La RSE dans le sport professionnel français : L`Olympique Lyonnais

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La RSE dans le sport professionnel français : L`Olympique Lyonnais
Université de Lyon
Université lumière Lyon 2
Institut d'Études Politiques de Lyon
La RSE dans le sport professionnel
français : L’Olympique Lyonnais,
illustration d’un management
responsable ?
Anne-Laure MICHEL
Master 1 Economie, Management des Organisations et Ressources Humaines
Séminaire Entreprises et Société : Débats Contemporains
Sous la direction de : Benjamin DUBRION
(Soutenu le : 11 Juin 2012)
Membres du jury: Benjamin DUBRION Etienne COGNARD
Table des matières
1-1) L’Europe et les Etats-Unis : deux logiques d’approche différentes de la RSE . .
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a) Une approche américaine religieuse et philanthropique: éthique et risque
individuel . .
12
b) Une approche européenne politique : Développement Durable et Risque collectif
..
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Remerciements . .
Avant propos . .
Introduction . .
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général . .
1-2) Les impacts de ces différences d’approches RSE dans le Sport Américain : Un
modèle ancien et avancé outre atlantique . .
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a) Etat des lieux des pratiques US : Programmes RSE développés notamment par
les ligues. . .
15
b) Raisons culturelles et structurelles : les structures du sport américain favorables
à un tel développement . .
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1-3) Pratiques Hétérogènes dans le Sport Européen et embryonnaires dans le Sport
Français . .
a) Etat des lieux des pratiques européennes et françaises . .
b) Raisons du retard français en matière de Responsabilité Sociale du sport . .
c) Lyon : une tradition humaniste qui pourrait être propice au développement de la
RSE dans le sport lyonnais . .
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais . .
2-1) La RSE comme réponse à la professionnalisation du sport . .
a) Du sport amateur au sport professionnel : L’Olympique Lyonnais et les clubs : de
véritables PME ? . .
b) Le sport face à des problèmes d’entreprise . .
c) Les actions RSE de l’Olympique Lyonnais pour répondre à cet enjeu . .
2-2) La RSE comme réponse à la multiplication des Parties prenantes dans
l’environnement sportif . .
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a) L’environnement de Olympique Lyonnais et des clubs français de plus en plus
complexe . .
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b) Un impact des clubs sur la société important : justification de la politique d’OL
Fondation . .
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c) Le Grand Stade Lyonnais, illustration d’un projet à multiples parties prenantes,
multiples intérêts . .
34
2-3) La RSE comme réponse à la multiplication d’enjeux auxquels sont confrontés les
organisations sportives . .
a) L’Olympique lyonnais face aux enjeux liés aux centres de formation : prise en
compte du capital immatériel . .
b) Répondre aux enjeux environnementaux : Le Grand Stade un projet écologique
..
c) Enjeux de sécurité publique . .
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un
management responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ? . .
3-1) L’efficacité basée sur les ressources et compétences spécifiques de l’Olympique
Lyonnais . .
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43
a) Les ressources et compétences spécifiques de l’OL au service d’une RSE
effective . .
43
b) Quelle relation entre la performance sociale de l’OL et sa performance
financière ? . .
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c) La politique RSE de l’OL face à des paradoxes quant à l’utilisation de ses
ressources . .
b) La politique RSE de l’OL face aux problèmes de greenwashing . .
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c) Les théories et les taxonomies des politiques RSE des organisations sportives au
service de l’évaluation de l’efficacité . .
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3-2) L’évaluation de l’effectivité de la politique RSE de l’OL . .
a) Difficulté d’évaluer la politique RSE des organisations sportives . .
3-3) La politique RSE de l’Olympique Lyonnais, une fin en soi ouun moyen vers un
management responsable ? . .
a) Ancrer la stratégie RSE de l’Olympique Lyonnais dans la stratégie des clubs :
recherche de l’avantage concurrentiel . .
b) Les enjeux d’une politique de RSE stratégique pour l’Olympique Lyonnais . .
Conclusion . .
Bibliographie . .
Annexes . .
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Remerciements
Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier Benjamin Dubrion et Etienne Cognard, responsables du séminaire
« Entreprises et Société », pour nous avoir permis de choisir un sujet librement, même si l’étude
du sport n’était pas l’une de leurs spécialités. J’adresse mes remerciements plus particulièrement
à Benjamin Dubrion, mon directeur de mémoire, qui m’a dirigé, suivi et conseillé durant toute la
période de réflexion, de définition du sujet mais aussi de rédaction du mémoire.
Je remercie également les personnes que j’ai pu rencontrer et interviewer ; Laurent Arnaud et
Gérard Caviglia, deux employés de l’Olympique Lyonnais avec qui j’ai pu discuter longuement de
la politique sociale du club. Mais aussi Hélène Blondel, responsable partenariats de l’association
Sport dans la ville, avec laquelle travaille l’Olympique Lyonnais. Tous m’ont accordé de leur temps
malgré des emplois du temps souvent chargés, ainsi que des informations précieuses. Je remercie
plus particulièrement l’équipe d’OL Fondation qui m’a conviée à une journée au Stade de Gerland
avec l’association FootValeurs le 10 Mai 2012. Cela m’a permis d’appréhender plus concrètement
une de leurs actions de responsabilité sociale et d’en discuter avec plusieurs protagonistes de cette
rencontre.
Merci aussi à Emmanuel Bayle, professeur à Lyon III et au Centre de Droit et d’Economie
du Sport de Limoges, spécialiste de la RSE dans le sport. En plus de son livre récemment publié
(« Sport et RSE » Décembre 2011), il m’a apportée de précieux conseils tout en m’aidant à cadrer
mon mémoire sur un axe précis.
Je remercie évidemment mes proches qui m’ont encouragée, soutenue pendant toute la période
de réalisation du mémoire.
Merci plus particulièrement à Vincent Chevrier, qui a patiemment lu et corrigé mon mémoire
en y ajoutant des remarques très constructives.
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La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
Avant propos
Ce mémoire de recherche constitue l’aboutissement de quatre années à l’IEP qui m’ont
permis d’acquérir certaines méthodes de recherche, d’analyse, ainsi que de synthèse,
nécessaire pour un travail d’une telle ampleur.
Si le choix du sujet entre dans le cadre de ma spécialité de master 1 « Economie,
Management des Organisations et Ressources Humaines », il me permet également
d’introduire certains concepts que j’étudierai – je l’espère, en Master 2 « Droit Economie et
Gestion du Sport ». Le choix du sujet n’a donc évidemment pas été pris à la légère, même
si à première vue, le lien entre Responsabilité Sociale de l’Entreprise et Sport ne saute
pas aux yeux. C’est là même, un de mes objectifs en rédigeant ce mémoire : démontrer la
pertinence de l’application d’un tel concept à un secteur plus connu pour son côté loisir que
professionnel. De plus, au niveau personnel, rencontrer des professionnels d’un domaine
qui me passionne et pour lequel je veux travailler, fut très instructif. Ainsi en plus de lier
l’utile à l’agréable, cela m’a même permis d’obtenir une offre de poste de chargé de projet
en Conseil en RSE au Comité Olympique du Rhône.
Le sport est pour moi un élément central de notre société : que ce soit pour ses valeurs,
pour ses bienfaits et sa capacité à rassembler. Ma troisième année que j’ai pu effectuer à
Brisbane (Australie) m’a fait découvrir une autre gestion et conception du sport. Tout comme
aux Etats Unis, la notion de Responsabilité Sociale dans le sport professionnel n’est pas
nouvelle dans la société australienne. Ainsi, le choix du sujet de ce mémoire de recherche
est en quelque sorte l’aboutissement de ce que j’ai pu découvrir ces dernières années que
ce soit en Australie, ou dans la conduite de mon projet professionnel.
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Introduction
Introduction
Des joueurs de football qui se mettent en grève lors de la Coupe du Monde en Afrique du
Sud, de multiples scandales financiers, des salaires faramineux aux affaires de dopage, les
frasques du « Sport Business » sont nombreuses à faire la une de l’actualité. Il n’est pourtant
pas rare de brandir le sport comme facteur de réconciliation du monde, comme nous le
montre l’engagement de Nelson Mandela, dont les idées ont notamment été soutenues et
reprises par l’Organisation des Nations Unies pour le Sport au service du Développement
et de la Paix (UNOSDP). L’ancien secrétaire des Nations Unies, Kofi Annan, s’est en effet
intéressé à l’esprit du sport et aux leçons que ce puissant outil peut nous enseigner :
rassembler les peuples, considérer l’adversaire comme un rival, non comme un ennemi,
rendre le monde meilleur, etc. Cependant, malgré ces multiples déclarations et volontés
quelque peu utopiques, l’influence du sport sur le monde et sur la société a encore du
chemin à parcourir pour se rapprocher des attentes de l’ancien président de l’Afrique du Sud.
Une des solutions néanmoins avancée par des chercheurs et autres experts est d’élargir et
d’appliquer la notion de Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE) au secteur du sport. A
prime abord il pourrait cependant sembler paradoxal de vouloir appliquer une telle notion à
un secteur qui est déjà en soit un véhicule de valeurs sociabilisantes et responsabilisantes,
que l’on retrouvent notamment ancrées dans le mouvement de l’Olympisme moderne
impulsé par Pierre de Coubertin. Le premier principe de la Charte Olympique souligne en
effet que :
L’Olympisme est une philosophie de vie, exaltant et combinant en un ensemble
e#quilibre# les qualite#s du corps, de la volonte# et de l’esprit. Alliant le sport
a# la culture et a# l’e#ducation, l’Olympisme se veut cre#ateur d’un style de
vie fonde# sur la joie dans l’effort, la valeur e#ducative du bon exemple, la
responsabilite# sociale et le respect des principes e#thiques fondamentaux
universels. (Comité International Olympique, 2011).
Ainsi, la volonté d’engager le secteur du sport sur la voie de la Responsabilité Sociale
semble être redondante avec l’éthique sportive inhérente à ce secteur. Cependant, les
logiques économiques actuelles ainsi que le contexte mondial dans lequel le sport moderne
se développe, ont beaucoup évolué depuis les débuts de l’Olympisme moderne. Ainsi, la
notion de Responsabilité Sociale de l’Entreprise semblerait pouvoir répondre à certains
enjeux du sport moderne et compenser ainsi le recul ou du moins, la moindre influence
des valeurs inhérentes au sport telles que décrites dans la Charte Olympique. C’est ce
dont l’Olympique Lyonnais, un des meilleurs clubs de football français, a pris conscience
ces dernières années. Suite à ses sept titres consécutifs de Champion de France entre
2002 et 2008, et à ses nombreuses participations en Championnat Européen (Ligue des
Champions), sa performance sportive n’est plus à démontrer. Cependant, depuis quelques
années ce club professionnel a pris conscience de son impact social grandissant et a décidé
de s’engager dans des pratiques de Responsabilité Sociale à plusieurs niveaux : création
d’une Fondation en 2007, d’un fond de dotation, un futur Stade à financement privé (et donc
propriété du club) en accord avec les principes de développement durable, des politiques
d’insertion par l’emploi, etc.
7
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
Une présentation de ce concept est alors nécessaire pour comprendre les enjeux de la
Responsabilité Sociale dans le Sport professionnel.
Le concept de « Responsabilité », tout d’abord, est un concept instable dans le champ
philosophique. Dérivant du latin respondere qui signifie « répondre de » et « se porter
garant de » (Capron et Quairel-Lanoizlée, 2007, 20), ce terme a souvent été rattaché à la
notion de faute et donc de sanction, notamment dans son acception juridique. Néanmoins,
l’acceptation philosophique du terme dépasse cette imputabilité de la faute et le rapproche
de la notion d’obligation ou d’engagement. Pour Hans Jonas (1990), par exemple, « l'éthique
a affaire à des actes, qui ont une portée causale incomparable en direction de l'avenir et
qui s'accompagnent d'un savoir prévisionnel peu importe son caractère incomplet �…�.
Tout cela place la responsabilité au centre de l'éthique, y compris les horizons d'espace
et de temps qui correspondent à ceux des actions » (22). Ainsi, la responsabilité devient
une véritable modalité d’action participant à forger le concept de Responsabilité Sociale de
l’Entreprise.
Ensuite, même si les origines du principe de la Responsabilité Sociale sont relativement
anciennes et peuvent être par exemple reliées à certains préceptes de l’éthique protestante,
comme cela est présenté dans l’ouvrage de Weber, le concept n’apparaît dans la littérature
qu’à partir des années 60. Généralement la paternité du terme « Responsabilité Sociale de
l’Entreprise » est attribuée à l’économiste keynésien Howard R. Bowen (Carroll, 1979). En
1953, il publie un ouvrage « Social Responsibilities of the Businessman », où il donne une
définition précise de ce qu’il considère être la Responsabilité Sociale de l’Entreprise :
« Le terme de Responsabilités Sociales des hommes d’affaires sera utilisé
fréquemment. Il renvoie aux obligations des hommes d’affaires de suivre les
politiques, de prendre les décisions, ou de suivre les orientations qui sont
désirables en termes d’objectifs et de valeurs pour notre Société. Cette définition
n’implique pas que les hommes d’affaires, en tant que membres de la Société,
ne disposent pas d’un droit à critiquer les valeurs acceptées au sein de la
Société et à contribuer à leurs améliorations. En effet, au vu de leur grands
pouvoir et influence, il peut sembler indispensable qu’ils prennent part à ce
débat. Cependant, nous faisons l’hypothèse qu’en tant que subordonnés à
la société, ils ne doivent pas mépriser les valeurs socialement acceptées ou
placer leurs propres valeurs au dessus de celles de la Société. Des synonymes
de la responsabilité sociale sont ‘la responsabilité publique’, les ‘obligations
sociales’, ou la ‘morale d’entreprise’. Le terme doctrine de la responsabilité
sociale renvoie à l’idée, désormais largement exprimée, selon laquelle la prise
en compte volontaire d’une responsabilité sociale de l’homme d’affaires est, ou
pourrait être, un moyen opérationnel pour résoudre des problèmes économiques
et atteindre plus globalement les objectifs économiques que nous poursuivons
» (1953, 6).
Depuis, de multiples définitions de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise ont été
proposées. En 1979, Archie B. Carroll a proposé un cadre conceptuel pragmatique qui
distingue quatre niveaux de responsabilité de l’entreprise, pouvant être appréhendé de
manière pyramidale :
(Graphique à consulter sur place à la bibliothèque de Sciences-Po Lyon)
(Golli et Yahiaoui, 2003).
8
Introduction
Le premier étage de la pyramide concerne la responsabilité économique ; c’est à
dire que l’entreprise a comme principale responsabilité de produire des biens et services
pour satisfaire les besoins de la société. La deuxième responsabilité de l’entreprise est la
responsabilité légale : elle doit agir de manière compatible avec les attentes de l’Etat et
de la loi. Ensuite, la troisième responsabilité qualifiée d’éthique, souligne la nécessité pour
l’entreprise d’agir volontairement de façon à être compatible avec les attentes de la société,
les mœurs et les normes éthiques (codes de déontologie, les chartes issus des syndicats,
etc.). Enfin, la dernière responsabilité d’après Carroll est la responsabilité discrétionnaire ou
philanthropique qui propose aux entreprises d’aller au delà des responsabilités précédentes
et d’assumer ainsi des responsabilités non codifiées, et volontaristes (Carroll, 1979).
Cependant même si ces deux modélisations de la RSE sont intéressantes, elles
s’apparentent plus à une approche américaine découlant du courant du « Business Ethics ».
Afin de recentrer l’étude sur la Responsabilité Sociale et le Sport Professionnel français,
une définition récente rattachée à la norme ISO 26 000 semble se prêter correctement
à cette approche (Bayle, 2011). En 2010, l’Afnor a en effet essayé de proposer une
définition universelle de la RSE. Cette norme est ainsi le résultat d’un compromis entre
gouvernements, entreprises, syndicats, consommateurs, ONG et chercheurs d’environ 90
pays. On y retrouve toutes les notions-clés telles que l’éthique, les parties prenantes et le
développement durable, ce qui permet la convergence de l’approche nord-américaine et de
l’approche européenne. Cette définition précise que :
« La responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions
et de ses activités sur la société et sur l’environnement, se traduit par un
comportement transparent et éthique qui : - contribue au développement durable,
incluant la santé et le bien-être de la société ; - prend en compte les attentes
des parties prenantes ; - respecte les lois en vigueur et est en accord avec les
normes internationales de comportement; -et qui est inte#gre# dans l’ensemble
de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations. » (Capron, 2009)
1
(ISO, 2010 , 4)
Parlant de responsabilité d’ « organisation » à la place de responsabilité
d’« entreprise », cette définition semble être tout à fait adaptée à l’étude de la Responsabilité
Sociale des organisations sportives. De plus, à travers les définitions précédentes, le
concept de Responsabilité Sociale de l’Entreprise (ou des Organisations) semble remettre
en cause la pensée libérale de Milton Friedman pour qui seule la maximisation du profit
2
devait être considérée comme la responsabilité de l’entreprise (1970) . Cela semble être
en cohérence avec les missions des organisations sportives puisque ces dernières n’ont
jamais eu comme finalité première la maximisation du profit, mais plutôt la maximisation de
leur performance sportive, de leur performance médiatique, ainsi que de leur performance
auprès des supporters, etc. Cette vision déjà pluridimensionnelle de la performance –
plus prégnante chez les organisations sportives que dans les entreprises traditionnelles
– semble ainsi être plus propice à l’intégration d’indicateurs sociaux et environnementaux
pour améliorer leur performance de Responsabilité Sociale (François, 2010). La définition
donnée par l’Afnor est également intéressante puisqu’en partenariat avec le ministère des
sports français, les modalités d’application de l’ISO 26000 au monde sportif ont été définies
à partir de la consultation de ses acteurs. Néanmoins, après une réunion d’information
organisée en juin 2011, la commission de normalisation « Sport et développement durable »
1
ISO, (2010), Découvrir ISO 26 000. Brochure.
2
Friedman, Milton (1970), « The Social Responsibility of Business is to Increase its Profits », The New York Times Magazine.
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La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
qui devait regrouper plusieurs sous commissions (« Gestion d’équipements », « Vie Sportive
», « Fabrication », « Distribution », « Organisation d’événements ») n’a pas vu le jour (Afnor,
3
2011) .
Dans ce mémoire, afin d’appuyer notre propos sur la responsabilité sociale de
l’Olympique Lyonnais, nous avons délibérément choisi de nous appuyer sur l’approche liée
à la théorie des parties prenantes, approche déterministe de la Responsabilité Sociale de
l’Entreprise, qui depuis les années 80 s’est progressivement imposée comme la théorie de
référence pour appréhender ce concept (Gond & Igalens, 2008, 40). Il s’agit d’une approche
élargie de la conception de l’environnement de l’entreprise, qui s’attache notamment à
analyser les fondements normatifs, descriptifs et instrumentaux sur lesquels repose la prise
en compte des demandes de groupes externes autres que les actionnaires (Donaldson &
Preston, 1995).
(Donaldson & Preston, 1995, 74)
L’approche « normative » de la théorie des parties prenantes vise à expliciter les
raisons pour lesquelles les demandes de groupes qui ne sont pas nécessairement en
relation contractuelle explicite avec les entreprises peuvent être légitimes et doivent donc
être prises en considération. La perspective « descriptive » quant à elle, vise à démontrer la
pertinence empirique de cette théorie en décrivant la nature de la firme, la façon de penser
le management pour les managers, comment les membres du conseil d’administration
considèrent les enjeux de l’organisation et enfin, la façon dont celles ci sont aujourd’hui
gérées. L’organisation est alors considérée comme le lieu de rencontre de différentes parties
prenantes que le manager prend effectivement en compte. Enfin pour Donaldson et Preston,
la perspective « instrumentale »de la théorie des parties prenantes a pour but d’analyser
3
AFNOR (2011), « Responsabilité Sociétale : une future commission de normalisation pour décliner l’ISO 26000 au
monde du sport ? » <http://www.afnor.org/profils/centre-d-interet/rse-iso-26000/responsabilite-societale-une-future-commission-denormalisation-pour-decliner-l-iso-26000-au-monde-du-sport >
10
Introduction
les liens entre la pratique du management par les parties prenantes et la performance de
l’entreprise (Gond & Igalens, 2008).
Par conséquent, la Responsabilité Sociale des organisations sportives sera ici
appréhendée comme une réponse aux pressions des différentes parties prenantes ainsi
que de l’environnement de l’organisation (Campbell, 2007, 947) considérée comme un
réseau de parties prenantes. Ces facteurs d’influence poussant les organisations sportives
à s’engager dans des pratiques de responsabilité sociale seront analysés plus précisément
dans le corps du mémoire.
Ainsi, en prenant appui sur le cas de l’Olympique Lyonnais, une des organisations
sportives françaises les plus avancées en matière de Responsabilité Sociale, nous allons
nous interroger sur la valeur ajoutée des pratiques de responsabilité sociale dans le
domaine précis du football professionnel français et nous demander en quoi les pratiques
de Responsabilité Sociale sont pertinentes dans ce secteur et permettent d’aboutir à un
management responsable du sport ?
