Quand le cancer s`étend au foie

Transcription

Quand le cancer s`étend au foie
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LE JOURNAL
DE
L’INSTITUT CURIE
COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER
18-19-20 MARS
Au Panthéon,
Un Jardin pour la Vie
Une Jonquille pour Curie
DOSSIER
Métastases hépatiques
Quand le cancer
s’étend au foie
# 61 - MARS 2005 - 1,25 € - ISSN 1145-9131
JIC61•2-3-XP1SR1
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ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
ÉDITORIAL
Institut Curie
Amélie Mauresmo,
p. 3
Quand un(e) physicien(ne)
rencontre un(e) biologiste…
Un taxane en traitement
initial du cancer du sein
marraine de cœur de l’Institut Curie
La championne
de tennis soutient
l’Institut Curie.
p. 6
Actualités générales
Prothèses esthétiques
Jacques Chirac demande
un meilleur remboursement
h DÉCRYPTAGE
p. 7
Les cellules parlent aux cellules !
h DOSSIER
p. 8
MÉTASTASES HÉPATIQUES
A. Lescure/Institut Curie
QUAND
LE CANCER
S’ÉTEND
AU FOIE
Témoignage
p. 11
Annie soignée à l’Institut Curie
raconte
Grâce à vous
K. Huck / Institut Curie
Communication cellulaire :
«Mon engagement aux côtés
de l’Institut Curie, bien que récent,
est très fort. Ce que je vis au
quotidien, en tant que sportive
de haut niveau, peut en effet
se rapprocher de ce que vivent
les malades atteints d’un cancer :
il faut toujours aller de l’avant.
Parfois, on peut être moins motivé;
à d’autres moments, on reprend
confiance en soi. Même si l’épreuve
qu’ils subissent est sans commune mesure avec ce que je traverse, j’espère
pouvoir leur donner du courage et un peu de bonheur.»
« Permettez-moi, au nom de l’Institut Curie, de vous convier
les 18, 19 et 20 mars à une formidable action de générosité et
de solidarité contre le cancer en partenariat avec les jardineries
Truffaut et le Monum (Centre des monuments historiques) : Un Jardin
pour la Vie, une Jonquille pour Curie (lire p. 17). Pour la deuxième fois,
venez découvrir le Panthéon (Paris 5e) habillé d’un nouveau décor fleuri
aux couleurs de l’espérance. »
Amélie Mauresmo
p. 12
L’apport des radiofréquences
h ENTRE NOUS
Initiatives
Un Jardin pour la Vie
Aux couleurs de l’espoir
Rétrospective
Le jardin de Marie Curie
p. 17
Depuis 2003, la championne de tennis Amélie Mauresmo, numéro 1 mondial*
et médaillée olympique, soutient l’Institut Curie. Sans compter sa notoriété
qui permet de sensibiliser le plus grand nombre au fléau du cancer,
le rapprochement de l’Institut Curie et d’Amélie Mauresmo est d’autant plus
légitime que les valeurs véhiculées par le sport sont proches de celles de
la recherche et de la santé : l’effort et l’esprit d’équipe face à un adversaire.
* Classement au moment où nous écrivons ces lignes.
p. 19
Quand un(e)
physicien (ne)
rencontre un(e)
biologiste…
Le travail commun de physiciens
et de biologistes, une originalité
de l’Institut Curie, est en pleine
maturité avec pour conséquence
l’augmentation du nombre de
découvertes réalisées et publiées
dans des revues scientifiques
prestigieuses. Preuve que
le dialogue entre chercheurs
d’horizons différents engendre
une dynamique favorable
à la créativité scientifique.
i communiquer est essentiel à
l’homme, c’est également vrai pour
la cellule, son constituant de base.
Les échanges entre les cellules, mais
aussi à l’intérieur de celles-ci, entre
les différents compartiments cellulaires
qui les composent, sont permanents
et indispensables pour maintenir
les grandes fonctions biologiques.
Pour communiquer, la cellule utilise
des molécules sur lesquelles sont
«codées» les informations. Celles-ci
sont transportées grâce à un véritable
réseau de tubes biologiques.
S
Des tubes pour véhicules
LE JOURNAL DE L’INSTITUT CURIE COMPRENDRE POUR AGIR CONTRE LE CANCER EST ÉDITÉ PAR L’INSTITUT CURIE - 26, RUE D’ULM, 75248 PARIS CEDEX 05 - FAX: 01 43 25 17 56 [email protected] - WWW.CURIE.FR - DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : PR CLAUDE HURIET - RÉDACTRICE EN CHEF : NATHALIE BOISSIÈRE (01 44 32 40 60) RÉDACTION: CHLOÉ BESSON, CÉLINE GIUSTRANTI, PIERRE KANTER, ABIGAELLE LACOMBE-DIDIER, GÉRALDINE LEBOURGEOIS, SARAH MÉLHÉNAS - ICONOGRAPHIE: CÉCILE
CHARRÉ (01 44 32 40 51) - DONS ET ABONNEMENTS: YOVAN VUJOSEVIC (01 44 32 40 80) - ONT PARTICIPÉ À CE NUMÉRO: MARITÉ AMRANI, PR PIERRE BEY, GINETTE BUSSON, DR LAURE
COPEL, DR LAURENCE DESJARDINS, DR THIERRY DORVAL, DR JEAN-MARC EXTRA, NATHALIE HUCHETTE, ALEXANDRE LESCURE, PR DANIEL LOUVARD, HENRI MAGDELENAT,
DR PASCALE MARIANI, DR SOPHIE PIPERNO-NEUMANN, PR PIERRE POUILLART DE L’INSTITUT CURIE – LE SOMMAIRE, LES TITRES, CHAPÔS, INTERTITRES, ILLUSTRATIONS ET
LÉGENDES SONT DE LA RESPONSABILITÉ DE LA RÉDACTION EN CHEF ET N’ENGAGENT PAS LES AUTEURS - PHOTO DE COUVERTURE : CELLULE EN DIVISION (BSIP) ABONNEMENT POUR 4 NUMÉROS/AN: 5 € - CRÉATION ET RÉALISATION: CITIZEN PRESS (01 53 00 10 00) - FABRICATION: TC GRAPHITE (PARIS) - IMPRESSION: LA GALIOTE PRENANT
70/82 RUE AUBER 94400 VITRY/SEINE - NUMÉRO DE COMMISSION PARITAIRE : 0907H82469 - DÉPÔT LÉGAL DU N° 61 : MARS 2005 - CE NUMÉRO A ÉTÉ IMPRIMÉ À 170 000 EXEMPLAIRES ET CONTIENT UN PROGRAMME « UN JARDIN POUR LA VIE » ET UNE ENQUÊTE DE LECTORAT.
02,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
C. Leduc-P. Bassereau/Institut Curie
h ACTUALITÉS
,RECHERCHE
h
SOMMAIRE
En partenariat avec les biologistes
de l’équipe de Bruno Goud1 à l’Institut
Curie, l’équipe de physiciens de Patricia
Bassereau2 a développé un système
original qui imite in vitro ce trafic
intracellulaire. Avec la collaboration
du groupe de physiciens théoriciens de
Jacques Prost et Jean-François Joanny2,
Réseau de tubes
membranaires observé
en microscopie confocale.
ils montrent comment des moteurs
moléculaires, les kinésines, «tractent»
des tubes vers leur destination3 : plusieurs
moteurs, liés à la membrane et sans cesse
renouvelés, s’associent dynamiquement
et génèrent une force suffisante pour tirer
ces tubes. La vitesse de l’ensemble est
dictée par les moteurs de tête. Au vu de
leurs résultats, il semblerait que la cellule
puisse réguler ces échanges en jouant
sur la quantité de kinésines. Ce modèle
n’a pas fini d’enrichir les connaissances
sur le trafic cellulaire.
Des « colles » pour maintien
Par ailleurs, en collaboration avec l’équipe
de physiciens d’Evan Evans (Vancouver,
Canada), Hélène Feracci4, biologiste à
l’Institut Curie, a fait un grand pas dans la
compréhension de l’adhésion entre cellules5.
Certaines cellules doivent en effet rester
soudées pour le bon fonctionnement de
l’organisme. Cette adhésion indispensable
est assurée par des «colles cellulaires»,
les cadhérines. Ces protéines à la surface
des cellules assurent le contact entre
celles-ci en interagissant entre elles.
Elles ont donc un rôle essentiel dans la
formation des tissus lors du développement
embryonnaire, puis pour leur cohésion
à l’âge adulte. Leur perturbation peut
avoir de fâcheuses conséquences. Ainsi,
lorsque les cellules cancéreuses perdent
leur capacité d’adhérence aux cellules
voisines, elles peuvent migrer et donner
naissance à des métastases.
