quels outils pour gérer la dynamique du groupe

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quels outils pour gérer la dynamique du groupe
CEFEDEM Br etagne / Pays de la Loir e Vie d’un ensemble chor al : quels outils pour gér er la dynamique du gr oupe ? Marielle Favr e Mémoire de Diplôme d’État Direction de choeur s Promotion 2005 / 2007
Avant­pr opos L’année d’obtention de mon Diplôme d’Études Musicales en direction de chœur, j’ai vécu deux conflits dans des groupes différents ; dans le premier en tant que chef de chœur, j’eus beaucoup de difficultés à gérer cette épreuve et la crise qui avait éclaté ainsi qu’à percevoir les différents indicateurs du malaise. Dans le second cas, où je participai en tant que choriste, j’ai pu apprécier la gestion du conflit par le chef de chœur et par le groupe lui­même. Je n’étais pas alors armée pour comprendre correctement ce qu’est le groupe, sa psychologie, analyser l’origine véritable du conflit et enfin pour le traiter. C’est pourquoi j’ai décidé de faire ce travail de recherche, de collecte d’expériences et d’analyse afin que, si un jour une situation conflictuelle se représente, je sois alors davantage en mesure de la comprendre et d’améliorer mes réactions. Remer ciements Je tiens à remercier chaleureusement toutes les personnes qui m’ont aidé à réaliser ce travail de réflexion en commençant par mes référents Jean­Pierre Aubret et Laurent Goossaert, les choristes du « Chœur de Chambre de la Vienne », de « Vita e Voce » et des « Voix du Nord » qui ont gentiment pris le temps de remplir le questionnaire servant à ma réflexion, toutes les personnes avec qui j’ai pu échanger sur le sujet parmi lesquelles Michel Calvez, Olivier Dattin, Augustin Maillard, ainsi que les re­lecteurs de ce travail.
2 Intr oduction Nous avons débuté ce travail de réflexion à partir de plusieurs hypothèses : Quelle est ou quelles sont les origines des conflits ? Les frustrations des choristes ou du chef ne génèrent­elles pas une certaine forme d’agressivité qui par effet d’accumulation éclate en crise ? Quels sont les conflits les plus fréquents ou les plus spécifiques du chant choral ? Quelles en sont les évolutions ou issues possibles ? Nous sommes tous, depuis notre naissance, immergés dans toutes sortes de groupes (en famille, à l’école, au travail,…). Nous passons donc la majeure partie de notre vie au coeur de groupes que nous formons et que nous subissons. Michel Serres disait dans une émission sur France musique : « Le chœur est le modèle réduit de la société idéale », mais il serait utopique de penser que le chant choral et ses groupes (de loisir pour la majorité des choristes), échappent aux tensions et conflits. Il faut alors que ces derniers soient vécus comme des éléments productifs et non comme des poisons destructeurs. A partir de l’étude du concept de groupe, d’un point de vue psychologique et social, de l’analyse de situations conflictuelles typiques en chant choral, et d’une enquête réalisée auprès de différents chœurs ou chorales, nous nous proposons d’examiner les outils pour contribuer à rendre harmonieuse la vie de groupes musicaux.
3 1. Le fonctionnement du gr oupe A. Concept de groupe et définitions Le mot « groupe » n’est apparu que récemment chez Molière dans le Poème du Val­de­Grâce en 1669. Nous pouvons constater que les langues anciennes ne disposent d’aucun terme pour définir une association de personnes en nombre restreint. Elles opposent l’individu à la société (la foule) et définissent ces ensembles de personnes par leur fonction ou leurs activités (confrérie, corporation, cohorte, clan, cercle, cénacle…) 1. L’origine du mot groupe : 1671, emprunté de l’italien groppo (d’abord « nœud », d’où « assemblage » cf. ancien provençal et catalan grop « nœud »), qui vient probablement par le gothique du germanique kruppa, qui devait avoir le sens large de « masse arrondie », de là les sens très variés des mots de cette famille même dans les langues germaniques, cf. aussi cruppa « gros câble », dans une glose de basse époque et croupe. 1 Le mot « croupe », outre le sens hippique, renvoie à l’idée d’une forme ronde « géographie : sommet, colline de forme ronde » 2 et a pour origine le « francique kruppa qu’on peut supposer d’après l’allemand Kropf (goitre) » 3 . Il est intéressant de noter que ces deux mots ont comme origine commune la langue germanique. Celle­ci renvoie au nœud comme un assemblage ou comme un « entrecroisement qui réunit étroitement deux brins, deux fils, deux cordes, etc., ou simple enlacement serré d’un brin, d’un fil, d’une corde, etc., sur lui­même » 4 . Cette définition présente une certaine unité de deux choses qui s’entrecroisent pouvant prendre une forme symbolique du rond ; elle se vérifie dans les groupes humains. En effet ils sont constitués d’êtres tous différents, leurs interactions et interrelations créant un ensemble cohérent. 2. Définition sociale : Ensemble de personnes qui peut être plus ou moins grand, admettre des frontières plus ou moins précises, stables ou perméables, être plus ou moins structuré, et qui se caractérise par un certain degré de cohésion affective et d’unité de conduites, des attitudes et des croyances. 5 1 BLOCH Oscar, VON WARTBURG Walter, sous la direction de, Dictionnaire étymologique de la langue française, PUF, Paris, 2002, 2004, p. 308. 2 Dictionnaire le Petit Larousse, 1998, p.285. 3 Dictionnaire étymologique de la langue française, op. cit, p. 172. 4 Dictionnaire le Petit Larousse, op. cit p. 697. 5 Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse, 2002, p. 407.
4 Ou : ensemble, large ou restreint, de personnes ayant des traits communs (opinions, goûts, activités). 6 Le groupe peut évoquer une idée de force comme l’expression « se grouper », mais la vie en groupe peut susciter des réactions ambiguës et contraires : le groupe est rassurant et protecteur, mais il peut aussi écraser et dévorer ses membres. D’où les sentiments opposés de désir de se rapprocher d’autrui et de lui ressembler tout en se revendiquant unique et en se sentant isolé et seul au milieu du groupe. 3. Définition psychologique : D’un point de vue psychologique, le groupe est l’ensemble des relations entre l’individu et le collectif, transformant un agrégat d’individus en un groupe psychologique. Deux processus entrent alors en jeu : la personnalisation et l’individuation. La personnalisation est celui par lequel un système socio­culturel façonne l’esprit de ses membres. L’individuation est celui par lequel une personne acquiert une singularité sociale en trouvant un équilibre entre la ressemblance et la dissemblance avec autrui. Un groupe est donc constitué de personnes hétérogènes dont les interrelations créent un ensemble cohérent. Le jeu de ces différentes interactions, décrit par l’individuation et la personnalisation, semble nous renvoyer à la notion, évoquée ci­dessus, de nœud. Le concept de groupe est complexe et accepte un sens très large. Nous pouvons le remarquer en observant les synonymes qui lui sont attribués : ensemble, masse, foule, communauté, etc. Pour remédier à cette complexité, les psychologues Martin et Anzieu classent les groupes selon leur taille, leur degré de structuration, les relations entre les individus et les actions communes. Dans ce travail, nous nous limiterons aux notions de groupe restreint et de groupe élargi qui correspondent à la plupart des groupes chorals (entre treize et cinquante personnes). 6 Dictionnaire de sociologie, Le Robert Seuil, Paris, 1999, p. 247.
