La Liberté de Presse en Haïti - Institute for Justice and Democracy in

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La Liberté de Presse en Haïti - Institute for Justice and Democracy in
La Liberté de Presse en Haïti :
Un Effet Dissuasif sur les Journalistes Critiques du Gouvernement
Un des plus grands accomplissements en Haïti depuis le 7 février 1986, est d’abord
l’exercice de la liberté d’expression, la possibilité pour les hommes, les femmes, les
organisations et la société civile de dire sans crainte, ce qu’ils pensent, mais c’est aussi la
possibilité pour la presse de diffuser leurs paroles, et de le faire de manière objective…
[…] Il est de ce fait nécessaire de se battre quotidiennement pour préserver cette liberté.
Marie Laurence Jocelyn Lassègue, ancienne Ministre de la Culture de la Communication d’Haïti, lors de
la Journée Mondiale de la Liberté de la Presse en 2011 1
September 28, 2012
menaces de mort, n’obtiennent qu’un accès restreint à
l’information et aucun accès aux ministères ou au palais
national, se font poursuivre pour diffamation avec sanctions
criminelles, et finissent par voir leur licence révoquée en
plus de devoir faire face à un maigre salaire et un manque de
formation professionnelle. Ensemble, ces actes envoient aux
journalistes et aux acteurs de la société civile qui s’engagent
à enquêter sur les attaques, les abus, les irrégularités ou les
actes illicites, le message qu’ils pourraient aussi devenir la
cible de menaces ou de représailles.
La liberté d’opinion et d’expression est la pierre d’assise
de toute société libre et démocratique.2 Quinze mois
après l’investiture du président haïtien Michel Martelly
en mai 2011, suite à des élections controversées,3 des
journalistes en Haïti se sont plaints à maintes reprises de
mauvais traitement que les membres du gouvernement
leur auraient fait subir.4 Ce rapport analyse ces plaintes
à la lumière des libertés et des protections garanties aux
journalistes par le droit internationale et la Loi haïtienne.
Il est important de noter que les conditions d’exercice
du métier de journaliste sont meilleures que sous les
gouvernements issus de coups d’État entre 1991 et 1994
et entre 2004 et 2006, et que sous la dictature de François
et Jean-Claude Duvalier, de 1957 à 1986. Selon Reporters
Sans Frontières (RSF), Haïti se retrouve 56ème sur 179
pays dans son classement mondial de la liberté de presse
en 2011, soit neuf places après les États-Unis (47ème).5
Les journalistes interviewés ont généralement convenu que
le Président Martelly a amélioré l’accès à l’information
publique par rapport à son prédécesseur, le Président
René Préval, en accordant plus de conférences de presse
et en utilisant fréquemment les médias sociaux. Seule une
poignée de meurtres et d’enlèvements de journalistes ont été
signalés en Haïti depuis que le Président Martelly est entré
en fonction, et son gouvernement n’y a pas été impliqué.
Les journalistes décrivent une première tendance à
l’intimidation, aux menaces, aux arrestations, à la
destruction d’équipement, et aux actes de représailles
commis par le président Michel Martelly et son
administration contre des journalistes progressistes
qui les critiquent. Cette tendance contribue à créer
une atmosphère de crainte et a un effet dissuasif sur
la liberté d’expression des journalistes.
Une deuxième tendance à « l’obstruction » envers les
journalistes est également décrite. Des journalistes
critiques du gouvernement se sont vus refusé des
entrevues avec des membres du gouvernement ainsi
que l’accès à l’information publique.
Ces deux tendances atteignent aux droits des journalistes
selon la Loi haïtienne et le droit international relatifs à la
liberté d’expression et d’accès à l’information publique. Les
journalistes haïtiens qui produisent des rapports investigatifs
sont particulièrement visés. Souvent, ils reçoivent des
La Liberté de Presse en Haïti
Néanmoins, l’agressivité du Président Martelly envers les
journalistes depuis le début de sa présidence, s’ajoutant
aux menaces, à l’intimidation et aux agressions
1
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Méthodologie
provenant de sources anonymes, est troublante. La
liberté d’expression est un vecteur pour la participation
civique et le contrôle démocratique de la gestion
gouvernementale. Le manque de contrôle efficace
« donne lieu à un comportement qui va à l’encontre de
l’essence même d’un État démocratique et ouvre la porte
à des actes répréhensibles et des abus inacceptables. ».6
Des entrevues en personne ont été réalisées entre le 20 et
le 29 juin 2012, à Port-au-Prince par une délégation de
la faculté de droit de l’Université de San Francisco.7 Les
personnes interrogées étaient neuf journalistes étrangers
et haïtiens travaillant à Port-au-Prince ou en périphérie,
pour des journaux écrits ou en ligne ainsi que des stations
de radio nationales et locales. Chaque entrevue a duré
environ une heure.
La démocratie en Haïti est encore jeune et fragile. Les
Haïtiens ont pour la première fois exercé leur droit de
vote lors d’élections libres et équitables en 1990, mais ce
droit a leur à été arraché par les coups d’État de 1991 et
de 2004. Si le gouvernement haïtien souhaite vraiment le
renforcement de la démocratie, il faudra qu’il prenne des
mesures positives pour remédier aux violations continues
de la liberté d’expression et pour protéger les médias.
L’échantillon de l’enquête a été sélectionné parmi une
gamme d’agences de presse connues comme étant de
droite, centristes et de gauche afin de mesurer la corrélation
entre la liberté de la presse et les tendances politiques. Le
Président Martelly est considéré par de nombreux Haïtiens
comme étant de droite. On lui connait des liens avec la
famille du père et du fils François et Jean-Claude Duvalier,
anciens dictateurs de droite qui ont instauré un règne de
la terreur en Haïti de 1959 à 1986.8 Le Président actuel
s’est également positionné publiquement contre l’ancien
président Jean-Bertrand Aristide et son parti politique « de
gauche » Fanmi Lavalas.
Le rapport propose les recommandations suivantes pour
protéger la liberté d’expression et les journalistes:
1. Sous la direction du Ministère de la justice, les
forces de l’ordre et les procureurs doivent prévenir
et enquêter sur les cas de menaces et de violences
contre les journalistes, punir leurs auteurs et veiller
au dédommagement des victimes.
2. Les forces de l’ordre, les acteurs gouvernementaux
et le Bureau de la Présidence doivent s’abstenir
d’intimider ou menacer des journalistes, ainsi que de
détruire leur matériel de presse.
3. La loi haïtienne devrait être amendée pour éliminer
les peines de prison pour les cas de diffamation.
4. Tous les organismes publics doivent faire tout ce qui
est en leur pouvoir pour assurer un accès aisé, rapide,
efficace et pratique à l’information publique.
5. Le Palais National est prié de cesser d’exiger des
journalistes qu’ils répondent à des questionnaires
qui demandent des informations qui n’ont aucun
lien avec l’obtention d’un permis pour assister aux
conférences de presse.
6. Les Ministères de la Communication et de l’Éducation
devraient aider à financer l’éducation et la formation
des journalistes.
7.Les valeurs journalistiques et les normes
professionnelles devraient être renforcées afin
d’assurer le respect pour les journalistes.
8. Les conditions de vie et de travail des journalistes
doivent être améliorées.
