Cancers bronchiques – Lung Cancer
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Cancers bronchiques – Lung Cancer
Cancers bronchiques Lung cancer ● ● D. Moro-Sibilot* es cancers thoraciques ont fait l’objet cette année de nombreuses présentations. Il n’y a pas de véritable scoop ni d’avancée imprévue, mais plusieurs études confortent des résultats antérieurs ou apportent un éclairage différent sur des questions débattues. L CHIMIOTHÉRAPIE DES STADES AVANCÉS DES CARCINOMES BRONCHIQUES NON À PETITES CELLULES L’association de gemcitabine et d’un sel de platine est l’un des doublets standard de première ligne dans les cancers bronchiques non à petites cellules (CBNPC). Le pemetrexed est un nouvel antimétabolite, enregistré notamment dans le traitement de seconde ligne des CBNPC. Son introduction en première ligne en association avec un sel de platine et sa comparaison avec les doublets de chimiothérapie actuels sont logiques. L’association pemetrexed 500 mg/m2 + carboplatine ASC 5, pendant 4 cycles (219 patients) a été comparée à l’association gemcitabine 1 000 mg/m2, J1, J8, carboplatine ASC 5, pendant 4 cycles (218 patients). L’objectif principal de l’étude était la comparaison de la qualité de vie sous traitement (échelles EORTC QLQ-C30 et LC13), les objectifs secondaires étant la survie sans progression et la toxicité du traitement. Cette étude n’a pas permis de mettre en évidence de différence sur l’objectif principal ni sur la survie sans progression. Sur le plan de la toxicité, seules les thrombopénies étaient plus fréquentes dans le groupe de patients traités par gemcitabine et cisplatine (abstract 7517). La chimiothérapie de consolidation par docétaxel après chimio-radiothérapie concomitante est un concept qui a été popularisé après plusieurs études du SWOG, dont SWOG 9504 (1) et SWOG 0023 (abstract 7513). L’étude HOG LUN01-24 (abstract 7512) est une étude randomisée qui a inclus 259 patients et a randomisé 180 d’entre eux entre une chimio-radiothérapie concomitante avec étoposide et cisplatine et le même traitement suivi d’une consolidation par 3 cycles de docétaxel 75 mg/m2. Les patients étaient porteurs de cancers non résécables de stades IIIa et IIIb. L’étude a été amendée après l’analyse intermédiaire des 203 premiers patients ; le recrutement * UF oncologie thoracique, Inserm U823, CHU de Grenoble. La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 prévu pour une randomisation de 210 patients a été interrompu pour un objectif de randomisation de 180 patients. La toxicité hématologique de grade 3-4 dans le groupe “consolidation” a été la principale raison de cet amendement. L’absence de gain en termes de survie sans progression (12,3 mois pour le groupe docétaxel versus 12,9 mois pour le groupe contrôle) va probablement amener à modifier l’attitude des radiothérapeutes américains, qui, pour 69 % d’entre eux, font actuellement une chimiothérapie de consolidation. Cancers bronchiques A SCO 2007 TRAITEMENT DES STADES AVANCÉS PAR THÉRAPEUTIQUES CIBLÉES Le facteur de croissance VEGF est un élément clé pour la formation des néovaisseaux, et son hyperexpression a été observée dans de nombreux types de tumeurs et associée à la progression de la maladie. L’inhibition du VEGF est une cible thérapeutique qui a déjà montré son intérêt dans différents types tumoraux. Il y a 2 ans, l’étude ECOG 4599, incluant 878 carcinomes non épidermoïdes pulmonaires de stade IIIB ou IV sans métastases cérébrales, a comparé paclitaxel et carboplatine à la même chimiothérapie associée au bévacizumab (15 mg/kg) [2]. L’effet sur la survie était démontré, avec une augmentation très significative de la survie globale et de la survie sans progression. Cette année est présentée la plus large étude de phase III comparant 3 bras : chimiothérapie seule par gemcitabine et cisplatine et la même chimiothérapie associée soit à 7,5 mg/kg, soit à 15 mg/kg de bévacizumab toutes les 3 semaines (Avastin® in Lung AVAiL, BO17704) [abstract 7514]. Les résultats obtenus sur 1 043 patients de stade IIIB/IV (tableau I, figure 1) démontrent que l’addition de bévacizumab à une