So much more Loïs Le Van

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So much more Loïs Le Van
Jazz
So much more
Loïs Le Van
On aime beaucoup fff
Patricia Barber, entendant Loïs Le Van lors d'un concours, a eu ce mot de musicienne : «
Voilà celui qui manquait au monde des vocalistes masculins, il peut vous briser le coeur. » Ce
jeune homme de 28 ans évoque irrésistiblement Chet Baker : douceur insidieuse d'une voix à
la fois sensuelle et froide. Une voix que l'on dirait intérieure, qui se fait à elle-même une
confidence improbable, comme détachée des pesantes réalités du monde. Le Van a eu pour
professeur le chanteur belge David Linx, qui, lui aussi, refuse les trémolos. So much more
crée l'émotion par la sobriété, l'intelligence des paroles, une façon de s'avancer sur le tempo
comme un chat. Le disque propose ainsi une aventure dans le minimalisme : pas de batterie,
un piano, une contrebasse, un saxophone ou une clarinette. Des compositions originales qui
s'insinuent entre chair et cuir, des arrangements lumineux dans le clair-obscur. La reprise
d'une chanson de Robert Wyatt, Alifib, est plus qu'un hommage ou une déclaration
d'allégeance, mais bien l'affirmation d'une parenté poétique. Poésie, le mot est lancé. Loïs Le
Van se fait du jazz une conception littéraire et risquée. Pas de standards, comme les creusait
Chet Baker en ouvrant des blessures de l'âme, mais des textes chantés le cœur ouvert et la
voix retenue au bord des sanglots. Il y avait longtemps qu'on n'avait pas entendu en jazz un
lyrisme aussi dénué de complaisance. Les compagnons musiciens du chanteur, Sylvain Rifflet
aux anches, Bruno Ruder au piano, Chris Jennings à la contrebasse, lui offrent une vraie
musique, inventive, surprenante, débarrassée de tout cliché. — Michel Contat
Michel Contat
Télérama n°3484 17/10/2016