Développement de CVT chez LuK
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Développement de CVT chez LuK
Développement de CVT chez LuK Dr.-Ing. Hartmut Faust Dr.-Ing. André Linnenbrügger Introduction Lors du précédent colloque organisé par LuK en 1994, nous avons présenté, dans le cadre d’une comparaison entre différents systèmes de boîtes de vitesses, une boîte à variation continue (“CVT” = continuously variable transmission), dont nous rappellerons ici les principaux avantages: • un surcroit de confort de conduite du fait que les changements de rapports s’effectuent sans à-coups. • une économie de carburant due à une plus grande ouverture de la boîte. • une excellente dynamique de roulage. Malgré ces avantages, qui se font particulièrement sentir sur les véhicules relativement puissants, les CVT ne sont commercialisées à l’heure actuelle que pour des couples moteur de 150 Nm [2] au plus, ou encore 200 Nm [3], comme c’est le cas depuis peu au Japon. Depuis, LuK a entrepris le développement et la mise au point de composants pour CVT fonctionnant sur le principe de l‘enroulement pour des couples moteur de 300 Nm et au-delà. Ces composants, actuellement développés pour la série, présentent certaines particularités que nous nous proposons de vous exposer ici. 163 Fonctions de la commande hydraulique La figure 1 présente les fonctions comparées de la commande hydraulique pour une boîte automatique à 5 rapports étagés d’une part, et pour la CVT d’autre part. Pour l’un comme pour l’autre des deux modèles, le système hydraulique a pour fonction de piloter les modes de roulage marche avant et marche arrière. Dans le cas de la boîte automatique à 5 rapports étagés, il faut en plus assurer le passage des différents rapports, ce qui nécessite, selon les modèles, environ six électrovannes supplémentaires et une vingtaine de tiroirs de commande. Dans le cas de la CVT, il suffit d’ajuster l’effort de la pression entre les poulies côniques et la chaîne de transmission d’une part, et la démultiplication du variateur d’autre part. Pour le concept présenté ici, trois électrovalves et neuf tiroirs de commande suffisent. boîte automatique à 5 rapports CVT couplage couplage inverseur inverseur 1. rapport niveau de pression 2. rapport contrôleur de démultiplication 3. rapport 4. rapport 5. rapport ~ 6 electrovannes ~ 20 tiroirs Figure 1: LuK CVT: 3 electrovannes 9 tiroirs Fonctions comparées de la commande hydraulique pour boîte automatique à 5 rapports étagés et pour CVT La CVT permet ainsi, dans le cadre du concept d’ensemble exposé ciaprès, la réalisation d’une commande hydraulique compacte. Un capteur de couple à double caractéristique, disposé directement dans le flux d’effort du variateur, assure un ajustement extrêment précis et très efficace du niveau de pression et garantit par là-même un fonctionnement parfait du système. 164 LuK assure aussi bien le développement que la fabrication de la commande hydraulique. Spécifications du système de pression Le niveau de pression nécessaire au bon fonctionnement du système subit l’influence d’une série de paramètres agissant sur l’ensemble de la chaîne cinématique, depuis le moteur jusqu’aux roues (cf figure 2): • Le couple-moteur est à prendre en compte, du fait qu’il dépend du conducteur d’une part et de la gestion électronique d’autre part. • Du fait d’une augmentation de puissance au niveau du convertisseur, du contrôle de couple de l’embrayage — éventuellement de l’embrayage de pontage (“lock-up”) —, des couples supplémentaires agissent sur le système. • La démultiplication est également à prendre en compte, car le cas de figure est différent selon que le train de poulies primaire transmet un couple en “underdrive” (UD), donc à faible rayon d’appui, ou en "overdrive” (OD), à rayon d’appui plus important. • Le niveau de pression nécessaire est fonction du plus faible coefficient de frottement observé. • Les roues exercent sur le couple transmis par le variateur des effets qu’il convient de considérer comme critiques, du fait qu’ils agissent de façon imprévisible et par à-coups; c’est le cas, par exemple, quand une roue rebondit sur un obstacle ou lorsque le véhicule passe d’une chaussée verglassée à un révêtement très adhérent. On peut limiter l’impact de ces effets par le biais d’un contrôle adéquat du couple d’embrayage. 