chimiothérapie à base de gemcitabine + cisplatine prolonge significativement la survie sans progression comparativement à la chimiothérapie seule. Bien que cette étude n’ait pas été conçue pour comparer les doses de bévacizumab, un effet thérapeutique similaire a été observé dans les deux groupes thérapeutiques en termes de survie sans progression. Le bévacizumab se confirme donc comme la première thérapeutique ciblée qui, associée à la chimiothérapie, améliore les résultats de la première ligne dans les phases avancées de CBNPC. Le choix actuel de la seconde ligne thérapeutique peut être la chimiothérapie par docétaxel ou pemetrexed ou, au contraire, un traitement par un inhibiteur de tyrosine kinase (TKI) de l’EGFR comme l’erlotinib. 251 Tableau I. Comparaison des caractéristiques des 3 groupes de l’étude AVAIL. CG n = 347 CGB 7,5 n = 345 CGB 15 n = 351 Survie sans progression (médiane : mois) 6,1 6,7 6,5 Taux de réponse (%) 20 34 30 Hémorragies pulmonaires grade >3 (%) 0,6 1,5 0,9 Hémorragies grade >3 (%) 2 6 6 Maladie thromboembolique (%) 6 7 7 Neutropénie grade >3 (%) 32 40 36 Thrombopénie grade >3 (%) 23 27 23 Épistaxis grade >3 (%) <1 2 3 2 6 9 HTA grade >3 (%) C : cisplatine, G : gemcitabine, B : bévacizumab. Dans les études comparatives randomisées de seconde ligne thérapeutique, le docétaxel est souvent retenu comme élément comparateur. En effet, il a déjà été comparé au pemetrexed (3), au topotécan (4) et à des médicaments plus anciens tels que la vinorelbine et l’ifosfamide (5). Cette année, un nouvel alcaloïde de la pervenche, la vinflunine, est comparé au docétaxel (abstract 7511). Cinq cent quarante-sept patients de stades IIIB/IV déjà prétraités ont été randomisés dans un groupe docétaxel 75 mg/m2 (275 patients) ou dans un groupe vinflunine 320 mg/m2 (272 patients). Les caractéristiques de deux groupes de patients sont résumées dans le tableau II. Le profil de tolérance de la vinflunine est différent de celui du docétaxel ; on note que la constipation, les myalgies, les douleurs abdominales et les vomissements sont significativement plus fréquemment retrouvés avec celle-ci, mais cela n’a pas modifié de façon importante son administration, puisque la dose-intensité relative a été supérieure à 98 %. Ce nouveau médicament représente une alternative intéressante au docétaxel dans le traitement de seconde ligne des CBNPC. L’étude pivotale BR21 a démontré il y a 3 ans la place majeure de l’erlotinib en seconde ou troisième ligne thérapeutique des Tableau II. Comparaison des deux groupes de l’étude vinflunine versus docétaxel en seconde ligne. Médicament Vinflunine Docétaxel 75/25 75,3/24,7 Stades IIIB/IV 23,9/61,4 24,7/60 Adéno/Épidermoïdes (%) 41,9/36,4 43,6/34,2 Constipation grade 3 (%) 39,2* 11,7 6,2 12,4* 23,8* 14,2 Hommes/femmes (%) Diarrhées grade 3 (%) Vomissements grade 3 (%) * Différence statistiquement significative. 252 1,0 Survie sans progression (%) Cancers bronchiques A SCO 2007 Placebo + CG n = 347 Bév. 7,5 + CG n = 345 HR (IC95) ––– 0,75 (0,62-0,91) p ––– 0,0026 0,8 0,6 0,4 Placebo + CG Bév. 7,5 mg/kg + CG 0,2 0,0 0 3 6 9 Temps (mois) 12 15 18 Figure 1. Courbes de survie sans progression dans l’étude AVAIL. Comparaison du groupe contrôle au groupe bévacizumab 7,5 mg/kg. CBNPC de stades IIIB/IV (6). Sur la base de cette étude réalisée dans une population de patients non sélectionnés, l’erlotinib a bénéficié d’une autorisation de mise sur le marché pour les CBNPC en progression après une première ligne de chimiothérapie. En dehors d’un choix fondé sur des caractéristiques prédictives de réponse à l’erlotinib ou liées à l’état général du patient, aucun critère biologique n’est régulièrement utilisé en routine pour déterminer le meilleur traitement. Cela souligne l’intérêt des études comparant la chimiothérapie aux TKI de l’EGFR dans cette indication. L’étude SIGN de phase II présentée à la World Conference of Lung Cancer (WCLC) de 2005, comparant gefitinib et docétaxel, mettait en évidence une efficacité comparable entre les deux traitements et des paramètres de survie en faveur du gefitinib. Cette année, une étude japonaise