5 B. Places et rôles des individus qui les constituent Les groupes voient émerger, chez les individus qui les constituent, des fonctions, des comportements et attitudes que nous nommerons « rôles » ainsi qu’un ensemble de normes sociales (des règles, des valeurs, des coutumes, une culture commune). Dans la sociologie de Pierre Bourdieu, ces places et rôles sont intimement liés à la notion d’Habitus, concept qu’il définit de la manière suivante : « Les conditionnements associés à une classe particulière de conditions d’existence produisent des habitus, systèmes de dispositions durables et transposables, structures structurées disposées à fonctionner comme structures structurantes, c’est­à­dire en tant que principes générateurs et organisateurs de pratiques et de représentations qui peuvent être objectivement adaptées à leur but sans supposer la visée consciente de fins et la maîtrise expresse des opérations nécessaires pour les atteindre, objectivement « réglées » et « régulières » sans être en rien le produit de l’obéissance à des règles, et, étant tout cela, collectivement orchestrées sans être le produit de l’action organisatrice d’un chef d’orchestre. » 7 L’habitus est donc un système de dispositions durables acquis par l’individu au cours du processus de socialisation. Des dispositions, de natures très diverses, ont été perçues par l’individu, puis intériorisées. Notons que l’habitus est une notion complexe qui pourrait être perçue comme « cristallisant » l’individu ; mais nous soulignerons qu’il peut être aussi un mécanisme de changement. En effet, l’acte d’intériorisation intervient tout au cours de la vie des individus et peut les emmener à bouleverser l’ordre social dans lequel ils étaient installés. Pour résumer, l’habitus peut entraîner des individus à occuper des rôles ou des places dans un groupe qui sont en lien avec leur vécu. En 1948, Benne et Sheat ont élaboré une grille de lecture des groupes en différenciant les rôles tenus par rapport aux fonctions assumées par les individus dans un groupe. Les rôles peuvent être classés en trois catégories : Ceux qui favorisent l’activité du groupe par rapport à ses buts ; Ceux qui forment, maintiennent ou renforcent la cohésion du groupe Ceux qui font obstacle aux fonctions précédentes. 8 Le leader : personne qui a une certaine autorité sur un groupe. 9 7 BOURDIEU, Pierre, Le sens pratique, Paris, Éditions de Minuit, 1980. ANZIEU, Didier, MARTIN, Jacques­Yves, La dynamique des groupes restreints, Paris, PUF, 2004, pp. 370­372. 9 Grand dictionnaire de la psychologie, Larousse, 2002, p. 407.
8 6 D’après Benne et Sheats, le leader est « celui qui perçoit les besoins du groupe et s’efforce de les satisfaire, toute intervention centrée sur la tâche ou sur le maintien de la cohésion est un acte de leadership. » 10 Le conducteur d’un groupe doit être le garant d’un cadre permettant au groupe de remplir les tâches et d’atteindre les objectifs qu’il s’est fixés. Pour cela il se doit d’analyser les situations (dispositifs), de diagnostiquer les dysfonctionnements et ensuite d’intervenir. Kurt Lewin classe les leaders en plusieurs catégories : le leader autocratique, le leader démocratique, et le leader « laisser­faire ». Dans un ensemble choral, le leader peut être le chef de chœur ou un choriste ; la pratique tend à montrer qu’ils peuvent chacun endosser un ou plusieurs personnages (père, coach, visionnaire, chef, patron, gourou). Dans le cas du chef de chœur, le leader sera soit désigné (celui du groupe qui est vécu comme le plus « musicien »), soit recruté, par une administration du groupe, dans le cas d’un chef professionnel. Dans le cas du choriste, il sera choisi, coopté, ou émergera donc du groupe, pouvant être un membre important du bureau qui accueille l’adhésion de chacun (s’il s’agit d’un chœur associatif). Le leadership : Fonction assumée, avec un certain style, par un individu, un sous­groupe, ou un groupe placé dans une situation définie, visant à influencer de manière significative ou même à transformer la conduite d’autrui (homme, groupe, organisation) afin que celui­ci progresse vers les buts qui lui sont assignés ou réalise la tâche exigée. 11 Le bouc émissaire : En psychologie des groupes, personne rendue responsable par le groupe d’un dysfonctionnement et jouant aux yeux de l’observateur un rôle d’informateur ou d’indicateur de ces dysfonctionnements. 12 Le bouc émissaire naît d’une frustration du groupe, dans l’impossibilité d’atteindre ses objectifs, qui retourne cette agressivité vers la cible la plus facile : soit une personne soit un sous­groupe minoritaire. La présence dans tous les cas d’un bouc émissaire, ou son émergence en cas de période moins faste, est­elle indispensable à la bonne marche du groupe ? Les autres rôles : 10 La dynamique des groupes restreints, op. cit. p. 276. Grand dictionnaire de la psychologie, op. cit. p.407. 12 Ibid. p. 128.
11 7 Ils sont regroupés en deux grandes catégories : ceux qui sont plutôt favorables à la vie du groupe ainsi qu’à l’avancée de la tâche, et ceux qui sont néfastes pour la cohésion et le travail. Les rôles de maintien de la cohésion : celui qui encourage les autres, celui qui cherche à établir l’harmonie entre les membres du groupe, celui qui favorise les compromis, celui qui sert de relais, celui qui formule les normes du groupe, celui qui observe et commente, celui qui opine du bonnet ; Les rôles « parasites » : l’agressif, le freineur, l’intéressant, celui qui prend le groupe pour un tribunal, le négateur, le dominateur, le battu d’avance, l’avocat d’intérêts particuliers. 13 Ces rôles sont plus ou moins présents suivant les groupes ; ils ont été représentés par Marie Nimier dans son roman Anatomie d’un chœur. 14 Éric Berne a mis au point, dans les années 50 aux Etats­Unis, une théorie : l’analyse transactionnelle 15 , qui concerne la complexité de la personnalité. Elle analyse la structure de celle­ci, la communication entre les gens, les règles qui sont instituées dans les relations de groupe. Ce psychologue a établi une relation entre ce qui est appelé « l’état du moi » et les langages particuliers qui leur sont associés, ainsi que les différentes perceptions des messages correspondant à ces états du moi. Ces états sont décrit dans le tableau ci­dessous : 16 13 La dynamique des groupes restreints, op. cit. pp. 371­372. NIMIER, Marie, Anatomie d’un chœur , Paris, Gallimard, 1990. 15 BERNE, Éric, Analyse transactionnelle et psychothérapie, traduit de l’américain par Sylvie 14 Laroche, Petite Bibliothèque Payot, éditions Payot, Paris, 1971, 1977, 1990. 16 CARRÉ, Christophe, Savoir communiquer avec un groupe, éditions Retz, Paris, 1999, p. 39.
8 Nous pouvons souligner l’importance pour le leader et/ou le chef de chœur d’être conscient de ces différents états et de puiser des ressources comportementales et analytiques dans chacun d’eux. Il est primordial pour le leader d’un groupe musical d’avoir dans sa personnalité : le côté responsable de l’adulte ainsi que ses raisonnements, le côté protecteur et surtout celui de guide du parent, enfin le côté candide et naturel de l’enfant (laissant paraître et transmettant ses émotions liées à la musique). Nous soulignons néanmoins les dangers de dérives possibles dans une relation (pour un leader comme pour un pédagogue) d’avoir une attitude trop parentale (maternelle ou paternelle).