165 coefficient de friction TE poulies 1 chaîne moteur TW poulies 2 roue couple moteur Figure 2: contrôle de couple et de pontage démultiplication couple dynamique de la roue Paramètres influents sur le niveau de pression nécessaire au variateur 125 iVar = 2,5 effort de pression F [%] 100 75 1,0 50 0,4 25 0 0 25 50 couple T1 [%] 75 100 Figure 3a: Pression minimale requise pour différentes démultiplications en fonction du couple 166 Pour un coefficient de frottement donné, le niveau de pression requis suit la progression linéaire du couple. La figure 3a illustre cette relation pour différentes démultiplications. A partir de cette valeur limite avant patinage, on détermine à pleine charge, ainsi qu’on peut le voir figure 3b dans le cas d’une transmission underdrive, une marge de sécurité d’environ 25 % pour pallier à d’éventuelles variations du coefficient de frottement. On évite ainsi le patinage de l’embrayage. Sur les systèmes conventionnels, cette marge de sécurité est maintenue intégralement et en permanence, y compris lorsque le couple est plus faible [2]. En effet, l’impact d’à-coups éventuels et imprévisibles étant indépendant du couple exercé sur le système à un moment donné, les sytèmes qui ne disposent pas de pompe automatique ajustant le niveau de pression avec une grande efficacité requièrent une marge de sécurité constante. Il s’ensuit que pour un quart du couple nominal, par exemple, l’excès de pression, rapporté au couple exercé sur le système, augmente de 100 %. On imagine aisément les effets négatifs que cela peut avoir sur le rendement du variateur et, du fait d’une pression inutilement élevée à l’intérieur du système, les pertes qu’il en résulte au niveau de la pompe, avec pour conséquence des consommations relativement importantes à faible charge. 125 avec marge constante pour les surcouples effort de pression F [%] 100 avec coefficient de sécurité constant iVar = 2.5 75 système conventionnel valeur limite avant patinage 50 25 capteur de couple 0 0 25 50 75 100 couple T1 [%] Figure 3b: Profils comparés de la pression rapportée au couple, pour un système conventionnel avec marge constant et pour un système doté d’un capteur de couple hydro-mécanique à coefficient de sécurité constant 167 Le système LuK par contre, grâce à son capteur de couple hydromécanique, constitue une solution efficace du fait qu’il présente un coefficient de sécurité constant, qui permet de réduire la surpression, en termes de niveau absolu, lorsque le couple diminue. Il enregistre pratiquement immédiatement le couple qui s’excerce sur le variateur et peut, dans le cas d’à-coups provenant du groupe motopropulseur (GPM) ou transmis par l’arbre de sortie de boîte, agir comme une pompe, sans qu’il soit besoin de faire intervenir d’autres modules de régulation. Un tel système permet également, du fait qu’il évite un excès de pression, d’obtenir un bon rendement de la boîte de vitesses à faible charge, lequel a des conséquences non négligeables sur la consommation du véhicule. La figure 4a propose une représentation analogique du niveau de pression minimal requis rapporté à la démultiplication du variateur, et ce pour des couples différents. Le profil de la courbe est hyperbolique. 125 capteur de couple à simple caractéristique effort de pression F [% ] 100 75 T1: 100 % 50 25 T1: 25 % 0 2,5 1 démultiplication i 0,4 Figure 4a: Possibilités de niveaux de pression pour différents couples en fonction de la démultiplication du variateur, dans le cas d’un capteur de couple à mono-caractéristique Une caractéristique de l’effort de pression à profil constant constitue en fait un inconvénient, en ce sens que les phases de conduite les plus fréquentes et les plus importantes s’effectuent en “overdrive”. La figure 4b 168 utilisation t [% ] fait apparaître les phases de conduite telles qu’on a pu les observer lors de trajets prolongés sur route et autoroute, sur un véhicule équipé de la boîte CVT, pour un couple d’environ 300 Nm. 60 route et autoroute 40 20 0 2.5 1 démultiplication i 0.4 Figure 4b: Phases de conduite mesurées sur route et autoroute pour un véhicule équipé de la boîte CVT L’ajustement du niveau de pression s’effectue de façon satisfaisante si, tenant compte de la répartition des phases de conduite, on utilise un capteur à double caractéristique, commutable d’un niveau à l’autre, ainsi que le montre la figure 4c. Les phases de conduite en “underdrive”, où s’observent des temps de surpression, sont très nettement minoritaires. Les simulations effectuées chez LuK ont montré que le strict ajustement de la pression au niveau théorique requis ne ferait pas gagner plus de 0,3 %, en termes de consommation de carburant, par rapport à ce qu’on peut obtenir en utilisant ce capteur à double caractéristique, par ailleurs facilement réalisable. 