de phase III a comparé le gefitinib 250 mg/jour (187 patients) au docétaxel 60 mg/m2 (200 patients) chez des patients ayant reçu 1 ou 2 lignes de chimiothérapie. Les critères d’inclusion de cette étude n’ont pas favorisé l’inclusion de patients potentiellement répondeurs aux TKI. Le taux de réponse et la qualité de vie sont plutôt en faveur du gefitinib ; les résultats de survie globale et sans progression montrent une absence d’infériorité du gefitinib par rapport au docétaxel. L’étude INTEREST compare les mêmes médicaments dans une population non asiatique ; les résultats en sont attendus pour le congrès de Séoul de cet automne. Une confirmation de l’étude japonaise aurait un impact majeur sur le choix de la seconde ligne, en particulier du fait de la bonne tolérance des TKI de l’EGFR. Les TKI de l’EGFR peuvent être prescrits sur des populations non sélectionnées comme, par exemple, dans l’étude BR21 (6), l’étude ISEL (7) ou les travaux cités ci-dessus. Cependant, on connaît des facteurs prédictifs de réponse clinique tels que le sexe féminin, les populations asiatiques, l’existence d’un tabaLa Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 Tableau III. Comparaison des résultats de l’étude IFCT 0401 aux résultats publiés de TKI de l’EGFR dans le traitement des adénocarcinomes à composante bronchiolo-alvéolaire. Étude N Traitement antérieur TKI (mg/jour) RO (%) IFCT 0401 SWOG 0126 (10) MSKCC (11) 88 136 83 non oui oui gefitinib 250 gefitinib 500 erlotinib 150 13 14 22 Contrôle (%) 29 46 38 Survie à 1an (%) 52 51 NR Les mutations de l’EGFR ont été découvertes il y a 3 ans. Elles sont prédictives de la réponse aux TKI de l’EGFR ; leur impact sur la survie sans progression et sur la survie globale est possible mais fait l’objet de controverses. Les mutations de l’EGFR et de K-ras semblent, par ailleurs, être un facteur pronostique favorable indépendamment de l’utilisation des TKI (figure 2). Plusieurs études prospectives présentées à l’ASCO 2006 avaient montré l’impact favorable des TKI chez les patients présentant une mutation. Cette année, l’étude iTARGET (abstract 7504) évalue, chez 31 patients présentant une délétion de l’exon 19 ou une mutation L858R, un traitement par gefitinib 250 mg. Le taux de réponse est de 55 %, avec une médiane de survie de 20,8 mois. On note plus de réponses chez les patients porteurs de la mutation L858R, à l’inverse de ce qui était noté l’an dernier par Paz-Ares sur un collectif de patients plus important (12). Enfin, l’un des intérêts de cette étude est de montrer que 76 % des patients mutés ont une amplification de l’EGFR. Celle-ci est plus simple à mettre en place en routine que la recherche des mutations, la coexistence dans les mêmes tumeurs de l’amplification et La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 100 Survie (%) gisme, ou encore des caractéristiques histologiques telles que les adénocarcinomes et leur composante bronchiolo-alvéolaire. Les caractéristiques biologiques telles que l’amplification de l’EGFR ou certaines mutations de l’EGFR (8, 9) représentent aussi la possibilité de sélectionner les patients les plus à même de bénéficier d’un traitement ciblé. Plusieurs études ont évalué les TKI de l’EGFR dans des populations sélectionnées. L’étude IFCT 0401 présentée par J. Cadranel (abstract 7560) a inclus 90 patients (88 évaluables) porteurs d’adénocarcinomes à composante bronchiolo-alvéolaire. Ces patients ont été traités par du gefitinib à la dose de 250 mg/jour. Les données de cette étude sont résumées dans le tableau III à côté de celles antérieurement publiées sur le même type de tumeurs (10, 11). Les résultats sont assez comparables à ceux de ces études plus anciennes : on retrouve l’influence prédictive du sexe, de l’apparition d’une éruption sous TKI, de l’absence de tabagisme, mais l’un des apports de cette étude est de montrer la meilleure évolution des patients porteurs d’adénocarcinomes non mucineux. EGFR mutant, n= 40 80 EGFR WT/K-ras WT, n =210 60 K-ras mutant, n = 50 40 20 0 Suivi moyen 22,3 mois 0 10 20 30 40 50 60 Mois depuis chirurgie 70 Cancers bronchiques A SCO 