Dans une première partie, nous allons faire un état des lieux général de la
Responsabilité Sociale dans le sport avec une mise en perspective des différences entre
l’approche nord-américaine, où la RSE dans le sport est très avancée, et l’approche
européenne où les recherches sont embryonnaires et hétérogènes sur ce sujet.
Dans une deuxième partie, en étudiant plus précisément les pratiques de l’Olympique
Lyonnais, le rôle de la Responsabilité Sociale dans le football professionnel sera explicité
et celle ci sera considérée comme une réponse aux multiples enjeux auxquels les clubs
professionnels doivent désormais faire face.
Enfin, la troisième partie sera consacrée à l’analyse de l’effectivité réelle et de la
pertinence des pratiques de responsabilité sociale dans ce domaine particulier.
La méthodologie adoptée repose sur plusieurs procédés :
- une étude approfondie de la littérature –notamment anglophone, relative à ce sujet.
- le recueil d’informations sur le terrain pour l’étude de mon cas pratique. Cette partie
terrain fut menée essentiellement à travers des interviews de professionnels du secteur
de la RSE et du sport, de professionnels plus spécifiquement travaillant pour la plupart à
l’Olympique Lyonnais, d’observations d’événements organisés par l’Olympique Lyonnais
dans le cadre de leur politique RSE, et d’analyse de leur support de communication :
dossiers de presse, site Internet, rapports annuels etc.
- analyse du cas pratique au regard des éléments théoriques et mise en perspective.
Le tout moins dans une visée de confirmation ou d’infirmation des théories mais
de questionnement de la pertinence de l’application de la notion de RSE au football
professionnel français (opportunités et résultats).
11
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
I. La Responsabilité Sociale de
l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux
général
Avant de commencer, il est nécessaire de préciser les différences fondamentales
entre l’approche européenne et l’approche américaine de la Responsabilité Sociale de
l’Entreprise, qui auront des répercussions sur notre étude de la Responsabilité Sociale des
Organisations Sportives.
1-1) L’Europe et les Etats-Unis : deux logiques
d’approche différentes de la RSE
Les auteurs s’accordent tout d’abord à dire que la notion de Responsabilité Sociale de
l’Entreprise, traduction du terme anglo-saxon de Corporate Social Responsibility (CSR) ,
est apparue en premier sur le continent américain . Cependant sous sa forme « implicite »,
des prémisses de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise ont pu être identifiés au 19ème
et 20ème siècle en Europe sous la forme notamment du paternalisme d’entreprise (Ballet
& de Bry, 2001).
Tout d’abord, la principale différence entre les deux approches est une différence de
perspective. Aux Etats-Unis la Responsabilité Sociale de l’Entreprise puise ses origines
dans une perspective religieuse et philanthropique alors que l’approche européenne émerge
d’une perspective politique et met en avant la contribution au développement durable plus
que l’éthique en elle même.
a) Une approche américaine religieuse et philanthropique: éthique et
risque individuel
L’ouvrage d’Howard Bowen paru en 1953, Social Responsibilities of the Businessman,
en plus de porter la paternité du terme, affirme l’origine religieuse et plus précisément
protestante du concept dans son approche américaine. Bowen, lui même pasteur protestant,
a proposé une vision en accord avec les principes de la Bible en se référant par exemple
au « stewardship principle » et au « charity principle », étant respectivement le principe
d’une gestion responsable de la propriété sans altérer la propriété d’autrui, et le devoir
des personnes riches à venir en aide aux personnes moins fortunées (Capron, QuairelLanoizlée, 2007, 7). De plus la parution de l’ouvrage de Bowen Social Responsibilities of
the Businessman (1953)résulte de la commande du conseil fédéral des églises du Christ
en Amérique (Federal Council of the Churches of Christ in America) qui s’est lancé dans
une étude plus large concernant l’éthique chrétienne et la vie économique (Acquier et
12
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
Gond, 2005). Cette étude reprend la thèse soutenue par Max Weber, selon laquelle des
facteurs psychologiques et d’éthique protestante affectent les décisions managériales. Ainsi
certaines valeurs du puritanisme et du calvinisme auraient participé à l’élaboration et à
l’encadrement du capitalisme (Weber, 1967). L’approche américaine de la Responsabilité
Sociale de l’Entreprise affirme ainsi l’idée d’un contrat implicite entre l’entreprise et la
société. En effet contrairement à l’approche européenne qui considère la relation entreprise
et société de manière « institutionnaliste », l’approche américaine la considère comme
« contractualiste » (Capron, 2006). En utilisant les termes à connotation religieuse tels que
trusteeship et stewardship Bowen souligne dans son ouvrage que ce contrat implicite repose
sur l’idée selon laquelle la propriété n’est pas un « droit absolu et inconditionnel » (18)
mais au contraire que celle ci ne peut être affirmée et légitimée que si les propriétaires et
l’administration de l’entreprise participent à améliorer le bien-être de la société.
La RSE serait ainsi considérée comme le moyen de corriger le système, de réparer
les abus, l’individu étant au centre de tout. Les externalités négatives provoquées par
l’entreprise seraient donc compensées par les activités philanthropiques menées par le chef
d’entreprise. L’éthique et la philanthropie combattraient l’immoralité du système mais sans
aucune intervention des pouvoirs publics, qui dans la conception américaine sont accusés
de limiter la liberté individuelle (Capron, Quairel-Lanoizlée, 2007). De fait, les fondations
philanthropiques auxquelles beaucoup d’entreprises américaines ont recours, peuvent être
considérées comme « une production privée de politiques publiques » (Boidin et al, 2009,
37).
A côté de cette conception américaine de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise,
basée sur des préceptes religieux et éthiques, l’Europe impose une vision politique de la
RSE qui est directement reliée à la promotion du développement durable.
b) Une approche européenne politique : Développement Durable et
Risque collectif
Si l’on regarde les publications de la Commission de l’Union Européenne au sujet de la
RSE, deux textes paraissent intéressants : le livre vert « Promouvoir un cadre européen
pour la responsabilité sociale des entreprises » publié en 2001 ainsi que la publication
en 2002 du rapport : « La responsabilité sociale des entreprises. Une contribution des
entreprises au développement durable ». Ces deux rapports, débarrassés des perspectives
éthiques et religieuses consacrent une vision politique de la Responsabilité Sociale des
Entreprises. En effet, ces deux publications visent à inciter les pays de l’Union Européenne
et leurs entreprises à s’engager dans des pratiques volontaires de RSE, ce qui permettra
à terme de répondre à un des objectifs de l’Union :
« Le défi à relever au niveau européen consiste à déterminer comment la
responsabilité sociale des entreprises peut aider à atteindre l'objectif de
Lisbonne, à savoir construire une économie de la connaissance dynamique
et compétitive fondée sur la cohésion. Le Conseil européen de Lisbonne a fait
spécialement appel au sens des responsabilités des entreprises dans le domaine
social pour les bonnes pratiques liées à l'éducation et la formation tout au long
13
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
de la vie, à l'organisation du travail, à l'égalité des chances, à l'insertion sociale et
4
au développement durable. » (Commission Européenne, 2001, 5)
Dans cette conception de la RSE, l’organisation est responsable à l’égard de la société
et des parties prenantes de sa communauté, mais également à l’égard des parties
prenantes appartenant aux générations futures. Cette approche européenne de la RSE
repose ainsi sur l’idée que les perspectives sociales, environnementales et économiques
ne seraient finalement pas si antithétiques que ça. En effet, dans la conception européenne,
la responsabilité sociale des organisations « au sens pratique du terme, se trouve
concrétisée au travers du concept ‘Triple Bottom Line’: prospérité économique, respect de
l’environnement, respect et amélioration de la cohésion sociale » (Pesqueux, 2002, p. 157).
Ce concept traduit bien l’approche européenne de la RSE basée sur le développement
durable qui est souvent représentée par un triangle pour mettre en évidence les trois
objectifs poursuivis : l’un est économique (création de richesses pour tous à travers des
modes de production et de consommations durables), l’autre est écologique (conservation
et gestion des ressources) et le troisième est social (équité et participation de tous les
groupes sociaux). Le principe du développement durable est donc d’équilibrer ces trois
dimensions afin d’éviter que la poursuite d’un objectif se fasse au détriment des deux autres.
Ces pratiques entrent dans le cadre du mouvement de « régulation civile » qu’Aggeri et
Godard décrivent comme passant par de « nouvelles demandes de consommateurs pour
des produits éthiques, de mouvements sociaux (boycotts, action militante des ONG, etc.),
de pressions d’investisseurs se voulant socialement
responsables et, d’affirmation de
valeurs véhiculées par les dirigeants et les employés » (2006, 14). Ainsi la conception
européenne de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise se recentre autour du concept de
5
la « soutenabilité » . Contrairement à la perspective américaine qui à travers l’éthique,
oppose le Bien et le Mal, la perspective européenne souligne l’enjeu de survie de la
communauté et des espèces vivantes de la Terre. D’après Capron (2006), il s’agirait ainsi
de réussir à assurer les besoins vitaux de la communauté mondiale (rôle de l’économie),
tout en conservant les conditions de reproduction de la nature (dimension écologique), avec
des relations sociales d’équité (préoccupation sociale). Ainsi la vision européenne de la
responsabilité sociale de l’entreprise est intimement liée celle d’un risque collectif.
Pour expliquer cette différence fondamentale entre l’approche américaine et
européenne, certains comme Rifkin (2005) avancent un profond choc des valeurs:
« Le rêve européen fait passer les relations communautaires avant l’autonomie
individuelle, la diversité culturelle avant l’assimilation, la qualité de vie avant
l’accumulation de richesses, le développement durable avant la croissance
matérielle illimitée, l’épanouissement personnel avant le labeur acharné, les
droits universels de l’homme et les droits de la nature avant les droits de
propriété, et la coopération mondiale avant l’exercice unilatéral du pouvoir » (14).
Cela est également expliqué par le fait que la sociologie européenne a une vision
à dominante holiste (et donc défend une responsabilité collective), contrairement à
la discipline nord américaine qui avance une approche relevant de l’individualisme
méthodologique (Capron, 2006).
4
COMMISSION DE L’UNION EUROPÉENNE, (2001), Livre vert « Promouvoir un cadre européen pour la responsabilité
sociale des entreprises », Bruxelles. http://europa.eu/legislation_summaries/employment_and_social_policy/
employment_rights_and_work_organisation/n26039_fr.htm, Consulté le 14/04/2012.
5
Soutenabilité : angliscisme dérivant du terme « sustainability »
14
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
Puisque les entreprises européennes sont incitées à dépasser les obligations légales et
contractuelles (Commission Européenne, 2001), celles ci ne sauraient réduire leurs actions
RSE à « des expressions de compassion charitable ». A la place, la RSE est « censée
pénétrer le système de management, comme le recommandent beaucoup de dispositifs nés
en Europe » (Capron, 2006, 10).
Ces différences d’approches de la Responsabilité Sociale des Entreprises vont avoir
des impacts dans les faits. En effet, le sport américain et le sport européen ont deux niveaux
d’engagement sensiblement différents dans les pratiques de Responsabilité Sociale : le
modèle américain est relativement ancien et avancé alors que le modèle européen, sur qui
la littérature est peu nombreuse, est encore au stade embryonnaire et les pratiques y sont
très hétérogènes.
1-2) Les impacts de ces différences d’approches RSE
dans le Sport Américain : Un modèle ancien et avancé
outre atlantique
La question de la Responsabilité Sociale dans le domaine du sport professionnel américain
a été abordée assez tôt, que ce soit par les clubs ou les ligues sportives. En conformité avec
la tradition philanthropique américaine, les actions sont principalement à portée caritative
et charitable.
a) Etat des lieux des pratiques US : Programmes RSE développés
notamment par les ligues.
Le premier partenariat notable en matière de Responsabilité Sociale dans le domaine
du sport américain fut celui mené par le club professionnel de baseball, les Red Sox de
Boston qui depuis 1953 mène des actions auprès de l’association The Jimmy Fund dans
la lutte contre le cancer (Robinson, 2005). Plusieurs clubs professionnels ont ensuite suivi
l’exemple et ont crée leur propre partenariat avec des organisations charitables locales ou
avec des organisations caritatives qu’ils ont-eux même fondées. En 1987 par exemple, le
club de basket Chicago Bulls a initié sa propre organisation : « The CharitaBulls nonprofit
organization. ». Néanmoins, si les clubs sportifs professionnels tels que le club des Red Sox
de Boston ou encore celui des Chicago Bulls ont initié ce mouvement, ce sont avant tout les
ligues américaines majeures (National Basket Association (NBA), National Football League
(NFL), National Hockey League (NHL), Major League Baseball (MLB) notamment) qui ont
favorisé le développement et l’essor des politiques de Responsabilité Sociale réalisées par
ces mêmes clubs nord-américains (Bayle, 2011).
Frise chronologique des différentes pratiques de Responsabilité Sociale initiées par les
quatre ligues majeures professionnelles. (Babiak, 2010, 532).
Ainsi autour des années 80, les ligues sportives majeures des Etats Unis ont toutes créé
leur propre fondation telles que NFL Charities en 1973, MLB Charities en 1986 et ont initié
de larges programmes à dominante sociale. La National Basket Association, ligue de basket
américaine a par exemple lancé le programme « Read to achieve » en 1994. Celui ci répond
à des objectifs d’éducation, avec pour principale mission d’inciter les jeunes américains à
15
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
la lecture. Du côté de la santé, la ligue de football américain (NFL) a lancé un programme
« Play 60 » destiné à combattre l’obésité par la pratique du sport. L’un des commissaires
de la Ligue de football américain a d’ailleurs déclaré:
« Le football ne se définit pas seulement selon ce qu’il se passe sur le terrain. Il faut
aussi regarder ce qu’il se passe hors du terrain. Notre engagement envers nos fans et les
communautés qui nous soutiennent ne se termine pas quand le coup de sifflet final est
donné. L’engagement de la Ligue de Football Américain envers notre environnement est fort
6
et a grandi au fil des années. » (National Football Association, 2009). (Babiak, 2010, 531).
Leur fondation NFL Charities créée en 1973, met à la disposition d’associations
caritatives américaines comme « the Boys and Girls Clubs of America » ou encore « the
Armeican Heart Association » près de 10 millions de dollar chaque année.
Les ligues américaines ont ainsi un rôle important de catalyseur de pratiques de
Responsabilité Sociale au sein du secteur sportif professionnel américain. En effet, la plupart
des programmes initiés par les ligues sont repris par les clubs et s’ajoutent aux programmes
que ces derniers avaient déjà développés. L’équipe professionnelle de baseball, les Atlanta
Braves, a par exemple mis en place le programme « Straight A » qui vise à promouvoir le
bon comportement des jeunes américains à l’école, en échange de places pour assister
aux matchs de l’équipe. Dans certains cas, en plus des programmes impulsés par les ligues
et les clubs, ce sont les joueurs eux même qui développent leurs propres actions. Peyton
Manning, un joueur talentueux des Denver Broncos a par exemple crée sa propre fondation
« Peyton Manning’s PeyBack Foundation » en 1999, avec pour mission de soutenir les
enfants américains en difficulté ainsi que les orphelins afin de leur offrir autant d’opportunités
que les enfants privilégiés (Babiak et Wolke, 2006).
Ainsi les programmes de Responsabilité Sociale dans le sport américain sont nombreux
et divers. L’élan impulsé par les ligues majeures américaines dans les années 70 a favorisé
un essor important des programmes caritatifs et philanthropiques auprès des clubs et des
joueurs. Un tel essor de pratiques sociales peut être expliqué par de nombreuses raisons
culturelles et structurelles propres au secteur sportif américain.
b) Raisons culturelles et structurelles : les structures du sport
américain favorables à un tel développement
La première raison qui explique un engagement si avancé en matière de Responsabilité
Sociale dans le domaine du sport professionnel américain est liée à la forte tradition
philanthropique du pays, présentée précédemment. Une étude a démontré qu’en 2010,
290.89 milliards de dollars avaient été consacrés à des œuvres caritatives (Giving USA,
7
2011) . Et 5% de ce budget (soit 15,29 milliards) a été apporté par les entreprises/
organisations (auxquelles se rattachent les ligues sportives). Cet engagement fort au travers
d’actions philanthropiques est expliqué par la corrélation entre un bas niveau de dépenses
publiques aux Etats-Unis et un secteur privé et associatif très développé. Cette tradition
de « corporate philanthropy » que nous considérons aujourd’hui comme des actions RSE,
6
« The game of football is about more than making plays on the field. It is about making them off the field as well. Our
commitment to fans and the communities that support us does not end when the final seconds tick off the game clock. The NFL’s
commitment to public ser- vice is strong and has grown over the decades. »
7
GIVING U.S.A (2011) The annual report on philanthropy for the year 2010. http://www.givingusareports.org/, Consulté le 13/04/2012.
16
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
remonte notamment aux pratiques des grandes compagnies d’aciers, de voies ferrées, etc.
ème
au 19
siècle (Godfrey, 2009).
De plus, les pratiques philanthropiques des clubs sportifs notamment illustrées par
le partenariat ancien entre l’équipe des Red Sox de Boston et The Jimmy Fund, sont
également expliquées par le statut même de ces clubs professionnels. En effet afin
d’instrumentaliser leurs politiques sociales, les clubs sportifs américains qui sont des clubs
franchisés (et donc sont admis à la ligue sportive américaine via le processus commercial
de franchise), ont la possibilité de se constituer en fondation publique (public charity), privée
(public foundation) ou sous l’égide d’une plus grande fondation (donoradvised fund). Ces
fondations ont l’avantage d’être exonérées d’impôts sur le revenu et permettent également
aux donateurs de bénéficier d’avantages fiscaux (Bayle, 2011). D’ailleurs les franchises
américaines du domaine sportif sont depuis longtemps dirigées par d’importants chefs
d’entreprises traditionnelles. Paul Allen, un des fondateurs de la compagnie Microsoft avec
Bill Gates est par exemple propriétaire de la franchise des SeaHawks de Seattle en foot
américain, et des TrailBlazers de Portland en NBA (basket) (Bayle, 2011). Cela a favorisé
le développement d’une véritable culture d’entreprise au sein des franchises sportives. Ces
grandes fortunes américaines symbolisent la culture du giving back. En effet, beaucoup
de ces grands hommes d’affaires redistribuent une partie de leur fortune afin de satisfaire
plusieurs de leurs intérêts et notamment afin de ne pas se voir considérer comme de
mauvais citoyens (Adams et Knutsen, 1994).
En parallèle à ces raisons culturellement inhérentes à la société nord américaine,
des raisons structurelles sont à développer. Il est en effet impensable en économie et
sociologie du sport, de comprendre la régulation du sport sans analyser le poids des
structures et des choix institutionnels (Andreff, 2007). Ainsi, la structure même des ligues
majeures nord américaines (NBA, MLB, NFL et NHL) leur confère un pouvoir important de
régulation sportive et économique. Etant constituées en ligues fermées, le principe est celui
d’un cartel où les clubs ni ne montent ni ne descendent en division inférieure à l’opposé
d’une ligue européenne par exemple, où les clubs qui participent au championnat national,
suivant leur performance sportive peuvent être promu en division supérieure ou relégué en
division inférieure à la fin du championnat (Andreff, 2007). Ce fort pouvoir institutionnel que
détiennent les ligues sportives américaines explique notamment la diffusion des pratiques
de responsabilité sociales initiées par les ligues auprès des clubs franchisés. Cependant,
bien que contraire aux lois anti trust américaines (Sherman Act, 1890), la Cour Suprême,
lors de l’affaire du Sports Broadcasting Act (1961) a décidé d’exempter les ligues sportives
américaines au motif qu’elles sont une « exhibition publique et non un commerce » (Andreff,
2007, np). Le droit d’entrée à payer pour prendre part au championnat étant très élevé, les
propriétaires des clubs franchisés sont bien souvent de richissimes hommes d’affaires ce
qui expliquent les multiples fondations créées ou activités caritatives initiées, ce qui peut
mener bien souvent à « des pratiques de philanthropie exacerbées » (Bayle, 2011, 88).
Ces caractéristiques propres au secteur sportif professionnel nord américain sont très
différentes de celles du secteur sportif européen et notamment français. Avec des traditions
et des conceptions de responsabilité sociale différentes entre les deux continents, les
pratiques de Responsabilité Sociale dans le secteur du sport sont évidemment différentes.
Si les pratiques nord américaines sont très portées sur la philanthropie et les actions
charitables, les pratiques européennes –bien moins avancées que celles d’outre Atlantique,
ont pris une voie sensiblement différente.
17
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
1-3) Pratiques Hétérogènes dans le Sport Européen et
embryonnaires dans le Sport Français
Contrairement aux pratiques de Responsabilité Sociale dans le milieu du sport professionnel
nord américain, les pratiques européennes et notamment françaises sont à un niveau
relativement embryonnaires. Plusieurs raisons expliquent ce retard bien qu’il ne faille pas
négliger cependant, le potentiel de développement de pratiques de Responsabilité Sociale
dans certains pays, certaines villes telles que Lyon, terreaux d’une tradition humaniste forte.
a) Etat des lieux des pratiques européennes et françaises
Au niveau européen tout d’abord les pratiques de Responsabilité Sociale au niveau du sport
professionnel sont hétérogènes. Une constante peut néanmoins être notée : étant donné les
pouvoirs moindres dont disposent les ligues sportives européennes, l’engagement dans des
pratiques de Responsabilité Sociale est directement à l’initiative des clubs professionnels.