9. La communauté internationale et les pays donateurs
devraient fournir au gouvernement haïtien et à la société
civile un appui financier et technique pour s’assurer que
tous les objectifs ci-dessus soient atteints.
La Liberté de Presse en Haïti
Les noms des agences de presse et des individus
interrogés ne sont pas divulgués dans le présent rapport
afin de protéger leur anonymat et leur sécurité.
Contexte des Médias en Haïti
La radio est de loin le média le plus populaire pour les
nouvelles en Haïti. Plus de 90 pour cent des Haïtiens ont
accès à la radio.9 Il y a de nombreuses radios en Haïti,
dont la transmission est accessible dans presque tous les
coins du pays. Les radios sont peu coûteuses et peuvent
fonctionner sans réseau d’électricité.
Les stations de télévision sont moins nombreuses, soit un
nombre approximatif de 20 à Port-au-Prince et de 15 autres
dans les provinces. L’audience totale de la télévision en
Haïti reste inférieure à 10 pour cent de la population en
raison du manque d’électricité et ressources.10
Plus de la moitié de la population ont du mal à lire, et la
diffusion des journaux est minime. Haïti dispose de deux
quotidiens nationaux - Le Nouvelliste, avec un tirage de
15000 exemplaires, et Le Matin (5000 exemplaires), ainsi que de deux journaux hebdomadaires. Alors que
100 pour cent de la population parle le créole haïtien,
et que seulement 20 pour cent parle le Français, aucun
2
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journal écrit n’existe actuellement en créole.11 Quelques
nouvelles en créole sont disponibles en ligne, mais le taux
d’utilisation de l’Internet a été estimé à moins de dix (10)
pour cent de la population en 2009.12
été condamné pour sa mort, mais le principal suspect
est Dany Toussaint, à l’époque candidat au Sénat et
qui a finalement été élu en mai 2000. Toussaint avait
publiquement confronté Dominique sur la manière
dont Haïti-Inter assurait la couverture de la politique
et, en particulier, des élections. En 1980, Dominique
avait été forcé à l’exil en raison de sa position
éditoriale critique de la dictature de Duvalier, et sa
station de radio a été détruite. Il avait aussi dû fuir le
gouvernement putchiste en 1991.
L’importance générale de la radio la rend particulièrement
importante lors d’élections. Les émissions de radio, en
particulier les lignes ouvertes, sont les forums les plus
importants d’Haïti pour débattre sur les candidats et les partis.
En conséquence, les stations de radio deviennent des terrains
de contestation pour tout plaidoyer politique, en particulier
en période électorale. Les candidats, les fonctionnaires et
autres acteurs politiques font plus d’efforts et de dépenses
pour obtenir une couverture médiatique à leur avantage.
Souvent, ils ont recours à la violence pour décourager la
couverture médiatique défavorable. L’historique d’attaques
contre des stations de radio haïtiennes en raison de leur
manière de couvrir la politique est long.
� En fin 2003, la station de radio de Frenot Cajuste a été
incendiée par des opposants politiques. Cajuste était
un procureur qui plus tard devint juge.
� Le 30 octobre 2003, Radio Caraïbes, une station de
Port-au-Prince, a été attaquée par des hommes armés
qui ont tiré de leur voiture au passage. Des témoins
ont rapporté que la voiture détenait des plaques
d’immatriculation officielles du gouvernement. Le
gouvernement a prétendu que les plaques avaient
probablement été volées.
Un journaliste interviewé a expliqué que les médias ne
sont pas représentatifs de la majorité de la population.
Ceux qui vivent avec 2 dollars ou moins par jour (environ
80 pour cent de la population) n’ont pas de chaîne de
télévision ou de station de radio qui s’adresse leurs
besoins et leurs conditions de vie. Un rapport de Reporters
Sans Frontières a constaté que le manque de formation
professionnelle de nombreux journalistes haïtiens limite
la disponibilité d’une couverture médiatique diversifiée
et de bonne qualité, tandis que certains secteurs de la
population n’ont aucun accès du tout.13
� Le 14 janvier 2004, des hommes armés ont attaqué un
camion qui se trouvait dans une installation d’antennes
de transmission située sur une colline surplombant
Port-au-Prince, regroupant les antennes d’un éventail
de stations de radio et de télévision. L’installation
n’hébergeait pas de journalistes ou de stations de
diffusion, mais l’attaque a entravé la capacité de
diffusion de huit stations de radio, les mettant hors des
ondes pendant plusieurs jours avant que des réparations
soient faites. Le 21 février 2004, le journaliste Pierre
Elisem, directeur et propriétaire de Radio Hispaniola,
dans la ville de Trou du Nord, a été atteint d’une balle
qui l’a paralysé, et son poste a été incendié. Il fait état de
menaces proférées par des partisans du gouvernement
en colère à cause de sa critique du gouvernement.
Les Violences déjà subies
par la Presse Haïtienne
Le Comité pour la Protection des Journalistes a enregistré
neuf meurtres de journalistes de 1992 à 2007.14 En juillet
2012, l’organisation haïtienne SOS Journalistes a rapporté
12 cas de meurtres non résolus depuis 2000. Quelques-uns
des cas d’agression et de meurtre les plus flagrants contre
des journalistes haïtiens entre 2000 et 2005 sont décrits
ci-dessous pour donner un cadre aux menaces historiques
auxquelles les médias ont eu à faire face.
� Le 9 février 2005, des hommes armés ont atteint et
blessé par balles l’animateur de radio Raoul SaintLouis alors qu’il était assis dans sa voiture devant la
station de Radio Mégastar où il travaillait. Saint-Louis
a indiqué qu’il avait reçu des menaces téléphoniques
de personnes critiquant sa couverture médiatique du
gouvernement.
Le 3 avril 2000, Jean Dominique, le journaliste radio le
plus populaire et le plus influent d’Haïti, a été assassiné.
Son assassinat a eu lieu juste avant les élections du 21
mai de la même année. Il a été tué alors qu’il se rendait
à sa station de radio, Haïti-Inter, pour les nouvelles du
matin. Plus de dix ans plus tard, personne n’a encore
La Liberté de Presse en Haïti
� En juillet 2005, Jacques Roche, qui animait une
émission de télévision populaire et écrivait pour le
journal Le Matin, a été enlevé et assassiné. Son corps
mutilé et menotté a été retrouvé à Port-au-Prince.
3
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Résultats du rapport
I. Intimidation, threats, and violence against journalists
Tout Haïtien ou toute haïtienne a le droit d’exprimer librement ses opinions, en toute matière par la
voie qu’il choisit. Constitution Haïtienne, Art. 28.
Le journaliste exerce librement sa profession dans le cadre de la loi. Cet exercice ne peut être soumis à
aucune autorisation, ni censure sauf en cas de guerre. Constitution Haïtienne, Art. 28-1.
Toute personne a droit à la liberté de pensée et d’expression; ce droit comprend la liberté de rechercher,
de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières,
que ce soit oralement ou par écrit, sous une forme imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de
son choix. Convention américaine relative aux droits de l’homme, Art. 13(1) & Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, Art.19(2).
Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété
pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les
informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. Déclaration universelle des droits
de l’homme, Art. 19.
