone rurale, donne une
13
bonne mesure des attentes et des problèmes identifiés par les résidents de la région
d’Yverdon en matière de sécurité de proximité et de résolution de problème.
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Recommandations
Le problème principal, prioritaire aux yeux des résidents de la région d’Yverdon, est
celui de la délinquance et l’incivilité juvéniles. Les jeunes sont pour ainsi dire des
deux côtés du problème : ils en sont les auteurs, avec une forte délinquance
d'appropriation, et les victimes principales. Les recommandations pour la région
s’articulent en priorité autour de ce constat.
Recommandation 1 : La violence à l’école : un champ d’action prioritaire pour
une action concertée
La violence dans l’enceinte scolaire et, dans une moindre mesure, à l’extérieur de
l’école dans la région d’Yverdon-Les-Bains est très supérieure à la moyenne
constatée dans les zones pilotes. Les parents d’élève sont très préoccupés par cette
violence, qu’ils jugent en majeure partie comme étant sérieuse, voire très sérieuse, et
se déclarent largement insatisfaits de son traitement par les établissements
scolaires. La résolution du problème doit devenir une priorité. Elle exige une action
concertée entre partenaires sociaux (école, police, parents, etc.) et un plan d’action
devrait être rapidement mis en place.
Recommandation 2 : Réduire les situations d’insécurité chez les jeunes par
présence policière visible accrue (notamment en ville et le soir)
A Yverdon-Les-Bains, l’insécurité est la plus forte chez les jeunes. Même si ce
phénomène n’est pas un fait cantonné à Yverdon il semble en revanche
particulièrement prononcé. Les jeunes femmes, particulièrement vulnérables aux
agressions et aux incivilités, se sentent en situation de forte insécurité après 22
heures. 1 jeune femme sur 2 entre 16 et 29 ans se dit en situation d’insécurité. Les
plus jeunes catégories d’âge sont sujettes à des taux élevés de délinquance (vols,
agressions), notamment pendant leurs loisirs, et se disent fortement importunées par
le phénomène de bandes de jeunes. La présence policière doit permettre de rassurer
ces segments de population les plus vulnérables. Ce sont précisément les plus
jeunes catégories d’âge et les femmes qui présentent les moins bons taux de
satisfaction face au traitement policier de leur cas et qui appellent de leurs voeux une
présence policière pédestre visible accrue. Cette présence visible est une priorité
pour l’ensemble de la région.
Recommandation 3 : analyser et traiter le phénomène de bande
Le phénomène de bande, identifié par le DLS, doit être analysé. La notion reste
assez floue et, bien que l’expression « bande de jeunes » semble avoir trouvé un
écho auprès des résidents d’Yverdon, son phénomène doit être étudié pour être
clairement cerné. Les bénéfices du traitement du problème sont potentiellement
nombreux : impact évident sur la qualité de vie des résidents de la ville d’Yverdon,
meilleure image de la police, diminution du sentiment d’insécurité, éventuellement
diminution de différents actes de petite délinquance tels que les vols de cycle et les
actes de vandalisme qui restent comparativement élevés dans la zone. Une réflexion
avec différents acteurs – juges, travailleurs sociaux, lieux de formation - doit avoir
lieu à la fois pour mieux cerner le problème, en étudier les causes, et offrir des
solutions pour éviter de créer l’illusion que la seule présence policière résoudra le
problème. Celle-ci doit s’insérer dans un partenariat à long terme pour que ses effets
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ne soient pas simplement ponctuels ou qu’ils ne déplacent pas simplement le
problème.
Recommandation 4 : Traiter l’incivilité par des méthodes de résolution de
problème
Les résidents de la région d’Yverdon-Les-Bains semblent accueillir les premiers pas
de la sécurité de proximité avec intérêt. Le bon niveau de satisfaction face au
traitement policier des incivilités peut être interprété comme encouragement à
intensifier ce type de prestation. La présence policière visible sous forme de
patrouilles pédestres adaptée aux heures et endroits à risque est, on l’a dit,
plébiscitée par les résidents de la région. En parallèle à ces efforts, les résidents
expriment des attentes assez claires en faveur d’une véritable résolution du
problème des incivilités qui ont une forte tendance à se répéter. La multivictimation
est la règle pour l’incivilité et les victimes affirment rapporter le problème à la police
afin que celui-ci cesse de se répéter. Cela confirme la validité d’une formation des
policiers de proximité à la résolution de problème et son application sur le terrain doit
être considéré comme un axe stratégique de la nouvelle sécurité de proximité.
Recommandation 5: Agir sur les incivilités routières
L’incivilité routière est un problème important en ville comme en zone rurale. Plus de
1 personne sur 4 se dit touchée par le phénomène. La fréquence de la victimation
répétée - plus de 20 x par année – pour plus d’une personne sur trois atteste de
l’ampleur du problème. L’incivilité routière, si elle reste peu dénoncée à la police,
semble-t-il avant tout parce qu’elle ne peut pas être prouvée, s’établit assez loin
devant d’autres incivilités, comme le bruit, dans la liste des priorités des résidents de
la région.
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