De plus contrairement aux Etats Unis, les initiatives de Responsabilité Sociale du sport
professionnel européen sont globalement concentrées sur un seul sport : le football.
Le Royaume Uni par exemple, souvent considéré comme « la terre du football
européen » (Breithbarth & Harris, 2008, 192), est depuis longtemps sensibilisé à l’impact que
peut avoir le sport sur la société et les clubs anglais de football sont ainsi engagés depuis
longtemps dans des pratiques sociétales. Même si les prémisses de la Responsabilité
Sociale de l’Entreprise sont apparues outre Atlantique, celles de la Responsabilité Sociale
du Sport sont à chercher du côté de la Grande Bretagne. En effet les premiers clubs de
football anglais (Everton, Aston Villa, Fulham, Southampton…) furent établis au XIX° siècle
par les Eglises anglicanes, protestantes et catholiques, qui considéraient le football comme
un excellent outil pour aider les jeunes sans abris. Les enfants et adolescents étaient ainsi
recrutés par les équipes de football de la paroisse tout en étant nourris, instruits et intégrés
dans la vie de la communauté (Rosca, 2011). Vinrent ensuite les clubs de football fondés
par les entreprises elles mêmes afin de répondre à un problème auquel les compagnies
britanniques durent faire face pendant la Révolution Industrielle. Les conditions de travail
difficiles laissaient peu de temps libre aux employés pour se divertir et l’un des seuls
plaisirs de ceux-ci, était de se rendre au bar à la fin de la journée. Conscients des dangers
de l’alcoolisme sur leurs employés, les entreprises essayèrent de régler ce problème et
fondèrent ainsi leur propre équipe de football afin de permettre aux ouvriers, de se relaxer
et de se divertir à travers le football (White, 2009). Les ouvriers, dans un meilleur état
d’esprit, augmentaient ainsi leur productivité au travail ce qui bénéficiait aux entreprises. La
manufacture d’armes à feux « Woolwich » fonda ainsi le club d’Arsenal, tout comme « York
Railway Company » qui établit le fameux club de Manchester United, un des clubs actuels
les plus performants au niveau européen. Un autre exemple frappant, fut celui du club de
West Ham United, fondé en 1895 par la compagnie « Thames Ironworks » afin d’améliorer
les relations entre les travailleurs qui avaient l’habitude de faire grève et la direction (Rosca,
2011). Encore aujourd’hui, la fédération de football anglaise « the Football Association »
pense que le football anglais a une place unique au sein de la société britannique et
peut ainsi être un outil efficace pour mener des pratiques de Responsabilité Sociale. « On
pense également que le gouvernement peut et doit utiliser le pouvoir du football à cet
18
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
8
effet » (the Football Association, 2005, 33) en parlant de la Responsabilité Sociale de
l’Entreprise. De nombreux clubs professionnels se sont donc lancés dans des programmes
de Responsabilité Sociale qui se veulent anticipateurs et préventifs notamment au sujet
des jeunes et de leur futur. Ainsi, de nombreux clubs ont noué des partenariats avec des
écoles locales et collaborent avec elles afin de permettre un avenir clément aux jeunes
britanniques mais également de former des supporters de football citoyens et éduqués ou
encore des futurs joueurs pour le club (Ackerman, 1973). Un bon exemple, est le programme
initié par le Club d’Arsenal, « Arsenal Double Club », un programme entre le club et le
stade d’Arsenal qui consiste à développer le football à l’école, mais aussi après l’école et
pendant les vacances. Le club possède depuis plusieurs années un service « Arsenal in
the Community » qui organise la politique sociale du club. Un des autres enjeux cher au
club britannique est la lutte contre le racisme et la promotion de la diversité (Breithbarth &
Harris, 2008).
L’Espagne, considérée comme l’un des pays les plus talentueux dans la pratique du
football professionnel et notamment, a lui aussi pris conscience de l’impact social de ses
clubs professionnels. Le FC Barcelone, l’un des clubs les plus puissants d’Europe et sa
fondation ont par exemple établi un partenariat emblématique en 2005 avec l’Unicef. Ce
club au mode de fonctionnement original dans le monde du football –un statut associatif qui
repose sur ses supporters, les « socios », environ 177 000 espagnols qui prennent part dans
9
les décisions du club a décidé de soutenir les projets de l’Unicef en versant 1,5 millions
d’euros par an sur 5 ans (Bayle & Mercier, 2008). Le logo de l’Unicef apparaît d’ailleurs au
dos du maillot des espagnols. Ce partenariat n’est qu’un partenariat parmi tant d’autres.
En effet la Fondation du FC Barcelone créée en 1994 s’est engagée dans de nombreux
programmes et soutient également de multiples associations et organisations (l’Unesco,
The International Network of Solidarity Centre etc.) avec pour objectif de promouvoir un
football plus juste.
La France, quant à elle, n’a développé ses pratiques de Responsabilité Sociale que
tardivement en comparaison à ses voisins européens. Au football, il n’y a actuellement que le
Paris Saint Germain et l’Olympique Lyonnais qui aient crée leur Fondation (respectivement
en 2000 et 2007), alors que les autres clubs n’agissent que lors d’actions ponctuelles. Au
rugby, le Racing Club de Narbonne est le premier club à avoir développé un « Agenda 21 »
en 2008 afin de rapprocher les valeurs du rugby de celles du développement durable. Sans
avoir initié d’actions ou de partenariats emblématiques, le club de rugby a développé 15
engagements concernant les volets sociétaux, économiques et environnementaux, comme
par exemple :
« Engagement 1 : Préparer la reconversion des joueurs, promouvoir la
préparation de la reconversion, sensibiliser les parents, développer l'activité de
l'organisme de formation # Engagement n° 2 : Optimiser le temps hebdomadaire
pour permettre aux joueurs de se former # Engagement n° 7 : Garantir et
transmettre les valeurs du rugby et être un acteur d'éducation auprès de
tous # Engagement n°8 : Inciter les supporters et spectateurs à adopter des
8
« We also think that the Government can and should use the power of football to this effect » The FA. (2005). Annual report
2004-2005, http://www.thefa.com/THEFA/WHOWEARE, Consulté le 10/04/2012.
9
FC Barcelone < http://www.fcbarcelona.com/club/identity/detail/card/club-in-figures >, Consulté le 04/04/2012.
19
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
comportements en accord avec l’Agenda 21 Engagement n°11 : Maîtriser et
10
réduire les consommations d’énergie du RCNM »
Cet Agenda 21 fait suite à plusieurs programmes initiés par le Ministère des Sports qui
a publié par exemple en 2003 à l’Agenda 21 du sport français, et en 2008, la charte du
sport pour un développement durable. Dernièrement, en partenariat avec le CNOSF (Comité
National Olympique et Sportif Français), l’ADEME (Agence De l'Environnement et de la
Maîtrise de l'Energie) et le CNDS (Centre National pour le Développement du Sport), le
Ministère des sports a adopté le 27 juillet 2010 la Stratégie Nationale du Développement
Durable (SNDD). Contrairement à ce qui peut se passer aux Etats Unis, ce document
n’est en rien contraigrant, mais propose des outils et des conseils pour toute organisation
sportive souhaitant s’engager dans des programmes de développement durable. La mission
principale de cette stratégie est « d’être un déclencheur et une source d’inspiration : pour
que chacune et chacun, au cœur des projets menés, puisse s’en emparer, le faire vivre, mais
aussi l’enrichir au fil des actions, grâce à la mise en œuvre sur le site Internet du ministère
des Sports d’espaces collaboratifs et de mutualisation de bonnes pratiques qui constituent
11
un centre de ressources précieux. » (Ministère des Sport, 2010, 6) .
Cependant, malgré cette volonté des organisations sportives françaises de se présenter
comme des « clubs citoyens » (Bayle & Mercier, 2008, 14), ceux ci ont un retard majeur
en matière de pratiques sociétales concrètes en comparaison avec leurs homologues et
notamment leurs homologues anglo-saxons.
Depuis quelques années néanmoins, les clubs européens les plus importants ont tenté
de parler d’une unique et même voix en matière de Responsabilité Sociale du sport. En 2008
en effet, les 14 clubs de football européens les plus importants regroupés sous l’ancienne
organisation « G-14 » ont publié un document dans lequel ils s’engagent à contribuer
au bien être de la communauté environnante en déclarant que « les clubs européens
sont actuellement engagés plus que jamais pour affronter les problèmes sociétaux en
coopérant avec les gouvernements, ONG, sponsors, organisations privées ou publiques »
12
. Cependant, malgré cette déclaration, les pratiques de Responsabilité Sociale du sport
au niveau européen ainsi que les niveaux d’engagement que ce soit entre les pays ou à
l’intérieur des pays restent très hétérogènes. La France sur le prisme des pays engagés en
matière de responsabilité sociale des organisations sportives est à la traîne, et cela pour
plusieurs raisons.
b) Raisons du retard français en matière de Responsabilité Sociale du
sport
En France, la professionnalisation du sport ne s’est pas faite aussi tôt qu’outre-Atlantique.
Tout d’abord, comme introduit dans une partie précédente, la France et l’Europe en
général n’ont pas la même tradition philanthropique que les Etas-Unis. Les lois américaines
fiscalement avantageuses sont anciennes, contrairement aux lois européennes. Par
exemple, en France, il a fallut attendre 2003 et la loi Aillagon pour rendre le don et la
10
Racing Club de Narbonne, (2008) <http://pro.rcnm.com/presentation_agenda21.php>, Consulté le 03/04/2012
11
,
Ministère des Sports (2010), Stratégie du Développement Durable et du Sport www. sports .gouv.fr/IMG/pdf/SNDDS_finale.pdf
Consulté le 15/04/2012.
12
G-14, (2008), « Community engagement—Insights into the contribution of European club football ». http://www.bitc.org.uk/
resources/publications/community_engagement.html, Consulté le 03/04/2012.
20
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
13
création des fondations attractifs . La loi Aillagon a permis de développer le mécénat en
doublant les avantages fiscaux en proposant par exemple pour une entreprise donatrice,
une diminution d’impôt équivalente à 60% du don dans la limite d’un plafond de 0,5%
14
du chiffre d’affaires . De plus, hormis le football français, les autres sports ont pendant
longtemps fonctionné sans ligue professionnelle puisque la création de la plupart des ligues
françaises date des années 80-90 (1987 pour le Volley, 1998 pour le rugby, 2004 pour le
handball, etc.). Ainsi, contrairement aux ligues américaines qui ont joué le rôle de catalyseur
et d’initiateur de pratiques RSE auprès des clubs professionnels, les clubs français ont dû
s’emparer de cette question d’eux même et relativement récemment. Cette récente prise de
conscience de leur Responsabilité Sociale s’explique par plusieurs raisons. Tout d’abord les
clubs sportifs professionnels français souffrent d’un lourd héritage associatif qui a retardé
l’engagement dans des pratiques RSE (Bayle, 2011). En effet, pendant longtemps les clubs
français sont restés sous un statut amateur et bien que désormais la législation française
contraignent les clubs professionnels à adopter un statut de sociétés commerciales au delà
15
de certains seuils , beaucoup de clubs sportifs emploient des sportifs professionnels en
conservant leur forme associative. De plus, cette proximité entre sport professionnel et
monde amateur est également soulignée par la possibilité pour les clubs professionnels de
conserver leur association support (ex : OL Association). Ainsi, ce fort héritage associatif
a retardé la prise de conscience de l’impact social et économique des clubs sportifs,
les dirigeants de clubs se retranchant derrière l’alibi des valeurs déjà socialisantes du
sport. De plus le modèle européen du sport professionnel s’est établi de façon différente.
La gouvernance européenne est totalement opposée à la gouvernance nord américaine
reposant sur des ligues fermées avec un fort pouvoir institutionnel sur les clubs membres.
En effet, considérées comme « ligues ouvertes », avec une organisation pyramidale où
les clubs peuvent monter ou être relégués en championnat supérieur ou inférieur, leur
mobilité dépend de leurs performances sportives. Alors que la concurrence économique
est primordiale dans une ligue fermée américaine (si une franchise a un trop grand déficit
elle peut être vendue), le modèle européen fait primer la compétition sportive et c’est
pourquoi les clubs professionnels en Europe sont bien souvent déficitaires si les résultats
sportifs ne suivent pas. Organisée de cette façon, les ligues n’ont quasiment aucun pouvoir
institutionnel sur les clubs étant donné que seuls leurs résultats sportifs leur permettent de
rester ou non dans les championnats.
De plus, si la tradition américaine de Responsabilité Sociale se veut réticente de
l’intervention étatique, le retard des clubs français en matière de Responsabilité Sociale à
caractère volontaire a été pendant longtemps dû à la forte intervention des pouvoirs publics
dans ce domaine. En effet, un des dispositifs français mis à disposition des entreprises
privées, associations ou clubs sportifs sont les Missions d’Intérêt Général (MIG) qui leur
permettent en échange de leur engagement dans ces missions d’obtenir des subventions
de l’Etat. D’après le code du sport (article R 113-1) les subventions versées par la collectivité
ne peuvent dépasser 2,3 millions d’euros par saison sportive de la discipline concernée.
Ces missions d’intérêt général concernent selon l’article R 113-2, des actions relatives à :
« - la formation ; le perfectionnement et l’insertion scolaire ou professionnelle
des jeunes sportifs accueillis dans les centres de formation agrées dans les
13
Kauffman Sylvie (2011) http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/08/31/pourquoi-les-francais-les-plus-riches-preferent-l-etat-a-la-
philanthropie_1565814_3232.html, Consulté le 06/04/2012.
14
15
Loi Aillagon : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000791289&dateTexte=&categorieLien=id
D’après le décret R122-1 du Code du Sport, ce sont les associations sportives qui ont des recettes au delà de 1,2 millions euros
qui doivent adopter ces statuts commerciaux (Bayle, 2011).
21
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
conditions prévues à l’article L 211-4 du code du sport. -La participation
de l’association ou de la société à des actions d’éducation, d’intégration ou
de cohésion sociale, -La mise en œuvre d’actions visant à l’amélioration
de la sécurité du public et à la prévention de la violence dans les enceintes
sportives. » (Ministère du Sport, 2012).
Cependant, même si pour de nombreux dirigeants de clubs sportifs les Missions d’Intérêt
Général apparaissent comme un bon outil pour répondre aux enjeux de la Responsabilité
Sociale de l’Entreprise, cela est contraire au caractère volontaire de la RSE (Bayle, 2011).
Néanmoins, malgré des structures du sport professionnel français et une tradition
différentes, la Responsabilité Sociale du sport en France se développe petit à petit. Avant
de s’intéresser plus précisément au cas de l’Olympique Lyonnais, un des cas les plus
emblématiques pour illustrer la Responsabilité Sociale du sport français, il peut être utile
d’analyser le terrain propice de cette ville au développement de pratiques RSE dans le
sport lyonnais étant donné la forte tradition humaniste de la ville. Ainsi, l’hétérogénéité entre
les villes d’un même pays en matière de responsabilité sociale du sport serait également
expliquée par des raisons plus profondément culturelles.
c) Lyon : une tradition humaniste qui pourrait être propice au
développement de la RSE dans le sport lyonnais
Gérard Caviglia, un des responsables du Grand Stade des Lumières, en est convaincu :
« si l’OL est un des clubs les plus avancés en France c’est aussi lié à la tradition humaniste
de la ville, ca fait partie des gènes lyonnais » (2012). En effet, Lyon, souvent considérée
comme la capitale de l’humanisme français a joué un grand rôle dans la diffusion des idées
de la Réforme et du protestantisme étant donné le poids des imprimeurs lyonnais connus
16
pour leur considérations humanistes tels que Etienne Dolet, Jean de Tournes etc . Philippe
Dujardin (2011) souligne cette prégnance sociale propre à la ville de Lyon en citant Jean
Jaurès : « Nulle part ailleurs en France le problème social se pose avec autant d’acuité
qu’à Lyon » (18). L’expression de cette prégnance sociale passe par la mise en place
des premiers conseils de prud’hommes, des premières révoltes ouvrières avec notamment
l’insurrection des canuts, les premières caisses d’épargne et mutuelles etc. (James, 2006).
C’est également à Lyon, que se coordonnent les premières actions écologistes de France.
En 1972, a été fondé par Philippe Lebreton, professeur à Lyon 1, une fédération de
protection de la nature qui participera par la suite à la création de la fédération nationale
France Nature Environnement. C’est également à l’instar de la Communauté urbaine de
Lyon qu’a été établie l’une des premières chartes d’écologie urbaine du pays (Dujardin,
2011).
Et comme le précise Yves Crozet, les « références humanistes demeurent donc
indispensables dans une logique de responsabilité à l’égard des évolutions sociales, tant
locales que globales » (1998, 7).
Cette raison culturelle, soulignée par le responsable du Grand Stade des Lumières,
explique ainsi la sensibilité d’une telle ville qui se répercute plus ou moins directement sur
les organisations de la ville telles que l’Olympique Lyonnais.
Après un état des lieux général des pratiques de RSE dans le sport professionnel,
mais néanmoins nécessaire étant donné le peu de littérature disponible à ce sujet, la
16
22
Gadagne musées, « Lyon au 16° siècle, ville humaniste », Repères de visite, fiche n°9.
I. La Responsabilité Sociale de l’Entreprise dans le Sport : Etat des lieux général
responsabilité sociale des organisations sportives va être questionnée sur sa pertinence
dans le sport français. Etant donné le caractère encore embryonnaire de telles pratiques en
France, on peut s’interroger sur les raisons et le rôle que peut jouer la RSE dans le sport
professionnel, plus spécifiquement français et cela, notamment à travers l’étude d’un des
plus importants clubs de football français, l’Olympique Lyonnais et de son environnement.
23
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
II. Le rôle de la RSE dans le Sport
Français : Cas d’Etude de l’Olympique
Lyonnais
La Responsabilité Sociale des Organisations Sportives Françaises est tout d’abord
justifiée par la lente mais effective professionnalisation du football français. Avec un
impact économique et social grandissant sur la communauté, les organisations sportives
professionnelles et notamment les clubs de football professionnels tels que l’Olympique
Lyonnais, club sur lequel l’étude va porter, se doivent d’adopter un comportement de
plus en plus proche de celui des entreprises, et ainsi de considérer la Responsabilité
Sociale de l’Entreprise comme une outil approprié pour atteindre un niveau de management
responsable.
2-1) La RSE comme réponse à la professionnalisation
du sport
a) Du sport amateur au sport professionnel : L’Olympique Lyonnais et
les clubs : de véritables PME ?
En matière de responsabilité sociale des organisations, il n’est pas évident au premier abord
ème
de voir le lien qui peut exister entre football et pratiques RSE. A la fin du 20
siècle le
football français a franchit une étape importante : la transformation du sport amateur en
sport professionnel ou « sport spectacle » comme certains l’appellent. Le sport amateur,
pouvait se dédouaner de toutes pratiques de responsabilité sociale en invoquant l’alibi des
valeurs déjà sociabilisantes véhiculées par le sport en général. Cependant la transformation
du sport et notamment du football, en sport business a favorisé l’émergence d’interrogations
éthiques étant donné l’impact économique et social grandissant sur la société.
Si l’on se concentre sur le football français, les prémisses de la professionnalisation
de ce sport apparurent dans les années 1930 – soit 50 ans après la Grande Bretagne ! -,
quand la Fédération Française de Football accepta de créer une statut professionnel pour
le joueur. Cependant cela fut seulement le symbole d’une professionnalisation inachevée :
la fédération empêcha les structures des clubs amateurs d’évoluer en vouant ceux ci à
conserver leur statut d’association à but non lucratif, reposant sur des volontaires et des
directeurs non payés (Senaux, 2011). Pour les partisans du professionnalisme du football,
la seconde étape a été l’établissement d’une ligue professionnelle chargée de réguler le
secteur. En effet, « l’introduction d’une ligue professionnelle permettrait de réguler le marché
et contrôler les salaires des joueurs. Le but n’est pas de faire du profit, ce qui est interdit
24
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
17
d’ailleurs par la loi des associations de 1901 » (Senaux, 2011, 255). A Henri Delaunay,
l’un des fondateurs de la Fédération Française de Football d’ajouter que cette solution
« aurait encore l’énorme avantage de démasquer les amateurs-marrons et de lever le
secret » (Football Association, 1920 dans Wahl, 1986, 21). Cependant, la volonté d’instituer
une Amicale des clubs amateurs utilisant des joueurs professionnelséchoua.
