Quand le cancer s`étend au foie
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Quand le cancer s`étend au foie
JIC61•COUVXP01 27/01/2005 10:03 Page 1 LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER 18-19-20 MARS Au Panthéon, Un Jardin pour la Vie Une Jonquille pour Curie DOSSIER Métastases hépatiques Quand le cancer s’étend au foie # 61 - MARS 2005 - 1,25 € - ISSN 1145-9131 JIC61•2-3-XP1SR1 27/01/2005 10:05 Page 2 ACTUALITÉS INSTITUT CURIE ÉDITORIAL Institut Curie Amélie Mauresmo, p. 3 Quand un(e) physicien(ne) rencontre un(e) biologiste… Un taxane en traitement initial du cancer du sein marraine de cœur de l’Institut Curie La championne de tennis soutient l’Institut Curie. p. 6 Actualités générales Prothèses esthétiques Jacques Chirac demande un meilleur remboursement h DÉCRYPTAGE p. 7 Les cellules parlent aux cellules ! h DOSSIER p. 8 MÉTASTASES HÉPATIQUES A. Lescure/Institut Curie QUAND LE CANCER S’ÉTEND AU FOIE Témoignage p. 11 Annie soignée à l’Institut Curie raconte Grâce à vous K. Huck / Institut Curie Communication cellulaire : «Mon engagement aux côtés de l’Institut Curie, bien que récent, est très fort. Ce que je vis au quotidien, en tant que sportive de haut niveau, peut en effet se rapprocher de ce que vivent les malades atteints d’un cancer : il faut toujours aller de l’avant. Parfois, on peut être moins motivé; à d’autres moments, on reprend confiance en soi. Même si l’épreuve qu’ils subissent est sans commune mesure avec ce que je traverse, j’espère pouvoir leur donner du courage et un peu de bonheur.» « Permettez-moi, au nom de l’Institut Curie, de vous convier les 18, 19 et 20 mars à une formidable action de générosité et de solidarité contre le cancer en partenariat avec les jardineries Truffaut et le Monum (Centre des monuments historiques) : Un Jardin pour la Vie, une Jonquille pour Curie (lire p. 17). Pour la deuxième fois, venez découvrir le Panthéon (Paris 5e) habillé d’un nouveau décor fleuri aux couleurs de l’espérance. » Amélie Mauresmo p. 12 L’apport des radiofréquences h ENTRE NOUS Initiatives Un Jardin pour la Vie Aux couleurs de l’espoir Rétrospective Le jardin de Marie Curie p. 17 Depuis 2003, la championne de tennis Amélie Mauresmo, numéro 1 mondial* et médaillée olympique, soutient l’Institut Curie. Sans compter sa notoriété qui permet de sensibiliser le plus grand nombre au fléau du cancer, le rapprochement de l’Institut Curie et d’Amélie Mauresmo est d’autant plus légitime que les valeurs véhiculées par le sport sont proches de celles de la recherche et de la santé : l’effort et l’esprit d’équipe face à un adversaire. * Classement au moment où nous écrivons ces lignes. p. 19 Quand un(e) physicien (ne) rencontre un(e) biologiste… Le travail commun de physiciens et de biologistes, une originalité de l’Institut Curie, est en pleine maturité avec pour conséquence l’augmentation du nombre de découvertes réalisées et publiées dans des revues scientifiques prestigieuses. Preuve que le dialogue entre chercheurs d’horizons différents engendre une dynamique favorable à la créativité scientifique. i communiquer est essentiel à l’homme, c’est également vrai pour la cellule, son constituant de base. Les échanges entre les cellules, mais aussi à l’intérieur de celles-ci, entre les différents compartiments cellulaires qui les composent, sont permanents et indispensables pour maintenir les grandes fonctions biologiques. Pour communiquer, la cellule utilise des molécules sur lesquelles sont «codées» les informations. Celles-ci sont transportées grâce à un véritable réseau de tubes biologiques. S Des tubes pour véhicules LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER EST ÉDITÉ PAR L’INSTITUT CURIE - 26, RUE D’ULM, 75248 PARIS CEDEX 05 - FAX: 01 43 25 17 56 [email protected] - WWW.CURIE.FR - DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : PR CLAUDE HURIET - RÉDACTRICE EN CHEF : NATHALIE BOISSIÈRE (01 44 32 40 60) RÉDACTION: CHLOÉ BESSON, CÉLINE GIUSTRANTI, PIERRE KANTER, ABIGAELLE LACOMBE-DIDIER, GÉRALDINE LEBOURGEOIS, SARAH MÉLHÉNAS - ICONOGRAPHIE: CÉCILE CHARRÉ (01 44 32 40 51) - DONS ET ABONNEMENTS: YOVAN VUJOSEVIC (01 44 32 40 80) - ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO: MARITÉ AMRANI, PR PIERRE BEY, GINETTE BUSSON, DR LAURE COPEL, DR LAURENCE DESJARDINS, DR THIERRY DORVAL, DR JEAN-MARC EXTRA, NATHALIE HUCHETTE, ALEXANDRE LESCURE, PR DANIEL LOUVARD, HENRI MAGDELENAT, DR PASCALE MARIANI, DR SOPHIE PIPERNO-NEUMANN, PR PIERRE POUILLART DE L’INSTITUT CURIE – LE SOMMAIRE, LES TITRES, CHAPÔS, INTERTITRES, ILLUSTRATIONS ET LÉGENDES SONT DE LA RESPONSABILITÉ DE LA RÉDACTION EN CHEF ET N’ENGAGENT PAS LES AUTEURS - PHOTO DE COUVERTURE : CELLULE EN DIVISION (BSIP) ABONNEMENT POUR 4 NUMÉROS/AN: 5 € - CRÉATION ET RÉALISATION: CITIZEN PRESS (01 53 00 10 00) - FABRICATION: TC GRAPHITE (PARIS) - IMPRESSION: LA GALIOTE PRENANT 70/82 RUE AUBER 94400 VITRY/SEINE - NUMÉRO DE COMMISSION PARITAIRE : 0907H82469 - DÉPÔT LÉGAL DU N° 61 : MARS 2005 - CE NUMÉRO A ÉTÉ IMPRIMÉ À 170 000 EXEMPLAIRES ET CONTIENT UN PROGRAMME « UN JARDIN POUR LA VIE » ET UNE ENQUÊTE DE LECTORAT. 02, LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE C. Leduc-P. Bassereau/Institut Curie h ACTUALITÉS ,RECHERCHE h SOMMAIRE En partenariat avec les biologistes de l’équipe de Bruno Goud1 à l’Institut Curie, l’équipe de physiciens de Patricia Bassereau2 a développé un système original qui imite in vitro ce trafic intracellulaire. Avec la collaboration du groupe de physiciens théoriciens de Jacques Prost et Jean-François Joanny2, Réseau de tubes membranaires observé en microscopie confocale. ils montrent comment des moteurs moléculaires, les kinésines, «tractent» des tubes vers leur destination3 : plusieurs moteurs, liés à la membrane et sans cesse renouvelés, s’associent dynamiquement et génèrent une force suffisante pour tirer ces tubes. La vitesse de l’ensemble est dictée par les moteurs de tête. Au vu de leurs résultats, il semblerait que la cellule puisse réguler ces échanges en jouant sur la quantité de kinésines. Ce modèle n’a pas fini d’enrichir les connaissances sur le trafic cellulaire. Des « colles » pour maintien Par ailleurs, en collaboration avec l’équipe de physiciens d’Evan Evans (Vancouver, Canada), Hélène Feracci4, biologiste à l’Institut Curie, a fait un grand pas dans la compréhension de l’adhésion entre cellules5. Certaines cellules doivent en effet rester soudées pour le bon fonctionnement de l’organisme. Cette adhésion indispensable est assurée par des «colles cellulaires», les cadhérines. Ces protéines à la surface des cellules assurent le contact entre celles-ci en interagissant entre elles. Elles ont donc un rôle essentiel dans la formation des tissus lors du développement embryonnaire, puis pour leur cohésion à l’âge adulte. Leur perturbation peut avoir de fâcheuses conséquences. Ainsi, lorsque les cellules cancéreuses perdent leur capacité d’adhérence aux cellules voisines, elles peuvent migrer et donner naissance à des métastases. Pour comprendre comment fonctionnent ces «colles», les physiciens canadiens et les biologistes de l’Institut Curie ont utilisé un modèle expérimental : deux billes de verre recouvertes de cadhérines mises en contact et un «ressort» constitué d’un globule rouge afin de mesurer la force nécessaire pour rompre ce contact. L’analyse de la déformation de ce ressort informe sur les propriétés adhésives de ces «colles». Les chercheurs ont ainsi révélé que les cadhérines, à l’échelle d’une molécule unique, ont des potentialités d’adhésion importantes. Ce sont des molécules capables de contacts à la fois dynamiques – ce qui leur permet de s’adapter rapidement à leur environnement – et très stables – ce qui favorise les interactions solides. Cette approche multidisciplinaire donne un nouvel éclairage sur l’adhérence cellulaire. Instaurée à l’Institut Curie, l’interface entre physique et biologie offre à la communauté scientifique internationale une autre vision du monde cellulaire extrêmement prometteuse pour comprendre la complexité de la cellule. Céline Giustranti 1. et 4. UMR 144, CNRS-Institut Curie. 