169 utilisation t [% ] 60 route et autoroute 40 20 0 2,5 CUD 1 0,4 effort de pression F [% ] 125 100 capteur de couple à double caractéristiques COD 75 T1: 100 % 50 CUD COD 25 T1: 25 % 0 2,5 1 démultiplication i 0,4 Figure 4c: En haut: Histogramme de conduite. En bas: Niveau de pression obtenu par un capteur de couple à double caractéristique Capteur de couple hydro-mécanique à double caractéristique Dans le chapitre qui précède, nous vous avons exposé les considérations qui nous ont amené à développer le capteur de couple à double caractéristique. La figure 5 présente le principe de base du capteur de couple hydro-mécanique à mono-caractéristique, tel qu’on le connaît déjà [4]. Le couple est transmis au système par un plateau à rampes, lequel transmet à son tour le flux d’effort, par l’intermédiaire de billes, à un pistoncapteur qui se déplace axialement et s’oppose à la pression exercée par l’huile. L’huile expulsée par la pompe passe par une canalisation de dérivation de flux dont la résistance à l’écoulement se modifie, par translation du piston-capteur, jusqu’à ce que l’équilibre soit atteint entre l’effort axial des rampes à billes et la force de pression. La pression transmise au cylindre de pression est ainsi strictement ajustée par le capteur en fonction du couple s’exerçant sur le système à un moment donné. En cas d’un pic de couple intempestif, l’extrémité du capteur mobile ferme la canalisation de dérivation et empêche l’huile de s’écouler. Si le couple 170 continue à s’élever, le piston-capteur chasse l’huile accumulée dans la chambre du cylindre et la transmet aux trains de poulies, ceci afin d’augmenter le niveau de pression. En d’autres termes, le capteur joue un court instant un rôle de pompe. Cette “pompe de réserve” qui intervient en cas de besoin et ne demande aucune puissance, peut fournir, dans le cas de pics de couples, plus de 30 L/min en flux d’alimentation. p T Figure 5: F Principe de fonctionnement du capteur hydro-mécanique à mono-caractéristique On obtient une caractéristique à deux niveaux en divisant en deux parties la surface d’appui du piston-capteur (figure 6). En mode “underdrive”, où la transmission du couple, étant donné le faible rayon d’action de la chaîne, requiert un niveau de pression élevé, la pression ne s’exerce que sur une partie de la surface de l’extrémité du piston. En fonction de l’effort transmis aux rampes par le couple, la pression s’élève dans le capteur de couple et du même coup dans le cylindre de pression, rééquilibrant ainsi les forces en présence. En mode “overdrive”, c’est à dire au-delà du point de commutation, la pression s’exerce sur toute la surface. A couple égal, le niveau de pression diminue. La commutation de la caractéristique d’un niveau à l’autre par exercice de la pression sur tout ou partie de la surface du capteur obéit directement à la translation axiale des poulies côniques mobiles du train de poulies primaire, 171 laquelle répond au changement de démultiplication. En mode “underdrive”, ainsi que le montre le croquis, la seconde moitié de la surface de l’extrémité du piston-capteur est soumise à la pression ambiante transmise par l’orifice de droite. En “overdrive”, cet orifice est fermé par la poulie cônique mobile et l’huile de compression pénètre par l’orifice de gauche. UD OD Figure 6: Principe de fonctionnement du capteur de couple à double caractéristique, en mode “underdrive” (forte pression) et en mode “overdrive” (faible pression) Spécifications du système d’ajustement Il s’agit maintenant de déterminer les quantités d’huile nécessaires à un ajustement rapide de la démultiplication du variateur. La figure 7 montre l’importance des flux nécessaires à l’alimentation des cylindres de trains de poulies pour un ajustement rapide en mode “underdrive”. Cette situation peut se présenter en cas de freinage brusque, lorsqu’il faut passer en “underdrive” immédiatement après l’arrêt du véhicule, ou bien en mode d’accélération “Kick-Down” ou lors d’une succession rapide de changements de rapports (à la volée). On voit sur le croquis les quantités