9 2. Étude de deux types de conflits typiques en chant chor al. A. Le leader « débordant » de la chorale A… Cette chorale est dite « d’éducation populaire », le principe est que tout nouveau se présentant est accepté ; aucune sélection n’est faite. Elle est gérée en association avec un conseil d‘administration et un bureau. J’étais engagée par celle­ci en qualité de chef de chœur. J’ai pu observer plusieurs difficultés menant à un conflit important. 1. Un leader qui veut tout contrôler Dans ce groupe, la présidente, elle­même choriste, tenait une place très importante ; en effet tout ce qui s’y déroulait devait passer par elle : l’administratif, l’organisationnel et le musical. Pour l’administratif et l’organisationnel, elle s’occupait de tout et critiquait les quelques initiatives venant d’autres personnes. Il en allait de même pour le domaine musical. Elle voulait décider du programme de chaque répétition (les partitions abordées) et de la méthode de travail. Elle avait été elle­même enseignante et avait fait des études musicales pendant quelques années dans sa jeunesse, et pensait ainsi être en mesure d’occuper des fonctions de direction artistique. J’avais personnellement l’impression que la présidente outrepassait son rôle, qui était de veiller au bon fonctionnement de l’association. Son intervention m’aurait semblé justifiée si les objectifs du groupe (qui étaient d’étudier, de pratiquer et de propager le chant choral) n’étaient pas maintenus et si les retours du public ainsi que des choristes n’étaient pas globalement positifs. 2. La remise en cause des choix artistiques du chef A la fin de ma deuxième année avec ce groupe, j’ai proposé d’unir les deux chœurs dont j’avais la charge (deux chœurs associatifs d’un niveau musical équivalent) pour monter un programme de musique baroque avec solistes et ensemble à cordes. Les années précédentes j’avais accepté, parfois sous une certaine pression de la part de la présidente, de grands projets de regroupements chorals et dont la direction musicale était assurée par d’autres chefs. La présidente disait craindre le départ de choristes si nous ne participions pas à ces regroupements.
10 Mon projet de musique baroque, après avoir été accepté au mois de juin, s’est trouvé remis en cause après la rentrée de septembre par la présidente. Au cours d’une discussion avec elle et un choriste, dans laquelle j’avais exposé les aspects du projet qui me semblaient intéressants, je lui ai demandé les raisons de son opposition, raisons qui ne me sont pas apparues avec évidence. 3. Les pressions exercées La présidente me rapportait des paroles alarmantes de choristes en difficulté, sans accepter de les nommer alors que je le lui demandais afin d’essayer d’ajuster mon comportement à leur égard. Cela a entraîné un questionnement de ma part : pourquoi ces choristes ne venaient­ils pas en parler directement avec moi ? Étais­je inaccessible ? Était­ce une question de confiance ? Ou n’avaient­ils pas le désir, procédant ainsi, de plaire à la présidente dont ils avaient bien analysé le fonctionnement ainsi que sa supériorité sur moi dans la vie du groupe ? D’un autre côté un bon nombre de choristes ne voulaient pas dire ouvertement ce qu’ils pensaient, car le leader (la présidente) s’était rendu indispensable. Ils acceptaient cet équilibre de groupe (supporter cette personne qui faisait tout pour eux) peut­être par peur du changement et/ou des responsabilités engendrées. Il est en outre important de préciser que je venais remplacer un chef qui lui était très cher et auprès duquel elle pensait fêter ses trente ans de choriste dans ce groupe. 4. Conclusion Ces faits ont créé un climat peu favorable au bon fonctionnement du groupe : beaucoup de non­dits, des pressions, une certaine animosité et agressivité sous­jacente de la part du groupe envers le leader. Dans cette ambiance, je n’ai pas réussi à instaurer une atmosphère propice à la discussion ; je ne me sentais plus apte à travailler dans de telles conditions, j’ai donc décidé de présenter ma démission. Parallèlement, j’ai pu réaliser le projet de musique baroque avec l’autre chœur dont j’avais gardé la charge, ce qui a abouti à deux concerts.
11 Ce conflit m’a amené à questionner mes orientations professionnelles tout en m’interrogeant sur mes envies et mes capacités à m’occuper de groupes ainsi que sur mes facultés à réagir si des situations semblables se présentaient à nouveau. B. Orientations et choix artistiques d’un groupe : quelle discussion ? 1. Présentation du chœur B. Pendant mes études, j’ai chanté dans un chœur de chambre composé de choristes amateurs (seize chanteurs – huit femmes et huit hommes ­ recrutés sur audition), qui dépendait d’un C.N.R. et d’une E.N.M. Cet ensemble, créé en 1995, menait des projets artistiques de natures très diverses tant par le répertoire (du grégorien à nos jours en passant par les musiques traditionnelles et actuelles) que par les lieux de diffusion (animations en maison de retraite, concerts lors de festivals, concours). Après un programme avec piano de la période classique au XX e siècle, le chœur a abordé un tout autre type de programme ayant entre autre l’objectif de toucher un public nouveau. La spécificité de ce programme résidait dans le fait de créer un spectacle avec mise en scène, autour d’un répertoire de la renaissance à nos jours, pouvant être représenté aussi bien dans des salles que dans la rue, et ayant pour thème « l’extravagance ». Pour cela le chœur a collaboré avec un metteur en scène professionnel. Pendant le début de l’apprentissage musical, le metteur en scène est venu prendre contact avec le groupe, s’imprégner du programme musical, puis rapidement nous avons commencé à travailler la mise en espace. Il proposait des tableaux ainsi que des idées directrices, le groupe faisait des essais, et ensuite la proposition était réajustée. 2. Les difficultés rencontrées ­ Chanter en bougeant, et assumer une mise en scène par la présence et le jeu théâtral ; ­ Mémoriser cette mise en scène avec des enchaînements qui ont beaucoup changé en cours de route ;
12 ­ Mémoriser les pièces (en effet plus de la moitié du programme était à apprendre par cœur) ; ­ Changer en permanence de style entre les différentes pièces ; ­ Mettre en valeur les compétences instrumentales des choristes. En effet chacun joue d’un ou plusieurs instruments qu’il a pu pratiquer, qu’il pratique ou non (comme des appeaux, des tuyaux harmoniques, la flûte traversière, la guitare…), pour accompagner les différentes pièces ou pendant les moments d’improvisation. Devant l’ampleur de la tâche, un certain nombre de choristes a pris peur, ce qui a entraîné d’abord des échanges en petits groupes jusqu’à ce que certains expriment le choix d’arrêter leur participation à cet ensemble ou s’opposent à la proposition artistique. 3. La gestion du conflit Le conflit a été géré par de nombreux moments de discussion (entre le chœur et le chef) pour cibler les craintes, en prendre conscience, et pour trouver des solutions confortables pour chacun ; mais aussi par des moments plus individuels d’entretien chef/choriste ainsi que des moments de rencontres improvisés entre choristes, dans le but de dédramatiser la situation pour les plus inquiets. Beaucoup de mails ont été échangés et de nombreux contacts téléphoniques ont eu lieu. Les solutions : La mise en scène a été aménagée pour que ceux qui avaient besoin d’un pupitre en aient un à proximité ou puissent avoir les partitions. Pour la mémorisation, des « antisèches » ont été confectionnées de la manière la plus extravagante possible pour s’insérer dans la mise en scène. Le spectacle a été rodé plusieurs fois devant un public restreint d’amis et de connaissances. Le projet de spectacle de rue a été pour l’heure abandonné. 4. Conclusion Le groupe a réussi à surmonter les différentes difficultés. Le conflit, dont l’expression était celle d’un refus de la proposition musicale du chef, s’est en fait
13 révélé comme étant une peur de l’inconnu et une peur devant une somme de complexités importantes. Seul un choriste a quitté le groupe, davantage en raison du programme musical que par rapport à la mise en scène. Après un certain recul, je peux dire que ce programme a été marquant dans l’histoire du groupe, chacun s’est un peu révélé grâce à l’écoute et à l’entraide de tous. Je pense ne pas m’avancer en disant que ce programme, débuté il y a maintenant quatre ans, est encore repris avec plaisir.