Depuis l’entrée en fonctions du Président Martelly en mai
2011, la presse haïtienne a subi l’hostilité du Président,
de ses gardes du corps, des membres du gouvernement et
de ses partisans. Alors que certains journalistes pensent
qu’ils ont toujours été pris pour cible par les autorités
et que rien n’a changé sous l’administration Martelly,
d’autres estiment que la multiplication des insultes
verbales et de l’hostilité proférées par le Président a créé
un climat plus menaçant pour la presse.
nous avons interrogés ont déclaré qu’ils évitaient de quitter
leurs maisons pendant la nuit ou d’assister à des évènements
publics réunissant de grandes foules où il serait facile d’être
la cible d’un assassinat.
Le travail de journaliste en Haïti est particulièrement
risqué pour ceux qui critiquent ouvertement le manque
de transparence et de redevabilité du gouvernement. Ils
font face, dans l’exercice de leur métier, à des menaces de
mort et des menaces à leur sécurité; à un manque d’accès
à l’information, aux sources du gouvernement et aux
conférences de presse au Palais National; aux bas salaires;
aux résiliations de contrat, aux révocations de licences et à
des poursuites pour diffamation coûteuses à défendre. Ces
difficultés ont un impact sur leur vie, leur travail, et leur
capacité à se déplacer librement. Selon le Département d’État
américain, « quelques journalistes pratiquent l’autocensure
lorsqu’il s’agit d’histoires liées au trafic de drogue ou
d’allégations de corruption politique ou économique, en
raison des tendances aux représailles contre le journalisme
d’enquête qu’il y a eu dans le passé, ce qui met en danger
les moyens d’existence et éventuellement la sécurité
physique des reporters ».15 Beaucoup de journalistes que
L’assassinat, l’intimidation et/ou les menaces envers les
journalistes, ainsi que la destruction de leur matériel de
presse, ont pour but de les réduire au silence et constituent
à la fois des violations des droits fondamentaux des
journalistes et une restriction de la liberté d’expression. Il
est du devoir du gouvernement haïtien de non seulement
prévenir et, le cas échéant, mener des enquêtes sur de tels
faits, mais aussi punir leurs auteurs et veiller à ce que
les victimes reçoivent une réparation adéquate.17 Cette
obligation s’étend aux actes commis par des acteurs
gouvernementaux ainsi que par des «personnes privées
ou morales, qui chercheraient à entraver l’exercice de la
liberté d’opinion et d’expression ».18
La Liberté de Presse en Haïti
De plus, La liberté de la presse en Haïti est contrainte par
le manque de ressources à la disposition des forces de
l’ordre et du système judiciaire, ainsi que par l’insécurité
générale.16
a. Menaces / Intimidation
Selon le Rapporteur Spécial sur la Liberté d’Expression
4
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de la Commission Interaméricaine des Droits de
l’Homme (CIDH), l’intimidation et les menaces à
l’encontre des journalistes, ainsi que la destruction
de matériels de presse, ont généralement pour but
d’éliminer les journalistes enquêtant sur les attaques,
les abus, les irrégularités ou les actes illégaux de toute
nature commises par des fonctionnaires publics, des
organisations ou des particuliers. Le Rapporteur Spécial
a ajouté que « cela sert à s’assurer que les enquêtes ne
soient pas complétées ou qu’elles ne fassent jamais partie
d’un débat public comme elles le mériteraient, ou tout
simplement comme une forme de représailles envers
l’enquête en elle-même ». De tels actes sont utilisés
comme un instrument d’intimidation pour envoyer un
message à ceux de la société civile qui seraient engagés
dans l’investigation de toutes sortes d’attaques, d’abus,
d’irrégularités ou d’actes illicites. Cette pratique vise à
faire taire la presse dans son rôle de chien de garde ».19
Le 5 avril 2011, cinq journalistes ont été
révoqués par la Télévision Nationale d’Haïti
(TNH) à la suite d’accusations de manque de
professionnalisme et d’émission de fausses
déclarations publiques après avoir été critiques
de Michel Martelly, alors candidat au second tour
des élections présidentielles.24 Reporters Sans
Frontières a déclaré que le renvoi « semble être
un cas de persécution politique et constitue en
tant que tel un très mauvais départ pour Michel
Martelly, qui a été proclamé président élu il y a une
semaine.»25 Reporters Sans Frontières a indiqué
que les révocations ont eu lieu peu après une
visite du président élu.26 Les journalistes licenciés
ont déposé une plainte auprès de l’Unité Anticorruption, accusant le directeur de la TNH de
couverture médiatique tendancieuse et de diffuser
de la propagande en faveur de Michel Martelly.27
Depuis l’investiture du Président Martelly, la plupart
des tactiques d’intimidation décrites par le Rapporteur
Spécial ont été utilisées par la police haïtienne, le
propriétaire d’un média privé, des partisans présumés du
Président et par d’autres responsables gouvernementaux.
Le 8 décembre 2010, des individus affirmant
travailler pour le candidat Martelly ont saccagé
la station locale de Radio Lebon FM aux Cayes,
et menacé les journalistes, après la publication de
résultats préliminaires pour les élections législatives
et présidentielles.28
Le 22 juin 2011, les animateurs de l’émission « Ils
l’ont dit » à la Radio Prévention de Petit-Goâve, Ernest
Joseph et Wolf ‘Duralph’ François, ont été arrêtés
et emprisonnés, accusés de diffamation, d’atteinte
à l’ordre public et de destruction de la propriété
publique.20 Les policiers ont scellé l’entrée de la
station de radio et confisqué l’émetteur et d’autres
équipements qui appartiennent à Joseph. Reporters
Sans Frontières a publié un article dénonçant cette
arrestation comme un abus de pouvoir et une forme
de censure.21 L’emprisonnement peut conduire à la
mise en danger de la sécurité physique. Dès sa sortie
de prison près d’un mois plus tard, François s’est
plaint que les mauvaises conditions de sa détention
avaient aggravé son état de santé, et entrainé une
pneumonie et une maladie rénale. Il a également
affirmé avoir été battu dans sa cellule par d’autres
prisonniers.22 Bien que les deux journalistes aient été
libérés, des accusations pèsent toujours contre eux.
Un journaliste d’un journal hebdomadaire de
gauche critique envers le gouvernement Martelly a
reçu des appels menaçants tous les deux ou trois
mois depuis l’entrée en fonction du Président
Martelly en mai 2011. Un des auteurs de ces appels
s’est identifié comme étant Louis-Jodel Chamblain,
ancien membre du FRAPH, un groupe paramilitaire
qui avait participé au coup d’État de 1991 qui a
renversé le Président Jean-Bertrand Aristide. À
un moment, l’homme au bout du fil a proféré une
menace: « Si vous n’arrêtez pas ce que vous faites,
vous allez disparaître -. Nous allons vous faire
disparaître ».29 L’identité de l’homme n’a pas été
vérifiée.
Le 20 Septembre 2012, trois journalistes du journal
Le Nouvelliste ont été arrêtés pour ne pas avoir
remis leur matériel de vidéo et de photographie à
la demande de policiers qui menaçaient d’effacer
leurs images. Les trois journalistes étaient Natasha
Bazelais, Jean Marc Abélard et Jeanty Augustin qui
étaient en train de filmer la scène d’un accident.