2. UMR 168, CNRS-Institut Curie. 3. Proceedings of the National Academy of Sciences. États-Unis, 7 décembre 2004. 5. Proceedings of the National Academy of Sciences. États-Unis, 16 novembre 2004. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE ,03 JIC61•actu4-7-XP1SR1 27/01/2005 10:11 Page 4 ACTUALITÉS ACTUALITÉS INSTITUT CURIE INSTITUT CURIE ,CANCER DU SEIN UN FREIN À LA PROLIFÉRATION L’équipe de François Radvanyi (UMR 144, CNRS-Institut Curie) a élucidé le mécanisme d’action du gène suppresseur de tumeurs, FGFR2, dans les cancers de la vessie. Ce gène, dont l’expression est fortement diminuée dans 30 % des tumeurs de la vessie, est associé à un mauvais pronostic. Sa réintroduction expérimentale dans des cellules tumorales de la vessie permet de bloquer leur prolifération. Aujourd’hui, les chercheurs montrent que, dans les cancers de la vessie, le gène FGFR2 empêche l’expression d’un des messagers cellulaires induisant la prolifération, IGF-II. Ils ont également déterminé la région génétique responsable de cette activité antiproliférative. Oncogene, 25 octobre 2004 VIE DE LA CELLULE Un taxane en traitement initial A vec 42000 nouveaux cas en 2000, le cancer du sein est le plus fréquent des cancers en France. Centre de référence pour la prise en charge de cette pathologie, l’Institut Curie participe depuis quatre-vingts ans à la mise au point et/ou au développement de nouvelles stratégies thérapeutiques et de traitements conservateurs préservant l’intégrité anatomique et fonctionnelle. Les médecins du Département d’oncologie médicale de l’Institut Curie ont coordonné une étude montrant l’intérêt d’un taxane, en chimiothérapie « néoadjuvante », c’està-dire administrée avant l’acte chirurgical: la taille de la tumeur est ainsi réduite chez 89 % des patientes contre 70 % avec l’association de référence, et un traitement conservateur est possible chez 58 % des patientes contre 45 %. Déjà utilisé en phase avancée de la maladie, l’administration de ce médicament, en phase précoce, permettrait donc d’améliorer l’efficacité des traitements. Céline Giustranti Journal of Clinical Oncology, 15 décembre 2004 F. Niedergang, M. Grasset (Paris 6) / IC INDISPENSABLE AU NETTOYAGE ,EXCELLENCE La biologiste The EMBO Journal, 27 octobre 2004 04, LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE La passion d’Anne Houdusse pour les moteurs moléculaires vient de lui valoir la médaille de bronze du CNRS 2004. Cette jeune biologiste, chargée de recherche 1re classe, est chef de l’équipe «Motilité structurale» au sein de l’UMR 144 CNRS à l’Institut Curie. Elle se consacre depuis plusieurs années à comprendre comment fonctionnent les protéines impliquées dans le mouvement cellulaire. À l’image d’une voiture, S. Laure/Institut Curie Virginie Braun et Florence Niedergang de l’équipe de Philippe Chavrier (UMR 144 CNRS) à l’Institut Curie ont montré que la protéine TI-VAMP joue un rôle clé lors de la phagocytose, processus par lequel les cellules se débarrassent des éléments indésirables, comme les bactéries. La phagocytose est, entre autres, essentielle à la réponse immunitaire et inflammatoire. Lorsqu’un corps étranger « attaque » l’organisme, il est dégradé afin d’en isoler un fragment caractéristique qui servira à déclencher une réponse immunitaire dirigée contre cet intrus. Globule blanc en plein travail de « nettoyage ». h h Anne Houdusse médaillée Anne Houdusse, chef de l’équipe «Motilité structurale» à l’Institut Curie, a reçu la médaille de bronze du CNRS. la cellule a besoin d’énergie et d’un moteur pour assurer ses mouvements et ses fonctions. Dans la cellule, le rôle de l’essence est assuré par des molécules énergétiques appelées ATP, et celui du moteur par plusieurs familles de protéines, dont les myosines. C’est à ces dernières et surtout à leur structure atomique que s’intéresse Anne Houdusse. « Décortiquer » ces protéines permet de mieux comprendre la dynamique cellulaire et certaines maladies génétiques. EN BREF Pour une organisation EUROPE RÉSEAU « ÉPIGÉNOME » et une cohérence P arce qu’il fallait adapter les locaux aux nouveaux équipements, aux nouvelles façons de travailler en cancérologie, et répondre aux besoins des malades, des travaux importants ont été entrepris à l’hôpital de l’Institut Curie1. Aboutissement d’une première phase, mars 2005 sera mémorable pour les équipes hospitalières et les patients de l’Institut. Tout d’abord, c’est l’ouverture d’un espace dédié à la médecine nucléaire, la radiologie2 et la radiothérapie où les trois disciplines sont rassemblées et leurs plateaux techniques proches. Fermée durant plus de six mois, la médecine nucléaire bénéficie désormais d’une Tep-scan (appareil de tomographie par émission de positons couplé à un scanner). Tandis que l’imagerie médicale, équipée depuis 2003 d’une IRM et d’un système informatique de stockage et de communication d’images, Pacs3, et le plateau technique de radiothérapie, parmi les plus performants d’Europe, vont pouvoir à nouveau fonctionner à plein régime. À côté de cette haute technologie, un autre secteur a bénéficié de locaux totalement refaits : il s’agit du Département des soins de support qui regroupe le soutien psychologique, les urgences, les soins d’accompagnement, la diététique, la rééducation. Plus de 500 m2 lui ont été réservés pour accueillir un hôpital de jour de trois places, une salle dédiée aux soins A. Lescure / Institut Curie CANCER DE LA VESSIE ,TRAVAUX À L’HÔPITAL A. Lescure/Institut Curie EN BREF des plaies, deux salles d’urgence et d’autres pour les consultations des psychologues. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg, car pour accompagner ou compléter ces réalisations, nombre d’espaces ont été repensés, déplacés, mis aux normes (poste de sécurité incendie, entrée de l’hôpital, archives médicales et radiologiques, logistique…). Par la priorité donnée à ces travaux, financés en accord avec les organismes de tutelle (caisse d’assurance maladie, agence régionale d’hospitalisation), l’Institut Curie œuvre en faveur du décloisonnement des pratiques et de l’amélioration de la qualité des soins, forces de progrès dans la lutte quotidienne contre le cancer. L’unité de Geneviève Almouzni (UMR 218 CNRS-Institut Curie) fait partie des 25 laboratoires européens retenus pour constituer le réseau d’excellence «Épigénome» coordonné par Thomas Jenuwein (Research Institute of Molecular pathology, Autriche). Doté de 12,5 millions d’euros, ce consortium va établir en Europe d’ici à cinq ans une plate-forme dédiée à la recherche et à la communication dans le domaine de l'épigénétique, ce domaine particulier de la génétique. Il s’attachera à mieux comprendre la transmission des caractères épigénétiques et leurs implications dans le cancer et le vieillissement. C. G. TÉMOIGNAGE « NOUS ALLONS NOUS BATTRE » Nathalie Oudar 1. L’hôpital dispose de 184 lits d’hospitalisation complète et de 43 places en ambulatoire. 2. Lire « Mieux voir, mieux soigner », Le journal de l’Institut Curie, nov. 2003. 3. Picture archiving and communication systems. PENDANT LES TRAVAUX, L’HÔPITAL RESTE OUVERT… Une nouvelle phase de travaux est d’ores et déjà entamée. Au programme de l’année 2005 : réaménagement de la pharmacie (création d’une zone de préparation centralisée des médicaments dits « cytotoxiques »), rénovation du service d’hospitalisation du Département de radiothérapie et curiethérapie, création de l’hôpital de jour de pédiatrie… C. G. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE ,05 JIC61•actu4-7-XP1SR1 27/01/2005 10:11 Page 6 DÉCRYPTAGE ACTUALITÉS GÉNÉRALES TRAITEMENT HORMONAL RISQUE CONFIRMÉ Un traitement hormonal substitutif (THS), association d’œstrogènes et de progestatifs de synthèse, prescrit sur une période de deux ans, augmente de 40 % le risque de cancer du sein chez la femme ménopausée. C’est le résultat de l’étude E3N menée sur 54000 femmes ménopausées par l’équipe Inserm de Françoise ClavelChapelon. « Quatre cents utilisatrices de THS sur 30000 ont développé un cancer du sein durant l’étude », précise-t-elle. Face aux risques, les experts recommandent donc la prudence. Les THS sont désormais prescrits à faible dose, pour une durée la plus courte possible et sous conditions très particulières pour lutter contre les inconvénients de la ménopause. Pour traiter l’ostéoporose notamment, ils ne sont nécessaires que s’il y a risque de fracture et après échec d’un traitement par les biphosphonates. D’autant que l’utilisation d’une combinaison d’œstrogènes et de progestérone naturels – non synthétique – ne semble pas augmenter le risque. Ce mélange n’est encore utilisé que par 20 % des 1,5 million de Françaises sous THS. A. L.-D. h Inserm Lire aussi : Le Journal de l’Institut Curie (mars 2004). « Quatre cents utilisatrices ont développé un cancer ». F. Clavel-Chapelon, auteur de l’étude E3N. ,PROTHÈSES ESTHÉTIQUES Jacques Chirac demande un meilleur remboursement parlent aux cellules ! Pour le bon fonctionnement de notre organisme, nos cellules – 60 000 milliards chez un adulte – doivent communiquer entre elles. Mais il arrive que leur « dialogue » soit brouillé. Résultat ? Des maladies, dont certains cancers. h POURQUOI COMMUNIQUER ? Dès lors que l’organisme compte plusieurs cellules, celles-ci doivent échanger des informations pour… • contrôler, surveiller la croissance de certains tissus, réguler la production de substances nécessaires à l’organisme, c’est notamment la mission du système hormonal ; • transmettre des messages nerveux, c’est le rôle du système nerveux ; • reconnaître et détruire les « microbes », objectif visé par le système immunitaire. h COMMENT COMMUNIQUER ? ,ÉQUIPEMENT Nantes aura son cyclotron Les cellules communiquent : • soit par contact direct, comme des voisins de palier peuvent se serrer la main ; • soit grâce à des « messagers chimiques », missives fabriquées et secrétées par une cellule et réceptionnées par une seconde, qui interprète alors le message et passe à l’action, comme un courrier peut demander une réaction de son destinataire. Selon l’éloignement de la cellule-cible, il peut s’agir de communication autocrine (la cellule s’envoie un message « pense-bête »), paracrine (la cellule s’adresse à ses voisines) ou endocrine (la cellule communique avec des cellules d’un organe éloigné via le sang). h COMME UNE CLÉ DANS SA SERRURE De même qu’une clé ne peut ouvrir qu’une seule serrure, les messagers chimiques ne sont reconnus que par leurs cellules-cibles grâce à des récepteurs qui leur sont spécifiques. Ils sont situés à la surface ou à l’intérieur des cellules, voire dans leur noyau. Isabelle Ramade-Masson Centre de vulgarisation de la connaissance université-XI 06, LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE La cellule fabrique un « messager chimique ». Celui-ci est émis hors de la cellule. Il se fixe sur un « récepteur » de la même cellule. Il se fixe sur un « récepteur » d’une cellule-cible voisine. Il est acheminé par le sang. Il se fixe sur un « récepteur » d’une cellule-cible d’un organe ou tissu éloignés. La fixation du messager sur son récepteur transmet un message à la cellulecible : cela y déclenche une réaction. Le messager est ensuite éliminé (ou dégradé). © CVC EN BREF Les cellules COMMUNICATION CELLULAIRE LE CANCER : UNE MALADIE DE LA COMMUNICATION CELLULAIRE? Une cellule reçoit en permanence des messages qui lui ordonnent de rester tranquille ou de se diviser. Ainsi, au cours du développement d’un individu, des gènes (oncogènes) stimulent la division cellulaire pour assurer la croissance ou le renouvellement des tissus et organes. Si ces gènes, normalement au repos chez l’adulte, se « réveillent » par erreur, ils court-circuitent les voies de communication. ces cellules prolifèrent alors de façon incontrôlée. Par ailleurs, les cellules cancéreuses émettent trop de messagers (facteurs de croissance), qui stimulent anarchiquement leur division. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE ,07 JIC61•8-14-XP1SR2 27/01/2005 10:20 Page 8 DOSSIER MÉTASTASES HÉPATIQUES h A. Lescure/Institut Curie La chimiothérapie est une arme employée contre les métastases hépatiques. Diminuant la taille des lésions, elle rend souvent possible un geste chirurgical. Elle participe également à la réduction du risque de récidive. Les métastases au foie représentent une possible complication grave des cancers du côlon et du sein. Toutefois, grâce aux progrès de la chimiothérapie et de la chirurgie, on sait aujourd’hui en contrôler et en traiter un grand nombre. a quasi-totalité des tumeurs cancéreuses possède le pouvoir de métastaser, autrement dit de se propager à des organes autres que celui d’origine1. Les métastases sont les « descendantes » des cellules malignes qui ont franchi les limites de la tumeur primitive et atteint les vaisseaux lymphatiques et/ou sanguins (lire p. 10). Dans le premier cas, elles sont bloquées dans le ganglion le plus proche, situé par exemple dans l’aisselle L 1. Cette redoutable propriété connaît toutefois deux exceptions : une forme de cancer de la peau, le carcinome baso-cellulaire, et un cancer du système nerveux central, le glioblastome. Le premier ne forme jamais de métastase, le second de façon exceptionnelle. 08, LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE pour un cancer du sein. Elles s’y multiplient, puis envahissent peu à peu les ganglions voisins. Lorsque ces cellules se trouvent dans la circulation sanguine, elles essaiment à distance avant de se fixer sur un autre organe et y « reproduire » le cancer d’origine : les cellules d’une métastase au foie d’un cancer du sein seront toujours des cellules typiques d’un cancer du sein, et non des cellules hépatiques altérées. Des localisations précises « Le nombre et la taille des métastases varient d’un patient à l’autre, explique le Dr Pascale Mariani, responsable de l’Unité de chirurgie elle risque de former des métastases. 2. Statistique Institut Curie. LOCALISATION INITIALE DESTINATIONS PRINCIPALES DES MÉTASTASES poumon (cancer du poumon dit «à petites cellules») h cerveau, foie, glandes surrénales côlon h foie, poumons prostate h os sein h foie, cerveau, os rein h poumons, foie ovaire h péritoine INTERVIEW DR THIERRY DORVAL, Ch. Gruner / Institut Curie digestive de l’Institut Curie. Elles peuvent se développer dans tous les organes mais en réalité, leur localisation n’est sans doute pas le simple fait du hasard : les tumeurs ont des sites préférentiels. » Le foie est un organe souvent touché par les métastases, et parfois l’unique organe atteint, comme dans la très grande majorité (83 %) des mélanomes de la choroïde (lire « Interview » ci-contre). C’est pourquoi tout bilan initial porte également sur ces organes cibles : c’est le bilan d’extension. Si un patient est atteint, par Seule une cellule sur mille exemple, d’un cancer du échappée d’une tumeur donne côlon ou du sein, son bilan d’extension comportera un une métastase. scanner abdominal et, pour le cancer du côlon, une échographie du foie. La surveillance se poursuivra parfois après le traitement initial afin de détecter une rechute hépatique isolée (lire encadré p. 12). Le foie est donc souvent un organe cible pour des métastases de cancers, parmi les plus fréquents en France : plus de 36 000 nouveaux cas de cancers colorectaux et près de 42 000 nouveaux cas de cancers du sein ont été diagnostiqués en 2000. Cinq ans après le diagnostic d’un cancer du côlon ou du sein non métastatique, respectivement 20 % et 4 % des patients2 développent des métastases hépatiques. C’est dire l’importance des enseignements tirés par la communauté des cancérologues, quant à la détection et au LE SAVIEZtraitement des métastases