Bains romains en termes japonais

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Bains romains en termes japonais
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Par By Hadrien Chidiac
Bains romains en termes japonais
longée dans l’ère romaine, pendant
le règne de l’empereur Hadrien (Publius Ælius Hadrianus, 76-138). Lucius Modestus est un architecte en mal d’inspiration. Alors qu’il se délasse dans les thermes, il
découvre un trou dans lequel il se fait aspirer
avant de réapparaître au XXIe siècle, dans un
bain japonais. La culture nippone étant aussi
friande des bains que Rome à cette époque,
Lucius va mettre à profit son voyage pour tenter de révolutionner les thermes romains.
Primé à deux reprises, Thermæ Romæ est un
manga déjà culte au Japon avec 5 millions
d’exemplaires vendus en seulement quatre
tomes (deux tomes sont parus en France et
huit sont prévus au total). La série de Mari
Yamazaki est adaptée en dessin animé pour
la télévision et le film devrait sortir au mois d’avril au Japon.
Publié en mars en France, la question est de savoir si ce manga
basé sur une pratique propre à la culture japonaise – les bains –
va plaire dans l’Hexagone. Pour caricaturer, une bande dessinée
sur le fromage ou la pétanque séduirait-elle les lecteurs japonais ?
Car l’idée de base de la série est indéniablement originale et
pourrait rebuter. L’auteure évite cet écueil et réussit le pari de
ne pas perdre le lecteur français dans cet univers qui lui est
inconnu. Pas besoin d’être japonais pour apprécier les aventures
d’une personne se réveillant dans un autre monde.
Cependant, une fois passée la découverte
de la thématique, l’ouvrage pêche par son
scénario poussif. Les situations cocasses
s’enchaînent toujours sur le même schéma :
Lucius, à l’image d’Alice s’évanouissant dans
le terrier du lapin blanc, disparaît dans un
bain, puis refait surface au Japon, avant d’en
repartir avec le plein d’idées. Chaque épisode
voit la même intrigue se répéter, à quelques
détails près, au point de s’essouffler dès le
premier tome.
Côté graphisme, malgré un trait parfois
un peu trop raide, Mari Yamazaki réussit à
s’approprier l’art romain et offre un mélange
sympathique dans ses dessins. Dommage
de voir les arrière-plans et les décors assez peu
exploités : l’époque est pourtant riche.
Si l’ouvrage se veut humoristique, il est avant tout instructif.
Des accessoires aux services en passant par les boissons ou les
encas, Mari Yamazaki passe en revue les différentes étapes du
bain. Les dessins, les quelques photos et les notes nous donnent
beaucoup d’éléments pour cerner la culture du bain, tant au
Japon qu’à Rome… et, au détour d’un commentaire, souligner
la piètre hygiène des Occidentaux ! •
P
Thermæ Romæ
Par Mari Yamazaki, Collection Sakka, éditions Casterman (mars 2012),
7,50 euros (2 tomes parus), 128 pages.
ROMAN BATHS THROUGH JAPANESE EYES
Take a plunge into the Roman era,
during the reign of Emperor Hadrian
(Publius Ælius Hadrianus, 76-138).
Lucius Modestus is an architect lacking
in inspiration. While unwinding at the
baths, he discovers a hole in which he is
sucked, before re-emerging in the 21st
century, in a Japanese bath. As Japanese culture has as much of a yen for
baths as Ancient Rome, Lucius Modestus takes advantage of his trip to find
ideas and revolutionise Roman baths.
Twice a prize-winner, Thermæ Romæ is
already a cult manga in Japan, with five
million copies sold for just four tomes
(two tomes published in France, eight
envisaged ultimately). Mari Yamazaki's
series has been adapted as a television
cartoon and the film version is to be
released in April in Japan.
Published in March in France, the
question is whether this manga based
on a practice specific to Japanese culture – public baths – will tickle the fancy
of the French. To put it in other terms,
would a comic on cheese or the French
bowls, pétanque, seduce Japanese
readers? For the basic idea of the series
is undeniably original, and risks alienating other cultures. Yet the author avoids
this pitfall and does not let French readers get lost in an unfamiliar universe.
COMMERCE INTERNATIONAL
No need to be Japanese to appreciate
the adventures of a person who wakes
up in another world. But once the reader
has been initiated to the theme, the
work's scenario suffers. The comical
situations always follow the same pattern: Lucius vanishes in a bath, then
resurfaces in Japan before leaving full
of ideas. The same plot is repeated
in every episode, differing only in a few
details, to the point of running out of
steam in the first tome. As far as graphic design goes, despite traits that
are sometimes a little too stiff, Mari
Yamazaki gives a successful rendition
of Roman art, providing her work with
127
N°85 - MAI 2012
an enjoyable blend of cultures. A pity
that backgrounds and decors have not
been deeply explored despite the richness of the era in question.
While the work sets out to be humorous, it is above all instructive. From
accessories to services via drinks or
snacks, Mari Yamazaki takes readers
through the different stages of the bath.
The drawings, a few photos and notes
provide many other elements for understanding the bath culture, in Japan
as well as in Rome... and in passing,
comments on the pitiful hygiene of
Westerners. •
Thermæ Romæ
By Mari Yamazaki, Sakka collection,
Éditions Casterman (March 2012),
7.50 euros (2 tomes published),
128 pages.