Pour comprendre comment fonctionnent
ces «colles», les physiciens canadiens et
les biologistes de l’Institut Curie ont utilisé
un modèle expérimental : deux billes de
verre recouvertes de cadhérines mises
en contact et un «ressort» constitué
d’un globule rouge afin de mesurer la
force nécessaire pour rompre ce contact.
L’analyse de la déformation de ce ressort
informe sur les propriétés adhésives
de ces «colles». Les chercheurs ont
ainsi révélé que les cadhérines, à
l’échelle d’une molécule unique, ont
des potentialités d’adhésion importantes.
Ce sont des molécules capables de
contacts à la fois dynamiques – ce qui
leur permet de s’adapter rapidement
à leur environnement – et très stables –
ce qui favorise les interactions solides.
Cette approche multidisciplinaire donne un
nouvel éclairage sur l’adhérence cellulaire.
Instaurée à l’Institut Curie, l’interface
entre physique et biologie offre à la
communauté scientifique internationale
une autre vision du monde cellulaire
extrêmement prometteuse pour
comprendre la complexité de la cellule.
Céline Giustranti
1. et 4. UMR 144, CNRS-Institut Curie.
2. UMR 168, CNRS-Institut Curie.
3. Proceedings of the National Academy
of Sciences. États-Unis, 7 décembre 2004.
5. Proceedings of the National Academy
of Sciences. États-Unis, 16 novembre 2004.
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L’INSTITUT CURIE
,03
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ACTUALITÉS
ACTUALITÉS
INSTITUT CURIE
INSTITUT CURIE
,CANCER DU SEIN
UN FREIN À LA
PROLIFÉRATION
L’équipe de François Radvanyi (UMR
144, CNRS-Institut Curie) a élucidé
le mécanisme d’action du gène
suppresseur de tumeurs, FGFR2,
dans les cancers de la vessie.
Ce gène, dont l’expression
est fortement diminuée dans
30 % des tumeurs de la vessie, est
associé à un mauvais pronostic. Sa
réintroduction expérimentale dans
des cellules tumorales de la vessie
permet de bloquer leur prolifération.
Aujourd’hui, les chercheurs
montrent que, dans les cancers de
la vessie, le gène FGFR2 empêche
l’expression d’un des messagers
cellulaires induisant la prolifération,
IGF-II. Ils ont également déterminé
la région génétique responsable
de cette activité antiproliférative.
Oncogene, 25 octobre 2004
VIE DE LA CELLULE
Un taxane en traitement initial
A
vec 42000 nouveaux cas en 2000,
le cancer du sein est le plus fréquent
des cancers en France. Centre de
référence pour la prise en charge
de cette pathologie, l’Institut Curie
participe depuis quatre-vingts ans à
la mise au point et/ou au développement
de nouvelles stratégies thérapeutiques et
de traitements conservateurs préservant
l’intégrité anatomique et fonctionnelle.
Les médecins du Département d’oncologie
médicale de l’Institut Curie ont coordonné
une étude montrant l’intérêt d’un taxane,
en chimiothérapie « néoadjuvante », c’està-dire administrée avant l’acte chirurgical:
la taille de la tumeur est ainsi réduite
chez 89 % des patientes contre 70 % avec
l’association de référence, et un traitement
conservateur est possible chez 58 %
des patientes contre 45 %. Déjà utilisé
en phase avancée de la maladie,
l’administration de ce médicament,
en phase précoce, permettrait donc
d’améliorer l’efficacité des traitements.
Céline Giustranti
Journal of Clinical Oncology, 15 décembre 2004
F. Niedergang, M. Grasset (Paris 6) / IC
INDISPENSABLE
AU NETTOYAGE
,EXCELLENCE
La biologiste
The EMBO Journal, 27 octobre 2004
04,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
La passion d’Anne
Houdusse pour les moteurs
moléculaires vient de lui
valoir la médaille de bronze
du CNRS 2004. Cette jeune
biologiste, chargée de
recherche 1re classe,
est chef de l’équipe
«Motilité structurale»
au sein de l’UMR 144 CNRS
à l’Institut Curie.
Elle se consacre depuis
plusieurs années à
comprendre comment
fonctionnent les protéines
impliquées dans le
mouvement cellulaire.
À l’image d’une voiture,
S. Laure/Institut Curie
Virginie Braun et
Florence Niedergang
de l’équipe de
Philippe Chavrier
(UMR 144 CNRS) à l’Institut Curie ont
montré que la protéine TI-VAMP joue
un rôle clé lors de la phagocytose,
processus par lequel les cellules
se débarrassent des éléments
indésirables, comme les bactéries.
La phagocytose est, entre autres,
essentielle à la réponse immunitaire
et inflammatoire. Lorsqu’un corps
étranger « attaque » l’organisme,
il est dégradé afin d’en isoler
un fragment caractéristique qui
servira à déclencher une réponse
immunitaire dirigée contre cet intrus.
Globule
blanc en plein
travail de
« nettoyage ».
h
h
Anne Houdusse médaillée
Anne Houdusse, chef de l’équipe
«Motilité structurale» à l’Institut Curie,
a reçu la médaille de bronze du CNRS.
la cellule a besoin d’énergie
et d’un moteur pour assurer
ses mouvements et ses
fonctions. Dans la cellule,
le rôle de l’essence est
assuré par des molécules
énergétiques appelées ATP,
et celui du moteur par
plusieurs familles
de protéines, dont
les myosines.
C’est à ces dernières et
surtout à leur structure
atomique que s’intéresse
Anne Houdusse.
« Décortiquer » ces
protéines permet de mieux
comprendre la dynamique
cellulaire et certaines
maladies génétiques.
EN BREF
Pour une organisation
EUROPE
RÉSEAU « ÉPIGÉNOME »
et une cohérence
P
arce qu’il fallait adapter les locaux aux
nouveaux équipements, aux nouvelles
façons de travailler en cancérologie,
et répondre aux besoins des malades,
des travaux importants ont été entrepris à
l’hôpital de l’Institut Curie1. Aboutissement
d’une première phase, mars 2005
sera mémorable pour les équipes
hospitalières et les patients de l’Institut.
Tout d’abord, c’est l’ouverture d’un
espace dédié à la médecine nucléaire,
la radiologie2 et la radiothérapie où
les trois disciplines sont rassemblées
et leurs plateaux techniques proches.
Fermée durant plus de six mois, la
médecine nucléaire bénéficie désormais
d’une Tep-scan (appareil de tomographie
par émission de positons couplé à un
scanner). Tandis que l’imagerie médicale,
équipée depuis 2003 d’une IRM et d’un
système informatique de stockage et
de communication d’images, Pacs3,
et le plateau technique de radiothérapie,
parmi les plus performants d’Europe,
vont pouvoir à nouveau fonctionner
à plein régime.
À côté de cette haute technologie, un autre
secteur a bénéficié de locaux totalement
refaits : il s’agit du Département des soins
de support qui regroupe le soutien
psychologique, les urgences, les soins
d’accompagnement, la diététique,
la rééducation. Plus de 500 m2 lui ont été
réservés pour accueillir un hôpital de jour
de trois places, une salle dédiée aux soins
A. Lescure / Institut Curie
CANCER DE LA VESSIE
,TRAVAUX À L’HÔPITAL
A. Lescure/Institut Curie
EN BREF
des plaies, deux salles d’urgence et d’autres
pour les consultations des psychologues.
Mais ce n’est que la partie émergée
de l’iceberg, car pour accompagner
ou compléter ces réalisations, nombre
d’espaces ont été repensés, déplacés,
mis aux normes (poste de sécurité
incendie, entrée de l’hôpital, archives
médicales et radiologiques, logistique…).
Par la priorité donnée à ces travaux,
financés en accord avec les organismes
de tutelle (caisse d’assurance maladie,
agence régionale d’hospitalisation),
l’Institut Curie œuvre en faveur
du décloisonnement des pratiques
et de l’amélioration de la qualité
des soins, forces de progrès dans
la lutte quotidienne contre le cancer.
L’unité de Geneviève Almouzni
(UMR 218 CNRS-Institut Curie) fait
partie des 25 laboratoires européens
retenus pour constituer le réseau
d’excellence «Épigénome»
coordonné par Thomas Jenuwein
(Research Institute of Molecular
pathology, Autriche). Doté de
12,5 millions d’euros, ce consortium
va établir en Europe d’ici à cinq ans
une plate-forme dédiée à la
recherche et à la communication
dans le domaine de l'épigénétique, ce
domaine particulier de la génétique.
Il s’attachera à mieux comprendre
la transmission des caractères
épigénétiques et leurs implications
dans le cancer et le vieillissement.