hépatiques, et de leur VOUS? traduction en protocoles. Plus le volume Dès que des métastases sont détectées, l’équipe d’une tumeur est médicale met en œuvre une stratégie théragrand, plus celle-ci peutique complexe. Le traitement des ■ ■ ■ est « agressive » : plus h QUAND LE CANCER S’ÉTEND AU FOIE MÉTASTASES HÉPATIQUES responsable de l’hospitalisation en chimiothérapie à l’Institut Curie. Il est spécialiste du mélanome de la choroïde, tumeur pour laquelle l’Institut Curie est un centre de référence. Qu’est-ce que le mélanome de la choroïde? C’est une forme rare de cancer, mais néanmoins le plus fréquent des cancers de l’œil chez l’adulte, dont on dénombre en France 500 à 600 nouveaux cas par an. L’Institut Curie en reçoit 300 chaque année, nous possédons donc la plus grande expérience dans ce domaine. Ce cancer se manifeste par l’apparition brutale de troubles de la vue de l’œil atteint. Son traitement repose sur la chirurgie, la curiethérapie ou la protonthérapie. Où les métastases de cette tumeur se développent-elles ? À 93 % dans le foie (dans 83 % des cas, seul le foie est atteint, tandis que les autres 10 % présentent d’autres métastases : os, peau ou poumons). Les métastases peuvent survenir jusqu’à 15-20 ans après le traitement de la tumeur initiale! Nous surveillons donc nos patients tous les six mois, par échographie hépatique pour en détecter la survenue le plus précocement possible dans un but chirurgical, malheureusement possible dans moins de 20 % des cas seulement. Quels sont les axes de la recherche clinique? L’Institut Curie participe à un essai coordonné par l’EORTC (European Organisation for Research and Treatment of Cancer*) évaluant deux voies d’administration de la chimiothérapie (intra-artérielle ou intraveineuse). Par ailleurs, un essai de vaccination non pas préventive mais thérapeutique, réalisé chez une quarantaine de malades a montré une faisabilité, une bonne tolérance et une absence de toxicité de la technique. Un second doit analyser de façon précise la réponse immunitaire des patients. Propos recueillis par P. K. * Organisation européenne pour la recherche et le traitement du cancer. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 09 JIC61•8-14-XP1SR2 27/01/2005 10:20 Page 10 DOSSIER LE POINT SUR... MÉTASTASES HÉPATIQUES De la tumeur à la métastase La capacité d’une tumeur à métastaser apparaît après une période de développement variable selon son agressivité, son volume et son type. Tous les organes peuvent être le siège de métastases, mais chaque type de cancer provoque des métastases le plus souvent aux mêmes endroits. Ainsi, un des organes cibles des tumeurs du sein, du côlon et de la choroïde est le foie. La surveillance des patients porte donc également sur ce ou ces organes afin de détecter le plus précocement possible la survenue d’une métastase. h LA TUMEUR INITIALE Au départ, la tumeur est locale et à ce stade, chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie, associées ou non, permettent la plupart du temps de guérir le patient. Mais parfois la pathologie « échappe » aux traitements, d’autant plus souvent que le cancer n’est pas diagnostiqué et traité à temps. Toute une cascade d’événements complexes peut alors donner naissance à des métastases dès lors que des cellules tumorales passent dans le réseau sanguin ou le réseau lymphatique (métastase ganglionnaire). ■■■ métastases hépatiques est, autant que possible, local. Il repose sur la chirurgie, mais pour l’envisager, l’équipe médicale doit être certaine, d’une part, d’enlever la totalité de la ou des métastases, d’autre part qu’il n’en existe pas dans d’autres organes, ce que détermine le bilan d’extension. Le cancer du côlon est le premier pour lequel la chirurgie a apporté la preuve de son efficacité dans le traitement des métastases hépatiques. C’était il y a plus de dix ans. Grâce à elle, le taux de survie des patients opérés est actuellement de 40 à 45 % après cinq ans, alors qu’aucun patient n’atteignait ce terme avec la chimiothérapie seule. « En ce qui concerne le cancer du sein, la survie à cinq ans est de 58 % chez les patientes qui répondent à la chimiothérapie administrée autour de l’acte chirurgical », indique le Dr Rémy Salmon, chef du Service de chirurgie sénologique3 à l’Institut Curie. 1 2 3 4 h LE PASSAGE SANGUIN Médecins et chercheurs suivent plusieurs pistes pour mieux comprendre ces mécanismes. Il s’agit notamment d’identifier les gènes ou les réseaux de gènes en cause dans le processus métastatique. Par ailleurs, une équipe de l’Institut Curie est en train d’évaluer un automate capable de détecter la présence de cellules cancéreuses dans un échantillon de sang prélevé dans la veine porte du foie. Si cet espoir se confirme, il sera possible d’agir de façon précoce et peut-être de prévenir l’apparition des métastases. Pierre Kanter h POUR EN SAVOIR PLUS Décryptage. Le Journal de l’Institut Curie. Août 2004 10, LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE 5 1 Prolifération de la tumeur primaire et formation de vaisseaux sanguins pourvoyeurs de nutriments et d’oxygène (angiogénèse). 2 Invasion du tissu de soutien et arrivée dans le système sanguin. 3 Préparation au voyage : les cellules tumorales fragiles s’entourent de plaquettes qui les protègent lors de leur transport. 4 Arrêt dans un organe (par exemple, le foie), adhérence à la paroi vasculaire interne et sortie du vaisseau. 5 Adaptation au nouvel environnement, prolifération et angiogenèse : installation de la métastase. LA RECHERCHE AVANCE Certaines cures de chimiothérapie par voie veineuse ont été ou vont être remplacées par une prise orale, aussi efficace et parfois mieux tolérée, améliorant la qualité de vie des patients. Delphine Bailly/Pour la science 2003 h UNE RECHERCHE ACTIVE Exemple de dissémination d’une métastase via le système sanguin h Dans le cas des métastases hépatiques, la dissémination se fait par les vaisseaux sanguins. Les cellules échappées de la tumeur d’origine circulent dans l’organisme, mais la majorité meurt : moins de 0,1 % d’entre elles franchissent toutes les étapes indispensables à la naissance d’une métastase… L’une d’elles finit parfois par se fixer sur la paroi d’un petit vaisseau sanguin (capillaire) du foie et la traverse. La cellule peut alors se multiplier et donner naissance à une colonie de cellules, puis à une tumeur secondaire: la métastase. Il peut y en avoir plusieurs. La cartographie des métastases Un bilan très complet est donc pratiqué afin de dresser une cartographie précise des métastases et déterminer si le patient peut ou non bénéficier d’une intervention chirurgicale. Seulement 10 % des patients sont opérables d’emblée. Les autres reçoivent une chimiothérapie pour réduire la taille ou le nombre des métastases hépatiques pour qu’une intervention chirurgicale puisse être réalisée. Les métastases du mélanome de la choroïde posent des problèmes particuliers car elles sont de très petite taille (de l’ordre du millimètre) et souvent disséminées, ce qui peut rendre leur ablation impossible. Au cours de l’intervention, le chirurgien s’assure qu’il n’existe pas d’autres lésions qui n’auraient pas été repérées par le bilan initial. Puis, il enlève la ou les métastases, avec une marge de sécurité si possible d’un centimètre. Le foie est heureusement le seul organe du corps capable de se régénérer. Il est donc possible d’en enlever jusqu’à 70 % sans dommage. Le foie « repousse » alors en quelques mois ! « Nous utilisons de nouveaux outils qui facilitent nos interventions, précise le Dr Rémy Salmon. Il s’agit notamment du“dissecteur à eau” qui simplifie l’hémostase (arrêt du saignement), de l’“ultra scissor” ■ ■ ■ INTERVIEW ANNIE, 58 ans, traitée pour des métastases hépatiques d’un cancer du sein. « Cela va faire dix ans que sont apparues les premières métastases. Mais c’est en 1992, que tout a commencé lorsque j’ai remarqué une zone de “peau d’orange” sur un