Le processus s’intensifia des décennies plus tard suite à l’émergence des droits
télévisés et du sponsoring dans les années 80, qui bouleversa profondément la balance
financière des clubs et participa à la « commercialisation » du football. Mais ce changement
n’aurait pas été effectif sans des hommes pour l’encadrer. En effet, les années 80
marquèrent l’arrivée d’hommes d’affaires à la tête des clubs qui participèrent à faire
évoluer la vision du football vers une conception d’entreprise : « Jean-Luc Largardère
à Paris, Bernard Tapie à l’Olympique de Marseille » (Senaux, 2011, 258) ; l’ère des
businessmen dans le monde du football commença pour ne plus s’arrêter. Actuellement,
Jean-Michel Aulas à la tête de l’Olympique Lyonnais, considérée comme une « PME de 270
18
employés » par Laurent Arnaud, responsable d’OL Fondation , est lui aussi un véritable
chef d’entreprise. En effet, fondateur et dirigeant de l'éditeur de logiciels Cegid, Jean Michel
Aulas, en plus d’être le président d’un des plus grands clubs de France, est à la tête
d’une entreprise avec un chiffre d'affaires de 263,8 millions d’euros en 2011, ce qui a
évidemment des répercussions sur le management de son club de football. Laurent Arnaud,
responsable d’OL Fondation souligne le fait que Jean Michel Aulas soit « aussi dirigeant
d’une autre société beaucoup plus importante en termes d’activités et de salariés lui a permis
de développer cette sensibilité par rapport aux problématiques RSE globales (…) qu’il
n’appelle d’ailleurs pas forcément RSE ; dans le contexte de l’OL il communique beaucoup
plus sur la notion d’éthique » (2012).
En parallèle à cette arrivée d’hommes d’affaires avec leur sensibilité de chefs
d’entreprises à la tête de clubs sportifs professionnels, les années 80 furent aussi les
années d’émergence des organisations représentatives des sportifs salariés (Syndicat
National des Basketteurs en 1988, Syndicat National des joueurs de rugby en 1998) des
employeurs (Union des clubs professionnels de football en 1990, etc.) et également des
ligues professionnelles dont la Ligue de Football Professionnel qui pris son nom définitif
dans les années 90 (Barbusse, 2002). Les statuts des clubs évoluèrent eux aussi ; alors que
dans les années 30 certains étaient réticents à abandonner le statut associatif d’organisation
à but non lucratif, les clubs professionnels sont désormais libres de choisir un statut plus
adapté non plus associatif mais commercial :
- Société Anonyme d’Economie Mixte Locale Sportive (SAEMLS) : statut introduit en
1975, où l’organisation sportive est co-gérée par la collectivité et le club sportif. Mais peu
de clubs ont opté pour ce statut à quelques exceptions près (En Avant Guingamp, Istres,
Grenoble, etc.) ;
- Société Anonyme à Objet Sportif (SAOS) : société commerciale, régie par le code
du commerce avec cependant l’interdiction de distribuer des dividendes et de payer les
dirigeants, et où le club sportif support doit détenir 33% du capital au minimum. Des clubs
comme Auxerre ou Bastia ont opté pour ce statut ;
- Entreprise Unipersonnelle Sportive à Responsabilité Limitée (EUSRL) : Avec ce statut
seule l’association support prend part au capital ;
17
“The introduction of a professional league was a response to the desire of those who ran football to regulate the market and
control players’ wages. It was not to make a profit, which was forbidden anyway by the law of 1901 on associations”
18
Une PME est cependant considérée comme ayant 249 employés maximum, ndlr
25
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
- Société Anonyme Sportive Professionnelle (SASP) : statut le plus utilisé par les
clubs de football professionnels, et par l’Olympique Lyonnais par exemple. Elle permet de
distribuer des dividendes et de rémunérer ses dirigeants. Les investisseurs peuvent de plus
accéder au capital (Rapport Denis, 2003).
Avec un statut juridique très proche d’une société commerciale, l’Olympique Lyonnais
tout comme la plupart des clubs de football professionnels se sont en quelques décennies
rapprochés d’une logique d’entreprise. Des rapprochements concrets entre entreprise et
organisation sportive peuvent être soulignés. L’entreprise, à moins d’être en situation de
monopole, évolue sans cesse dans un contexte de concurrence et compétition avec une
nécessité de performance (productivité, rendement), ce qui est similaire à l’environnement
sportif (Raspaud, 2002). Le sportif professionnel est, de plus, un salarié soumis aux règles
de l’entreprise traditionnelle : une division verticale du travail (entre d’un côté personnes
chargées de les entrainer, d’organiser leur pratique sportive et de l’autre les joueurs chargés
de mettre en pratique et produire des résultats), une division horizontale du travail puisque
chaque sportif a une spécialité (en athlétisme : saut de haie, 100 mètres) ou une position
précise (en football : attaquant, centre, libéro, ailier) (Barbusse, 2002).
Ainsi l’Olympique Lyonnais, comme ses homologues, répond à « une logique
d’entreprise basée sur le profit sous la pression des enjeux financiers du spectacle sportif
professionnalisé » (Raspaud, 2002, 58) ainsi que de plus en plus sur la compétition/
concurrence entre clubs. Cette structure de 259 salariés, sous son statut de Société
Anonyme Sportive Professionnelle (SASP) a réalisé 154,6 millions d’euros de produits des
activités pour l’exercice 2010/2011 avec un excédent brut d’exploitation s’élevant à 8,9
millions d’euros (OL, 2011). Cet impact économique grandissant sur la société française a
été souligné également par l’introduction du club lyonnais en Bourse en 2007, deuxième
club professionnel français à avoir franchi le pas (après Istres). Dans une interview réalisée
en 2007, Jean-Michel Aulas déclare que :
« L'entreprise ne se réduit pas au seul club OL, mais comprend des produits
d'images, de merchandising, une chaîne de télévision qui fonctionne 24 h
sur 24, et des partenaires comme le groupe Accor, ainsi que des métiers
complémentaires de restaurations, de prestations de voyages et d'organisations
d'événements ». Selon lui, « cette opération va permettre au Groupe de disposer
de ressources nouvelles pour accélérer sa croissance et poursuivre son
19
développement maîtrisé sur une base diversifiée de revenus »
Laurent Arnaud, responsable d’OL Fondation, pense que l’introduction du club en Bourse a
« induit un certain nombre de réglementations et notamment la nécessité de faire un audit
social qui est fait chaque année » et ainsi que ca fait « partie des épiphénomènes qui ont
renforcé cette sensibilité �sensibilité à s’engager dans des pratiques de Responsabilité
Sociale de l’Entreprise� » (2012). En effet, même si la Responsabilité Sociale de l’Entreprise
repose sur un aspect volontaire et une sensibilité du chef d’entreprise dans son acceptation
commune, la réglementation française depuis 2002 peut être considérée comme un point
de départ à l’engagement dans des pratiques de Responsabilité Sociale : l’article 116 de la
loi relative aux Nouvelles Régulations Economiques (NRE), veut que le rapport annuel des
entreprises cotées en Bourse comporte des « informations sur la manière dont l’entreprise
19
LCI (2007) L’OL s’offre une introduction en Bourse, http://lci.tf1.fr/economie/entreprise/2007-01/offre-introduction-
bourse-4880621.html, Consulté le 10/05/2012.
26
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
prend en compte les conséquences sociales et environnementales de ses activités »
20
(Novethics Etudes, 2003, 15) .
Le sport, et plus particulièrement le football, est donc devenu un enjeu économique
majeur pour la société française. Ces responsabilités et missions nouvelles auxquelles
doivent faire face les clubs de football professionnel tel que l’Olympique Lyonnais
augmentent par la même la responsabilité qu’une telle organisation a envers la société et
envers ses propres parties prenantes. En effet, la professionnalisation du football français a
fait émerger depuis quelques années des problèmes, qui pour l’opinion commune, étaient
généralement réservés aux entreprises traditionnelles, ce qui justifie d’autant plus la prise
en compte de questionnements éthiques au sein des organisations sportives.
b) Le sport face à des problèmes d’entreprise
Comme démontré ci dessus, le secteur sportif a de plus en plus de points communs avec
les secteurs professionnels classiques. Tout comme eux, il n’échappe pas aux problèmes
salariaux auxquels sont confrontés généralement les entreprises traditionnelles. En juin
2010 lors de la Coupe du Monde de football en Afrique du Sud par exemple, l’équipe de
France s’est plus illustrée dans les pages faits divers que dans les pages sportives. En effet,
pour s’opposer à l’exclusion de l’un de leurs coéquipiers, –Nicolas Anelka –, les joueurs
de l’équipe de France ont catégoriquement refusé de s’entraîner et sont remontés dans le
bus, chargeant Raymond Domenech alors sélectionneur de l’équipe de France, de lire un
21
communiqué à la presse affirmant leur volonté de faire grève . Les exemples de grèves
de sportifs se sont multipliés ces dernières années et les raisons se rapprochent de plus
en plus des demandes salariales classiques. En Espagne par exemple, l’ensemble des
joueurs de football a décidé de faire grève afin de retarder la reprise du Championnat
2011. Représentés par l’Association des Footballeurs Espagnols, les joueurs « ont pris
la décision responsable et ferme d'appeler à l'unanimité à la grève pour la 1ère et la
2e journée de championnat, en 1ère comme en 2e division. Il n'y aura pas de football
22
tant que nous n'aurons pas signé une nouvelle convention collective » a déclaré Luis
Rubiales, le président du syndicat des joueurs. Beaucoup de clubs la saison précédente,
s’étaient retrouvés en incapacité de payer leurs joueurs à cause d’une dette importante du
club, comme les joueurs du club de Levante qui n’ont reçu aucun salaire durant toute la
saison 2007-2008. Les joueurs espagnols réclamèrent la création d’un fond de garantie afin
d’assurer le versement de leurs salaires. Un accord entre la ligue, les clubs et les joueurs
a pu être trouvé concernant la convention collective avec notamment la création d’un fonds
de garantie. Mais les problèmes salariaux du football professionnel ne se résument pas aux
seules grèves. Des conflits entre « salariés/employeurs » (ici considérés comme joueurs/
direction du club) ont souvent des conséquences importantes.
Un sociologue, Stéphane Béaud auteur de Traître à la Nation s’est intéressé aux causes
d’une telle tendance à la mise en grève de la part des footballeurs actuels, en prenant appui
20
Novethics Etudes, (2003), « Benchmark européen des outils d’évaluation ‘Responsabilité Sociale’ utilisables par les PME » initiée
par la Caisse des Dépôts et Consignations, www.novethic.fr/novethic/upload/ etudes / Etude _ RSE -PME.pdf
, Consulté le
17/05/2012.
21
Remise,
Christophe
(2010),
«
Les
bleus
en
grève
»,
Le
Figaro,
<http://www.lefigaro.fr/flash-
sport/2010/06/20/97003-20100620FILSPO00109-les-bleus-en-greve.php>, Consulté le 12/04/2012.
22
Egly
Florian,
(2011),
«
Le
football
espagnol
en
grève
»,
Le
Figaro,
<http://www.lefigaro.fr/football-clubs-
etrangers/2011/08/11/02017-20110811ARTSPO00357-le-foot-espagnol-en-greve.php>, Consulté le 12/04/2012
27
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
sur le cas de la grève des Bleus à Knysna. D’après lui la principale raison est la précocité
de la formation des jeunes footballeurs, la précocité également de leur début de carrière
professionnelle qui favorise la montée sur un piédestal à grande fortune du joueur de plus
en plus jeune. Par exemple, l’Olympique Lyonnais aurait offert 100 000 euros à Ben Arfa à
23
l’âge de 15 ans afin qu’il rejoigne le club lyonnais . Comme nous verrons par la suite, un
des principaux enjeux de la Responsabilité Sociale propre au sport et au football notamment
concerne justement la gestion de la formation du joueur afin de faciliter son insertion dans
le monde professionnel mais aussi sa réinsertion dans la « vraie vie » à la fin de sa carrière.
Laurent Arnaud, responsable d’OL Fondation, est convaincu qu’un meilleur encadrement
de la formation (avec en même temps une formation académique pour former aussi de
« bons citoyens »), ne fera qu’assainir le monde du football professionnel et éviter par la
suite de tels problèmes salariaux. Cela répond à la théorie de la dépendance à l’égard
des ressources qui d’après Capron et Quairel-Lanoizelée, « inscrit la RSE dans la vision
économique traditionnelle des finalités de la firme » (2007, 34). En effet, si les joueurs (les
ressources ou parties prenantes comme les appellent Freeman (1984)) ne jouent plus, la
finalité du club de football n’est plus assurée ce qui peut avoir de graves conséquences
financières. Selon eux, il faut ainsi un « management qui reconnaisse et identifie les groupes
sociaux dont dépend l’organisation, ajuste ses actions à leurs demandes » (2007, 34). Pour
beaucoup d’auteurs, l’engagement de l’organisation des pratiques RSE améliore la relation
de confiance entre les parties prenantes (par exemple ici les joueurs) et la direction et ainsi
les parties prenantes seraient plus « loyales » envers l’organisation (Chaveau & Rosé, 2003,
40). Et comme Ballet et De Bry le soulignent « la manifestation principale de cette forme de
confiance est la réduction de l’opportunisme » (2001, 268).
Un autre exemple de problème salarial auquel le secteur professionnel du football est
confronté est les attaques aux prud’hommes notamment suite à des « licenciements »
considérés comme injustifiés ou abusifs. Ce fut le cas par exemple de Claude Puel, ancien
entraineur de l’Olympique Lyonnais qui arrivé en 2008 à Lyon avec un contrat de 4 ans, fut
remercié un an avant la fin, à l’été 2011 pour avoir « été jugé responsable de la perte du jeu
24
de l'équipe et l'absence de trophées pendant trois ans » . S’opposant à cette justification,
Claude Puel attaqua son ancien employeur aux prud’hommes, en réclamant 3 millions
d’euros de salaires restant dus et 1,6 million de dommages et intérêts. Dernièrement, c’est
un joueur du PSG, Péguy Luyindula, qui est en conflit ouvert avec le club parisien. Pour
avoir été écarté du groupe sans raisons valables selon lui, le joueur inactif au PSG, avait
donc réclamé d’être libéré avant la fin de son contrat ce qui lui a été refusé. Il a décidé de
poursuivre le club parisien pour harcèlement moral dénonçant le mépris dont il fait l’objet,
et les a attaqués aux prud’hommes ; l’audience se tiendra en septembre 2012.
Le volet social de la Responsabilité Sociale de l’Organisation est ainsi décisif ; dans
le cas d’un licenciement (et donc dans le cas du football d’un contrat rompu avant son
terme que ce soit le contrat d’un entraineur ou d’un joueur), celui ci doit satisfaire à
certaines conditions éthiques : « préserver l’employabilité du salarié, le prévenir dans des
délais raisonnables, créer les conditions psychologiques les meilleures possibles avant
son départ, respecter des droits » (Ballet & De Bry, 2001, 311). Une étude de la Sofres
réalisée en 2001 souligne d’ailleurs l’importance du volet social parmi les différents volets
de la RSE. Questionnés sur les enjeux de la RSE que les organisations devraient considérer
23
Béaud, Stéphane (2011). « Les bleus dans les filets du sociologue », Libération, <http://www.liberation.fr/
sports/01012325100-les-bleus-dans-les-filets-du-sociologue> Consulté le 12/04/2012
24
hommes-10-11-2011-1394795_26.php
28
http://www.lepoint.fr/sport/le-litige-puel-ol-joue-les-prolongations-jeudi-devant-les-prud-
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
comme prioritaires, 65% des employés interrogés pensent que la priorité pour l’entreprise
est de bien traiter les salariés, d’interdire les discriminations raciales (41%), mais aussi de
25
développer l’employabilité des salariés (40%) (Sofres, 2001) . Ainsi que ce soit dans les
secteurs professionnels classiques ou dans le sport professionnel, les organisations de ces
secteurs font faces à des problèmes similaires qui pour résumer concernent généralement :
« la question de la représentation des parties prenantes notamment au sein des ligues,
la qualité des conditions de travail (rythme de la compétition sportive, des entraînements,
etc.), la gestion de la masse salariale et le problème particulièrement de l’inflation salariale,
l’implication et la fidélisation des sportifs, l’importance du turnover, etc. » (Barbusse, 2002,
395). Selon elle, cela souligne deux phénomènes : « la précocité d’un marché du travail en
cours d’organisation et les insuffisances des clubs professionnels en matière de gestion des
ressources humaines » (2002, 395). La Responsabilité Sociale des organisations sportives
est donc devenue utile et nécessaire afin d’améliorer les relations au sein de l’entreprise,
afin d’éviter au maximum les problèmes salariaux que nous venons d’évoquer.
c) Les actions RSE de l’Olympique Lyonnais pour répondre à cet
enjeu
Afin de tendre vers un management toujours plus responsable, les organisations sportives
doivent ainsi prendre en compte l’importance grandissante de la Gestion des Ressources
Humaines. L’Olympique Lyonnais en est conscient. Comme Laurent Arnaud l’a souligné, la
politique RSE du club lyonnais est basée sur trois pilliers : « des aspects RH, des aspects
sociaux plus liés avec le mécénat, et tous les aspects qui concernent le Grand Stade
notamment aspects écologiques » (2012).
Comme cela a été précisé ci dessus, les entreprises cotées en Bourses, comme l’est
l’Olympique Lyonnais, sont soumises à la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques.
Cette dernière leur demande d’établir un rapport annuel où figurent les informations relatives
à leur gestion sociale et environnementale. Sur le volet social, doivent figurer par exemple
les informations concernant l’emploi des handicapés, la parité, les budgets de formation etc.
(Saulquin, 2004).
Si l’on analyse les publications de l’Olympique Lyonnais, celui ci publie et rend
disponible sur son site Internet un rapport d’activités annuel contenant une sous partie
« Emploi ». Concernant la saison 2010/2011 l’Olympique lyonnais (SASP) a par exemple
employé 125 personnes dont une majorité en CDD (99). Le groupe a licencié 4 personnes,
a transféré 5 personnes dans une autre filiale et 5 salariés ont démissionné. Le rapport
souligne également le recours important du groupe à l’intérim (ce qui aurait représenté 3896
jours travaillés).
La formation tient également une place importante à l’Olympique Lyonnais notamment
afin que les employés améliorent leurs compétences relatives à leur poste de travail mais
aussi des formations spécialisées en informatique, langues étrangères, etc. Le coût de
l’ensemble de ces dispositifs s’élève à 1 382 K€.
Concernant l’emploi des personnes handicapées, même si l’Olympique Lyonnais au
travers de sa fondation a un partenariat solide avec Handicap International, l’objectif n’est
pas atteint. En effet l’Olympique Lyonnais a dans son effectif 2 employés handicapés en
CDI. Conscient que le quota n’est pas respecté –quota qui étant de 6% de personnes
25
SOFRES (2001), L’entreprise responsable, réalisé en exclusivité pour le TOP COM 2001, http://www.tns-sofres.com/etudes/
corporate/020201_entreprise.htm, Consulté le 28/04/2012.
29
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
handicapées au sein de l’effectif d’après la loi du 11 février 2005, le groupe note dans son
rapport qu’il a versé 26 K € à l’AGEFIPH (Association de gestion du fonds pour l'insertion
professionnelle des personnes handicapées). Cependant le rapport précise que « les
mesures prises en faveur de l’emploi des travailleurs en situation de handicap passent
davantage par des actions indirectes que par de l’emploi direct. Le Groupe fait régulièrement
appel à des établissements et services d’aide par le Travail pour du conditionnement, de
l’archivage et du stockage. » (OL, 2011).
Un autre volet RH au sein des pratiques RSE est la prise en compte de la parité
hommes/femmes. D’après l’Olympique Lyonnais, celle ci est « respectée dans la mesure du
possible », surtout depuis 2009, où le club a obtenu la reconnaissance du statut de joueuse
fédérale ce qui lui a permis de former une équipe féminine professionnelle.
L’Olympique Lyonnais est, de plus, engagé auprès d’œuvres sociales en
interne notamment en s’acquittant de dépenses en matière de titres restaurant, de régime
prévoyance, de dotation aux représentants du personnel : le montant total s’élève à 783 K
€ dont 406 K€ de subvention au Comité Inter Entreprise.
Le projet Grand Stade des Lumières est lui aussi porteur d’une volonté d’optimisation
du volet social du groupe et met notamment l’accent sur la création d’emplois. Comme le
souligne Gérard Caviglia, responsable Grand Stade, « on a évalué sur le site à proprement
dit entre 600 et 800 postes. Les soirs d’événements c’est 2000 personnes pour l’accueil,
la sécurité » (2012). Les 800 postes correspondent à des emplois permanents à temps
plein sur le site, à travers les postes administratifs du siège de l’Olympique Lyonnais (250
emplois), ses bureaux (320 emplois), le centre de loisirs (200 emplois), les restaurants
ou encore les hôtels (50 emplois) à proximité de ce complexe sportif. Cela s’ajoute aux
26
1500 postes du BTP actifs crées pour la période des travaux . C’est ainsi que la CGT de
Décines a apporté son soutien en faveur du projet Grand Stade, tout comme la Chambre de
Commerce et d’Industrie (CCI), le MEDEF-Rhône, la Chambre des métiers et de l’artisanat,
ou encore la CGPME (Confédération Générale du Patronat des Petites et Moyennes
Entreprises). En effet les représentants de ces quatre grandes institutions économiques
du Rhône se sont prononcés à l’unanimité en faveur de la construction du Grand Stade à
27
Lyon .