14 3. Str atégies pour conduir e un gr oupe chor al En nous reportant aux réponses du questionnaire, nous pouvons constater qu’une majorité des choristes a déjà vécu une situation conflictuelle au cours de sa pratique (51,5%). Ces situations étaient dues à : des problèmes de personnes, des caractères ne s’accordant pas, des jalousies entre certains participants, des paroles vexantes et blessantes de la part du chef, des personnes qui perturbent les répétitions et qui veulent remplacer le chef, un intervenant vocal peu apprécié, un chef qui ne travaille pas ses partitions, un chef qui abandonne le chœur la veille d’un concert. La plupart du temps, les choristes évoquent que le conflit a abouti au départ d’une ou plusieurs personnes, voire à la scission du groupe : « À chaque
fois que j’ai pu assister à une situation conflictuelle, cela s’est résolu par le départ
d’une des personnes impliquées. » ou « le groupe s’est scindé en deux parties, l’une
restant avec le chef, l’autre partant créer une autre association ». Nous reportons en annexe une partie des propos des choristes interrogés. Afin de gérer la vie d’un groupe choral de la façon la plus harmonieuse possible nous proposons une « boîte à outils ». A. Gestion du conflit 1. Étymologie et définitions XII e emprunté du latin de basse époque conflictus (de confligere « heurter »). 17 Le mot « heurter » exprime la violence d’une entrée en contact. Les définitions du mot « conflit » peuvent avoir des nuances : Antagonisme, opposition de sentiments, d’opinions entre les personnes ou des groupes 18 ou Affrontement entre des personnes ou des groupes de personnes. 19 Elles montrent que le conflit peut avoir différents niveaux qui vont de la simple opposition d’opinions jusqu’à la guerre déclarée, en passant par différents degrés d’affrontements. 17 18 19 Dictionnaire étymologique de la langue française, op. cit. , p. 150. Dictionnaire le Petit Larousse, op. cit. p. 247. Dictionnaire de l’Académie française en ligne : http://www.academie­francaise.fr/dictionnaire/
15 2. Attitudes et comportements Pour pouvoir traiter un conflit déclaré, il faut se questionner sur sa nature et distinguer quels sont les désaccords exprimés. Ils peuvent porter sur : les faits, les méthodes, les objectifs, les personnes (un désaccord sur les objectifs peut cacher en réalité un problème d’incompatibilité d’humeur), ou les valeurs. Les conflits peuvent être gérés de différentes manières qui ont chacune des avantages et des inconvénients. Ces modes de gestion du conflit dépendent de l’intensité du désir de collaborer et de s’affirmer chez chacun des participants.
· Le retrait ou la fuite permettent d’avoir davantage de temps pour la réflexion, l’analyse, ainsi que de récupérer des forces, mais ils peuvent aussi favoriser l’escalade des tensions et être perçus comme une attitude de faiblesse de la part du leader.
· La recherche de domination peut faire apparaître une solution rapide, en permettant de sécuriser un certain nombre de personnes, avec parfois une certaine satisfaction personnelle pour le leader. Cependant elle provoque une rupture dans la communication, une passivité chez les membres du groupe qui sont déresponsabilisés et ils ne sont plus dynamisés par les échanges.
· La recherche d’apaisement peut être efficace si l’enjeu est minime car elle calme les esprits, améliore la relation et donc sécurise à court terme. Mais elle peut être perçue comme le refus de prendre ses responsabilités et elle peut maintenir un conflit « larvé » qui pourra éclater à un moment donné comme une « goutte d’eau fera déborder le vase».
· La négociation peut renforcer la confiance, construire une solution pour le long terme, sur laquelle on pourra s’appuyer et développer la motivation ainsi que la responsabilité de l’autre ; mais elle demande du temps et peut contribuer à déstabiliser l’image traditionnelle du chef. Il faut aussi prendre en compte le fait que tous les sujets de discussion ne relèvent pas nécessairement de la négociation, comme les choix d’interprétation, qui sont en dernier ressort le choix du chef (personne qui a la responsabilité musicale et artistique du groupe).
16 · La recherche de compromis peut débloquer une situation en créant un climat d’ouverture, de conciliation ; elle permet aussi à chacun d’obtenir satisfaction sur une partie de ses intérêts, mais elle peut laisser une impression d’inachevé et de marchandage. De ces différentes attitudes, aucune n’est miraculeuse ; on peut user, suivant les situations de l’une ou de l’autre, voire de plusieurs ; tout dépend de la sensibilité de chacun et du contexte. La fuite ou l’évitement ne sont pas, à notre avis, des attitudes très favorables car elles laissent pourrir le conflit qui peut rester latent et, ensuite éclater de manière encore plus violente. De la même manière, affirmer son autorité et sa domination en abusant du rôle qui nous est imparti pourra créer un climat de malaise, de tensions peu propice à l’accomplissement de la tâche. Nous soulignons cependant l’importance qu’il y a à responsabiliser chacun en expliquant les conséquences de leurs actes mais en évitant de créer des sentiments de culpabilité. Traiter un conflit en réaffirmant des points communs entre les parties (comme les objectifs, les savoir­faire, les valeurs) permet d’établir une base partagée sur laquelle peut débuter une discussion. Dans la même idée, l’emploi du « nous » crée des liens, renforce la cohésion ainsi qu’une base commune pour des perspectives d’avenir. Il faut aussi être attentif au fait que, dans la gestion de conflits, les choristes qui, d’après leurs compétences, peuvent être classés parmi les rôles de « maintien de la cohésion » ont une grande importance et peuvent être d’un grand soutien en jouant les rôles de médiateur ou de conciliateur entre les différents acteurs. B. Les types de communication 1. L’assertivité Les quatre attitudes classant les comportements humains sont : la fuite, la manipulation, l’agressivité et l’assertivité. L’assertivité (mot venant de l’anglais « assertiveness » assurance, affirmation de la personnalité) est le fait de s’exprimer de façon sensible et réfléchie permettant ainsi des actions adaptées par
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rapport aux situations. C’est une affirmation de soi (avec un respect de soi) qui se lie avec le respect d’autrui. Elle permet d’oser entendre et d’oser dire. L’assertivité, en tant qu’attitude et manière d’être, ne relève pas, dans la communication, que du système langagier ; elle met en oeuvre également le système corporel (position, mouvements, mimiques faciales, respiration) et le système paraverbal (placement de la voix, articulation, variations de hauteurs, intensité, timbre, débit, rythme, pauses). Cela peut être l’objet d’un travail dans le temps comme de pouvoir adapter le débit et l’intensité des paroles en fonction des situations. 2. La « communication non­violente » Elle présuppose une relation de confiance et une ouverture à soi et à l’autre ; en cela cette technique est proche de l’assertivité. Le processus se déroule en quatre étapes :
· observation des faits,
· identification des sentiments de chacun,
· identification des besoins de chacun