2007 Figure 2. Influence pronostique des mutations de l’EGFR et de K-ras dans une population de patients opérés non traités par TKI (ASCO 2007, educational session). des mutations de l’EGFR peut ainsi faire préférer la recherche de l’amplification en routine clinique. Bien que le taux de réponse soit plus élevé chez les patients mutés amplifiés, la différence n’est pas statistiquement significative, mais ce dernier point est sûrement lié à un manque d’effectif dans cette étude. La partie biologique de l’étude BR21 comparant erlotinib et placebo, déjà publiée (13), a été revisitée avec de nouvelles analyses biologiques (abstract 7571). Cette étude confirme les résultats de la publication et souligne qu’il existe un petit bénéfice de survie chez les patients porteurs de la mutation de l’EGFR, mais que ce bénéfice n’atteint pas le niveau de la signification statistique. En revanche, l’amplification de l’EGFR est un facteur prédictif de réponse et de bénéfice en survie chez les patients traités par TKI. TRAITEMENT MULTIMODALITÉ DES STADES OPÉRABLES La chirurgie est le seul traitement permettant d’obtenir de façon très régulière la guérison des cancers bronchiques. Cependant, seuls 25 % des patients opérés vont survivre à leur cancer, la grande majorité des autres étant victime de rechutes locales ou métastatiques de la maladie. La radiothérapie et la chimiothérapie sont proposées pour essayer de contrôler ces risques de rechute. Plusieurs études, ces dernières années, ont démontré la place des chimiothérapies adjuvantes, et ce traitement fait maintenant partie des standards thérapeutiques. La méta-analyse LACE présentée l’an dernier et réalisée sur 4 584 patients (14) montrait une réduction du risque de décès de 11 % (hazard-ratio 0,89 [IC95 : 0,82-0,96]). Dans cette étude, un travail en sous-groupe a évalué l’influence de l’âge sur le bénéfice de la chimiothérapie adjuvante (abstract 7553). Les patients ont été divisés en 3 groupes : moins de 65 ans, 65-69 ans, plus de 253 Cancers bronchiques A SCO 2007 254 70 ans. Le bénéfice est observé uniquement dans les populations de moins de 65 ans Catégorie d'études Décès/patients Hazard-ratio IC95 (HR) (p = 0,0001) ; il n’y a pas de significativité Sel de platine + vinca-alcaloïde/étoposide statistique au-delà de 65 ans. MSKCC 80 53 68/72 Cette année, c’est la méta-analyse princeps GETCB 01CB82 240/267 EORTC 08861 13/24 de 1995 (15) qui est actualisée, avec un Int 0115 369/488 effectif de 8 147 patients (abstract 7552). MDA DM 87045 33/34 ANITA RT 243/377 Cette nouvelle analyse, reprenant 30 études BLT RT 33/49 de chimiothérapie adjuvante, estime que IALT RT 386/572 la chimiothérapie apporte un bénéfice en ALPI RT 2882/470 0,89 (0,81 ; 0,98) Sous-total 1 667/2 353 survie de 4 % à 5 ans (hazard-ratio 0,86 [IC95 : 0,81-0,93], p = 0,000001). Dans le sousAutres associations avec platine LCSG 791 143/172 groupe de patients traités par chirurgie et FLCSG3 76/86 radiothérapie, il n’y avait, en 1995, qu’une 0,85 (0,65 ; 1,11) Sous-total 219/258 tendance non statistiquement significative (c) autres antimétabolites en faveur de la chimiothérapie. Cette actualiOLCSG1d 23/49 sation inclut les études récentes sur ce sujet, Sous-total 23/49 1,02 (0,45 ; 2,33) et en particulier les grandes études adju0,89 (0,81 ; 0,97) Total 1 909/2 660 vantes récemment publiées, dans lesquelles 0 1 2 3 des sous-groupes de patients ont été traités Chimiothérapie par radiothérapie (abstract 7521). La métaTest d'interaction : p = 0,90 mieux analyse démontre le bénéfice en survie pour Figure 3. Méta-analyse comparant radiothérapie et chirurgie avec et sans chimiol’ensemble des groupes étudiés (hazardthérapie. ratio = 0,88, IC95 [0,80-0,96], p = 0,0062) [ figure 3]. La majorité du bénéfice est expliquée par le sous-groupe traité par des associations de sels de platine et d’alcaloïdes de la pervenche rompue pour des raisons éthiques du fait des résultats des ou de l’étoposide. Ce sous-groupe est numériquement le plus études de chimiothérapie adjuvante, qui rendaient caduque important et c’est aussi celui où le bénéfice est le plus incontesl’existence