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Modulation pharmacologique du stress oxydatif
Pharmacological control of oxidative stress
 E. Descamps*, P. Gelé*, R. Bordet*, J. Vamecq*
 RÉSUMÉ
Compte tenu de la complexité et de la variété des voies de
l’oxydation, la modulation pharmacologique du stress oxydatif englobe de nombreuses stratégies. D’une manière non
exhaustive, ces stratégies incluent notamment la prévention
de l’émergence d’espèces oxydantes (chélateurs de métaux
et inhibiteurs des activités enzymatiques génératrices d’espèces oxydantes), une meilleure efficacité de leur piégeage
(composés dits antioxydants), une “métabolisation” cellulaire
accrue (composés augmentant l’activité des défenses cellulaires antioxydantes) ou pharmacochimique accrue également
(composés mimant une activité antioxydante enzymatique,
comme l’ebselen) . En parallèle, toute une série de cibles
moléculaires relatives aux voies de signalisation impliquées
dans le contrôle redox cellulaire offrent une alternative ou un
complément à la modulation du stress oxydatif. Un accent
tout particulier est mis sur le potentiel antioxydant/antiinflammatoire du PPARα, un récepteur nucléaire activé par
la famille des fibrates. L’efficacité et les limites de l’approche
antioxydante dans le cadre de la thérapeutique des désordres
neurodégénératifs et des maladies cardiovasculaires sont
développées tout au long de cet article.
Mots-clés : Antioxydants - Espèces oxydantes - Récepteurs nucléaires - Protection cardiovasculaire - PPAR Flavones - Caroténoïdes - Vitamines - Neuroprotection NADPH oxydase - Fibrates - Radicaux libres.
L
e French paradox fait ressortir les bienfaits du régime
alimentaire de type méditerranéen chez des individus
qui, malgré la présence de facteurs de risque cardiovasculaires, semblent présenter une incidence plus faible d’événements cardiovasculaires que ceux n’ayant pas ce mode de vie (1).
Cet effet “protecteur” est habituellement attribué au pouvoir
antioxydant, supposé ou réel, d’aliments comme l’huile d’olive,
les fruits et légumes, voire le vin, caractérisés par la présence
dans leur composition de substances antioxydantes, notamment les polyphénols, par ailleurs retrouvés dans différentes
* Inserm UNIV 045131 (JV), EA 1046 (JV, ED, PD, RB), laboratoire de pharmacologie, faculté de
médecine, université de Lille-2, 59045 Lille Cedex.
 SUMMARY
As a consequence of the complexity and multiplicity of oxidative pathways, the pharmacological control of oxidative stress
avers to cover a large number of strategies. These strategies
may overlap and they may include prevention of oxidant species production (chelation of metals, inhibition of oxidant
species-generating activities), improvement of free radicals
scavengers (antioxidant compounds), of natural (stimulators
of antioxidant enzymes) and compound-catalysed (enzyme
mimics, e.g. ebselen) cell defence mechanisms. On the other
hand, a large number of additional pharmacological targets
may be found in cell signaling pathways physiologically involved in cell redox homeostasis. A special emphasis is here made
on the antioxidant/anti-inflammatory properties of PPARα
activation and agonists such as fibrates, among which fenofibrate. The benefits and limits of the antioxidant approach
within the scope of the therapy of human disorders are developed throughout this article.
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
Keywords: Antioxidants - Oxidant species - Nuclear receptors - Cardiovascular protection - PPAR - Flavones - Carotenoids - Vitamins - Neuroprotection - NADPH oxidase Fibrates - Free radicals.
variétés de boissons, incluant thé et whisky. Cette association
d’un apport nutritionnel riche en antioxydants et d’une protection cardiovasculaire souligne les potentialités thérapeutiques
d’une approche antioxydante. D’autre part, le rôle joué par les
espèces oxydantes dans l’extension des phénomènes de nécrose
ou dans l’induction de l’apoptose dans des pathologies aiguës
d’origine vasculaire (infarctus myocardique ou cérébral) ou
dans des maladies neurodégénératives (maladie d’Alzheimer
ou maladie de Parkinson) souligne le bénéfice thérapeutique
que l’on pourrait tirer, dans ces cas bien précis, d’une stratégie
pharmacologique dévolue à “neutraliser” l’effet délétère d’un
excès de formation des espèces oxydantes.
Si les bénéfices d’une approche antioxydante apparaissent en
théorie largement acquis, il n’en va pas nécessairement de même
en pratique. Une première raison en demeure le potentiel prooxydant des agents antioxydants, c’est-à-dire que ces molécules
dotées de propriétés antioxydantes peuvent aussi, dans certaines
circonstances, faire preuve d’une activité pro-oxydante. Une
La Lettre du Pharmacologue - vol. 20 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
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Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
deuxième raison en est peut-être que les cibles pharmacologiquement visées par cette approche sont des molécules qui
remplissent physiologiquement plusieurs fonctions utiles à la
cellule. Comme présenté dans notre précédente mini-revue (2),
une des avancées scientifiques importantes de cette dernière
décennie est la démonstration que, outre leur rôle délétère
établi depuis de nombreuses années, les espèces oxydantes
sont aussi des messagers inter- et/ou intracellulaires impliqués
dans de nombreuses voies de signalisation et de régulation,
dans la modulation de l’expression de gènes et dans le contrôle
cellulaire de l’homéostasie redox. Il n’est pas établi à l’heure
actuelle que le fait d’interférer à l’aveugle par l’administration
systématique d’antioxydants avec ces voies utiles à la vie de
la cellule soit vraiment sans danger. À ce propos, l’utilisation
d’agents antioxydants peut empêcher le préconditionnement
cérébral (3), une observation montrant que ces agents peuvent
manifester des effets non désirés.
L’INHIBITION DE LA FORMATION DES ESPÈCES
OXYDANTES
La modulation du stress oxydatif peut viser la formation des
espèces oxydantes, leur neutralisation ou leur destruction. Il est
théoriquement plus judicieux de juguler d’abord la production
incontrôlée des espèces oxydantes que de les laisser se former
avant de les neutraliser. Assez curieusement, cette première
approche, plus indiquée, est souvent mise à l’arrière-plan dans
la démarche thérapeutique et, en pratique, la stratégie thérapeutique antioxydante évoque plus souvent l’utilisation d’agents
neutralisateurs de radicaux libres (agents antioxydants, molécules mimant l’activité SOD en glutathion péroxydase, etc.) que
celle d’agents empêchant leur formation.
LES CHÉLATEURS DE MÉTAUX
Les métaux de transition dans leur état réduit peuvent participer
à la réaction de Fenton. Toute stratégie qui élimine ou masque
le métal en question a une valeur potentiellement antioxydante.
Ce rôle est naturellement rempli par des protéines telles que
la transferrine (qui lie le fer) et la céruloplasmine (qui lie le
cuivre). Certains métabolites comme le citrate peuvent aussi
fixer les métaux.
Les chélateurs de métaux emprisonnent un des acteurs indispensables à la réaction de Fenton, à savoir le métal, notamment
Fe2+ ou Fe3+ (précurseur du Fe2+ par réduction). Le complexe
“chélateur-métal” peut encore servir d’intervenant dans la réaction de Fenton, mais lorsque la complexation est associée à
une élimination du complexe hors de l’organisme (élimination
urinaire ou digestive), il en résulte une diminution ou une disparition progressive du métal pouvant être complexé. Cette mesure
conduit à réduire la contribution de la réaction de Fenton à la
formation d’espèces hautement toxiques telles que le radical
hydroxyle ou encore les radicaux alkoxyles.
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Divers chélateurs synthétiques de métaux ont ainsi démontré
leur efficacité dans des modèles de stress oxydatif. Citons la
desferrioxamine, le prototype des chélateurs du fer. D’autres
molécules non toxiques peuvent chélater les métaux : l’HBED
(hydroxyphényl éthylène diamine diacétate), un analogue de
l’EDTA (éthylène diamine tétra-acétate), où quatre phénols
remplacent les groupements carboxyliques, le PIH (pyridoxal
isonicotinyl hydrazone), la disferrithiocine et les hydroxypyridones, parmi lesquelles la défériprone.
La dexrazoxane est une bisdioxopiperazine qui est dotée de
propriétés à la fois chélatrices du fer et antioxydantes. Cette
double caractéristique en fait, depuis quelques années, un
composé recommandé pour son utilisation clinique dans la
cardiotoxicité induite par les agents anticancéreux de type
anthracycline. Son mode d’action repose principalement sur
sa capacité à mobiliser le fer du complexe “anthracycline-fer”
et vraisemblablement à inhiber l’activation des anthracyclines
par la NADH déshydrogénase mitochondriale (4). Ce faisant, la
production de l’anion radical superoxyde induite par les anthracyclines est relativement bien contrôlée par la dexrazoxane, et
cette activité antioxydante réduit, voire efface, la cardiotoxicité
des anthracyclines (toxicité de l’adriamycine, par exemple). Cet
effet thérapeutique bénéfique de la dexrazoxane représente son
indication première en clinique humaine.