· formulation de la part des communicants de demandes claires, précises et concrètes. Elle est basée sur l’importance du langage avec en particulier une attention portée aux mots, à ce qu’ils cachent ou révèlent. La formulation est aussi primordiale : la CNV insiste sur la capacité à exprimer des faits précis plutôt que d’émettre des jugements sur l’autre. Enfin il est intéressant dans ce type de communication de s’exercer pour acquérir une capacité à entendre les sentiments et les besoins exprimés par l’autre. C. Axes de travail 1. Importance du conflit : le conflit comme outil Le conflit d’intensité faible, comme un simple désaccord, peut devenir la source d’un échange et de discussions permettant un dynamisme et une vitalité du groupe. Le débat peut entraîner la réaffirmation des valeurs, des objectifs de l’ensemble. En ce sens, le conflit est alors constructif car il entraîne une
18 collaboration et une implication de chacun. Le chœur B a eu récemment une discussion sur la faisabilité de diffuser le programme ayant pour thème « l’extravagance » dans une église. Cette discussion s’est tenue suite à la demande d’un comité des fêtes, qui proposait comme lieu l’église paroissiale (faute de mieux en équipements de diffusion du spectacle vivant). Les choristes ont exprimé leurs sentiments tout en envisageant les réactions possibles des spectateurs, ainsi que celles de la communauté religieuse locale. Le chef a pris note de ces discussions et a transmis les interrogations au comité des fêtes pour qu’une décision commune et concertée soit prise. Un groupe n’ayant pas de divergences d’opinions, ou qui ne voit pas ses oppositions s’exprimer, est enclin à la routine et à un manque de dynamisme qui peut voir le départ de certains choristes pouvant, en situation extrême, amener à la mort de l’ensemble. Un choriste évoque le cas d’un tout jeune groupe, dont il fait partie, qui se réunit régulièrement, et dont le projet de chœur n’a pas été clairement défini : certains ont exprimé le souhait de se produire en concert mais cela n’a pas abouti. Cette situation amène certains choristes à ne plus venir régulièrement ou plus du tout aux répétitions. Nous soulignerons les interrogations de cette personne quant à la vie de cet ensemble : de quelle manière ce groupe va évoluer d’ici la fin d’année scolaire et va­t­il reprendre ses activités en septembre prochain ? 2. Attribution de rôles Pour le bon fonctionnement d’un groupe choral, et dans le souci d’un « partage des pouvoirs », il peut être intéressant et dynamisant qu’il y ait deux leader (l’un musical et l’autre administratif). Cependant, pour cela, il faut clarifier les rôles et aires de compétences de chacun des leader ainsi que des instances qui garantissent la bonne vie de l’association et donc du groupe. De plus, permettre à chacun des membres du chœur de s’investir dans la vie du groupe peut être extrêmement enrichissant. Il n’est pas rare dans ces groupes de voir des postes ou des commissions, avec des tâches précises comme : affiches, programmes, technique, relation avec la presse, relation avec les lieux de diffusion, etc., celles­ ci aident à la bonne marche du groupe et donc au projet artistique.
19 3. Gestion des tensions et détentes : le rire comme élément important Le climat dans lequel le groupe évolue est important pour la qualité du travail. D’où le côté essentiel du rire et de l’humour qui permettent de dédramatiser la plupart des situations. Citons deux exemples récents. Une choriste, qui est plutôt dans le rôle de la « râleuse pessimiste» et qui se plaint souvent de ne pas connaître assez bien ses partitions (sous­entendu que le chef ne les a pas fait assez travailler à ce pupitre), se retrouve seule pour chanter sa voix dans une partition suite à diverses absences ainsi qu’à la division des pupitres (voix de femmes dédoublées en six parties distinctes). Avant d’aborder cette pièce, je fais toujours une vérification afin de voir si les choristes se sont bien regroupés par voix ; mais aussi pour me re­visualiser la spatialisation. Donc ce soir là, je m’aperçois qu’elle est seule. Pendant le travail, j’ai été très attentive à elle, pour qu’en cas de défaillance je puisse l’aider rapidement. À la fin de la séquence, le bilan était très positif : elle n’avait pas eu besoin d’aide spéciale car elle assurait sa partie et cela joliment. Je me suis donc permise de le faire remarquer à l’ensemble mettant ainsi cette choriste en valeur ; elle avait quitté momentanément le personnage de râleuse. Depuis nous avons fait ensemble un concert et une seule répétition ; je me demande si ce fait va durablement changer son comportement? L’autre exemple récent concernant l’ensemble vocal dont j’ai la charge s’est passé à la répétition du jeudi 29 mars (dernier rendez vous avant les vacances de printemps). Trois jours avant, nous passions au CEFEDEM une évaluation d’interprétation pour laquelle l’ensemble était gentiment venu, me permettant ainsi de présenter des exemples musicaux; ce fut un moment chargé d’une certaine tension en raison de l’enjeu. À la répétition suivante j’ai senti un besoin de relâcher cette pression : plusieurs blagues et calembours ont fusé permettant des éclats de rire collectifs. J’aurais pu à ce moment là les réprimer, mais mon ressenti du groupe m’a poussé à laisser faire (j’en ai profité pour rire) tout en ramenant ensuite le groupe à la tâche. De ces exemples, nous soulignerons qu’il est important de gérer dans la dynamique de groupe les tensions et surtout les détentes. Il est primordial de savoir accepter qu’après un moment plus stressant, le groupe se relâche, prenant
20 ainsi des forces pour affronter les pressions à venir. Dans ces moments de détente, le rire et l’humour sont de bons indicateurs de l’état du groupe. 4. Favoriser la communication choriste / chef Des moments informels de communication privilégiée, entre le chef et un choriste ou un petit ensemble de choristes, peuvent s’établir avant ou après les répétitions, pendant les moments d’attente, pendant les « verres de l’amitié » qui suivent la plupart des prestations publiques, au cours des repas. Pendant ces moments, les places de chacun sont différentes : le chef n’est plus devant et les choristes évoluent librement ne restant pas à leurs places habituelles. D’où, l’importance de ces instants qui ponctuent l’année voire les années passées ensemble (comme le pot de rentrée ou de bienvenue aux nouveaux, la galette des rois, le repas de fin d’année, les annonces de mariage, de naissances, les pots de départ à la retraite, etc.). On pourrait penser que ces temps passés à faire autre chose que de la musique ne font pas avancer la tâche musicale et qu’ils sont des prétextes à s’échapper du travail. Mais nous pouvons estimer au contraire que renforcer les liens et les interactions entre les participants, augmente le dynamisme ainsi que la cohésion, et amène à une meilleure qualité de travail par la suite. Les résultats de notre enquête, auprès des choristes interrogés dans le cadre de ce mémoire, confirment l’importance de ces moments de socialité. À la question : Quelles sont vos motivations pour venir chanter en chœur ? La plupart évoque des raisons sociales comme le partage, l’écoute, les rencontres, l’ambiance, le climat, la vie associative. (cf. Annexe) Dans certains chœurs sont instaurés des moments plus formels d’audition et / ou d’entretien pendant lesquels un bilan – évaluation est dressé, tant par le chef vis­à­vis du choriste que l’inverse. Voici un exemple d’entretiens dans un chœur : le chef laisse d’abord la parole au choriste qui peut ainsi exprimer librement ses sentiments ; ensuite, des questions précises sont évoquées. Chacun peut alors exprimer ses sentiments et ses besoins éventuels dans le but d’un réaménagement possible. Cela engage une discussion qui peut être ramenée au groupe dans un souci d’amélioration des dispositifs.