Les journalistes sont accusés d’avoir troublé l’ordre
public.30
Le 22 mai 2011, des agents de l’Unité Départementale
pour le Maintien de l’Ordre (UDMO) aux Gonaïves
ont saccagé et détruit l’équipement de journalistes
qui rapportaient sur la visite du Président Martelly
à la suite d’un incendie dans le marché publique de
Gonaïves.23
La Liberté de Presse en Haïti
5
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liberté de la presse. Un mandat d’arrêt a été délivré
et le maire a promis de ramener l’accusé, mais
en juillet 2012, l’accusé n’avait toujours pas été
arrêté.36
b. Le manquement du Gouvernement à
protéger les Journalistes de la Violence
En septembre, deux assassinats de journalistes ont déjà
été signalés pour l’année 2012. Les autorités locales ont
bloqué l’enquête et les poursuites dans l’un des cas, et
ont été incapable de désigner un suspect dans l’autre.31
Le 5 mars 2012, Jean Liphete Nelson, directeur
de Radio Boukman et directeur-général de l’ONG
Hands Together a été assassiné.37 Lancé en 2006,
Radio Boukman était le seul média de reportage basé
à Cité Soleil, un bidonville défavorisé de Port-au
-Prince.38 Quatre autres personnes étaient présentes
dans la voiture où se trouvait Nelson quand il a été
abattu. Un des passagers a été tué et un autre a été
blessé aux deux jambes. Le mobile du meurtre n’a
pas été officiellement établi. Toutefois, le Bureau
du Rapporteur Spécial pour la Liberté d’Expression
a publié un communiqué de presse demandant aux
autorités haïtiennes d’étudier la possibilité que sa
mort ait été liée aux activités professionnelles du
journaliste, en les exhortant à procéder à une enquête
approfondie, afin de clarifier les circonstances du
crime, d’identifier et de punir les coupables, et de
veiller à une compensation juste pour les proches
des victimes.39 Quatre semaines avant le meurtre,
M. Nelson avait été enlevé et menacé.40
En vertu de la Convention Américaine relative aux
Droits de l’Homme et d’autres instruments du droit
international, les États ont l’obligation de mener
des enquêtes efficaces sur les évènements entourant
l’assassinat de journalistes et de punir les auteurs de ces
crimes.32 La CIDH a affirmé que l’échec d’un État à
mener une enquête efficace et approfondie sur l’assassinat
d’un journaliste et d’appliquer des sanctions pénales a de
graves répercussions sur la société. Les crimes contre les
journalistes ont un effet intimidant sur tous les citoyens,
car ils « inspirent la peur de dénoncer les attaques, les
abus et toutes activités illégales ».33
Cet effet intimidant peut être évité si le gouvernement
d’Haïti s’engage dans une action concertée pour
punir les responsables d’agressions ou d’assassinat
de journalistes. Ainsi, le gouvernement haïtien peut
envoyer, l’encontre de la société, le message puissant et
direct qu’il n’y aura aucune tolérance envers ceux qui
commettent des violations graves du droit à la liberté
d’expression.
En Décembre 2010, plusieurs incidents ont eu lieu
durant lesquels des journalistes ont été harcelés et
maltraités au cours de violentes manifestations de
rue suite à l’annonce des élections présidentielles et
législatives.41
Le 17 mars 2012, un journaliste a été abattu par un
employé d’une municipalité, où le maire fait obstacle
à toute enquête ou poursuites par le gouvernement.
Le garde du corps du maire de Thomonde a tiré
sur Wendy Phele, une correspondante de 21 ans
travaillant à Radio Télé Zénith. Elle assistait à un
discours public du maire de Thomonde au moment
où les tirs ont eu lieu.34 Le procureur s’est entendu
avec le maire pour interroger le garde du corps
accusé. Suite à cet interrogatoire, il s’apprêtait
à l’arrêter, mais le maire s’est interposé et ses
partisans ont menacé le procureur. SOS Journalistes,
Reporters sans Frontières et d’autres groupes ont
fait pression sur le ministère de l’Intérieur pour
retirer le maire de ses fonctions et l’empêcher de
faire obstacle à la justice, en soulignant que s’il ne
le faisait pas, le ministère se rendait complice de
la tentative d’assassinat.35 Ils ont également lancé
une campagne publique contre plusieurs autorités
gouvernementales haïtiennes qu’ils considéraient
comme des ennemis et des « prédateurs » de la
La Liberté de Presse en Haïti
c. Ingérence dans les activités journalistiques
Le gouvernement haïtien doit également interdire et
empêcher l’ingérence directe ou indirecte des forces
de l’ordre, du Président et de son administration dans
le travail des médias ainsi que toute pression exercée
sur les journalistes.42 La jouissance pleine et entière du
droit à l’expression implique que les médias soient en
mesure de recevoir les informations nécessaires pour
mener à bien leurs fonctions de diffuseurs les nouvelles.
L’ingérence, même lorsque n’étant pas associée à un
niveau de violence grave ou à des menaces de violence,
viole néanmoins la liberté d’expression en tentant
d’empêcher les journalistes d’accomplir leur travail. Le
président Martelly lui-même a expulsé des journalistes
de conférences de presse et menacé des journalistes
qui lui posaient des questions. Tous les journalistes
interrogés ont déclaré que le président a été moins
6
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agressif avec la presse au cours des derniers mois, une
tendance qu’ils espèrent voir perdurer.
La Commission Interaméricaine a déclaré que la
criminalisation du discours autour de fonctionnaires ou
de particuliers engagés volontairement dans des affaires
d’intérêt public est une sanction disproportionnée
par rapport à l’importance du rôle que joue la liberté
d’expression et d’information dans un système
démocratique. « Ces sanctions ne peuvent évidemment
pas être justifiées, en particulier lorsque l’on sait que les
sanctions non-pénales suffisent à réparer toute atteinte
à la réputation des individus ».45 Dans une démocratie
représentative, les fonctionnaires publics, ou toute
personne impliquée dans les questions d’intérêt public,
doivent être tenus redevables par les hommes et les
femmes qu’ils représentent.46
Le 28 juillet 2011, les gardes de sécurité du Président
Martelly ont bousculé et expulsé des journalistes d’une
salle de conférence lors d’une visite du président dans
la ville de Jacmel.43
Le 27 juillet 2011, le Président Martelly, alors présent
au lancement du magazine de voyage Magique Haïti,
a accusé la presse d’être responsable de l’image
négative d’Haïti à l’étranger et a ordonné à la presse
de se taire. Le président a menacé d’utiliser la force
contre ceux qui parlaient en mal du pays, y compris
la presse.44
Les journalistes qui ont reçu des citations à comparaître
ou des lettres de sommation ou ordonnances de cessation
et d’abstention, affirment que les poursuites sont frivoles
et représentent en fait des représailles pour leurs opinions
politiques ou leur critique du Président Martelly ou
d’autres membres du gouvernement. Parmi les quatre
procès pour diffamation contre les journalistes rencontrés
par les auteurs de ce rapport, trois ont été instigués par le
gouvernement haïtien, dont deux ont été déposés auprès
du tribunal haïtien et un devant un tribunal américain.
Les trois cas ont été abandonnés quand les journalistes
ont répondu à la citation ou l’ordonnance de cessation et
d’abstention. (Le quatrième cas a été déposé pendant la
publication du présent rapport, donc le résultat n’est pas
connu.)