L’utilisation première des chélateurs des métaux est, bien sûr,
le traitement des surcharges en métaux. Néanmoins, l’impact
antioxydant de cette stratégie médicamenteuse n’est pas négligeable, et en fait une option thérapeutique dans la toxicité cardiaque
aux anthracyclines, mais aussi dans d’autres conditions physiopathologiques associées au stress oxydatif, telles que l’arthrite
rhumatoïde, la reperfusion tissulaire, la toxicité pulmonaire au
paraquat, ou encore la sclérose multiple (5). D’autre part, un
certain nombre d’agents antioxydants développés plus loin dans
ce numéro peuvent aussi complexer les métaux (fer ou cuivre,
notamment), comme les flavonoïdes ou encore l’acide lipoïque.
L’INHIBITION DES SITES PHYSIOLOGIQUES
GÉNÉRATEURS D’ESPÈCES OXYDANTES
Différents sites biologiques sont impliqués dans la formation
d’espèces oxydantes. Ces sites ont une contribution faible à la
production d’espèces oxydantes en conditions basales. Il s’agit
notamment de la chaîne respiratoire, du cytochrome P450, de la
xanthine déshydrogénase, des NAD(P)H oxydases phagocytaire
et non phagocytaire. Dans des états physiologiques d’activation
ou certaines conditions physiopathologiques, les sites précités
peuvent manifester une activité quantitativement et/ou qualitativement anormale qui peut générer un stress oxydatif. Le
métabolisme de l’acide arachidonique par le biais d’espèces
oxydantes produites par la voie de la cyclo-oxygénase et des
lipo-oxygénases peut aussi entrer dans ce cadre. Il sera abordé
séparément au moment de la présentation des voies de signalisation cellulaire et de l’expression génique comme cibles de
la thérapie antioxydante.
La Lettre du Pharmacologue - vol. 20 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
Chaîne respiratoire
L’inhibition de la chaîne respiratoire mitochondriale n’est pas une
option a priori recommandée pour inhiber la formation du radical
anion superoxyde formé par la mitochondrie, tout simplement
parce qu’elle ajouterait un stress bioénergétique et métabolique
suffisant à lui seul pour induire la mort cellulaire. En revanche, il
est judicieux de ne pas surcharger la chaîne respiratoire, notamment au niveau de ses complexes I et II, et d’éviter dès lors l’apport
de substrats bio-énergétiques utilisés par la mitochondrie ou la
formation excessive de NADH cellulaire qui serait redirigé par
les systèmes de navette redox vers la mitochondrie.
Membrane
cellulaire
Espace Cytoplasme
extracellulaire
O
Rac
p40
gp91 p67
O2
NAD(P)H oxydase phagocytaire
La NAD(P)H oxydase des phagocytes peut, elle, représenter
une cible moléculaire cohérente. Physiologiquement, cette
enzyme n’est pas en permanence activée. Son inhibition en
dehors d’une attaque infectieuse est donc a priori tolérable sur
le plan physiologique. À l’inverse, dans le cadre d’un contexte
infectieux et subséquemment à la phagocytose par les cellules
macrophagiques, ces dernières exposent l’élément phagocyté
à une véritable explosion oxydative (6). Ce stress oxydatif est
initié par la formation massive d’anion radical superoxyde catalysée par une NAD(P)H oxydase membranaire. La stratégie
qui amène à délocaliser ce stress oxydatif de son site de formation à son site d’action, c’est-à-dire directement au contact
de l’élément phagocyté, a été précédemment présentée (2) et
implique notamment la sécrétion de myéloperoxydase dans la
fente phagocytaire séparant la cellule hôte (macrophage) de l’envahisseur (par exemple, un micro-organisme). Ce stress oxydatif
est physiologiquement utile, puisqu’il permet aux leucocytes et
autres cellules macrophagiques d’éliminer des agents pathogènes.
Néanmoins, son intervention exagérée ou inappropriée dans
des conditions par exemple de recrutement des leucocytes suite
à une insulte tissulaire (comme l’ischémie/reperfusion) peut
aggraver l’étendue des lésions par le surajout d’un stress oxydatif. Pouvoir, dans ces conditions, bloquer le recrutement des
cellules inflammatoires (par exemple, en bloquant la sécrétion
ou l’expression de protéines endothéliales jouant un rôle chimiotactique ou d’ancrage), bloquer la stimulation de ces cellules
inflammatoires et/ou inhiber la NAD(P)H oxydase pourrait
éviter le surajout d’un stress oxydatif et l’extension subséquente
de lésions cellulaires ou tissulaires. L’inhibition de la NAD(P)H
oxydase macrophagique peut se concevoir de deux manières
: soit par inhibition directe de l’activité enzymatique, soit par
inhibition de l’activation de la NAD(P)H oxydase. L’activation de
la NAD(P)H oxydase est un phénomène relativement complexe
(figure 1). Elle offre plusieurs cibles moléculaires potentielles à
la modulation du stress oxydatif, et plusieurs composés expérimentaux présentés peuvent déjà interférer avec l’activation de
la NAD(P)H oxydase.
La NAD(P)H oxydase phagocytaire est une enzyme composée
de sous-unités multiples d’origine membranaire et cytosolique,
dont cinq constituent le noyau dur de l’enzyme (7). Deux de
ces cinq sous-unités sont représentées par les sous-unités p22
et gp91 et sont présentes dans les membranes de granules de
NAD(P)H
oxydase
active
GTP
.2
p22 p47
Rap1
Membrane
cellulaire
Espace Cytoplasme
extracellulaire
P
P
GDP
Rac
P
P
P
Les 5 sous-unités
de base de la NAD(P)H
oxydase active
ACTIVATION
Rho
GDI
gp91
O2
p22
Rap1
p40
p67
p47
Figure 1. Activation de la NAD(P)H oxydase phagocytaire.
L’activation est nécessaire à la formation d’une NAD(P)H oxydase fonctionnelle
capable de former l’anion radical superoxyde (O2λ-). L’électron nécessaire à
la réduction de l’oxygène moléculaire (O2) en radical anion superoxyde
est fourni par le groupement prosthétique flavinique du cytochrome b558
(hétérodimère formé de gp91 et p22) [7].
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
sécrétion qui fusionnent avec la membrane cellulaire lors de la
phagocytose. Leur association constitue donc un hétérodimère.
Cet hétérodimère correspond à une flavohémoprotéine connue
aussi sous le nom de cytochrome b558. Les trois autres des cinq
sous-unités sont les sous-unités p40, p47 et p67 et sont localisées
dans le cytoplasme (7). L’activation de la NAD(P)H oxydase,
c’est-à-dire la formation du complexe associant l’ensemble des
cinq sous-unités, survient lorsque les macrophages sont stimulés. La sous-unité p47 est alors hautement phosphorylée par
des protéines kinases, fusionnant avec les autres sous-unités
cytoplasmiques (p40 et p67), et l’intégralité de ce complexe est
alors transférée (“transloquée”) vers la membrane cellulaire,
où il s’associe à l’hétérodimère flavohémoprotéique, ou cytochrome b558. Cette association des cinq sous-unités au niveau de
la membrane cellulaire représente la formation d’une NAD(P)H
oxydase active (7). Son activation complète requiert deux petites
GTP-binding proteins apparentées au facteur Ras. Il s’agit de
Rap1 et Rac1 [souris] (ou Rac2 [homme]) (7). Avant l’activation
du phagocyte, le facteur Rac est localisé dans le cytoplasme,
formant un complexe avec Rho GDI (Rho GDP dissociation
inhibitor). Une fois lié au GTP, le facteur Rac rejoint, lors de
l’activation de macrophages, la membrane, indépendamment du
complexe cytosolique p40/p47/p67 mentionné plus haut. Quant
au facteur Rap1, il s’associe physiquement de manière spontanée
au cytochrome b558, mais perd cette faculté de liaison une fois
phosphorylé (par la protéine kinase A, par exemple) [7].
Les composés expérimentaux pouvant interférer avec l’activation
de la NAD(P)H oxydase incluent notamment le SB203580, un
inhibiteur de la p38 MAPK (mitogen activated protein kinase) qui
permet de bloquer complètement la translocation de Rac et partiellement celle de p47 ; la wortmanine et le composé LY294002,
des inhibiteurs de la PI3K qui bloquent aussi l’activation de la p38
MAPK, mais également celle du facteur Rac (le composé SB203580
ne bloque pas la PI3K) ; le composé PD98059, un inhibiteur
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Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
spécifique de la ERK kinase qui inhibe complètement certaines
phosphorylations de p47 et partiellement d’autres, et le composé
GF 109203X, un inhibiteur de la PKC (protéine kinase C) [7].