d’un groupe contrôle traité par chirurgie seule. table. Dans les autres sous-groupes, il y a une tendance en faveur L’effectif de patients est donc insuffisant pour avoir la puissance de la chimiothérapie, mais avec un intervalle de confiance ne statistique nécessaire. Dans le groupe de patients traité par permettant pas de conclure à la significativité de la différence. chimiothérapie, l’observance a été bonne, avec 79 % de patients Maintenant, la question à venir est celle de la place de la radioayant reçu les trois cycles de chimiothérapie prévus. Le taux thérapie après chimiothérapie adjuvante. L’étude de phase III de réponse à la chimiothérapie d’induction est de 41 %. Il y a IFCT 0503 LungART, qui compare une radiothérapie médias7 décès postopératoires dans le groupe chimiothérapie puis tinale conformationnelle postopératoire à l’absence de radiothérapie après chirurgie complète chez des patients présentant Tableau IV. Comparaison des résultats de l’étude S9900 comparant un CBNPC avec envahissement médiastinal N2, va bientôt chimiothérapie néo-adjuvante et chirurgie à chirurgie d’emblée chez commencer en Europe. les patients opérables de stades I à IIIA. La question de l’intérêt de la chimiothérapie néo-adjuvante a été soulevée par les résultats de plusieurs études (16-18). Dans Groupe néo-adjuvant Groupe contrôle l’étude française MIP 91 publiée en 2002 (18), deux stratégies Hommes/femmes (%) 64/36 68/32 étaient comparées : chimiothérapie par mitomycine + ifosfamide + platine (MIP) [2 cycles] suivie de chirurgie, comparée Stades IB-IIA/IIB-IIIA 67/33 68/32 à la chirurgie première. Le bénéfice de la chimiothérapie préopératoire dans cette étude était observé plutôt dans les Épidermoïdes/adénocarcinomes/ 34/31/35 42/33/25 stades I et II que dans les stades III (N2). Cette étude est à autres (%) l’origine de plusieurs travaux confirmatifs, dont les études RC/RP (%) 3/38 IFCT 0002 (abstract 7519) et S9900 présentée par K. Pisters (abstract 7520). L’étude S9900 compare une chimiothérapie par Survie globale (médiane : mois) 75* 46 3 cycles de paclitaxel 225 mg/m2 et carboplatine ASC 6 puis chirurgie à un groupe de patients traités par chirurgie seule. Survie sans progression 33** 21 (médiane : mois) Les patients inclus dans l’étude étaient de stades IB à IIIA (T3N1). Les caractéristiques des patients sont représentées * p = 0,19 ; HR = 0,81 ; ** p = 0,07 ; HR = 0,77. dans le tableau IV. Cette étude a été prématurément interLa Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 chirurgie versus 4 dans le groupe chirurgie seule. En dépit d’une amélioration à la fois de la survie globale et de la survie sans progression, la différence reste statistiquement non significative. Cette absence de signification statistique s’explique certainement par l’insuffisance du nombre de patients, mais aussi par une survie du groupe contrôle meilleure que celle prévue sur le plan statistique. L’étude IFCT 0002 est une phase III multicentrique comparant deux schémas d’administration de la chimiothérapie. Les patients sont traités soit par deux cycles de chimiothérapie avant l’intervention et éventuellement deux autres cycles après la chirurgie en cas de réponse, soit par deux cycles avant l’intervention suivis éventuellement à nouveau de deux autres cycles, toujours avant l’intervention chirurgicale. La chimiothérapie comporte soit une association de carboplatine + paclitaxel, soit une association de cisplatine + gemcitabine. Les résultats préliminaires de cette étude sont présentés avec l’inclusion de 528 patients. L’analyse montre un taux de réponse à la chimiothérapie comparable, avec 52,3 % pour cisplatine + gemcitabine versus 49,2 % pour carboplatine + paclitaxel. L’administration de plus de deux cures de chimiothérapie n’améliore pas le taux de réponse clinique ni de réponse pathologique sur la pièce opératoire. En revanche, la compliance à l’administration de la chimiothérapie est bien meilleure quand celle-ci est administrée en préopératoire (90,4 % versus 75,2 %, p = 0,0011). On remarque, d’une part, la quasi-absence de décès toxiques (1/528), ce