respectivement nécessaires pour un temps de réaction donné du système, le tout étant fonction de la vitesse initiale et donc du temps de freinage du véhicule. Dans le cas de figure 172 présenté ici, et pour une vitesse de 25 km/h environ, l’ajustement rapide requiert des afflux d’huile supérieurs à 13 L/min pour un système équipé d’un variateur classique. Dans le cas du système LuK à double-piston, le volume d’huile nécessaire au fonctionnement du cylindre d’ajustement est réduit à un tiers environ. Ceci tient au fait que la pompe, lors de l’ajustement du variateur, n’agit que sur une partie de la surface de pression du cylindre, en fait sur celle du cylindre d’ajustement. débit volumique QVar [L/min] 15 a = 8 m/s2 T = 0,2 s système conventionnel 12 9 système LuK à double piston 6 3 0 0 10 20 30 40 50 60 vitesse v [km/h] Figure 7: Débit volumique nécessaire aux cylindres de trains de poulies pour un ajustement rapide en “underdrive” dans le cas d’un système conventionnel et pour le système LuK à double-piston Système LuK à double piston avec capteur de couple à double caractéristique Sur les systèmes conventionnels, on trouve un cylindre de pression au niveau de chacun des trains de poulies respectivement situés en entrée et en sortie de système (cf figure 8 à gauche). L’huile expulsée par la pompe passe dans une unité de contrôle qui transmet aux deux cylindres le niveau de pression nécessaire. Ceux-ci réalisent la synthèse de deux fonctions dans la mesure où ils ajustent la démultiplication en même temps qu’ils exercent la pression requise. La surface de l’extrémité du cylindre est fréquemment plus importante que celle du cylindre secondaire. Ceci tient 173 principalement au fait que, souvent, les modèles de systèmes hydrauliques pour CVT n’offrent pas la possibilité d’exercer une pression plus forte sur le cylindre primaire que sur le cylindre secondaire. Pour un passage rapide en mode “underdrive”, la pompe doit fournir un volume d’huile important devant exercer une pression sur la surface totale de l’extrémité du cylindre secondaire. Dans le même temps, l’huile de pression provenant du train de poulies primaire est évacuée dans le carter, ce qui signifie une perte d`énergie. Par analogie, ceci vaut également pour le passage en mode “overdrive”. Si bien que les besoins en dynamique nécessitent une pompe de grande capacité, donc consommatrice d’énergie. contrôle de pression niveau de pression & passage système conventionnel Figure 8: 174 passage système LuK à double piston Principe de fonctionnement du système hydraulique de la CVT, et comparaison volumétrique des flux d’huile nécessaires à un passage rapide en mode “underdrive” pour un système conventionnel (à gauche) et le système LuK à double piston (à droite) Dans le cas du système LuK à double piston, les surfaces des cylindres sont divisées: • en sous-surfaces (zones rouges sur le croquis), qui assurent le niveau de pression. • en sous-surfaces, isolées des autres, (bleues ou vertes sur le croquis), par l’intermédiaire desquelles s’opère l’ajustement. Le niveau de pression est assuré par le capteur de couple à double caractéristique précédemment décrit, lequel ajuste sur deux niveaux la pression dans les cylindres en stricte proportion du couple transmis par le système, et ce en fonction de la démultiplication du variateur. L’ajustement des trains de poulies ne nécessite qu’un faible volume d’huile, qui suffit pour agir sur la surface relativement réduite de l’extrémité des cylindres d’ajustement. Lors de l’ajustement du variateur, sous niveau de pression élevé, l’huile destinée à la pression passe directement d’un train de poulies à l’autre, sans qu’un apport supplémentaire d’énergie ne soit nécessaire. Aussi le système LuK à double piston permet-il de concevoir des pompes nettement plus petites que pour les systèmes conventionnels avec CVT, ce qui représente une amélioration substantielle en termes de consommation et de rendement du GPM. L´idée de base de ce concept de dépense d´énergie lors du changement de démultiplication est schématisée par la figure 9. Avec un système conventionnel, l´huile sous pression contenue dans la poulie est transférée dans le carter. Pour le remplissage de l´autre poulie, une dépense d´énergie supplémentaire est nécessaire pour amener l´huile contenue dans le carter de la pression atmosphérique à une haute pression ou à un haut niveau d´énergie. Avec le principe du double piston LuK, l´huile à haute pression est directement déplacée d´une poulie à l´autre, sans passage par le carter, donc sans dépense d´énergie supplémentaire. 