Il est à noter que l’utilisation de ces composés a pu montrer que
l’axe de signalisation PI3K/p38 MAPK/Rac était impliqué dans
l’activation de la NAD(P)H oxydase. Ces composés atténuent
en fait la phagocytose ; à l’inverse, le GF 109203X stimule la
phagocytose. Toutefois, ce dernier composé, comme mentionné
plus haut, est aussi capable de diminuer la formation de l’anion
radical superoxyde en inhibant l’activation de la NAD(P)H oxydase. Ces données suggèrent que p38 MAPK et PI3K modulent
à la fois la phagocytose et l’activation de la NAD(P)H oxydase,
alors que la PKC interviendrait seulement dans la régulation de
l’activation de la NAD(P)H oxydase (7). Il est donc pharmacologiquement envisageable de disposer d’agents pouvant bloquer
ou réduire la production de l’anion radical superoxyde par des
cellules macrophagiques, même si celles-ci sont activées. En
d’autres termes, même si, dans les suites d’une insulte tissulaire,
le recrutement et l’activation de cellules inflammatoires sont
déjà bien engagés, il est encore possible de contrer la formation
excessive du radical anion superoxyde par ces cellules.
NAD(P)H oxydase non phagocytaire
La membrane plasmique, tout comme la membrane du réticulum
endoplasmique de cellules non phagocytaires, peut aussi catalyser une activité NAD(P)H oxydase. Il s’agit ici de la NAD(P)H
oxydase impliquée dans le sensing de l’oxygène et dans la réponse
d’adaptation cellulaire subséquente (2). L’activité de cette protéine
est surtout dépendante du NAD(P)H et présenterait des ressemblances structurales avec la NAD(P)H oxydase phagocytaire (8).
Il est difficile à l’heure actuelle d’évaluer l’impact d’une inhibition
de la NAD(P)H oxydase non phagocytaire en termes de bénéfice
thérapeutique, car, si une activité antioxydante peut être apportée
par une telle stratégie, celle-ci supprimerait dans le même temps
la fonction physiologique remplie par cette protéine.
Xanthine déshydrogénase
La xanthine déshydrogénase est une enzyme qui catalyse chez
l’homme les étapes terminales du catabolisme des bases puriques,
à savoir la conversion de l’hypoxanthine en xanthine et celle de
la xanthine en acide urique. La xanthine déshydrogénase est
une oxydoréductase qui utilise normalement le NAD+ comme
cofacteur et le réduit lors de l’oxydation de ses substrats. Dans
certaines conditions physiopathologiques, cette oxydoréductase
peut être soumise à un début de digestion protéasique ou d’altération oxydative, et peut produire le radical anion superoxyde et/ou
du peroxyde d’hydrogène lors de l’oxydation de l’hypoxanthine et
de la xanthine (9). La xanthine déshydrogénase est alors qualifiée
de xanthine oxydase. Cette génération d’espèces oxydantes par la
xanthine oxydase a été montrée dans plusieurs modèles expérimentaux comme jouant un rôle crucial dans la genèse du stress
oxydatif et la sévérité des lésions observées (10). En conséquence
logique, l’allopurinol, un inhibiteur de la xanthine oxydase, peut
endiguer le stress oxydatif caractérisant ces modèles, réduisant
ainsi la taille et la survenue des lésions.
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Cytochrome P450
Les microsomes et leurs cytochromes, notamment le cytochrome P450, peuvent jouer un rôle important dans la genèse
du stress oxydatif suite à l’administration de certains composés,
mais aussi au décours de la reperfusion tissulaire. En conséquence logique, les inhibiteurs du cytochrome P450 peuvent
être efficaces pour contrecarrer le stress oxydatif associé à
certaines conditions physiopathologiques (11).
Autres (NOS)
Les NO synthases catalysent les deux étapes permettant la
synthèse de NO à partir d’arginine, à savoir la conversion de
l’arginine en ω-hydroxyarginine et l’oxydation de cette dernière en citrulline et NO. Dans certaines conditions, la NO
synthase peut aussi produire le radical anion superoxyde, voire
le peroxyde d’hydrogène (12), le premier pouvant par ailleurs
se combiner au NO pour former le peroxynitrite, très réactif
et hautement toxique pour la cellule. Cette activité pro-oxydante de la NO synthase peut être inhibée par des composés
qui vont dès lors manifester une activité antioxydante. Cette
activité antioxydante, donc protectrice, des inhibiteurs de la
NO synthase (comme la N-nitro-L-arginine) a été montrée dans
différents modèles (13). À remarquer que des donneurs de NO
ou que des molécules pouvant augmenter le taux cellulaire de
NO peuvent parfois offrir une protection dans des modèles
associés à la genèse d’un stress oxydatif (14). La production
de NO doit rester relativement limitée, les augmentations
brusques et importantes de NO comme celles caractérisant
l’activation oxydative des macrophages étant associées à l’inverse à une aggravation du stress oxydatif. Ces conditions
sont aussi connues comme étant associées à l’activation de la
NAD(P)H oxydase phagocytaire (voir ci-dessus).
LE PIÉGEAGE DES ESPÈCES OXYDANTES
Le piégeage des espèces oxydantes est un concept qui souligne que le potentiel oxydant d’un composé peut être piégé.
En fait, l’agent antioxydant ne piège pas vraiment une espèce
oxydante : il la réduit en un composé par définition moins
oxydant et en pratique plus stable. Il existe divers composés antioxydants naturels ou synthétiques. Les antioxydants
naturels incluent diverses vitamines (vitamines A, C et E), des
composés pouvant être synthétisés par les cellules animales
(glutathion, mélatonine, acide urique, créatine, ubiquinone,
acide lipoïque) ou d’origine végétale apportés par l’alimentation
(flavones, resvératrol et autres polyphénols, caroténoïdes/
lycopène). Les antioxydants synthétiques comprennent des
composés antioxydants classiques (N-acétylcystéine, lazaroïdes, flavones et chalcones de synthèse, stobadine) et d’autres
composés dotés d’activités catalytiques de type enzymatique
(ebselen mimant l’activité glutathion peroxydase, complexes
synthétiques liant le manganèse mimant l’activité superoxyde
dismutase ou catalase).
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COMPOSÉS ANTIOXYDANTS NATURELS
Vitamines E et C
Les vitamines E et C représentent des composés antioxydants (15) étudiés depuis très longtemps. Ces vitamines sont
complémentaires, occupant des sites cellulaires distincts en
relation avec leur solubilité respective dans les milieux lipidiques et aqueux. De plus, elles peuvent interagir de manière
synergique.
● La vitamine E, connue aussi sous le nom d’α-tocophérol,
est un composé lipophile monophénolique et un antioxydant
puissant, piégeant les radicaux libres. Le radical libre formé dans
le milieu vient arracher un proton sur la vitamine E, générant
ainsi le radical tocophéryle et le composé neutralisé correspondant. Le groupe hydroxyle de cette molécule peut donner un
proton pour saturer, et donc “détoxiquer”, l’électron célibataire
d’un radical libre. Quand le radical avec lequel cette vitamine
réagit initialement est issu de l’attaque radicalaire des lipides, la
vitamine E joue alors le rôle de “terminateur” ou “briseur” de la
propagation des réactions en chaîne caractérisant la peroxydation lipidique des membranes biologiques. Ce potentiel antioxydant de la vitamine E explique son rôle protecteur vis-à-vis des
membranes biologiques.
 La vitamine C, ou acide ascorbique, existe physiologiquement sous la forme de l’anion ascorbate. Comme dans le cas
de la vitamine E, un groupe hydroxyle de cette molécule peut
donner un proton pour saturer, et donc “détoxiquer”, l’électron célibataire d’un radical libre. Le radical ascorbyle est aussi
stabilisé par délocalisation électronique. De plus, il peut être
ultérieurement stabilisé par l’oxydation du radical ascorbyle
en acide ascorbique dit oxydé ou déhydroascorbate. L’acide
ascorbique a en fait un large spectre d’activité antioxydante
réduisant différentes espèces oxydantes incluant notamment
l’anion superoxyde ou le radical hydroxyle. L’acide ascorbique
peut d’autre part régénérer la vitamine E (α-tocophérol) à partir
du radical α-tocophéryle. Cette réaction participe au recyclage
de la vitamine E sous sa forme réduite, c’est-à-dire sous la forme
lui permettant d’exercer son activité antioxydante antiradicalaire
vis-à-vis notamment de la peroxydation lipidique.