21 Ces deux types de moments (formels et informels) permettent aux personnes peu enclines ou mal à l’aise pour s’exprimer devant le groupe, de pouvoir néanmoins le faire tout en ayant la possibilité d’être entendues. 5. Favoriser la communication dans le groupe Dans le but de créer une cohésion, il est important que chacun des choristes sache ce que va lui apporter sa présence dans le groupe. C’est pourquoi nous conseillons que tout nouvel arrivant dans un chœur se voit remettre ou énoncer le « projet du chœur », il sera ainsi au courant du fonctionnement de l’ensemble. Il est important lors des situations conflictuelles de redire en partie ou en totalité ce projet ce qui permet de rassembler autour de notions communes. Bien souvent ce sont les personnes ayant des rôles de maintien de la cohésion (« celui qui formule les normes du groupe », cité dans le 1.B), et pas nécessairement le chef de chœur ou le président, qui se chargent intuitivement de le faire. La réexposition de ce projet, lorsque cela semble nécessaire, peut éviter des malentendus : dans l’exemple du chœur B, le choix de prestation publique (spectacle avec une ouverture vers d’autres publiques et d’autres lieux) était rattaché aux projets d’établissements desquels dépendait cet ensemble (et non un choix arbitraire du chef de chœur), ce qui était ignoré de certains choristes. Le projet de chœur peut aussi être un moment de concertation générale dans laquelle chacun s’implique pour la réflexion et la rédaction. Nous notons que l’important n’est pas forcément le but atteint (l’écrit) mais le chemin parcouru par le groupe (la réflexion et ainsi le renforcement de la cohésion et d’une moindre inertie). La prise en main de son avenir par le groupe est essentielle car nous pouvons remarquer que toute proposition imposée, venant de l’extérieur ou du leader peut être perçue comme une attaque et donc sera naturellement rejetée. Au contraire, des propositions acquises après réflexion sont plus facilement et plus globalement acceptées. Cette façon d’accepter le changement est décrite par Anzieu : La prise de décision par le groupe aboutit à la suppression de l’inertie naturelle du groupe avec une capacité de mobiliser ses énergies pour entreprendre de nouvelles tâches. Elle modifie son équilibre quasi stationnaire en facilitant l’érosion des normes anciennes et la cristallisation de nouvelles normes (perçues par tous comme « raisonnables »). Elle est actuellement considérée comme le moyen le mieux approprié
22 à la prévention du phénomène de « résistance au changement », qui s’oppose aux 20 initiatives fécondes. Nous prenons l’exemple du chœur B dans lequel la décision a été prise de rédiger un règlement intérieur complémentaire aux statuts de l’association. Une équipe de volontaires s’est chargée de proposer un document qui a été ensuite remanié. Le chef était présent à toutes les discussions donnant un regard de professionnel du chant choral, mais sans pour autant diriger les séances. Nous pouvons constater que dans ce cas, le groupe s’est organisé en vue d’apporter des clarifications et des changements à son fonctionnement. Le projet de chœur peut contenir aussi un article concernant les attentes vis­à­vis des choristes, en particulier dans les ensembles qui prétendent à un certain niveau de qualité. Les attentes peuvent rappeler les règles de vie en groupe (ponctualité, régularité, travail personnel des œuvres, durée d’engagement des choristes…) mais aussi l’exigence artistique du groupe (exemple dans le chœur de l’ONPL : chaque choriste est admis pour une période de trois ans au­delà de laquelle il peut prolonger sa participation après une nouvelle audition. Celle­ci permet de maintenir des exigences et attentes conformes au projet du choeur). Des moments de bilan collectifs peuvent être instaurés après les « événements » de la vie du groupe. Il faut pour cela créer un climat dans lequel chacun pourra s’exprimer sereinement et recevoir la parole des autres. Bannir les jugements ou les réactions immédiates ou puériles n’est pas chose facile, d’où l’importance de l’éducation régulière du groupe et du chef à cet exercice. Pendant ces moments, les attentes non comblées et les frustrations peuvent s’exprimer, permettant un réajustement de l’organisation du groupe. Aussi, pendant ces temps de paroles, le chef de chœur doit pouvoir montrer qu’il est ouvert aux propositions et critiques de chacun : en proposant la parole à ceux qui le souhaitent ou demander à chacun de dire quelque chose, de donner la parole aux nouveaux venus en premier, aux plus timides. Ainsi il ne sera pas perçu comme un leader autocratique et totalitaire. Les résultats du questionnaire (cf. Annexe) relèvent ces attentes des choristes vis­à­vis du chef : l’attente d’humanité est mise en avant (18,4%), à l’inverse de l’autorité (3,1%) qui, à chacune de ses évocations, était accompagnée d’une phrase comme : « qu’il impose son autorité par ses 20 La dynamique des groupes restreints, op. cit. p. 187.
23 connaissances et non par la contrainte ou la discipline scolaire ». Si nous regroupons certaines des réponses, nous pouvons souligner les tendances des attentes vis à vis d’un chef de chœur : ­ qu’il sache transmettre ce savoir (pédagogie et humanité : 35,7%) ; ­ qu’il connaisse son métier (connaissances musicales et vocales, de direction : 30,6%) ; ­ qu’il soit un guide (qu’il sache conduire le groupe, l’écouter, qu’il puisse partager son amour et sa passion : 26,5%). Les attentes des choristes vis­à­vis du leader musical sont donc multiples : il doit pouvoir transmettre sa passion ainsi qu’un savoir (qu’il maîtrise), tout en étant un guide pour le groupe en faisant preuve d’humanité. Nous sommes loin de l’image des chefs autocratiques et totalitaires.
24
Conclusion Ce travail de réflexion, qui avait pour objectif premier d’acquérir des outils pour la gestion des conflits ainsi qu’une compréhension plus fine des groupes tant d’un point de vue sociologique que psychologique, a trouvé au fil du temps un second objectif, tout aussi important : permettre une communication par l’émergences des critiques dans tous les sens du terme (attentes insatisfaites, désirs de chacun), et l’expression des diverses propositions, pour bâtir une réflexion permettant une dynamique ainsi qu’une vitalité commune du groupe. C’est pourquoi nous tenterons de favoriser la communication entre tous les membres du groupe (choristes/choristes comme choristes/chef et chef/choristes) dans divers moments et par divers moyens comme les bilans, la rédaction du projet de chœur. Dans ces moments, nous veillerons à être attentif aux modes de communication pour permettre à chacun de s’exprimer tout en étant entendu par l’ensemble, ainsi qu’aux divers rôles tenus par chacun. Dans cette gestion de la dynamique de groupe, prendre en considération l’alternance tension/détente (que nous retrouvons aussi dans les partition) comme un besoin vital témoigne de l’importance accordée au côté humain de cette discipline, qu’est la direction de chœurs, dans laquelle le rire et l’humour sont un aspect incontournable. De l’hypothèse de départ : l’origine des conflits est­elle à chercher dans une agressivité latente, nous réajusterons cette question en remplaçant « conflit » par « crise » et nous dirons oui dans le sens où un conflit larvé peut éclater en une crise de grande importance. Mais il peut avoir des origines bien différentes comme la méconnaissance ou la non­connaissance : du projet de chœur, des valeurs, des objectifs.
25 Nous nous posions la question de savoir s’il existait des conflits fréquents ou spécifiques au chant choral. Après l’exploitation du questionnaire, nous pouvons dire qu’il existe bien des spécificités dans les conflits (prise de pouvoir trop importante ou recherche de prise de pouvoir de la part du chef de chœur, ou d’un choriste, problèmes relationnels) et que souvent ils aboutissent soit au départ d’une des personnes soit à son retour dans le rang. Cette étude nous apporte maintenant une lecture plus fine des groupes ainsi que des systèmes de communication. Elle nous permet d’être plus armé et préparé à la résolution de crises et de mieux se servir des conflits comme d’axes de travail et de possibilités de communication au sein du groupe.