175 système conventionnel h F F h=0 système LuK à double piston Figure 9: Comparatif de l’apport d’énergie pour l’ajustement du variateur avec système conventionnel (en haut) et système LuK à double piston (en bas) La figure 10 présente l’application pratique des principes de double piston et de capteur de couple à double caractéristique au niveau des trains de poulies, et ce en mode “underdrive (en haut) et “overdrive” (en bas). L’huile destinée à la pression, représentée en rouge, est fournie par la pompe, afflue dans la chambre du capteur de couple et s’écoule vers la gauche à pression faible après l’arête de débordement. Le niveau de pression, tel qu’il est ajusté par le capteur afin de rétablir l’équilibre des forces, agit directement sur le cylindre de pression des trains de poulies primaire, et du même coup sur celui du train de poulies secondaire, non représenté sur le croquis. La seconde chambre du capteur de couple (en bleu), disposée radialement vers l’extérieur, est mise à l‘air par l’orifice de droite et de ce fait n’est soumise à aucune pression. Le support de la poulie mobile ferme l’orifice de gauche, empêchant ainsi l’huile de passer. Nous avons représenté en vert le parcours effectué par l’huile jusqu’au cylindre d’ajustement primaire, en position radiale externe. La somme des efforts s’exerçant dans le sens de l’axe se compose de la force du cylindre de pression à laquelle s’ajoute celle du cylindre d’ajustement. La pression exercée sur ce dernier doit lui permettre non seulement d’ajuster la pression, mais aussi, en raison du rapport des forces s’exerçant au niveau 176 des trains de poulies primaire et secondaire, de maintenir la démultiplication. Ainsi, pour générer l’effort axial, on utilise toute la surface disponible selon la taille du train de poulies. UD OD Figure 10: Réalisation du train de poulies primaire dans le système LuK à double piston et capteur hydro-mécanique à double caractéristique En mode “overdrive”, qui nécessite moins de pression, la poulie mobile s’est rapprochée de la poulie fixe (en bas sur le croquis), obturant l’orifice de ventilation à droite et libérant du même coup à gauche la canalisation d’accès au cylindre de pression, de sorte que grâce à ce système d’ouvertures l’huile de pression afflue également dans la seconde chambre du capteur de couple. La surface soumise à pression ayant augmenté, le 177 capteur de couple exerce une pression plus faible, et ce sans que le couple transmis au système ait varié en quoi que ce soit. L’action exercée sur le cylindre d’ajustement reste également la même que précédemment (en haut sur le croquis). Les plateaux à rampes du capteur de couple sont réalisés à partir de tôles embouties, les dentures droites, quant a elles, sont obtenues par la méthode dite de refoulage. La figure 11 présente les profils des couples, niveaux de pressions et régimes des roues tels qu’ils apparaissent lorsque le véhicule équipé du système précédemment décrit démarre sur un revêtement partiellement verglassé et passe ensuite sur un revêtement très adhérent. régimes des roues n couple T niveau de pression p La seconde partie du croquis, en bas, montre clairement que la vitesse de rotation de la roue motrice de droite augmente progressivement avec la vitesse de roulage, tandis que la roue gauche patine de plus en plus vite. Après le passage sur le revêtement adhérent, cette dernière, qui présente un gradient élevé, est retardée. La roue droite accélère alors davantage, conjointement à la vitesse même du véhicule. Au sortir de cette phase de glissement, l’accélération des deux roues s’effectue en synchronisation avec celle du véhicule. couple moteur niveau de pression gauche couple du variateur gauche & droite droite verglassée adhérente temps t Figure 11: Profil du couple et du niveau de pression lors d’un roulage sur revêtement partiellement verglassé suivi d’un passage sur revêtement adhérent 178 La partie supérieure du croquis montre les profils des couples et du niveau de pression tel qu’il est déterminé par le capteur de couple. Le couple interne du moteur reste pratiquement constant lors du décollage. Cela étant, pendant toute la phase de roulage sur verglas, il sert principalement à l’accélération