Caroténoïdes et lycopènes
Les caroténoïdes principalement ingérés incluent l’α- et le βcarotène, la β-cryptoxanthine, la lutéine et le lycopène (ces
composés sont passés en revue dans l’ouvrage de Willis et Wians
[16]). Les carotènes et la cryptoxanthine sont retrouvés dans
différents fruits (abricots) et légumes (carottes). La lutéine
est plutôt retrouvée dans des légumes verts (brocoli, chou de
Bruxelles, haricot princesse). Les lycopènes sont abondants dans
les tomates mais aussi dans le raisin ou la pastèque. La longue
structure polyénique des caroténoïdes leur permet d’absorber
la lumière UV. Ils peuvent réduire ou piéger les espèces réactives de l’oxygène et interférer avec des réactions radicalaires.
Ils peuvent ainsi bloquer ou limiter la peroxydation lipidique.
Les lycopènes exercent aussi une action antioxydante et sont
dotés d’autres effets biologiques bien établis (17).
Vitamine A
Bien que décrite comme possédant des propriétés antioxydantes
in vitro, la vitamine A, à l’inverse du β-carotène dont elle dérive,
n’exercerait qu’une faible action antioxydante in vivo (16). Le rétinol
et le rétinal ne “piègent” que faiblement l’oxygène singulet, et leurs
propriétés antiradicalaires restent malgré tout limitées. La vitamine
A peut néanmoins être active contre des cancers comme celui de
la prostate, dont le développement est connu pour être retardé ou
partiellement inhibé par l’administration d’agents antioxydants.
Cette action de la vitamine A sur la prévention relative du cancer
de la prostate est attribuée à des propriétés autres qu’antioxydantes :
son potentiel inhibiteur de l’ADN polymérase en phase G1 du cycle
cellulaire et son impact régulateur sur la transcription des gènes
(16). Ces effets de la vitamine A peuvent expliquer une partie des
propriétés manifestées par le β-carotène.
Vitamine B3 (niacine)
La niacine ou vitamine B3 est le nom commun pour l’acide
nicotinique et la nicotinamide. Elle est aussi parfois nommée
vitamine PP. Il s’agit d’une vitamine hydrosoluble pour laquelle
une activité antioxydante a été documentée. Cette vitamine
représente en fait un puissant agent neuroprotecteur dans des
modèles animaux d’occlusion permanente de l’artère cérébrale
moyenne ou encore d’ischémie/reperfusion cérébrale (18).
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
Flavonoïdes
Les flavonoïdes désignent un groupe chimiquement assez varié
de composés polyphénoliques largement retrouvés dans le règne
végétal, si bien qu’ils font partie de notre régime alimentaire (19).
Plusieurs milliers de flavonoïdes différents ont pu être identifiés
et ont été regroupés en plusieurs classes incluant les flavones, les
isoflavones, les flavonols, les dihydroflavonols, les catéchines, les
anthocyanidines et les chalcones. Les flavonoïdes alimentaires
sont surtout apportés par le thé, les oignons, les pommes et le
vin rouge, avec un apport quotidien moyen estimé entre 23 et
170 mg/kg.
Les flavonoïdes alimentaires ont des propriétés antioxydantes importantes et variées. Notamment, ils peuvent neutraliser divers radicaux libres, chélater les métaux et inhiber la
peroxydation lipidique. Plusieurs études épidémiologiques ont
conduit à l’hypothèse que ces composés pouvaient jouer un
rôle important dans la réduction et la prévention des maladies
cardiovasculaires. Ce bénéfice médical est attribué notamment
à la diminution de l’oxydation des lipoprotéines et à l’action
antiagrégante plaquettaire des flavonoïdes.
Glutathion
Le glutathion est un tripeptide synthétisé par la cellule. Il correspond au γ-glutamylcystéinylglycine et présente une fonction
thiol (celle de la cystéine) dotée d’un potentiel antioxydant qui
s’exprime notamment vis-à-vis des hydroperoxydes (peroxyde
d’hydrogène et hydroperoxydes lipidiques, notamment). Il réagit dans le cadre de réactions enzymatiques catalysées par les
glutathion peroxydases (activités dites sélénodépendantes). En
ce qui concerne le peroxyde d’hydrogène, le glutathion peut en
La Lettre du Pharmacologue - vol. 20 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
111
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
plus réduire le peroxyde, assisté par les glutathion transférases
(activité glutathion peroxydase dite non sélénodépendante). Au
cours de la réduction des hydroperoxydes, l’oxydation du glutathion peut être conjuguée à celle d’un autre thiol conduisant à
la formation de disulfures hybrides. Cette glutathionylation est
réversible quand il s’agit de protéines ; elle peut transitoirement
mettre à l’abri la protéine de l’oxydation de ces cystéines ou induire
un changement d’activité ayant une valeur régulatrice. D’autres
peptides ou protéines présentant des fonctions SH, telles que les
peroxyrédoxines, glutarédoxines ou encore la thiorédoxine, sont
dotés de propriétés antioxydantes (2).
Bien que le glutathion soit un peptide, le lien γ-glutamyl est
relativement résistant aux protéases et le glutathion peut utiliser
des transporteurs pour entrer dans des cellules auxquelles il est
extérieurement présenté. Le glutathion en tant qu’agent utilisé
à visée pharmacologique s’est montré protecteur vis-à-vis de
différents modèles animaux (20).
Mélatonine
La mélatonine est une neurohormone synthétisée et sécrétée par
l’épiphyse, ou glande pinéale. Ce méthoxyindole est substitué
par une chaîne latérale comprenant un groupement N-acétate.
Les propriétés antioxydantes de la mélatonine tiennent dans le
noyau méthoxyindole. Des analogues mélatoninergiques où cette
structure est remplacée par un noyau napthalénique perdraient
partiellement cette activité antioxydante. Il est à noter que ces
analogues naphtaléniques de la mélatonine peuvent être dotés
d’une affinité beaucoup plus élevée vis-à-vis des récepteurs à
la mélatonine (21).
La mélatonine est dotée d’un large spectre antioxydant, pouvant
réduire ou neutraliser des espèces incluant l’anion superoxyde,
les hydroperoxydes, le radical hydroxyle, le NO et le peroxynitrite. La mélatonine assure une protection antioxydante très
puissante dans différents modèles de stress oxydatif incluant des
modèles de cataracte, de maladies cardiaques et neurologiques.
Son utilité pharmacologique pour réduire les dommages cellulaires et moléculaires a fait l’objet de nombreuses revues, dont
celle récemment publiée par Reiter et al. (22). D’autre part, les
propriétés antioxydantes de la mélatonine lui ont valu d’être
considérée comme une molécule anti-vieillissement et même
comme hormone de jouvence.
En fait, les indications médicales potentielles de la mélatonine, seule ou comme traitement d’appoint, sont nombreuses
et concernent toute condition physiopathologique associée à
la génération de radicaux libres. Celles-ci incluent notamment
l’exposition à divers agents toxiques (ecstasy, tétrachlorure de
carbone, carcinogènes comme le safrole), aux radiations ionisantes, à l’ischémie/reperfusion (accident vasculaire cérébral,
infarctus du myocarde), au choc septique, à la déplétion en glutathion ou encore à la protéine β-amyloïde (maladie d’Alzheimer)
[23]. L’utilisation de la mélatonine a aussi été recommandée
dans la maladie de Parkinson (23). La mélatonine possède non
seulement une activité antioxydante intrinsèque, mais également
la propriété d’induire les sytèmes de défenses antioxydantes cellulaires. En effet, la mélatonine a été rapportée comme pouvant
112
induire l’activité superoxyde dismutase [SOD] (stimulation de la
SOD cupro/zinc-dépendante [isoenzyme cytoplasmique] et de
la SOD manganèse-dépendante [isoenzyme mitochondriale]),
les activités glutathion peroxydase et réductase, de même que
l’activité de la glucose-6-phosphate déshydrogénase, qui est
l’enzyme produisant le NAD(P)H utilisable par la glutathion
réductase (23). Une propriété remarquable de la mélatonine,
qui en fait un agent antioxydant pharmacologiquement exploitable, est sa bonne biodistribution et l’aisance avec laquelle cette
molécule peut traverser les différentes barrières biologiques,
barrière hématoencéphalique incluse.
Acide urique
L’acide urique est le produit terminal du catabolisme des bases
puriques chez l’homme. Chez la plupart des autres mammifères,
l’acide urique subit une oxydation supplémentaire catalysée
par l’urate oxydase, qui permet la formation d’allantoïne, un
produit relativement plus polaire. L’acide urique est doté de
puissantes propriétés antioxydantes et est formé par la xanthine
déshydrogénase. Il est difficilement soluble dans l’eau, limitant
vraisemblablement sa concentration physiologique. Néanmoins,
il faut savoir qu’il contribue à plus de 60 % au pouvoir antioxydant
du plasma chez les sujets en bonne santé. Il neutralise en fait
10 à 15 % du radical hydroxyle produit quotidiennement, et peut
aussi neutraliser les radicaux peroxyles, de même que l’oxygène
singulet. De manière très intéressante, il peut aussi fixer le fer
et stabiliser l’acide ascorbique plasmatique (20).