M. Caviglia souligne également que l’Olympique Lyonnais « a signé une convention
aussi avec l’Unis-est, une association qui a pour objet de travailler sur l’insertion des
personnes en difficulté, de façon à mettre en place un dispositif de façon satisfaisante et
pérenne en accord avec notre volonté d’insertion par l’emploi du projet Grand Stade »
(2012). Ce partenariat permettra à l’association Unis-est de recevoir 90 000€ de subvention
dont 30 000€ du Grand Lyon afin de créer une cellule emploi spécifique au Grand Stade.
L’accent sera mis sur l’embauche de personnes en situation de recherche d’emploi souligne
Kaïs Ben Moussa, directeur de l’association. Avec pour but principal de pérenniser le plus
d’emplois possibles.
Cependant, comme le précise Saulquin, les sources disponibles pour les responsables
RH afin de communiquer les informations relatives aux actions sociales –rapports annuels,
chartes, codes, informations disponibles sur les sites Internet, informations publiées dans
la presse, font appel au « déclaratif » des organisations, ce qui « biaise la qualité
de l’information obtenue » (2004, 2490). Il cite Autier (2001) « ce biais concerne la
nature effective de ce qui est mesuré : mesure-t-on la performance sociale effective des
26
27
30
http://www.grandstadeol.com/developpement-durable/insertion-emploi/
Site internet de Lyon France Webzine, « Rhône : le Grand Stade soutenu économiquement », Juin 2011
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
entreprises ou la performance des stratégies de communication des entreprises cibles ?
» (dans Saulquin, 2004, 2490) pour souligner cette limite de la Responsabilité Sociale des
Organisations, que nous développerons par la suite.
La Responsabilité Sociale de l’Entreprise apparaît ainsi comme une solution et un outil
pour faire face à la professionnalisation du secteur sportif. Les organisations sportives par
leur comportement et leur statut, se rapprochant de plus en plus de ceux des entreprises
ne pouvaient plus se cacher sous l’alibi des valeurs de l’olympisme moderne pour ne pas
assumer leurs responsabilités envers la société.
Par la suite, il apparaît logiquement que la professionnalisation d’un tel secteur s’est
également traduite par la complexification de l’environnement des organisations sportives.
Les parties prenantes à un club tel que l’Olympique Lyonnais se sont multipliées ces vingt
dernières années ce qui a fait émerger de nouveaux enjeux de management auxquels les
pratiques de Responsabilité Sociale tentent également de répondre.
2-2) La RSE comme réponse à la multiplication des
Parties prenantes dans l’environnement sportif
La Responsabilité Sociale du Football professionnel est d’autant plus nécessaire que
l’environnement des clubs de football professionnel français s’est complexifié et que les
parties prenantes se sont multipliées, à cause évidemment de la professionnalisation du
sport mais aussi des phénomènes récents propres au football : sa mondialisation, sa
médiatisation et sa marchandisation.
a) L’environnement de Olympique Lyonnais et des clubs français de
plus en plus complexe
A partir des années 80, le football français a subi de nombreux changements et évolutions.
Après une professionnalisation des clubs de football professionnels français qui sont passés
d’un statut amateur à un statut commercial, le secteur du football français s’est libéralisé.
Cette libéralisation est notamment le fait d’un arrêt décisif pour le football européen : l’Arrêt
28
Bosman , qui fit suite au litige opposant le joueur belge Jean Luc Bosman à l’UEFA,
instance de régulation du football européen, en 1995. Alors qu’auparavant les transferts
de joueurs de nationalité européenne entre clubs européens étaient limités à 3, la Cour
de Justice des Communautés Européennes a estimé que le sport devait être considéré
comme une activité économique comme les autres et donc être soumis aux règles du
marché intérieur. C’est ainsi que les quotas de joueurs étrangers furent supprimés, et les
transferts rendus libres et sans indemnités à verser (Gouguet, 2005). Pour Breithbarth &
Harris, l’arrêt Bosman a « participé à mettre fin à l’innocence du football » (2008, 185)
et a fortement contribué à sa mondialisation. Cela a également, d’après eux, renforcé les
liens entre les instances européennes et mondiales du football (FIFA, l’UEFA), et les clubs
européens. De plus la mondialisation du football passe également par toutes les pratiques
des clubs qui visent la vente ou l’achat d’un joueur étranger, ou la recherche des sponsors : le
28
Arrêt Bosman : décision de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), rendue le 15 décembre 1995 relative
au sport professionnel
31
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
marketing, la promotion de leur équipe, de leurs marques, la vente des droits TV aux chaines
étrangères, tout cela participe à la multiplication des parties prenantes du football. De plus,
la libéralisation des droits de retransmission à la télévision des matchs de football, opérée
en 1984 en France (Andreff, 2007) a également participé à faire émerger de nouvelles
parties prenantes : les chaines de télévisions locales et internationales. En parallèle à cette
médiatisation, la marchandisation du football quant à elle, a permis aux grandes marques et
grandes compagnies de sponsoriser les équipes de football et d’être également considérée
comme parties prenantes. Cet environnement de plus en plus étoffé, est décrit par Freeman
(1984) comme une « série de relations complexes interloqués » (46) entre les organisations,
les clients, les actionnaires, les employés et la communauté. Ainsi la théorie des parties
prenantes nous rappelle que les organisations sportives tels que les clubs de football
professionnel, comme toute entreprise, sont des zones d’intérêts concurrents ou divergents.
Ces différents éléments, définis comme les parties prenantes de l’organisation, ont donc
une grande importance dans la RSE puisque pour les partisans de la théorie des parties
prenantes, c’est dans l’intérêt de l’organisation d’agir de façon responsable afin de satisfaire
l’intérêt de chacun. Freeman définit précisément une partie prenante comme « un groupe
29
ou un individu qui peut affecter ou est affecté par les actions de l’organisation » (1984, 46).
La particularité du sport est d’en avoir de nombreuses, très différentes les unes des autres :
Réalisé par Anne-Laure Michel d’après le graphique de Boon (2000, 30)
Au cœur de la théorie des parties prenantes, la notion de durabilité de l’organisation
et donc de survie, repose sur l’attention portée sur ses parties prenantes, leur coopération
et l’engagement de celles-ci dans la création d’une valeur partagée avec l’organisation
(Donaldson & Preston, 1995).
Cette théorie des parties prenantes, qui s’applique parfaitement bien au secteur du
football professionnel, souligne ainsi la responsabilité élargie de l’organisation, et donc
ici de l’Olympique Lyonnais, envers ses différentes parties prenantes. Cela s’oppose à la
théorie de Friedman, pour qui la seule responsabilité d’une organisation devait être de
maximiser son profit afin de satisfaire les actionnaires de l’entreprise (shareholders). Pour
les promoteurs de la théorie des parties prenantes, la responsabilité de l’organisation est
définitivement plus large et concerne ainsi l’ensemble de ses stakeholders.
b) Un impact des clubs sur la société important : justification de la
politique d’OL Fondation
A côté des multiples responsabilités de l’Olympique Lyonnais envers ses parties prenantes,
le club professionnel lyonnais a également un fort impact sur la société entière plus
généralement, ce qui implique de nombreuses responsabilités envers celle ci. Avec la
récente professionnalisation, médiatisation et marchandisation du football professionnel
celui ci est en effet devenu un fait social majeur ces dernières années.
L’Olympique Lyonnais est un des clubs français qui réunit le plus de téléspectateurs:
en 2012 par exemple, le match PSG-OL a rassemblé 3,9 millions de personnes devant leur
poste de télévision. Ainsi France 3 a réussi à atteindre 14,7% d’audience ce soir là. Mais
cela va au delà des frontières françaises : lors de la finale de la Coupe de la Ligue opposant
l’Olympique Lyonnais et l’Olympique de Marseille, 73 pays ont retransmis le match. En
France, ce match a réuni « 5,1 millions de téléspectateurs pour une part d’audience de
29
32
« Any group or individual who can affect or is affected by the achievement of the organisation’s objectives ».
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
30
23,3% » . Plus généralement, le sport et notamment le football français sont très suivis
par les Français. Selon une étude de la TNS Sofres datant de 2008, le premier événement
sportif plébiscité par les français est la Coupe du monde du football (35%), devant les Jeux
31
Olympiques (34%), et Roland Garros (23%) (TNS Sofres, 2008) .
Ainsi, l’Olympique Lyonnais, comme la plupart des clubs de football professionnel
français, a pris en compte ces dernières années son impact social grandissant dans la
société française ainsi que son rôle de modèle pour la plupart des enfants et des jeunes,
ce qui a fait partie de l’une des motivations pour créer leur Fondation. Comme le souligne
Laurent Arnaud, responsable d’OL Fondation : « Jean-Michel Aulas voulait montrer qu’en
tant que chef d’entreprise il y avait aussi des dimensions sociales à assumer » ce qui
comprend la dimension mécénale du club. Pour beaucoup le football, du fait de son
importance au sein des ménages français est reconnu comme ayant « un fort potentiel pour
contribuer à créer des liens sociaux, à éduquer la jeunesse et à insérer les populations en
difficulté, en milieu rural et urbain » (Ministère du Sport, 2010). C’est ainsi que l’Olympique
Lyonnais en 2007, a décidé d’établir sa propre Fondation, avec quatre axes principaux :
l'insertion par le sport, l'éducation, l'aide aux personnes malades ou hospitalisées, le soutien
au sport amateur. A travers divers partenariats avec des associations, l’Olympique Lyonnais
conscient de ce qu’il peut apporter à ces dernières, a mis en place une solide politique
de mécénat. Cependant il semblerait que cette sensibilité sociale soit présente depuis
longtemps au sein du club lyonnais :
« La motivation principale était d’organiser la politique sociale. On a toujours
eu un vrai terrain, une vraie sensibilité au club, tout bêtement parce qu’on a
dans l’environnement du club et à la direction, au-delà de Jean Michel Aulas
seulement, qui sont très sensibles à ces problématiques là. Il y a des gens
comme Bernard Lacombe [conseiller du président Aulas], comme Joel Bats
[entraîneur des gardiens], qui étaient déjà engagés dans des associations et
investis en tant que parrains, donc il y a toujours eu cette sensibilité là au sein du
club, mais c’est vrai qu’il n’y a jamais eu de personne référente sur ces sujets là
donc l’idée c’était d’organiser la politique sociale pour être d’une part plus visible
et d’autre part plus efficace. » (Arnaud, 2012).
Interrogés pour une étude Ifop de 2007, 92 % des responsables d’entreprises pensent
que le mécénat permet d’afficher que l’entreprise assume sa responsabilité citoyenne
vis-à-vis de la société. Le mécénat est considéré comme le premier geste responsable,
avant l’engagement d’une politique de développement durable qui implique l’entreprise
dans tous ses fonctionnements. Bien que l’Olympique Lyonnais dispose tout de même
d’une politique de développement durable (notamment avec le Grand Stade), il est vrai
que le simple volet mécénal offre beaucoup d’avantages pour le club : Depuis 2003,
une loi française a augmenté le seuil de déductions fiscales pour les Fondations. C’est
de plus, assez facile à mettre en place, puisque ca ne modifie pas le structurellement
le fonctionnement de l’organisation : en effet 69% des responsables de mécénat,
communication et développement durable ou RSE considèrent que le mécénat est facile à
mettre en œuvre aujourd’hui en France (IFOP, 2007). Le mécénat est également considéré
comme un outil renforçant efficacement l’identité de l’organisation vis à vis des publics
externes pour 95% des chefs d’entreprise interrogés (IFOP, 2007).
30
31
LFP, 2012, http://www.lfp.fr/coupeLigue/article/affluence-et-audience-au-rendez-vous.htm, Consulté le 14/05/2012.
TNS
SOFRES
(2008),
«
Les
Français
et
le
Sport
»,
http://www.tns-sofres.com/points-de-
vue/8AE8BB4283C44DCD9ECCDF9166B67433.aspx, Consulté le 13/04/2012.
33
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
Souvent pourtant, le mécénat et les actions philanthropiques dans la conception
française de la RSE n’entrent pas dans le périmètre de la RSE, contrairement aux Etats
Unis (Capron & Quairel-Lannoizelée, 2007). Ces actions n’ayant aucun impact sur le
fonctionnement de l’organisation, sont plus souvent mises en place en réponse à la
sensibilité personnelle du chef d’entreprise. Cependant, il faut se garder de mettre toutes les
actions liées au mécénat dans le même panier. D’après Capron & Quairel-Lannoizelée: « A
côté de ces actions philanthropiques pures et qui n’ont aucun intérêt économique pour
l’entreprise, on peut distinguer les actions liées à la stratégie de l’entreprise mais ayant
un impact sur l’image, les actions qui répondent aux attentes des parties prenantes mais
en restant hors du cœur de métier de l’entreprise » (2007, 78). Bien souvent ces actions
permettent de sensibiliser les employés au travers d’une politique de motivation interne,
ainsi que de communiquer vers l’extérieur et les parties prenantes. Ainsi, comme le pense
Laurent Arnaud, la politique mécénat de l’Olympique Lyonnais fait pleinement partie de la
politique RSE du club.
c) Le Grand Stade Lyonnais, illustration d’un projet à multiples parties
prenantes, multiples intérêts
Le Grand Stade Lyonnais, actuellement en construction, a fait l’objet de multiples
débats. Considéré comme un des volets de la politique RSE/Développement Durable de
l’Olympique Lyonnais par les uns, il est malheureusement bien souvent considéré comme
le contraire d’une infrastructure respectueuse de son environnement au sens large. Le
Grand Stade est néanmoins un cas d’étude intéressant pour illustrer la théorie des parties
prenantes étant donné le grand nombre d’intérêts concernés dans ce projet. Mais qui dit
intérêts concernés, dit responsabilités de l’Olympique Lyonnais envers ces mêmes parties
prenantes. Gérard Caviglia, un des responsables du Grand Stade avec comme mission
principale de gérer les relations avec l’ensemble des partenaires et des collectivités, n’hésite
pas à le souligner :
« C’est le premier projet qui se développe sous forme de partenariat de ce type
en France. Il existe des Partenariats Publics Privés mais ce sont des procédures
réglementaires, c’est le code des marchés publics. Alors certes on va chercher
un partenaire privé, mais à la sortie c’est la collectivité qui paie. Dans ce cas
les choses sont différentes ; c’est l’OL qui finance et réalise le stade et qui
en assume les risques. Mais le projet a besoin d’être accompagné par les
collectivités pour les transports par exemple. Mais ce projet s’est développé
parce que l’ensemble des partenaires a fait ce qu’il fallait pour que ca aboutisse.
Il y a eu un protocole signé entre les partenaires parce qu’il fallait qu’on cadre les
choses, mais ce protocole n’a pas de valeur juridique et celui qui veut partir, peut
partir quand il veut. Et ça, ça mérite d’être souligné, parce qu’il n’y a pas eu de
contrats, pas de démarches réglementaires comme ca a été le cas à Nice, à Lille
par exemple » (2012).
Le futur stade lyonnais est en effet le seul stade français à être un « investissement
32
d’Intérêt Général de nature publique qui est financé par le privé » . Afin de mener à bien ce
projet, un protocole d’accord a été signé en octobre 2008 entre l’Olympique Lyonnais, l’Etat,
le Grand Lyon, le Sytral, le Conseil Général du Rhône et la Ville de Décines. Mais au delà des
32
34
http://www.grandstadeol.com/faq/
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
partenaires publics ou privés, une partie prenante décisive dans ce projet est la population.
Beaucoup de débats ont notamment eu lieu avec les habitants de Décines qui avaient peur
des nuisances futures, de l’engorgement de la ville les soirs de match. En effet le projet
du Grand Stade a fait l’objet d’une résistance forte au sein du territoire rhodanien. Que
ce soit les chiffres avancés, les montants du projet, les événements relatifs au projet, tout
est décortiqué et dénoncé par les associations hostiles au projet relayées ensuite par des
représentants politiques de différents partis dont notamment l’UMP, le PCF mais également
les Verts. Le financement du projet est par exemple vivement contesté : si les partisans du
projet affirment que le coût pour les contribuables en vue du financement des infrastructures
publiques est estimé à 168 millions d’euros (au maximum 180 millions), ses détracteurs
avancent un montant largement supérieur ; la somme de 450 millions d’euros étant même
évoquée par l’Association Déplacement Citoyen, relayée par l’Association Carton Rouge.
C’est ainsi que pour construire et mener à terme un tel projet, l’Olympique Lyonnais a
du agir en conséquence. En effet, se retrouvant au milieu de plusieurs parties prenantes, il
a fallu gérer les attentes et intérêts différents d’où la nécessité de construire une politique
de responsabilité sociale efficace. Avec l’ensemble des partenaires a d’abord été initié
des groupes de travail : « un qui concerne l’accessibilité au stade, un sur le plan de
l’environnement pour suivre l’élaboration de l’ensemble des études, un groupe de travail
en matière d’urbanisme et le dernier en matière de sécurité de façon à aborder les enjeux
de sécurité publique, ou sécurité civile. » (Caviglia, 2012). Mais comme Gérard Caviglia l’a
précisé :
« Ce qui a été fort c’est que tout le monde est arrivé avec ses contraintes,
ses attentes, ses obligations mais on a toujours été à la recherche de bonnes
réponses qui ont permis d’harmoniser les attentes, de concilier mais toujours
avec l’objectif d’aboutir à un haut niveau à chaque fois. C’est pas le consensus
mou, pas le minimum nécessaire, on a vraiment cherché les meilleures réponses,
les réponses optimales ».
Les responsabilités envers les habitants de Décines ont notamment été assumées à travers
les dispositions environnementales du projet : des dispositifs anti bruits, un protocole
signé avec l’ADEME afin d’optimiser les actions de respect de l’environnement direct, le
développement des transports en commun pour limiter l’accès en voitures, etc. De plus, une
autre partie prenante importante prise en compte dans ce projet, fut les propres salariés de
l’Olympique Lyonnais. En effet, en plus du stade, les salariés administratifs du club auront de
nouveaux locaux dans lesquels les conditions de travail seront optimales. Comme l’a précisé
Gérard Caviglia : « le Grand Stade sera bien plus qu’un simple stade mais sera un véritable
lieu de vie : avec des restaurants, un centre de loisir, des hôtels, des immeubles de bureaux,
etc. » (2012). Les supporters également ne seront pas en reste : une capacité d’accueil
plus importante sans pour autant augmenter les tarifs des places, de meilleurs dispositifs
de sécurité les soirs de match, mais aussi une meilleure accessibilité pour les personnes à
mobilité réduite : des places assises réservées ainsi que des places de stationnement.
Le futur Grand Stade, un stade 5 étoiles selon les critères de l’UEFA, est ainsi
pleinement intégré dans la politique de Responsabilité Sociale de l’Olympique Lyonnais,
avec pour but de répondre au mieux aux différents intérêts de chacun.
Parallèlement à cette professionnalisation du football français, à la complexification
de son environnement ainsi qu’à la multiplication de ses parties prenantes, de nouveaux
enjeux ont émergé pour les organisations sportives. L’étude de l’Olympique Lyonnais a
mis en avant trois enjeux principaux auxquels doivent se confronter les organisations
35
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
sportives contemporaines : la nécessaire prise en compte du capital immatériel du club
liée à l’optimisation des centres de formation notamment, la prise en compte d’enjeux
environnementaux, décisifs dans la construction d’installations sportives tel que le Grand
Stade des Lumières, ainsi que des enjeux de sécurité publique décisifs dans le secteur du
sport. La responsabilité sociale des organisations sportives peut ainsi apparaître comme
une réponse pertinente à ces trois enjeux contemporains et en cohérence avec les
prescriptions du développement durable.
2-3) La RSE comme réponse à la multiplication
d’enjeux auxquels sont confrontés les organisations
sportives
Le football français, en lien avec la multiplication de ses parties prenantes et des
responsabilités qui en découlent doit désormais faire face à de nouveaux enjeux. Une
exigence de Responsabilité Sociale envers les joueurs de football, souvent considérés
comme un capital immatériel décisif du club, a ainsi émergé, ce qui a renforcé la politique
RSE de l’Olympique Lyonnais en ce qui concerne les centres de formation notamment. Cela
s’ajoute aux enjeux environnementaux et de sécurité publique face auxquels l’Olympique
Lyonnais a pris conscience de la nécessité d’actions de Responsabilité Sociale.
a) L’Olympique lyonnais face aux enjeux liés aux centres de
formation : prise en compte du capital immatériel
La prise en compte du capital immatériel dans une entreprise est un processus important
pour la bonne gestion de l’organisation. Souvent définis comme « l’ensemble des actifs
intangibles contribuant à la création de valeur d’une entreprise ou d’une organisation »
(Fustec & Marois, 2006, 13), les actifs immatériels sont généralement partagés en dix
catégories : capital actionnaire, capital organisationnel, capital marques, capital humain,
capital client, capital fournisseur, capital système d’information, capital environnemental,
capital sociétal et capital technologique. C’est ainsi que les joueurs de football peuvent de
nos jours être considérés comme des actifs immatériels des club de football professionnels
français. En effet, d’après Bourgeois (2007), le club contrôle bien le joueur pour un certain
temps par le système du contrat à temps déterminé et il en attend des bénéfices futurs
(revenus financiers suite aux matchs gagnés, aux publicités, etc.). De plus, il s’agit d’un
investissement en ressources humaines, donc incorporel. Et du fait de l’importance des
revenus qu’apportent les joueurs de football aux organisations, cet investissement en
capital-joueurs (ou capital humain) est ainsi l’un des plus importants pour les clubs de
football. Il apparaît alors nécessaire de valoriser au mieux ce capital immatériel ; l’une
des façons pour y parvenir passe par l’application de pratiques RSE (Pagliano, 2011). En
effet, la Responsabilité Sociale de l’organisation influence la stratégie, le management de
l’entreprise et sa mise en place nécessite souvent de s’appuyer sur les actifs immatériels.