26 ANNEXES
27 ANNEXE 1 : QUESTIONNAIRE pour les CHORISTES Quelle est votre expérience en tant que choriste : Avez­vous chanté dans d’autres chœurs ? Si oui quels types de chœurs ? Et combien d’années ? Avez­vous pratiqué le chant ? Combien d’années ? Avez­vous pratiqué la formation musicale ? Combien d’années ? Avez­vous pratiqué un instrument ? Lequel et combien d’années ? Dans quel pupitre chantez vous ? Quelle est votre profession ? Dans quelle catégorie d’âge vous situez vous ? 15­25 ans 25­35 ans 35­45 ans 45­55 ans 55 ans et + _________________________ Que représente pour vous la musique et le chant ? Quelles sont vos motivations pour venir chanter en chœur ? Qu’attendez vous d’un chef de chœur ?
28 Que pensez vous des relations humaines à l’intérieur de ce chœur ? Quels sont vos souhaits et/ou vos regrets concernant ce chœur ? Avez­vous déjà vécu, dans un chœur, une situation conflictuelle ? Si oui, pouvez vous l’évoquer ? A­t­elle eu des effets positifs ou négatifs sur le groupe ?
29 ANNEXE 2 : RÉSULTATS DU QUESTIONNAIRE PREMIÈRE PARTIE : REPRÉSENTATION DU PANEL Représentation du panel par tranches d'âge en pourcentages avec les années d'expérience 40 35 12 30 25 15 6 20 3 0 15 0 3 0 3 6 6 3 0 10 3 0 3 0 3 5 6 6 3 3 9 6 0 0 18 ­ 25 ans 25 ­ 35 ans débutant 35 ­ 45 ans 1 à 3 ans 4 à 6 ans 45 ­ 55 ans 6 à 10 ans 10 à 20 ans 55 ans et + 20 ans et + Nous pouvons remarquer que plus des deux tiers des choristes interrogés ont plus de 45 ans, mais aussi que dans le panel, les débutants sont présents dans presque toutes les catégories d’âge. représentations des types de choeurs en pourcentages
35 31,4 30 25 19,7 20 15,7 17,6 15 10 11,7 5 3,9 0 chorale chœur mixte chœur scolaire % ensemble vocal chœur à voix égales autre 30 Définition des types d’ensembles : Chorale : ouverte à tous, aucun niveau requis Chœur mixte : avec un niveau minimum demandé (comme les chœurs de conservatoires) Chœur scolaire : ensemble rattaché à un établissement (école primaire, collège, université, école de formation professionnelle) Autre : regroupe les ensembles spécialisés dans certains répertoires comme les ensembles de cabaret, d’opérette et d’opéra ou les chorales paroissiales. culture musicale des choristes interrogés 80 72,7 70 63,6 60 57,6 50 42,4 36,4 40 27,3 30 20 10 0 1 oui non oui non oui non pratique de cours de chant pratique de la FM Pratique instrumentale Nous pouvons noter que beaucoup de choristes ont eu une expérience d’instrumentiste accompagnée de la pratique de la formation musicale. Certains précisent, pour l’instrument (ils sont très divers, toutes les familles sont représentées sauf celle des percussions), que cette pratique a eu lieu pendant l’enfance « Je reprends des cours cette année après une quinzaine d’années d’interruption », contrairement au cours de chant qui ont été plutôt débutés à l’âge adulte, en complément de la pratique chorale (comme certains le précisent : « depuis 3 ans », « cela fait 5 ans »).
31 répartition des choristes par pupitres et sexe 70 60,6 60 50 42,4 39,4 40 30 18,2 18,2 21,2 20 10 0 soprane alto ténor basse total femmes total hommes Nous pouvons constater que les résultats montrent une majorité de femmes et surtout de sopranes. Néanmoins, le questionnaire, ayant interrogé des choristes issus d’ensembles où l’admission se fait sur audition (pour un souci de niveau et d’équilibre dans les pupitres), donne le chiffre de 39,4% d’hommes sur le panel, chiffre plutôt élevé par rapport à la réalité de la plupart des chœurs « ouverts à tous ».
32 catégories socioprofessionnelles 35 30,2 30 27,2 25 18,1 20 15,5 15 10 6 3 5 0 0 0 0 groupe 1 groupe 2 groupe 3 groupe 4 groupe 5 groupe 6 groupe 7 groupe 8 groupe 9 Le code des professions et catégories socioprofessionnelles de l’INSEE : Groupe 1 : agriculteurs sur petite, moyenne et grande exploitation. Groupe 2 : artisans, commerçants, chefs d’entreprises de 10 salariés et plus. Groupe 3 : professions libérales, cadres de la fonction publique, professeurs, professions scientifiques, profession information, arts et spectacles, cadres administratifs et commerciaux d’entreprise, ingénieurs, cadres techniques d’entreprise. Groupe 4 : instituteurs, professions intermédiaires de la santé et du travail social, clergé, religieux, professions intermédiaires administratives de la fonction publique, professions intermédiaires administratives et commerciales des entreprises, techniciens, contremaîtres, agents de maîtrise. Groupe 5 : employés civils, agents de service de la fonction publique, policiers, militaires, employés administratifs d’entreprise, employés de commerce, personnels de services directs aux particuliers. Groupe 6 : ouvriers, chauffeurs. Groupes auxquels nous ajoutons : Groupe 7 : retraités. Groupe 8 : mères au foyer. Groupe 9 : étudiants. Dans les questionnaires, nous n’avons pas demandé de préciser pour les retraités (18,1%) leur groupe socioprofessionnel avant la retraite, il en va de même pour les mères au foyer. C’est pourquoi nous avons dû les mettre à part. Dans le panel, les groupes d’agriculteurs, d’artisans et d’ouvriers ne sont pas représentés. Il faudrait faire une comparaison avec un sondage regroupant davantage de personnes. Aussi, les chœurs interrogés se situent dans un milieu urbain (villes et communautés d’agglomérations de plus de 80 000 habitants). Nous pourrions étendre ce sondage avec des ensembles en milieu rural.
33 SECONDE PARTIE DU QUESTIONNAIRE Que représente pour vous la musique et le chant? 30 26,9 25 22 20 17,1 15 12,2 10 6,1 5 6 6 0 relation au métier culture apprentissage création sensations social plaisir loisir / détente 3,7 À partir de ce point du questionnaire, les questions étant ouvertes, il a fallu faire des choix dans le traitement des réponses. Nous avons regroupé sous des termes génériques un ensemble de réponses ayant un thème commun. Plaisir : plaisir, joie, bonheur. Social : communication avec les autres / le public, relation aux autres, ouvertures aux autres. Sensations : sensibilité, sensations, émotions, épanouissement, confiance et travail sur soi, besoin vital, ressourcement. Loisir : moyen d’échapper au quotidien, au stress du travail, détente apaisement. Création : imagination, évasion. Apprentissage : technique, apprendre, rigueur. Culture : beauté, raffinement, interprétation.
34 motivations pour venir chanter en choeur 38 40 35,2 35 30 25 22,5 20 15 10 5 2,9 0 1,4 sociales plaisir S1 travail répertoire chef Dans la questions suivante (Quelles sont vos motivations pour venir chanter en chœur ?), les réponses évoquent très nettement le côté social et le côté détente du chant choral. Nous pouvons noter néanmoins que la notion de travail (avec les recherches de progrès, de qualité, de résultats) émerge par rapport à la question précédente (de 6% à 22,5%). La dimension collective est soulignée : « réaliser quelque chose en commun avec
d’autres (c’est un peu pour ça que j’avais arrêté la clarinette, jouer seul commençait
à me peser !) ». Cette choriste exprime aussi l’aspect social de cette pratique :
« Étant actuellement au chômage, chanter en cœur me permet de garder du lien
social, de faire de nouvelles rencontres et de partager une activité avec une amie. » Le côté abordable du chant choral (soutenu par César Geoffroy) est remarqué par cette autre choriste : « Pratique non réservée à une élite » La réponse de ce choriste résume bien l’ensemble des résultats : « Participer à
l’élaboration de vibrations partagées de qualité ».