Son potentiel antioxydant a été mis en évidence notamment
dans des modèles animaux d’agression cérébrale induits par
l’occlusion de l’artère cérébrale moyenne. En pratique clinique,
l’acide urique reste d’une utilisation délicate, vu notamment sa
faible solubilité et, dès lors, le risque de précipitation.
Acide lipoïque
L’acide lipoïque (acide 1,2-dithiolane-3-pentanoïque), aussi appelé
acide thioctique ou acide lipodomique, possède une structure
chimique comprenant deux atomes de soufre. Il a la particularité
d’être hydro- et liposoluble, ce qui lui donne la capacité d’agir
dans ces deux milieux et donc de neutraliser plusieurs types de
radicaux libres comme le peroxynitrite, l’hypochlorite ainsi que
l’oxygène singulet (24). En réalité, c’est l’acide dihydrolipoïque qui
joue le rôle d’antioxydant. En neutralisant le radical libre, l’acide
dihydrolipoïque est transformé en acide lipoïque, qui peut alors
régénérer certains antioxydants comme la vitamine E, la vitamine
C, le glutathion. L’acide lipoïque a en plus la propriété de chélater
divers métaux, incluant le fer et le cuivre, une activité qui contribue
à son potentiel antioxydant. L’administration expérimentale d’acide
lipoïque est associée à une protection dans différents modèles animaux de stress oxydatif ou de maladies dégénératives. Son emploi
chez l’homme est efficace dans la neuropathie diabétique et a été
préconisé aussi dans les troubles oculaires (glaucome), ainsi que
comme traitement renforçant l’état général des patients souffrant
du syndrome de l’immunodéficience acquise (sida). Son extension
à d’autres pathologies humaines impliquant le stress oxydatif ou
la diminution des défenses antioxydantes est attendue.
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Ubiquinone ou coenzyme Q
L’ubiquinone est un cofacteur naturel qui joue le rôle de transporteur d’électrons dans le cadre de la chaîne respiratoire
mitochondriale. Si, d’un côté, sa structure proquinonique est
impliquée dans la formation de l’anion superoxyde au décours du
transport mitochondrial d’électrons, cette molécule représente,
d’un autre côté, un agent antioxydant puissant. Ces aspects à
la fois pro- et antioxydants de l’ubiquinone ont été considérés
dans la revue d’Ernster et Dallner (25).
L’ubiquinone peut interagir avec un certain nombre d’espèces oxydantes, et cette activité antioxydante lui permet d’agir comme “terminateur” de la peroxydation lipidique, comme le fait la vitamine E.
Mais, à l’inverse de cette dernière, l’ubiquinone peut aussi agir comme
inhibiteur de l’initiation de la peroxydation lipidique (25). De plus,
l’ubiquinone assure un rôle protecteur vis-à-vis des lésions oxydatives
des protéines et de l’ADN (25). Elle a été employée avec succès dans
différents modèles animaux et est utilisée chez l’homme, non seulement dans le cadre de cytopathies mitochondriales (comme transporteur d’électrons), mais aussi dans le cadre de la thérapie antioxydante
ou comme facteur de supplémentation antioxydant préconisé contre
la fatigue et le vieillissement. Les pathologies humaines améliorées
par l’ubiquinone incluent le syndrome de Prader-Willi, l’ataxie de
Friedreich, la maladie de Parkinson et les affections cardiovasculaires
(26). Au cours des vingt dernières années, au moins dix études portant sur 1 000 patients souffrant d’une pathologie coronarienne ont
montré une influence positive de l’administration de l’ubiquinone,
avec amélioration significative notamment de la fraction d’éjection
et autres indices hémodynamiques (index de volume distolique).
À une dose de 100 mg/j, l’ubiquinone améliore significativement
les performances ventriculaires gauches dans une population de
patients souffrant de défaillance cardiaque (d’origine ischémique
ou fonctionnelle [i.e. cardiomyopathie dilatée]) [26].
Resvératrol
Le resvératrol, ou trans-3,5,4’-trihydroxystilbène, est un composé
polyphénolique naturel. Il est présent dans la peau et les pépins de
raisin, ce qui explique sa forte concentration dans le vin, surtout
dans le vin rouge. Cela est dû au fait que, lors du processus de fermentation du vin, les peaux et les pépins restent en contact plus
longtemps avec le liquide pour le vin rouge que pour le vin blanc.
Mais le resvératrol est aussi présent dans d’autres plantes, comme
l’eucalyptus ou le lys, ou dans d’autres aliments, comme les mûres
et les cacahouètes. Plusieurs études ont démontré que le resvératrol
a un effet antioxydant. En effet, il inhibe la peroxydation lipidique
des lipoprotéines de basse densité, prévient la cytotoxicité de ces
lipoprotéines oxydées et protège les cellules contre la peroxydation
lipidique. Le resvératrol a aussi été étudié dans le cadre de l’initiation,
la promotion et la progression de cancers (27). Lors de la phase
d’initiation, le resvératrol agit comme un antioxydant en inhibant
la formation de radicaux libres. Lors de la phase de promotion, il
inhibe la cyclo-oxygénase 1, une enzyme qui convertit l’acide arachidonique en composés pro-inflammatoires. Lors de la phase de
progression tumorale, il inhibe la ribonucléotide réductase, une
enzyme nécessaire à la synthèse d’ADN particulièrement active lors
de la prolifération des cellules.
Créatine
La créatine [N-(amino-iminométhyl)-N-méthyl glycine] est un
tripeptide produit de façon endogène à partir de la glycine, de
la méthionine et de l’arginine dans le foie, le rein et le pancréas.
Elle peut se trouver dans les muscles, mais aussi dans les tissus
cérébraux. Certaines recherches expérimentales ont montré
que la créatine fournit une neuroprotection contre l’ischémie
et autres modèles animaux de stress oxydatif. Sullivan et al.
(28) ont montré qu’une administration chronique de créatine
réduit l’étendue des dommages cérébraux corticaux consécutifs
à un traumatisme de jusqu’à 36 % chez la souris et 50 % chez le
rat. Cette protection induite par la créatine semble être liée au
maintien de la bioénergétique mitochondriale (préservation des
taux d’ATP, réduction de la concentration intramitochondriale
en calcium et en espèces oxydantes).
La créatine semble prometteuse en vue d’études cliniques sur
le traitement des dommages du système nerveux central, mais,
au préalable, les doses préconisées doivent être évaluées pour
déterminer la balance bénéfice thérapeutique/toxicité.
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
Estradiol, estriol et estrone
L’estradiol, l’estrone et l’estriol sont dérivés du noyau estrane
et comportent un cycle aromatique. Ils représentent les trois
estrogènes principalement sécrétés par les ovaires ; mais d’autres
organes comme les testicules, le tissu adipeux et le cerveau
peuvent les synthétiser. Les estrogènes s’opposent à l’ostéoporose ; ils réduisent la fréquence des accidents cardiovasculaires,
coronaropathies et infarctus du myocarde physiologiquement
chez la femme avant la ménopause et pharmacologiquement
lors de leur administration médicamenteuse. Les estrogènes
réduisent le taux circulant des lipoprotéines de basse densité,
augmentent celui des lipoprotéines de haute densité, et induisent une vasodilatation par le biais de l’ouverture des canaux
potassiques. Les estrogènes, surtout l’estradiol, sont utilisés lors
du traitement des déficiences de sécrétion ovarienne à l’adolescence, l’âge adulte ou après la ménopause. Dans ce dernier cas,
l’estradiol est prescrit dans le but de diminuer la progression
de l’ostéoporose et des accidents cardiovasculaires. L’estriol,
quant à lui, a un pouvoir estrogénique plus faible. Les estrogènes
agissent principalement par le biais de récepteurs nucléaires
appartenant à la superfamille des récepteurs nucléaires hormonaux. Ils exercent aussi des effets qui ne dépendent pas de
l’activation de ces récepteurs aux estrogènes, notamment par
le biais de propriétés antioxydantes (29).
L’activité antioxydante des estrogènes est aisément compréhensible si l’on tient compte de l’analogie structurale qu’ils peuvent
présenter avec la vitamine E : à savoir, une partie phénolique
hydrophile riche en électrons et responsable du potentiel antioxydant de la molécule, et une partie plus lipophile, expliquant la
solubilité de la molécule dans les membranes biologiques. Cette
activité antioxydante est efficace contre la peroxydation lipidique
associée à un stress oxydatif. Par exemple, l’estradiol est un bon
piégeur du radical hydroxyle hautement toxique pour la cellule.