Le 9 mars 2011, le candidat à la présidence
Martelly a été verbalement agressif envers le
journaliste Gotson Pierre durant un débat lors du
deuxième tour des élections présidentielles et
législatives. Pierre a demandé des explications à
Martelly à propos d’allégations concernant une
énorme dette contractée aux États-Unis. Martelly a
évité la question et Pierre a répondu qu’il n’était
pas approprié pour Martelly de ne pas assumer
la responsabilité de ses actes en tant que possible
prochain président d’Haïti. Martelly s’est mis en
colère et a crié sur la foule, en faisant allusion à
la possibilité d’une émeute contre les journalistes,
semblable à l’émeute qui avait eu lieu en 2006
après les élections du Président René Préval. Pierre
et d’autres journalistes présents dans la salle ont
interprété les commentaires comme une menace de
la part de Martelly d’inciter une émeute violente
contre eux s’ils continuaient à le discréditer.
En Septembre 2012, le Premier-Ministre d’Haïti
a poursuivi en justice le journal hebdomadaire
haïtien- américain Haïti Observateur, devant une
cour américaine pour diffamation sur sa couverture
de la vente d’une entreprise de télécommunications
acquise par le gouvernement haïtien.47 Le journal
paraît depuis 1971 et désert les communautés de
la diaspora haïtienne à New York, en Floride, à
Montréal et dans la Caraïbe. L’accusation était que
le journal avait faussement et avec malveillance
rapporté que le Premier-Ministre, un ancien directeur
des télécommunications, avait orchestré la vente de
la société, et qu’il avait fixé le prix de vente à 25
millions de dollars en s’attendant à recevoir la « part
du lion » des bénéfices.48
d. Les poursuites pour diffamation
en guise de représailles
Une tendance qui inquiète les journalistes est
l’augmentation des menaces de poursuites pour
diffamation ou celles réellement déposées par le
gouvernement haïtien contre la presse pour des
déclarations faites à propos des fonctionnaires ou des
entités privées dans la sphère publique. La diffamation
en Haïti est sanctionnée à la fois au pénal et au civil, donc
les journalistes sont privés de leur liberté, ils subissent
des dommages civils et doivent payer des frais d’avocats
dans un système juridique où la justice est souvent
achetée par les élites.
La Liberté de Presse en Haïti
En Avril 2012, deux des cinq journalistes qui
avaient été licenciés par la Télévision Nationale
d’Haïti (TNH) pour manque de professionnalisme
et fausses déclarations publiques sur la radio
7
University of San Francisco & IJDH
critiquant Michel Martelly, alors candidat à la
présidence, ont été poursuivis pour diffamation par
le directeur de la TNH. (Voir ci-dessus la section (a)
Menaces et Intimidation). Ils font face à une peine
d’emprisonnement de trois ans et 50 millions de
gourdes (1,25 millions de dollars) en dommages et
intérêts. En juillet 2012, le procès était en attente à
la Cour d’Appel.
Le gouvernement haïtien ne respecte pas ses obligations
en vertu de la Constitution haïtienne, Art. 28-1, de
protéger la liberté d’opinion et la liberté d’expression des
journalistes contre la violence, les menaces, l’intimidation
et les représailles commises par le gouvernement haïtien,
la police, les autorités locales, et le Président lui-même.
Une presse indépendante et critique est fondamentale
pour assurer le respect des autres libertés, et former un
système de gouvernement démocratique avec la primauté
du Droit. Comme la CIDH l’a expliqué, dans les
démocraties telles qu’ Haïti, où les institutions chargées
de la surveillance de la conduite et du fonctionnement des
autorités sont faibles,’’ la presse est devenue le principal
instrument de contrôle et de diffusion de l’information
sur les activités gouvernementales.”52
IEn Janvier 2012, le site web d’actualités Defend
Haiti basé à Orlando, en Floride, qui a comme
public la diaspora haïtienne anglophone, a reçu
une ordonnance de cessation et d’abstention d’un
avocat représentant le gouvernement haïtien. La
lettre accusait le site de mener une “campagne de
diffamation contre le gouvernement haïtien” et
exigeait au site de supprimer l’article ou de faire
face à une demande de réparation pour dommage
au gouvernement. Defend Haiti a répondu aux
accusations par écrit et n’a pas reçu d’autres
communications à ce sujet.49 Le fondateur de
l’agence de presse a déclaré que, après avoir reçu
la lettre, il a cessé de rapporter sur la question qui
avait fait l’objet de la plainte du gouvernement. Le
fondateur a déclaré que les journalistes en Haïti ont
rapporté avoir été harcelés, et il avait peur que sa
famille en Haïti soit elle aussi menacée.50
Malgré les menaces et les violences, les journalistes
continuent de se battre pour une presse libre. Un célèbre
journaliste haïtien a dit: « Les gens savent que s’ils
m’intimident, je vais quand même faire [mon travail].
Les gens pourraient me tuer, bien que je n’aie pas
dernièrement été exposé à cela. À cause de ce que je fais,
je sais que je serais toujours confronté à cela. » Un autre
journaliste a fait la remarque : « [Si] nous commençons à
avoir peur, nous n’accomplirons rien. ».
En février 2012, le journal Haïti Liberté a été
poursuivi pour diffamation par la Première Dame
de la République, Sofia Martelly. Haïti Liberté
avait fait état d’un affrontement entre les gardes du
Président Martelly et des étudiants de l’Université
d’État d’Haïti (UEH). Le Président Martelly avait
tenté de participer à un colloque organisé à l’UEH
sur l’ethnologie et sur la politique de construction
de la nation, à laquelle il n’avait pas été invité.
Lorsque les étudiants de l’UEH ont refusé à Martelly
de participer à l’évènement, un affrontement entre
les étudiants et les partisans de Martelly a éclaté.
Cet affrontement s’est soldé par des lancements
de gaz lacrymogène, et des coups de feu tirés en
l’air.51 Au moins quatre étudiants ont été blessés et
des dommages causés aux locaux et à l’équipement
de l’université. La Première Dame, Sofia Martelly,
a déposé une plainte en diffamation devant un
tribunal haïtien contre le journal Haïti Liberté, lui
demandant de se rétracter et de supprimer son article
sur le conflit à l’UEH. Haïti Liberté a répondu à
la citation, et Mme Martelly n’a pas pris d’autres
mesures.
La Liberté de Presse en Haïti
II.L’accès à l’information publique
L’accès à l’information détenue par l’État est un droit
fondamental pour chaque individu, ainsi que l’un des
piliers de la démocratie.53 Comme l’a souligné la Cour
Interaméricaine des Droits de l’Homme, « une société
qui n’est pas bien informée n’est pas une société qui
est vraiment libre. »54 L’accès à l’information est
également fondamental au principe de la transparence
dans la gouvernance publique.55 En se basant sur
ces principes, l’accès à l’information détenue par le
gouvernement haïtien est un droit fondamental pour
tous et le gouvernement a l’obligation de le garantir. Les
Haïtiens ont donc le droit individuel de demander accès
à la documentation et aux informations contenues dans
les archives publiques ou traitées par le gouvernement.56
Ces obligations mettent le gouvernement haïtien au devoir
de ne ménager aucun effort pour assurer un accès facile,
rapide, efficace et pratique à l’information publique.