35 qualités attendues chez un chef de choeur 20 18,4 17,3 18 15,3 16 15,3 13,3 14 12 10 8 7,1 6 6,1 4 4,1 2 3,1 S1 autorité talent / musicien écoute partage guide technique connaissances pédagogie humanité 0 Connaissances : de solfège, de répertoire, d’histoire, de culture, sur la voix et le chant. Technique : précision, compétence Pédagogie : transmission, conseils, créativité. Humanité : relationnel, indulgence, patience, encouragements, bonne humeur, impartialité, accessibilité. Guide : faire progresser. Ecoute : des besoins, propositions et demandes du choeur Partage : des émotions, suscite cohésion de groupe, soit en harmonie avec le groupe. L’autorité : « qu’il impose son autorité par ses connaissances et non par la
contrainte ou la discipline scolaire. ». Comme nous pouvons le constater, les attentes vis à vis du chef de chœur sont multiples : qu’il connaisse son métier, qu’il sache transmettre et partager ses connaissances tout en restant humain. Nous sommes très loin des chefs tyranniques et totalitaires.
36 souhaits des choristes 40 37,5 35 30 25 20,8 20 16,7 15 12,5 12,5 10 5 0 répertoire effectif S1 fonctionnement rythme vie de groupe Beaucoup de questionnaires sont restés vierges ou avec des mentions telles : « Le
chœur correspond à ce que j’attends d’un tel groupe » ou « pour l’instant : aucun
regret et le souhait que cela continue ainsi. » Pour le répertoire, les souhaits sont sur des époques précises (plus de classique, plus de variété ou de moderne) ou sur des pièces avec instruments. Le « fonctionnement » concerne aussi bien le nombre de concerts prévus dans l’année, que la durée des répétitions « deux heures par semaine c’est trop court », mais aussi les dispositifs de ces dernières (comme chanter en mélangeant les choristes des différents pupitres) Le rythme est souhaité avec une progression plus rapide (pour certains l’apprentissage des partitions n’est pas assez rapide). La vie de groupe englobe l’organisation de sorties aux concerts, une vie associative plus dynamique, mais aussi des sessions de travail pendant les vacances en partant dans un lieu nouveau. Situations conflictuelles vécues par les choristes Choristes ayant déjà vécu une situation conflictuelle en chœur : 51,5%. Nombreux ont été les choristes qui ont décris ces situations, leur dénouement, etc. Nous citons des extraits de leurs propos, d’après nous, très intéressants et évocateurs.
« En tant que président de chorale, j’ai été amené à gérer un conflit entre le chef et
une choriste : affaire relationnelle entre les deux personnes.
Il ne faut pas attendre, et comme il n’était pas possible de prendre parti pour la
choriste au risque de voir partir le chef, j’ai demandé à la choriste de rentrer dans le
rang ou sinon de rejoindre une autre chorale. La personne en question a choisi la
première solution. Il n’y a eu aucune répercussion négative sur la vie du groupe. La
suite des événements a confirmé que l’option choisie avait été la bonne. »
37 « Conflit entre le chef de chœur et quelques choristes à fort caractère qui a failli
aboutir au néant pour le chœur. Le chef s’est est sorti uniquement grâce au soutien
sans faille de quelques choristes. Ce clash a eu des effets très positifs sur le groupe
[…] cela a eu aussi un effet sur le chef qui est devenu plus humain et énormément
plus diplomate. »
« Le groupe a toujours survécu car les choristes sont devenus actifs. »
« Le chef a pu acquérir de l’expérience, ce qui est le cas de toute personne acceptant
de se regarder en face et de tirer des conclusions équilibrées de l’analyse du conflit.
Les torts sont toujours partagés. »
« Raccord du […], troisième de quatre concerts, le chef semble un peu énervé par le
retard des choristes et des instrumentistes, il se fâche un peu parce qu’il n’obtient
pas du chœur l’intention qu’il a demandé, un collègue ténor ose alors lui poser
abruptement la question que plusieurs d’entre nous ont peut –être aussi en tête ; le
chef se fâche encore plus et choisit de ridiculiser le choriste en lui répondant
scolairement comme un instituteur (mauvais) pourrait le faire : « dans une mesure,
il y a quatre temps, le premier, le deuxième, etc. », le choriste vexé, s’en va sur le
champ, on essaie de le rattraper, il ne veut pas revenir, monte dans sa voiture et s’en
va. Nous sommes tous perplexes.
Le lendemain, dernier concert, le choriste, qu’on n’attendait plus, revient et se glisse
comme si de rien n’était dans le chœur pendant le raccord, on pense qu’il est gonflé,
mais pourquoi pas ? Après le raccord, on le voit de loin en discussion avec le chef,
on pense qu’ils sont en train de s’arranger, tant mieux ! Pas du tout, on apprend
que le chef ne veut plus qu’il participe au concert !
Certains choristes envisagent de faire la grève par solidarité avec l’exclu, d’autres
essayent de négocier, finalement le concert se fera sans l’exclu. »
« Deux ou trois fois, on a eu quelques personnes qui venaient voir (dont un homme
qui voulait ni plus ni poins que remplacer le chef de chœur !), cherchaient
manifestement une chorale plus « professionnelle » et avaient parfois des
remarques assez désobligeantes. Pas de bol, en principe, ces personnes ne revenaient
pas quand elles voyaient qu’elles n’avaient pas d’écho. »
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39 TABLE DES MATIÈRES Avant­propos ........................................................................ 2 Remerciements...................................................................... 2 Introduction .......................................................................... 3 1. Le fonctionnement du groupe............................................ 4 A. Concept de groupe et définitions ................................................................. 4 1. L’origine du mot groupe :......................................................................... 4 2. Définition sociale : ................................................................................... 4 3. Définition psychologique : ....................................................................... 5 B. Places et rôles des individus qui les constituent........................................... 6 2. Étude de deux types de conflits typiques en chant choral.10 A. Le leader « débordant » de la chorale A… ................................................. 10 1. Un leader qui veut tout contrôler ............................................................ 10 2. La remise en cause des choix artistiques du chef..................................... 10 3. Les pressions exercées............................................................................ 11 4. Conclusion ............................................................................................. 11 B. Orientations et choix artistiques d’un groupe : quelle discussion ? ............. 12 1. Présentation du chœur B......................................................................... 12 2. Les difficultés rencontrées...................................................................... 12 3. La gestion du conflit ............................................................................... 13 4. Conclusion ............................................................................................. 13 3. Stratégies pour conduire un groupe choral..................... 15 A. Gestion du conflit ...................................................................................... 15 1. Étymologie et définitions........................................................................ 15 2. Attitudes et comportements .................................................................... 16 B. Les types de communication...................................................................... 17 1. L’assertivité ........................................................................................... 17 2. La « communication non­violente »........................................................ 18 C. Axes de travail.......................................................................................... 18 1. Importance du conflit : le conflit comme outil ........................................ 18 2. Attribution de rôles................................................................................. 19 3. Gestion des tensions et détentes : le rire comme élément important ........ 20 4. Favoriser la communication choriste / chef............................................. 21 5. Favoriser la communication dans le groupe ............................................ 22 Conclusion.......................................................................... 25 ANNEXES........................................................................... 27 ANNEXE 1 : QUESTIONNAIRE pour les CHORISTES............................... 28 ANNEXE 2 : RÉSULTATS DU QUESTIONNAIRE .................................... 30 Bibliographie ...................................................................... 39 TABLE DES MATIÈRES..................................................... 40
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