L’efficacité de cette activité antioxydante a été démontrée dans
différents modèles expérimentaux neurophysiopathologiques
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113
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
(30), incluant les effets positifs enregistrés dans différents modèles
de la maladie d’Alzheimer et contribuant très vraisemblablement
aux propriétés protectrices des estrogènes.
DHEA
La déhydroépiandrostérone (DHEA) est un stéroïde hormonal
produit dans les glandes surrénales, les gonades et le cerveau.
Les précurseurs de la DHEA sont le cholestérol, la prégnanolone et la 17-hydroxyprégnanolone. La DHEA peut aussi être
métabolisée en estrogènes, estrone et estradiol. La DHEA et la
DHEAS (dehydroepiandrostérone-3-sulfate, son métabolite)
ont beaucoup été étudiées ces dernières années en vue d’une
utilisation pharmaceutique possible. La DHEA a été développée
dans le cadre de la préservation des tissus neuronaux et du
myocarde face aux effets lésionnels de l’ischémie/reperfusion
associée aux infarctus cardiaques ou cérébraux, ou encore à la
chirurgie cardiovasculaire. Les propriétés antioxydantes de la
DHEA protègent les composants subcellulaires et les lipoprotéines de basse densité contre la peroxydation lipidique ; elles
réduisent les lésions oxydatives de l’ADN liées au vieillissement
des cellules cérébrales et des lymphocytes circulants (31). La
DHEAS, quant à elle, est utilisée dans le cadre du traitement
des attaques asthmatiques aiguës. La DHEA, considérée comme
une hormone de “jeunesse”, a souvent été associée à des vertus
antioxydantes et à des effets anti-inflammatoires, anticancéreux,
anti-obésité, antidiabétiques et anti-vieillissement. De tels effets
et propriétés restent cependant à confirmer.
Le sélénium
Le sélénium est un oligoélément, métalloïde analogue au soufre.
L’on attribue à plusieurs protéines contenant cet élément des
propriétés antioxydantes, mais aussi une fonction de détoxication
ou encore des effets anticancéreux. Seule notre alimentation
fournit le sélénium à l’organisme. On peut le retrouver dans
les produits de la mer, les légumes frais, les céréales et les abats
(foie). Il intervient dans de nombreuses réactions enzymatiques comme la synthèse d’ADN, ainsi que celle des hormones
thyroïdiennes ou encore des phospholipides membranaires.
Le sélénium a un rôle antioxydant et détoxiquant au niveau
de la cellule. Il est un constituant de la glutathion peroxydase,
une enzyme qui joue un rôle intracellulaire antioxydant. Le
sélénium est normalement présent en quantités importantes
dans les tissus immunitaires comme le foie et la rate. Il diminue
la gravité des lésions produites par les métaux toxiques (Hg,
As, Cd) par formation de séléniures biologiquement inactifs
ou par phénomène de compétition. De plus, on attribue au
sélénium des propriétés anti-inflammatoires, et une tendance
à la réduction de la fréquence des maladies cardiaques, sans
réduction de la pression artérielle. Il serait aussi efficace dans
le traitement de l’arthrose par le contrôle des prostaglandines
et dans le traitement de l’hypothyroïdie par son effet sur la
transformation de la thyroxine.
Le sélénium est en fait retrouvé dans différentes protéines,
qualifiées dès lors de sélénoprotéines. Outre les glutathion
peroxydases, les sélénoprotéines incluent la sélénoprotéine
114
P et la thiorédoxine réductase, dont le rôle antioxydant
résulte notamment de leur capacité à métaboliser le peroxynitrite (2).
COMPOSÉS ANTIOXYDANTS SYNTHÉTIQUES
Les antioxydants naturels représentent déjà un réservoir
important de composés pouvant être utilisés de manière
pharmacologique. À l’heure actuelle, l’utilisation d’un bon
nombre d’entre eux reste limitée à une administration non
pharmacologique, ne requérant pas de prescription médicale
et restant accessible en vente libre. Ces produits naturels sont
vantés notamment pour leurs propriétés cosmétiques, énergétiques et anti-vieillissement. Ces indications de “confort”, de
même que leur présence parfois retrouvée dans l’alimentation,
expliquent peut-être le désintérêt médical apparent dont ils ont
fait jusqu’ici l’objet. Cela ne doit en rien discréditer l’intérêt
thérapeutique dont ces composés naturels pourraient à l’avenir
faire preuve, notamment sur la base d’études expérimentales
scientifiques démontrant leur efficacité dans des conditions
physiopathologiques bien précises. Il en va de même de l’intérêt préventif/thérapeutique de certaines mesures diététiques
visant à enrichir l’apport nutritionnel en certains de ces agents
antioxydants.
Les composés antioxydants synthétiques s’inspirent néanmoins d’agents antioxydants naturels. De puissants agents
pharmacologiques de synthèse représentant des analogues
de ces composés naturels sont actuellement en cours d’évaluation expérimentale (par exemple : chalcone synthétique
et neuroprotection [32]). Même un composé comme la Nacétylcystéine, qui est dotée d’une activité antioxydante
intrinsèque, participe après hydrolyse à la synthèse d’un
agent antioxydant naturel cellulaire aussi important que le
glutathion. Certains agents antioxydants synthétiques, bien
qu’imitant les molécules ou les défenses naturelles, sont dotés
d’un potentiel antioxydant bien plus élevé que les référents
naturels, comme le démontre la comparaison de l’ebselen et
de la glutathion peroxydase.
N-acétylcystéine
La N-acétylcystéine est un composé thiolé utilisé cliniquement
depuis le milieu des années 1950. La N-acétylcystéine réduit
de manière efficace les espèces radicalaires et autres espèces
oxydantes, en particulier le radical hydroxyle et le peroxyde
d’hydrogène. La N-acétylcystéine n’est pas synthétisée de façon
endogène et ne peut pas passer la barrière hématoencéphalique.
Cela pourrait limiter son efficacité in vivo. Néanmoins, la Nacétylcystéine s’hydrolyse et peut générer la cystéine, qui, elle,
peut théoriquement traverser la barrière hématoencéphalique.
L’intérêt réside dans le fait que la cystéine participe à la synthèse
du glutathion et que, dès lors, sa biodisponibilité accrue augmente les taux cellulaires de glutathion. Des études animales
(principalement sur des modèles de rongeurs) montrent que
la N-acétylcystéine peut être bénéfique dans le traitement des
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dommages oxydants, incluant ceux induits par ischémie-reperfusion (33). En pratique clinique humaine, la N-acétylcystéine est
employée comme agent mucolytique (son potentiel antioxydant
empêche l’oxydation, et par là-même l’agrégation des sécrétions
pulmonaires) et comme agent de détoxication dans des syndromes aigus précipités par la genèse d’un stress oxydatif incontrôlé,
notamment d’origine médicamenteuse (par exemple, nécrose
tubulaire rénale induite par le paracétamol) [34].
Lazaroïdes
Les lazaroïdes sont des 21-aminostéroïdes dérivés des glucocorticoïdes, mais toutefois dépourvus d’activité glucocorticoïde et
minéralocorticoïde. Les propriétés antioxydantes de différents
composés synthétiques tels que le tirilazad mésylate (U-74006F)
ont bien été documentées, notamment l’inhibition de la peroxydation lipidique dans des modèles d’ischémie et de traumatisme
cérébral (35). Ces composés peuvent ainsi réduire la taille de
l’infarctus cérébral enregistré dans des modèles animaux d’ischémie-reperfusion, ou encore d’occlusion permanente de l’artère
cérébrale moyenne, et protéger la barrière hématoencéphalique
dans des conditions de traumatisme cérébral ou d’hémorragie
subarachnoïdienne.
La démonstration d’une cérébroprotection expérimentale a
conduit à l’utilisation du tirilazad chez l’homme dans des indications de désordres neurologiques aigus. Les résultats peu
encourageants ont été mis en rapport avec la faible absorption
orale, mais surtout avec le faible passage du lazaroïde au travers de la barrière hématoencéphalique. La mise au point de
lazaroïdes pouvant traverser la barrière hématoencéphalique
est aujourd’hui à l’étude.
Analogues synthétiques des polyphénols alimentaires
Différentes générations de flavonoïdes synthétiques ont été
testées pour leurs activités antioxydantes. Une chalcone synthétique, à savoir le dérivé 3,5-tert-butyl 4,2’ dihydroxychalcone,
dotée d’un potentiel antioxydant lui permettant de prévenir in
vitro la cytotoxicité induite par des LDL oxydées, s’est avérée
protéger de manière très efficace le cerveau dans un modèle
d’ischémie/reperfusion (32). Un bon parallélisme a par ailleurs
été démontré entre la qualité de cette protection cérébrale et celle
de l’activité des canaux potassiques Kir2.x du muscle vasculaire
lisse de l’artère cérébrale moyenne sujette à l’occlusion transitoire
caractérisant le modèle d’ischémie/reperfusion (32).