Et même s’il est possible de prendre en compte ces derniers, en dehors d’une politique de
RSE, l’objectif de responsabilité optimise la gestion du capital immatériel (Pagliano, 2007).
Si l’on rapporte ces réflexions au monde du football professionnel, la Responsabilité Sociale
de l’organisation serait ainsi un outil de valorisation des actifs immatériels de l’entreprise
36
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
(et notamment des joueurs). C’est dans cette perspective que l’Olympique Lyonnais s’est
vu confier par le Ministère de l’Economie et des Finances, début octobre 2011, « une
mission d’expertise de la protection et de la valorisation du savoir-faire par la labellisation
de la formation dans le secteur des clubs de football » (OL, 2011,12), ce qui correspond
à un « projet pilote RSE » selon Laurent Arnaud. Ainsi afin de gérer au mieux ces actifs
immatériels en lien avec une politique RSE, de nouveaux enjeux ont émergé comme
l’explique Laurent Arnaud : « une problématique précise qui consiste à dire que 90% de ces
jeunes qui sont en formation à l’OL ne vont pas signer un contrat professionnel chez nous et
qu’il y a la nécessité de les former sur d’autres champs que leur jeu de tête ou leur pied droit,
et ainsi de former des citoyens et des hommes en plus de former des footballeurs »(2012).
Pour éviter que ces joueurs soient déconnectés de la vie réelle l’Olympique Lyonnais a
par exemple mis en place des partenariats avec des écoles lyonnaises afin que les jeunes
soient scolarisés dans des lieux de vie classiques. Comme le précise Laurent Arnaud, ce
n’est pas le cas de tous les centres de formation : beaucoup choisissent de faire venir l’école
au centre de formation, ce qui pour l’Olympique Lyonnais participe à leur exclusion de la
société. Comme l’ajoute l’Olympique Lyonnais dans son rapport annuel : « la stratégie de
formation est donc une volonté de recherche d’excellence en développant l’individu dans sa
globalité tant au niveau éducatif que footballistique et dans un souci de parité filles/garçons »
(2011,12).
Cette volonté d’une meilleure gestion du capital immatériel des organisations sportives
à travers des politiques de RSE a cependant été exprimée et surtout institutionnalisée en
premier lieu par le rugby professionnel français. En effet la Fédération Française du Rugby
ainsi que la Ligue Nationale de Rugby ont toujours prôné l’idée d’une double qualification
des joueurs : une qualification sportive mais aussi scolaire, universitaire ou professionnelle.
Et cette volonté s’est de plus traduite par la prise en compte de la qualification scolaire,
universitaire et professionnelle dans l’évaluation des centres de formation de rugby par la
ligue nationale. L’évaluation de ceux ci est basée sur plusieurs critères dont notamment :
« - Les infrastructures du centre ;
- L’organisation de la formation sportive et du suivi médical ;
- L’organisation de la formation scolaire, universitaire et professionnelle ;
- L’efficacité du centre sur le plan sportif et sur le plan des résultats scolaires.
33
»
Après l’évaluation, chaque centre de formation se voit attribuer une catégorie, catégorie
qui détermine le montant de l’aide financière attribuée par la Ligue Nationale de Rugby et
qui a également un impact sur le montant de l’indemnité de formation due au club formateur
en cas de départ du joueur. Ce n’est cependant pas le cas dans le football français. En effet,
pour l’évaluation des centres de formation de football, la Ligue de Football Professionnelle
se base uniquement sur des critères de performance sportive.
Ainsi, la politique de Responsabilité Sociale de l’Olympique Lyonnais tente de répondre
aux enjeux liés au centre de formation qui consiste, en plus de former des joueurs
professionnels, à former des citoyens capables de se réinsérer dans la « vie réelle »
après leur carrière ou s’ils ne parviennent pas à signer un contrat professionnel. Cet enjeu
de formation des salariés de l’Olympique Lyonnais (les joueurs) est lié fortement à la
gestion des actifs immatériels de l’organisation. Cependant les actions RSE de l’Olympique
Lyonnais sont diverses et d’autres enjeux sont également pris en compte, comme les enjeux
environnementaux.
33
http://www.lnr.fr/la-lnr-centres-de-formation-centres-de-formation-24-08-2010-7-186-11156,11156.html
37
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
b) Répondre aux enjeux environnementaux : Le Grand Stade un projet
écologique
Une des sept questions centrales de la norme ISO 26 000 qui définit la Responsabilité
Sociale des Organisations sous l’angle du développement durable, concerne la question
de l’environnement, avec quatre domaines d’actions précis : la prévention de la pollution,
l’utilisation durable des ressources, l’atténuation des changements climatiques et adaptation
ainsi que la protection de l’environnement, de la biodiversité et de la réhabilitation des
habitats naturels (ISO, 2010). Le sport professionnel, comme quasiment toute activité
humaine génère des déplacements, des activités, des équipements, des consommations et
a donc de forts impacts sur l’environnement.
L’Olympique Lyonnais, conscient que ces enjeux sont décisifs pour la gestion
responsable d’une organisation, a décidé d’agir en ce sens. Le volet environnemental de
sa politique de Responsabilité Sociale est notamment concentré autour du projet du Grand
Stade. Comme Gérard Caviglia le souligne, l’Olympique Lyonnais a « initié dès le départ
une analyse environnementale qui a permis de faire un état des lieux et puis d’identifier les
éléments majeurs qu’il fallait prendre en compte. A l’issue de cette analyse, on a travaillé
avec l’ADEME et on a aboutit à un accord cadre qui a permis de formaliser et de conforter la
démarche » (2012). Cet accord cadre pluriannuel signé avec l’Agence De l’Environnement
et de la Maîtrise de l’Energie le 12 Décembre 2008, a permis non seulement de répondre
au cadre réglementaire exigé en matière environnementale pour la construction d’une telle
structure mais également de dépasser la réglementation avec la volonté de construire
un stade qui se veut éco-responsable pour que le « projet soit référent en termes de
développement durable et de citoyenneté » (OL, 2011, 63). L’Olympique Lyonnais, grâce
à l’aide de l’ADEME qui met à disposition des groupes d’experts ainsi qu’un cahier des
charges précis en matière environnementale, a ainsi pu mettre en place plusieurs actions
afin de répondre à divers impératifs environnementaux :
- Le Grand Stade répond tout d’abord à la volonté d’assurer la continuité écologique
du territoire sur lequel il va être implanté. Des espaces refuges ont ainsi été crées pour
certaines espèces animales et certains milieux écologiques spécifiques (comme les zones
de boisement, les zones humides, etc..).
- De plus, le projet du Stade des Lumières s’est voulu respectueux du cycle et du
cheminement naturel des eaux pour assurer leur infiltration dans les meilleures conditions
grâce à des sols perméables. L’eau sera stockée et réutilisée au maximum pour les besoins
liés à l’animation et à l’arrosage sur le site. La protection des nappes phréatiques est
également prévue avec l’utilisation de produits non polluants. L’objectif, comme précisé dans
l’Accord Cadre Pluri Annuel est « d’aller vers un 0 pesticide et engrais chimiques » (ADEME34
OL, 2008, 7) pour l’entretien des espaces verts.
- Un système de tri des déchets sera également mis en place avec l’installation de
bornes de tri intégrées (recyclables, biodégradables et le reste) avec une signalétique claire
afin de faciliter leur utilisation. Cela participera à l’éducation au tri des supporters. Mais
une volonté de limiter les déchets a également été émise notamment avec la limitation des
déchets de restauration, des emballages et l’utilisation d’emballages biodégradables. Le
compostage sera également développé sur le site.
34
ADEME-OL (2008), Accord Cadre PluriAnnuel 2009-2014. http://www.grandstadeol.com/developpemen-durable/
environnement/, Consulté le 28/05/2012.
38
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
- L’Olympique Lyonnais a également voulu instituer une stratégie énergétique
efficace en limitant non seulement la consommation d’énergie grâce à l’utilisation de
technologies à fort rendement (ampoules basse consommation, pompes à chaleur etc.)
mais également en favorisant l’utilisation d’énergies renouvelables telles que l’énergie
solaire grâce à la mise en place de panneaux photovoltaïques dans la toiture du stade.
Comme le précise l’accord cadre ces mesures de maîtrise de l’énergie et d’optimisation de
la production d’énergie renouvelable « pourront être étudiées pour les bâtiments existants
et de proximité en lien avec la collectivité, les bailleurs sociaux, les copropriétés… Il sera
ainsi recherché un effet d’entraînement en matière d’efficacité énergétique sur un périmètre
large autour de l’aménagement du Grand Stade ». (ADEME-OL, 2008, 6).
- En accord avec le Sytral (SYndicat des Transports de l’Agglomération Lyonnaise),
l’Olympique Lyonnais a émis la volonté de promouvoir des modes de transport respectueux
de l’environnement en privilégiant notamment les transports en commun dans un but de
limiter les accès en voiture. Des bornes Vélov, ainsi qu’un garage à vélos d’une capacité de
1000 emplacements sera également mis en place. Un scénario d’accessibilité a même été
réalisé (pour un taux de remplissage maximal du stade) :
- Mais l’accord cadre avec l’ADEME concerne aussi le respect de l’environnement
sonore. Même si le problème n’a pas été facile, l’Olympique Lyonnais a mis en place une
stratégie anti bruit : le projet du stade a été élaboré de façon à ce que la plus grande partie
du bruit reste à l’intérieur de l’enceinte. L’accord cadre insiste sur le fait que les actions en
matière acoustique devront aller « bien au delà des contraintes réglementaires » (ADEMEOL, 2008, 6) afin d’intégrer au mieux le stade dans son environnement proche. Les
nuisances sonores sont en effet l’un des points de débat les plus houleux auquel l’Olympique
Lyonnais est confronté aux habitants de la ville de Décines pour faire accepter son projet.
La prise en compte de ces enjeux environnementaux s’est effectué et s’effectuera dans
l’élaboration du projet, dans la réalisation des travaux mais aussi dans l’exploitation des
différents équipements ainsi que dans l’organisation des manifestations futures. Mais les
actions de Responsabilité Sociale de l’Olympique Lyonnais en matière environnementale
vont plus loin. Ce projet se veut être un « vecteur de sensibilisation considérable (flux
de 60000 personnes plusieurs fois par mois) et la démarche environnementale engagée
sur la construction du stade se veut exemplaire pour ensuite être génératrice d’actions
Eco responsables avec le personnel du groupe, les supporters, les partenaires et les
joueurs » (ADEME-OL, 2008, 8). Par exemple un projet de charte de l’environnement
des supporters avec des engagements qualifiés de réduction des impacts carbone est
actuellement développé.
39
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
c) Enjeux de sécurité publique
Un autre enjeu décisif auquel doit faire face le football professionnel n’est pas récent :
celui de la violence notamment entre supporters afin de garantir la sécurité de tous.
Cette Responsabilité Sociale envers les personnes venues assister au match est devenue
centrale pour les clubs de football étant donné l’affluence massive et hebdomadaire de
milliers de personnes dans un même lieu. Si depuis tout temps, le sport d’équipe a déchainé
les passions étant donné l’opposition de deux équipes suivies elles mêmes par des publics
distincts, des phénomènes plus violents ont fait leur apparition et se sont généralisés dès
les années 60 notamment en Grande Bretagne avec en tête de liste le développement du
hooliganisme et l’apparition de noyaux durs de supporters. Défini comme « la production
de comportements agressifs produits par un individu dans le contexte d’un spectacle sportif
» (Govaert & Comeron, 1995, 126)ou comme « les comportements d’agression physique
(violence contre les personnes) et de vandalisme (violence contre les biens) produits par
les spectateurs d’une manifestation sportive spécifique, le match de football, et se déroulant
dans une zone géographique spécifique, le stade de football et ses alentours urbains »
(Comeron, 2001, 145), le hooliganisme ou la violence organisée dans les stades recouvrent
en effet deux grands types de violence : une violence que l’on peut qualifier de spontanée,
qui est liée au déroulement du jeu et suscitée par les émotions du moment (par exemple,
suite une décision arbitrale contestée ou une défaite de l’équipe) et une violence davantage
préméditée. Ce comportement des supporters est liée indirectement aux caractéristiques
mêmes du sport et de la pratique du football. En effet comme Eric Dunning le souligne :
« On pourrait soutenir, qu’avec la religion et la guerre, les sports constituent le
meilleur vecteur de mobilisation collective jamais conçu par l’homme. Sans qu’ils
constituent pour autant un système social, ils restent l’espace où s’entremêlent
des fonctions de représentation, d’identification, de formation et de simulation
émotionnelle. Le sport assume jusqu’à un certain point des fonctions analogues
à la religion et à la guerre et en constitue peut-être même ‘une alternative
fonctionnelle’ » (1996, 125).
40
II. Le rôle de la RSE dans le Sport Français : Cas d’Etude de l’Olympique Lyonnais
Cet enjeu de sécurité publique est souligné dans l’objectif n°13 de l’Agenda 21 du Sport
développé par le Comité National Olympique et Sportif Français. En effet l’objectif « Prévenir
et lutter contre toutes les formes de violence dans et autour du sport » souligne quatre
axes de lutte à disposition du sport français, professionnel et amateur :
1) Lutter contre la violence et les « incivilités » dans le sport. 2) Lutter contre
la violence des spectateurs lors des rencontres sportives. 3) Lutter contre les
pratiques sectaires et les conduites attentatoires à la pudeur et aux bonnes
mœurs. 4) Développer des programmes cohérents de prévention et de lutte
contre toutes les formes de violence dans le sport (information, formation des
35
cadres, numéros verts, sites Internet, lieux d’accueil, etc.). (CNOSF, 2005, 22) .
Le ministre de l’Intérieur, lors d’une réunion consacrée au problème du hooliganisme avec
les représentants des clubs de ligue 1 de Bordeaux, Lyon, Montpellier, Nice et SaintEtienne en Mars 2012, a de plus souligné qu’en France depuis la fin de l’année 2011,
« nous assistons à la réapparition d’un certain nombre de phénomènes bagarres entre
supporteurs, usage d’engins pyrotechniques, comportements racistes et incidents lors de
déplacements » mais que pour lutter contre cette violence dans les stades et à leurs abords
cela « dépend de tous les maillons de la chaîne, à commencer par les clubs, qui sont
36
les premiers responsables de leurs supporteurs » a ajouté Claude Guéant . L’Olympique
Lyonnais conscient de ces réalités a ainsi décidé d’assumer cet enjeu en créant par exemple
un groupe de travail spécifique pour l’élaboration du projet Grand Stade « de façon à aborder
les enjeux de sécurité publique, ou sécurité civile. Il y a eu la volonté dès le départ d’aborder
le volet sécurité avec l’ensemble des partenaires puisque c’est un enjeu essentiel pour
les stades » affirme Gérard Caviglia (2012). Le nombre de stadiers sera par exemple plus
important qu’actuellement à Gerland puisqu’il passera de 400 à 500 au double environ,
c’est-à-dire entre 800 et 1 000 selon les rencontres sportives. Les caméras de surveillance
et autres dispositifs de sécurité seront par-là même renforcés.
Mais en plus d’être responsables des supporters, les clubs professionnels doivent aussi
faire face à la violence sur le terrain. Le coup de tête de Zinedine Zidane contre Marco
Materazzi, incident qui s'est déroulé le 9 juillet 2006, lors de la finale de la coupe du monde
de football opposant la France à l'Italie, a défrayé la chronique. On a notamment reproché
au joueur français d’avoir agi sans penser aux conséquences que cela pourrait avoir sur
ses jeunes fans. En effet, on attribue souvent aux joueurs de football professionnel un rôle
de modèle notamment auprès des enfants qui les regardent et les supportent et qui seraient
tentés alors de reproduire le comportement de leurs idoles. Ainsi un des quatre grands axes
de la politique d’OL Fondation est consacré au soutien du football amateur et à l’éducation
aux valeurs du football. L’Olympique Lyonnais a par exemple conclu un partenariat avec
l’association Foot Valeurs qui a pour but de redonner du sens au sport et notamment au
football en luttant contre la tricherie, la simulation, la violence et le racisme. A travers
différents kits de sensibilisation à destination des clubs, l’association Foot Valeurs souligne
également la responsabilité des clubs et des joueurs dans la lutte contre la violence :
« Si le phénomène de la violence peut être réglé par les instances politiques
et celles du football, si le problème du racisme est régulièrement combattu
par différentes associations, nous avons la conviction que les attitudes et
les mentalités antisportives pourraient être modifiées par la sensibilisation et
35
CNOSF (2005), Programme Agenda 21 du Sport Français en faveur du développement durable. < franceolympique.com/
art/297-lagenda_21_du_sport_francais.html>, Consulté le 23/04/2012.
36
Le Progrès http://www.leprogres.fr/football/2012/04/04/hooligans-les-clubs-premiers-responsables-des-supporteurs
41
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
l’éducation des jeunes enfants d’aujourd’hui et footballeurs, entraîneurs, arbitres
ou supporters de demain » (Brochure Foot Valeurs).
C’est ainsi que l’Olympique Lyonnais à travers ses différentes actions de responsabilité
sociale, que ce soit les actions d’OL Fondation ou les pratiques responsables qui tournent
autour du projet du Grand Stade, a pris conscience de sa responsabilité envers ses parties
prenantes face à plusieurs enjeux émergents : les enjeux liés à la gestion de ses actifs
immatériels et donc liés notamment à la formation, les enjeux environnementaux, mais aussi
les enjeux relatifs à la sécurité dans les stades et sur le terrain.
La Responsabilité Sociale des organisations sportives, comme étudiée à travers le
cas de l’Olympique Lyonnais, apparaît donc comme une réponse pertinente face à divers
impératifs touchant le sport contemporain français : la professionnalisation du secteur,
la complexification de l’environnement des organisations et des enjeux émergents. La
justification de l’application de telles pratiques de responsabilité sociale étant maintenant
admise, il est nécessaire désormais de s’intéresser à l’institutionnalisation et à l’effectivité
de ces pratiques au sein des organisations sportives.
42
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
III. L’Effectivité des pratiques RSE
dans le sport professionnel Français :
vers un management responsable
de l’Olympique Lyonnais et des
Organisations Sportives ?
Après avoir présenté un état des lieux des pratiques de Responsabilité Sociale du
sport professionnel ainsi qu’analysé le rôle et les réponses que peuvent apporter ces
politiques de responsabilité au football français notamment, nous allons nous intéresser à
l’effectivité réelle de celles ci. L’efficacité d’une politique de Responsabilité Sociale dans une
organisation sportive telle que l’Olympique Lyonnais repose tout d’abord sur des apports
réciproques ; nous allons ainsi analyser ce que le sport et plus précisément le football
apporte à la RSE, et ce que la RSE apporte au sport. Cette logique réciproque participe
ainsi à la pertinence et l’effectivité de telles actions au sein des organisations sportives.
3-1) L’efficacité basée sur les ressources et
compétences spécifiques de l’Olympique Lyonnais
En premier lieu, l’efficacité des politiques de responsabilité sociale des organisations
sportives, telles que celles de l’Olympique Lyonnais, repose sur des ressources et
compétences spécifiques de ces organisations, qui utilisées à bon escient participent à
optimiser l’efficacité de leur engagement.
a) Les ressources et compétences spécifiques de l’OL au service
d’une RSE effective
Les organisations sportives professionnelles telles que l’Olympique Lyonnais semblent de
nos jours avoir en leur possession des ressources et compétences qui leur permettent
d’être considérées comme un véhicule parfait pour déployer une politique de Responsabilité
Sociale efficace (Smith & Westerbeek, 2007). En effet, plusieurs auteurs ont développé les
caractéristiques uniques que possèdent les organisations sportives en comparaison avec
les entreprises traditionnelles. Premièrement, un des attributs spécifiques du sport et du
football professionnel plus particulièrement, est la passion et l’intérêt généré pour le produit
(les matchs, l’équipe). Comme le soulignent Babiak et Wolfe, « il est difficile d’imaginer
une autre industrie générer une telle passion avec ses produits tel que du produit lessive,
du dentifrice ou du shampoing » (2009, 722). Cette passion et cet intérêt générés, ont
43
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
pour conséquence de rassembler une audience plus facilement et d’avoir ainsi un impact
plus important sur la population qui s’identifie à l’équipe sportive plus facilement qu’à des
employés lambda. De plus, le sport professionnel face à la pression de la société et des
médias, a la particularité de devoir se justifier et rendre public quasiment l’ensemble de
ses pratiques : la signature d’un contrat, le salaire des joueurs, qui gagne, qui perd, les
ventes de joueurs, les primes etc. De même pour les scandales qui touchent les joueurs,
tout est révélé au grand public instantanément, ce qui n’est pas le cas pour un salarié
d’une entreprise lamda qui aurait commis une faute. Ainsi cela est une particularité du
sport professionnel par rapport à d’autres entreprises, ce qui favorise son engagement
dans des pratiques de Responsabilité Sociale afin de contrecarrer l’image d’un sport
déconnecté de la réalité et d’améliorer la réputation sociale de l’organisation sportive.