des masses tournantes. Durant cette première phase, le couple du variateur reste donc relativement faible. Lors de la phase de glissement qui correspond au passage sur le revêtement adhérent, le couple du variateur s’élève brutalement pour atteindre un niveau nettement supérieur à celui du couple moteur, et ce aussi longtemps que les inerties de masses, du fait du ralentissement important de toute la chaîne cinématique, moteur compris, induisent des couples dynamiques supplémentaires. Ce n’est que lors de la phase suivante, en mode normal d’accélération, que le couple moteur et le couple variateur redeviennent quasiment identiques. Le capteur de couple enregistrant directement le couple transmis au variateur, le niveau de pression qu’il détermine suit de façon analogique le couple du variateur, aussi bien en statique qu’en dynamique. L’excellente dynamique du système et l’action momentanée du capteur faisant un court instant office de pompe, garantit un ajustement très efficace du niveau de pression à celui du couple s’exerçant à un instant T sur le mécanisme. Un autre avantage du capteur de couple réside dans la haute précision avec laquelle le couple transmis à un instant T est converti en niveau de pression, seules les données géométriques du capteur étant prises en compte pour la conversion. C’est ce qui permet d’obtenir même à faible charge, alors que les couples générés par la régulation-moteur sont relativement aléatoires, un ajustement précis du niveau de pression, proche de la valeur minimale. La CVT et son principe de fonctionnement par chaîne Se basant sur le modèle de la chaîne articulée à éléments d’appuis du type “rocker pin” telle qu’elle a été conçue par la Société P.I.V. Antrieb Werner Reimers, LuK a entrepris de poursuivre le développement du système de fonctionnement CVT par chaîne, dans le but de l’appliquer au domaine de l’automobile. Il s’agissait avant tout de renforcer la tenue mécanique pour passer des couples importants et d’en optimiser le comportement acoustique. La figure 12 présente la chaîne CVT telle qu’elle est conçue pour des couples-moteur allant jusqu’à 300 Nm. Elle se compose de mailles de tailles différentes, qui constituent la chaîne proprement dite, d’axes d’articulations et d‘appuis. 179 mailles courtes axes d'articulations face d'appui longues Figure 12: Construction et composants de la chaîne pour CVT, d’après le concept LuK-P. I. V. La chaîne pour CVT présente les particularités suivantes: • Elle permet d’abaisser la consommation et d’obtenir une excellente dynamique de roulage. Ceci tient au fait que, grâce au système d’articulation des éléments de chaîne, on peut réduire le parcours de ces derniers sur les poulies côniques et étendre ainsi l’ouverture de la boîte. • Elle permet de transmettre des couples élevés. Des mailles de taille plus importante en bordure extérieure de la chaîne répartissent l’effort de façon homogène. • La dynamique de basculement des maillons minimise les pertes internes par frottement et garantit un bon rendement de la boîte de vitesses. • Grâce à la surface frontale bombée des axes d’articulation, la chaîne est insensible au désaxage. En la combinant à des poulies côniques à face convexe, on réduit l’importance de la composante supplémentaire que constitue le désaxage, inévitable au moment où s’effectue l’ajustement. De plus, la chaîne-CVT est insensible aux déformations des trains de poulies sous charges, aux défauts angulaires et aux rotations relatives intervenant entre la poulie fixe et la poulie mobile. Elle ne nécessite donc pas l’utilisation de poulies côniques à déplacement axial sur roulement. 180 • L’utilisation de la chaîne CVT minimise les forces axiales s’exerçant au niveau du train de poulies primaire, si bien que pour des surfaces de cylindres données, on peut se contenter d’une pression hydraulique relativement faible, ce qui améliore encore le rendement de la boîte de vitesses. • Les mailles de la chaîne proprement dite sont disposées par trois, ce qui permet de réaliser un pas de chaîne très court. Quand le maillon est court, il n’est séparé de l’articulation voisine que par une seule anse. En utilisant une seconde longueur de maille, et en optimisant par calcul la répartition des mailles courtes et longues, on peut obtenir un comportement acoustique acceptable du mécanisme. Calcul de la résistance en mode de fonctionnement et conception de la