C. G.
TÉMOIGNAGE
« NOUS ALLONS
NOUS BATTRE »
Nathalie Oudar
1. L’hôpital dispose de 184 lits d’hospitalisation
complète et de 43 places en ambulatoire.
2. Lire « Mieux voir, mieux soigner », Le journal
de l’Institut Curie, nov. 2003.
3. Picture archiving and communication systems.
PENDANT LES TRAVAUX, L’HÔPITAL RESTE OUVERT…
Une nouvelle phase de travaux est d’ores et déjà entamée. Au programme
de l’année 2005 : réaménagement de la pharmacie (création d’une zone
de préparation centralisée des médicaments dits « cytotoxiques »),
rénovation du service d’hospitalisation du Département de radiothérapie
et curiethérapie, création de l’hôpital de jour de pédiatrie…
C. G.
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DÉCRYPTAGE
ACTUALITÉS
GÉNÉRALES
TRAITEMENT HORMONAL
RISQUE CONFIRMÉ
Un traitement hormonal substitutif
(THS), association d’œstrogènes et de
progestatifs de synthèse, prescrit sur
une période de deux ans, augmente
de 40 % le risque de cancer du sein
chez la femme ménopausée. C’est
le résultat de l’étude E3N menée
sur 54000 femmes ménopausées par
l’équipe Inserm de Françoise ClavelChapelon. « Quatre cents utilisatrices de
THS sur 30000 ont développé un cancer
du sein durant l’étude », précise-t-elle.
Face aux risques, les experts
recommandent donc la prudence. Les
THS sont désormais prescrits à faible
dose, pour une durée la plus courte
possible et sous conditions très
particulières pour lutter contre les
inconvénients de la ménopause. Pour
traiter l’ostéoporose notamment,
ils ne sont nécessaires que s’il y a
risque de fracture et après échec d’un
traitement par les biphosphonates.
D’autant que l’utilisation d’une
combinaison d’œstrogènes
et de progestérone naturels
– non synthétique –
ne semble pas
augmenter le risque.
Ce mélange n’est
encore utilisé que par
20 % des 1,5 million de
Françaises sous THS.
A. L.-D.
h
Inserm
Lire aussi : Le Journal
de l’Institut Curie
(mars 2004).
« Quatre cents utilisatrices ont développé
un cancer ». F. Clavel-Chapelon, auteur de
l’étude E3N.
,PROTHÈSES ESTHÉTIQUES
Jacques Chirac
demande
un meilleur
remboursement
parlent aux cellules !
Pour le bon fonctionnement
de notre organisme,
nos cellules – 60 000 milliards
chez un adulte – doivent
communiquer entre elles.
Mais il arrive que leur « dialogue »
soit brouillé. Résultat ?
Des maladies, dont certains cancers.
h POURQUOI COMMUNIQUER ?
Dès lors que l’organisme compte plusieurs cellules,
celles-ci doivent échanger des informations pour…
• contrôler, surveiller la croissance de certains tissus,
réguler la production de substances nécessaires
à l’organisme, c’est notamment la mission du système
hormonal ;
• transmettre des messages nerveux, c’est le rôle
du système nerveux ;
• reconnaître et détruire les « microbes »,
objectif visé par le système immunitaire.
h COMMENT COMMUNIQUER ?
,ÉQUIPEMENT
Nantes aura
son cyclotron
Les cellules communiquent :
• soit par contact direct, comme des voisins
de palier peuvent se serrer la main ;
• soit grâce à des « messagers chimiques », missives
fabriquées et secrétées par une cellule et réceptionnées
par une seconde, qui interprète alors le message et passe
à l’action, comme un courrier peut demander une réaction
de son destinataire.
Selon l’éloignement de la cellule-cible, il peut s’agir
de communication autocrine (la cellule s’envoie un
message « pense-bête »), paracrine (la cellule s’adresse
à ses voisines) ou endocrine (la cellule communique
avec des cellules d’un organe éloigné via le sang).
h COMME UNE CLÉ DANS SA SERRURE
De même qu’une clé ne peut ouvrir qu’une seule
serrure, les messagers chimiques ne sont reconnus
que par leurs cellules-cibles grâce à des récepteurs
qui leur sont spécifiques. Ils sont situés à la surface
ou à l’intérieur des cellules, voire dans leur noyau.
Isabelle Ramade-Masson
Centre de vulgarisation de la connaissance université-XI
06,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
La cellule fabrique
un « messager chimique ».
Celui-ci est émis
hors de la cellule.
Il se fixe sur
un « récepteur »
de la même cellule.
Il se fixe sur un
« récepteur » d’une
cellule-cible voisine.
Il est acheminé
par le sang. Il se fixe
sur un « récepteur »
d’une cellule-cible
d’un organe ou tissu
éloignés.
La fixation du
messager sur son
récepteur transmet
un message à la cellulecible : cela y déclenche
une réaction.
Le messager est
ensuite éliminé (ou dégradé).
© CVC
EN BREF
Les cellules
COMMUNICATION CELLULAIRE
LE CANCER :
UNE MALADIE DE LA COMMUNICATION CELLULAIRE?
Une cellule reçoit en permanence des messages qui lui ordonnent
de rester tranquille ou de se diviser. Ainsi, au cours du développement
d’un individu, des gènes (oncogènes) stimulent la division cellulaire
pour assurer la croissance ou le renouvellement des tissus et organes.
Si ces gènes, normalement au repos chez l’adulte, se « réveillent »
par erreur, ils court-circuitent les voies de communication. ces cellules
prolifèrent alors de façon incontrôlée. Par ailleurs, les cellules
cancéreuses émettent trop de messagers (facteurs de croissance),
qui stimulent anarchiquement leur division.
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,07
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Page 8
DOSSIER
MÉTASTASES HÉPATIQUES
h
A. Lescure/Institut Curie
La chimiothérapie
est une arme
employée contre
les métastases
hépatiques. Diminuant
la taille des lésions,
elle rend souvent
possible un geste
chirurgical. Elle
participe également
à la réduction du
risque de récidive.
Les métastases au foie représentent une possible complication grave
des cancers du côlon et du sein. Toutefois, grâce aux progrès de la chimiothérapie
et de la chirurgie, on sait aujourd’hui en contrôler et en traiter
un grand nombre.
a quasi-totalité des tumeurs cancéreuses
possède le pouvoir de métastaser, autrement dit de se propager à des organes
autres que celui d’origine1.
Les métastases sont les « descendantes » des
cellules malignes qui ont franchi les limites de
la tumeur primitive et atteint les vaisseaux
lymphatiques et/ou sanguins (lire p. 10). Dans le
premier cas, elles sont bloquées dans le ganglion
le plus proche, situé par exemple dans l’aisselle
L
1. Cette redoutable propriété connaît toutefois deux exceptions : une
forme de cancer de la peau, le carcinome baso-cellulaire, et un cancer
du système nerveux central, le glioblastome. Le premier ne forme
jamais de métastase, le second de façon exceptionnelle.
08,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
pour un cancer du sein. Elles s’y multiplient, puis
envahissent peu à peu les ganglions voisins.
Lorsque ces cellules se trouvent dans la circulation sanguine, elles essaiment à distance avant
de se fixer sur un autre organe et y « reproduire »
le cancer d’origine : les cellules d’une métastase
au foie d’un cancer du sein seront toujours des
cellules typiques d’un cancer du sein, et non
des cellules hépatiques altérées.
Des localisations précises
« Le nombre et la taille des métastases varient
d’un patient à l’autre, explique le Dr Pascale
Mariani, responsable de l’Unité de chirurgie
elle risque de former
des métastases.
2. Statistique Institut Curie.
LOCALISATION INITIALE
DESTINATIONS PRINCIPALES
DES MÉTASTASES
poumon (cancer du poumon
dit «à petites cellules»)
h cerveau, foie,
glandes surrénales
côlon
h foie, poumons
prostate
h os
sein
h foie, cerveau, os
rein
h poumons, foie
ovaire
h péritoine
INTERVIEW
DR THIERRY DORVAL,
Ch. Gruner / Institut Curie
digestive de l’Institut Curie. Elles peuvent se
développer dans tous les organes mais en réalité,
leur localisation n’est sans doute pas le simple
fait du hasard : les tumeurs ont des sites préférentiels. » Le foie est un organe souvent touché
par les métastases, et parfois l’unique organe
atteint, comme dans la très grande majorité
(83 %) des mélanomes de la choroïde (lire
« Interview » ci-contre).
C’est pourquoi tout bilan initial porte également
sur ces organes cibles : c’est le bilan d’extension.
Si un patient est atteint, par
Seule une cellule sur mille exemple, d’un cancer du
échappée d’une tumeur donne côlon ou du sein, son bilan
d’extension comportera un
une métastase. scanner abdominal et, pour le
cancer du côlon, une échographie du foie. La surveillance se poursuivra
parfois après le traitement initial afin de détecter
une rechute hépatique isolée (lire encadré p. 12).