sein. J’ai consulté et appris que j’avais un cancer. À l’Institut Curie, après une chimiothérapie destinée à faire diminuer la taille de la tumeur et ainsi à éviter l’ablation totale du sein, j’ai subi une tumorectomie avec curage axillaire, suivie de huit semaines de radiothérapie. J’ai ensuite toujours été surveillée de façon très régulière. C’est comme cela qu’en avril 1995, une échographie hépatique a révélé cinq métastases dans le foie. Là, nouvelle chimiothérapie, à laquelle j’ai très bien répondu : au bout de deux mois, on ne voyait déjà pratiquement plus d’images suspectes à l’échographie ! En 1997, un contrôle a montré une nouvelle métastase hépatique qui, elle, a nécessité huit mois de chimiothérapie. Puis, j’ai été tranquille jusqu’en 2003, quand une échographie de contrôle a découvert une récidive de ce dernier nodule. La chimiothérapie orale n’ayant pas donné les résultats escomptés, j’ai alors reçu une autre chimiothérapie, plus puissante, que j’ai supportée avec difficultés. Et, fin novembre 2004, j’ai été opérée à l’Institut. Au cours de l’intervention, qui a duré six heures, il a été constaté qu’il existait quatre autres foyers métastatiques invisibles à l’échographie et au scanner. Le chirurgien les a alors enlevés. J’ai été hospitalisée une douzaine de jours. Je me suis vraiment sentie en sécurité à l’hôpital, bien entourée, réconfortée. Et j’entame maintenant ma sixième chimiothérapie. » Propos recueillis par P. K. 3. Chirurgie du sein. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 11 JIC61•8-14-XP1SR2 27/01/2005 10:20 Page 12 DOSSIER DOSSIER MÉTASTASES HÉPATIQUES LE SUIVI POUR LA VIE La prise en charge de la maladie cancéreuse ne s’arrête pas, comme d’autres pathologies, à la fin du traitement initial. Face au risque de récidive et de métastase, il faut en effet être suivi durant des années pour détecter et traiter le plus précocement possible toute évolution de la maladie qui pourrait être traitée. Les examens préconisés dépendent de la tumeur en cause. S’il s’agit d’un cancer du côlon par exemple, le suivi comporte notamment une échographie hépatique, éventuellement complétée par un scanner, tous les quatre mois pendant deux ans, puis tous les six mois pendant trois ans, et enfin tous les ans. Il faut y associer une radiographie du thorax tous les ans. Cette surveillance s’espace généralement au-delà de cinq ans. h 10 jours C’est la durée moyenne d’hospitalisation après une opération du foie. ■ ■ ■ qui coupe et réalise l’hémostase de la plaie, ou encore des radiofréquences. » Cette dernière technique consiste à introduire une électrode au contact de la métastase, qui, en chauffant, la détruit (lire encadré). Cette intervention nécessite une hospitalisation d’une dizaine de jours. Les suites opératoires sont rendues moins douloureuses grâce à des antalgiques forts comme la morphine. Réduire le risque de récidive La chimiothérapie représente la seconde arme. Elle est systématique, en plus de la chirurgie, quand il s’agit de métastases d’un cancer du sein. Des études ont en effet montré qu’elle réduisait le risque de récidive. « La question fait encore l’objet de débats en ce qui concerne les métastases du cancer colique. À l’heure actuelle, des études sont menées pour le déterminer. J’ai la conviction qu’elle est utile et qu’il faut la prescrire », estime le Dr Jean-Marc Extra, responsable de l’hôpital de jour de chimiothérapie à l’Institut Curie. La chimiothérapie est également utilisée pour faire diminuer la taille des lésions hépatiques et permettre éventuellement un geste chirurgical. Face aux métastases du cancer du côlon, la chimiothérapie repose sur des associations de 5-fluoro-uracile (5-FU) et d’autres molécules, tel un dérivé du platine. Elle ne nécessite qu’une hospitalisation de jour : deux cures tous les quinze jours pendant six à douze mois. Chez les patients inopérables, cette chimiothérapie augmente à la fois la qualité de vie et la survie. Il existe depuis peu une forme orale de 5-FU, extrêmement bien tolérée, qui va certainement remplacer la forme injec-table et améliorer ainsi la qualité de vie des patients. Depuis 2004, les cancérologues disposent aussi d’un nouveau médicament, le cétuximab, qui agit sur un facteur de croissance de la cellule tumorale. Des études ont montré que lorsqu’il est associé à une autre molécule usuelle de chimiothérapie, le CPT-11, il augmente encore de 10 % le taux de régression des métastases du cancer du côlon. GRÂCE À VOUS A. Lescure/Institut Curie L’apport des radiofréquences LE JOURNAL DE 12 , L’INSTITUT CURIE Cette technique très récente consiste à détruire les métastases par la chaleur. Elle se déroule au bloc opératoire, sous anesthésie générale, soit seule, soit en complément d’une chirurgie classique. Chirurgicalement, il est possible d’enlever le lobe droit du foie s’il présente plusieurs métastases, mais l’intervention ne pourra pas supprimer une métastase située au centre du lobe gauche. D’où l’intérêt des radiofréquences. Celles-ci détruiront sans dommage pour le malade les métastases du lobe gauche. Les radiofréquences se pratiquent, soit au décours de l’opération, soit indépendamment de celle-ci (toujours sous anesthésie générale), en introduisant l’électrode à travers la peau. Il s’agit donc d’un progrès majeur. À l’Institut Curie, l’appareillage a pu être acquis grâce aux fonds collectés lors de l’exposition-vente organisée en décembre 2002 par la ville de Charenton-le-Pont (94). h ESSENTIEL « Affamer » la tumeur Une autre voie de recherche est en plein développement : celles des médicaments anti-angioC’est le pourcentage genèses. Pour survivre, les cellules cancéreuses de cancers du côlon secrètent des substances qui favorisent la pris en charge création de nouveaux vaisseaux sanguins, c’est à l’Institut Curie qui présentent déjà l’angiogenèse. Ces vaisseaux sont destinés à leur une ou des métastases apporter les éléments nutritifs indispensables à hépatiques au moment leur survie. L’idée est donc d’agir à ce niveau du diagnostic*. pour bloquer ce mécanisme. Des essais cliniques Ce pourcentage réalisés avec l’une de ces nouvelles molécules, a tendance à baisser grâce au diagnostic de le bevacuzimab, montrent qu’elle augmente plus en plus précoce. de 10 % le taux de réponse à une forme orale de * Source : Service de 5-FU et allonge la survie des patients. Ce produit biostatistiques de l’Institut devrait être disponible courant 2005. Les quinze Curie. dernières années ont également été marquées par l’apparition de nouveaux médicaments plus efficaces contre les métastases hépatiques du cancer du sein. Ils permettent plus souvent l’intervention chirurgicale et, même si cela n’est pas le cas, ils doublent la survie. Celle-ci ne dépassait pas deux ans en 1990, elle est Les médicaments du futur en moyenne de quatre ans aujourd’hui. Ces progrès reposent sur les taxanes et pourraient empêcher la sur un anticorps monoclonal. Ce dervascularisation des tumeurs. nier bloque une protéine, présente une fois sur cinq à la surface des cellules cancéreuses, permettant à la tumeur de croître. Il ne peut toutefois être utilisé que chez 20 % des patientes, celles dont les cellules tumorales « possèdent » cette protéine. 