qui diffère des données observées dans les chimiothérapies adjuvantes, et, d’autre part, un chiffre de mortalité postopératoire d’environ 3 %, non influencé par le nombre de cycles de chimiothérapie préopératoire. Dans la même thématique, les résultats préliminaires de l’étude espagnole NATCH ont été publiés (abstract 7578). Cette étude a inclus 625 patients de stades IA à IIA dans 3 bras : soit chirurgie (211 patients), soit chimiothérapie préopératoire par paclitaxel + carboplatine (203 patients), soit la même chimiothérapie administrée en situation adjuvante (211 patients). Seule la population traitée en préopératoire a été présentée. Les stades IB représentent 65 % des patients. Le taux de réponse à la chimiothérapie préopératoire est de 58,7 %, et on observe 6 % de progression sous chimiothérapie. Le taux de réponse complète sur la pièce opératoire est de 8,8 %. Il y a 11 % de neutropénies de grade 3-4. Les résultats définitifs sont attendus pour 2009, mais, déjà, G. Scagliotti, dans la discussion sur ce thème, évoque l’absence de différence dans les deux modalités de chimiothérapie. Le bien-fondé du néo-adjuvant est discuté, l’un de ses principaux intérêts étant de pouvoir être administré à un plus grand nombre de patients que les traitements adjuvants. Une méta-analyse des traitements néo-adjuvants a été publiée (19). Celle-ci donne, au global, un hazard-ratio de 0,82 (IC 95 : 0,69-0,97) en faveur de l’approche néo-adjuvante. Il est probable qu’aucune étude ne résolve la question du meilleur moment pour administrer la chimiothérapie : avant ou après la chirurgie. La question n’est d’ailleurs probablement plus d’actualité : cette modalité est largement répandue en pratique courante. Son choix varie selon les écoles de pensée La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 et selon les options thérapeutiques des équipes chirurgicales, qui, souvent, préfèrent ne pas retarder le moment de l’intervention, celle-ci restant, en 2007, la partie fondamentale du traitement. Enfin, d’autres questions scientifiquement plus importantes ont pris le devant de la scène. On peut citer, en particulier, la place de la pharmacogénomique, de la génomique ou de la protéomique dans la sélection des patients, tout comme la place des traitements ciblés, qu’ils visent l’EGFR ou l’angiogenèse. TRAITEMENT DES CARCINOMES À PETITES CELLULES PULMONAIRES Cancers bronchiques A SCO 2007 Le traitement des carcinomes à petites cellules pulmonaires (CPC) a été l’objet d’une présentation en session plénière. Cette présentation sort un peu de l’ombre une maladie dont l’incidence a diminué ces dernières années et qui, en l’absence de progrès thérapeutique, est en passe de devenir une maladie orpheline. La courbe des abstracts de l’ASCO ces dernières années témoigne du manque d’intérêt pour cette maladie (figure 4). Le traitement de première ligne des carcinomes à petites cellules a peu évolué, il repose sur l’association de cisplatine + étoposide, à laquelle on ajoute une radiothérapie thoracique la plus précoce possible dans les formes limitées de la maladie. La question de la radiothérapie prophylactique cranioencéphalique a été résolue dans les formes limitées de la maladie, où ce traitement est indiqué chez les patients en réponse. Dans les formes étendues, cette question reste débattue ; une méta-analyse récente (20) évaluait le bénéfice potentiel en survie à 5,4 % à 3 ans. Une étude de l’EORTC a comparé l’irradiation prophylactique cérébrale (IPC) à l’absence de traitement chez les patients porteurs de formes étendues en réponse après chimiothérapie (abstract 4). Le critère de jugement était l’apparition de métastases cérébrales symptomatiques. Deux cent quatre-vingt-six patients ont été randomisés, 143 dans le groupe IPC et 143 dans le groupe contrôle. La tolérance de la radiothérapie était bonne, avec 29 % 450 400 350 Toutes histologies CBNPC 300 250 200 150 100 50 0 CPC 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 Années Figure 4. Évolution du nombre de résumés “poumon” à l’ASCO. 255 Cancers bronchiques A SCO 2007 256 d’effets indésirables aigus de grade 