Comme indiqué précédemment dans le présent rapport,
les Haïtiens ont difficilement accès à l’information en
8
University of San Francisco & IJDH
qui enquêtaient sur le projet ou ont simplement refusé
d’en parler. Le journaliste s’est adressé à un ministère
local et on lui a dit que « La Constitution n’est qu’un
tas de mots que auquel personne ne prête attention. »57
Obligation est faite à l’Etat de donner
publicité par voie de presse parlée, écrite et
télévisée, en langues créole et française aux
lois, arrêtés, décrets, accords internationaux,
traités, conventions, à tout ce qui touche
la vie nationale, exception faite pour les
informations relevant de la sécurité nationale.
Le journaliste ne peut être forcé de révéler ses
sources. Il a toutefois pour devoir d’en vérifier
l’authenticité et l’exactitude des informations.
Il est également tenu de respecter l’éthique
professionnelle. Constitution Haïtienne, Arts. 28
et 40.
Selon un journaliste, le gouvernement est plus
susceptible d’accorder des entrevues à des
journalistes étrangers qu’à des journalistes haïtiens.
Par exemple, un ministère a immédiatement accordé
une interview à une agence de presse française,
alors qu’une équipe de journalistes haïtiens n’a reçu
aucune réponse de la part du ministère après avoir
fait 12 appels téléphoniques, envoyé une lettre et
s’être présenté en personne.58
La liberté d’expression ne peut être restreinte
par des voies ou des moyens indirects,
notamment par les monopoles d’Etat ou
privés sur le papier journal, les fréquences
radioélectriques, les outils ou le matériel de
diffusion, ou par toute autre mesure visant à
entraver la communication et la circulation des
idées et des opinions. Convention américaine
relative aux droits de l’homme, Art. 13(3).
Un journaliste haïtien rattaché à une agence de
presse internationale a indiqué que la capacité
d’accéder à l’information est fortement tributaire
de l’existence de fortes relations personnelles au
sein du gouvernement. Bien qu’il n’ait pas indiqué
un déclin de son propre accès à l’information
sous l’administration Martelly, il a nuancé sa
déclaration en disant qu’il a de bons contacts dans
l’administration actuelle et que « Ce n’est jamais une
véritable démocratie et [le gouvernement haïtien] n’a
jamais estimé qu’il devrait y avoir un accès total à
l’information. [Je] [ne peux pas] dire que nous avons
un accès moindre que par le passé. Nous sommes à
10%. » Les journalistes de gauche manquent souvent
de contacts dans le gouvernement actuel et sont
incapables d’accéder à l’information nécessaire pour
mener leurs enquêtes.
général. Seulement vingt pour cent de la population
comprend le Français, mais tous les journaux imprimés
en Haïti le sont en Français. Moins de dix pour cent de
la population à accès à l’Internet ou à la télévision. Ces
difficultés renforcent le devoir du gouvernement haïtien
de permettre l’accès à l’information publique et de sortir
de l’habitude de refuser de fournir ces informations.
Pour avoir la permission d’accéder au Palais National
à Port-au-Prince pour les conférences de presse, les
journalistes sont invités à remplir un formulaire.
Le formulaire demande des questions générales
d’identification, mais il demande aussi les noms et les
adresses des conjoint(e)s, des enfants et des voisins des
journalistes. Cette pratique a été documentée dans deux
des sept entretiens, ce qui implique que la politique
est discriminatoire; cela permet au gouvernement
de déterminer quels journalistes peuvent ou non
avoir accès à information.59 Les deux journalistes à
qui on a demandé des informations sur leur famille
n’ont pas soumis le formulaire, en argumentant que
ces demandes de renseignements personnels non
pertinents leur rappelait les questions indiscrètes
posées par les Tontons Macoutes sous la dictature des
Duvalier, qui se servaient de ces informations pour
persécuter ceux qui critiquaient le gouvernement. Le
a. Réponses évasives du gouvernement
sur les informations publiques
Pour certains journalistes progressistes, le
gouvernement a rendu presque impossible l’enquête ou
la localisation de contrats publics et d’audits en refusant
de répondre aux demandes de renseignements, aux
demandes de rencontres ou aux appels téléphoniques.
Par exemple, les journalistes d’un journal d’enquête
en ligne ont retracé une demande provenant d’une
institution financière internationale au sujet d’un
contrat signé entre le gouvernement haïtien et un autre
gouvernement pour un projet de reconstruction après
le séisme. Alors que l’article 40 de la Constitution
exige que le gouvernement haïtien rende public
les accords internationaux, les fonctionnaires ont à
plusieurs reprises raccroché au nez des journalistes
La Liberté de Presse en Haïti
9
University of San Francisco & IJDH
formulaire de demande d’information sur la famille
est une nouveauté sous l’administration Martelly.
publique par rapport à son prédécesseur, le président
Préval en accordant plus de conférences de presse.
Le Président Martelly et le Premier-Ministre ont tous
deux publié des communiqués officiels et fréquents
sur Facebook et Twitter, ce qui est un pas positif vers
l’accès et la transparence. Cependant, les journalistes
se demandent si l’administration utilise les médias
sociaux et les conférences de presse pour contrôler la
diffusion de l’information afin de réduire l’influence
des médias indépendants.64
Lors d’une conférence de presse en février 2012,
le journaliste Jackson Alexis de Radio Kiskeya a
interrogé le Président Martelly sur les allégations
selon lesquelles il aurait renoncé à sa nationalité (ce
qui le disqualifierait en tant que Président en vertu
de la Constitution Haïtienne). Le Président Martelly
a répondu en demandant à Alexis pour quel média il
travaillait. Quand Alexis lui a dit qu’il était à Radio
Kiskeya, Martelly a déclaré qu’il ne répondrait pas.
Conclusion
En avril 2012, une journaliste en République
dominicaine, Nuria Piera, a découvert que le
Président Martelly avait reçu 2,5 millions de dollars
en pots de vin pour des contrats de reconstruction
avec la République dominicaine.60 Une des personnes
interrogées a déclaré que les journalistes internationaux
et haïtiens n’étaient pas en mesure d’obtenir des
informations sur les allégations des représentants du
gouvernement en Haïti, et aucune vérification des
contrats de reconstruction n’a été mise à la disposition
du public haïtien. Les seules informations disponibles
aux journalistes investigatifs sont parvenues du
gouvernement Dominicain.61
La liberté d’expression est une condition nécessaire à la
réalisation des principes de transparence et de reddition de
comptes qui t, à leur tour, son essentiels pour la promotion
et la protection de la démocratie et des droits de l’homme.
Le gouvernement haïtien a le devoir de protéger et de
promouvoir une presse libre, mais les observations et
les expériences personnelles de journalistes révèlent une
tendance inquiétante à répondre de manière évasive à la
presse, à recourir à l’intimidation et aux attaques contre
les journalistes, notamment les journalistes de gauche
qui seraient critiques du gouvernement actuel.