20% Stimuler l’immunité Dernière arme à ce jour : la vaccinothérapie. L’idée est de stimuler le système immunitaire du patient et particulièrement ses lymphocytes T pour qu’ils reconnaissent et détruisent les cellules malignes. « C’est une voie de recherche très intéressante que nous poursuivons dans le mélanome de la choroïde, commente le Dr Sophie Piperno-Neuman, oncologue à l’Institut Curie. Les cellules de ce cancer – et donc de ses métastases – « expriment » différents antigènes, cibles du système immunitaire, dont l’un (baptisé NA 17) de façon quasi systématique. L’idée est d’utiliser cet antigène comme molécule de reconnaissance, de l’injecter dans l’organisme grâce à un vecteur (ce peut être un virus sans danger, certaines cellules du patient…), afin que le système de défense apprenne à ■ ■ ■ GRÂCE À VOUS Noak / Le bar Floréal / Institut Curie MÉTASTASES HÉPATIQUES Réserver du temps pour accélérer la recherche Depuis 2003, la création du « Temps médical protégé » permet à des médecins de l’Institut Curie de concilier pratique clinique et recherche. « J’ai été un des premiers à bénéficier de cette possibilité, témoigne le Dr Philippe Giraud, radiothérapeute. Je passe chaque semaine trois jours auprès de mes patients et j’en consacre deux à l’enseignement et à la recherche clinique. Grâce à cette organisation, j’ai pu notamment mettre en place la radiothérapie asservie à la respiration appliquée au cancer du poumon à l’Institut Curie. » Cet aménagement lui a aussi permis d’être habilité à monter une équipe de recherche transversale en imagerie et radiothérapie avec d’autres collègues, mais également des radiologues, des physiciens… tout en encadrant des étudiants en DEA ou en thèse. Ce sont les fonds récoltés auprès des donateurs qui permettent cette réorganisation au sein de l’hôpital. « La recherche est une priorité. Jusqu’à présent, l’Institut Curie mène plus d’une centaine de protocoles d’essais cliniques pour un total de 500 patients chaque année. Objectif 2007 : doubler le nombre de patients bénéficiant de la recherche clinique. » Géraldine Lebourgeois LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 13 JIC61•8-14-XP1SR2 27/01/2005 10:20 Page 14 DOSSIER ENTRE NOUS MÉTASTASES HÉPATIQUES INITIATIVES ,HISTOIRE D’UN LEGS GRÂCE À VOUS Micrométastases La recherche fondamentale au profit de la médecine L’enjeu pronostique est évident : identifier parmi les personnes atteintes de cancer celles qui ont un risque élevé de récidive. L’enjeu thérapeutique l’est tout autant, puisqu’il s’agit de détecter les « embryons » de métastases, ou micrométastases, avant même leur maturité. En 1997, l’Institut Curie a décidé d’agir en finançant un Programme incitatif et coopératif (Pic) sur ce thème. La générosité des donateurs a soutenu, pendant cinq ans, un faisceau d’études à hauteur d’environ 150 000 euros par an. Le Pic «Détection, biologie et traitement des micrométastases» a suscité une étroite collaboration entre cliniciens et biologistes autour de l’étude biologique de ces cellules tumorales disséminées ainsi que sur les effets de médicaments anticancéreux. Selon les tumeurs concernées, diverses analyses extrêmement sensibles ont été mises au point pour détecter et caractériser les micrométastases dans la circulation sanguine et la moelle osseuse. h Grâce à la « signature » que laissent immanquablement les sarcomes (un type de cancer), le défi de la détection a été relevé et la valeur pronostique confirmée pour les tumeurs d’Ewing, des sarcomes particuliers touchant LE JOURNAL DE 14 , L’INSTITUT CURIE les plus jeunes. Conçues à l’Institut Curie, de telles analyses sont désormais proposées à la plupart des malades atteints de tumeurs d’Ewing en France. h Pour les cancers du sein, la détection des micrométastases reste délicate. Car sans signature spécifique, il a fallu recourir à leur recherche « tous azimuts ». Des études ont néanmoins confirmé que leur présence dans la moelle osseuse est bien un facteur de risque de récidive. Une étude associant plusieurs centres européens, dont l’Institut Curie, révèle que la valeur pronostic est confirmée sur près de 5 000 patientes. De nouveaux essais reposant sur une technologie plus performante faciliteront la mise en place d’une détection en routine dans la moelle osseuse. Quant à la recherche de micrométastases dans le sang, un nouvel automate est actuellement évalué à l’Institut. Nathalie Boissière h POUR EN SAVOIR PLUS sur les programmes incitatifs et coopératifs financés par votre générosité : www.curie.fr/recherche/activites En hommage à sa mère et à sa femme, Georges Garet a légué la majeure partie de sa fortune à l’Institut Curie. Ce legs a permis la création du Laboratoire Garet, spécialisé notamment dans le transfert, cette «transformation» des découvertes en applications médicales. VENEZ NOUS RENCONTRER Afin de vous informer sur les objectifs de l’Institut Curie en matière de recherche et de soins, l’équipe du Service des legs de l’Institut Curie sera au Salon des Seniors-Notre Temps, du 1er au 3 avril 2005, au Parc des Expositions, porte de Versailles à Paris. euf et retraité, Georges Garet, résidant à Paris, avait décidé de faire de l’Institut Curie son légataire universel. Dans son testament, il ne dévoile pas les raisons de ce choix, mais écrit : « Je veux que l’on sache que je fais ce legs à l’Institut Curie en considération de la très grande reconnaissance que j’éprouve à l’égard de ma femme et de ma mère. Si le bénéfice de ce legs peut recevoir une affectation particulière et déterminée, j’aimerais qu’il soit conservé trace de cette intention à l’occasion de la réalisation qu’il permettrait. » Georges Garet décède le 24 janvier 1987. Sa fortune dont hérite l’Institut Curie est alors estimée à plus de 22 millions de francs (plus de 3,4 millions d’euros). Conformément à la volonté du testateur, le conseil d’administration de l’Institut Curie l’affecte au financement de la construction et de l’équipement de 700 m2 de laboratoire. Consacrés en grande partie aux activités de transfert des découvertes effectuées par la recherche fondamentale vers l’application médicale, ces espaces sont inaugurés en 1993, soit six ans seu- V h Pierre Kanter « JE VEUX QUE L’ON SACHE… » Ch. Grnuer / Institut Curie reconnaître et à détruire les cellules qui expriment cet antigène. «Nous avons terminé en décembre 2003 un premier essai clinique qui a porté sur 44 patients durant quatre ans. Il a montré l’absence de toxicité et la faisabilité de la technique. Au vu des résultats, nous lançons actuellement un second essai de vaccination antitumorale. Ce traitement, s’il s’avère efficace, pourrait être proposé d’emblée, dans quelques années, aux patients dont la tumeur est particulièrement agressive, juste après un traitement local comme la chirurgie ophtalmique ou la protonthérapie. C’est là, me semble-t-il, que cette approche aurait sa place. » Les progrès, lentement mais sûrement, viennent changer l’horizon des personnes atteintes de cancer métastatique. Il y a une dizaine d’années, les chances étaient faibles. Aujourd’hui, des stratégies d’attaque bénéficient à nombre de patients, tandis que d’autres font l’objet de nombreuses recherches cliniques. À suivre… En 1994, quelques mois après l’installation du Laboratoire Garet, l’équipe de biologistes et d’ingénieurs dirigée par Henri Magdelenat (au centre) est déjà sur de nombreux programmes d’innovation. lement après l’ouverture de la succession. Le Laboratoire Garet est alors le premier en France à être dédié à la cancérologie et à l’innovation diagnostique et thérapeutique grâce à la mobilisation des chercheurs et des cliniciens et la mutualisation de leurs objectifs. De nombreuses pratiques synonymes de progrès y voient le jour, parmi lesquelles des méthodes de diagnostic moléculaire de cancers de l’enfant comme les tumeurs d’Ewing. La pharmacologie oncologique s’y implante h A. Lescure/Institut Curie ■■■ à la fin des années 1990, participant au développement de nouveaux médicaments et à l’expérimentation de thérapies. Le Laboratoire Garet s’agrandit à la même période et accueille une équipe d’immunologie et d’immunothérapie. Il est le berceau de l’étude des virus liés au cancer avec l’établissement du rôle diagnostic et pronostic des papillomavirus, notamment dans les cancers du col utérin. De nouveaux protocoles cliniques d’immunothérapie devraient débuter en 2005. L’activité de transfert, au cœur des ambitions de l’Institut, bénéficie désormais d’une large infrastructure1 pour les années à venir. Abigaelle Lacombe-Didier 1. Lire Le Journal de l’Institut Curie, août 2004. CONTACT Pour obtenir des informations