1 et 18 % de grades 2 et 3 (essentiellement céphalées, nausées, léthargie, dermite aiguë). Le bénéfice de l’IPC est observé à la fois sur le taux d’apparition de métastases cérébrales symptomatiques (p = 0,001) [figure 5] et sur la survie globale (p = 0,003) [survie à 1 an : 27,1 versus 13,3 %]. L’IPC n’a, en outre, pas entraîné d’effet délétère sur les paramètres de qualité de vie. Les toxicités sont globalement comparables et acceptables dans les deux groupes de patients. L’association irinotécan + cisplatine avait montré une amélioration significative de la survie chez les patients atteints d’un cancer bronchique à petites cellules disséminées dans une étude japonaise publiée en 2002 (21). Ces résultats ont fait l’objet de controverses, car plusieurs études présentant des résultats discordants n’ont pas détrôné l’association étoposide + cisplatine, qui reste le standard thérapeutique. On peut citer notamment l’étude publiée récemment par N. Hanna (22), qui ne montre pas d’amélioration des paramètres de réponse et de survie. L’ étude IRIS (abstract 7523), présentée cette année et qui compare irinotécan + cisplatine à étoposide oral + cisplatine, est en faveur du doublet irinotécan + cisplatine. La différence observée dans cette dernière étude est probablement le fait du traitement de référence insuffisant, l’étoposide oral ayant montré depuis longtemps ses limites par rapport à l’étoposide i.v. Enfin, l’étude CALGB 30206 (abstract 7565) évalue irinotécan + cisplatine et radiothérapie : les résultats en termes de survie sont inférieurs à ceux de l’étude de A.T. Turrisi (23), ce qui fait abandonner cette option thérapeutique. Les résultats de l’étude SWOG 0124, qui compare encore ces deux associations de chimiothérapie, sont en attente, cette étude étant encore en cours de recrutement. Les antiangiogènes représentent une option thérapeutique potentielle dans les CPC. L’an dernier, l’étude IFCT 0001, présentée par J.L. Pujol (24), démontrait que l’administration concomitante de thalidomide avec la chimiothérapie améliorait la survie globale des patients présentant une forme étendue de la maladie. L’administration en traitement de maintenance d’un antiangiogène représente aussi une option à étudier. Le ZD6474 (vandetanib) est un médicament oral administré en dose quotidienne unique qui bloque deux importantes voies de croissance des tumeurs. Il bloque la voie de signalisation du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire VEGFR-2, ce qui inhibe l’angiogenèse. Il bloque aussi la voie de signalisation de l’EGFR. Cent sept patients atteints de formes limitées ou étendues de CPC en réponse après chimiothérapie et radiothérapie (formes limitées) ont été randomisés entre un groupe vandetanib et un groupe contrôle. Les principaux effets secondaires ont été les suivants : rash 71 %, diarrhées 79 %, HTA 21 %, élévation des ASAT 46 %, augmentation du QTc 15 %. L’administration du vandetanib n’a modifié ni la survie sans progression ni la survie globale. Les auteurs de l’étude se posent la question du moment propice pour administrer le vandetanib, et notamment de la possibilité de l’administrer de façon concomitante à la chimiothérapie. Le bévacizumab peut être associé à la chimiothérapie dans les CPC : cela représente une option intéressante en phase II (tableau V) [abstracts 7563, 7564]. Une étude de phase III est donc justifiée. 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 1 an 14,6 % versus 40,4 % HR : 0,27 (0,16-0,44) ; p < 0,001 Contrôle IPC ( irradiation prophylactique cérébrale) 0 4 8 12 16 20 Mois 24 28 32 36 Figure 5. Estimation du risque de rechute cérébrale en fonction de la réalisation ou non d’une irradiation prophylactique cérébrale. Tableau V. Comparaison des associations irinotécan + cisplatine + bévacizumab (IPB) et étoposide + cisplatine + bévacizumab (EPB) aux résultats publiés de l’étude Hanna irinotecan + cisplatine (IP) et étoposide + cisplatine (EP) [22]. Ready (abstract 7563) Hanna Sandler (abstract 7564) Hanna IPB IP EPB EP RC (%) 4 4 6 3 RP (%) 71 44 63 41 RO + RP (%) 91 52 86 51 Médiane SSP (mois) 7,1 4,1 