L’importance de détenir de telles ressources, compétences ou particularités a été soulignée
par Wernerfelt qui dès 1984 s’est interrogé sur ce qui fait qu’une entreprise est plus
performante que d’autres sur long terme. Dans son article « A Resource-based View of
the Firm » (1984), il conclue qu’un des facteurs de performance d’une entreprise est lié aux
ressources. D’après lui chaque organisation s’efforcerait de développer des ressources qui
lui assureraient un avantage sur ses concurrentes. Il avance même la notion de « barrière de
ressource » puisque ce sont des ressources rendues difficiles d’accès pour ses concurrents.
Dans cette lignée, Barney (1991) s’interroge sur les capacités d’une ressource à être à
l’origine d’un avantage concurrentiel persistant. D’après lui, les ressources qui peuvent
faire qu’une organisation possède un avantage sur les autres, doivent avoir des critères
précis : « la ressource doit créer de la valeur, doit être rare et inimitable » (Babiak & Wolfe,
2009, 731). Ainsi cette théorie basée sur les ressources aide à appréhender l’avantage
que possèdent les organisations sportives. En effet les ressources et compétences que
possèdent ces dernières peuvent être considérées comme créant de la valeur, rare et
inimitable. Tout d’abord, étant donné les sentiments d’identité, d’admiration, de passion
qu’ont généralement les individus pour les sportifs et les équipes sportives, l’organisation
sportive détient des ressources créatrices de valeur pour optimiser leur engagement
sociétal. Mais cela ne s’arrête pas à ca : l’accès à des infrastructures (stades), l’accès aux
médias, les sponsors, le staff professionnel de l’équipe, tout cela constitue des ressources
uniques créatrices de valeur (Babiak & Wolfe, 2009). Ces valeurs sont également rares :
un stade, des joueurs, des entraineurs reconnus, des médias omniprésents, l’aura autour
des équipes. Ces valeurs sont rarement disponibles pour les autres entreprises. Et ces
dernières ne peuvent pas dupliquer de telles ressources : l’identification, l’admiration et la
passion pour ces salariés sportifs sont inimitables pour les salariés lambda. Laurent Arnaud,
responsable d’OL Fondation est bien conscient de ca :
« Parce que certaines de nos caractéristiques pouvaient bénéficier aux
associations qu’on soutenait et que la caractéristique principale est son
exposition médiatique qui est hors norme par rapport aux autres. On jouit d’une
exposition qui est conséquente et on souhaite leur en faire bénéficier. Donc on
est parti d’un principe qu’au-delà de l’aspect financier on peut jouer sur deux
champs principaux : d’une part la mise en lumière et, d’autre part, un prisme de
mise en réseaux, puisqu’à la différence des entreprises classiques on est un club
et on est le point de ramification de plusieurs acteurs : grand public, partenaires,
annonceurs, collectivités territoriales, médias. Ces gens gravitent autour du club,
donc on mettre en réseau une association avec nos sponsors etc. » (2012).
Ainsi la théorie des ressources d’une firme est utile pour appréhender l’efficacité ou du
moins le potentiel des politiques de Responsabilité Sociale engagées par les clubs sportifs.
44
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
De plus il apparaît que la théorie des ressources ne soit pas incohérente avec la théorie des
parties prenantes précédemment utilisée pour appuyer notre propos. En effet les parties
prenantes sont aussi perçues comme étant en possession de ressources stratégiques pour
la survie de l’entreprise. C’est ainsi que l’entreprise s’engage à être responsable afin de
répondre aux pressions des parties prenantes, qui possèdent certaines des ressources dont
elle a besoin pour construire un avantage concurrentiel solide (Gherra, 2010). Ainsi pour
pouvoir bénéficier de ces ressources stratégiques (les médias etc.), l’organisation sportive
telle que l’Olympique Lyonnais doit prendre en compte les intérêts et les attentes des autres
parties prenantes.
(Breitbarth et al., 2011, 725)
Cependant d’ancrer les politiques de responsabilité sociale des organisations sportives
dans le long terme, celles ci doivent se garder de se concentrer uniquement sur leurs
ressources et compétences comme nous le verrons par la suite. En effet, d’après Babiak et
Wolfe qui hiérarchisent les pratiques de Responsabilité Sociale dans le sport professionnel,
distinguent la « corporate-centric CSR » (2009, 734) (la RSE centrée sur les ressources
et compétences de l’entreprise) des autres stratégies. Cette orientation basée sur les
ressources tiendrait moins compte des besoins et demandes sociétales, ce qui d’après
les auteurs, ne serait pas viable à long terme pour un management responsable des
organisations sportives.
Dès lors, après avoir souligné la corrélation entre des ressources et compétences
spécifiques du sport et l’efficacité de l’engagement RSE des organisations sportives, nous
pouvons nous interroger sur la relation entre la performance sociale de celles-ci et leur
performance financière. Les ressources et compétences dont dispose l’Olympique Lyonnais
par exemple, participent-elles à la performance globale de l’organisation et donc à l’efficacité
financière ?
b) Quelle relation entre la performance sociale de l’OL et sa
performance financière ?
Cette question des possibles retombées financières est une question incontournable de
l’étude de la Responsabilité Sociale de l’Entreprise. Cette interrogation avait été abordée
indirectement dans la citation de Friedman pour qui la seule responsabilité est de faire du
profit afin d’exister et d’être créatrice de valeur (d’emplois, de richesses collectives). Les
études empiriques sur ce point sont cependant nombreuses (en 2007 on en dénombre
par exemple 160, d’après Gond & Igalens (2008).). Dès 1985, par exemple Auperle et al.
n’avaient pas trouvé un lien significatif, ni positif ni négatif, entre la profitabilité de l’entreprise
et l’adoption de la RSE ont souligné dans la conclusion de leur recherche que « les bénéfices
intangibles de la RSE tendent à être incernables par les investigations scientifiques. Il se
peut que la question de l’existence ou de l’inexistence d’une relation entre la profitabilité
et la RSE ne sera jamais résolue »(1985, 462). Les bénéfices intangibles de la RSE sont
également soulignés par Gérard Caviglia qui prône plus des effets économiques indirects
que directs :
« Pour avoir évoqué ce sujet avec certains collègues du merchandising, il y a
aujourd’hui des entreprises qui formulent des exigences en la matière. Donc je
pense qu’indirectement ca va avoir des effets positifs, je n’imagine pas dans
le cadre de la recherche de ‘naming’ pour le Stade des Lumières #pratique de
sponsoring sportif qui consiste à donner à une enceinte sportive (le plus souvent
45
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
un stade) le non d’une marque ou d’une société sponsor, ndlr# cela ne soit pas
évoqué. »
Des auteurs se sont particulièrement intéressés à cette corrélation appliquée au sport
professionnel. Inoue et al. (2011), par exemple après avoir mené des études auprès de
clubs américains ont conclu au lien négatif entre les profits des clubs professionnels et
leur engagement dans des politiques de responsabilité sociale. Etant donné les différences
structurelles entre le système européen et américain, il n’est cependant pas possible d’en
tirer les conclusions pour l’Olympique Lyonnais et les organisations sportives européennes
et françaises, à moins de mener une étude globale qui mériterait bien plus que ce simple
mémoire. Cependant, un des points soulignés par les auteurs pour expliquer les raisons
de ce lien négatif est qu’à la base, et contrairement aux entreprises classiques, les
organisations sportives auraient un autre objectif que d’uniquement augmenter leur profit.
En effet, la performance sportive, les gains de matchs, de trophées, bien que souvent
complémentaire de la performance économique, est également à prendre en compte.
De plus, même si les études n’établissent pas de lien de corrélation positif, les
organisations sportives ont un intérêt économique à long terme dans la mise en œuvre
de pratiques de Responsabilité Sociale. Comme souligné par Gérard Caviglia ci dessus,
l’engagement des pratiques sociétales favoriseraient la mise en place de nouveaux
partenariats avec des entreprises sensibles à la dimension responsable (Bayle et al, 2012).
De nos jours, le football et le sport professionnel en général s’engagent de plus en plus
dans le « sponsoring citoyen ou sponsoring responsable ». D’après Gilles Dumas, directeur
du cabinet conseil SportLab :
« Par opposition au sponsoring à l'ancienne, qu'on peut considérer comme un
sponsoring jetable, c'est-à-dire qu'une fois que l'événement s'est déroulé, on
retire les panneaux, il n'y a plus de petits fours et de champagne dans les loges,
les invités sont partis et il ne reste aucune trace tangible et durable du passage
du sponsor. Le sponsoring citoyen est clairement l'avenir du sponsoring. Il y a
même aujourd'hui, avec la création de la Fondation du sport, des possibilités
pour les entreprises d'obtenir les mêmes déductions fiscales que dans le
37
mécénat lorsqu'il finance ce type d'opération. »
La chaîne de grande distribution Carrefour a par exemple organisé en novembre 2009 à
la mi-temps de France-Irlande, dernier match de qualification pour la Coupe du monde de
football 2010, une séance de tirs au « but du cœur » pour récolter 24.000 euros et opérer
deux enfants. Ainsi la mise en place d’une politique sociale pour une organisation sportive
professionnelle permettrait de renforcer ses partenariats et d’en attirer des nouveaux ; ce
qui est évidemment un enjeu actuel pour l’Olympique Lyonnais qui cherche un sponsor
pour donner un nom au nouveau Stade des Lumières. Cet « avantage intangible », comme
l’appellent Babiak & Wolfe (2009, 719), s’accompagne également d’autres avantages :
entretenir des bonnes relations avec ses parties prenantes ce qui comprend une relation
de bon voisinage avec les associations locales, la fierté des employés, meilleures relations
avec les collectivités environnantes etc. Cela peut par exemple permettre de « ( re)légitimer
les aides publiques » (Bayle & Mercier, 2008, 14). Au delà de l’enjeu économique, l’enjeu
politique est ainsi majeur.
Cependant, malgré les avantages intangibles importants que les organisations
sportives peuvent retirer de leur engagement sociétal, notamment en raison des
37
http://www.lemonde.fr/sport/chat/2006/05/05/le-sponsoring-est-il-dangereux-pour-le-sport_768804_3242_1.html (le
monde)
46
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
compétences et ressources spécifiques dont elles disposent, un constat paradoxal quant à
l’utilisation de ces ressources induit une efficacité nuancée des pratiques de Responsabilité
Sociale comme le cas de l’Olympique Lyonnais le montre.
c) La politique RSE de l’OL face à des paradoxes quant à l’utilisation
de ses ressources
Le constat est clair : malgré une présence quotidienne de l’OL dans les médias (presse
écrite, Internet etc.) ses actions RSE ne sont que très peu médiatisées. Comme le souligne
Gérard Caviglia en matière de la communication des pratiques RSE du Grand Stade :
C’est une vraie difficulté. En matière de communication on a du mal à construire
quelque chose de coordonné, de cohérent entre tous, et donc finalement c’est
l’effet pervers de la multiplicité des partenaires. Donc j’espère que la phase
opérationnelle qui commence va permettre de remédier à ce problème. On a
fait un travail important en 2008/2009 en matière d’information et ca n’a pas
marché parce qu’un certain nombre d’opposants avaient tellement d’oppositions
virulentes que la communication n’était pas possible et a été rompue. Le fait
d’apporter des réponses à leur questionnement n’a pas suffit et pour eux c’est
tout ou rien : on n’en veut pas, on n’en veut pas. Donc cette ambiance là n’a pas
facilité la performance en matière de communication.
Mais le manque de médiatisation de cet engagement sociétal est d’autant plus
problématique qu’il est compensé par la forte médiatisation des externalités négatives que
le sport implique et qu’il essaie en quelques sortes de compenser via son engagement.
En effet les scandales, les salaires exorbitants, les problèmes de dopage mais aussi les
avis négatifs au sujet du Grand Stade, les nuisances qu’il pourrait entrainer etc. sont
eux très largement médiatisés. Comme l’indique Emmanuel Bayle et al., « le système
sur lequel s’est construit le sport professionnel a, de plus, entrainé une multitude de
pratiques allant à l’encontre de l’esprit que tente de véhiculer la responsabilité sociale. Les
valeurs du sport traditionnel �…� semblent être éloignées de celles du sport professionnel,
qui produit un nombre considérable d’externalités négatives » (2011, 114). On peut ainsi
associer plusieurs externalités négatives à chaque pilier du développement durable : le
« pillage » des pays formateurs tels que l’Afrique, l’Amérique du Sud de la part de clubs
à la recherche de joueurs bon marché pour le pilier social, l’écart entre les salaires les
plus bas et les plus hauts au sein d’une même organisation sportive entre les joueurs stars
et les autres pour le pilier économique et par exemple les gaz à effet de serre générés
lors des déplacements des joueurs et des dirigeants notamment lors des compétitions
internationales pour le pilier environnemental. Bayle et al. (2011) ajoutent que « l’activité
sportive utilisée comme instrument d’éducation, de cohésion sociale et de lutte contre
les problèmes de santé publique est largement mise en avant à travers ces initiatives
caritatives. La stratégie sociale des organisations sportives professionnelles se trouve
alors en adéquation avec les valeurs que véhicule le sport. Néanmoins les initiatives
sociales qui tentent de réparer les externalités négatives causées par le sport professionnel
sont déjà plus rares » (114-115). Cependant, malgré le manque de médiatisation et de
communication externe à ce sujet, l’Olympique Lyonnais est l’un des clubs français les plus
avancés en matière environnementale par exemple. En effet étant donné que la plupart
des clubs ne sont pas propriétaires de leurs infrastructures, la dimension environnementale
peut difficilement être prise en compte pour les organisations sportives. Avec le Stade
des Lumières, qui est propriété de l’Olympique Lyonnais, et le partenariat avec l’ADEME,
47
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
le club lyonnais a pu avoir une marge de manœuvre conséquente pour gérer le pilier
environnemental.
Ainsi sans une utilisation optimale des ressources pourtant disponibles dans leur
environnement, tels que les médias, les organisations sportives professionnelles participent
à la nuance de l’efficacité de leur engagement sociétal, puisque celui-ci n’est pas
communiqué de façon claire. La population lyonnaise par exemple, constate une
médiatisation plus importante des articles « contre le Grand Stade », dénonçant ses impacts
négatifs, avant même de savoir que le Stade n’est pas un investissement public, qu’un
partenariat avec l’ADEME impliquant de solides engagements en matière environnementale
a été signé etc.
Cependant, une réelle problématique autour de l’effectivité de pratiques de
responsabilité sociale est celle de leur évaluation. En effet, de nos jours, beaucoup de
pratiques de responsabilité sociale sont accusées de n’être seulement que des pratiques
cosmétiques, alors comment savoir quand les pratiques RSE dépassent cette fonction
uniquement rhétorique ?
3-2) L’évaluation de l’effectivité de la politique RSE de
l’OL
a) Difficulté d’évaluer la politique RSE des organisations sportives
Selon Igalens et Gond (2003), il existerait cinq groupes de méthodes de mesure et
d’évaluation de la performance sociale des entreprises :
- l’analyse de contenu des rapports annuels ;
- les indices de pollution ;
- les mesures perceptuelles issues des enquêtes par questionnaires ;
- les indicateurs de réputation ;
- les indicateurs produits par des organismes de mesure.
Cependant, les limites de ces méthodes liées à leur mode de production et à leur
construction doivent être soulignée. Par exemple, « les mesures s’appuyant sur des
données issues directement des entreprises peuvent être fortement biaisées. D’autres
mesures comme les indices de pollution ont tendance à se focaliser sur une seule
dimension alors que les mesures globales comportent un risque d’effet de halo » (Ben
Yedder & Zaddem, 2009, 96).
Laurent Arnaud, responsable d’OL Fondation, évoque la problématique compliquée de
l’évaluation de leurs pratiques RSE et en donne une raison :
Concernant la politique de mécénat, j’ai quelques outils d’évaluation, notamment
en partenariat avec un chercheur du CNRS qui a mis en place un logiciel
d’évaluation de partenariats entre mécénés et mécénat, pour évaluer la qualité
du partenariat avec des critères précis, d’objectifs et d’indicateurs. Ca a du sens
que si ce sont des partenariats pluri annuels puisque ca nous permet de corriger
48
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
chaque année nos actions. Sur la dimension évaluation de la RSE au niveau
global, ca n’existe pas à l’OL, pour une raison assez simple : on oublie aussi que
les clubs de foot sont de petites entreprises et je ne suis pas sure que les PME
de cette taille là aient des outils d’évaluation de pratiques RSE. Donc ce n’est pas
étonnant qu’on ne soit pas encore outillé. Il y a dix ans on n’était que 50 salariés,
quinze fois moins de chiffre d’affaire. Donc vu la croissance de ces dernières
années les pratiques se sont étoffées mais l’évaluation vient toujours dans un
second temps. (2012)
Cependant, peu à peu l’Olympique Lyonnais, notamment grâce à ses partenaires tente
d’évaluer ses propres pratiques. En 2006 le club de football lyonnais a fait appel à IMS
Entreprendre pour la Cité, une agence de conseil et d’aide à la mise en place de pratiques
RSE. Une étude d’impact des actions sociales de l’OL a été ainsi réalisée au début de leur
engagement (Bayle et al, 2011). De plus, depuis la saison 2009-2010, l’Olympique Lyonnais
a inclus une petite partie dans son rapport annuel concernant sa politique sociale. Selon
Igalens (2004), le recours aux organismes externes spécialisés dans la mesure de la RSE
est considéré comme la méthode la plus susceptible d’asseoir la crédibilité des démarches
de l’entreprise. Cela serait la méthode la plus neutre et la plus impartiale pour mesurer
l’efficacité des pratiques sociétales.
b) La politique RSE de l’OL face aux problèmes de greenwashing
Le problème évoqué ci dessus, concernant notamment la difficulté d’évaluer l’efficacité
les pratiques sociales des organisations sportives, fait ressortir une autre problématique
majeure : les phénomènes de greenwashing. Le greenwashing est « un anglicisme qui
sert à désigner les pratiques consistant à utiliser abusivement un positionnement ou des
38
pratiques écologiques à des fins marketing » . Généralement les entreprises qui prennent
des mesures partielles et qui se prêtent au greenwashing le font pour se donner une image
vertueuse ou compenser une image négative. D’après Michel Capron :
« Celles qui pratiquent l’évitement recherchent généralement néanmoins
une « conformité symbolique » aux exigences sociétales en faisant du «
greenwashing », c’est-à-dire de la désinformation destinée à donner une
image publique environnementalement responsable ou en prenant des
engagements sans modification effective de comportement. D’autres adoptent
des stratégies de compromis en cherchant à gagner du temps, à retarder une
réglementation » (2009, 2).
Pour Barthel (2005), entre l’éthique du discours et l’éthique de l’action, il y a un long chemin
qui sous-tend une volonté de la part de l’entreprise et de ses acteurs. Cette rhétorique de la
RSE est souvent accompagnée de pratiques de « reporting social » qui consiste à divulguer
les données relatives aux activités sociales et environnementales effectuées par l’entreprise
(Gond & Igalens, 2008).
Cependant le responsable d’OL Fondation, à la question de savoir si les pratiques RSE
de l’Olympique Lyonnais sont des réponses à l’image négative que peut avoir le football
français professionnel, précise : « je ne pense pas qu’on le fasse pour compenser quelque
chose. On le fait avant tout par conviction, parce que c’est une conviction du club et un
modèle d’entreprise dans lequel le président du club croit, qui est lui même chef d’entreprise
38
http://www.definitions-marketing.com/Definition-Greenwashing
49
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
d’une autre grosse compagnie sur lequel ces sujets là sont certainement plus enclenchés
ou du moins depuis plus longtemps » (Arnaud, 2012).
En effet, l’Olympique Lyonnais, a choisi de dépasser les simples actions ponctuelles
qui auraient permis de communiquer sur leur comportement responsable suite à quelques
actions sociales disséminées. La création de la Fondation a d’ailleurs été motivée par la
volonté de pérenniser des actions et leur ancrage dans la durée. Comme le précise Laurent
Arnaud, « la motivation principale était d’organiser la politique sociale pour être d’une part
plus visible et d’autre part plus efficace. OL Fondation n’est donc pas un point de départ,
mais une continuité. C’est pour ca, qu’au début de la Fondation on a défini des champs
dans lesquels on était déjà actif pour vraiment marquer une continuité dans la politique
» (2012). Cette caractéristique et cette volonté de dépasser les simples actions ponctuelles
sont confirmées par la responsable partenariats de l’association Sport dans la Ville avec
laquelle OL Fondation a un partenariat : « l’association Sport dans la ville a été crée en
1998, et le partenariat avec l’OL s’est monté dans les premières années, donc c’est un
partenariat de longue date. C’est un partenariat à long terme, avec un vrai engagement de
leur part » (2012).