sur les legs, merci d’utiliser le bulletin et l’enveloppe affranchie joints ou, à défaut, d’écrire au Service des legs de l’Institut Curie, 26 rue d’Ulm, 75248 Paris Cedex 05 (Tél. : 01 44 32 40 65/40 58 www.curie.fr/legs.cfm) LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 15 JIC61•16-19-XP1SR1 27/01/2005 10:22 Page 16 ENTRE NOUS ENTRE NOUS INITIATIVES INITIATIVES ,UN JARDIN POUR LA VIE Construit sur le modèle centenaire hérité de Marie Curie et toujours d’avant-garde, le continuum Recherche-Soins innovants, l’Institut Curie dispose des talents, des structures et des ambitions nécessaires pour «prendre le cancer de vitesse». Cette approche dans un lieu unique encourage l’innovation, favorise les échanges et le travail collectif entre chercheurs, médecins et soignants, pour accélérer la mise à disposition de traitements innovants aux patients. Notre volonté de progresser ne pourrait se concrétiser sans le soutien et la générosité de nos donateurs. AUX COULEURS DE L’ESPOIR Noak / le bar Floréal /Institut Curie a jonquille Institut Curie, créée par le pépiniériste Truffaut, fête son premier anniversaire. À cette occasion, le « Jardin pour la Vie » refleurit à Paris les 18, 19 et 20 mars. Cette année, la rue Soufflot et le Panthéon seront parés de plus de 40 000 jonquilles généreusement offertes par Truffaut – soit 10 000 de plus que l’année passée. Un chemin de gazon mènera les visiteurs du jardin du Luxembourg au Panthéon pour L LA PAROLE DES LE JOURNAL DE 16 , L’INSTITUT CURIE h Samedi 19 et dimanche 20 mars de 10 h à 18 h. Musée Curie (entrée libre). Balade commentée en bus (2 €). Renseignements : 01 42 34 63 15 – www.curie.fr h Expo « Marie Curie, femme de science ». Mairie du 5e arrondissement jusqu’au 24 mars. FEMMES LIBÉRÉE réateur de lingerie, le groupe Simone Pérèle s’engage aux côtés de l’Institut Curie et « libère la parole des femmes ». Depuis les années 1950, Madame Simone Pérèle puis ses successeurs contribuent à la libération des femmes et à l’affirmation de leur personnalité. Leur engagement aux côtés de l’Institut Curie va permettre de réaliser une étude inédite sur l’intimité des femmes touchées par un cancer du sein. Pour la première fois en France, l’impact du cancer du sein et de ses traitements sur la vie sexuelle sera en effet au cœur d’une véritable enquête. Elle permettra de mieux comprendre ce que les patientes vivent dès lors que la maladie a modifié, leur image corporelle, parfois, et leur relation de couple, souvent. Simone Pérèle s’est engagé sur un parte- C l’association et tout particulièrement ceux des communes de Janzé, Rivarennes, Saint-Léonard, Chirac et Outarville. « J’ai vu des bénévoles relever le défi, des femmes et des hommes courir et marcher pour la vie », a raconté Paul Rolland, organisateur de la manifestation janzéenne (Ille-et-Vilaine). Et de poursuivre : « J’ai vu des milliers de marcheurs et des centaines de ballons s’envoler, symboles de leur solidarité. J’ai vu une troupe de théâtre, des dizaines d’associations, d’entreprises et de Janzé / CPLV CPC 145 000 EUROS AU PROFIT DE CURIE epuis maintenant quinze ans, l’association Courir pour la Vie, Courir pour Curie organise chaque année dans toute la France une rando-course de solidarité contre le cancer. Le bilan 2004 est très satisfaisant : 145 000 euros collectés par 33 communes et près de 10 000 participants, qui, ensemble, ont parcouru 235 000 kilomètres. Au cours de la soirée de remise des Trophées, le 16 février dernier, l’Institut Curie a été heureux de féliciter les bénévoles de exceptionnels à bord d’un vieil autobus de collection. Durant ce week-end caritatif, des jonquilles sont également en vente au profit de l’Institut dans toutes les jardineries Truffaut, donnant à cet événement une dimension nationale. ,PATIENTES ET CANCERS DU SEIN 1. lire « Quand la recherche devient traitement », Journal de l’Institut Curie, mars 2004. 2. Lire « Du laboratoire à l’hôpital », Journal de l’Institut Curie, août 2004. ,COURIR POUR LA VIE D y découvrir le « Jardin » version 2005 et déchiffrer une citation de Marie Curie. Un spectacle inaugurera ce week-end de générosité et de solidarité où plus de 70000 personnes sont attendues pour soutenir les missions de l’Institut Curie en matière de lutte contre le cancer. Symbolisant l’espoir de découvertes et de guérison (lire ci-contre), les jonquilles seront vendues au profit des programmes engagés par l’Institut. Les visiteurs pourront découvrir le musée Curie, haut lieu de mémoire de la famille aux cinq Prix Nobel, le Panthéon qui abrite depuis dix ans les cendres de Pierre et de Marie Curie ou encore suivre dans Paris les traces de ces scientifiques collectivités apporter leur soutien… » Les fonds collectés permettront de renforcer l’équipement hospitalier nécessaire aux curiethérapies, notamment à celle des cancers du sein, des tumeurs gynécologiques, ORL ou dermatologiques. S. Laure / Institut Curie in 2004, l’Institut Curie a lancé, pour la première fois, une campagne nationale dans les médias avec pour objectif de mobiliser 300 000 donateurs particuliers et des entreprises mécènes appelées « actionnaires à but non lucratif » en faveur de ses missions et de ses recherche et la médecine – nécessitant 23 millions d’euros d’investissement (2005-2007), puis 8 millions d’euros de fonctionnement annuel. h Le développement de la recherche clinique et le renforcement de l’innovation1 en multipliant par deux le nombre de patients participant à la recherche clinique: 3 millions d’euros chaque année. h La montée en puissance du Département de transfert2 : une passerelle indispensable pour mettre les découvertes à la disposition des patients : un budget en augmentation après les 5,1 millions d’euros de fonctionnement et d’investissement déjà réalisés en 2004. La jonquille est un symbole fort dans la lutte contre le cancer. Bravant les rigueurs hivernales, cette fleur est en effet parmi les premières à s’épanouir. Synonyme de courage, une telle victoire redonne espoir tant aux malades atteints de cancer qu’aux médecins et chercheurs de l’Institut Curie. h © A. Lescure / Institut Curie « PRENONS LE CANCER DE VITESSE » F Fidèle à sa devise « Plus belle sera la terre » et à l’Institut Curie, Truffaut participe, pour la deuxième fois, au Jardin pour la Vie. Cet événement caritatif est toujours soutenu par le Centre des monuments historiques (Monum), la Mairie de Paris et celle du 5e arrondissement. Cette année, de nouveaux partenaires ont rallié cette cause, parmi lesquels l’assureur santé SwissLife. h ,CAMPAGNE NATIONALE projets. Pour assurer la croissance et le développement de ses activités les plus innovantes et pour traduire les connaissances scientifiques en applications médicales, l’Institut Curie a besoin de compléter les financements publics par ses propres ressources. Il s’est donné trois ans pour collecter 10 millions d’euros supplémentaires annuels. Avec un investissement mesuré, cette campagne a été annoncée sur trois stations de radio et dans une trentaine de journaux, dont certains ont offert ces parutions publicitaires. Mi-janvier, déjà près de 20 000 nouveaux donateurs nous avaient rejoints. Les projets phares que l’Institut s’est engagé à financer sur les trois années à venir sont : h La création d’un pôle de biologie du développement – nouveau pont entre la DES SOLIDARITÉS INSTITUTIONNELLES L’hôpital de l’Institut Curie projette d’ouvrir une consultation de sexologie grâce à l’engagement de Simone Pérèle. nariat financier avec l’Institut Curie pour une durée de trois ans. Car, au-delà de l’étude, dont les conclusions sont attendues d’ici à juin 2005, le groupe accompagnera également la mise en place de consultations de sexologie. Les patientes bénéficieront alors d’un interlocuteur spécialisé pour parler de leur vie intime bouleversée par la maladie. Cette prise en charge devrait leur permettre d’obtenir une réponse à nombre de leurs