Le foie est donc souvent un organe cible pour des
métastases de cancers, parmi les plus fréquents
en France : plus de 36 000 nouveaux cas de
cancers colorectaux et près de 42 000 nouveaux
cas de cancers du sein ont été diagnostiqués en
2000. Cinq ans après le diagnostic d’un cancer
du côlon ou du sein non métastatique, respectivement 20 % et 4 % des patients2 développent des
métastases hépatiques. C’est dire l’importance
des enseignements tirés par la communauté
des cancérologues, quant à la détection et au
LE SAVIEZtraitement des métastases hépatiques, et de leur
VOUS?
traduction en protocoles.
Plus le volume
Dès que des métastases sont détectées, l’équipe
d’une tumeur est
médicale met en œuvre une stratégie théragrand, plus celle-ci
peutique complexe. Le traitement des ■ ■ ■
est « agressive » : plus
h
QUAND LE CANCER
S’ÉTEND AU FOIE
MÉTASTASES HÉPATIQUES
responsable de
l’hospitalisation
en chimiothérapie
à l’Institut Curie.
Il est spécialiste
du mélanome de
la choroïde, tumeur
pour laquelle l’Institut
Curie est un centre
de référence.
Qu’est-ce que le mélanome de la choroïde?
C’est une forme rare de cancer, mais
néanmoins le plus fréquent des cancers
de l’œil chez l’adulte, dont on dénombre
en France 500 à 600 nouveaux cas par an.
L’Institut Curie en reçoit 300 chaque année,
nous possédons donc la plus grande
expérience dans ce domaine. Ce cancer se
manifeste par l’apparition brutale de troubles
de la vue de l’œil atteint. Son traitement
repose sur la chirurgie, la curiethérapie
ou la protonthérapie.
Où les métastases de cette tumeur
se développent-elles ?
À 93 % dans le foie (dans 83 % des cas, seul
le foie est atteint, tandis que les autres
10 % présentent d’autres métastases : os,
peau ou poumons). Les métastases peuvent
survenir jusqu’à 15-20 ans après le traitement
de la tumeur initiale! Nous surveillons
donc nos patients tous les six mois, par
échographie hépatique pour en détecter la
survenue le plus précocement possible dans
un but chirurgical, malheureusement possible
dans moins de 20 % des cas seulement.
Quels sont les axes de la recherche clinique?
L’Institut Curie participe à un essai coordonné
par l’EORTC (European Organisation for Research
and Treatment of Cancer*) évaluant deux voies
d’administration de la chimiothérapie
(intra-artérielle ou intraveineuse).
Par ailleurs, un essai de vaccination non
pas préventive mais thérapeutique, réalisé
chez une quarantaine de malades a montré
une faisabilité, une bonne tolérance et
une absence de toxicité de la technique.
Un second doit analyser de façon précise
la réponse immunitaire des patients.
Propos recueillis par P. K.
* Organisation européenne pour la recherche
et le traitement du cancer.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 09
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DOSSIER
LE POINT SUR...
MÉTASTASES HÉPATIQUES
De la tumeur à la métastase
La capacité d’une tumeur à métastaser apparaît après
une période de développement variable selon son agressivité,
son volume et son type. Tous les organes peuvent être le siège
de métastases, mais chaque type de cancer provoque des
métastases le plus souvent aux mêmes endroits. Ainsi,
un des organes cibles des tumeurs du sein, du côlon et
de la choroïde est le foie. La surveillance des patients porte
donc également sur ce ou ces organes afin de détecter
le plus précocement possible la survenue d’une métastase.
h LA TUMEUR INITIALE
Au départ, la tumeur est locale et à ce stade, chirurgie,
chimiothérapie et radiothérapie, associées ou non,
permettent la plupart du temps de guérir le patient.
Mais parfois la pathologie « échappe » aux traitements,
d’autant plus souvent que le cancer n’est pas diagnostiqué
et traité à temps. Toute une cascade d’événements complexes
peut alors donner naissance à des métastases dès lors que
des cellules tumorales passent dans le réseau sanguin ou
le réseau lymphatique (métastase ganglionnaire).
■■■
métastases hépatiques est, autant que
possible, local. Il repose sur la chirurgie, mais
pour l’envisager, l’équipe médicale doit être
certaine, d’une part, d’enlever la totalité de la ou
des métastases, d’autre part qu’il n’en existe
pas dans d’autres organes, ce que détermine le
bilan d’extension.
Le cancer du côlon est le premier pour lequel
la chirurgie a apporté la preuve de son efficacité
dans le traitement des métastases hépatiques.
C’était il y a plus de dix ans. Grâce à elle, le taux
de survie des patients opérés est actuellement
de 40 à 45 % après cinq ans, alors qu’aucun
patient n’atteignait ce terme avec la chimiothérapie seule. « En ce qui concerne le cancer du
sein, la survie à cinq ans est de 58 % chez les
patientes qui répondent à la chimiothérapie
administrée autour de l’acte chirurgical »,
indique le Dr Rémy Salmon, chef du Service de
chirurgie sénologique3 à l’Institut Curie.
1
2
3
4
h LE PASSAGE SANGUIN
Médecins et chercheurs suivent plusieurs pistes pour mieux
comprendre ces mécanismes. Il s’agit notamment d’identifier
les gènes ou les réseaux de gènes en cause dans le processus
métastatique. Par ailleurs, une équipe de l’Institut Curie est en
train d’évaluer un automate capable de détecter la présence de
cellules cancéreuses dans un échantillon de sang prélevé dans
la veine porte du foie. Si cet espoir se confirme, il sera possible
d’agir de façon précoce et peut-être de prévenir l’apparition des
métastases.
Pierre Kanter
h POUR EN SAVOIR PLUS
Décryptage. Le Journal de l’Institut Curie. Août 2004
10,
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
5
1 Prolifération de la
tumeur primaire et formation
de vaisseaux sanguins
pourvoyeurs de nutriments
et d’oxygène (angiogénèse).
2 Invasion du tissu de soutien et
arrivée dans le système sanguin.
3 Préparation au voyage : les cellules
tumorales fragiles s’entourent
de plaquettes qui les protègent
lors de leur transport.
4 Arrêt dans un organe (par exemple,
le foie), adhérence à la paroi vasculaire
interne et sortie du vaisseau.
5 Adaptation au nouvel
environnement, prolifération
et angiogenèse : installation
de la métastase.
LA
RECHERCHE
AVANCE
Certaines cures
de chimiothérapie
par voie veineuse
ont été ou vont être
remplacées par
une prise orale,
aussi efficace et
parfois mieux tolérée,
améliorant la qualité
de vie des patients.
Delphine Bailly/Pour la science 2003
h
UNE RECHERCHE ACTIVE
Exemple de
dissémination
d’une métastase
via le système
sanguin
h
Dans le cas des métastases hépatiques, la dissémination se fait
par les vaisseaux sanguins. Les cellules échappées de la tumeur
d’origine circulent dans l’organisme, mais la majorité meurt :
moins de 0,1 % d’entre elles franchissent toutes les étapes
indispensables à la naissance d’une métastase… L’une d’elles
finit parfois par se fixer sur la paroi d’un petit vaisseau sanguin
(capillaire) du foie et la traverse. La cellule peut alors se
multiplier et donner naissance à une colonie de cellules, puis à
une tumeur secondaire: la métastase. Il peut y en avoir plusieurs.
La cartographie des métastases
Un bilan très complet est donc pratiqué afin de
dresser une cartographie précise des métastases
et déterminer si le patient peut ou non bénéficier
d’une intervention chirurgicale. Seulement 10 %
des patients sont opérables d’emblée. Les autres
reçoivent une chimiothérapie pour réduire la
taille ou le nombre des métastases hépatiques
pour qu’une intervention chirurgicale puisse
être réalisée. Les métastases du mélanome de la
choroïde posent des problèmes particuliers car
elles sont de très petite taille (de l’ordre du
millimètre) et souvent disséminées, ce qui peut
rendre leur ablation impossible.
Au cours de l’intervention, le chirurgien s’assure
qu’il n’existe pas d’autres lésions qui n’auraient
pas été repérées par le bilan initial. Puis, il
enlève la ou les métastases, avec une marge de
sécurité si possible d’un centimètre. Le foie est
heureusement le seul organe du corps capable
de se régénérer. Il est donc possible d’en enlever
jusqu’à 70 % sans dommage. Le foie « repousse »
alors en quelques mois ! « Nous utilisons de
nouveaux outils qui facilitent nos interventions,
précise le Dr Rémy Salmon. Il s’agit notamment
du“dissecteur à eau” qui simplifie l’hémostase
(arrêt du saignement), de l’“ultra scissor” ■ ■ ■
INTERVIEW
ANNIE,
58 ans, traitée
pour des métastases
hépatiques d’un
cancer du sein.