chaîne CVT Le calcul de la durée de vie d’une chaîne CVT comprend quatre phases schématisées ci-dessous figure13. . . . . . . . E . F iV . . a r 1 c la s s ific a tio n . . e x ig e n c e s c lie n t p o u r u n v é h ic u le C V T F 1 3 F 2 c a lc u l d e s te n s io n s d e la c h a în e 2 4 1 A n E s a/ s T t 1 0 c a lc u l d e s c o n tr a in te s 6 lo g N c a lc u l d e la d u r é e d e v ie Figure 13: Analyse des efforts subis et calcul de la durée de vie d’une chaîne CVT, sur la base d’un ensemble de données recueillies chez nos clients 181 (1) Classification des données concernant les efforts subis Dans un cas de figure idéal, le client fournit un ensemble d´exigences qui tient lieu de cahier des charges. Losqu’il s’agit de déterminer les efforts imposés au variateur, il faut tenir compte, en plus des caractéristiques du moteur et du profil du parcours choisi pour les essais, du poids total autorisé, du type de système d’entraînement, de même que, entre autres, du châssis et des pneus du véhicule. A partir des profils temporels du couple et du régime du moteur d’une part, et de ceux de la démultiplication du variateur d’autre part, on classe ces paramètres en différentes catégories en vue de calculer la capacité d’endurance du système. On obtient ainsi plusieurs centaines de situations de conduite correspondant chacune à un certain pourcentage du temps global de conduite effectué lors des tests. (2) Calcul des efforts de la chaîne Pour chaque type de fonctionnement, on mesure et calcule les efforts exercés sur le brin de la chaîne, en tirage et en roue libre. Ce calcul basé sur la théorie de Dittrich [5, 6] intègre, en plus des forces périphériques provenant de la transmission du couple, les forces s’exerçant axialement sur les deux trains de poulies. (3) Détermination des contraintes imposées aux différents éléments Sur la base des efforts de tirage de la chaîne tels qu’ils ont été calculés, on établit au moyen de procédés de calcul appropriés la part de contrainte imposée à chaque élément du système pour chacune des situations recensées à partir des tests clientèle. Ceci concerne aussi bien la répartition des efforts au sein de la chaîne elle-même que la répartition de la tension dans les mailles et les axes d’articulation. (4) Calcul de la résistance de la chaîne à la fatigue Se fondant sur des hypothèses d´accumulation de fatigue, on procède à un calcul de durée de vie des éléments de la chaîne à l’aide de courbes de Wöhler matières ou composants établies expérimentalement. La fatigue globale telle qu’on a pu la déterminer à partir de l’ensemble des donnés recueillies, renseigne sur les conditions de mise en oeuvre du principe de construction de la chaîne, base de l’ensemble du système. 182 Répartition des charges dans la chaîne CVT La figure 14 montre la répartition des charges dans la chaîne pour un mode de transmission “underdrive” et un couple moteur en plein développement. Figure 14: Répartition inégale de l’effort sur les mailles de la chaîne CVT pour un mode de transmission “underdrive” et un couple-moteur maximal, avec prise en compte de l’influence des déformations subies par les axes d’articulation Ainsi que le montre l’agrandissement sur la figure 14, les forces de pression, l’effort de tirage de la chaîne, ainsi que les forces de frottement induites entraînent une déformation des axes d’articulation. La flexion sollicite d’une part les axes et entraîne d’autre part une répartition inégale de l’effort sur les mailles, illustrée ici par les différents tons de couleurs. L’utilisation de mailles de tailles différentes constitue une innovation importante et un progrès substantiel en comparaison des performances obtenues par d’autres modèles connus. Les différents éléments euxmêmes ont été optimisés dans le sens de la tension au moyen d’un calcul à éléments finis. La somme de toutes les améliorations apportées suite à l’étude des données recueillies en tests clientèle ont permis de doubler la durée de vie de la chaîne sans en modifier les principales dimensions. 