questions et d’améliorer ainsi leur qualité de vie. Ces consultations dépendront, tout comme l’unité de psychooncologie, du Département de soins de support dirigé par le Dr Laure Copel. Le besoin est bien réel, car plus de la moitié des nouveaux patients de l’Institut Curie sont des femmes touchées par un cancer du sein, soit près de 1800 femmes chaque année. LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 17 JIC61•16-19-XP1SR1 27/01/2005 10:22 Page 18 ENTRE NOUS ENTRE NOUS EN MÉMOIRE DE… D Olivier Delattre, directeur de l’Unité de recherche Inserm « Pathologie moléculaires des cancers » ’association franc-comtoise Réagir souhaitait soutenir la recherche sur certains cancers des enfants, c’est pourquoi leur don a été spécifiquement affecté à la recherche sur les tumeurs pédiatriques sur lesquelles travaille mon équipe “Génétique et biologie des tumeurs pédiatriques” au sein de l’Unité, explique le Dr Olivier Delattre. C’est un soutien très important, par la somme elle-même et par le lien qu’il signifie entre l’association et l’Institut Curie autour de ces pathologies de l’enfant. Cet encouragement est stimulant S. Laure / Institut Curie L car, derrière ce don, il y a la confiance et l’espoir de nombreuses personnes concernées directement ou indirectement par ces maladies rares. Les 22 867 euros reçus devraient nous permettre d’acheter du matériel pour améliorer nos systèmes d’imagerie et d’analyse cellulaire, indispensables pour étudier les cellules tumorales. » h Association Réagir - BP7 - 25430 Sancey-Le-Grand ,TÉMOIGNAGE Organisatrice d’« UN GOÛTER POUR LA VIE », Anne Da Silva est mère d’une petite fille suivie à l’Institut Curie « À 4 ans, ma fille Andréa a eu un cancer. Aujourd’hui, elle en a 8, et est « en rémission », comme disent les médecins, car il faut encore attendre quatre ans pour que les risques de rechute deviennent minimes et que h « l’on puisse parler de guérison. Il est difficile de ne pas penser à cette maladie qui nous a fait souffrir, et de vivre dans la peur qu’elle ressurgisse. Pour ma fille et pour tous les enfants touchés par le cancer, je vais me battre. Ils ne doivent pas se sentir seuls. Nous devons leur tendre la main et leur faire espérer un avenir meilleur. J’ai eu le véritable déclic après le décès de mon oncle des suites d’un cancer. Aujourd’hui, je ne veux plus rester passive. Avec l’école d’Andréa, j’ai donc décidé d’organiser une journée d’information, de solidarité et de générosité au profit du Département de pédiatrie de l’Institut Curie et des recherches sur les cancers pédiatriques. » Propos recueillis par C. B. et A. L.-D. h Un Goûter pour la Vie. Destinée aux enfants de l’école d’Andréa et à leurs familles, cette opération sera organisée avec l’école courant avril à Montmorency (95) . COMMENT NOUS AIDER Tout donateur particulier bénéficie d’une réduction d’impôts sur le revenu de 66 % du montant du don, dans la limite de 20 % du revenu imposable annuel. Pour soutenir l’Institut, merci LE JOURNAL DE 18 , L’INSTITUT CURIE d’utiliser le bulletin joint ou, à défaut, d’envoyer votre chèque de soutien à : Institut Curie - Gestion des dons 26 rue d’Ulm - 75248 Paris Cedex 05. Renseignements : 01 44 32 40 80 MUSIQUE, MAESTRO Le 2 décembre 2004, l’association Phares en partenariat avec l’Institut Curie donnait un concert au profit de la recherche. Le produit de la vente des places ainsi que quelques dons, soit plus de 5 400 euros, ont été remis à l’Institut Curie. 24 000 EUROS POUR LA RECHERCHE Le maire de Charentonle-Pont, Jean-Marie Bretillon, et le maireadjoint, Christiane Mayer, ont remis à l’Institut Curie 24 074 euros le 7 janvier dernier. Fruit d’une vente annuelle d’objets réalisés par les retraités, ce don participera à l’achat d’un automate pour assurer avec performance les quelque 50 000 analyses sanguines annuelles. GÉNÉROSITÉ : VOTRE FONDATION Le statut de fondation offre à l’Institut Curie une réactivité des financements et une diversité des ressources privées. En 2004, grâce aux dons et aux legs, elles devraient s’élever à plus de 17 millions d’euros, participant au budget annuel de 155 millions d’euros. RÉTROSPECTIVE , CLIN D’ŒIL LE JARDIN DE MARIE CURIE Les fenêtres du laboratoire de Marie Curie s’ouvrent sur un petit jardin qu’elle a composé elle-même, en amoureuse de la nature. On l’imagine interrompant une expérience pour observer la floraison des premières jonquilles. ors de la construction de son laboratoire à l’Institut du Radium en 1911, Marie Curie suit de près les travaux, « dessinant des plans, discutant avec l’architecte ! […] Quant au jardin – le plus cher souci de notre paysanne –, elle le compose avec amour. Sourde aux bonnes raisons de ceux qui veulent “économiser de la place”, elle défend avec âpreté chaque mètre du terrain qui sépare les bâtiments. Elle choisit un à un en connaisseur, les jeunes arbres, et les fait mettre en terre sous ses yeux, bien avant que les fondations ne soient jetées. [...] Elle plante elle-même les rosiers grimpants, maniant la bêche, tassant la terre avec ses mains au pied des murs inachevés. Chaque jour, elle les arrose. »1 Cette sensibilité pour la nature, Marie Curie l’a partagée avec Pierre dès leur rencontre. Ils aimaient s’éloigner de la ville et de leur travail pour de longues « promenades à pied ou à bicyclette, soit dans la campagne des environs de Paris, soit au bord de la mer ou en montagne […]. Ces journées de grand air et de belles visions nous laissaient des impressions profondes que nous aimions évoquer par la suite », écrit-elle2. « La forêt de Compiègne nous a L ACJC ,TÉMOIGNAGE r Gilles aurait eu 50 ans le 19 novembre 2004. Atteint d’un cancer, il s’est éteint quelques mois auparavant. Sa femme et le restaurant Nomad, dont il était le gérant, lui ont rendu hommage au cours d’un dîner au profit de la recherche sur le cancer. Ce soir-là, 90 invités se sont mobilisés offrant la somme de 4 000 euros à l’Institut. h INITIATIVES Marie Curie appréciait la nature et était très attachée aux jardins. Elle inaugure ici l’Institut du radium de Varsovie (1932). charmés au printemps, par sa tendre verdure et ses tapis, à perte de vue, de pervenches et d’anémones; à la lisière de la forêt de Fontainebleau, les bords du Loing, chargés de renoncules d’eau, étaient pour Pierre Curie un objet de ravissement. Et nous aimions la mélancolie des côtes de la Bretagne et l’étendue des landes de bruyères et d’ajoncs… » À la mort accidentelle en avril 1906 de son mari, compagnon de vie comme du AU MUSÉE CURIE h Chaque 2 e mercredi du mois à 15 h, le musée Curie propose une conférence ou une visite. • 9 mars : Marie Curie sous le regard de la fille de son chauffeur. • 13 avril : Le Jardin de Marie Curie (cf. l’article ci-contre) • 11 mai : La saga des Nobel : la tribu Curie (documentaire de C. Glowacki, 1997, durée 27 min) suivie d’une visite commentée du bureau et du laboratoire de Marie Curie. h Expo-photo du 18 mars à mi-juin sur les grilles, à l’angle des rues d’Ulm et P. et M. Curie, Paris 5e. Renseignements : 01 42 34 67 49 travail, Marie Curie tient pendant près d’un an un journal intime dans lequel elle exprime toute sa souffrance : « 7 mai 1906. Mon Pierre (…). Depuis deux jours, j’ai vu que les arbres ont des feuilles et que le jardin est beau. J’ai pensé (…) que tu m’aurais appelée pour me montrer les pervenches et les narcisses en fleurs. 14 mai 1906. Mon petit Pierre, je voudrais te dire que les faux ébéniers sont en fleurs, les glycines, les aubépines, les iris commencent, tu aurais aimé voir tout cela… » À travers ses lettres fictives adressées à « son » Pierre, on entrevoit à quel point le contact des fleurs et des plantes était toujours pour elle une source de réconfort. Marité Amrani et Nathalie Huchette, musée Curie 1. Madame Curie. Eve Curie. Éd. Poche (1981). 2. Pierre Curie. Marie Curie. Coll. Opus, Éd. Odile Jacob (1996). LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE , 19