« Cela va faire dix ans que sont apparues
les premières métastases. Mais c’est en
1992, que tout a commencé lorsque j’ai
remarqué une zone de “peau d’orange”
sur un sein. J’ai consulté et appris que
j’avais un cancer. À l’Institut Curie, après
une chimiothérapie destinée à faire
diminuer la taille de la tumeur et ainsi à
éviter l’ablation totale du sein, j’ai subi une
tumorectomie avec curage axillaire, suivie
de huit semaines de radiothérapie. J’ai
ensuite toujours été surveillée de façon
très régulière.
C’est comme cela qu’en avril 1995,
une échographie hépatique a révélé
cinq métastases dans le foie. Là, nouvelle
chimiothérapie, à laquelle j’ai très bien
répondu : au bout de deux mois, on ne
voyait déjà pratiquement plus d’images
suspectes à l’échographie ! En 1997,
un contrôle a montré une nouvelle
métastase hépatique qui, elle, a
nécessité huit mois de chimiothérapie.
Puis, j’ai été tranquille jusqu’en 2003,
quand une échographie de contrôle
a découvert une récidive de ce dernier
nodule. La chimiothérapie orale n’ayant
pas donné les résultats escomptés, j’ai
alors reçu une autre chimiothérapie, plus
puissante, que j’ai supportée avec
difficultés. Et, fin novembre 2004, j’ai été
opérée à l’Institut. Au cours de
l’intervention, qui a duré six heures, il a
été constaté qu’il existait quatre autres
foyers métastatiques invisibles à
l’échographie et au scanner. Le chirurgien
les a alors enlevés. J’ai été hospitalisée
une douzaine de jours. Je me suis
vraiment sentie en sécurité à l’hôpital,
bien entourée, réconfortée. Et j’entame
maintenant ma sixième chimiothérapie. »
Propos recueillis par P. K.
3. Chirurgie du sein.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
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DOSSIER
DOSSIER
MÉTASTASES HÉPATIQUES
LE SUIVI POUR LA VIE
La prise en charge de la maladie cancéreuse ne s’arrête pas, comme
d’autres pathologies, à la fin du traitement initial. Face au risque de
récidive et de métastase, il faut en effet être suivi durant des années
pour détecter et traiter le plus précocement possible toute évolution
de la maladie qui pourrait être traitée. Les examens préconisés
dépendent de la tumeur en cause. S’il s’agit d’un cancer du côlon
par exemple, le suivi comporte notamment une échographie hépatique,
éventuellement complétée par un scanner, tous les quatre mois pendant
deux ans, puis tous les six mois pendant trois ans, et enfin tous les ans.
Il faut y associer une radiographie du thorax tous les ans.
Cette surveillance s’espace généralement au-delà de cinq ans.
h
10 jours
C’est la durée
moyenne
d’hospitalisation après
une opération du foie.
■ ■ ■ qui coupe et réalise l’hémostase de
la plaie, ou encore des radiofréquences. »
Cette dernière technique consiste à introduire
une électrode au contact de la métastase, qui,
en chauffant, la détruit (lire encadré). Cette
intervention nécessite une hospitalisation d’une
dizaine de jours. Les suites opératoires sont rendues moins douloureuses grâce à des antalgiques
forts comme la morphine.
Réduire le risque de récidive
La chimiothérapie représente la seconde arme.
Elle est systématique, en plus de la chirurgie,
quand il s’agit de métastases d’un cancer du
sein. Des études ont en effet montré qu’elle
réduisait le risque de récidive. « La question fait
encore l’objet de débats en ce qui concerne les
métastases du cancer colique. À l’heure actuelle,
des études sont menées pour le déterminer.
J’ai la conviction qu’elle est utile et qu’il
faut la prescrire », estime le Dr Jean-Marc Extra,
responsable de l’hôpital de jour de chimiothérapie à l’Institut Curie. La chimiothérapie est
également utilisée pour faire diminuer la taille
des lésions hépatiques et permettre éventuellement un geste chirurgical. Face aux métastases
du cancer du côlon, la chimiothérapie repose
sur des associations de 5-fluoro-uracile (5-FU)
et d’autres molécules, tel un dérivé du platine.
Elle ne nécessite qu’une hospitalisation de jour :
deux cures tous les quinze jours pendant six à
douze mois. Chez les patients inopérables,
cette chimiothérapie augmente à la fois la
qualité de vie et la survie. Il existe depuis peu
une forme orale de 5-FU, extrêmement bien
tolérée, qui va certainement remplacer la forme
injec-table et améliorer ainsi la qualité de vie des
patients.
Depuis 2004, les cancérologues disposent aussi
d’un nouveau médicament, le cétuximab, qui
agit sur un facteur de croissance de la cellule
tumorale. Des études ont montré que lorsqu’il est
associé à une autre molécule usuelle de chimiothérapie, le CPT-11, il augmente encore de 10 %
le taux de régression des métastases du cancer
du côlon.
GRÂCE À VOUS
A. Lescure/Institut Curie
L’apport des radiofréquences
LE JOURNAL DE
12 , L’INSTITUT CURIE
Cette technique très récente consiste à détruire les métastases
par la chaleur. Elle se déroule au bloc opératoire, sous anesthésie
générale, soit seule, soit en complément d’une chirurgie classique.
Chirurgicalement, il est possible d’enlever le lobe droit du foie s’il
présente plusieurs métastases, mais l’intervention ne pourra pas
supprimer une métastase située au centre du lobe gauche. D’où l’intérêt
des radiofréquences. Celles-ci détruiront sans dommage pour le malade
les métastases du lobe gauche. Les radiofréquences se pratiquent, soit
au décours de l’opération, soit indépendamment de celle-ci (toujours
sous anesthésie générale), en introduisant l’électrode à travers la peau.
Il s’agit donc d’un progrès majeur. À l’Institut Curie, l’appareillage
a pu être acquis grâce aux fonds collectés lors de l’exposition-vente
organisée en décembre 2002 par la ville de Charenton-le-Pont (94).
h
ESSENTIEL
« Affamer » la tumeur
Une autre voie de recherche est en plein développement : celles des médicaments anti-angioC’est le pourcentage
genèses. Pour survivre, les cellules cancéreuses
de cancers du côlon
secrètent des substances qui favorisent la
pris en charge
création de nouveaux vaisseaux sanguins, c’est
à l’Institut Curie
qui présentent déjà
l’angiogenèse. Ces vaisseaux sont destinés à leur
une ou des métastases
apporter les éléments nutritifs indispensables à
hépatiques au moment
leur survie. L’idée est donc d’agir à ce niveau
du diagnostic*.
pour bloquer ce mécanisme. Des essais cliniques
Ce pourcentage
réalisés avec l’une de ces nouvelles molécules,
a tendance à baisser
grâce au diagnostic de
le bevacuzimab, montrent qu’elle augmente
plus en plus précoce.
de 10 % le taux de réponse à une forme orale de
* Source : Service de
5-FU et allonge la survie des patients. Ce produit
biostatistiques de l’Institut
devrait être disponible courant 2005. Les quinze
Curie.
dernières années ont également été marquées
par l’apparition de nouveaux médicaments
plus efficaces contre les métastases hépatiques
du cancer du sein. Ils permettent plus souvent
l’intervention chirurgicale et, même si cela
n’est pas le cas, ils doublent la survie. Celle-ci ne
dépassait pas deux ans en 1990, elle est
Les médicaments du futur en moyenne de quatre ans aujourd’hui.
Ces progrès reposent sur les taxanes et
pourraient empêcher la
sur un anticorps monoclonal. Ce dervascularisation des tumeurs. nier bloque une protéine, présente une
fois sur cinq à la surface des cellules
cancéreuses, permettant à la tumeur
de croître. Il ne peut toutefois être utilisé que
chez 20 % des patientes, celles dont les cellules
tumorales « possèdent » cette protéine.
20%
Stimuler l’immunité
Dernière arme à ce jour : la vaccinothérapie.
L’idée est de stimuler le système immunitaire
du patient et particulièrement ses lymphocytes T
pour qu’ils reconnaissent et détruisent les cellules
malignes. « C’est une voie de recherche très
intéressante que nous poursuivons dans le mélanome de la choroïde, commente le Dr Sophie
Piperno-Neuman, oncologue à l’Institut Curie.