Stobadine
La stobadine est une molécule présentant des analogies structurales avec la mélatonine. Comme cette dernière, elle est dotée
d’un spectre d’activité antioxydante relativement large. La stobadine (36) est en fait active vis-à-vis de diverses espèces oxydantes,
incluant le radical hydroxyle, les radicaux peroxyles et alkoxyles,
ou encore l’oxygène singulet. Elle diminue les lésions du myocarde relevant de mécanismes impliquant le stress oxydatif
dans différents modèles animaux in vitro et in vivo (infarctus et
hypoxie/réoxygénation du myocarde, surexposition aux catécholamines). La stobadine est un excellent agent neuroprotecteur
expérimental dans des modèles physiopathologiques également
caractérisés par un excès de radicaux libres. Elle se révèle être
aussi un puissant inhibiteur de l’oxydation des lipoprotéines
de basse densité, protégeant à la fois la partie protéique et la
partie lipidique contre l’oxydation cuprodépendante. L’activité
antioxydante de la stobadine a en outre été démontrée dans de
nombreux autres modèles, incluant la mutagenèse induite par
les radicaux libres. Chez l’homme, l’administration de stobadine
a montré notamment une réduction significative de la fréquence
des épisodes d’angine de poitrine, un effet normolipémiant et
antihypertensif (36).
Ebselen
L’ebselen est un séléno-composé synthétique. Il a été conçu
pour mimer l’activité catalytique de la glutathion peroxydase
(37). L’ebselen est doté de propriétés antioxydantes puissantes
qui s’expriment vis-à-vis notamment du peroxyde d’hydrogène
et des peroxydes organiques (peroxydes lipidiques), mais aussi
vis-à-vis du peroxynitrite, hautement toxique pour la cellule.
L’activité antioxydante de l’ebselen s’est montrée bénéfique dans
différents modèles animaux (réduction du volume de l’infarctus cérébral ou de l’ischémie cérébrale dans divers modèles
d’occlusion – transitoire ou permanente – de l’artère cérébrale
moyenne). Les études cliniques déjà réalisées chez l’homme
(38) ont montré des effets encourageants en termes d’étendue
des lésions cérébrales et de récupération chez des patients avec
atteinte cérébrale. Des patients avec accident vasculaire cérébral
ayant reçu de l’ebselen montrent une évolution plus favorable
que ceux n’ayant pas reçu le composé sélénié. Ils présentent
une réduction significative de leur infarctus cérébral lorsque
l’ebselen est administré dans les six heures suivant l’attaque
cérébrale. L’ebselen est actuellement en phase III de son expérimentation clinique.
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
Complexes synthétiques mimant l’activité
d’antioxydants catalytiques
Certaines métalloprotéines, comme la superoxyde dismutase et la catalase, catalysent des réactions dont le peroxyde
d’hydrogène est soit le produit soit le substrat. L’utilisation
de ces protéines comme agents thérapeutiques permet de
diminuer les dommages induits par les espèces activées de
l’oxygène. Mais leurs limitations, notamment leur grande
taille et leur courte demi-vie, ont poussé les chercheurs à
développer de nouveaux antioxydants catalytiques de faible
poids moléculaire. Une molécule mimétique de ces protéines
doit être stable et non toxique, sa taille et sa charge pouvant aussi permettre le ciblage de sites cellulaires clés dans
le stress oxydatif. Trois classes d’antioxydants catalytiques
contenant un métal (manganèse) ont été développées : la
classe des salens, celle des macrocycles, et enfin celle des
métalloporphyrines. Dans ces groupes, on peut distinguer
deux sous-divisions : les composés sélectifs et non sélectifs,
fondés sur la spécificité de ces composés envers l’anion radical superoxyde lors de l’évaluation in vitro. Les antioxydants
catalytiques non sélectifs comprennent les salens ainsi que
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115
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
les métalloporphyrines, alors que les macrocycles sont des
antioxydants sélectifs (39). Ces derniers sont composés d’un
atome de manganèse, au centre d’une molécule fondée sur
un ligand penta-azamacrocyclique. Cet atome de manganèse
catalyse des transferts à un électron.
Les composés de type salens sont généralement des complexes
métalliques aromatiques éthylènediamine substitués. Contrairement aux macrocycles, l’atome de manganèse piège ici d’autres
espèces oxydantes que le radical anion superoxyde, à savoir le
peroxyde d’hydrogène et le peroxynitrite, mais aussi les peroxydes lipidiques.
Les métalloporphyrines sont structurellement différentes des
protoporphyrines endogènes, et sont classées comme porphyrines méso-substituées synthétiques. Comme pour les salens,
l’atome de manganèse manifeste des propriétés antioxydantes
envers l’anion radical superoxyde, le peroxyde d’hydrogène, le
peroxynitrite et les peroxydes lipidiques.
Les antioxydants catalytiques sont actifs dans de nombreux
modèles expérimentaux. Ceux-ci incluent la fibrose pulmonaire, les maladies chroniques d’obstruction des poumons, l’asthme, le syndrome de douleur respiratoire aiguë,
la dysplasie bronchopulmonaire, les infarctus du myocarde,
l’ischémie-reperfusion, le diabète, les transplantations,
l’arthrite, la migraine, les maladies neurodégénératives, la
pleurésie, la douleur, la démence, la sclérose latérale amyotrophique (39).
LA “MÉTABOLISATION” DES ESPÈCES OXYDANTES
La “métabolisation” des espèces oxydantes peut permettre leur
dégradation et, à l’exception de quelques espèces incluant le
radical hydroxyle ou les radicaux alkoxyles, tire parti du fait que
la plupart d’entre elles représentent des substrats de réactions
enzymatiques. Dès lors, la stimulation de ces activités enzymatiques peut avoir un potentiel anti-stress oxydatif. Néanmoins,
il y a lieu d’être attentif à ne pas provoquer de déséquilibre
dans la voie de métabolisation des espèces oxydantes qui peut
être un facteur d’induction de stress oxydatif. Par exemple, un
mode de gestion de la métabolisation des espèces oxydantes
caractérisées par un déséquilibre en faveur des activités des
superoxyde dismutases (dégradant le radical anion superoxyde
mais génératrices d’eau oxygénée), par rapport à celles des
glutathion peroxydases et de la catalase (enzymes dégradant
l’eau oxygénée), induit une augmentation des concentrations
cellulaires en eau oxygénée. Une telle situation existe physiologiquement dans la période néonatale suite à l’immaturité de la
glutathion peroxydase. Une induction importante et sélective
des superoxyde dismutases, sans induction correspondante de
la glutathion peroxydase et de la catalase, aboutit théoriquement au même résultat. Par exemple, l’hyperexpression de la
superoxyde dismutase par manipulation génétique dans des
modèles expérimentaux aggrave la sensibilité au stress oxydatif ainsi que les lésions consécutives à une stress oxydant
(40). La modulation de l’activité des enzymes oxydantes doit
116
donc être pensée non seulement en termes d’ajout de potentiel
antioxydant mais aussi dans une stratégie de métabolisation
de ces espèces, à adapter au type de stress oxydatif qu’il est
censé contrecarrer. Dès lors, une bonne connaissance de la
composante oxydative caractérisant le désordre médical auquel
le pharmacologue s’adresse est nécessaire en vue d’optimiser
l’approche antioxydante choisie.
La métabolisation ou dégradation enzymatique/catalytique des
espèces oxydantes peut être optimisée soit par la stimulation
des enzymes antioxydantes physiologiques soit par l’apport
de composés synthétiques mimant les activités enzymatiques
antioxydantes. Notons que l’administration intraveineuse de
catalase ou encore de superoxyde dismutase humaine d’origine
exogène représente une option thérapeutique qui a précédemment fait ses preuves.
INDUCTION DES DÉFENSES CELLULAIRES
OU STIMULATION DES ENZYMES ANTIOXYDANTES
PHYSIOLOGIQUES
Différents éléments ou molécules peuvent induire l’activité
des défenses antioxydantes cellulaires. C’est le cas notamment de la mélatonine, qui, outre ses propriétés antioxydantes
intrinsèques, peut augmenter l’activité des enzymes antioxydantes cellulaires (voir ci-dessus). C’est le cas aussi de composés agissant sur des cibles moléculaires intervenant dans
la régulation de la synthèse de ces protéines antioxydantes,
comme les agonistes du Peroxisome Proliferator-Activated
Receptor de type α (PPARα), qui peuvent induire l’activité de
la glutathion peroxydase ou encore de la superoxyde dismutase
cytoplasmique (voir ci-dessous).
