Changer les normes de beauté à l`ère du plus que parfait

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Changer les normes de beauté à l`ère du plus que parfait
Changer les normes de beauté
à l’ère du plus que parfait
S
ourire immaculé, taille de guêpe, poitrine qui
défie la gravité… En cette ère hypermédiatisée,
difficile de ne pas être exposés aux standards
de beauté irréalistes. Difficile, également, d’y être
entièrement immunisés. Si bien que, pour bon nombre
d’entre nous, accepter ses petites imperfections et
résister au dernier régime à la mode constitue un défi.
Mais qu’adviendra-t-il des enfants qui grandissent dans
cet univers du plus que parfait ?
Chez les fillettes, le désir d’avoir un corps plus mince
pourrait se manifester dès l’âge de cinq ans. On sait
par ailleurs qu’au Québec, 45 % des enfants de neuf
ans (filles et garçons) sont insatisfaits de leur silhouette
et qu’une fillette de neuf ans sur trois a déjà tenté
de perdre du poids. L’insatisfaction corporelle se vit
aussi chez les garçons, qui veulent posséder un corps
sculpté comme celui des acteurs, vedettes sportives ou
musiciens en vogue.
Malheureusement, l’insatisfaction corporelle ne mène
pas à l’adoption de saines habitudes de vie. Elle y fait
même obstacle. Afin de contrôler leur poids, certains
jeunes vont sauter des repas, s’entraîner de façon
obsessionnelle ou même commencer à fumer ! Les
problèmes d’image peuvent également mener à
l’abandon de la pratique d’activités physiques.
Par ailleurs, des études indiquent que les jeunes qui se
soumettent à des régimes pour contrôler leur poids
sont plus susceptibles de développer un surpoids en
vieillissant. Une image corporelle négative est associée à
l’anxiété, la dépression et une faible estime de soi. L’estime
de soi… n’est-ce pas la clé de la réussite scolaire ?
Travailler à changer la norme
Les problèmes d’image corporelle méritent notre
attention, car ils représentent une menace pour la santé
et le bien-être des jeunes. Mais, quel rôle pouvons-nous
jouer en tant que parents, enseignants ou intervenants ?
D’abord, prendre conscience de notre statut de modèle.
Les commentaires et moqueries des parents ou
membres de l’entourage sont régulièrement relevés
dans la littérature comme facteurs dans la construction
d’une image corporelle négative chez les jeunes. Les
enfants nous écoutent, nous imitent. Involontairement,
nous pouvons alimenter certaines de leurs craintes. On
s’en rend à peine compte : les petits commentaires sur la
deuxième assiettée (t’es certaine que tu en veux ENCORE ?)
ou sur la prise de poids de la voisine paraissent
anodins. Pourtant, qu’enregistre l’enfant qui voit des
Éditorial
membres de son entourage se peser tous les jours,
se priver d’aliments qu’ils aiment ou se dénigrer ? L’idée
ici n’est pas de se culpabiliser, mais de savoir la portée
des gestes que l’on croit inoffensifs.
Être un bon modèle n’exige pas d’être en parfaite
harmonie avec son corps. Rares sont les personnes
qui, face au miroir, se disent : quel beau body ! On peut
par contre chercher à atteindre un certain équilibre et,
surtout, briser le tabou. Que pensent les jeunes de votre
entourage des modèles de beauté ? Sont-ils conscients
des retouches apportées à ces images ? Quels effets
ces images ont-elles sur eux ? De belles pistes de
discussions…
Peut-être aurez-vous, en cours de route, à remettre en
question certaines de vos croyances. Saviez-vous qu’il
n’est pas nécessaire d’être mince pour être en santé ?
À force d’être exposés à un modèle unique de beauté,
nous oublions qu’il est normal de rencontrer une
diversité de silhouettes dans la population. L’objectif
n’est donc pas de rendre tous les enfants minces, mais
bien de permettre à chacun d’eux, peu importe son
format, d’atteindre son plein potentiel de santé et
de bien-être.
/// Fannie Dagenais
Dt.P., M.Sc.
Directrice d’ÉquiLibre
et maman d’Emmanuelle,
7 ans, d’Alexandre, 5 ans
et de Camille 2 ans
Mais est-ce suffisant ? Comment lutter contre les
millions de dollars investis en publicité pour nous
vendre le corps parfait ou la méthode miracle pour
l’atteindre ? Nos actions seront-elles comme une
goutte d’eau dans l’océan ? Je suis peut-être optimiste,
mais je crois le changement possible. Chaque petit
geste compte. Pour réussir à renverser la norme, des
changements doivent être entrepris ailleurs que dans
nos classes ou nos cuisines. Et de tels changements ont
commencé à apparaître…
Certaines entreprises ne retouchent plus leurs
photos, d’autres embauchent des mannequins aux
physionomies diversifiées ou plus réalistes. La question
de l’image corporelle est régulièrement abordée
dans les magazines et les lectrices y réagissent. Il
n’en tient qu’à nous, en tant que consommateurs,
d’exprimer notre appui à de telles initiatives, d’en
parler… de créer un effet boule de neige.
Les représentations du corps parfait varient selon les
cultures et les époques. En réalité, ce qui fait la beauté,
c’est le regard que nous posons sur l’autre. Aussi,
laissons de côté le modèle unique de beauté et
apprenons aux jeunes à ouvrir les yeux sur les charmes
de la diversité !
MARS 2012 /// LE MONDE DE L’ÉDUCATION - 5
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