Les cellules de ce cancer – et donc de ses métastases – « expriment » différents antigènes, cibles
du système immunitaire, dont l’un (baptisé
NA 17) de façon quasi systématique. L’idée est
d’utiliser cet antigène comme molécule de
reconnaissance, de l’injecter dans l’organisme
grâce à un vecteur (ce peut être un virus sans
danger, certaines cellules du patient…), afin
que le système de défense apprenne à ■ ■ ■
GRÂCE À VOUS
Noak / Le bar Floréal / Institut Curie
MÉTASTASES HÉPATIQUES
Réserver du temps pour
accélérer la recherche
Depuis 2003, la création du « Temps
médical protégé » permet à des médecins
de l’Institut Curie de concilier pratique
clinique et recherche. « J’ai été un
des premiers à bénéficier de cette
possibilité, témoigne le Dr Philippe Giraud,
radiothérapeute. Je passe chaque semaine
trois jours auprès de mes patients et
j’en consacre deux à l’enseignement
et à la recherche clinique. Grâce à cette
organisation, j’ai pu notamment mettre
en place la radiothérapie asservie à la
respiration appliquée au cancer du poumon
à l’Institut Curie. » Cet aménagement lui
a aussi permis d’être habilité à monter
une équipe de recherche transversale en
imagerie et radiothérapie avec d’autres
collègues, mais également des radiologues,
des physiciens… tout en encadrant des
étudiants en DEA ou en thèse. Ce sont les
fonds récoltés auprès des donateurs qui
permettent cette réorganisation au sein
de l’hôpital. « La recherche est une priorité.
Jusqu’à présent, l’Institut Curie mène
plus d’une centaine de protocoles d’essais
cliniques pour un total de 500 patients chaque
année. Objectif 2007 : doubler le nombre
de patients bénéficiant de la recherche
clinique. »
Géraldine Lebourgeois
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
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DOSSIER
ENTRE NOUS
MÉTASTASES HÉPATIQUES
INITIATIVES
,HISTOIRE D’UN LEGS
GRÂCE À VOUS
Micrométastases
La recherche fondamentale au profit de la médecine
L’enjeu pronostique est évident : identifier parmi les
personnes atteintes de cancer celles qui ont un risque
élevé de récidive. L’enjeu thérapeutique l’est tout autant,
puisqu’il s’agit de détecter les « embryons » de métastases,
ou micrométastases, avant même leur maturité.
En 1997, l’Institut Curie a décidé d’agir en finançant
un Programme incitatif et coopératif (Pic) sur ce thème. La
générosité des donateurs a soutenu, pendant cinq ans, un
faisceau d’études à hauteur d’environ 150 000 euros par an.
Le Pic «Détection, biologie et traitement des
micrométastases» a suscité une étroite collaboration entre
cliniciens et biologistes autour de l’étude biologique de ces
cellules tumorales disséminées ainsi que sur les effets de
médicaments anticancéreux. Selon les tumeurs concernées,
diverses analyses extrêmement sensibles ont été mises
au point pour détecter et caractériser les micrométastases
dans la circulation sanguine et la moelle osseuse.
h Grâce à la « signature » que laissent immanquablement
les sarcomes (un type de cancer), le défi de la détection
a été relevé et la valeur pronostique confirmée pour les
tumeurs d’Ewing, des sarcomes particuliers touchant
LE JOURNAL DE
14 , L’INSTITUT CURIE
les plus jeunes. Conçues à l’Institut Curie, de telles
analyses sont désormais proposées à la plupart
des malades atteints de tumeurs d’Ewing en France.
h Pour les cancers du sein, la détection des
micrométastases reste délicate. Car sans signature
spécifique, il a fallu recourir à leur recherche « tous
azimuts ». Des études ont néanmoins confirmé que
leur présence dans la moelle osseuse est bien un facteur
de risque de récidive. Une étude associant plusieurs
centres européens, dont l’Institut Curie, révèle que la valeur
pronostic est confirmée sur près de 5 000 patientes.
De nouveaux essais reposant sur une technologie plus
performante faciliteront la mise en place d’une détection
en routine dans la moelle osseuse. Quant à la recherche
de micrométastases dans le sang, un nouvel automate
est actuellement évalué à l’Institut.
Nathalie Boissière
h POUR EN SAVOIR PLUS
sur les programmes incitatifs et coopératifs financés
par votre générosité : www.curie.fr/recherche/activites
En hommage à sa mère et à sa femme, Georges Garet a légué la majeure partie de sa fortune à l’Institut Curie.
Ce legs a permis la création du Laboratoire Garet, spécialisé notamment dans le transfert,
cette «transformation» des découvertes en applications médicales.
VENEZ NOUS
RENCONTRER
Afin de vous informer sur
les objectifs de l’Institut Curie
en matière de recherche et
de soins, l’équipe du Service des
legs de l’Institut Curie sera au
Salon des Seniors-Notre Temps,
du 1er au 3 avril 2005, au Parc
des Expositions, porte de
Versailles à Paris.
euf et retraité, Georges Garet, résidant à Paris, avait décidé de faire
de l’Institut Curie son légataire universel. Dans son testament, il ne dévoile
pas les raisons de ce choix, mais écrit :
« Je veux que l’on sache que je fais ce legs
à l’Institut Curie en considération de la
très grande reconnaissance que j’éprouve
à l’égard de ma femme et de ma mère. Si
le bénéfice de ce legs peut recevoir une
affectation particulière et déterminée,
j’aimerais qu’il soit conservé trace de cette
intention à l’occasion de la réalisation qu’il
permettrait. »
Georges Garet décède le 24 janvier 1987.
Sa fortune dont hérite l’Institut Curie est
alors estimée à plus de 22 millions de
francs (plus de 3,4 millions d’euros).
Conformément à la volonté du testateur,
le conseil d’administration de l’Institut
Curie l’affecte au financement de la construction et de l’équipement de 700 m2 de
laboratoire. Consacrés en grande partie
aux activités de transfert des découvertes
effectuées par la recherche fondamentale
vers l’application médicale, ces espaces
sont inaugurés en 1993, soit six ans seu-
V
h
Pierre Kanter
« JE VEUX QUE L’ON SACHE… »
Ch. Grnuer / Institut Curie
reconnaître et à détruire les cellules qui
expriment cet antigène. «Nous avons terminé
en décembre 2003 un premier essai clinique qui
a porté sur 44 patients durant quatre ans. Il a
montré l’absence de toxicité et la faisabilité de
la technique. Au vu des résultats, nous lançons
actuellement un second essai de vaccination
antitumorale. Ce traitement, s’il s’avère efficace,
pourrait être proposé d’emblée, dans quelques
années, aux patients dont la tumeur est particulièrement agressive, juste après un traitement
local comme la chirurgie ophtalmique ou la
protonthérapie. C’est là, me semble-t-il, que
cette approche aurait sa place. »
Les progrès, lentement mais sûrement, viennent
changer l’horizon des personnes atteintes de
cancer métastatique. Il y a une dizaine d’années,
les chances étaient faibles. Aujourd’hui, des stratégies d’attaque bénéficient à nombre de patients,
tandis que d’autres font l’objet de nombreuses
recherches cliniques. À suivre…
En 1994, quelques mois après l’installation
du Laboratoire Garet, l’équipe de biologistes
et d’ingénieurs dirigée par Henri Magdelenat
(au centre) est déjà sur de nombreux
programmes d’innovation.
lement après l’ouverture de la succession.
Le Laboratoire Garet est alors le premier
en France à être dédié à la cancérologie
et à l’innovation diagnostique et thérapeutique grâce à la mobilisation des
chercheurs et des cliniciens et la mutualisation de leurs objectifs. De nombreuses
pratiques synonymes de progrès y voient
le jour, parmi lesquelles des méthodes
de diagnostic moléculaire de cancers de
l’enfant comme les tumeurs d’Ewing. La
pharmacologie oncologique s’y implante
h
A. Lescure/Institut Curie
■■■
à la fin des années 1990, participant au
développement de nouveaux médicaments et à l’expérimentation de thérapies.
Le Laboratoire Garet s’agrandit à la
même période et accueille une équipe
d’immunologie et d’immunothérapie. Il
est le berceau de l’étude des virus liés
au cancer avec l’établissement du rôle
diagnostic et pronostic des papillomavirus, notamment dans les cancers du
col utérin. De nouveaux protocoles
cliniques d’immunothérapie devraient
débuter en 2005. L’activité de transfert, au
cœur des ambitions de l’Institut, bénéficie
désormais d’une large infrastructure1
pour les années à venir.