LES MIMÉTIQUES ENZYMATIQUES
Les mimétiques enzymatiques incluent des composés synthétiques passés en revue plus haut dans le texte sous la rubrique
consacrée aux composés antioxydants. Il s’agit de l’ebselen et de
différentes classes de complexes synthétiques (salens, macrocycles et métalloporphyrines) mimant l’activité d’antioxydants
catalytiques.
D’autre part, il existe des mimétiques enzymatiques d’origine
naturelle. Les mimétiques enzymatiques d’origine naturelle
incluent les ovothiols, mercaptohistidines retrouvées dans les
œufs des invertébrés marins et certains parasites tels que le
trypanosome. Les ovothiols sont dotés d’une activité glutathion
peroxydase et permettent de résister, notamment lors de la
fécondation de l’œuf d’oursin, à l’un des stress oxydatifs physiologiques les plus intensifs existant dans la nature. La haute
efficacité de cette défense antioxydante naturelle a conduit au
développement d’analogues synthétiques des ovothiols. Il s’agit
de composés 4-mercapto-imidazoliques synthétiques, dont le
potentiel hautement neuroprotecteur a été récemment démontré
de manière expérimentale (41).
La Lettre du Pharmacologue - vol. 20 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
LES VOIES DE SIGNALISATION CELLULAIRE
ET L’EXPRESSION GÉNIQUE : LE POTENTIEL
ANTIOXYDANT DU PPARα, UN RÉCEPTEUR
NUCLÉAIRE ACTIVÉ PAR LES FIBRATES
Les espèces oxydantes peuvent agir comme messagers cellulaires
et interagir avec diverses voies de signalisation cellulaire et de
régulation de l’expression des gènes. Ces aspects fascinants
ont déjà été précédemment évoqués (2) et ont fait l’objet de
divers travaux (42).
Un aspect retiendra l’attention en cette fin d’article : il s’agit des
propriétés antioxydantes/anti-inflammatoires liées à l’activation
des PPAR, et notamment du PPARα. Les propriétés antioxydantes et anti-inflammatoires des agonistes du PPARα (fénofibrate,
par exemple) apparaissent aujourd’hui aussi importantes que
les propriétés normolipémiantes (propriétés anti-hypertriglycéridémiantes, amélioration du rapport HDL/LDL) pour la
protection cardiovasculaire offerte par ceux-ci. Même le mode
d’action protecteur des statines, inhibitrices de l’HMG-CoA
réductase, peut passer par l’activation du PPARα et son impact
sur l’expression des gènes et voies de signalisation cellulaire
[pour une vue d’ensemble du mode d’action des fibrates et
des statines, le lecteur est renvoyé à la revue de Fruchart et
Duriez (43)].
Parmi les processus cellulaires générateurs d’espèces oxydantes,
la voie des lipo-oxygénases ou celle de la cyclo-oxygénase, par le
biais de la formation des leucotriènes, des thromboxanes et des
prostaglandines, sont sollicitées par la cellule pour orchestrer
et développer la réponse inflammatoire. Le métabolisme de
l’acide arachidonique est donc à la fois pro-oxydant et proinflammatoire. L’inhibition, par exemple, de la cyclo-oxygénase
a une valeur à la fois antioxydante et anti-inflammatoire. La
cyclo-oxygénase existe en fait sous deux formes, une forme
constitutive ubiquitaire appelée cyclo-oxygénase 1 (COX-1),
et une forme inductible appelée COX-2, observée après activation cellulaire, notamment par des cytokines. Cette COX-2
représente une cible antioxydante et anti-inflammatoire intéressante et peut être inhibée par les coxibs. D’autres agents
anti-inflammatoires traditionnels inhibent à la fois COX-1
et COX-2.
La COX-2, c’est-à-dire la cyclo-oxygénase inductible, peut être
ciblée autrement que par inhibition directe par le composé.
L’induction même de la protéine peut être bloquée par des agents
pharmacologiques. Il a été démontré depuis plusieurs années
déjà que l’activation du PPARα pouvait bloquer l’induction de
cette COX-2 (44). Les travaux qui suivirent la mise en évidence
de cet effet ont révélé que, en fait, l’activation du PPARα pouvait
conduire à la dépression des voies de signalisation cellulaire
construites autour des facteurs de transcription NF-κB et AP1, voies pro-inflammatoires/pro-oxydantes. Il a été documenté
que ce rôle antioxydant/anti-inflammatoire de l’activation du
PPARα obéissait à un mécanisme de transrépression, et que
des protéines pro-inflammatoires/pro-oxydantes autres que la
COX-2 pouvaient être régulées négativement au terme des effets
transrépressifs du PPARα. La régulation négative de protéines
(COX-2 mais aussi différentes protéines d’adhésion cellulaire
comme le VCAM ou encore l’ICAM) par le PPARα joue ainsi
un rôle primordial dans le contrôle anti-inflammatoire et donc
protecteur exercé par les agonistes du PPARα (les fibrates, par
exemple) sur le développement de l’athérosclérose et des maladies cardiovasculaires. La figure 2 résume les mécanismes impliqués dans le potentiel antioxydant/anti-inflammatoire du PPARα
et des fibrates (45). De manière intéressante, le fénofibrate induit
certaines activités antioxydantes et représente un composé doté
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
Figure 2. Potentiel antioxydant/anti-inflammatoire
du PPARα.
Agoniste du PPARB
(physiologique, le LTB4 ;
L’activation du PPARα survient avec la fixation d’un ligand
RXRB
PPARB
pharmacologique, les fibrates)
agoniste (un fibrate dans le cas d’une action pharmacologique).
9-cis rétinoate
PPARB
Une fois activé, le PPARα peut exercer un effet régulateur sur
activé
l’expression génique et les voies de signalisation cellulaire
NF-LB
PPARB RXRB
PPARB
PPARB
par deux mécanismes essentiellement distincts. Le premier
PPARB
(ou AP-1)
activé activé
activé
activé
activé
mécanisme est celui qui a été le premier décrit et correspond
PPRE
à la fixation du PPARα activé, après hétérodimérisation avec
NF-LB
(ou AP-1)
le RXRα, lui aussi activé par son propre ligand, sur des motifs
Action
retrouvés dans la région promotrice de gènes cibles, motifs
Réponse
normoModulation
de
l’
e
xpression
de
gènes
inflammatoire
lipémiante
impliqués dans l’oxydation et le trafic appelés PPRE (Peroxisome Proliferator [PPAR] Responsive
NF-LB
(ou AP-1)
des acides gras et du cholestérol Elements). Ce mécanisme porte le nom de “transactivation”
et conduit surtout à la stimulation de diverses protéines
Bénéfice
NF-LB RE
Modulation de l’expression
(ou AP-1 RE)
(enzymes de la β-oxydation et du transport des acides gras,
de gènes impliqués
thérapeutique
synthèse accrue de l’apo-AI), et occasionnellement à la
dans le contrôle redox
et les voies de l’inflammation
répression d’autres (apo-CIII). Ces modifications métaboliques
ont une action normolipémiante, c’est-à-dire qu’elles ont une action anti-hypertriglycéridémiante ou encore hypocholestérolémiante. Ces effets induisent en fait
un profil lipidique protecteur vis-à-vis des désordres cardiovasculaires. Le rôle protecteur apporté par l’activation du PPARα dans ces désordres relève aussi du
deuxième mécanisme illustré sur la figure, à savoir le mécanisme transrépressionnel. La transrépression par le PPARα s’exprime surtout vis-à-vis de facteurs de
transcription impliqués dans la signalisation cellulaire relative aux voies cellulaires redox et celles de l’inflammation. Dans ce mécanisme, le PPARα activé ne se
lie pas à l’ADN, mais inactive le facteur de transcription auquel il se fixe. En fait, il empêche le facteur de transcription complexé de se lier à l’ADN et, par là même,
empêche celui-ci de jouer son rôle naturel de messager cellulaire, le détournant de sa fonction et suspendant ainsi ladite fonction. Les facteurs de transcription
ainsi complexés par le PPARα dans le cadre de son activité transrépressionnelle incluent le NF-κB et l’AP-1, facteurs de transcription jouant un rôle clé dans les voies
pro-oxydantes/pro-inflammatoires de la cellule. D’autres facteurs de transcription tels que STAT peuvent ainsi être complexés par le PPARα (45).
Activation
Transactivation
Transrépression
La Lettre du Pharmacologue - vol. 20 - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2006
117
Stratégies thérapeutiques
S tratégies thérapeutiques
118
de propriétés neuroprotectrices récemment mises en évidence
dans un modèle animal de l’AVC (accident vasculaire cérébral)
(ischémie/reperfusion par occlusion/désocclusion de l’artère
cérébrale moyenne) [46].
■
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