D’après un journaliste interviewé:
« Certains journalistes sont tombés, certains ont
été tués, certains ont disparu, donc pour [ces
journalistes], ils continuent à se battre pour leur
pays et pour le peuple haïtien. Ils ont mené un long
combat. Le président et le peuple haïtiens ont besoin
de comprendre cela. Le gouvernement a besoin de la
presse pour exprimer ses préoccupations et ses idées,
mais l’État a besoin de journalistes pour enquêter
et rapporter sur ces questions. Tous les deux ont le
droit de rechercher et d’exprimer la vérité. »
b. La stratégie et les tactiques du gouvernement
pour contrôler les médias
Plusieurs journalistes ont parlé d’une réunion interne
initiée par la Première Dame, Sophia Martelly, en
février 2012 au Palais national pour explorer la
création d’une loi qui règlementerait la presse.62
Certaines des personnes interrogées craignent que
l’intention du gouvernement était de contrôler les
droits des médias. Les journalistes ont protesté
contre la réunion, et il semble qu’aucune autre
mesure n’a été prise sur la proposition de loi. L’an
dernier, le Président Martelly a également proposé le
rétablissement de l’armée nationale avec un Service
National de Renseignement (SRN), qui, entre autre,
serait chargé de la surveillance des journalistes.63
Le nouveau Ministre de la Communication, Jean Gardy,
qui a pris ses fonctions en mai 2012, s’est engagé à lutter
contre l’extrême pauvreté chez les journalistes et à offert
aux travailleurs dans les médias une assurance santé
et une l’assurance-vie, ainsi qu’une formation.65 En
Septembre 2012, son bureau a initié une rencontre avec
le Président et le Premier ministre, plusieurs propriétaires
de médias, et l’organisation haïtienne de surveillance
des droits des médias SOS Watch pour discuter de la
liberté de expression.66 C’est un geste encourageant qui,
espérons-le, aboutira à davantage de protection pour les
Haïtiens et les journalistes.
Il y une inquiétude chez les journalistes sur le fait
que l’administration Martelly cherche à contrôler
les médias en remplaçant le journalisme d’enquête
par sa propre agence d’information. Les personnes
interviewées sont généralement d’accord que le
président Martelly a amélioré l’accès à l’information
La Liberté de Presse en Haïti
10
University of San Francisco & IJDH
Recommandations pour la protection de la liberté de la presse en Haïti
1. Sous la direction du Ministère de la justice, les forces de l’ordre et les procureurs doivent prévenir et enquêter sur
les cas de menaces et de violences contre les journalistes, punir leurs auteurs et veiller au dédommagement des
victimes.
2. Les forces de l’ordre, les acteurs gouvernementaux et le Bureau de la Présidence doivent s’abstenir d’intimider ou
menacer des journalistes, ainsi que de détruire leur matériel de presse.
3. La loi haïtienne devrait être amendée pour éliminer les peines de prison pour les cas de diffamation.
4. Tous les organismes publics doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour assurer un accès aisé, rapide, efficace
et pratique à l’information publique.
5. Le Palais National est prié de cesser d’exiger des journalistes qu’ils répondent à des questionnaires qui demandent
des informations qui n’ont aucun lien avec l’obtention d’un permis pour assister aux conférences de presse.
6. Les Ministères de la Communication et de l’Éducation devraient aider à financer l’éducation et la formation des
journalistes.
7. Les valeurs journalistiques et les normes professionnelles devraient être renforcées afin d’assurer le respect pour
les journalistes.
8. Les conditions de vie et de travail des journalistes doivent être améliorées.
9. La communauté internationale et les pays donateurs devraient fournir au gouvernement haïtien et à la société civile
un appui financier et technique pour s’assurer que tous les objectifs ci-dessus soient atteints.
Nicole Phillips, membre du corps professoral de la faculté de droit de l’Université de San Francisco, ainsi que
Kate O’Laughlin, Lynn Nguyen et Laura Tran, toutes trois étudiantes à l’USF ont rédigé ce rapport. Mme Phillips
est également avocate, employée à l’Institute for Justice & Democracy in Haiti (IJDH). Les auteurs tiennent à
remercier Carolyn Boyd, Brian Concannon, Dolores Donovan, et Beatrice Lindstrom pour leurs modifications;
Alice Gomez pour son aide avec les citations, et Philip Goldsmith pour la production du rapport.
La Liberté de Presse en Haïti
11
University of San Francisco & IJDH
World Press Freedom Day, Haiti Libre, May 3, 2011, http://www.haitilibre.com/en/news-2861-haiti-communication-world-pressfreedom-day.html.
2 Human Rights Comm., 102nd Sess., General Comment 34, Freedoms of Opinion and Expression, U.N. Doc. CCPR/C/GC/34
(July 11-29, 2011) [hereinafter Human Rights Comm.].
3 See Nicole Phillips, Michel Martelly’s Short Honeymoon, The Fresh Outlook, May 3, 2011, available at http://ijdh.org/
archives/18518; Nicole Phillips & Nicolas Pascal, Hold New, Open, Fair Elections, Miami Herald, Jan. 3, 2011, available
at http://ijdh.org/archives/16240; Haiti’s November 28 Elections: Trying to Legitimize the Illegitimate (Inst. for Justice &
Democracy in Haiti, Boston, Mass.), Nov. 22, 2010, available at http://ijdh.org/wordpress/wp-content/uploads/2010/11/
Election-Report-11-23-2010.pdf.
4 See U.S. Dep’t of State, 2011 Country Reports on Human Rights Practices - Haiti, May 24, 2012, available at http://www.unhcr.
org/refworld/docid/4fc75a966a.html [hereinafter Human Rights Practices – Haiti]; See also The Platform of Haitian Human
Rights Organizations (POHDH), Déclaration de la POHDH à l’occasion de la Journée Mondiale de la liberté de la presse,
May 3, 2012, http://www.pohdh.org/article.php3?id_article=179.
5 Freedom of Press is Progressing in Haiti, Haiti Libre, Jan. 3, 2012, http://www.haitilibre.com/en/news-4837-haiti-politicfreedom-of-the-press-is-progressing-in-haiti.html.
6 See Alicia Pierini, Valentín Lorences & María Inés Tornabene, Habeas Data: Derecho a la Intimidad 31 (Editorial
Universidad, 1999).
7 The delegation was led by USF law faculty member Nicole Phillips, and included USF students Kate Finch, Aditi Fruitwala, Brit
Mark, Kate O’Laughlin, Lynn Nguyen, Samantha Silva, and Laura Tran. Ms. Phillips is also a staff attorney with the Institute
for Justice & Democracy in Haiti (IJDH)
8 Nicole Skibola, Sovereignty, Stability and Sweet Mickey: What is Going on in Haiti?, Huffington Post, Mar. 11, 2011, http://
www.huffingtonpost.com/nicole-skibola/post_1816_b_833953.html; Jeb Sprague, Michel Martelly, Stealth Duvalierist, Haiti
Liberté, Vol. 4, No. 22, Dec. 15-22, 2010, available at http://www.haiti-liberte.com/archives/volume4-22/MichelMartelly_
Stealth_Duvalierist.asp.
9 Freedom House, Freedom in the World 2012 - Haiti, Aug. 22, 2012, available at http://www.unhcr.org/refworld/
docid/503c722d28.html.
10 Id.
11 June 22, 2012 interview with USF delegation.
12 Freedom House, Freedom of the Press 2010 - Haiti, Sept. 30, 2010, available at http://www.unhcr.org/refworld/
docid/4ca44d921e.html.