Abigaelle Lacombe-Didier
1. Lire Le Journal de l’Institut Curie, août 2004.
CONTACT
Pour obtenir des informations sur
les legs, merci d’utiliser le bulletin et l’enveloppe affranchie joints
ou, à défaut, d’écrire au Service
des legs de l’Institut Curie,
26 rue d’Ulm, 75248 Paris Cedex
05 (Tél. : 01 44 32 40 65/40 58 www.curie.fr/legs.cfm)
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 15
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ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
INITIATIVES
INITIATIVES
,UN JARDIN POUR LA VIE
Construit sur le modèle centenaire hérité de Marie Curie et toujours d’avant-garde, le continuum
Recherche-Soins innovants, l’Institut Curie dispose des talents, des structures et des ambitions
nécessaires pour «prendre le cancer de vitesse». Cette approche dans un lieu unique encourage
l’innovation, favorise les échanges et le travail collectif entre chercheurs, médecins et soignants,
pour accélérer la mise à disposition de traitements innovants aux patients. Notre volonté de progresser
ne pourrait se concrétiser sans le soutien et la générosité de nos donateurs.
AUX COULEURS DE L’ESPOIR
Noak / le bar Floréal /Institut Curie
a jonquille Institut Curie, créée par
le pépiniériste Truffaut, fête son
premier anniversaire. À cette occasion, le « Jardin pour la Vie » refleurit à
Paris les 18, 19 et 20 mars. Cette année,
la rue Soufflot et le Panthéon seront
parés de plus de 40 000 jonquilles généreusement offertes par Truffaut – soit
10 000 de plus que l’année passée. Un
chemin de gazon mènera les visiteurs du
jardin du Luxembourg au Panthéon pour
L
LA PAROLE DES
LE JOURNAL DE
16 , L’INSTITUT CURIE
h Samedi 19 et dimanche 20 mars de 10 h à 18 h.
Musée Curie (entrée libre). Balade commentée en bus (2 €).
Renseignements : 01 42 34 63 15 – www.curie.fr
h Expo « Marie Curie, femme de science ». Mairie
du 5e arrondissement jusqu’au 24 mars.
FEMMES LIBÉRÉE
réateur de lingerie, le groupe
Simone Pérèle s’engage aux côtés
de l’Institut Curie et « libère la parole
des femmes ». Depuis les années 1950,
Madame Simone Pérèle puis ses successeurs contribuent à la libération des femmes et à l’affirmation de leur personnalité.
Leur engagement aux côtés de l’Institut
Curie va permettre de réaliser une étude
inédite sur l’intimité des femmes touchées
par un cancer du sein. Pour la première fois
en France, l’impact du cancer du sein et
de ses traitements sur la vie sexuelle sera
en effet au cœur d’une véritable enquête.
Elle permettra de mieux comprendre ce que
les patientes vivent dès lors que la maladie
a modifié, leur image corporelle, parfois, et
leur relation de couple, souvent.
Simone Pérèle s’est engagé sur un parte-
C
l’association et tout particulièrement ceux
des communes de Janzé, Rivarennes,
Saint-Léonard, Chirac et Outarville. « J’ai
vu des bénévoles relever le défi, des
femmes et des hommes courir et marcher
pour la vie », a raconté Paul Rolland, organisateur de la manifestation janzéenne
(Ille-et-Vilaine). Et de poursuivre : « J’ai vu
des milliers de marcheurs et des centaines
de ballons s’envoler, symboles de leur
solidarité. J’ai vu une troupe de théâtre, des
dizaines d’associations, d’entreprises et de
Janzé / CPLV CPC
145 000 EUROS AU PROFIT DE CURIE
epuis maintenant quinze ans, l’association Courir pour la Vie, Courir
pour Curie organise chaque année
dans toute la France une rando-course
de solidarité contre le cancer. Le bilan
2004 est très satisfaisant : 145 000 euros
collectés par 33 communes et près de
10 000 participants, qui, ensemble, ont
parcouru 235 000 kilomètres.
Au cours de la soirée de remise des Trophées, le 16 février dernier, l’Institut Curie
a été heureux de féliciter les bénévoles de
exceptionnels à bord d’un vieil autobus de
collection.
Durant ce week-end caritatif, des jonquilles sont également en vente au profit
de l’Institut dans toutes les jardineries
Truffaut, donnant à cet événement une
dimension nationale.
,PATIENTES ET CANCERS DU SEIN
1. lire « Quand la recherche devient traitement »,
Journal de l’Institut Curie, mars 2004.
2. Lire « Du laboratoire à l’hôpital », Journal de
l’Institut Curie, août 2004.
,COURIR POUR LA VIE
D
y découvrir le « Jardin » version 2005 et
déchiffrer une citation de Marie Curie.
Un spectacle inaugurera ce week-end de
générosité et de solidarité où plus de 70000
personnes sont attendues pour soutenir
les missions de l’Institut Curie en matière
de lutte contre le cancer. Symbolisant
l’espoir de découvertes et de guérison (lire
ci-contre), les jonquilles seront vendues au
profit des programmes engagés par l’Institut. Les visiteurs pourront découvrir le
musée Curie, haut lieu de mémoire de la
famille aux cinq Prix Nobel, le Panthéon
qui abrite depuis dix ans les cendres de
Pierre et de Marie Curie ou encore suivre
dans Paris les traces de ces scientifiques
collectivités apporter leur soutien… » Les
fonds collectés permettront de renforcer
l’équipement hospitalier nécessaire aux
curiethérapies, notamment à celle des
cancers du sein, des tumeurs gynécologiques, ORL ou dermatologiques.
S. Laure / Institut Curie
in 2004, l’Institut Curie a lancé,
pour la première fois, une campagne
nationale dans les médias avec pour
objectif de mobiliser 300 000 donateurs
particuliers et des entreprises mécènes
appelées « actionnaires à but non lucratif » en faveur de ses missions et de ses
recherche et la médecine – nécessitant
23 millions d’euros d’investissement
(2005-2007), puis 8 millions d’euros de
fonctionnement annuel.
h Le développement de la recherche
clinique et le renforcement de l’innovation1 en multipliant par deux le nombre
de patients participant à la recherche
clinique: 3 millions d’euros chaque année.
h La montée en puissance du Département de transfert2 : une passerelle indispensable pour mettre les découvertes à
la disposition des patients : un budget
en augmentation après les 5,1 millions
d’euros de fonctionnement et d’investissement déjà réalisés en 2004.
La jonquille est un symbole fort dans
la lutte contre le cancer. Bravant les rigueurs
hivernales, cette fleur est en effet parmi
les premières à s’épanouir. Synonyme de
courage, une telle victoire redonne espoir
tant aux malades atteints de cancer qu’aux
médecins et chercheurs de l’Institut Curie.
h
© A. Lescure / Institut Curie
« PRENONS LE CANCER DE VITESSE »
F
Fidèle à sa devise « Plus belle sera
la terre » et à l’Institut Curie, Truffaut
participe, pour la deuxième fois, au
Jardin pour la Vie. Cet événement
caritatif est toujours soutenu par le
Centre des monuments historiques
(Monum), la Mairie de Paris et celle
du 5e arrondissement. Cette année,
de nouveaux partenaires ont rallié
cette cause, parmi lesquels l’assureur
santé SwissLife.
h
,CAMPAGNE NATIONALE
projets. Pour assurer la croissance et le
développement de ses activités les plus
innovantes et pour traduire les connaissances scientifiques en applications
médicales, l’Institut Curie a besoin de
compléter les financements publics par
ses propres ressources. Il s’est donné
trois ans pour collecter 10 millions d’euros supplémentaires annuels.
Avec un investissement mesuré, cette
campagne a été annoncée sur trois
stations de radio et dans une trentaine
de journaux, dont certains ont offert ces
parutions publicitaires. Mi-janvier, déjà
près de 20 000 nouveaux donateurs nous
avaient rejoints.
Les projets phares que l’Institut s’est
engagé à financer sur les trois années à
venir sont :
h La création d’un pôle de biologie du
développement – nouveau pont entre la
DES SOLIDARITÉS
INSTITUTIONNELLES
L’hôpital de l’Institut Curie projette
d’ouvrir une consultation de sexologie grâce
à l’engagement de Simone Pérèle.
nariat financier avec l’Institut Curie pour
une durée de trois ans. Car, au-delà de
l’étude, dont les conclusions sont attendues
d’ici à juin 2005, le groupe accompagnera
également la mise en place de consultations de sexologie. Les patientes bénéficieront alors d’un interlocuteur spécialisé
pour parler de leur vie intime bouleversée
par la maladie. Cette prise en charge devrait
leur permettre d’obtenir une réponse à
nombre de leurs questions et d’améliorer
ainsi leur qualité de vie. Ces consultations
dépendront, tout comme l’unité de psychooncologie, du Département de soins de
support dirigé par le Dr Laure Copel.
Le besoin est bien réel, car plus de la moitié
des nouveaux patients de l’Institut Curie sont
des femmes touchées par un cancer du sein,
soit près de 1800 femmes chaque année.