183 Optimisation acoustique Nous avons accordé une importance particulière à l’optimisation du comportement acoustique de la chaîne CVT. En utilisant des mailles de longueurs différentes et en les combinant de façon adéquate dans la chaîne, on peut considérablement réduire le son monocorde persistant, pénible à l’oreille. Pour chaque cas d’application, on optimise par calcul la répartition des différentes longueurs de mailles, aussi bien en termes de proportions que de positionnement des unes par rapport aux autres. La figure 15, qui présente des mesures effectuées à l’intérieur d’un véhicule au moyen d’une tête acoustique, illustre le succès d’une optimisation de ce type, assistée par ordinateur. Après avoir déterminé des caractéristiques particulières pour le module de commande de boîte dans le but d’obtenir un régime moteur constant, on a effectué des parcours en accélération de 30 à 80 km/h environ. Cette méthode permet de bien identifier et d’opérer une discrimination claire entre les différentes sources de bruit. • Lignes horizontales: groupe motopropulseur (GPM) • Lignes diagonales: roues, essieus, arbre de sortie de boîte • Lignes courbes: engrènement de la chaîne du variateur 184 a n a ly s e a c o u s tiq u e é ta t in itia l a p r è s o p tim is a tio n Figure 15: Comportement acoustique de la chaîne CVT: Optimisation par calculs en simulation et détermination préalable de la répartition des mailles courtes et longues dans la chaîne Sur la partie gauche de la figure, les lignes courbes correspondent à des crêtes de niveau, lesquelles sont provoquées par l’engrènement de la chaîne CVT dans les trains de poulies. Le bruit ainsi produit est désagréable. Après optimisation des proportions respectives et de la répartition des longueurs de mailles dans la chaîne, le son monocorde persistant a pratiquement disparu (figure 15 à droite). On a pu ainsi obtenir un bon comportement acoustique de la chaîne. Les paliers des trains de poulies, la construction du carter de même que tous les ponts phoniques sont autant d’autres facteurs importants influant sur le comportement acoustique général du système CVT, et constituent de ce fait un potentiel d’optimisation supplémentaire. 185 Résumé LuK a développé des composants CVT pour des couples de plus de 300 Nm. En voici les principales caractéristiques: • Ajustement précis du niveau minimal de pression permettant de garantir une bonne transmission du couple et des rendements élevés; on utilise à cette fin un capteur de couple hydro-mécanique à double caractéristique, qui enregistre avec une extrême précision le couple s’exerçant à l’instant T sur le variateur et qui, faisant très brièvement fonction de pompe, ajuste la pression avec une grande efficacité. • Une excellente dynamique d’ajustement pour une pompe de faible puissance, du fait que l’huile, soumise à une pression élevée lors de l’ajustement, passe directement d’un train de poulie dans l’autre; ceci grâce au système à double piston de LuK comportant deux cylindres distincts respectivement chargés d’assurer la pression et l’ajustement. • Une grande ouverture, une construction robuste, un bon rendement et un comportement acoustique optimisé du mécanisme de transmission; ceci grâce à la chaîne CVT conçue par le biais de simulations et réalisée pour des couples de plus de 300 Nm. 186 Documentation [1] Jürgens, G.: Vergleich von Getriebesystemen. [Comparaison entre différents systèmes de boîtes de vitesses], 5ème Colloque LuK, Bühl, 27 mai 1994, p. 145 à 173. [2] Fuchino, M.; Ohsono, K.: Development of Fully Electronic Control Metal Belt CVT. International Conference on Continuously Variable Power Transmissions CVT ‘96, 11.12. September 1996, Yokohama/Japan, p. 23 - 32. [3] Kurosawa, M.; Fujikawa, T.: High Torque Belt CVT with Torque Converter. Symposium Steuerungssysteme für den Antriebsstrang von Kraftfahrzeugen [Symposium sur les systèmes de commande pour chaînes cinématiques de véhicules], 18 & 19 septembre 1997, Berlin, p. 1 à 12. [4] Rattunde, M.; Schönnenbeck, G.; Wagner, P.: Bauelemente stufenloser Kettenwandler und deren Enfluß auf den Wirkungsgrad [Les éléments de convertisseurs à chaîne à variation continue et leur influence sur le rendement du système], Publications VDI 878 (1991), p. 259 à 275. [5] Dittrich, O.: Theorie des Umschlingungstriebes mit keilförmigen Reibscheibenflanken [Théorie du principe de transmission par chaîne avec disques de friction à flancs côniques], Thèse de doctorat présentée à la Technische Hochschule de Karlsruhe, 1953. [6] Dittrich, O.: Anwendung der Theorie des keilförmigen Umschlingungstriebes auf stufenlose Getriebe [Le principe de transmission par chaîne avec poulies côniques appliqué aux boîtes automatiques à variation continue], Bad Homburg, 1992. 187