4,7 4,6 Médiane de survie (mois) 11,7 9,3 11,1 10,2 Survie à 1 an (%) 49 35 Non atteinte 35 Chimiothérapie TRAITEMENT DES MÉSOTHÉLIOMES PLEURAUX Le pemetrexed en association avec le cisplatine est le traitement de référence des patients atteints de mésothéliome pleural malin non résécable et qui n’ont pas reçu de chimiothérapie antérieure (25). Une analyse du “programme d’accès étendu” européen (Extended Access Program) [abstract 7562] a permis de comparer l’association cisplatine 75 mg/m2 + pemetrexed 500 mg/m2 et l’association carboplatine ASC 6 + pemetrexed 500 mg/m2. Bien qu’il ne s’agisse pas d’une étude randomisée, ces résultats de survie et de réponse sont assez fiables, car obtenus sur un collectif de 1 704 patients. Il n’y a pas de différence entre les deux modalités de traitement pour les paramètres de réponse et de survie. Il faut noter que les résulLa Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007 tats sont sensiblement inférieurs à ceux de l’étude Vogelzang (26 % versus 41 % de réponse), mais ils correspondent à une population non sélectionnée. D’autres médicaments comme la gemcitabine, la vinorelbine ou le raltitrexed sont des possibilités alternatives. Une étude britannique (abstract 7525) a comparé les meilleurs soins de confort (136 patients) à un traitement par vinorelbine (136 patients) ou mitomycine + vinblastine + cisplatine (MVP) [137 patients]. Cette étude, prévue initialement pour atteindre un objectif de 840 patients sur 4 ans a été arrêtée à 420 patients du fait de problèmes de recrutement. Ce travail ne montre aucun avantage en termes de survie ou de qualité de vie, et en particulier aucun effet de l’association MVP, qui est un peu démodée. Il existe une tendance pour une meilleure survie avec la vinorelbine, qui mérite sûrement d’autres études, mais, comme le souligne l’investigateur principal, il y a peu de chances, dans le contexte actuel, qu’une équipe ait la velléité de comparer la vinorelbine au pemetrexed. Une étude de phase II (abstract 7526) a comparé l’association gemcitabine + cisplatine avec et sans bévacizumab. L’association chimiothérapie et antiangiogène est logique dans ce contexte, car les mésothéliomes sont parmi les tumeurs avec les plus forts taux de VEGF. Cent huit patients porteurs de mésothéliomes inopérables ont été inclus, dont 53 traités par gemcitabine + cisplatine + bévacizumab et 55 par gemcitabine + cisplatine et placebo. Il n’a pas été observé de différence dans les toxicités de grade 3-4 entre les deux groupes de patients. Tous grades confondus, les épistaxis, protéinurie et HTA étaient cependant plus fréquentes dans le groupe bévacizumab. Il n’a pas été noté de différence dans les taux de réponse ou en termes de survie sans progression, de survie médiane et de survie à 1 an. En revanche, si l’on considère des sousgroupes de patients en fonction du taux sérique de VEGF, une différence de survie sans progression est observée en faveur du bévacizumab chez les patients présentant un taux de VEGF dans la médiane de l’ensemble des valeurs de la cohorte. ■ 5. Fossella FV, DeVore R, Kerr RN et al. Randomized phase III trial of docetaxel versus vinorelbine or ifosfamide in patients with advanced non-small-cell lung cancer previously treated with platinum-containing chemotherapy regimens. The TAX 320 Non-Small Cell Lung Cancer Study Group. J Clin Oncol 2000;12: 2354-62. 6. Shepherd FA, Rodrigues Pereira J, Ciuleanu T et al. Erlotinib in previously treated non-small-cell lung cancer. 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Confirmation de l’étude positive de phase III ECOG 4599 menée avec l’association bévacizumab-paclitaxel-carboplatine. ● Traitement néo-adjuvant et traitement adjuvant : des résultats comparables Deux cures de chimiothérapie néo-adjuvante semblent suffisantes (versus 4 cures) avec un taux de réponse complet pathologique comparable entre le groupe 2 cures et le groupe 4 cures. Impact bénéfique sur la tolérance, la tolérance est meilleure quand la chimiothérapie est administrée avant la chirurgie. La Lettre du Cancérologue - Vol. XVI - n° 6-7 - juin-juillet 2007