Ainsi comme le précisent Emmanuel Bayle et al. (2011), l’Olympique Lyonnais a mis
en place des actions moins cosmétiques que certains clubs comme l’Elan Chalonnais par
exemple, étant donné la politique discrète mais durable de mécénat et la place moindre
pour les actions ponctuelles.
Cependant face à cette relative difficulté à évaluer et juger de l’efficacité des pratiques
de responsabilité sociale, les théories et tentatives de taxonomies des politiques RSE
tentent d’apporter des réponses.
c) Les théories et les taxonomies des politiques RSE des
organisations sportives au service de l’évaluation de l’efficacité
La volonté de taxonomie des pratiques RSE met « en jeu le nombre, la variété et le
degré d’implication, d’interaction et d’engagement réciproque entre les parties prenantes et
l’entreprise » (Martinet & Payaud, 2007, 201). Ainsi ces deux auteurs ont défini trois niveaux
et stratégies différentes, renvoyant à différents types d’organisation : de l’organisation
Friedmanienne à l’organisation sociale. Comme le définit le gouvernement britannique,
une entreprise ou organisation sociale – ce vers quoi tentent de tendre toute entreprise
engagée dans des pratique sociales, est « une activité commerciale ayant essentiellement
des objectifs sociaux et dont les surplus sont principalement réinvestis en fonction de
ces finalités dans cette activité ou dans la communauté plutôt que d’être guidés par
le besoin de maximiser les profits pour des actionnaires ou des propriétaires » (DTI,
2002, p.13 dans Defourny, 2006). La première stratégie est une RSE dite cosmétique,
c’est à dire une organisation s’illustrant par des pratiques légères de RSE. Souvent ces
organisations se contentent de remplir les conditions de l’article 116 de la loi sur les
Nouvelles Réglementations Economiques (NRE), qui exige pour les entreprises cotées
en Bourse, comme l’Olympique Lyonnais, de fournir des informations sur leurs pratiques
sociales, environnementales dans leur rapport annuel. Comme le soulignent Martinet et
Payaud : « il n’y a pas une volonté de construire avec les parties prenantes un projet dans la
durée, le projet est d’ailleurs réduit à sa plus simple expression, il s’agit le plus souvent d’un
partenariat avec une association pour un événement ponctuel » (2007, 202). La deuxième
stratégie est la stratégie annexe ou périphérique : c’est une stratégie légèrement plus
50
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
impliquée que la première, mais avec des pratiques et actions sans lien direct avec le cœur
de métier de l’entreprise ni avec les activités de l’organisation. Ainsi toute organisation aurait
pu mettre en place ces actions puisqu’elles ne demandent pas une cohérence avec les
activités, compétences et ressources de l’organisation. La troisième stratégie est la RSE
intégrée qui traduit l’intégration des pratiques RSE dans le cœur de métier de l’organisation
et mènerait vers « une performance globale » voire même « durable » (Martinet & Payaud,
2007, 202). Cette dernière stratégie définirait ainsi les moyens pour atteindre le stade d’une
entreprise sociale, c’est à dire de mettre en place des actions sociétales efficaces (envers
la société) pour un management pleinement responsable (envers les salariés).
Dans la même logique, cette efficacité est également soulignée par la taxonomie de
Babiak et Wolfe (2009) directement adaptée au sport professionnel. Le premier niveau
défini par ces auteurs est la « Stakeholder centric CSR » (734). Dans cette stratégie, les
pressions externes sont les déterminants essentiels des politiques RSE. Cependant les
auteurs soulignent que cette stratégie n’est que peu durable sur long terme car celle ci est
basée uniquement sur des demandes sociales. Un des exemples donnés par les auteurs
pour saisir la spécificité de cette stratégie est la Campagne « Read to Achieve » de la NBA (la
ligue de basket américaine) qui a mis en œuvre un programme pour aider les enfants à
atteindre un taux d’alphabétisation correct. Les compétences cœurs d’un club de basket ne
sont en effet pas directement liés à la lecture ou l’éducation. Le deuxième niveau de RSE
défini par les auteurs est la « Corporate Ethic CSR ». Il s’agit d’une orientation basée sur
ses ressources qui tient moins compte des besoins et demandes sociétales. Par exemple,
aux Etats Unis, le programme the Punt, Pass and Kick Program donne l’opportunité à des
enfants de montrer leurs compétences en foot américain dans des stades. Cela participe
à développer de futures générations de joueurs et de fans. Enfin, la dernière stratégie est
définie comme la « Strategic CSR ». Elle illustre une orientation externe et interne dans
les efforts RSE de l’organisation : grâce à l’utilisation de leurs compétences cœurs et de
leurs uniques aptitudes, les actions sociales sont adaptées aux besoins de la société et
aux pressions externes. Par exemple le programme Fit Kids, Healthy future (NBA) utilise
les ressources (coaches, joueurs, sponsors) de l’équipe pour répondre aux besoins de la
société dans le domaine de la santé et de la condition physique des enfants.
Cependant ma différence entre ces deux taxonomies est que la première (celle de
Martinet et Payaud) classe les pratiques de RSE sur une échelle morale en fonction de
l’intention et de la nature du lien avec les parties prenantes, alors que celle de Babiak et
Wolfe n’introduit aucune hiérarchie de valeur mais classe seulement les actions selon leur
lien avec le cœur de métier de l’organisation ; la « strategic CSR » étant assimilé à une
stratégie optimale de RSE pour satisfaire les intérêts de toutes les parties prenantes.
Ainsi ces tentatives de taxonomie des pratiques RSE, permettent d’appréhender une
RSE optimale qui serait ainsi efficace pour atteindre un management responsable durable.
Elles permettent également de dépasser certaines théories explicatives des pratiques
RSE. La théorie des parties prenantes par exemple, que nous avons principalement utilisé
dans ce mémoire afin d’appuyer nos propos, présente des limites dans l’explication des
motivations qu’ont les organisations pour s’engager et mettre en œuvre des pratiques
RSE. De nombreux auteurs ont par exemple reproché aux promoteurs de la théorie
des parties prenantes, d’avoir fourni une théorie sans conseils pratiques d’application.
En effet, comment l’organisation doit gérer les conflits d’intérêts dans l’application de
programme RSE. L’organisation a en effet une responsabilité différente envers chaque
partie prenante et les conflits ainsi que les modalités d’application ne sont pas assez
explicités d’après certains (Godfrey, 2009, 705). Cela souligne également la confusion du
51
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
concept de partie prenante, voire une redondance. En effet, un même individu peut fort
bien appartenir à plusieurs groupes : il peut être, à la fois, actionnaire, employé, membre
de la communauté et consommateur (Gibson, 2000). Martinet (1984) utilise l’expression
de parties prenantes ubiquistes pour décrire cette situation. Une question se pose alors :
jusqu’où va la responsabilité de l’organisation ? Etant donné que l’organisation doit prendre
en compte des responsabilités différentes selon les catégories, et les parties prenantes
certains auteurs font la distinction entre celles-ci : Phillips et al. parlent par exemple des
parties prenantes dérivées (par opposition aux normatives), « pouvant être nuisibles ou
bénéfiques à l’entreprise, mais envers lesquelles l’entreprise n’a aucune obligation morale
directe » incluant ainsi dans ce groupe « les concurrents, activistes, terroristes et médias »
(Phillips et al., 2003, 489). Ainsi expliquer les motivations d’engagement dans des politiques
RSE efficaces dans le but d’atteindre un management responsable uniquement en se
basant sur la théorie des parties prenantes présente quelques limites. Cela souligne donc
les lacunes de cette approche déterministe de la RSE pour expliquer l’efficacité de la RSE à
l’Olympique Lyonnais et dans les autres organisations sportives. Certains déclarent même
que la pression des parties prenantes influencerait les pratiques RSE uniquement dans la
publication des informations sociétales et non dans leurs pratiques en elles mêmes (Ayadi,
2006).
Si la théorie des parties prenantes présente des limites pour expliquer l’effectivité des
pratiques RSE, Laurent Arnaud responsable d’OL Fondation est quant à lui convaincu que
l’efficacité de leur pratique est liée avant tout à la conviction profonde du président, Jean
Michel Aulas, et de ses collaborateurs : « on le fait avant tout par conviction, parce que
c’est une conviction du club et un modèle d’entreprise dans lequel le président du club
croit, qui est lui même chef d’entreprise d’une autre grosse compagnie sur lequel ces
sujets là sont certainement plus enclenchés ou du moins depuis plus longtemps » (2012).
Certains auteurs, s’appuyant sur la théorie des valeurs managériales, ont en effet mis en
évidence l’importance des individus présents dans l’entreprise et notamment des managers
pour expliquer les comportements de l’organisation en matière de Responsabilité Sociale
(Sharma, 2000). Le rapport de l’INSEAD (Grande Ecole de Management) de 2007 souligne
d’ailleurs que « la RSE est à la fois une pratique organisationnelle et un comportement
individuel et l’on ne peut dissocier ces deux aspects lorsque l’on s’intéresse aux pratiques
liées à la RSE ».
Ainsi prendre en considération les taxonomies des pratiques RSE ainsi que dépasser la
théorie des parties prenantes en l’associant par exemple à celle des valeurs managériales,
permettrait d’analyser plus pertinemment l’effectivité des pratiques RSE des organisations
sportives. Avec ces constats plus ou moins théoriques, nous pouvons tenter d’analyser
l’effectivité réelle de la politique RSE de l’Olympique Lyonnais.
3-3) La politique RSE de l’Olympique Lyonnais,
une fin en soi ouun moyen vers un management
responsable ?
Les deux taxonomies présentées ci-dessus, ont décrit le stade optimal des pratiques RSE :
« RSE intégrée » pour Martinet et Payaud (2007), ou « Strategic CSR » pour Babiak et
52
III. L’Effectivité des pratiques RSE dans le sport professionnel Français : vers un management
responsable de l’Olympique Lyonnais et des Organisations Sportives ?
Wolfe (2009), ces deux stratégies RSE ont pour avantage d’ancrer les actions RSE des
organisations dans la durée afin d’atteindre un management responsable.
a) Ancrer la stratégie RSE de l’Olympique Lyonnais dans la stratégie
des clubs : recherche de l’avantage concurrentiel
Pour beaucoup, à la différence des simples actions ponctuelles de mécénat par exemple,
la RSE ne doit pas être considérée comme une finalité, un but, encore moins un objectif à
atteindre. Les entreprises qui s'engagent dans une démarche de RSE doivent le faire dans
le cadre d'une réflexion stratégique afin d’ancrer cette démarche dans la durée et d’être
considérées comme pleinement responsables envers la société. Dans cette perspective
on pourrait définir la RSE comme une approche à long terme qui procure des avantages
commerciaux aux entreprises et aide celles-ci à contribuer de façon positive à la société.
Hélène Blondel, responsable partenariats de l’association Sport dans la Ville, souligne cette
nécéssité d’une pratique stratégique : « On a souvent l’impression qu’ils vivent dans un autre
monde et donc mener des actions auprès d’associations ca les rapproche de la société,
de leurs supporters. Leur impact social est fort, et on s’en rend compte tous les jours : ils
apportent du rêve à nos jeunes, ils ont un peu le rôle de modèle, donc finalement leurs
pratiques de responsabilité sociétale c’est gagnant-gagnant : et pour eux, et pour nous »
(2012).
Cependant ancrer la politique sociale de l’Olympique Lyonnais dans la stratégie globale
du club, n’est pas chose facile. Porter et Kramer (2006) ont tenté d’apporter des réponses
à cette problématique en soulignant que cela est guidé par la recherche de « l’avantage
concurrentiel » (Porter, 1985). Ils suggèrent tout d’abord d’identifier dans la chaîne de valeur
les points d’intersection entre l’organisation et la société dans laquelle celle ci s’insère, en
distinguant les liens inside-out (l’impact de l’organisation sur la société, positif ou négatif
— par exemple, la création d’emplois sur un site (à Décines par exemple), la pollution liée
à l’activité, les nuisances lors des matchs) et les liens outside-in (l’impact de la société
sur l’organisation, positif ou négatif ; par exemple, le niveau de formation dans le bassin
d’emploi, la qualité des infrastructures, le niveau de corruption dans le sport). Ensuite, pour
que l’approche stratégique aille au-delà de la recherche mimétique de bonnes pratiques
ou de pratiques cosmétiques, ils préconisent d’essayer de se différencier et de renforcer
l’avantage concurrentiel. Cette approche stratégique doit alors se focaliser sur des objectifs
restreints qui intègrent à la fois des effets inside-out et outside-in (Porter et Kramer, 2006).
Une telle approche stratégique, permettrait ainsi de satisfaire l’Olympique Lyonnais dans
ses objectifs ainsi que les besoins de la société.
Cette approche souligne la distinction entre ceux qui pensent que « doing good is
the right thing to do » et ceux qui sont convaincus que « doing good is good business »
(Babiak & Wolfe, 2009, 723). Ainsi les partisans de la deuxième maxime, qui pensent que la
performance sociale sert la performance globale de l’entreprise, sont convaincus que cette
posture est la plus optimale pour atteindre un management responsable durable.
La description de cette approche stratégique permet dès lors d’appréhender les enjeux
d’une politique sociale stratégique pour l’Olympique Lyonnais.
b) Les enjeux d’une politique de RSE stratégique pour l’Olympique
Lyonnais
53
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
Que ce soit Gérard Caviglia, ou Laurent Arnaud, tout deux ont confirmé que l’Olympique
Lyonnais dans la mise en place de leur politique sociale, avait conscience des enjeux qui
découleraient d’une pratique stratégique de responsabilité sociale. Laurent Arnaud illustre
ceci en prenant l’exemple des actions RSE en relation avec le centre de formation : améliorer
les conditions d’accueil, de formation des joueurs « c’est faire en sorte de les accompagner
et qu’ils aient la vie la plus facile possible, qu’ils ne soient pas déconnectés de la vie
réelle » (2012). Si on reprend l’explication de Porter et Kramer, il y a des points d’intersection
entre l’Olympique Lyonnais et la Société. Du côté des liens inside out, c’est à dire l’impact
de l’organisation sportive sur la société, on y trouve l’éducation des jeunes, la création
d’emplois et de contrats professionnels pour les joueurs, la promotion de l’activité sportive
pour lutter contre les problèmes de santé. Du côté des liens outside-in, c’est à dire l’impact
de la société sur l’organisation, la qualité des infrastructures, le niveau de formation proposé
par les établissements publics lyonnais dans lesquels sont scolarisés les joueurs permettent
de reconnecter les joueurs à la vie réelle pour faciliter leur réinsertion en cas de non
signature d’un contrat, ou fin de carrière professionnelle.
Il y a également des éléments stratégiques dans la politique RSE liée au Grand Stade.
Les efforts RSE de l’Olympique Lyonnais, notamment en matière environnementale sensés
limiter les nuisances sonores et les pollutions, doivent permettre une meilleure acceptation
par les habitants de Décines, et par les Lyonnais en général, ce qui pourrait permettre une
augmentation des ventes de la billetterie par exemple. Ainsi comme le souligne Gérard
Caviglia :
« Le lien avec les clubs locaux aussi est important. L’OL a un rayonnement fort
au niveau régional, mais il y a des liens forts qui vont se créer avec Décines : la
possibilité de donner accès aux installations à des clubs de jeunes, la possibilité
d’accueillir le public dans certaines conditions soit pendant la préparation
des joueurs soit pour les matchs des féminines par exemple. En matière de
stationnement, il y a beaucoup de craintes de la part des habitants de voir
leurs rues envahies par les voitures, donc c’est à l’OL d’accompagner le projet
de mesures visant à protéger cette tranquillité là. Ce sont des mesures de
ce type qui doivent permettre d’avoir une bonne acceptation du stade par
l’environnement immédiat » (2012).
Ces actions stratégiques de l’Olympique Lyonnais, sont évidemment accompagnées
d’autres actions RSE plus ou moins intégrées. Certains partenariats de l’Olympique
Lyonnais via sa Fondation ne sont pas toujours en lien direct avec leur cœur de métier,
ni ancré dans la stratégie globale du club. Cependant, si l’on prend en compte les actions
stratégiques menées par le club Lyonnais nous pouvons constater qu’elles sont bien plus
qu’une simple fin en soi, mais plutôt de véritables moyens pour atteindre un management
responsable durable.
54
Conclusion
Conclusion
Ainsi à travers l’exemple de l’Olympique Lyonnais, la Responsabilité Sociale des
Organisations Sportives semble être un outil efficace pour atteindre un management
responsable et durable dans un secteur souvent décrié pour les externalités négatives
qu’il implique. La réelle émergence de la RSE dans le sport professionnel s’inscrit dans
le contexte profondément renouvelé des années 2000, marqué par exemple par la
professionnalisation du sport, sa médiatisation et marchandisation, la coexistence de fortes
attentes envers les clubs sportifs mais aussi d’une véritable crise de légitimité de ces
dernières, notamment suite à des scandales financiers.
Bien que l’Europe et notamment la France aient du retard par rapport au système
américain en matière de Responsabilité Sociale du sport professionnel, ces politiques
RSE dans un sport tel que le football professionnel français sont pertinentes, adaptées
à un secteur qui ne semblaient pas à première vue devoir se soumettre à un principe
normalement attribué à l’entreprise traditionnelle. Mais comme nous l’avons étudié, la
pertinence de la RSE dans le football professionnel repose sur des apports réciproques :
ce que le football apporte de spécifique à la RSE par rapport à d’autres entreprises
classiques et ce que la RSE apporte au football professionnel en termes de réponses à
des enjeux nouveaux et à une complexification de l’environnement du football. Cependant
pour atteindre un réel management responsable des organisations sportives, les clubs de
football par exemple, doivent dépasser les simples pratiques cosmétiques, et ancrer leurs
actions sociales dans la stratégie globale des clubs.
Si l’Olympique Lyonnais est plutôt bien avancé sur ces questions là et a structuré sa
politique sociale de façon à intégrer certains aspects dans sa stratégie globale, les autres
clubs de ligue 1 sont encore loin derrière, et la plupart se concentrent uniquement sur des
actions ponctuelles ultra médiatisées. Néanmoins, l’importance de l’Olympique Lyonnais en
termes de rayonnement au niveau national mais aussi européen, peut permettre de diffuser
et d’inspirer d’autres clubs sportifs sur cette voie. Comme le souligne Laurent Arnaud :
« Ce sont des sujets en perpétuelle évolution. Il y a cinq ans on en parlait très
peu. Et d’un point de vue du mécénat ça fait vraiment cinq ans que les clubs
ont commencé à agir et à dépasser le côté uniquement communication. Donc je
pense que ca va continuer à se développer dans le futur. Je vois donc l’OL plutôt
comme précurseur de ces dimensions là, mais bon on est absolument pas en
concurrence sur ces champs là : plus y a de clubs qui le font et mieux c’est ! »
Une des conclusions que nous pouvons tirer de ce travail, est que la RSE dans le sport
professionnel ne découle pas spontanément d’une situation ou d’un contexte. Elle nécessite
d’être mise en œuvre suivant une méthodologie, basée par exemple sur le management
stratégique de l’entreprise. En effet une des origines de ce travail de recherche provenait du
constat suivant: bien que la responsabilité sociale de l’entreprise représente aujourd’hui un
enjeu stratégique majeur pour les organisations et notamment les organisations sportives
comme nous l’avons étudié dans ce mémoire, la question de son opérationnalisation en
des pratiques claires et pertinentes pose problème. C’est pourquoi nous nous sommes
interrogés sur la façon de parvenir à un réel management stratégique et responsable
dans le football professionnel. L’Olympique Lyonnais semble avoir pris conscience de ce
55
La RSE dans le sport professionnel français : L’Olympique Lyonnais, illustration d’un
management responsable ?
constat, puisqu’ils se sont interrogés eux aussi sur la manière d’optimiser leur politique
sociale pour l’ancrer dans la durée. En créant leur Fondation par exemple ils ont cherché
à organiser et harmoniser des pratiques déjà existantes auparavant afin de les rendre plus
visibles et efficaces. Il faut ainsi un engagement dans un processus de changement dans
le management de l’organisation. De plus, afin d’atteindre un management responsable
dans le sport professionnel il est important de ne pas opérer de dissociations entre les trois
piliers de la RSE et Développement Durable : les piliers économique, environnemental et
social doivent être pris en compte sans négliger l’un d’eux. Imaginons, un club de football
professionnel se focalisant uniquement au pilier environnemental ; il gagnerait certes en
réputation et améliorerait son image mais il y aurait probablement des pertes financières. Si
au contraire, le club ne se focalisait uniquement sur le pilier économique, comme Friedman
le préconisait, il le ferait au détriment de plusieurs de ses parties prenantes tels que les
salariés. De plus, sans s’intéresser au pilier environnemental le club perdrait un avantage
concurrentiel précieux et essentiel dans la société d’aujourd’hui.
Il reste toujours, néanmoins, des pistes à travailler. En plus d’avoir à prendre conscience
de leur impact social, les clubs sportifs doivent notamment travailler sur l’évaluation de ces
pratiques sociales afin de remettre en question régulièrement leur politique de responsabilité
sociale et d’optimiser celle ci au maximum.
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Annexes
- A consulter sur place à la bibliothèque de Sciences-Po Lyon -
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