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 17
JIC61•16-19-XP1SR1
27/01/2005
10:22
Page 18
ENTRE NOUS
ENTRE NOUS
EN MÉMOIRE DE…
D Olivier Delattre, directeur de l’Unité de recherche
Inserm « Pathologie moléculaires des cancers »
’association franc-comtoise Réagir
souhaitait soutenir la recherche
sur certains cancers des enfants,
c’est pourquoi leur don a été spécifiquement
affecté à la recherche sur les tumeurs
pédiatriques sur lesquelles travaille mon
équipe “Génétique et biologie des tumeurs
pédiatriques” au sein de l’Unité, explique
le Dr Olivier Delattre. C’est un soutien très
important, par la somme elle-même et
par le lien qu’il signifie entre l’association
et l’Institut Curie autour de ces pathologies
de l’enfant. Cet encouragement est stimulant
S. Laure / Institut Curie
L
car, derrière ce don, il y
a la confiance et l’espoir
de nombreuses personnes
concernées directement
ou indirectement par
ces maladies rares.
Les 22 867 euros reçus
devraient nous permettre
d’acheter du matériel
pour améliorer nos systèmes d’imagerie
et d’analyse cellulaire, indispensables
pour étudier les cellules tumorales. »
h
Association Réagir - BP7 - 25430 Sancey-Le-Grand
,TÉMOIGNAGE
Organisatrice
d’« UN GOÛTER POUR LA VIE »,
Anne Da Silva est mère d’une
petite fille suivie à l’Institut Curie
«
À 4 ans, ma fille
Andréa a eu un cancer. Aujourd’hui, elle
en a 8, et est « en rémission »,
comme disent les médecins,
car il faut encore attendre
quatre ans pour que
les risques de rechute
deviennent minimes et que
h
«
l’on puisse parler de guérison.
Il est difficile de ne pas penser
à cette maladie qui nous a fait
souffrir, et de vivre dans la peur
qu’elle ressurgisse. Pour ma
fille et pour tous les enfants
touchés par le cancer, je vais
me battre. Ils ne doivent pas se
sentir seuls. Nous devons leur
tendre la main et leur faire
espérer un avenir meilleur. J’ai
eu le véritable déclic après le
décès de mon oncle des suites
d’un cancer. Aujourd’hui, je ne
veux plus rester passive. Avec
l’école d’Andréa, j’ai donc décidé
d’organiser une journée d’information, de solidarité et de
générosité au profit du Département de pédiatrie de l’Institut
Curie et des recherches sur les
cancers pédiatriques. »
Propos recueillis
par C. B. et A. L.-D.
h Un Goûter pour la Vie.
Destinée aux enfants de l’école
d’Andréa et à leurs familles, cette
opération sera organisée avec l’école
courant avril à Montmorency (95) .
COMMENT NOUS AIDER
Tout donateur particulier bénéficie
d’une réduction d’impôts sur le revenu
de 66 % du montant du don, dans
la limite de 20 % du revenu imposable
annuel. Pour soutenir l’Institut, merci
LE JOURNAL DE
18 , L’INSTITUT CURIE
d’utiliser le bulletin joint ou, à défaut,
d’envoyer votre chèque de soutien à :
Institut Curie - Gestion des dons 26 rue d’Ulm - 75248 Paris Cedex 05.
Renseignements : 01 44 32 40 80
MUSIQUE, MAESTRO
Le 2 décembre 2004,
l’association Phares
en partenariat avec
l’Institut Curie donnait
un concert au profit de
la recherche. Le produit
de la vente des places
ainsi que quelques dons,
soit plus de 5 400 euros,
ont été remis à l’Institut
Curie.
24 000 EUROS POUR
LA RECHERCHE
Le maire de Charentonle-Pont, Jean-Marie
Bretillon, et le maireadjoint, Christiane
Mayer, ont remis à l’Institut Curie 24 074 euros
le 7 janvier dernier. Fruit
d’une vente annuelle
d’objets réalisés par
les retraités, ce don
participera à l’achat d’un
automate pour assurer
avec performance les
quelque 50 000 analyses
sanguines annuelles.
GÉNÉROSITÉ :
VOTRE FONDATION
Le statut de fondation
offre à l’Institut Curie
une réactivité des financements et une diversité
des ressources privées.
En 2004, grâce aux
dons et aux legs, elles
devraient s’élever à plus
de 17 millions d’euros,
participant au budget
annuel de 155 millions
d’euros.
RÉTROSPECTIVE
, CLIN D’ŒIL
LE JARDIN DE MARIE CURIE
Les fenêtres du
laboratoire de Marie
Curie s’ouvrent sur un
petit jardin qu’elle a
composé elle-même, en
amoureuse de la nature.
On l’imagine
interrompant une
expérience pour
observer la floraison des
premières jonquilles.
ors de la construction de
son laboratoire à l’Institut
du Radium en 1911, Marie
Curie suit de près les travaux,
« dessinant des plans, discutant
avec l’architecte ! […] Quant au
jardin – le plus cher souci de notre
paysanne –, elle le compose avec
amour. Sourde aux bonnes raisons
de ceux qui veulent “économiser de
la place”, elle défend avec âpreté
chaque mètre du terrain qui sépare
les bâtiments. Elle choisit un à un
en connaisseur, les jeunes arbres,
et les fait mettre en terre sous ses
yeux, bien avant que les fondations
ne soient jetées. [...] Elle plante
elle-même les rosiers grimpants,
maniant la bêche, tassant la terre
avec ses mains au pied des murs
inachevés. Chaque jour, elle les
arrose. »1 Cette sensibilité pour la
nature, Marie Curie l’a partagée
avec Pierre dès leur rencontre. Ils
aimaient s’éloigner de la ville et
de leur travail pour de longues
« promenades à pied ou à bicyclette, soit dans la campagne des
environs de Paris, soit au bord de
la mer ou en montagne […]. Ces
journées de grand air et de belles
visions nous laissaient des impressions profondes que nous aimions
évoquer par la suite », écrit-elle2.
« La forêt de Compiègne nous a
L
ACJC
,TÉMOIGNAGE
r
Gilles aurait eu 50 ans
le 19 novembre 2004.
Atteint d’un cancer,
il s’est éteint quelques
mois auparavant. Sa
femme et le restaurant
Nomad, dont il était
le gérant, lui ont rendu
hommage au cours
d’un dîner au profit de la
recherche sur le cancer.
Ce soir-là, 90 invités
se sont mobilisés offrant
la somme de 4 000 euros
à l’Institut.
h
INITIATIVES
Marie Curie appréciait
la nature et était très
attachée aux jardins. Elle
inaugure ici l’Institut du
radium de Varsovie (1932).
charmés au printemps, par sa tendre verdure et ses tapis, à perte de
vue, de pervenches et d’anémones;
à la lisière de la forêt de Fontainebleau, les bords du Loing, chargés
de renoncules d’eau, étaient pour
Pierre Curie un objet de ravissement. Et nous aimions la mélancolie des côtes de la Bretagne et
l’étendue des landes de bruyères
et d’ajoncs… » À la mort accidentelle en avril 1906 de son mari,
compagnon de vie comme du
AU MUSÉE CURIE
h Chaque 2
e
mercredi du mois à 15 h, le musée Curie propose
une conférence ou une visite.
• 9 mars : Marie Curie sous le regard de la fille de son chauffeur.
• 13 avril : Le Jardin de Marie Curie (cf. l’article ci-contre)
• 11 mai : La saga des Nobel : la tribu Curie (documentaire de
C. Glowacki, 1997, durée 27 min) suivie d’une visite commentée
du bureau et du laboratoire de Marie Curie.
h Expo-photo du 18 mars à mi-juin sur les grilles, à l’angle des rues
d’Ulm et P. et M. Curie, Paris 5e.
Renseignements : 01 42 34 67 49
travail, Marie Curie tient pendant
près d’un an un journal intime
dans lequel elle exprime toute sa
souffrance : « 7 mai 1906. Mon
Pierre (…). Depuis deux jours, j’ai
vu que les arbres ont des feuilles
et que le jardin est beau. J’ai pensé
(…) que tu m’aurais appelée pour
me montrer les pervenches et les
narcisses en fleurs. 14 mai 1906.
Mon petit Pierre, je voudrais te dire
que les faux ébéniers sont en
fleurs, les glycines, les aubépines,
les iris commencent, tu aurais
aimé voir tout cela… » À travers
ses lettres fictives adressées à
« son » Pierre, on entrevoit à quel
point le contact des fleurs et des
plantes était toujours pour elle
une source de réconfort.
Marité Amrani et Nathalie Huchette,
musée Curie
1. Madame Curie. Eve Curie. Éd. Poche
(1981).
2. Pierre Curie. Marie Curie. Coll. Opus,
Éd. Odile Jacob (1996).
LE JOURNAL DE
L’INSTITUT CURIE
, 19