13 Reporters Without Borders, World Report - Haiti, Aug. 2011, available at http://www.unhcr.org/refworld/docid/4d59463d28.html
14 Comm. to Protect Journalists, cpj.org, http://cpj.org/killed/americas/haiti/ (last visited Sept. 23,2012). The names of the
journalists murdered include: Jean-Remy Badio, Robenson Laraque, Ricardo Ortega, Brignol Lindor, Jean Leopold Dominique,
Alix Joseph, Jacques Roches, Gerad Denoze, and Robinson Joseph.
15 Human Rights Practices - Haiti, supra note 4.
16 Freedom House, Freedom in the World 2012 - Haiti, Aug. 22 , 2012, available at http://www.unhcr.org/refworld/
docid/503c722d28.html.
17 IACHR, Declaration of Principles on Freedom of Expression, at ¶9 (2000).
18 Human Rights Comm., supra note 2 at ¶7.
19 IACHR, Background and Interpretation of the Declaration of Principles of Freedom of Expression, at ¶39, available at http://
www.oas.org/en/iachr/expression/showarticle.asp?artID=132&lID=1.
20 Two Petit-Goâve radio journalists arbitrarily detained, Reporters Without Borders, June 29, 2011, http://en.rsf.org/haiti-twopetit-goave-radio-journalists-29-06-2011,40551.html.
21 Id.
22 Liberation of Wolf « Duralph » François, Haiti Libre, July 19, 2011, http://www.haitilibre.com/en/news-3406-haiti-justiceliberation-of-wolf-duralph-francois.html.
23 Id.
24 RWB requests the intervention of Martelly, Reporters without Borders, Apr. 29, 2011, available at http://www.haitilibre.com/
en/news-2834-haiti-justice-rwb-requests-the-intervention-of-martelly.html [hereinafter Reporters Without Borders]. The five
terminated journalists were Jacques Innocent, Guemsly Saint-Preux, Stéphane Cadet, Josias Pierre and former editor in chief
Eddy Jackson Alexis.
25 State TV Chief Fires Three Journalists, Brings Criminal Defamation Suit Against Them, Reporters Without Borders, Apr. 12,
2011, I http://www.unhcr.org/refworld/docid/4da7fcfb2.html.
26 Reporters Without Borders, supra note 24.
27 Id.
28 Jacques Desrosiers, Haïti-Presse-Pouvoir : L’AJH scandalisée par l’attitude « grossière » de Martelly à l’égard des journalistes,
AlterPress, Oct. 11, 2011,http://www.alterpresse.org/spip.php?article11702.
1
La Liberté de Presse en Haïti
12
University of San Francisco & IJDH
June 20, 2012 interview with USF delegation.
Three Journalists from Le Nouvelliste Arrested, defend.ht, September 20, 2012, available at http://defend.ht/news/articles/
media/3361-three-journalists-from-le-nouvelliste-arrested.
31 See facts immediately below regarding death of Wendy Phele and Jean Liphète Nelson.
32 IACHR, supra note 19, at ¶40.
33 Miranda v. Mexico, Case 11.739, Inter-Am. Comm’n H.R., Report No. 50/90, OAS/Ser/L/V/II, doc. 57 (1999).
34 Wendy Phele continue de réclamer justice, Radio Vision 2000, June 26, 2012, http://radiovision2000haiti.net/public/haitijusticewendy-phele-continue-de-reclamer-justice/.
35 Thierry Mayard-Paul dans le collimateur des défenseurs de la presse, Le Nouvelliste, June 15, 2012, http://www.lenouvelliste.
com/article4.php?newsid=106185.
36 June 26, 2012 interview with USF delegation.
37 June 20, 2012 interview with USF delegation; See also http://rjrnewsonline.com/news/regional/reporters-without-borderscondemns-murder-journalist-haiti.
38 Radio Boukman Resumes Broadcasting Two Weeks After Director’s Murder, Reporters Without Borders, Mar. 23, 2012,
available at http://www.unhcr.org/refworld/docid/4f744bf52.html.
39 Office of the Special Rapporteur Condemns Murder of Journalist in Haiti, Inter-Am. Comm’n H.R., Press Release R26/12, Mar.
8, 2012, http://www.oas.org/en/iachr/expression/showarticle.asp?artID=886&lID=1.
40 Two Hands Together Staff Shot and Killed, handstogether.org, http://www.handstogether.org/news/2012/two-hands-togetherstaff-shot-and-killed [last visited September 19, 2012].
41 Freedom House, Freedom of the Press 2011 - Haiti, Sept. 23, 2011, available at http://www.unhcr.org/refworld/
docid/4e7c84fb28.html; See alsoMedia get off relatively lightly in post-election rioting, but for how much longer?, Reporters
Without Borders, Dec. 10, 2010, available at http://www.unhcr.org/refworld/docid/4d071e6617.html.
42 IACHR, Declaration of Principles on Freedom of Expression, at ¶5 (2000), which says, “Direct or indirect interference in or
pressure exerted upon any expression, opinion or information transmitted through any means of oral, written, artistic, visual or
electronic communication must be prohibited by law.”
43 Desrosiers, supra note 28.
44 Id.
45 Article XIX, Defining Defamation, Principles of Freedom of Expression and Protection of Reputation, Principle 4.
46 IACHR, supra note 19, at ¶43.
47 Jennifer Kay, Haiti’s Lamothe sues US newspaper for defamation, Associated Press, Sept. 12, 2012, http://bigstory.ap.org/
article/haitis-lamothe-sues-us-newspaper-defamation-0.
48 Id.
49 Sara Rafsky, Was letter to Haiti website just part of Martelly’s theatrics? Comm. to Protect Journalists Blog (Feb. 24, 2012),
http://www.cpj.org/blog/2012/02/was-letter-to-haiti-website-just-part-of-martellys.php#more.
50 Kay, supra note 45.
51 June 20, 2012 interview with USF delegation with USF delegation.
52 IACHR, supra note 19, at ¶40.
53 IACHR, Declaration of Principles on Freedom of Expression, ¶ 4.
54 IACHR, OC 5/85, Series A Nº 5, supra note 15, at ¶ 70.
55 See Pierini, Lorences & Tornabene, supra note 6.
56 IACHR, supra note 19.
57 June 21, 2012 interview with USF delegation.
58 Id.
59 June 22, 2012 interview and June 26, 2012 interview with USF delegation.
60 Ezra Fieser & Jacqueline Charles, Dominican authorities investigating Haitian contracts of senator, Miami Herald, Apr. 2,
2012, http://www.miamiherald.com/2012/04/02/2728451/dominican-authorities-investigating.html.
61 Id.
62 Id.
63 Haiti’s army: Back to the future, Economist (Americas View Blog) (Sept. 30, 2011), http://www.economist.com/blogs/
americasview/2011/09/haiti’s-army; June 26, 2012 interview with USF delegation.
64 June 22, 2012 interview with USF delegation.
65 Installation of the New Minister of Communication, Haiti Libre, May 18, 2012, http://www.haitilibre.com/en/news-5676-haitipolitic-installation-of-the-new-minister-of-communication.html.
66 Strengthening of the Freedom of Press and of Structures of the Press, Haiti Libre, Sept. 2, 2012, http://www.haitilibre.com/en/
news-6539-haiti-politic-strengthening-of-the-freedom-of-speech-and-of-structures-of-the-press.html.
29
30
La Liberté de Presse en Haïti
13
University of San Francisco & IJDH

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